Civ.1 12 juin 2025 n° 22-23.646 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation sans renvoi
Mme CHAMPALAUNE, présidente
Arrêt n° 330 FS-B+R
Pourvoi n° H 22-23.646
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
Mme [C] [J] [B], domiciliée [Adresse 4], a formé le pourvoi n° H 22-23.646 contre l'arrêt rendu le 30 septembre 2022 par la cour d'appel d'Orléans, dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [T] [F], domicilié chez Mme [H], [Adresse 1],
2°/ à l'établissement public du conseil départemental du Loiret, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Marilly, conseillère référendaire, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de Mme [J] [B], et l'avis de Mme Picot-Demarcq, avocate générale référendaire, après débats en l'audience publique du 25 mars 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, Mme Marilly, conseillère référendaire rapporteure, Mme Auroy, conseillère doyenne, M. Fulchiron, Mmes Dard, Beauvois, Agostini, conseillers, M. Duval, Mme Azar, M. Buat-Ménard, Mmes Lion, Daniel, Vanoni-Thiery, conseillers référendaires, Mme Picot-Demarcq, avocate générale référendaire, et Mme Ben Belkacem, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, de la présidente et des conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 30 septembre 2022) et les pièces de la procédure, des relations de Mme [J] [B] et de M. [F] est née [U] [F], le [Date naissance 3] 2019.
2. Un jugement du 24 mai 2022 a ordonné le placement de l'enfant à l'aide sociale à l'enfance et accordé aux parents un droit de visite médiatisé, en lieu neutre.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. Mme [J] [B] fait grief à l'arrêt de confier [U] à l'aide sociale à l'enfance à compter du jugement entrepris et jusqu'au 30 novembre 2022 et de lui octroyer, en plus de son droit de visite médiatisé, un droit de visite et d'hébergement libre s'exerçant les 1er et 3ème week-end de chaque mois du samedi 10h au dimanche 18h, alors « que le juge des enfants est compétent, à charge d'appel, pour ce qui concerne l'assistance éducative et il doit toujours s'efforcer de recueillir l'adhésion de la famille à la mesure envisagée et se prononcer en stricte considération de l'intérêt de l'enfant ; que le juge doit systématiquement effectuer un entretien individuel avec l'enfant capable de discernement lors de son audience ou de son audition ; qu'en considérant, pour confirmer le jugement entrepris sur le placement d'[U] à l'aide sociale à l'enfance jusqu'au 30 novembre 2022 et sur l'octroi d'un droit de visite médiatisé à Mme [J] [B] et en lui accordant un droit de visite et d'hébergement libre un week-end sur deux, qu'il ressort des pièces versées aux débats une situation d'insécurité pour l'enfant liée au conflit parental majeur entre les deux parents ainsi qu'à leurs failles et fragilités psychologiques et en ajoutant qu'en l'état actuel et dans l'attente des mesures d'investigation en cours, [U] se présente encore dans une situation de danger justifiant le maintien de son placement à tout le moins jusqu'à la prochaine audience du juge des enfants où il sera à nouveau statué, et en indiquant que dans cette situation transitoire, il apparaît de l'intérêt supérieur d'[U] de favoriser le maintien de ses liens avec sa mère, en permettant à Mme [J] [B] d'investir davantage et plus librement sa fonction maternelle que le simple droit de visite médiatisé hebdomadaire ne l'y autorise, sans avoir entendu l'enfant, ni constaté son absence de discernement, la cour d'appel a violé les articles 375, 375-1 du code civil et 1189 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 375-1, alinéas 1 à 3, du code civil, 1189, alinéa 1er, et 1193, alinéa 1er, du code de procédure civile :
4. L'article 375-1, alinéas 1 et 2, du code civil dispose :
« Le juge des enfants est compétent, à charge d'appel, pour tout ce qui concerne l'assistance éducative.
5. Le juge des enfants doit s'efforcer de recueillir l'adhésion de la famille à la mesure d'assistance éducative envisagée et se prononcer en stricte considération de l'intérêt de l'enfant. »
6. Aux termes de l'alinéa 3 du même texte, créé par l'article 26 de la loi n° 2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants et figurant en son titre III intitulé « Améliorer les garanties procédurales en matière d'assistance éducative », il doit systématiquement effectuer un entretien individuel avec l'enfant capable de discernement lors de son audience ou de son audition.
7. Il en résulte que dans la procédure d'assistance éducative, à laquelle le mineur est partie, s'ajoute à l'obligation faite au juge des enfants d'entendre l'enfant capable de discernement, prévue aux articles 1182, 1184 et 1189 du code de procédure civile, tant pour les nécessités de l'instruction que pour la recherche de son adhésion à la mesure envisagée, celle d'y procéder sous la forme d'un entretien individuel.
8. Aux termes de l'article 1189, alinéa 1er, du code de procédure civile, à l'audience, le juge entend le mineur, ses parents, tuteur ou personne ou représentant du service à qui l'enfant a été confié ainsi que toute autre personne dont l'audition lui paraît utile. Il peut dispenser le mineur de se présenter ou ordonner qu'il se retire pendant tout ou partie de la suite des débats.
9. Si en vertu de ce texte le juge des enfants peut dispenser le mineur de se présenter à l'audience, il doit néanmoins effectuer un entretien individuel avec l'enfant capable de discernement. 10. L'article 1193 du même code dispose :
« L'appel est instruit et jugé par priorité en chambre du conseil par la chambre de la cour d'appel chargée des affaires des mineurs suivant la procédure applicable devant le juge des enfants. »
11. Il résulte de ce texte que, si la cour d'appel, juridiction de jugement, n'est pas tenue de procéder à une nouvelle instruction de l'affaire, elle doit cependant effectuer les actes auxquels le premier juge n'a pas procédé.
12. Il se déduit de l'ensemble de ces textes que la cour d'appel, qui a toujours la faculté d'entendre l'enfant si elle l'estime nécessaire et qui, en application de l'article 388-1 du code civil, en a l'obligation si celui-ci, capable de discernement et dûment informé de son droit à être entendu, en a fait la demande, est tenue de s'entretenir individuellement avec le mineur dont elle n'a pas constaté l'absence de discernement, si celui-ci n'a pas été précédemment entendu sous la même forme, relativement à la mesure envisagée, par le juge des enfants.
13. Pour statuer sur le placement de l'enfant et le droit de visite de la mère, la cour d'appel n'a pas entendu individuellement la mineure, ni constaté son absence de discernement.
14. En statuant ainsi, alors qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des pièces de la procédure, que l'enfant avait été entendue par le juge des enfants, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
15. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt confirmant le placement d'[U] [F] à l'aide sociale à l'enfance jusqu'au 30 novembre 2022 et octroyant à Mme [J] [B] un droit de visite médiatisé à organiser par l'aide sociale à l'enfance, un droit de visite et d'hébergement libre s'exerçant les 1er et 3ème week-end de chaque mois, du samedi 10 heures au dimanche 18 heures, à charge pour la mère d'aller chercher et ramener l'enfant dans sa famille d'accueil aux horaires ci-avant mentionnés, entraîne la cassation du chef de dispositif disant que les allocations familiales auxquelles la mineure ouvre droit seront perçues par le service gardien qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
16. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
17. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond dès lors que les mesures ordonnées par le juge des enfants le 24 mai 2022 ont épuisé leurs effets.
Crim. 12 juin 2025 n° 24-86.521 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 24-86.521 F-B
N° 00801
RB5 12 JUIN 2025
CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 12 JUIN 2025
M. [Z] [R] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 7 novembre 2024, qui, dans l'information suivie, notamment, contre lui des chefs de recel aggravé et blanchiment, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.
Par ordonnance du 4 février 2025, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de Mme Jaillon, conseiller, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. [Z] [R], les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de Mme [U] [P], et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Jaillon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 2 mars 2015, Madame [U] [P], fille de [V] [D], dernière épouse de [C] [D], a déposé plainte auprès des services de police pour vol et recel.
3. Elle a indiqué que, courant 2008, elle avait chargé M. [L] [W] de dresser l'inventaire des oeuvres stockées dans l'ancienne résidence de [C] [D] et de les déménager dans les locaux de la société [1] à [Localité 2] (92) et qu'elle s'est rendu compte par la suite qu'il en avait détourné une partie.
4. Elle a en outre indiqué suspecter M. [Z] [R], directeur de la société genevoise [3], qui a confié à un restaurateur d'oeuvre d'art la restauration d'oeuvres de [C] [D] entreposées précisément à [Localité 2].
5. A la suite de l'enquête diligentée, une information contre personne non dénommée des chefs de vols, recel de vol et escroquerie, a été ouverte le 23 mars 2015.
6. Le 14 septembre 2015, M. [R] a été mis en examen pour recel habituel par professionnel d'oeuvres de [C] [D] provenant d'un délit commis notamment au préjudice de Mme [P].
7. Il a présenté une requête en nullité. Madame [P], partie civile, a, par mémoire présenté devant la chambre de l'instruction, sollicité que soient écartées des pièces de la procédure.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en sa première branche, et les troisième et quatrième moyens
8. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le deuxième moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a constaté la forclusion partielle de la requête, dit que la requête en nullité n'est recevable que pour les actes postérieurs au 15 mai 2017 soit à compter de la cote D 2028, l'a dite mal fondée, a écarté de la procédure par cancellation certaines des cotes comprises entre D 3051/74 et D 3051/257 et certaines des cotes comprises entre D 3050/120 et D 3050/304, et a dit n'y avoir lieu à annulation de la procédure examinée jusqu'à la cote D 3146, alors :
« 2°/ que la chambre de l'instruction, à laquelle la partie civile, dans son simple mémoire, ne demandait pas la cancellation de certaines des cotes comprises entre D3050/120 et D3050/304, ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs, canceller lesdites cotes, en méconnaissance de l'article 173 du code de procédure pénale et du droit au procès équitable garanti par l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
3°/ que la personne mise en examen a droit à l'exercice effectif de ses droits à la défense ; que la chambre de l'instruction, en écartant par cancellation des cotes comprises entre D3050/120 et D3050/304, versées à la procédure par le mis en examen, a porté atteinte au droit à l'exercice effectif des droits de la défense de ses droits par une sanction disproportionnée et a violé l'article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
4°/ que la nullité tirée de l'application d'une décision de la Cour européenne des droits de l'homme à laquelle la partie civile qui se prévaut de celle-ci n'était pas partie, ni d'ailleurs devant les juridictions internes de l'Etat étranger en cause, suppose l'existence d'un grief et que la cause de nullité porte atteinte aux intérêts de la personne qui s'en prévaut ; que la chambre de l'instruction a cancellé des pièces de la procédure en vertu d'une décision de la Cour européenne des droits de l'homme à laquelle Madame [P] n'était pas partie et concernant un Etat étranger sans rechercher si cette décision faisait grief à Madame [P] et portait atteinte aux intérêts de celle-ci ; que la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 171, 802 du code de procédure pénale et 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et 170 du code de procédure pénale :
10. En vertu du premier de ces textes, toute personne a droit à un procès équitable.
11. Il résulte du second qu'en toute matière, au cours de l'information, seules peuvent être annulés ou cancellés par la chambre de l'instruction des actes ou pièces de la procédure au sens de ce texte.
12. Pour faire droit au mémoire de la partie civile sollicitant que la cote D 3051 soit écartée du dossier d'instruction, l'arrêt attaqué énonce que par arrêt définitif du 6 juin 2024, la Cour européenne des droits de l'homme a jugé l'exploitation du téléphone portable de Mme [H], avocate, illégale comme ayant été faite en violation de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme.
13. Les juges relèvent notamment que selon l'article 46 de ladite Convention, l'Etat partie doit prendre dans son ordre juridique interne des mesures individuelles et/ou, le cas échéant, des mesures générales propres à mettre un terme à la violation constatée par la Cour européenne et à en effacer les conséquences.
14. Ils ajoutent que l'examen de la cote D 3051 démontre que les cotes D 3051/47 à D 3051/49 proviennent de l'exploitation jugée illégale par l'arrêt du 6 juin 2024 du téléphone de Mme [H], qu'il en va de même des cotes D 3050/81, D 3050/83 et D 3050/85 et que, dès lors, ces pièces doivent être écartées de la procédure d'information.
15. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.
16. En effet, en premier lieu, les pièces contenant l'exploitation d'un téléphone portable communiquées par la personne mise en examen ne constituent pas, au sens de l'article 170 du code de procédure pénale, des actes ou pièces de l'information susceptibles d'être annulés, mais des moyens de preuve soumis à discussion contradictoire.
17. En second lieu, la décision rendue par la Cour européenne des droits de l'homme relative à l'exploitation jugée illégale des données téléphoniques, à laquelle la partie civile requérante n'est d'ailleurs pas partie, est sans effet sur la production de ces pièces par la personne mise en examen dans le cadre d'un autre dossier d'information, pièces qui constituent un moyen de preuve et peuvent être discutées à ce titre devant une juridiction de jugement.
18. La cassation est par conséquent encourue de ce chef, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs.
Civ.2 12 juin 2025 n° 22-20.594 B
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 589 F-B
Pourvoi n° Q 22-20.594
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
1°/ Mme [B] [G], domiciliée [Adresse 2],
2°/ la société [Adresse 3], société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° Q 22-20.594 contre l'arrêt rendu le 2 juin 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-9), dans le litige les opposant au comptable des finances publiques, responsable du service des impôts des particuliers de [Localité 4] Centre-Colline, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits du SIP [Localité 4] collines par suite de la fusion du SIP [Localité 4] centre et SIP [Localité 4] collines, agissant sous l'autorité du directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes et du directeur général des finances publiques, défendeur à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de Mme [G] et de la société [Adresse 3], de la SCP Foussard et Froger, avocat du comptable des finances publiques, responsable du service des impôts des particuliers de [Localité 4] Centre-Colline, venant aux droits du SIP [Localité 4] collines par suite de la fusion du SIP [Localité 4] centre et SIP [Localité 4] collines, agissant sous l'autorité du directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes et du directeur général des finances publiques et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 juin 2022) et les productions, le comptable responsable du service des impôts des particuliers de [Localité 4] a fait délivrer, le 29 juillet 2020, par un huissier de justice, un commandement de payer valant saisie immobilière à la socié
2. Mme [G], gérante de la société (la gérante), est intervenue volontairement à l'instance en se présentant comme tiers détenteur de l'immeuble saisi.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et quatrième branches, et le troisième moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
4. La société et sa gérante font grief à l'arrêt de les débouter de leur demande d'annulation du commandement de payer du 29 juillet 2020 et de l'assignation à comparaître à l'audience d'orientation, alors « qu'un commandement de payer valant saisie émis par un comptable public est un acte administratif, peu important que cet acte doive être signifié par voie d'huissier au contribuable qu'il vise ; que l'identité du comptable public, personnellement responsable du recouvrement de l'impôt, doit donc être mentionnée sur le commandement de payer valant saisie, afin de permettre au contribuable de vérifier sa qualité et son habilitation ; qu'en jugeant que la délivrance d'un commandement de payer valant saisie immobilière ne constituait pas une "décision" au sens de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration mais la mise en oeuvre d'une décision déjà intervenue qu'il convenait de faire exécuter et qu'il était donc suffisant que l'acte comporte l'énoncé de la qualité de l'agent de l'Etat qui a fait procéder à sa délivrance, sa fonction justifiant les pouvoirs, alors que la simple désignation d'une qualité ne permet pas de vérifier l'habilitation du comptable public, auteur du commandement de payer et de la demande de signification, la cour d'appel a violé les articles L. 212-1 précité, R. 321-5 du code des procédures civiles d'exécution et 648 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. Selon l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.
6. En application de l'article R. 321-1 du code des procédures civiles d'exécution, la procédure d'exécution est engagée par la signification au débiteur ou au tiers détenteur d'un commandement de payer valant saisie à la requête du créancier poursuivant.
7. Selon l'article 648 du code de procédure civile, tout acte d'huissier de justice indique, indépendamment des mentions prescrites par ailleurs, les nom, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice.
8. Selon les articles 1er et 2, alors en vigueur, de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945, les huissiers de justice, officiers ministériels, sont responsables de la rédaction de leurs actes, sauf, lorsque l'acte a été préparé par un autre officier ministériel, pour les indications matérielles qu'ils n'ont pas pu eux-mêmes vérifier.
9. Il en résulte que la délivrance d'un commandement de payer valant saisie immobilière par un huissier de justice est soumise aux seules dispositions du code de procédure civile, du code des procédures civiles d'exécution et de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945.
10. Le moyen, qui invoque l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, manque en droit.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
11. La société et sa gérante font grief à l'arrêt de les débouter de leur demande de prononcé de la suspension de la procédure de recouvrement forcé, alors « que les oppositions aux actes de poursuite en vue du recouvrement forcé des impôts locaux ont un effet suspensif, en application de l'article 117 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ; qu'en considérant que les taxes foncières, objet du commandement de payer valant saisie litigieux, ne relevaient pas des dispositions de cet article, la cour d'appel a violé ce texte et l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales. »
Réponse de la Cour
12. Selon l'article 1658 du code général des impôts, les impôts directs et les taxes assimilées sont recouvrés en vertu soit de rôles rendus exécutoires par arrêté du directeur général des finances publiques ou du préfet, soit d'avis de mise en recouvrement.
13. Selon l'article 107 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, les impositions de toute nature sont liquidées et recouvrées selon les modalités fixées aux articles 23 à 28 de ce décret.
14. Selon l'article 23 de ce décret, les impositions de toute nature sont liquidées et recouvrées dans les conditions prévues par le code général des impôts, le livre des procédures fiscales, le code des douanes et, le cas échéant, par les autres lois et règlements.
15. Selon l'article 112, 1°, de ce décret, les ordres de recouvrer relatifs aux autres recettes comprennent les titres de perception mentionnés à l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales.
16. Aux termes de l'article 117 de ce décret, les titres de perception émis en application de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales peuvent faire l'objet de la part des redevables : 1° Soit d'une contestation portant sur l'existence de la créance, son montant ou son exigibilité ; 2° Soit d'une contestation portant sur la régularité du titre de perception. Les contestations du titre de perception ont pour effet de suspendre le recouvrement de la créance.
17. Il résulte de la combinaison de ces textes que les dispositions de l'article 117 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ne sont pas applicables aux impositions de toute nature, lesquelles sont recouvrées dans les conditions prévues par le livre des procédures fiscales.
18. Ayant retenu à bon droit que les taxes foncières dont le recouvrement est poursuivi ne relèvent pas de la suspension de l'article 117 précité et qu'il convient pour le contribuable de demander le différé de paiement sur le fondement de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales, ce qui n'a pas été sollicité, c'est sans méconnaître les dispositions précitées que la cour d'appel a débouté la société de sa demande de suspension de la procédure de saisie immobilière.
19. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Civ.1 12 juin 2025 n° 23-13.894 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Irrecevabilité
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 431 F-B
Pourvoi n° C 23-13.894
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
1°/ M. [Y] [O],
2°/ Mme [L] [E],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° C 23-13.894 contre le jugement rendu le 27 janvier 2023 par le tribunal mixte de commerce de Nouméa, dans le litige les opposant à la société Mary-Laure Gastaud, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], prise en qualité de mandataire liquidateur de M. [Y] [O], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Daniel, conseiller référendaire, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [O] et de Mme [E], de la SCP Richard, avocat de la société Mary-Laure Gastaud, en qualité de mandataire liquidateur de M. [O], après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Daniel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Recevabilité du pourvoi examinée d'office
Vu l'article 605 du code de procédure civile :
1. Après avis donné aux parties conformément à l'article 16 du code de procédure civile, il est fait application du texte susvisé.
2. Aux termes de ce texte, le pourvoi en cassation n'est ouvert qu'à l'encontre des jugements rendus en dernier ressort.
3. L'article L. 642-19-1 du code de commerce, applicable en Nouvelle-Calédonie en vertu de l'article L. 930-1, 6°, de ce code, renvoie au pouvoir réglementaire la détermination des conditions et formes du recours contre les décisions du juge-commissaire prises en application de l'article L. 642-18 du même code en matière de cession d'actifs du débiteur en liquidation judiciaire.
4. La délibération du congrès de la Nouvelle-Calédonie n° 352 du 18 janvier 2008 portant mesures de procédure en matière de sauvegarde des entreprises prévoit, en son article 67, alinéa 4, que les ordonnances du juge-commissaire sur les demandes relevant de sa compétence peuvent faire l'objet d'un recours devant le tribunal mixte de commerce. Cet article, qui régit les procédures de sauvegarde, est applicable également en procédure de liquidation judiciaire par l'effet de l'article 224 de la même délibération. À défaut de disposition spéciale, il s'applique y compris aux ordonnances rendues en application de l'article L. 642-18 du code de commerce.
5. Il résulte en outre de l'article 336 de la délibération n° 352 du 18 janvier 2008 que les jugements statuant sur les recours formés contre les ordonnances rendues par le juge-commissaire, qui ne sont pas visés par des dispositions spéciales réglementant les voies de recours, sont susceptibles de recours dans les termes du droit commun.
6. Il s'ensuit que le jugement du tribunal mixte de commerce attaqué, statuant sur le recours formé contre une ordonnance rendue par le juge-commissaire en application de l'article L. 642-18 du code de commerce, tranchant une partie du principal en rejetant la demande tendant à voir déclarer indisponibles les droits sur le bien dont la vente était demandée, jugement exactement qualifié en premier ressort, était susceptible d'appel conformément aux articles 543 et 544 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie.
7. En conséquence, le pourvoi n'est pas recevable.
Civ.1 12 juin 2025 n° 23-22.985 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Irrecevabilité
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 435 F-B
Pourvoi n° J 23-22.985
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
Mme [I] [V], épouse [N], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 23-22.985 contre l'arrêt rendu le 16 novembre 2023 par la cour d'appel de Versailles (2e chambre, 2e section), dans le litige l'opposant à M. [R] [N], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vanoni-Thiery, conseiller référendaire, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de Mme [V], de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. [N], après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Vanoni-Thiery, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Recevabilité du pourvoi, contestée par la défense
Vu les articles 606 et 608 du code de procédure civile :
1. Sauf dans les cas spécifiés par la loi, les décisions en dernier ressort qui ne mettent pas fin à l'instance ne peuvent être frappées de pourvoi en cassation indépendamment des décisions sur le fond que si elles tranchent dans leur dispositif tout ou partie du principal. Il n'est dérogé à cette règle qu'en cas d'excès de pouvoir.
2. Mme [V] s'est pourvue en cassation contre un arrêt qui, statuant sur appel d'une ordonnance du juge de la mise en état rendue à l'issue de l'audience d'orientation et sur mesures provisoires, a prescrit de telles mesures pendant la durée de l'instance en divorce et, à cette fin, s'est prononcé sur l'attribution du domicile conjugal et le règlement des échéances des prêts en cours, de la taxe d'habitation et des taxes foncières.
2. Cette décision, dont il n'est pas prétendu qu'elle procéderait d'un excès de pouvoir et qui est dépourvue de l'autorité de la chose jugée au principal, n'a pas mis fin à l'instance.
3. En l'absence de dispositions spéciales de la loi, le pourvoi en cassation formé par Mme [V], indépendamment de la décision sur le fond, n'est donc pas recevable.
Civ.1 12 juin 2025 n° 23-50.030 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
IJ
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Irrecevabilité
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 436 F-B
Pourvoi n° F 23-50.030
Aide juridictionnelle totale en demande au profit de Mme [R] [P]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 15 novembre 2023.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
Mme [R] [P], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 23-50.030 contre l'arrêt rendu le 9 mai 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 2-3), dans le litige l'opposant à M. [U] [E], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vanoni-Thiery, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boullez, avocat de Mme [P], de la SCP Le Griel, avocat de M. [E], après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Vanoni-Thiery, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Recevabilité du pourvoi, examinée d'office
1. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application des articles 606 et 608 du code de procédure civile.
Vu les articles 606 et 608 du code de procédure civile :
2. Sauf dans les cas spécifiés par la loi, les décisions en dernier ressort qui ne mettent pas fin à l'instance ne peuvent être frappées de pourvoi en cassation indépendamment des décisions sur le fond que si elles tranchent dans leur dispositif tout ou partie du principal. Il n'est dérogé à cette règle qu'en cas d'excès de pouvoir.
2. Mme [P] s'est pourvue en cassation contre un arrêt qui, statuant sur appel d'une ordonnance du juge de la mise en état rendue à l'issue de l'audience d'orientation et sur mesures provisoires, a prescrit de telles mesures pendant la durée de l'instance en divorce et, à cette fin, s'est prononcé sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale sur les deux enfants mineurs.
3. Cette décision, dont il n'est pas prétendu qu'elle procéderait d'un excès de pouvoir et qui est dépourvue de l'autorité de la chose jugée au principal, n'a pas mis fin à l'instance.
4. En l'absence de dispositions spéciales de la loi, le pourvoi en cassation formé par Mme [P], indépendamment de la décision sur le fond, n'est donc pas recevable.
Civ.2 12 juin 2025 n° 22-22.946 B
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 587 F-B
Pourvoi n° W 22-22.946
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
M. [B] [L], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 22-22.946 contre l'arrêt rendu le 14 septembre 2022 par la cour d'appel de Toulouse (2e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [T] [P], domiciliée [Adresse 4], prise en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de M. [B] [L],
2°/ à la caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Savoie (CRCAM), dont le siège est [Adresse 3],
3°/ au procureur général près la cour d'appel de Toulouse, domicilié en son parquet général, [Adresse 1], 31068 Toulouse,
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [L], de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Savoie, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. [L] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. le procureur général près la cour d'appel de Toulouse.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 14 septembre 2022), la caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Savoie (la banque) a consenti à M. [L] un prêt immobilier libellé en francs suisses, remboursable en trois cents mensualités et garanti par une hypothèque.
3. A la suite du défaut de paiement des échéances de ce prêt, la banque a engagé une procédure de saisie immobilière.
4. Par un jugement du 4 décembre 2019, un tribunal de grande instance a déclaré irrecevables comme prescrites les demandes de M. [L] tendant à voir reconnaître le caractère abusif de certaines clauses.
5. M. [L] a été placé en liquidation judiciaire par un jugement du 4 novembre 2019 et il a relevé appel du jugement du juge commissaire ayant admis à titre privilégié la créance de la banque.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
6. M. [L] fait grief à l'arrêt de constater que ses contestations relatives au caractère abusif de la clause de remboursement des échéances en francs suisses, de la clause relative au risque de change, de celle relative aux commissions de change insérées dans le contrat de prêt litigieux se heurtaient à la chose jugée attachée au jugement du tribunal de grande instance d'Annecy du 4 décembre 2019, de confirmer l'ordonnance déférée, en ce qu'elle avait admis, à titre privilégié, la créance de la banque à concurrence de 300 844,63 euros, outre intérêts contractuels postérieurs au taux de 4,70 % l'an à compter du 16 octobre 2018, au titre du prêt n° 56518 sauf en ce qu'elle avait fait courir des intérêts au taux contractuel sur l'indemnité de recouvrement de 16 275,32 euros, et de dire que cette somme, admise au passif privilégié de la liquidation judiciaire de M. [L], ferait courir des intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, alors « qu'en toute hypothèse, le juge est tenu d'examiner le caractère abusif des clauses litigieuses, au besoin d'office, sans que puisse être opposée l'autorité de la chose jugée attachée à une précédente décision n'ayant pas procédé à l'examen des clauses ; qu'en jugeant que les moyens de défense opposés par M. [L], tirés du caractère abusif des clauses litigieuses et ne tendant qu'au rejet de la prétention adverse, se heurtaient aux dispositions irrévocables du jugement du 4 décembre 2019 ayant jugé les demandes fondées sur ce caractère abusif irrecevables comme prescrites, quand elle était tenue de procéder à l'examen du caractère abusif des clauses litigieuses, auquel ne s'était livré aucune autre juridiction, nonobstant les règles internes de procédure ou de prescription, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation, ensemble l'article 7, § 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 7, § 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 et l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation :
7. Aux termes du premier de ces textes, les États membres veillent à ce que, dans l'intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l'utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel.
8. Selon le second, dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
9. Par un arrêt du 26 janvier 2017 (C-421/14 ECLI : EU : C : 2017 : 60 Banco Primus), la Cour de justice de l'Union Européenne a dit pour droit que l'autorité de la chose jugée ne fait pas obstacle, en soi, à ce que le juge national soit tenu d'apprécier, sur la demande des parties ou d'office, le caractère éventuellement abusif d'une clause, même au stade d'une mesure d'exécution forcée, dès lors que cet examen n'a pas déjà été effectué à l'occasion du précédent contrôle juridictionnel ayant abouti à la décision revêtue de l'autorité de la chose jugée.
10. Pour constater que les contestations de M. [L] relatives au caractère abusif de plusieurs clauses du contrat de prêt litigieux se heurtent à la chose jugée attachée au jugement du tribunal de grande instance d'Annecy du 4 décembre 2019, l'arrêt retient que les moyens développés par l'appelant relatifs au caractère abusif de la clause relative au remboursement des échéances en francs suisses, de la clause relative au risque de change, de celle relative aux commissions de change insérées dans le contrat de prêt litigieux sont rigoureusement identiques à ceux qu'il avait développés dans le cadre de son action formée devant le tribunal de grande instance d'Annecy dans l'instance qui opposait les mêmes parties et que les moyens développés de ces chefs par M. [L] se heurtent, aux dispositions irrévocables de ce jugement qui a déclaré irrecevables les demandes de M. [L] tendant à voir réputer non écrites ces clauses.
11. En statuant ainsi, alors qu'elle était tenue de procéder à l'examen du caractère abusif des clauses litigieuses, auquel ne s'était livrée aucune autre juridiction, sans que l'autorité de la chose jugée d'un jugement ni son caractère irrévocable ne puissent faire obstacle à cet examen, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Civ.1 12 juin 2025 n° 23-22.003 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation partielle
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 433 F-B
Pourvoi n° S 23-22.003
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
M. [N] [K], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 23-22.003 contre l'arrêt rendu le 1er septembre 2023 par la cour d'appel de Nancy (troisième chambre civile, section 1), dans le litige l'opposant à Mme [H] [X], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Daniel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [K], après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Daniel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy, 1er septembre 2023), un jugement du 12 mai 2018 a prononcé le divorce de M. [K] et de Mme [X], mariés sans contrat préalable.
2. Des difficultés sont survenues à l'occasion de la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. M. [K] fait grief à l'arrêt de dire qu'il est redevable envers l'indivision post-communautaire d'une indemnité d'occupation de 500 euros par mois pour la période comprise entre mai 2015 et jusqu'au jour du partage, alors « que l'indemnité prévue à l'article 815-9 du code civil ne peut être due que pour la jouissance privative d'un bien indivis ; que l'indemnité, qui a pour objet de réparer le préjudice causé à l'indivision par cette jouissance privative, cesse d'être due à compter de la libération effective des lieux ; qu'en l'espèce, en jugeant que M. [K] sera redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation du mois de mai 2015 jusqu'au jour du partage alors que, ce partage n'étant pas encore intervenu, aucune jouissance privative du bien indivis jusqu'à cette date ne pouvait être constatée, la cour d'appel a violé l'article 815-9 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 815-9, alinéa 2, du code civil :
5. Il résulte de ce texte que l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.
6. Pour dire que M. [K] est redevable envers l'indivision post-communautaire existant entre lui et Mme [X] d'une indemnité d'occupation pour la période comprise de mai 2015 jusqu'au jour du partage, l'arrêt retient que M. [K], à qui la jouissance du domicile conjugal, bien commun, avait été attribuée à titre onéreux par l'ordonnance de non-conciliation du 12 mai 2015, ne démontre pas avoir remis le bien à l'indivision.
7. En statuant ainsi, sans réserver l'hypothèse de la remise effective du bien à la disposition de l'indivision avant le partage, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Civ.2 12 juin 2025 n° 21-11.991 B
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Rejet
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 574 FS-B
Pourvoi n° T 21-11.991
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
La République du Congo, représentée par son ministre de la justice, des droits humains et de la promotion des peuples autochtones, domicilié en cette qualité ministère de la justice, [Adresse 8] (République du Congo) a formé le pourvoi n° T 21-11.991 contre l'arrêt rendu le 11 février 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 10), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Commissions import export (Commisimpex), société anonyme, dont le siège est [Adresse 6] (République du Congo),
2°/ à la société Orange, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],
3°/ à la Société congolaise d'enlèvement des ordures ménagères et d'assainissement, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5] (République du Congo),
4°/ à la Société congolaise d'électrification et de canalisation, société anonyme, dont le siège est [Adresse 11] (République du Congo), 5°/ à la société Boissons africaines de [Localité 9], société anonyme, dont le siège est [Adresse 7] (République du Congo),
défenderesses à la cassation.
La société Commissions import export a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vendryes, conseiller, les observations de la SCP Gouz-Fitoussi, avocat de la République du Congo, de la SAS Boucard-Capron-Maman, avocat de la société Orange, de la SARL Ortscheidt, avocat de la société Commissions import export, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, Mme Vendryes, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, Mme Grandemange, M. Delbano, M. Ancel, Mme Caillard, M. Waguette, conseillers, Mme Bohnert, M. Cardini, Mmes Techer, Latreille, Bonnet, Chevet, conseillers référendaires, Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la République du Congo du désistement de son pourvoi en ce que son premier moyen est dirigé contre la société Orange ;
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 février 2021) et les productions, la société Orange a, en exécution d'une sentence arbitrale exécutoire condamnant la République du Congo à lui payer diverses sommes, délivré, le 29 octobre 2014, un commandement de payer valant saisie immobilière visant les droits et biens immobiliers situés notamment [Adresse 1] à [Localité 10].
3. La société Commissions import export (la société Commisimpex) a, en exécution de deux sentences arbitrales exécutoires condamnant la République du Congo à lui payer diverses sommes, délivré, le 30 août 2016, un commandement de payer valant saisie immobilière visant les droits et biens immobiliers situés notamment, pour l'un [Adresse 2], pour l'autre [Adresse 3] à [Localité 14].
4. Par un jugement du 25 juin 2020, un juge de l'exécution a annulé le commandement du 29 octobre 2014 relatif à l'immeuble situé [Adresse 1] à [Localité 10] dont la société Orange poursuivait la vente et déclaré irrecevables les prétentions de la société Commisimpex en qualité de créancier chirographaire.
5. Par un jugement du même jour, ce juge a annulé le commandement du 30 août 2016 relatif aux biens situés [Adresse 2] et [Adresse 3] à [Localité 14], dont la société Commisimpex poursuivait la vente.
6. Les sociétés Orange et Commisimpex ont interjeté appel de ces jugements.
7. Après jonction des instances, une cour d'appel a, par arrêt du 11 février 2021, infirmé le premier jugement sauf en ce qu'il a dit irrecevables les prétentions de la société Commisimpex en qualité de créancier chirographaire. Elle a ordonné la vente forcée de l'immeuble situé [Adresse 1] à [Localité 10], objet du commandement du 29 octobre 2014.
8. Infirmant le second jugement, la cour d'appel a, par ce même arrêt, ordonné la vente forcée de l'immeuble situé [Adresse 3] à Vaucresson et rejeté la demande visant la vente forcée de l'immeuble situé [Adresse 2], tous deux visés au commandement de payer valant saisie immobilière du 30 août 2016.
9. A l'occasion de l'examen du pourvoi principal formé par la République du Congo et du pourvoi incident formé par la société Commisimpex, par un arrêt du 12 septembre 2024 (2e Civ., 12 septembre 2024, pourvoi n° 21-11.991), la deuxième chambre civile de la Cour de cassation a, en application de l'article 1015-1 du code de procédure civile, sollicité l'avis de la première chambre civile sur les points suivants :
« 1°. - Le fait pour un État d'alléguer qu'un bien immobilier, objet d'un commandement de payer valant saisie immobilière, abrite la résidence de son ambassadeur permanent auprès de l'Unesco ou sa paierie en France, permet-il, à lui seul, de fonder une présomption d'affectation diplomatique de ces biens, au sens de l'article L. 111-1-2, 3°, du code des procédures civiles d'exécution, qu'il appartient au créancier poursuivant de renverser ?
2°. - Quelle est l'incidence sur la preuve de l'affectation diplomatique des biens immobiliers, de l'article 20 de la Convention de Vienne du 18 avril 1961 qui stipule que la mission et son chef ont le droit de placer le drapeau et l'emblème de l'État accréditant sur les locaux de la mission, y compris la résidence du chef de la mission, et sur les moyens de transport de celui-ci ? Le défaut de ces insignes sur un bien immobilier permet-il de retenir l'absence d'affectation diplomatique du bien ? »
10. La première chambre civile de la Cour de cassation a rendu son avis le 22 janvier 2025 (1ère Civ., 22 janvier 2025, pourvoi n° 21-11.991).
Examen des moyens
Sur le second moyen du pourvoi principal, pris en ses première, troisième, quatrième et cinquième branches ainsi que sur le premier moyen et le second moyen du pourvoi incident, pris en sa deuxième branche
11. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
12. La République du Congo fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a annulé le commandement de payer valant saisie immobilière du 30 août 2016, d'ordonner la vente forcée du bien situé [Adresse 3] à [Localité 14] visé au commandement de payer du 30 août 2016 délivré par la société Commisimpex et de fixer la créance de cette société à certaines sommes, alors « que la charge de la preuve de l'absence d'affectation diplomatique des biens attachés au fonctionnement de la mission diplomatique, tels les immeubles constituant les sites de l'ambassade, incombe aux créanciers ; qu'en affirmant néanmoins que la République du Congo ne démontrait pas que l'immeuble était affecté à une activité diplomatique, la cour d'appel qui a inversé la charge de la preuve a violé l'article 1315 du code civil devenu l'article 1353. »
Réponse de la Cour
13. Il ressort des motifs de l'avis rendu par la première chambre civile les éléments suivants :
14. « Le préambule de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961 rappelle que le but de ces immunités est « non pas d'avantager des individus mais d'assurer l'accomplissement efficace des fonctions des missions diplomatiques en tant que représentants des États. »
15. L'article 2 de cette Convention stipule que « l'établissement de relations diplomatiques entre États et l'envoi de missions diplomatiques permanentes se font par consentement mutuel. »
16. L'article 12 de cette Convention stipule :
« l'État accréditant ne doit pas, sans avoir obtenu au préalable le consentement exprès de l'État accréditaire, établir des bureaux faisant partie de la mission dans d'autres localités que celles où la mission elle-même est établie. »
17. L'article 20 de la même Convention énonce que « la mission et son chef ont le droit de placer le drapeau et l'emblème de l'État accréditant sur les locaux de la mission, y compris la résidence du chef de la mission, et sur les moyens de transport de celui-ci. »
18. Aux termes de l'article 1, i), l'expression « locaux de la mission » s'entend des bâtiments ou des parties de bâtiments et du terrain attenant qui, quel qu'en soit le propriétaire, sont utilisés aux fins de la mission, y compris la résidence du chef de la mission.
19. L'article 22 de la Convention stipule :
« 1. Les locaux de la mission sont inviolables. Il n'est pas permis aux agents de l'État accréditaire d'y pénétrer, sauf avec le consentement du chef de la mission.
2. L'État accréditaire a l'obligation spéciale de prendre toutes mesures appropriées afin d'empêcher que les locaux de la mission ne soient envahis ou endommagés, la paix de la mission troublée ou sa dignité amoindrie.
3. Les locaux de la mission, leur ameublement et les autres objets qui s'y trouvent, ainsi que les moyens de transport de la mission, ne peuvent faire l'objet d'aucune perquisition, réquisition, saisie ou mesure d'exécution. »
20. Aux termes de l'article 30, alinéa 1er, « la demeure privée de l'agent diplomatique jouit de la même inviolabilité et de la même protection que les locaux de la mission. »
21. Par une décision rendue le 11 décembre 2020 dans une affaire opposant la Guinée équatoriale à la France, la Cour internationale de justice (CIJ) a été amenée à trancher la question de l'identification du statut de l'immeuble (Immunités et procédures pénales (Guinée équatoriale c. France), arrêt, C.I.J. Recueil 2020, p. 300).
22. La Cour relève que l'article 1 i) de la convention de Vienne est insuffisant pour déterminer « comment un immeuble peut en venir à être utilisé aux fins d'une mission diplomatique, si un tel usage est subordonné au respect d'éventuelles conditions préalables et de quelle manière cet usage, le cas échéant doit être établi (...) » et que l'article 22 « ne donne pas plus d'indications à cet égard », ce qui la conduit à « examiner le contexte de ces dispositions ainsi que l'objet et le but de la convention de Vienne. » (§ 62)
23. La Cour rappelle que « l'article 2 de la convention de Vienne prévoit que "l'établissement de relations diplomatiques entre Etats et l'envoi de missions diplomatiques permanentes se font par consentement mutuel" (§ 63). Elle en déduit que « la convention de Vienne ne peut être interprétée comme autorisant un Etat accréditant à imposer unilatéralement son choix de locaux de la mission à l'Etat accréditaire lorsque ce dernier a objecté ce choix. S'il en était ainsi, l'Etat accréditaire serait tenu d'assumer, contre sa volonté, l'obligation spéciale de protéger les locaux choisis qui est énoncée au paragraphe 2 de l'article 22 de la convention. » (§ 67)
24. La Cour ajoute que « L'imposition unilatérale du choix de locaux par un Etat accréditant ne serait donc manifestement pas compatible avec l'objet de la convention consistant à favoriser les relations d'amitiés entre les pays. Elle exposerait de surcroît l'Etat accréditaire à des abus potentiels des privilèges et immunités diplomatiques, ce que les rédacteurs de la convention de Vienne entendaient éviter, en spécifiant, dans le préambule, que le but desdits privilèges et immunités n'est pas « d'avantager les individus (...). » (§ 67)
25. Cependant, le pouvoir d'objecter de l'État accréditaire n'est pas illimité. La Cour précise au paragraphe 74 que si l'État accréditaire objecte à la désignation par l'État accréditant d'un certain bien comme faisant partie des locaux de sa mission diplomatique, il est nécessaire que cette objection soit communiquée en temps voulu et qu'elle n'ait un caractère ni arbitraire ni discriminatoire. Dans ce cas, ce bien n'acquiert pas le statut de locaux de la mission et ne bénéficie dès lors pas de la protection prévue à l'article 22.
26. Dans l'ordre interne, la Cour de cassation (1re Civ., 7 juillet 2021, pourvoi n° 20-15.994, publié au Bulletin) a jugé :
« Vu les articles 30, paragraphe 1, de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961 et L. 111-1-2 du code des procédures civiles d'exécution :
Aux termes du premier de ces textes, la demeure privée de l'agent diplomatique jouit de la même inviolabilité et de la même protection que les locaux de la mission.
Selon le second, lorsqu'une sentence arbitrale a été rendue contre un Etat étranger, des mesures conservatoires ou d'exécution forcée visant un bien appartenant à l'Etat concerné ne peuvent être autorisées par le juge que si le bien en question est spécifiquement utilisé ou destiné à être utilisé par ledit Etat autrement qu'à des fins de service public non commerciales et entretient un lien avec l'entité contre laquelle la procédure a été intentée. Sont notamment considérés comme spécifiquement utilisés ou destinés à être utilisés par l'Etat à des fins de service public non commerciales, les biens utilisés ou destinés à être utilisés dans l'exercice des fonctions de la mission diplomatique de l'Etat.
Pour ordonner la vente forcée du bien immobilier litigieux, après avoir constaté que le caractère officiel de la résidence de l'ambassadeur de la RDC dans ces lieux a été reconnu par le service du protocole du Ministère des affaires étrangères à compter du 2 août 2014, l'arrêt retient qu'en réalité, ils ne constituent pas la résidence personnelle de l'ambassadeur et ne sont pas affectés à la mission diplomatique de cet Etat. Il ajoute que, fut-il affecté au logement du personnel diplomatique de la RDC, son acquisition ne constitue pas une prérogative ou un acte de souveraineté mais seulement une opération habituelle de gestion relevant du droit privé.
En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. »
27. De ces arrêts, il se déduit que la constatation de l'affectation d'un immeuble à la mission diplomatique résulte, au sens de l'article 2 de la Convention de Vienne, du « consentement mutuel » de l'Etat accréditant et de l'Etat accréditaire.
28. Selon l'article 22 de cette Convention, l'affectation à la mission diplomatique emporte d'autres conséquences que l'insaisissabilité : l'inviolabilité, la protection policière, l'exemption fiscale. L'application du statut diplomatique d'un bien immobilier implique que l'affectation soit déclarée au service compétent du ministère des Affaires étrangères qui peut y objecter. Pour les bureaux installés dans d'autres localités que celles où la mission elle-même est établie, il est même exigé par l'article 12 de la Convention une autorisation expresse de l'Etat accréditaire.
29. Appliquer ce statut dans certains de ses aspects (sécurité, exemption fiscale) et non pour d'autres (insaisissabilité) serait générateur d'insécurité juridique. De l'unicité du statut, il résulte que l'allégation par l'Etat débiteur que l'immeuble est affecté à l'usage de la mission diplomatique constitue une présomption d'affectation. Celle-ci ne peut être combattue que par l'avis du service du protocole du ministère des Affaires étrangères indiquant qu'il n'a pas reçu de déclaration d'affectation, ou qu'il y a objecté ou, s'agissant des bureaux installés dans d'autres localités que celles où la mission elle-même est établie, qu'il n'a pas délivré d'autorisation.
30. En ce qui concerne les drapeaux et emblèmes, il n'y a pas de jurisprudence spécifique relative à l'article 20 de la Convention, dont il convient de souligner qu'il crée un droit et non une obligation d'identification. De ce que l'affectation résulte du seul consentement mutuel des Etats et que des motifs de sécurité peuvent rendre opportun l'anonymat de locaux qui ne sont pas destinés à recevoir du public, il résulte que l'apposition ou la non-apposition du drapeau ou de l'emblème de l'Etat accréditant sur l'immeuble litigieux est une circonstance indifférente. »
31. En conséquence, la première chambre civile est d'avis que :
« 1° Pour l'application de l'article L. 111-1-2, 3°, du code des procédures civiles d'exécution, l'allégation qu'un bien immobilier, objet d'un commandement de payer valant saisie immobilière, abrite la résidence de son ambassadeur permanent auprès de l'Unesco ou sa paierie en France permet, à elle seule, de fonder une présomption d'affectation diplomatique de ces biens, que le créancier poursuivant ne peut renverser qu'en produisant la réponse du service du protocole du ministère des Affaires étrangères indiquant qu'il n'a pas reçu de déclaration d'affectation, ou qu'il y a objecté, ou, s'agissant des bureaux installés dans d'autres localités que celles où la mission elle-même est établie, qu'il n'a pas délivré d'autorisation.
2° L'apposition ou la non-apposition du drapeau ou de l'emblème de l'Etat accréditant sur l'immeuble litigieux est une circonstance indifférente. »
32. Le pourvoi pose à la deuxième chambre civile la question du régime des preuves applicable lorsqu'un créancier envisage une mesure d'exécution forcée sur un bien appartenant à un Etat étranger. Il convient de déterminer, de manière générale, ce régime de preuve au vu des règles énoncées par l'avis de la première chambre civile.
33. Selon l'article L. 111-1-2 du code des procédures civiles d'exécution, issu de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, des mesures conservatoires ou des mesures d'exécution forcée visant un bien appartenant à un Etat étranger ne peuvent être autorisées par le juge que si l'une des conditions suivantes est remplie : 1° L'Etat concerné a expressément consenti à l'application d'une telle mesure ; 2° L'Etat concerné a réservé ou affecté ce bien à la satisfaction de la demande qui fait l'objet de la procédure ; 3° Lorsqu'un jugement ou une sentence arbitrale a été rendu contre l'Etat concerné et que le bien en question est spécifiquement utilisé ou destiné à être utilisé par ledit Etat autrement qu'à des fins de service public non commerciales et entretient un lien avec l'entité contre laquelle la procédure a été intentée. Pour l'application du 3°, sont notamment considérés comme spécifiquement utilisés ou destinés à être utilisés par l'Etat à des fins de service public non commerciales, les biens suivants : a) Les biens, y compris les comptes bancaires, utilisés ou destinés à être utilisés dans l'exercice des fonctions de la mission diplomatique de l'Etat ou de ses postes consulaires, de ses missions spéciales, de ses missions auprès des organisations internationales, ou de ses délégations dans les organes des organisations internationales ou aux conférences internationales ;
34. En matière d'immunité d'exécution d'un Etat étranger, le Conseil constitutionnel a dégagé le principe suivant lequel, en adoptant les dispositions précitées, le législateur a cherché à protéger la propriété des personnes publiques étrangères et a notamment entendu assurer un contrôle judiciaire renforcé sur les mesures conservatoires ou d'exécution à l'encontre de biens situés en France appartenant à des États étrangers, et susceptibles de bénéficier d'un régime d'immunité d'exécution au regard du droit international et qu'il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général (Cons. const., 8 décembre 2016, décision n° 2016-741 DC, § 69, Loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique).
35. Il en découle, pour l'application des dispositions de l'article L. 111-1-2, 3°, du code des procédures civiles d'exécution, éclairé par la décision du Conseil constitutionnel et l'avis de la première chambre civile du 22 janvier 2025, que lorsque le juge de l'exécution est saisi d'une demande d'autorisation d'une mesure d'exécution ou d'une contestation visant un bien d'un Etat étranger, il appartient au créancier, une fois que l'Etat a allégué que le bien est affecté à une mission diplomatique, de renverser la présomption d'affectation diplomatique, en produisant la réponse du service du protocole du ministère des Affaires étrangères. Le cas échéant, le créancier peut former une demande au juge de l'exécution à l'effet, pour ce dernier, d'obtenir communication de la réponse.
36. En l'espèce, la question qui se pose est celle de savoir, en ce qui concerne l'immeuble sis à [Localité 14], s'il existe une immunité d'exécution, au sens des dispositions précitées, faisant obstacle à sa saisie.
37. Tout d'abord, l'arrêt relève que la République du Congo se prévaut de ce qu'il abrite la résidence de l'ambassadeur permanent auprès de l'Unesco et qu'elle fait valoir que l'immunité d'exécution fait obstacle à sa saisie.
38. Il retient que le ministère des affaires étrangères a précisé, sur interrogation de la société Orange qui avait saisi l'immeuble situé [Adresse 12] à [Localité 10], qu'il ne possédait aucune liste de biens immobiliers déclarés par les autorités congolaises comme étant affectés à sa mission diplomatique en France.
39. Il ajoute que l'immeuble saisi par la société Commisimpex, n'a pas, comme tous les autres biens immobiliers de la République du Congo, fait l'objet d'une déclaration auprès du service du protocole du ministère des affaires étrangères.
40. De ces seules constatations et énonciations, établissant l'existence d'une présomption d'affectation diplomatique que le créancier avait renversée, par la réponse du ministère chargé des Affaires étrangères indiquant qu'il n'avait pas reçu de déclaration d'affectation, c'est sans inverser la charge de la preuve incombant au créancier, que la cour d'appel en a déduit l'absence d'obstacle, tiré des dispositions de l'article L. 111-1-2, 3°, du code des procédures civiles d'exécution, à la saisie de l'immeuble.
41. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Sur le second moyen du pourvoi incident, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
42. La société Commisimpex fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de voir ordonner la vente forcée de l'immeuble situé [Adresse 2], à [Localité 10], alors, « que la charge de la preuve de l'affectation diplomatique des biens attachés au fonctionnement de la mission diplomatique, tels les immeubles constituant les sites de l'Ambassade, incombe à l'Etat qui se prévaut de l'immunité d'exécution ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris qu'il n'est pas attesté d'une absence de signes distinctifs apposés sur l'immeuble quant à l'usage diplomatique de l'immeuble, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1353 du code civil. »
Réponse de la cour
43. Il résulte de l'avis de la 1ère chambre civile du 22 janvier 2025 que la constatation de l'affectation d'un immeuble à la mission diplomatique résulte, au sens de l'article 2 de la Convention de Vienne, du « consentement mutuel » de l'Etat accréditant et de l'Etat accréditaire.
44. Selon l'article 22 de cette Convention, l'affectation à la mission diplomatique emporte d'autres conséquences que l'insaisissabilité : l'inviolabilité, la protection policière, l'exemption fiscale. L'application du statut diplomatique d'un bien immobilier implique que l'affectation soit déclarée au service compétent du ministère des Affaires étrangères qui peut y objecter. Pour les bureaux installés dans d'autres localités que celles où la mission elle-même est établie, il est même exigé par l'article 12 de la Convention une autorisation expresse de l'Etat accréditaire.
45. Appliquer ce statut dans certains de ses aspects (sécurité, exemption fiscale) et non pour d'autres (insaisissabilité) serait générateur d'insécurité juridique. Il en résulte un principe d'unicité du statut du bien immobilier. Dès lors qu'il est établi que ce bien a fait l'objet d'une exemption fiscale en application de l'article 23 de la Convention de Vienne, l'affectation diplomatique est caractérisée.
46. La cour d'appel a relevé que la République du Congo faisait valoir que le bâtiment sis [Adresse 13] à [Localité 10] abrite la paierie du Congo et justifiait que cet immeuble bénéficie d'une exemption de taxe foncière conformément à l'article 23 de la Convention de Vienne.
47. Il doit être déduit du principe d'unicité du statut de l'immeuble en cause, son affectation diplomatique et par conséquent, son insaisissabilité.
48. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt, qui a retenu que le bien immobilier sis [Adresse 2] à [Localité 10] n'était pas saisissable, se trouve légalement justifié.
Civ.1 12 juin 2025 n° 24-12.767 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
IJ
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation partielle
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 424 F-B
Pourvoi n° Y 24-12.767
Aide juridictionnelle totale en demande au profit de Mme [U] [X]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 17 janvier 2024.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
Mme [U] [X], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Y 24-12.767 contre l'arrêt rendu le 23 mai 2023 par la cour d'appel de Limoges (chambre de la famille), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [Z] [V], domicilié [Adresse 1], venant aux droits de la société MSA services Limousin, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à M. [Y] [W], domicilié [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Marilly, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de Mme [X], et l'avis de Mme Caron-Deglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Marilly, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 23 mai 2023), Mme [X] a saisi un juge des contentieux de la protection statuant en qualité de juge des tutelles d'une demande de mainlevée de la mesure de curatelle renforcée prononcée à son égard par jugement du 25 juin 2013.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
2. Mme [X] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de mainlevée de la mesure de curatelle renforcée la concernant et de maintenir cette mesure, alors « que lorsque la personne protégée sollicite en justice la main levée de la mesure de curatelle, le juge ne peut décider de son maintien sans vérifier au préalable ni constater que la demanderesse est dans l'impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d'une altération, médicalement constatée, de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté ; qu'en l'espèce, après avoir auditionné Madame [U] [X] à l'audience, constaté qu'elle ne [présentait] pas une altération de ses facultés mentales de nature à justifier une mesure de protection", qu'elle pouvait communiquer avec l'assistance d'un ordinateur après avoir été, au préalable, équipée d'un casque muni d'une tige métallique lui permettant d'écrire sur le clavier" la cour d'appel ne pouvait néanmoins affirmer une altération de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté" au prétexte qu'elle ne [pouvait] exprimer sa volonté qu'au moyen d'un équipement informatique" qui suppose qu'elle soit assistée d'une tierce personne", car en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'impossibilité médicalement constatée d'exprimer sa volonté et n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, dont il résultait que, munie d'un équipement informatique, Madame [U] [X] pouvait exprimer sa volonté et remédier aux difficultés résultant de son handicap ; qu'ainsi la cour d'appel a violé les articles 415, 425 alinéa 1er, 428 et 440 du code civil. »
Réponse de la Cour
3. Vu les articles 425, alinéa 1er, et 440, alinéa 1er, du code civil :
4. Il résulte de ces textes que l'ouverture d'une mesure de curatelle exige la constatation par les juges du fond, d'une part, de l'altération, médicalement constatée, soit des facultés mentales de l'intéressé, soit de l'altération de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté, et, d'autre part, de la nécessité pour celui-ci d'être assisté ou contrôlé de manière continue dans les actes importants de la vie civile.
5. Pour rejeter la demande de mainlevée de la mesure de curatelle renforcée concernant Mme [X] et maintenir cette mesure, l'arrêt retient que celle-ci ne présente pas d'altération de ses facultés mentales, ses capacités de raisonnement, de jugement et de compréhension étant efficientes, de même que sa capacité d'anticipation et sa capacité à dire non, mais que l'altération de ses facultés corporelles est de nature à empêcher l'expression de sa volonté, dès lors que cette expression requiert l'installation préalable d'un matériel informatique par une tierce personne.
6. En statuant ainsi, après avoir relevé que dotée, fût-ce par un tiers, d'un matériel adéquat, Mme [X] pouvait exprimer sa volonté, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.
Com. 12 juin 2025 n° 24-13.604 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
HM
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 315 FS-B
Pourvoi n° G 24-13.604
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 JUIN 2025
La caisse de Crédit mutuel de [Localité 4], société coopérative de crédit, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 24-13.604 contre l'arrêt rendu le 5 décembre 2023 par la cour d'appel d'Angers (chambre A, commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [C] [D], divorcée [H], agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de representante légale de son fils mineur [O] [H],
2°/ à M. [O] [H],
3°/ à M. [P] [H],
4°/ M. [X] [H],
tous quatre domiciliés [Adresse 1],
5°/ à l'Union départementale des associations familiales du Maine-et-Loire (l'UDAF), dont le siège est [Adresse 3], prise en qualité d'administrateur ad'hoc à la représentation de l'enfant mineur [O] [H],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société caisse de Crédit mutuel de [Localité 4], et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, M. Riffaud, Mme Guillou, MM. Bedouet, Calloch, Chazalette, Mme Gouarin, conseillers, Mme Champ, M. Boutié, Mmes Coricon, Buquant, conseillers référendaires, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 5 décembre 2023), le 26 juin 2012, M. [H], administrateur légal des biens de ses enfants mineurs, MM. [X], [P] et [O] [H] issus de son union avec Mme [D], a fait procéder au virement de la somme de 5 000 euros au débit de chacun des trois comptes d'épargne ouverts aux noms de ces derniers dans les livres de la caisse de Crédit mutuel de [Localité 4] (la banque),au profit du compte d'une entreprise dont il était le dirigeant. Il a ensuite opéré plusieurs virements et retraits de ces mêmes comptes jusqu'à un quasi épuisement de leur solde.
2. Alerté par Mme [D], un juge des tutelles a désigné l'Union départementale des associations familiales du Maine-et-Loire (l'UDAF) en qualité d'administrateur ad'hoc.
3. Mme [D], en son nom personnel et en qualité de représentante de ses enfants mineurs, a recherché la responsabilité de la banque pour manquement à son obligation de vigilance. L'UDAF, ès qualités, est intervenue volontairement à l'instance.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. [X] [H], la somme de 6 664,38 euros, à M. [P] [H], la somme de 6 294,89 euros, à l'UDAF, ès qualités, la somme de 6 224,77 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la date des prélèvements des fonds et capitalisation des intérêts échus pour une année entière conformément aux dispositions de l'article 1154, ancien, du code civil, alors :
« 1°/ en premier lieu que les tiers ne sont pas garants de l'emploi des capitaux décidé par l'administrateur légal ; qu'en l'espèce, pour retenir la responsabilité de la caisse de Crédit mutuel de [Localité 4], la cour d'appel considère que les circonstances ne pouvaient que faire suspecter un détournement des fonds de la part de l'administrateur légal dès lors qu'il a viré l'argent des livrets des mineurs sur le compte d'une entreprise commerciale gérée par lui ; qu'en statuant ainsi, quand la banque n'était pas garante de l'emploi des capitaux décidé par l'administrateur légal, la cour d'appel a violé l'article 499 du code civil ;
2°/ en deuxième lieu que le banquier est soumis à un devoir de non-ingérence et de non-immixtion dans les affaires de son client en sorte qu'il n'a pas à apprécier l'opportunité des opérations qui lui sont confiées ; qu'il est seulement tenu d'un devoir de vigilance, en vertu duquel il est tenu de déceler les opérations de son client présentant des anomalies apparentes ; qu'en l'espèce, pour considérer que la caisse de Crédit mutuel de [Localité 4] avait commis un manquement à son devoir de vigilance, la cour d'appel retient que les circonstances ne pouvaient que faire suspecter un détournement des fonds de la part de l'administrateur légal dès lors qu'il a viré l'argent des livrets des mineurs sur le compte d'une entreprise commerciale gérée par lui et relève que la banque avait connaissance de la "destination des fonds vers un compte de l'entreprise commerciale du père des mineurs à l'origine des virements"; qu'en statuant ainsi, par un motif tiré de la destination des fonds, quand le banquier, tenu à un devoir de non-ingérence et de non immixtion dans les affaires de son client, n'avait pas à apprécier l'opportunité des opérations qui lui étaient confiées, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;
3°/ en troisième lieu que le banquier est tenu d'un devoir de vigilance, en vertu duquel il est tenu de déceler les opérations de son client présentant des anomalies apparentes ; qu'en l'espèce, pour considérer que la caisse de Crédit mutuel de [Localité 4] avait commis un manquement à son devoir de vigilance, la cour d'appel retient que les circonstances ne pouvaient que faire suspecter un détournement des fonds de la part de l'administrateur légal dès lors qu'il a viré l'argent des livrets des mineurs sur le compte d'une entreprise commerciale gérée par lui et relève que " les relevés des livrets d'épargne des trois enfants mineurs montrent que sur chacun d'eux, le 26 juin 2012, apparaît un ¿vir SG Auto impor' de 5 000 euros, qui sont les premières opérations de retrait et qui ont étaient suivies de nombreux retraits moins importants, par différents moyens soit par virements Web sur le compte de M. [H] ou sur ¿C/C eurocompte con', soit de retraits DAB, jusqu'à ce qu'au 31 décembre 2014, les soldes ne soient plus créditeurs que de 8,59 euros sur le livret de [X], de 10,08 euros sur celui de [P] et de 10,20 euros sur celui de [O]" ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir que ces opérations présentaient le caractère d'anomalies apparentes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil. »
Réponse de la Cour
5. Il résulte de l'article 389-5, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2015-1288 du 15 octobre 2015, et de l'article 505, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2022-267 du 28 février 2022, du code civil que, dans l'administration légale pure et simple, les parents accomplissent ensemble les actes de disposition sur les biens du mineur. A défaut d'accord entre les parents, l'acte doit être autorisé par le juge des tutelles.
6. Selon l'annexe 1 du décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008, est un acte de disposition la modification de tout compte ou livret ouverts au nom de la personne protégée.
7. L'arrêt énonce que la banque est tenue à un devoir de vigilance et constate que M. [H] a fait procéder, seul, à des virements sur chacun des trois comptes d'épargne ouverts aux noms de ses enfants mineurs.
8. Il en résulte que la banque, en ne sollicitant pas l'autorisation de l'autre parent pour accomplir ces actes de disposition, a commis une faute engageant sa responsabilité.
9. Par ces motifs de pur droit substitués d'office à ceux critiqués par le moyen, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, la décision attaquée se trouve légalement justifiée.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
Com. 12 juin 2025 n° 23-23.365 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
MB
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation et annulation
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 317 F-B
Pourvoi n° X 23-23.365
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 JUIN 2025
1°/ La société Jump XL [Localité 6] [Localité 5], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ la société AJRS, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], représentée par de M. [C] [D], agissant en qualité de commissaire au plan de sauvegarde de la société Jump XL [Localité 6] [Localité 5],
3°/ la société [N]-Pécou, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], représentée par M. [Y] [N], agissant en qualité de mandataire judiciaire de la société Jump XL [Localité 6] [Localité 5],
ont formé le pourvoi n° X 23-23.365 contre les arrêts rendus le 18 avril 2023 et le 21 novembre 2023 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre civile), dans le litige les opposant à la société Icom, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 4], défenderesse à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Bedouet, conseiller, les observations de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat des sociétés Jump XL Paris Gennevilliers, AJRS, ès qualités, et [N]-Pécou, ès qualités, de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société Icom, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Bedouet, conseiller rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon les arrêts attaqués (Versailles, 18 avril 2023 et 21 novembre 2023), le 29 septembre 2021, la société Jump XL [Localité 6] [Localité 5] (la société), a été mise en sauvegarde, la société AJRS étant désignée en qualité administrateur judiciaire et la société [N] Pécou de mandataire judiciaire.
2. Le 19 novembre 2021, la Sci Icom, bailleresse de la société Jump XL, a déclaré une créance à titre privilégié. Par une lettre recommandée du 17 janvier 2022, le mandataire judiciaire a indiqué à la société Icom que sa créance était contestée en son intégralité. Cette lettre lui étant revenue avec les mentions « destinataire inconnu à cette adresse » et « non réclamée », le mandataire judiciaire l'a faite signifier par un acte d'huissier de justice.
3. Le 21 avril 2022, le juge-commissaire a rejeté la créance de la société Icom. Cette dernière a relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
4. La société Jump XL et les organes de sa procédure font grief à l'arrêt de déclarer recevable le recours de la société Icom contre l'ordonnance du juge-commissaire du 21 avril 2022, alors « que l'article R. 624-1 du code de commerce dispose que la lettre de contestation de créance précise l'objet de la discussion, indique le montant de la créance dont l'inscription est proposée et rappelle les dispositions de l'article L. 622-27 du même code ; que ces mentions sont relatives à la régularité de ladite lettre et non à celle de l'acte de notification la portant à la connaissance du créancier ; qu'en retenant que l'acte de signification du 8 mars n'avait pu faire courir le délai de trente jours de l'article L. 622-27 du code de commerce, faute de reproduction en son sein de cet article, la cour d'appel a violé l'article R. 624-1 du code de commerce, ensemble les articles 651 et suivants du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article R. 624-1 alinéa 2 du code de commerce :
5. Selon ce texte, si une créance autre que celle mentionnée à l'article L. 625-1 du code de commerce est contestée, le mandataire judiciaire en avise le créancier ou son mandataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Le délai de trente jours prévu à l'article L. 622-27 du même code court à compter de la réception de la lettre. Cette lettre précise l'objet de la discussion, indique le montant de la créance dont l'inscription est proposée et rappelle les dispositions de l'article L. 622-27 du code de commerce.
6. Pour retenir que l'acte de signification de la lettre a pu faire courir le dit délai, l'arrêt retient que, dès lors que la société Jump XL et les organes de la procédure ont entendu faire partir ce délai à compter de la date de signification de cet acte d'huissier de justice, qui se substitue à la dite lettre, cet acte doit contenir, à destination du créancier, un avertissement quant aux conséquence de son abstention par la reproduction intégrale de l'article L. 622-27 du code de commerce.
7. En statuant ainsi alors qu'elle avait constaté que la lettre de contestation signifiée par voie d'huissier de justice reproduisait l'article L 622-27 du code de commerce, de sorte que l'acte de signification n'avait pas à reproduire ce texte, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. En application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt du 18 avril 2023 entraîne, par voie de conséquence, celle de l'arrêt du 21 novembre 2023 qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
Com. 12 juin 2025 n° 23-19.924 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
JB
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Rectification d'erreur matérielle
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 326 F-B
Requête n° H 23-19.924
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 JUIN 2025
La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation se saisit d'office, conformément à l'article 462 du code de procédure civile, en vue de la rectification d'une erreur matérielle affectant l'arrêt n° 690 F-B du 20 novembre 2024, pourvoi n° H 23-19.924, dans une affaire opposant :
La société Crédit logement, société anonyme, dont le siège est [Adresse 7]
à
1°/ à M. [K] [J],
2°/ à Mme [C] [Z], épouse [J],
tous deux domiciliés [Adresse 5],
3°/ à la société Ekip, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de M. [B] [W], pris en qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de M. [K] [J],
4°/ à la société Prestation viti-vinicoles Banton Lauret, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 8]
5°/ au trésor public service impôts des entreprises,
6°/ au trésor public service impôts des particuliers de [Localité 9],
tous deux ayant leur siège [Adresse 6],
7°/ à la Société coopérative Vinicole alliance bourg, dont le siège est [Adresse 4],
8°/ à la société Vitivista, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
9°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 2],
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Coricon, conseiller référendaire, après débats a l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Coricon, conseiller référendaire rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Vu l'article 462 du code de procédure civile :
Vu les avis donnés aux parties.
1. Une erreur matérielle a été commise dans la rédaction de l'arrêt n° 690 F-B du 20 novembre 2024, pourvoi n°H 23-19.924, en ce que, au point 4, il est mentionné « la déclaration d'insaisissabilité » au lieu et place de « l'insaisissabilité ».
2. Il y a lieu, en application de l'article 462 du code de procédure civile, de réparer cette erreur.
Com. 12 juin 2025 n° 23-21.958 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
MB
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Rectification d'erreur matérielle
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 328 F-B
Requête n° T 23-21.958
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 JUIN 2025
La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation se saisit d'office, conformément à l'article 462 du code de procédure civile, en vue de la rectification d'une erreur matérielle affectant l'arrêt n° 153 FS-B prononcé le 26 mars 2025, sur le pourvoi n° T 23-21-958, dans une affaire opposant :
- la société [T] & associés, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [P] [T], agissant en qualité de liquidateur de la société L. [V],
à
1°/ à l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales d'Alsace (URSSAF), dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à l'association AGEA-AGS Nord-Est, dont le siège est [Adresse 6],
3° / au procureur général près la cour d'appel de Colmar, domicilié en son parquet général [Adresse 5],
4°/ à la société L. [V], société par actions simplifiée, dont le siège est chez M. [V] [N], [Adresse 4], anciennement au [Adresse 3],
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Coricon, conseiller référendaire, après débats à l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents, M. Vigneau, président, Mme Coricon, conseiller référendaire rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Vu l'article 462 du code de procédure civile :
Vu les avis donnés aux parties.
1. Une erreur matérielle a été commise dans l'arrêt n° 153 FS-B du 26 mars 2025, pourvoi n° 23-21.958, en ce qu'au point 6 est cité l'article R. 642-39 du code de commerce alors qu'il s'agit de l'article R. 641-39 du code de commerce.
2. Il y a lieu de réparer cette erreur.
Civ.1 12 juin 2025 n° 23-18.832 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation sans renvoi
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 434 F-B
Pourvoi n° V 23-18.832
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
M. [O] [H], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° V 23-18.832 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2023 par la cour d'appel de Versailles (2e chambre, 2e section), dans le litige l'opposant à Mme [M] [S], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Vanoni-Thiery, conseiller référendaire, les observations de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de M. [H], après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Vanoni-Thiery, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 6 avril 2023), un arrêt du 24 juin 1999 a prononcé la séparation de corps de Mme [S] et de M. [H] et condamné ce dernier au paiement mensuel d'une pension alimentaire au titre du devoir de secours.
2. Le 29 décembre 2020, M. [H] a assigné Mme [S] en conversion de la séparation de corps en divorce et a saisi le juge de la mise en état d'une demande de révision de la pension alimentaire.
Examen du moyen
Sur le moyen relevé d'office
3. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.
Vu l'article 303, alinéa 1er, du code civil, les articles 1084, alinéa 1er, 1118 et 1129 du code de procédure civile, et les principes qui régissent l'excès de pouvoir :
4. Aux termes du premier de ces textes, la séparation de corps laisse subsister le devoir de secours ; le jugement qui la prononce ou un jugement postérieur fixe la pension alimentaire qui est due à l'époux dans le besoin.
5. Il résulte du deuxième, auquel renvoie le dernier de ces textes, que lorsqu'il y a lieu de statuer, après le prononcé de la séparation de corps, sur la modification de la pension alimentaire due au titre du devoir de secours, la demande est présentée au juge aux affaires familiales par l'un des époux, dans les formes et conditions prévues aux articles 1137 et suivants du code de procédure civile.
6. Il s'ensuit qu'il n'entre pas dans les attributions du juge de la mise en état de statuer sur une telle demande au cours d'une instance en conversion de la séparation de corps en divorce.
7. Pour rejeter la demande de révision de la pension alimentaire formée par M. [H], l'arrêt fait application de l'article 1118 du code de procédure civile, qui dispose qu'en cas de survenance d'un fait nouveau, le juge peut, jusqu'au dessaisissement de la juridiction, supprimer, modifier ou compléter les mesures provisoires qu'il a prescrites.
8. En statuant ainsi, alors que la demande de M. [H] visait à la modification d'une mesure accessoire au prononcé de la séparation de corps, et non la modification d'une mesure provisoire prise pour la durée de l'instance en conversion de la séparation de corps en divorce, de sorte qu'il n'entrait pas dans les attributions du juge de la mise en état de la connaître, la cour d'appel, qui, statuant dans les mêmes limites, a excédé ses pouvoirs, a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
11. Le juge de la mise en état étant dépourvu du pouvoir juridictionnel de statuer sur la demande de M. [H] tendant à voir diminuer, à compter du 8 septembre 2021, le montant de la pension alimentaire qu'il verse à son épouse en exécution de l'arrêt ayant prononcé leur séparation de corps, il y a lieu, relevant d'office le moyen pris d'un excès de pouvoir du premier juge, d'annuler l'ordonnance du 23 décembre 2021 en toutes ses dispositions et de déclarer cette demande irrecevable.
Civ.1 12 juin 2025 n° 25-70.009 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Demande d'avis n° P 25-70.009
Juridiction : le tribunal judiciaire de Versailles
LM
Avis du 12 juin 2025
n° 15014 B
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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COUR DE CASSATION _________________________
Première chambre civile
Énoncé de la demande d'avis
1. La Cour de cassation a reçu, le 17 mars 2025, une demande d'avis formée le 18 février 2025 par un juge aux affaires familiales, statuant en qualité de juge de la mise en état, du tribunal judiciaire de Versailles, en application des articles L. 441-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire et 1031-1 et suivants du code de procédure civile, dans une instance en divorce opposant M. [W] à Mme [X].
2. La demande est ainsi formulée :
« Dans le régime de la participation aux acquêts, la jurisprudence de la 1re chambre civile de la Cour de cassation résultant de son arrêt n° 21-25.554 rendu le 13 décembre 2023, selon laquelle "Lorsque l'état d 'un bien a été amélioré, fût-ce par l'industrie personnelle d'un époux, il doit être estimé dans le patrimoine originaire, dans son état initial et, dans le patrimoine final, selon son état à la date de la dissolution du régime matrimonial, en tenant compte des améliorations apportées, la plus-value ainsi mesurée venant accroître les acquêts nets de l'époux propriétaire", s'applique-t-elle à tous les biens, y compris à l'entreprise exploitée sous forme sociétaire par l'un des époux ? »
Examen de la demande d'avis
3. Selon l'article 1569 du code civil, pendant la durée du mariage, le régime de participation aux acquêts fonctionne comme si les époux étaient mariés sous le régime de la séparation de biens. À la dissolution du régime, chacun des époux a le droit de participer pour moitié en valeur aux acquêts nets constatés dans le patrimoine de l'autre, et mesurés par la double estimation du patrimoine originaire et du patrimoine final.
4. Selon l'article 1570 du même code, le patrimoine originaire comprend les biens qui appartenaient à l'époux au jour du mariage et ceux acquis depuis par succession ou libéralité, ainsi que tous les biens qui, dans le régime de la communauté légale, forment des propres par nature sans donner lieu à récompense.
5. Selon les articles 1571 et 1574 de ce code, les biens compris dans le patrimoine originaire comme dans le patrimoine final sont estimés à la date de la liquidation du régime matrimonial, d'après leur état au jour du mariage ou de l'acquisition pour les biens originaires et d'après leur état à la date de la dissolution du régime pour les biens existant à cette date. Si les biens du patrimoine originaire ont été aliénés, on retient leur valeur au jour de l'aliénation.
6. Il en résulte que lorsque l'état d'un bien a été amélioré, fût-ce par l'industrie personnelle d'un époux, il doit être estimé, dans le patrimoine originaire, dans son état initial et, dans le patrimoine final, selon son état à la date de dissolution du régime, en tenant compte des améliorations apportées, la plus-value ainsi mesurée venant accroître les acquêts nets de l'époux propriétaire (1re Civ., 13 décembre 2023, pourvoi n° 21-25.554, publié).
7. Cette double estimation concerne tous les biens quelle qu'en soit la nature et, le régime de participation aux acquêts tendant à associer chaque époux à l'enrichissement de l'autre pendant le mariage, l'état des droits sociaux doit s'apprécier, comme en matière successorale, au regard de l'état du fonds social dont ils sont représentatifs (1re Civ., 8 juillet 2009, pourvoi n° 07-18.041, Bull. 2009, I, n° 168 ; 1re Civ., 24 octobre 2012, pourvoi n° 11-21.839, Bull. 2012, I, n° 219).
8. Il s'ensuit que lorsque l'état d'une entreprise exploitée sous forme sociale a été amélioré, fût-ce par l'industrie personnelle d'un époux, l'état des droits sociaux doit être estimé dans le patrimoine originaire, au regard de l'état initial de l'entreprise et, dans le patrimoine final, au regard de l'état de l'entreprise à la date de la dissolution du régime matrimonial, en tenant compte des améliorations apportées, la plus-value ainsi mesurée venant accroître les acquêts nets de l'époux propriétaire.
Civ.1 12 juin 2025 n° 24-12.552 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Rejet
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 415 FS-B
Pourvoi n° Q 24-12.552
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
M. [H] [B], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 24-12.552 contre l'arrêt rendu le 22 février 2024 par la cour d'appel de Versailles (chambre famille 2-2), dans le litige l'opposant à Mme [P] [K], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Buat-Ménard, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [B], et l'avis de Mme Caron-Déglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Buat-Ménard, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mme Poinseaux, M. Fulchiron, Mmes Dard, Beauvois, Agostini, conseillers, M. Duval, Mme Azar, Mmes Marilly, Daniel, Lion, Vanoni-Thiery, conseillers référendaires, Mme Caron-Déglise, avocat général, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 22 février 2024), un arrêt du 23 janvier 2014 a prononcé le divorce de M. [B] et de Mme [K], mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts.
2. Le 6 février 2018, M. [B] a revendu un bien propre qu'il avait acquis avant le mariage au moyen d'un crédit immobilier, partiellement remboursé par la communauté.
3. Des difficultés sont nées lors de la liquidation de leurs intérêts patrimoniaux.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. M. [B] fait grief à l'arrêt de fixer la récompense due par lui à la communauté au titre du remboursement du crédit immobilier de son bien propre à la somme de 81 076 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 6 février 2018, alors « que les récompenses dues par la communauté ou à la communauté portent intérêts de plein droit du jour de la dissolution, que toutefois, lorsque la récompense est égale au profit subsistant, les intérêts courent du jour de la liquidation ; qu'en fixant pourtant le point de départ des intérêts dus par M. [B] sur la récompense, évaluée à hauteur du profit subsistant et due à la communauté au titre du remboursement du crédit immobilier sur son bien propre, à la date de son aliénation, la cour d'appel a violé par fausse application l'article 1473, alinéa 2, du code civil. »
Réponse de la Cour
5. Selon l'article 1469, alinéa 3, du code civil, la récompense ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur. Si le bien acquis, conservé ou amélioré a été aliéné avant la liquidation, sans qu'un nouveau bien ait été subrogé au bien aliéné, le profit est évalué au jour de l'aliénation.
6. Aux termes de l'article 1473, alinéa 2, du même code, lorsque la récompense est égale au profit subsistant, les intérêts courent du jour de la liquidation.
7. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les intérêts d'une récompense, évaluée selon les règles de l'article 1469, alinéa 3, du code civil, courent, lorsque le bien a été aliéné entre la date de la dissolution de la communauté et celle de la liquidation du régime, sans qu'un nouveau bien lui ait été subrogé, à compter du jour de l'aliénation, qui détermine le profit subsistant.
8. Dès lors, c'est sans encourir le grief du moyen que la cour d'appel a fixé le point de départ des intérêts légaux relatifs à la récompense due par M. [B] à la communauté, au titre du remboursement, pendant le mariage, du crédit immobilier souscrit pour financer l'acquisition de son bien propre, au 6 février 2018.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
Civ.2 12 juin 2025 n° 22-24.115 B
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
AF1
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 586 F-B
Pourvoi n° S 22-24.115
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
Mme [B] [U], épouse [P], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° S 22-24.115 contre l'arrêt rendu le 11 octobre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 4 - chambre 13), dans le litige l'opposant à M. [I] [F], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Waguette, conseiller, les observations de la SCP Richard, avocat de Mme [U], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Waguette, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme [I], greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 octobre 2022) rendu sur renvoi après cassation, (1re Civ., 12 septembre 2019, pourvoi n° 18-14.194), Mme [U] a saisi un tribunal de grande instance d'une demande tendant à voir engager la responsabilité de M. [F], avocat, et à le voir condamner à l'indemniser des préjudices résultant de divers manquements à ses obligations professionnelles.
2. Par un jugement du 17 septembre 2015, confirmé par l'arrêt d'une cour d'appel du 23 janvier 2018, Mme [U] a été déboutée de ses demandes.
3. Par un arrêt du 12 septembre 2019, la Cour de cassation a cassé l'arrêt du 23 janvier 2018 et renvoyé l'affaire et les parties devant la cour d'appel autrement composée.
4. Par déclaration du 6 août 2021, Mme [U] a saisi une cour d'appel de renvoi.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. Mme [U] fait grief à l'arrêt de déclarer caduque sa déclaration de saisine de la cour d'appel de renvoi, alors « que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut, à ce titre, relever un moyen d'office, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen ; qu'en relevant néanmoins d'office le moyen tiré de ce que la déclaration de saisine de la cour de renvoi par Mme [U] était caduque, à défaut d'avoir été signifiée aux autres parties à l'instance dans le délai de dix jours à compter de la notification de l'avis de fixation d'audience, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
6. Aux termes de ce texte, le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui même le principe de la contradiction.
7. L'arrêt déclare caduque la déclaration de saisine.
8. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office tiré de la caducité de la déclaration de saisine faute de signification dans le délai légal, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Et sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches
Enoncé du moyen
9. Mme [U] fait le même grief à l'arrêt, alors :
« 3°/ que si en matière de procédure à bref délai, la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi doit être signifiée par son auteur aux autres parties à l'instance ayant donné lieu à la cassation, dans les dix jours de la notification par le greffe de l'avis de fixation, à peine de caducité de la déclaration, un avis de fixation irrégulier ne fait toutefois pas courir ce délai ; qu'en décidant néanmoins que la déclaration de saisine de la cour de renvoi par Mme [U] était caduque, motif pris que l'avis de fixation adressé le 30 septembre 2021 était régulier, comme mentionnant les jours et heures où l'affaire était appelée, et qu'aucune disposition n'imposait des mentions supplémentaires, bien qu'il ait été mentionné sur cet avis la fixation d'une procédure de « mise en état », incompatible avec une procédure à bref délai, et non d'une procédure à « bref délai », de sorte que le délai de signification imposé à l'auteur de la saisine pour informer les autres parties de sa déclaration de saisine n'avait pu courir, la cour d'appel a violé l'article 1037-1 du code de procédure civile ;
4°/ qu'en cas de renvoi devant la cour d'appel, lorsque l'affaire relevait de la procédure ordinaire, celle-ci est fixée à bref délai ; que la déclaration de saisine est signifiée par son auteur aux autres parties à l'instance ayant donné lieu à la cassation dans les dix jours de la notification par le greffe de l'avis de fixation ; que l'expiration du délai signification ne peut être opposé à l'auteur de la saisine de la juridiction sur le fondement d'un avis de fixation d'audience expressément rétracté par le greffe ; qu'en décidant néanmoins que la déclaration de saisine de Mme [U] devait être déclarée caduque, à défaut d'avoir été signifiée dans les dix jours de la notification de l'avis de fixation d'audience du 30 septembre 2021, motif pris qu'il importait peu que cet avis de fixation ait été rétracté par le greffe et que la notification d'un nouvel avis notifié par le greffe le 26 juillet 2022 était sans incidence, en ce qu'il n'avait pu faire courir un nouveau délai, la cour d'appel a violé l'article 1037-1 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1037-1 du code de procédure civile :
10. Selon ce texte, en cas de renvoi devant la cour d'appel, lorsque l'affaire relevait de la procédure ordinaire, celle-ci est fixée à bref délai dans les conditions de l'article 905. A peine de caducité de la déclaration de saisine, celle-ci est signifiée par son auteur aux autres parties à l'instance ayant donné lieu à la cassation dans les dix jours de la notification par le greffe de l'avis de fixation.
11. Pour déclarer caduque la déclaration de saisine, l'arrêt relève que l'avis de fixation adressé le 30 septembre 2021 fixait les jours et heure où l'affaire devait être appelée, puis retient que ni l'article 1037-1 ni l'article 905 auquel il renvoie ne prévoient que d'autres dispositions doivent être mentionnées dans l'avis de fixation adressé et en déduit que cet avis de fixation a valablement fait courir le délai de dix jours pour signifier la déclaration de saisine, le fait qu'un nouvel avis de fixation ait été adressé par le greffe le 26 juillet 2022 étant sans incidence.
12. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que le greffe avait transmis un second avis de fixation se substituant au premier qui était erroné, ce dont il résultait que la notification du premier avis de fixation du 30 septembre 2021 ne pouvait avoir fait courir le délai de signification, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Com. 12 juin 2025 n° 24-10.168 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM
JB
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 314 FS-B
Pourvoi n° Y 24-10.168
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 JUIN 2025
La société X Medical Picture (XMP), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 24-10.168 contre l'arrêt rendu le 8 novembre 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société BNP Paribas, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chazalette, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société X Medical Picture, de la SCP Marc Lévis, avocat de la société BNP Paribas, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Chazalette, conseiller rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, M. Riffaud, Mme Guillou, M. Bedouet, M. Calloch, Mme Gouarin, conseillers, Mme Brahic-Lambrey, Mme Champ, M. Boutié, Mme Coricon, Mme Buquant, conseillers référendaires, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 novembre 2023), entre le 14 et le 17 mai 2019, la comptable de la société X Medical Picture (la société), trompée par de faux courriers électroniques au nom du dirigeant de celle-ci, a adressé à la société BNP Paribas (la banque) quatre ordres de virement au profit d'une société étrangère sur un compte ouvert dans une banque hongroise.
2. Reprochant à la banque d'avoir manqué à son obligation de vigilance dans l'exécution de ces ordres de virement, la société l'a assignée en réparation de son préjudice.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. La société fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors :
« 1°/ que le banquier est tenu d'un devoir de vigilance, en vertu duquel il est tenu de déceler les opérations de son client présentant des anomalies apparentes ; qu'en l'espèce, pour considérer que la société BNP Paribas n'a pas commis de manquement à son devoir de vigilance, la cour d'appel retient que le montant des opérations litigieuses restait dans la "limite des plafonds quotidiens convenus" ; qu'en statuant ainsi, par un motif impropre à établir que ces opérations ne présentaient pas un caractère anormal, les opérations pour un montant supérieur à ces plafonds étant par hypothèse automatiquement rejetées par la banque, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;
2°/ que le banquier est tenu d'un devoir de vigilance, en vertu duquel il est tenu de déceler les opérations de son client présentant des anomalies apparentes ; que le devoir de vigilance du banquier ne dépend pas de la situation de fortune de son client ; qu'en l'espèce, pour considérer que la société BNP Paribas n'a pas commis de manquement à son devoir de vigilance, la cour d'appel retient que les opérations litigieuses "demeuraient largement couverts par le solde créditeur" ; qu'en statuant ainsi, par un motif tiré du solde du compte, impropre à établir que ces opérations ne présentaient pas un caractère anormal, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil ;
3°/ que le banquier est tenu d'un devoir de vigilance, en vertu duquel il est tenu de déceler les opérations de son client présentant des anomalies apparentes ; qu'en l'espèce, pour considérer que la société BNP Paribas n'a pas commis de manquement à son devoir de vigilance, la cour d'appel retient que les opérations litigieuses ont été faites "vers un compte détenu dans les livres d'une banque dûment agréée dans un pays membre de l'Union européenne, qui n'attirait pas spécialement l'attention en terme de sécurité" ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les virements faits à l'étranger pour un montant de 384 625,41 euros (entre 90 000 euros et 98 000 euros environ, chaque jour, entre le 14 mai et le 17 mai 2019) ne présentaient pas le caractère d'anomalies apparentes, quand le montant maximal des virements opérés à l'étranger par la société X Medical Picture depuis trois ans était de seulement 9 292,60 euros, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil. »
Réponse de la Cour
4. Après avoir constaté que le montant des virements restait dans la limite des plafonds quotidiens convenus et demeurait couvert par le solde créditeur du compte, et que la destination des virements était un compte détenu dans les livres d'une banque agréée dans un pays membre de l'Union européenne qui n'attirait pas spécialement l'attention en termes de sécurité, l'arrêt retient que les opérations ne présentaient pas d'anomalies devant alerter la banque.
5. De ces constatations et appréciations souveraines, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu déduire que la banque n'avait pas manqué à son devoir de vigilance.
6. Le moyen n'est pas fondé.
7. Et en l'absence de doute raisonnable quant à l'interprétation de la directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, modifiant les directives 2002/65/CE, 2009/110/CE et 2013/36/UE et le règlement (UE) n° 1093/2010, et abrogeant la directive 2007/64/CE, en matière de responsabilité des prestataires de services de paiement à l'occasion d'opérations de paiement autorisées, il n'y a pas lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne des questions préjudicielles suggéré
Com. 12 juin 2025 n° 23-22.078 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
JB
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation sans renvoi
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 316 F-B
Pourvois n° W 23-22.076 X 23-22.077 Y 23-22.078 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 JUIN 2025
I- 1°/ La société Pasaryne, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ La société SELARL Firma, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], agissant en qualité de liquidateur de la société O Sorbet d'amour,
3°/ La société Arva, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], agissant en qualité d'administrateur de la société O Sorbet d'amour,
ont formé le pourvoi n° W 23-22.076 contre l'arrêt n° RG 22/00249 rendu le 5 septembre 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (4e chambre civile), dans le litige les opposant à la société Kabrousse, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesse à la cassation.
II- 1°/ La société Pasaryne, société par actions simplifiée,
2°/ La société SELARL Firma, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, agissant en qualité de liquidateur de la société O Sorbet d'amour,
3°/ La société Arva, société à responsabilité limitée, agissant en qualité d'administrateur de la société O Sorbet d'amour,
ont formé le pourvoi n° X 23-22.077 contre l'arrêt n° RG 22/00254 rendu le 5 septembre 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (4e chambre civile), dans le litige les opposant à la société Pacabear, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesse à la cassation.
III- La société Pasaryne, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Y 23-22.078 contre l'arrêt n° RG 23/01991 rendu le 12 septembre 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (4e chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Kabrousse, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société Pacabear, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2],
3°/ à la société SELARL Firma, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], prise en qualité de liquidateur de la société O Sorbet d'amour,
4°/ à la société Arva, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], prise en qualité d'administrateur de la société O Sobret d'amour,
défenderesses à la cassation.
Les demanderesses aux pourvois n° W 23-22.076, X 23-22.077 et Y 23-22.078 invoquent, chacune, à l'appui de leurs recours, un moyen de cassation.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de M. Bedouet, conseiller, les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat des sociétés Pasaryne, SELARL Firma, ès qualités, et Arva, ès qualités, de la SCP Gouz-Fitoussi, avocat des sociétés Kabrousse, et Pacabear, et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Bedouet, conseiller rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° W 23-22.076, X 23-22.077 et Y 23-22.078 sont joints
Faits et procédure
2. Selon les arrêts attaqués (Bordeaux, 5 septembre 2023), la société O Sorbet d'amour, à qui la société Pacabear a consenti un bail commercial le 1er octobre 2012 et la société Kabrousse un autre bail commercial en janvier 2013, a été mise en redressement judiciaire le 23 octobre 2019, la société Laurent Mayon étant désignée en qualité de mandataire judiciaire et la société Vincent Mequignon, devenue la société Arva, en qualité d'administrateur judiciaire.
3. Soutenant que les loyers échus postérieurement au jugement d'ouverture étaient demeurés impayés, les bailleresses ont chacune saisi le juge-commissaire en résiliation des baux.
4. Le tribunal, statuant par des jugements distincts sur les recours contre les ordonnances a constaté la résiliation des baux.
5. La société O Sorbet d'amour, son administrateur judiciaire et son mandataire judiciaire ont interjeté appel de ces deux décisions.
6. Au cours de ces instances d'appel, le tribunal a prononcé la résolution du plan de redressement de la société O Sorbet d'amour et ouvert une procédure de liquidation judiciaire, la société Firma étant désignée liquidateur.
7. Le 12 avril 2023, le tribunal a arrêté le plan de cession de la société O Sorbet d'amour au profit de la société Pasaryne, lequel plan incluait la cession des baux commerciaux.
Examen du moyen
Sur les moyens des pourvois n° W 2322076 et X 2322077 pris en leurs premières branches réunies
Enoncé du moyen
8. La société Pasaryne, l'administrateur et le liquidateur de la société O sorbet d'amour font grief aux arrêts de constater la résiliation des baux alors que « lorsque la liquidation judiciaire est ouverte sur résolution du plan, il ne s'agit pas d'une conversion de la procédure de redressement en cours, mais d'une nouvelle procédure collective ; que, dans cette hypothèse, le point de départ du délai de carence de trois mois pour la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges prévue à l'article L. 622-14 2°, du code de commerce, auquel renvoie l'article L. 641-12, 3° de ce code, est la date du jugement prononçant la résolution du plan et ouvrant la liquidation judiciaire ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la cour que par jugement du 8 mars 2023, le tribunal de commerce a prononcé la résolution du plan de redressement de la société O Sorbet d'Amour ; qu'à cette date, aucune décision irrévocable ayant force de chose jugée n'avait prononcé ou constaté la résiliation des baux litigieux de telle sorte que lesdits baux étaient toujours en cours, qu'en constatant néanmoins la résiliation des baux pour une créance de loyer et charge échus antérieurement au prononcé de la liquidation judiciaire après résolution du plan et en se plaçant à la date du 14 février 2020, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des textes susvisés et de l'article 500 du code de procédure civile »
-Réponse de la cour
Recevabilité du moyen
9. Les bailleresses contestent la recevabilité du moyen comme étant nouveau.
10. Cependant ce moyen qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond est de pur droit.
11. Le moyen est donc recevable.
Bien fondé du moyen
Vu les articles L. 622-27, L. 641-11-1, I et II et L. 641-12,3° du code de commerce et l'article 500 du code de procédure civile:
12. Il résulte de ces textes qu'une liquidation judiciaire ouverte concomitamment à la résolution d'un plan de redressement constitue une nouvelle procédure collective, laquelle fait obstacle à la résiliation du bail des immeubles pour des loyers échus postérieurement au jugement d'ouverture du redressement judiciaire. Le bailleur dispose cependant de la faculté de se prévaloir d'une décision constatant ou prononçant la résolution du bail dès lors que cette décision a acquis force de chose jugée avant le jugement d'ouverture de cette nouvelle procédure.
13. Pour constater la résiliation du bail, la cour d'appel relève qu'à la date de la requête du bailleur déposée trois mois après le jugement d'ouverture du redressement judiciaire, la société O Sorbet d'amour restait devoir des loyers échus postérieurement au jugement d'ouverture.
14 . En statuant ainsi alors qu'elle avait constaté que le 8 mars 2023, le plan de redressement de la société O Sorbet d'amour avait été résolu de sorte que la résiliation des baux ne pouvait plus intervenir en application de l'article L. 622-14, 2° du fait de la liquidation judiciaire de cette société ouverte le même jour, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquence de la cassation
Vu l'article 625 du code de procédure civile :
15. Selon ce texte, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
16. La cassation des arrêts ayant constaté la résiliation des baux consentis par les sociétés Pacabear et Kabrousse entraîne l'annulation par voie de conséquence, de l'arrêt du 12 septembre 2023, qui s'y attache par un lien de dépendance nécessaire.
17. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3 alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
18. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
Civ.1 12 juin 2025 n° 24-18.562 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
IJ
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation partielle sans renvoi
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 425 F-B
Pourvoi n° X 24-18.562
Aide juridictionnelle totale en défense au profit de Mme [X] [G]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 14 octobre 2024.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
M. [C] [Z], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° X 24-18.562 contre l'arrêt rendu le 5 juin 2024 par la cour d'appel de Besançon (assistance éducative), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [X] [G], domiciliée [Adresse 4],
2°/ à l'association [7], dont le siège est [Adresse 5],
3°/ à l'aide sociale à l'enfance [Localité 8] (ASE), dont le siège est [Adresse 6],
4°/ au procureur général près la cour d'appel de Besançon, domicilié en son parquet général, [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Marilly, conseiller référendaire, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [Z], de la SARL Corlay, avocat de Mme [G], et l'avis de Mme Caron-Deglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Marilly, conseiller référendaire rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 5 juin 2024), un jugement du 1er mars 2021 a prononcé le divorce de Mme [G] et de M. [Z] et fixé la résidence habituelle de leur enfant [L] [Z], né le [Date naissance 3] 2014, chez la mère.
2. Depuis fin 2019, l'enfant était suivi en milieu ouvert par un juge des enfants.
3. Le 28 novembre 2023, celui-ci a ordonné son placement auprès de l'aide sociale à l'enfance (ASE) jusqu'au 30 novembre 2024.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. M. [Z] fait grief à l'arrêt d'ordonner le placement de [L] [Z] à l'ASE à compter du 30 novembre 2023 jusqu'au 30 novembre 2024, de dire que ce placement prendra la forme d'un placement éducatif à domicile chez la mère et d'accorder à M. [Z] des droits de visite et d'hébergement un week-end sur deux du samedi matin 10h au dimanche 17h les semaines paires, y compris durant les vacances scolaires selon des modalités pratiques à définir en concertation avec l'institution gardienne, alors « que le placement à domicile prévu par la loi n°2022-140 du 7 février 2022 relative à la protection des enfants se définit comme la mesure par laquelle l'enfant demeure chez son ou ses deux parents, tout en bénéficiant d'une intervention à domicile de soutien à la parentalité par un binôme de professionnels du service d'assistance éducative, trois fois par semaine le premier mois, puis deux fois par semaine, l'accueil ponctuel par le service demeurant possible mais exceptionnel ; qu'il en résulte que cette mesure entre dans le champ d'application de l'article 375-2 du code civil qui permet au juge des enfants d'ordonner une mesure d'assistance éducative en milieu ouvert, renforcée ou intensifiée, avec possibilité d'hébergement exceptionnel ou périodique mais non pas dans le champ d'application de l'article 375-3 du code civil qui permet au juge des enfants si la protection de l'enfant l'exige, de le confier à un service départemental de l'aide sociale à l'enfance dont découle l'application d'un régime juridique spécifique ; qu'en ordonnant, par motifs propres et adoptés, le placement de [L] [Z] au Pôle solidarités et cohésion sociale, ASE Antenne de [Localité 8] à compter du 30 novembre 2023 jusqu'au 30 novembre 2024 et en disant que ce placement prendra forme d'un placement éducatif à domicile chez la mère, la cour d'appel a violé les articles 375-2 et 375-3 3° du code civil, dans leur rédaction issue de la loi n° 2022-140 du 7 février 2022. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
5. Mme [G] conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que celui-ci est contraire aux propres écritures de M. [Z] devant la cour d'appel.
6. Cependant, devant la cour d'appel, M. [Z] demandait, sans en préciser le fondement, que le placement soit ordonné à son domicile ou celui de sa tante.
7. Le moyen, qui n'est pas contraire, est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 375, 375-2 et 375-3, 3°, du code civil :
8. Selon le premier de ces textes, lorsqu'un enfant est en danger, le juge des enfants peut être saisi pour ordonner une mesure d'assistance éducative.
9. Selon le deuxième, chaque fois qu'il est possible, le mineur doit être maintenu dans son milieu actuel, qui s'entend de son milieu familial naturel.
10. Selon le troisième, si la protection de l'enfant l'exige, le juge des enfants peut décider de le confier à un service départemental de l'aide sociale à l'enfance.
11. Il en résulte que lorsqu'il décide de confier le mineur à l'ASE, le juge des enfants ne peut pas ordonner que le placement s'effectue au domicile d'un ou des deux parents.
12. L'arrêt, tout en ordonnant le placement du mineur auprès de l'ASE, dit qu'il prendra la forme d'un placement éducatif à domicile chez la mère.
13. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
14. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de l'arrêt ordonnant le placement de [L] [Z] à l'ASE à compter du 30 novembre 2023 jusqu'au 30 novembre 2024, disant que ce placement prendra la forme d'un placement éducatif à domicile chez la mère, et accordant à M. [Z] des droits de visite et d'hébergement un week-end sur deux du samedi matin 10h au dimanche 17h les semaines paires, y compris durant les vacances scolaires selon des modalités pratiques à définir en concertation avec l'institution gardienne, entraîne la cassation du chef de dispositif disant que les allocations familiales auxquelles le mineur ouvre droit seront perçues par Mme [G] qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
15. La cassation des chefs de dispositif susvisés n'emporte pas celle du chef de dispositif de l'arrêt laissant les dépens à la charge du Trésor public justifié par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.
16. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
17. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond dès lors que les mesures ordonnées par le juge des enfants le 28 novembre 2023 ont épuisé leurs effets.
Com. 12 juin 2025 n° 24-13.697 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
MB
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 320 F-B
Pourvoi n° J 24-13.697
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 JUIN 2025
La caisse fédérale du Crédit mutuel de Maine Anjou et Basse Normandie (Caisse de Crédit mutuel), dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 24-13.697 contre l'arrêt rendu le 23 janvier 2024 par la cour d'appel d'Angers (chambre A, commerciale), dans le litige l'opposant à la société Ouest acro, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La société Ouest Acro a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Calloch, conseiller, les observations de la SAS Boucard-Capron-Maman, avocat de la caisse fédérale du Crédit mutuel de Maine Anjou et Basse Normandie (Caisse de Crédit mutuel), de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Ouest Acro, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Calloch, conseiller rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 23 janvier 2024), la société Ouest Acro (la société), titulaire d'un compte ouvert dans les livres de la caisse fédérale du Crédit mutuel de Maine Anjou Basse Normandie (la banque), a signé une extension de contrat de banque à distance donnant mandat à la société Bara Investissement pour régir et administrer l'ensemble de ses comptes bancaires.
2. Le 13 mars 2020, la société a découvert qu'un salarié de la société Bara Investissement avait ordonné onze virements à la suite d'une escroquerie dite « au président »
Examen des moyens
Sur le moyen unique du pourvoi incident
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen du pourvoi principal
Enoncé du moyen
4. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société une certaine somme à titre de dommages et intérêts, alors « que dès lors que la responsabilité d'un prestataire de services de paiement est recherchée en raison d'une opération de paiement relevant des articles L. 133-1 et suivants du code monétaire et financier, qui transposent la directive 2015/2366 du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, seul est applicable le régime de responsabilité défini aux articles L. 133-18 et suivants du code monétaire et financier, à l'exclusion de tout régime alternatif de responsabilité résultant du droit national ; qu'en l'espèce, après avoir considéré que les opérations litigieuses avaient été dûment autorisées par la société, de sorte que la demande fondée sur les articles L. 133-18 et L. 133-23 du code monétaire et financier ne pouvait être accueillie, la cour d'appel a énoncé qu'il restait à déterminer si la banque n'avait pas néanmoins manqué à son devoir de vigilance au vu des circonstances et que le fait d'avoir exécuté des ordres de virement transmis par le système télématique, formellement réguliers, reçus au travers d'une relation sécurisée destiné à éviter les risques de fraude, ne l'exonérait pas de toute responsabilité, et a considéré que la banque avait manqué à son devoir de vigilance ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1147, devenu 1231-1, du code civil, ensemble les articles L. 133-18 à L. 133-24 du code monétaire et financier, dans leur rédaction postérieure à la transposition de la directive 2015/2366 du 25 novembre 2015. »
Réponse de la Cour
5. Après avoir retenu que les opérations de paiements avaient été autorisées, l'arrêt en déduit à bon droit que si la responsabilité de la banque ne pouvait pas être recherchée sur le fondement des articles L. 133-18 et L. 133-23 du code monétaire et financier, elle pouvait l'être en cas de manquement à son obligation de vigilance.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le second moyen du pourvoi principal, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
7. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société une certaine somme à titre de dommages et intérêts, alors « qu'en présence d'une anomalie apparente, le devoir de vigilance impose seulement au banquier de surseoir à son exécution et de se renseigner auprès de son client afin de vérifier que celui-ci est bien à l'origine de l'ordre de paiement ; qu'elle faisait valoir, dans ses écritures d'appel, pièce à l'appui, que la banque avait contacté M. [U] pour s'assurer qu'il était effectivement à l'origine des opérations, et que celui-ci le lui avait confirmé, ce que ne contestait pas la société ; que la cour d'appel a d'ailleurs constaté l'existence de courriels échangés entre M. [U] et le préposé bancaire, correspondant à des réponses à des demandes de confirmation de la banque ou des relances de M. [U] pour obtenir le déblocage de la validation envoyée par le service télématique" ; que la cour d'appel a constaté que M. [U] était habilité à émettre des ordres de paiement ; qu'en se bornant à retenir l'existence d'anomalies apparentes qui ne pouvaient qu'attirer l'attention de la banque, et à considérer qu' en s'abstenant de vérifier auprès du dirigeant de la société ou du directeur financier que ces ordres étaient bien donnés avec l'accord de la société, le Crédit Mutuel avait manqué à son devoir de vigilance ", sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si elle n'avait pas, au contraire, satisfait à son devoir de vigilance en sollicitant et en obtenant confirmation de la part d'une personne habilitée, M. [U], de ce que les ordres de virement en cause émanaient bien de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147, devenu 1231-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
8. Pour retenir la responsabilité de la banque, l'arrêt relève que les ordres de virement étaient affectés d'anomalies apparentes qui ne pouvaient qu'attirer son attention et en déduit qu'en s'abstenant de vérifier auprès du dirigeant de la société ou du directeur financier que ces ordres avaient bien été donnés avec l'accord de la société, elle avait manqué à son devoir de vigilance.
9. En se déterminant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée, si la banque n'avait pas satisfait à son devoir de vigilance en obtenant une confirmation de la part d'une personne habilitée à émettre des ordres de paiement, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
Civ.2 12 juin 2025 n° 22-23.005 B
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Irrecevabilité appel partiellement recevable
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 590 F-B
Pourvoi n° K 22-23.005
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
Mme [Y] [G] [F], veuve [O], domiciliée [Adresse 4], a formé le pourvoi n° K 22-23.005 contre le jugement rendu le 30 août 2022 par le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse (juge de l'exécution), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [H] [J] [U], domicilié [Adresse 2],
2°/ à la société Le Crédit lyonnais, dont le siège est chez M. [P], [Adresse 5],
3°/ à la société Agence nationale pour l'habitat, dont le siège est chez Mme [M] [K], [Adresse 3],
4°/ à la société caisse régionale de Crédit agricole Centre Est, dont le siège est [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Techer, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de Mme [F], veuve [O], de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de M. [U] et de la société caisse régionale de Crédit agricole Centre Est, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Techer, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Sur le commandement de payer valant saisie immobilière délivré à Mme [F] par M. [U], et dénoncé aux sociétés caisse régionale de Crédit agricole Centre Est, Agence nationale pour l'habitat et Le Crédit lyonnais, créanciers inscrits, un juge de l'exécution a, par un jugement d'orientation du 14 décembre 2021, autorisé la vente amiable du bien immobilier objet de la saisie.
2. Par un jugement du 30 août 2022, qualifié en dernier ressort, le même juge de l'exécution a notamment déclaré la contestation soulevée par Mme [F] irrecevable, ordonné la reprise de la procédure après l'échec de la vente amiable et ordonné la vente forcée du bien immobilier objet de la saisie.
Recevabilité du pourvoi contestée par la défense
Vu l'article R. 311-7 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023 :
3. M. [U] et la caisse régionale de Crédit agricole Centre Est soulèvent l'irrecevabilité du pourvoi. Ils soutiennent que le jugement attaqué est susceptible d'appel pour avoir statué sur une contestation.
4. Selon le texte susvisé, en procédure de saisie immobilière, les jugements sont, sauf disposition contraire, susceptibles d'appel.
5. Il résulte de ce texte que le jugement qui, en procédure de saisie immobilière, statue sur une contestation, est, sur ce chef, susceptible d'appel.
6. Par conséquent, le jugement du 30 août 2022, attaqué, qui est susceptible d'appel sur la contestation relative à la prescription soulevée par Mme [F], est inexactement qualifié.
7. Le pourvoi dirigé contre le jugement, en ce qu'il a statué sur la contestation, n'est, dès lors, pas recevable.
Recevabilité du pourvoi examinée d'office
Vu les articles 606, 607 et 608 du code de procédure civile et les articles R. 311-7 et R. 322-22 du code des procédures civiles d'exécution, le quatrième dans sa rédaction antérieure au décret n° 2023-1391 du 29 décembre 2023 :
8. Après avis donné aux parties conformément à l'article 16 du code de procédure civile, il est fait application des articles 606, 607 et 608 du code de procédure civile.
9. Sauf dans les cas spécifiés par la loi, les jugements en dernier ressort qui ne mettent pas fin à l'instance ne peuvent être frappés de pourvoi en cassation, indépendamment du jugement sur le fond, que s'ils tranchent dans leur dispositif tout ou partie du principal. Il n'est dérogé à cette règle qu'en cas d'excès de pouvoir.
10. Selon le quatrième des textes susvisés, en procédure de saisie immobilière, les jugements sont, sauf disposition contraire, susceptibles d'appel.
11. Selon le dernier de ces textes, la décision qui ordonne la reprise de la procédure n'est pas susceptible d'appel.
12. Il résulte de la combinaison de ces textes que le jugement qui ordonne la poursuite de la procédure d'exécution, n'ayant pas tranché une partie du principal ni mis fin à l'instance, n'est pas susceptible de pourvoi en cassation, sauf si un excès de pouvoir est caractérisé.
13. En l'espèce, le moyen soutient que le juge de l'exécution est tenu en toute hypothèse d'examiner le moyen tiré de la prescription, lequel peut être soulevé en tout état de cause.
14. Toutefois, il résulte des dispositions de l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution, qu'à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut, sauf dispositions contraires, être formée après l'audience d'orientation prévue à l'article R. 322-15 à moins qu'elle porte sur les actes de procédure postérieurs à celle-ci.
15. Le jugement ayant constaté que le moyen tiré de la prescription avait été soulevé après l'audience d'orientation, aucun excès de pouvoir n'est établi.
16. Le pourvoi dirigé contre le jugement, en ce qu'il a ordonné la reprise de la procédure après l'échec de la vente amiable ainsi que la vente forcée du bien immobilier objet de la saisie immobilière, n'est, dès lors, de ces chefs et de ceux qui leur sont indissociables, pas recevable.
Civ.2 12 juin 2025 n° 23-15.025 B
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 596 F-B
Pourvoi n° H 23-15.025
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
La [7] ([7]) [7], dont le siège est [Adresse 6], a formé le pourvoi n° H 23-15.025 contre le jugement rendu le 23 février 2023 par le tribunal judiciaire de Tours (surendettement des particuliers), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [J] [B], domicilié [Adresse 2],
2°/ à la direction générale des finances publiques, dont le siège est [Adresse 3],
3°/au Comptable public du pôle de recouvrement spécialisé du Gard, domicilié [Adresse 4],
4°/ à la société [10], dont le siège est [Adresse 1],
5°/ à M. [R] [Y], domicilié [Adresse 1],
6°/ à la société [8], [V], [M], [K], dont le siège est [Adresse 5],
7°/ à M. [T] [K], domicilié [Adresse 5],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Chevet, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boucard, Capron, Maman, avocat de la [7], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Chevet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Tours, 23 février 2023), rendu en dernier ressort, la demande de M. [B] tendant au traitement de sa situation financière a été déclaré recevable par une commission de surendettement.
2. Le 6 janvier 2021, la commission de surendettement a notifié l'état détaillé des dettes à M. [B], lequel a contesté par lettre du 13 janvier 2021 une créance de la [7] (la banque).
3. Le 4 février 2021, la commission de surendettement a saisi un juge des contentieux de la protection de cette contestation.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. La banque fait grief au jugement de déclarer recevable la demande formulée par M. [B] en vérification de sa créance au titre de l'acte de cautionnement du prêt n° 01QB4F010PR consenti à la SCI [9] figurant à l'état détaillé des dettes de M. [B] et d'écarter de la procédure de traitement de la demande de surendettement de M. [B] la créance figurant à l'état détaillé des dettes à son profit au titre de l'engagement de caution solidaire de M. [B] en garantie du prêt n° 01QB4F010PR consenti à la SCI [9] alors « que le débiteur peut contester l'état de son passif dressé par la commission de surendettement des particuliers dans un délai de vingt jours à compter de la date à laquelle cet état lui est notifié ; qu'à l'expiration de ce délai, le débiteur ne peut plus formuler une telle demande ; qu'il en résulte que le débiteur n'est pas recevable à contester, devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire, une créance autre que celles qu'il a contestées dans le délai de vingt jours à compter de la date à laquelle l'état de son passif dressé par la commission de surendettement des particuliers lui a été notifié ; qu'en retenant dès lors, pour déclarer recevable la demande formulée par M. [B] en vérification de la créance de la [7] au titre de l'acte de cautionnement du prêt n° 01QB4F010PR consenti à la Société civile immobilière [9] figurant à l'état détaillé des dettes de M. [B], que si M. [B] avait circonscrit sa demande originelle en vérification des créances à la créance de la [7] au titre du solde débiteur du compte ouvert de la Société civile immobilière [9], il avait régulièrement pu, dans le cadre de l'instance introduite, solliciter la vérification de la créance de la [7] au titre de son engagement de caution du prêt n° 01QB4F010PR consenti à la Société civile immobilière [9], dès lors que cette demande s'analysait comme une demande additionnelle, et, donc, incidente au sens des dispositions des articles 63 et 65 du code de procédure civile et que la recevabilité de cette demande additionnelle apparaissait non contestable dans la mesure où elle se rattachait à la prétention originaire de M. [B] par un lien suffisant, puisqu'il s'agissait dans les deux cas de faire vérifier les sommes dues à la [7] telles que déclarées à la procédure de surendettement, quand M. [B] n'était pas recevable à contester, devant le juge des contentieux de la protection, au moyen d'une demande additionnelle, une créance autre que la créance de la [7] au titre du solde débiteur du compte ouvert de la Société civile immobilière [9] qu'il avait contestée dans le délai de vingt jours à compter de la date à laquelle l'état de son passif dressé par la commission de surendettement des particuliers lui avait été notifié, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire a violé les dispositions des articles L. 723-3, R. 723-5 et R. 723-8 du code de la consommation et des articles 63 et 65 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article R. 723-8 du code de la consommation :
5. Selon ce texte, le débiteur peut contester l'état du passif dressé par la commission dans un délai de vingt jours, et ne peut plus à l'expiration de ce délai, formuler une telle demande. La commission informe le débiteur de ce délai.
6. Il en résulte que lorsque le juge des contentieux de la protection est déjà saisi par la commission aux fins de vérification d'une créance, le débiteur n'est pas recevable à contester lors de cette instance une autre créance, figurant à l'état du passif dressé par la commission, qu'il n'a pas contestée dans le délai de 20 jours suivant la date à laquelle cet état lui a été notifié.
7. Pour déclarer recevable la demande formée par M. [B] en vérification de la créance de la banque au titre de l'acte de cautionnement du prêt souscrit par la SCI [9] et l'écarter de la procédure, le jugement retient que, si M. [B] a circonscrit sa demande originelle en vérification des créances à la créance de la banque au titre du solde débiteur du compte ouvert au nom de la SCI [9], il a régulièrement pu, dans le cadre de l'instance introduite, solliciter la vérification d'une autre créance de la banque au titre de son engagement de caution du prêt souscrit par cette même société, s'agissant d'une demande additionnelle, et, donc, incidente au sens des articles 63 et 65 du code de procédure civile qui se rattache à la prétention originaire du débiteur par un lien suffisant.
8. En statuant ainsi, alors que la demande en vérification d'une créance de la banque avait été formée postérieurement au délai de vingt jours, à compter de la notification par la commission de l'état des créances, le tribunal a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
9. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif déclarant recevable la demande formée par M. [B] en vérification de la créance de la [7] au titre de l'acte de cautionnement du prêt n° 01QB4F010PR consenti à la SCI [9] figurant à l'état détaillé des dettes entraîne la cassation du chef de dispositif écartant de la procédure la créance figurant à l'état détaillé des dettes au profit de la [7] au titre de l'engagement de caution solidaire de M. [B] en garantie du prêt n° 01QB4F010PR consenti à la SCI [9] qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
Civ.1 12 juin 2025 n° 24-10.743 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Rejet
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 414 FS-B
Pourvoi n° Y 24-10.743
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
Mme [M] [F], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Y 24-10.743 contre l'arrêt rendu le 28 novembre 2023 par la cour d'appel de Chambéry (3e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [I] [J], domiciliée [Adresse 1],
2°/ au procureur général près de la cour d'Appel de Chambéry, domicilié en son parquet général, [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Fulchiron, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de Mme [F], de Me Occhipinti, avocat de Mme [J], et l'avis de Mme Caron-Déglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Fulchiron, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mmes Poinseaux, Dard, Beauvois, Agostini, conseillers, M. Duval, Mme Azar, M. Buat-Ménard, Mmes Marilly, Daniel, Vanoni-Thiery, Lion, conseillers référendaires, Mme Caron-Déglise, avocat général, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 28 novembre 2023), Mme [F] et Mme [J] se sont mariées le 7 septembre 2019.
2. Le 11 février 2021, Mme [F] a donné naissance à [L] [F], après recours à une assistance médicale à la procréation avec tiers donneur réalisée en Belgique.
3. Le couple s'étant séparé au cours de la grossesse, Mme [J] a, le 28 mars 2022, présenté une requête en adoption plénière de l'enfant.
Examen des moyens
Sur le second moyen pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en sa première branche, qui est irrecevable, et sur le moyen, pris en ses deuxième à sixième branches, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Mme [F] fait grief à l'arrêt de dire recevable la demande formée par Mme [J] au titre de l'adoption plénière de [L] [F], alors « que le nouveau mode de filiation créé par la loi n° 2021-1017 du 2 août 2021 qu'est la reconnaissance conjointe consiste en un acte passé devant notaire, qui doit préalablement délivrer au couple un certain nombre d'informations sur la filiation, énumérées à l'article 342-10 du code civil, cette reconnaissance devant être remise à l'officier d'état civil après la naissance de l'enfant ; que ce formalisme est exigé dès lors qu'il a un impact déterminant sur la vie de l'enfant puisqu'il crée un lien de filiation qui ne pourra être remis en cause que dans des conditions très réduites ; que l'action en adoption forcée ouverte à titre exceptionnel et provisoire par la loi n° 2022-219 du 21 février 2022, prévue pour l'hypothèse où la mère inscrite dans l'acte de naissance s'oppose à l'établissement de la filiation à l'égard de la mère d'intention, n'est ouverte qu'en cas de refus de la mère de réaliser la procédure de reconnaissance conjointe a posteriori, elle-même ouverte pour une période limitée pour les procréations médicalement assistées antérieures à l'entrée en vigueur de la loi du 2 août 2021 ; qu'en raison des conséquences lourdes pour l'enfant comme pour le demandeur à l'établissement du lien de filiation et la mère ayant accouché, il doit être considéré que la tentative préalable de reconnaissance conjointe devant notaire, pour caractériser le refus de la mère inscrite dans l'acte de naissance de procéder à cette reconnaissance, est un formalisme préalable sans lequel la demande d'adoption est irrecevable ; qu'en considérant au contraire que la seule preuve de la volonté de la mère de ne pas voir naître de lien entre la demanderesse à l'adoption et l'enfant pourrait suffire à rendre recevable la demande d'adoption forcée, la cour d'appel a violé l'article 9 de la loi n° 2022-219 du 21 février 2022, ainsi que les articles 32 et 122 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
6. L'article 9 de la loi n° 2022-219 du 21 février 2021 visant à réformer l'adoption dispose :
« À titre exceptionnel, pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de la présente loi, lorsque, sans motif légitime, la mère inscrite dans l'acte de naissance de l'enfant refuse la reconnaissance conjointe prévue au IV de l'article 6 de la loi nº 2021-1017 du 2 août 2021 relative à la bioéthique, la femme qui n'a pas accouché peut demander à adopter l'enfant, sous réserve de rapporter la preuve du projet parental commun et de l'assistance médicale à la procréation réalisée à l'étranger avant la publication de la même loi, dans les conditions prévues par la loi étrangère, sans que puisse lui être opposée l'absence de lien conjugal ni la condition de durée d'accueil prévue au premier alinéa de l'article 345 du code civil. Le tribunal prononce l'adoption s'il estime que le refus de la reconnaissance conjointe est contraire à l'intérêt de l'enfant et si la protection de ce dernier l'exige. Il statue par une décision spécialement motivée. L'adoption entraîne les mêmes effets, droits et obligations qu'en matière d'adoption de l'enfant du conjoint, du partenaire d'un pacte civil de solidarité ou du concubin. »
7. Il ne résulte de ce texte aucune exigence formelle relative à la mise en oeuvre d'une tentative préalable de reconnaissance conjointe devant notaire. La preuve du refus de la mère inscrite dans l'acte de naissance de procéder à cette reconnaissance peut être rapportée par tout moyen.
8. Après avoir à bon droit énoncé qu'aucun formalisme particulier n'était exigé quant à la démonstration du refus opposé par la mère inscrite dans l'acte de naissance, la cour d'appel, qui a relevé qu'étaient produites aux débats différentes pièces établissant qu'avant le dépôt de la requête en adoption, Mme [F] avait exprimé à Mme [J] sa décision de ne lui laisser aucune place dans la vie de l'enfant, lui refusant même le droit de le voir, en a déduit que Mme [J] était dans l'impossibilité d'obtenir l'accord de Mme [F] en vu de l'établissement d'une reconnaissance conjointe et qu'en conséquence la preuve de son refus était établie.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le second moyen, pris en sa septième branche
Enoncé du moyen
10. Mme [F] fait grief à l'arrêt de prononcer l'adoption plénière de [L] [F] par Mme [J] et de dire que le nom de l'enfant adopté serait [L] [F] [J], alors « que dans le cas prévu à l'article 9 de la loi n° 2022-219 du 21 février 2022, le tribunal prononce à titre exceptionnel l'adoption à l'égard de la femme qui n'a pas accouché si la protection de l'enfant l'exige ; qu'en n'énonçant pas en quoi la protection de [L] exigeait que soit prononcée son adoption par Mme [J] malgré le refus de sa mère de voir établir ce lien de filiation adoptive, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte précité. »
Réponse de la Cour
11. Il résulte de l'article 9 de la loi n° 2022-219 du 21 février 2021, qu'au regard du projet parental commun dont a procédé l'assistance médicale à la procréation réalisée, l'adoption de l'enfant peut être prononcée si, en dépit du refus, sans motif légitime, de la femme qui a accouché de procéder à la reconnaissante conjointe, elle est conforme à l'intérêt de l'enfant, souverainement apprécié par le juge en considération des exigences de sa protection (1r Civ., 23 mai 2024, pourvoi n° 22-20.069, publié), sans que ce dernier ait à rechercher en outre si la mesure d'adoption est indispensable pour protéger l'enfant d'un danger.
12. La cour d'appel, qui a d'abord relevé que le projet parental commun avait été porté par le couple durant plusieurs années, puis observé que malgré la séparation du couple, Mme [F] avait, dans un premier temps, continué à associer Mme [J] à sa grossesse, et que celle-ci, malgré ses efforts pour maintenir entre elles un lien apaisé, s'était heurtée au refus de son épouse d'assister à l'accouchement et de voir l'enfant, a retenu que Mme [F] ne justifiait pas d'un motif légitime pour s'opposer à la reconnaissance conjointe, et que ses griefs à l'encontre de son épouse ne l'autorisaient pas à mettre en échec de manière unilatérale le projet commun du couple, dès lors que Mme [J] avait montré sa capacité à dialoguer de manière constructive avec elle, et estimé qu'il était dans l'intérêt de l'enfant de pouvoir disposer d'une double filiation, conformément au projet parental initial du couple, afin, notamment, de bénéficier de l'affection et de l'attention constante de ses deux parents et de s'inscrire dans ses deux familles élargies.
13. En l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a prononcé l'adoption plénière de [L] [F] par Mme [J] au regard du seul critère pertinent de l'intérêt de l'enfant, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.
14. Le moyen n'est donc pas fondé.
Com. 12 juin 2025 n° 24-13.566 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
JB
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 323 F-B
Pourvoi n° S 24-13.566
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 JUIN 2025
La société Franklin Bach, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de M. [V], agissant en qualité de liquidateur de la société Réunionnaise de vente de matériel de levage et de travaux publics, a formé le pourvoi n° S 24-13.566 contre l'arrêt rendu le 15 novembre 2023 par la cour d'appel de Saint-Denis (chambre commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [O] [Z], domicilié [Adresse 2],
2°/ à M. [O] [L], domicilié [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire, les observations de la SCP Françoise Fabiani - François Pinatel, avocat de la société Franklin Bach, ès qualités, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [Z], et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis,15 novembre 2023), les 12 mai et 30 juin 2010, la société Réunionnaise de vente de matériel de levage et de travaux publics (la société Sorelev) a été mise en redressement puis liquidation judiciaires.
2. La société Franklin Bach, agissant en qualité de liquidateur, a assigné le dirigeant, M. [Z], en responsabilité pour insuffisance d'actif et en prononcé de sa faillite personnelle.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3. Le liquidateur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de condamnation de M. [Z] à supporter l'insuffisance d'actif de la société, alors « que le juge ne peut méconnaître les termes du litige, déterminés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, pour débouter la société Franklin Bach de sa demande de condamnation de M. [Z] à supporter l'insuffisance d'actif révélée à l'issue des opérations de liquidation judiciaire de la société Sorelev, la cour d'appel s'est déterminée par la seule circonstance que les documents produits par le liquidateur ne suffisent pas à établir l'existence d'une insuffisance d'actif ; qu'en statuant ainsi, quand les parties au litige ne s'opposaient que sur la réalité des fautes de gestion imputables au dirigeant, et sur leur lien de causalité avec l'insuffisance d'actif que l'exposante souhaitait voir supporter par ledit dirigeant, tandis que ce dernier, qui se bornait à prétendre que l'exposante ne motivait pas la part d'insuffisance d'actif imputée à M. [Z], reprochait simplement à l'intéressée de vouloir lui imputer "une moitié de l'insuffisance d'actif finale sans préciser en quoi elle serait en lien avec les actes qu'elle lui impute à faute", de sorte que le dirigeant admettait à tout le moins, ce faisant, la réalité d'une insuffisance d'actif révélée par la liquidation judiciaire, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 4 du code de procédure civile :
4. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
5. Pour rejeter la demande de condamnation du dirigeant à payer l'insuffisance d'actif, l'arrêt retient que le liquidateur se borne à verser aux débats des déclarations de créances de certains des créanciers et un bordereau de communication de pièces sur lequel figure notamment l'état du passif déclaré qui ne suffisent pas à établir l'existence d'une insuffisance d'actif.
6. En statuant ainsi, alors que les parties s'accordaient sur l'existence d'une insuffisance d'actif que le liquidateur évaluait à la somme de 854 280, 20 euros et que seuls étaient discutés les fautes reprochées et leur lien avec cette insuffisance d'actif, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.
Et sur le second moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
7. Le liquidateur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de prononcer la faillite personnelle de M. [Z], alors « que la sanction de la faillite personnelle encourue sur le fondement des articles L. 653-4 et L. 653-5 du code de commerce ne requiert pas la preuve d'une insuffisance d'actif ; que, dès lors, en se déterminant par la seule circonstance que les documents produits par le liquidateur ne suffisent pas à établir l'existence d'une insuffisance d'actif, pour en déduire qu'il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la faillite personnelle de M. [Z], sans qu'il y ait lieu d'examiner l'existence ou non des fautes de gestion de l'intéressé, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 653-4 et L. 653-5 du code de commerce :
8. Il résulte de ces textes que le tribunal peut prononcer la faillite personnelle du dirigeant de la personne morale débitrice contre lequel a été relevé un ou plusieurs faits qu'ils énumèrent sans qu'il soit tenu de constater l'existence d'une insuffisance d'actif.
9. Pour rejeter la demande du liquidateur, l'arrêt retient que celui-ci échoue à l'établir l'existence d'une insuffisance d'actif.
10. En statuant ainsi, en ajoutant à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas, la cour d'appel violé, par refus d'application, le texte susvisé.
Civ.2 12 juin 2025 n° 22-24.111 B
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
AF1
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 585 F-B
Pourvoi n° N 22-24.111
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 12 JUIN 2025
La société SCI BD, société civile immobilière, dont le siège est chez société Gestion conseil patrimoine, [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 22-24.111 contre l'arrêt rendu le 2 juin 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Etude JP, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], prise en la personne de M. [F] [Z] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Pool,
2°/ à la société Pool, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Waguette, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de la société SCI BD, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Waguette, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 juin 2022), rendu sur renvoi après cassation, (2e Civ., 20 mai 2021, pourvoi n° 19-26.076), la société SCI BD (la SCI BD) a déclaré des créances au passif de la liquidation judiciaire de la société Pool, représentée par la société Etude JP, son mandataire judiciaire.
2. Par deux ordonnances du 27 septembre 2017, confirmées par un arrêt du 29 octobre 2019, un juge-commissaire a rejeté les créances.
3. Par un arrêt du 20 mai 2021, la Cour de cassation a cassé en toutes ses dispositions l'arrêt ainsi rendu et a renvoyé la cause et les parties devant une cour d'appel.
4. Par déclaration du 16 juillet 2021, la SCI BD a saisi la cour d'appel de renvoi.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. La SCI BD fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité de la déclaration de saisine et de constater, en conséquence, son absence de saisine, alors « que pour l'application des articles 1033 et 901 du code de procédure civile, une société tant qu'elle n'a pas fait choix d'un nouveau siège social, est réputée conserver son siège social au lieu fixé par les statuts et publié au registre du commerce, sous réserve de la preuve de son caractère fictif ou frauduleux ; qu'en l'espèce, comme l'admettaient expressément la société Etude JP et la société Pool, l'acte de saisine de la juridiction de renvoi mentionne l'adresse du siège social de la SCI BD qui est indiquée au Kbis de cette société, à savoir [Adresse 2] à [Localité 4] ; qu'en se fondant pour dire que l'acte de saisine de la Cour d'appel serait affectée de nullité en ce qui concerne l'adresse du siège social de la SCI BD, sur la circonstance la SCI BD ne démontre pas qu'elle est toujours domiciliée à cette adresse, un officier ministériel assermenté ayant indiqué en 2021 ne pas être en mesure de signifier un acte à la SCI BD à cette adresse à laquelle se trouve un cabinet d'expertise comptable sans que le nom de la SCI BD y figure et alors qu'une personne rencontrée sur place a indiqué ne pas connaître la SCI BD, quand la SCI BD qui n'avait pas fait le choix d'un nouveau siège social, était réputée domiciliée à cette adresse figurant sur son Kbis, et sans constater la preuve par la société Etude JP et la société Pool du caractère fictif ou frauduleux du siège social de la SCI BD indiquée sur son Kbis, la cour d'appel a violé les articles 901, 114 et 1033 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 54, 901 et 1033 du code de procédure civile :
6. Selon le troisième de ces textes, la déclaration de saisine de la cour d'appel de renvoi contient les mentions exigées pour l'acte introductif d'instance devant cette juridiction.
7. Il résulte du premier, qu' à peine de nullité, la demande initiale mentionne pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement.
8. Pour l'application de ces textes, une société, tant qu'elle n'a pas fait choix d'un nouveau siège social, est réputée conserver son siège social au lieu fixé par les statuts et publié au registre du commerce, sous réserve de la preuve de son caractère fictif ou frauduleux.
9. Pour prononcer la nullité de la déclaration de saisine, l'arrêt relève que la SCI BD y a indiqué avoir son siège social au [Adresse 2] à [Localité 4] et que l'intimé en conteste l'exactitude en produisant un courrier d'un huissier de justice indiquant que la SCI BD n'est pas connue à cette adresse ; puis l'arrêt retient que le contrat de domiciliation produit par cette dernière n'est conforté par aucun élément contemporain attestant qu'elle est toujours domiciliée à cette adresse et en déduit que la déclaration de saisine comporte une adresse de siège social erronée.
10. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'adresse du siège social indiquée par la SCI BD dans sa déclaration de saisine était celle que mentionnait l'extrait du registre du commerce et des sociétés, ce dont il résultait qu'à défaut de preuve de son caractère fictif ou frauduleux, la SCI BD était réputée domiciliée à cette adresse, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Com. 12 juin 2025 n° 24-13.777 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
HM
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 12 juin 2025
Rejet
M. VIGNEAU, président
Arrêt n° 321 F-B
Pourvoi n° W 24-13.777
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 12 JUIN 2025
La société BNP Paribas, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 24-13.777 contre l'arrêt rendu le 7 février 2024 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société [H] transports, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Calloch, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société BNP Paribas, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la société [H] transports, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Calloch, conseiller rapporteur, Mme Schmidt, conseiller doyen, et Mme Sezer, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 février 2024), le 23 juillet 2019, Mme [W], salariée de la société [H] transport dirigée par M. [G] [H] (la société) a été contactée téléphoniquement par une personne se présentant comme un technicien de la société BNP Paribas (la banque) lui demandant d'effectuer différentes manipulations à l'aide du système de paiement à distance afin permettre la réinscription d'opérations sur le compte.
2. A la suite de ces manipulations, deux virements ont été exécutés vers des comptes domiciliés en Allemagne pour une somme totale de 98 000 euros.
3. Après avoir déposé une plainte pour escroquerie et soutenant ne pas avoir autorisé ces paiements, la société a assigné la banque en réparation de ses préjudices.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société la somme de 98 000 euros au titre du remboursement des fonds, alors :
« 1° que manque, par négligence grave, à son obligation de prendre toute mesure raisonnable pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés, l'utilisateur d'un service de paiement qui communique les données personnelles de ce dispositif de sécurité en réponse à un appel téléphonique dont la teneur permet à un interlocuteur normalement attentif de douter de sa provenance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'il ressortait de l'audition de [G] [H] que " ([R] [W]) ne s'est pas méfiée de son interlocuteur qui ne lui demandait pas de mot de passe (?) ; qu'elle a renouvelé la création d'une signature électronique, son interlocuteur prétendant que la manoeuvre n'avait pas réussi " ; qu'elle a également relevé que l'audition de [R] [W] confirmait qu' " elle s'est connectée avec le boîtier et la carte, mais sans le mot de passe", que "l'escroc lui a alors demandé de se connecter et de se déconnecter à plusieurs reprises, puis de saisir la clef d'accès créée par le boîtier. Prétendant que cela ne fonctionnait pas, il lui a demandé d'essayer avec une autre clef d'accès qu'il lui a communiquée. Il lui a refait manipuler le boîtier à plusieurs reprises en l' ¿embrouillant', puis lui a demandé de confirmer que le code qu'il lui indiquait au téléphone s'affichait, ce qui était le cas. Il lui a fait appuyer sur un ou deux boutons du boîtier, lui a demandé d'attendre et de confirmer. [R] [W] pense que c'est ce qui a créé une signature pour les virements" ; qu'en considérant qu' "il n'est pas démontré par la banque que la société [H] Transports ait commis une négligence grave exonérant la société BNP Paribas de son obligation de remboursement", quand il ressortait de ses propres constatations que Mme [W], et partant la société [H] Transports, avait communiqué les données personnelles de son dispositif de sécurité en réponse à un appel téléphonique dont la teneur permettait à un interlocuteur normalement attentif de douter de sa provenance, la cour d'appel a violé les articles L. 133-16 et L. 133-19 du code monétaire et financier ;
2°/ que les juges du fond ne peuvent statuer par voie de simple affirmation sans viser ni analyser, fût-ce sommairement, les éléments sur lesquels ils fondent leur décision ; qu'en première instance, le tribunal de commerce de Paris avait retenu " que Mme [W] a été contactée par téléphone (mais qu'[H] n'apporte pas la preuve qu'il s'agit du numéro de la hotline de BNP)" ; qu'en affirmant de manière péremptoire que " la circonstance que l'escroc ait pu usurper un numéro de téléphone de la société BNP Paribas (?) était de nature à persuader ([R] [W]) qu'elle était en relation avec un technicien de la banque", sans viser ni analyser, fût-ce sommairement, les éléments de preuve sur lesquels elle se fondait pour juger que l'appel provenait d'un numéro de téléphone attribué à la société BNP Paribas, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que commet une négligence grave l'utilisateur de services de paiement qui omet de prendre toute mesure nécessaire pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés ; qu'en l'espèce, l'article III des conditions générales de fonctionnement de la Carte Transfert Sécurisé (CTS) stipule que le détenteur d'un code personnel communiqué confidentiellement par la société BNP Paribas doit "tenir son code confidentiel absolument secret et ne le communiquer à quiconque" ; que l'article VII précise que "le Détenteur est responsable de l'utilisation et de la conservation de la Carte et du code confidentiel qui y est associé et de leur utilisation conformément aux présentes conditions de fonctionnement", l'article VIII ajoutant que "le Client est tenu solidairement et indivisément responsable de toutes les conséquences financières résultant de l'utilisation et de la conservation de la Carte par son Détenteur" ; qu'il résultait, en outre du bordereau BNP Net Entreprises (production) que Mme [W], désignée comme mandataire "M3", n'était pas habilitée à valider les "virements domestiques/Sepa" et "virements internationau " (" Choix des services et habilitation des mandataires") ; qu'en affirmant que "les documents contractuels et les guides et exemples d'utilisation du service BNP Net Evolution ne suffisent pas à établir les faits de négligence grave imputés à la société [H] Transports, consistant notamment à avoir laissé [R] [W] utiliser la Carte Transfert Sécurité de [G] [H]", sans expliquer comment cette dernière avait pu valider les virements litigieux quand seule la Carte Transfert Sécurisé (CTS) de [G] [H] permettait de valider les virements internationaux, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 133-16 et L. 133-19 du code monétaire et financier ;
4°/ que commet une négligence grave l'utilisateur de services de paiement qui omet de prendre toute mesure nécessaire pour préserver la sécurité de ses dispositifs de sécurité personnalisés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'il ressortait de l'audition de [G] [H] que "([R] [W]) ne s'est pas méfiée de son interlocuteur qui ne lui demandait pas de mot de passe (?) ; qu'elle a renouvelé la création d'une signature électronique, son interlocuteur prétendant que la manoeuvre n'avait pas réussi" ; qu'elle a également relevé que l'audition de [R] [W] confirmait qu'elle s'est connectée avec le boîtier et la carte, mais sans le mot de passe ", que l'escroc lui a alors demandé de se connecter et de se déconnecter à plusieurs reprises, puis de saisir la clef d'accès créée par le boîtier. Prétendant que cela ne fonctionnait pas, il lui a demandé d'essayer avec une autre clef d'accès qu'il lui a communiquée. Il lui a refait manipuler le boîtier à plusieurs reprises en l' ¿embrouillant', puis lui a demandé de confirmer que le code qu'il lui indiquait au téléphone s'affichait, ce qui était le cas. Il lui a fait appuyer sur un ou deux boutons du boîtier, lui a demandé d'attendre et de confirmer. [R] [W] pense que c'est ce qui a créé une signature pour les virements " ; qu'il résultait de ces constatations que Mme [W] avait utilisé une CTS permettant de créer une signature pour la validation des virements internationaux, à savoir celle de [G] [H] ; qu'en affirmant, au contraire, qu' "il ne ressort pas de l'enquête de gendarmerie que [R] [W] ait utilisé la Carte Transfert Sécurisé de [G] [H] ", la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 133-16 et L. 133-19 du code monétaire et financier. »
Réponse de la Cour
5. Après avoir exactement énoncé que, dans l'hypothèse d'ordres de paiement non autorisés, il appartient à la banque de fournir les éléments afin de prouver la faute ou la négligence grave commise par sa cliente, l'arrêt, se fondant sur les auditions par les services d'enquête du dirigeant et de l'employée de la société, retient que la secrétaire de cette société avait reçu un appel téléphonique d'un soi-disant employé de la banque l'avertissant d'une panne informatique qui avait fait disparaitre les écritures du matin, et qu'à la demande de l'escroc, cette employée, après s'être connectée au service de paiement en ligne à l'aide du dispositif de sécurité personnalisé mais sans le mot de passe, avait effectué diverses manipulations afin de reconstituer les écritures sans se méfier de son interlocuteur qui ne lui demandait pas de mot de passe. Il relève que la circonstance que l'escroc ait pu usurper un numéro de téléphone de la banque et annoncer le code qui s'affichait sur l'écran de l'utilisatrice était de nature à persuader celle-ci qu'elle était en relation avec un technicien. Il ajoute que la connaissance par son interlocuteur des opérations réalisées avant l'appel et de leur disparition pouvait la conforter dans la croyance qu'un incident informatique était survenu. Il retient encore que l'historique des opérations versé aux débats par la société révèle que le numéro d'abonné du titulaire de la carte de transfert sécurisé n'était pas attaché à la validation des tiers.
6. De ces constatations et appréciations, la cour d'appel a pu déduire que la société n'avait pas commis de négligence grave dans la conservation et l'utilisation de ses données personnelles de sécurité.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.
Crim. 11 juin 2025 n° 23-83.474 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° G 23-83.474 FS-B
N° 00689
SL2 11 JUIN 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JUIN 2025
Les sociétés [8], [2], [1] et [7], parties civiles, ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-14, en date du 23 mai 2023, qui les a déboutées de leurs demandes après relaxe de M. [D] [I] et de la société [5] notamment des chefs de contrefaçons.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de M. Samuel, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat des sociétés [2], [1] et [7], les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, Lassalle-Byhet, avocat de la société [8], les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [D] [I] et de la société [5], et les conclusions de M. Desportes, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Samuel, conseiller rapporteur, MM. Sottet, Coirre, Mme Hairon, M. Busché, Mme Carbonaro, conseillers de la chambre, MM. Joly, Leblanc, Charmoillaux, Rouvière, conseillers référendaires, M. Desportes, premier avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Une enquête a établi que la société [5] (la société), filiale du groupe espagnol [4] et dont le dirigeant est M. [D] [I], revendait des rétroviseurs fabriqués par ce groupe, lui-même équipementier de première monte des constructeurs français [8], [6] et [3].
3. A l'issue de l'information ouverte sur ces faits, la société et M. [I] ont été renvoyés de divers chefs devant le tribunal correctionnel qui les a déclarés coupables notamment de détention de marchandises présentées sous une marque contrefaisante, importation et vente ou mise en vente de telles marchandises, détention de marchandises contrefaisantes (dessin ou modèle) sans document justificatif régulier constitutive d'un fait réputé importation en contrebande, importation sans déclaration en douane applicable à une marchandise prohibée.
4. Le premier juge a également prononcé sur les intérêts civils en allouant diverses sommes aux sociétés [8], [2], [1] et [7], constituées parties civiles.
5. Les deux prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le troisième moyen, pris en ses cinquième et sixième branches, proposé pour la société [8] et le premier moyen, pris en ses cinquième et sixième branches, proposé pour les sociétés [2], [1] et [7]
6. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen, pris en ses quatre premières branches, proposé pour les sociétés [2], [1] et [7] et le premier moyen et le troisième moyen, pris en ses quatre premières branches, proposés pour la société [8]
Enoncé des moyens
7. Le moyen proposé pour les sociétés [2], [1] et [7] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il les a déboutées de l'intégralité de leurs demandes après avoir renvoyé les prévenus des fins de la poursuite du chef de contrefaçon de dessins et modèles, alors :
« 1°/ que le principe de l'application immédiate de la loi pénale plus douce ne trouve pas à s'appliquer lorsque les poursuites ont été engagées à raison d'un comportement qui reste incriminé et que les sanctions encourues n'ont pas été modifiées dans un sens moins sévère ; que pour infirmer le jugement ayant déclaré les prévenus coupables de contrefaçons de dessins et modèles, pour avoir porté atteinte au droit des sociétés [2], [1] et [7], sciemment, sans leur consentement, par la détention, l'offre à la vente, la mise sur le marché et l'importation de rétroviseurs incorporant le dessin ou le modèle protégé, en violation des droits conférés par l'enregistrement du modèle, la cour d'appel affirme qu'il « est exact que la loi du 22 août 2021 n'a modifié ni les peines encourues, ni la définition de la protection des dessins et modèles, mais elle a en revanche créé un régime exonératoire de responsabilité pénale, dont peut se prévaloir l'équipementier d'origine. [Que] cette modification, qui diminue le champ d'incrimination, est une loi pénale plus douce, puisque favorable au prévenu » ; qu'en prononçant ainsi quand ces dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle limitant la protection conférée par l'enregistrement d'un dessin ou modèle et précisant les objets susceptibles de bénéficier de cette protection n'étaient pas de nature pénale et ne pouvaient s'appliquer aux infractions commises avant leur entrée en vigueur dès lors que la définition du délit de contrefaçon par les articles L. 513-4 et L. 521-1 du code de la propriété intellectuelle, comme les sanctions pénales prévues par l'article L. 521-10 du même code, demeuraient en vigueur et n'avaient pas été modifiées, la cour d'appel a méconnu les articles 112-1, alinéa 3, du code pénal, L. 513-4, L. 521-1 et L. 521-10 du code de la propriété intellectuelle, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ que en vertu des propres énonciations de l'article 32 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle limitant la protection des dessins et modèles n'entreront en vigueur qu'à compter du 1er janvier 2023 ; qu'il en résulte que ces dispositions ne peuvent s'appliquer que pour l'avenir sans pouvoir effacer rétroactivement les atteintes portées aux droits légalement conférés par l'enregistrement de dessins et modèles antérieurement au 1er janvier 2023 ; qu'en décidant néanmoins de l'application rétroactive de ces dispositions, cependant que les titres de propriété intellectuelle dont disposaient les sociétés parties civiles sur les rétroviseurs litigieux s'agissant des dessins et modèles, étaient opposables à la société [5] et à M. [I] à l'époque des faits, sans pouvoir être remis en cause par les dispositions nouvelles applicables aux seuls faits de fabrication et commercialisation postérieurs au 1er janvier 2023, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 32 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 et privé sa décision de toute base légale au regard des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que toute personne a droit à la propriété et nul ne peut être privé arbitrairement de propriété ; qu'il est constant que la protection juridique des droits de propriété intellectuelle ne peut être annulée que par une décision de justice ; qu'en l'absence de toute annulation des droits de propriété intellectuelle dont disposaient les sociétés [2], [1] et [7] sur les rétroviseurs litigieux par une décision de justice, l'entrée en vigueur de la loi du 22 août 2021, dont il est expressément précisé qu'elle ne pouvait intervenir qu'à compter du 1er janvier 2023, ne pouvait disposer que pour l'avenir sans pouvoir remettre en cause rétroactivement des droits dont la validité n'était nullement contestée, sauf à porter une atteinte injustifiée au droit de propriété des titulaires des droits ; que pour appliquer néanmoins rétroactivement la loi du 22 août 2021, la cour d'appel se borne à affirmer que « cette rétroactivité n'éta[i]t pas contraire à la protection du droit de propriété » ; qu'en prononçant ainsi quand l'application rétroactive de la loi en cause revenait à priver arbitrairement le titulaire d'un titre de son droit de propriété, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision, et méconnu les articles 112-1 du code pénal, Ier du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme, 17 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
4°/ que, subsidiairement, même à supposer que les dispositions de l'article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021, puissent être considérées comme rétroactivement applicables aux faits de la présente espèce, ces dispositions limitent expressément les droits conférés par l'enregistrement d'un dessin ou modèle aux seuls « actes visant à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur ou à une remorque, au sens de l'article L. 110-1 du code de la route, et qui », à l'exception des pièces relatives au vitrage, « sont réalisés par l'équipementier ayant fabriqué la pièce d'origine » ; que pour faire néanmoins bénéficier de ces dispositions les prévenus dont il n'était pas contesté qu'ils n'étaient pas un équipementier ayant fabriqué la pièce d'origine, mais un simple distributeur, la cour d'appel affirme, après avoir rappelé que « le législateur a souhaité mettre fin à la protection des pièces contribuant à l'apparence d'un véhicule pour favoriser le consommateur », que « les participants à la chaîne commerciale entre l'équipementier et le consommateur ne peuvent donc être poursuivis » ; qu'en prononçant ainsi par une interprétation extensive et contraire au texte des dispositions litigieuses que rien ne justifiait, s'agissant d'une exception aux droits, se devant au contraire d'être interprétée de manière restrictive, au regard de surcroît des appréhensions ayant entouré les différents projets législatifs allant dans le sens d'une libéralisation, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle et privé sa décision de toute base légale. »
8. Le premier moyen proposé pour la société [8] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes au titre de son action civile exercée contre la société [5] et M. [I], alors « qu'il résulte de l'article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle que seul l'équipementier ayant fabriqué la pièce d'origine peut bénéficier de l'exception aux droits conférés par l'enregistrement d'un dessin ou d'un modèle prévue par ce texte ; qu'en retenant, pour écarter toute faute de la société [5] et de M. [I] et, partant, rejeter les demandes au titre de l'action civile, qu'en application de l'article L. 513-6, 4°, b), du code de la propriété intellectuelle, « les participants à la chaîne commerciale entre l'équipementier et le consommateur ne peuvent [...] être poursuivis » (cf. arrêt, p. 14, in medio), la chambre des appels correctionnelle a méconnu le texte précité. »
9. Le troisième moyen proposé pour la société [8] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes au titre de son action civile exercée contre la société [5] et M. [I], alors :
« 1°/ que le principe de l'application immédiate de la loi pénale plus douce ne trouve pas à s'appliquer lorsque les poursuites ont été engagées à raison d'un comportement qui reste incriminé et que les sanctions encourues n'ont pas été modifiées dans un sens moins sévère ; que pour écarter la contrefaçon de dessins et modèles, la cour d'appel a retenu qu'il « est exact que la loi du 22 août 2021 n'a modifié ni les peines encourues, ni la définition de la protection des dessins et modèles, mais elle a en revanche créé un régime exonératoire de responsabilité pénale, dont peut se prévaloir l'équipementier d'origine. [Que] cette modification, qui diminue le champ d'incrimination, est une loi pénale plus douce, puisque favorable au prévenu » ; qu'en prononçant ainsi, quand ces dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle limitant la protection conférée par l'enregistrement d'un dessin ou modèle et précisant les objets susceptibles de bénéficier de cette protection n'étaient pas de nature pénale et ne pouvaient s'appliquer aux infractions commises avant leur entrée en vigueur dès lors que la définition du délit de contrefaçon par les articles L. 513-4 et L. 521-1 du code de la propriété intellectuelle, comme les sanctions pénales prévues par l'article L. 521-10 du même code, demeuraient en vigueur et n'avaient pas été modifiées, la cour d'appel a méconnu les articles 112-1 alinéa 3 du code pénal, L. 513-4, L. 521-1 et L. 521-10 du code de la propriété intellectuelle, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ qu'en vertu des propres énonciations de l'article 32 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle limitant la protection des dessins et modèles n'entreront en vigueur qu'à compter du 1er janvier 2023 ; qu'il en résulte que ces dispositions ne peuvent s'appliquer que pour l'avenir sans pouvoir effacer rétroactivement les atteintes portées aux droits légalement conférés par l'enregistrement de dessins et modèles antérieurement au 1er janvier 2023 ; qu'en décidant néanmoins de l'application rétroactive de ces dispositions, cependant que les droits de propriété intellectuelle dont disposait la société [8], partie civile, sur les rétroviseurs litigieux s'agissant des dessins et modèles, étaient opposables à la société [5] et à M. [I] à l'époque des faits, sans pouvoir être remis en cause par les dispositions nouvelles applicables aux seuls faits de fabrication et commercialisation postérieurs au 1er janvier 2023, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 32 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 et privé sa décision de toute base légale au regard des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que toute personne a droit à la propriété et nul ne peut être privé arbitrairement de propriété ; qu'en l'absence de toute annulation des droits de propriété intellectuelle dont disposait la société [8] sur les rétroviseurs litigieux par une décision de justice, l'entrée en vigueur de la loi du 22 août 2021, dont il est expressément précisé qu'elle ne pouvait intervenir qu'à compter du 1er janvier 2023, ne pouvait disposer que pour l'avenir sans pouvoir remettre en cause rétroactivement des droits dont la validité n'était nullement contestée, sauf à porter une atteinte injustifiée au droit de propriété des titulaires des droits ; que pour appliquer néanmoins rétroactivement la loi du 22 août 2021, la cour d'appel se borne à affirmer que « cette rétroactivité n'éta[i]t pas contraire à la protection du droit de propriété » ; qu'en prononçant ainsi, quand l'application rétroactive de la loi en cause revenait à priver arbitrairement le titulaire d'un titre de son droit de propriété, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision, et méconnu les articles 112-1 du code pénal, 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme, 17 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
4°/ subsidiairement, qu'il résulte de l'article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle que seul l'équipementier ayant fabriqué la pièce d'origine peut bénéficier de l'exception aux droits conférés par l'enregistrement d'un dessin ou d'un modèle prévue par ce texte ; qu'en retenant, pour écarter toute faute de la société [5] et de M. [I] et, partant, rejeter les demandes au titre de l'action civile, qu'en application de l'article L. 513-6, 4°, b), du code de la propriété intellectuelle, « les participants à la chaîne commerciale entre l'équipementier et le consommateur ne peuvent [...] être poursuivis » (cf. arrêt, p. 14, in medio), la cour d'appel a méconnu le texte précité. »
Réponse de la Cour
10. Les moyens sont réunis.
11. Pour relaxer les prévenus du chef de contrefaçon par atteinte aux droits des dessins ou modèles, l'arrêt attaqué énonce que les incriminations et pénalités régissant la protection de ces droits sont prévues par les dispositions du chapitre I du titre II du livre V du code de la propriété intellectuelle et que la loi modifiant les textes définissant la répression de la violation de ces droits est une loi pénale lorsqu'elle a pour conséquence de changer les éléments constitutifs de cette infraction.
12. Les juges rappellent que la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a modifié l'article L. 513-6 de ce code en précisant, au 4°, que les droits conférés par l'enregistrement d'un dessin ou modèle ne s'exercent pas à l'égard d'actes qui visent à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur et qui sont réalisés par l'équipementier ayant fabriqué la pièce d'origine.
13. Pour appliquer immédiatement aux prévenus ces dispositions entrées en vigueur le 1er janvier 2023, postérieurement aux faits, ils retiennent qu'elles n'ont modifié ni les peines encourues ni la définition de la protection des dessins et modèles, mais qu'elles ont créé un régime exonératoire de responsabilité pénale dont peut se prévaloir l'équipementier d'origine et s'analysent en une loi pénale plus douce.
14. Ils précisent que l'exonération de responsabilité pénale de l'équipementier d'origine concerne les pièces qu'il fabrique et qu'il peut de ce fait librement céder, que les participants à la chaîne commerciale entre ce dernier et le consommateur ne peuvent donc être poursuivis et qu'une lecture contraire de la loi la rendrait inutile si l'équipementier ne pouvait pas céder les pièces qu'il produit licitement.
15. Ils relèvent enfin que l'application immédiate de ces dispositions n'est pas contraire au droit de propriété.
16. En statuant ainsi, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés aux moyens pour les motifs qui suivent.
17. En premier lieu, les dispositions législatives modifiant l'article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle ont redéfini, dans un sens favorable aux prévenus, le champ de l'incrimination pénale tendant à la protection des droits en matière de dessins et modèles.
18. En deuxième lieu, ces dispositions portent auxdits droits une atteinte proportionnée au but légitime poursuivi, les travaux parlementaires établissant qu'elles ont pour objet de favoriser, par l'ouverture à la concurrence du marché des pièces détachées visibles, l'entretien et la réparation des véhicules automobiles afin d'éviter que, en raison du coût excessif par rapport à leur amortissement, des véhicules qui pourraient continuer à rouler ne soient mis au rebut.
19. En troisième et dernier lieu, en interprétant ces dispositions comme étant applicables non seulement à l'équipementier d'origine, mais aussi à la chaîne commerciale existant entre lui et le consommateur, la cour d'appel leur a conféré leur exacte portée sans méconnaître le principe d'interprétation stricte de la loi pénale.
20. Ainsi, les moyens doivent être écartés.
Sur le deuxième moyen proposé pour les sociétés [2], [1] et [7] et le quatrième moyen proposé pour la société [8]
Enoncé des moyens
21. Le moyen proposé pour les sociétés [2], [1] et [7] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il les a déboutées de l'intégralité de leurs demandes après avoir renvoyé les prévenus des fins de la poursuite du chef de contrefaçon de droits d'auteur, alors :
« 1°/ que les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle instaurant une nouvelle exception au droit d'auteur, introduite à son article L. 122-5 12°, s'agissant de « la reproduction, l'utilisation et la commercialisation des pièces destinées à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur ou à une remorque, au sens de l'article L. 110-1 du code de la route » ne s'appliquent pas aux infractions commises avant leur entrée en vigueur, dès lors qu'elles ne sont pas de nature pénale et que le texte législatif support légal de l'incrimination demeure en vigueur ; que pour infirmer le jugement ayant déclaré les prévenus coupables de contrefaçons de droits d'auteur, pour avoir importé des oeuvres contrefaisantes au mépris des lois et réglements relatifs a la propriété de leur auteur, les sociétés [2], [1] et [7], la cour d'appel affirme « que les textes d'incrimination et de pénalité régissant la protection des droits d'auteur sont régis par les dispositions du livre I de la première partie du code de la propriété intellectuelle, qu'il en résulte que la modification de la protection de la propriété des droits d'auteur est une loi pénale lorsqu'elle a pour conséquence de modifier les éléments constitutifs d'une infraction » ; qu'en prononçant ainsi, quand l'exception au droit d'auteur introduite à l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle n'est pas un texte de nature pénale et que la définition comme les sanctions du délit de contrefaçon de droits d'auteur par les articles L. 335-2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle n'ont pas été modifiées et demeurent en vigueur, la cour d'appel a méconnu les articles 112-1 alinéa 3 du code pénal, L. 335-2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ que en vertu des propres énonciations de l'article 32 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021, les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle instaurant une nouvelle exception au droit d'auteur à son article L. 122-5 12° n'entreront en vigueur qu'à compter du 1er janvier 2023 ; qu'il en résulte que ces dispositions ne peuvent s'appliquer que pour l'avenir sans pouvoir effacer rétroactivement les atteintes portées aux droits d'auteur régulièrement protégés antérieurement au 1er janvier 2023 ; qu'en décidant néanmoins de l'application rétroactive de ces dispositions, cependant que les titres de propriété intellectuelle dont disposaient les sociétés parties civiles sur les rétroviseurs litigieux s"agissant des droits d'auteur, étaient opposables à la société [5] et à M. [I] à l'époque des faits, sans pouvoir être remis en cause par les dispositions nouvelles applicables aux seuls faits de commercialisation postérieurs au 1er janvier 2023, la cour d"appel a méconnu le sens et la portée de l'article 32 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 et privé sa décision de toute base légale au regard des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que toute personne a droit à la propriété et nul ne peut être privé arbitrairement de propriété ; qu'il n'est pas contesté que les sociétés [2], [1] et [7] bénéficiaient de la protection des droits d'auteur sur les rétroviseurs litigieux antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 22 août 2021, dont il est expressément précisé qu'elle ne pouvait intervenir qu'à compter du 1er janvier 2023 ; que cette loi ne pouvait disposer que pour l'avenir sauf à remettre en cause rétroactivement des droits dont la validité n'était nullement contestée, en violation du droit au respect des biens ; que pour appliquer néanmoins rétroactivement la loi du 22 août 2021, la cour d'appel se borne à affirmer que « cette rétroactivité n 'éta[i]t pas contraire à la protection du droit de propriété » ; qu'en prononçant ainsi quand l'application rétroactive de la loi en cause revenait à priver arbitrairement les sociétés parties civiles des droits de propriété intellectuelle dont elles disposaient sur les rétroviseurs litigieux, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision, en violation des articles 112-1 du code pénal, 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme, 17 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
22. Le moyen proposé pour la société [8] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes après avoir renvoyé les prévenus des fins de la poursuite du chef de contrefaçon de droits d'auteur, alors :
« 1°/ que les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle instaurant une nouvelle exception au droit d'auteur, introduite à son article L. 122-5, 12°, s'agissant de « la reproduction, l'utilisation et la commercialisation des pièces destinées à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur ou à une remorque, au sens de l'article L. 110-1 du code de la route » ne s'appliquent pas aux infractions commises avant leur entrée en vigueur, dès lors qu'elles ne sont pas de nature pénale et que le texte législatif support légal de l'incrimination demeure en vigueur ; que pour écarter la contrefaçon de droits d'auteur, la cour d'appel a relevé « que les textes d'incrimination et de pénalité régissant la protection des droits d'auteur sont régis par les dispositions du livre I de la première partie du code de la propriété intellectuelle, qu'il en résulte que la modification de la protection de la propriété des droits d'auteur est une loi pénale lorsqu'elle a pour conséquence de modifier les éléments constitutifs d'une infraction » ; qu'en prononçant ainsi, quand l'exception au droit d'auteur introduite à l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle n'est pas un texte de nature pénale et que la définition comme les sanctions du délit de contrefaçon de droits d'auteur par les articles L. 335-2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle n'ont pas été modifiées et demeurent en vigueur, la cour d'appel a méconnu les articles 112-1 alinéa 3 du code pénal, L. 335-2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ que en vertu des propres énonciations de l'article 32 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021, les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle instaurant une nouvelle exception au droit d'auteur, introduite à son article L. 122-5 12° n'entreront en vigueur qu'à compter du 1er janvier 2023 ; qu'il en résulte que ces dispositions ne peuvent s'appliquer que pour l'avenir sans pouvoir effacer rétroactivement les atteintes portées aux droits d'auteur régulièrement protégés antérieurement au 1er janvier 2023 ; qu'en décidant néanmoins de l'application rétroactive de ces dispositions, cependant que les droits d'auteur dont disposait la société [8] sur les rétroviseurs litigieux étaient opposables à la société [5] et à M. [I] à l'époque des faits, sans pouvoir être remis en cause par les dispositions nouvelles applicables aux seuls faits de commercialisation postérieurs au 1er janvier 2023, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 32 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 et privé sa décision de toute base légale au regard des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que toute personne a droit à la propriété et nul ne peut être privé arbitrairement de propriété ; qu'il n'est pas contesté que la société [8] bénéficiait de la protection des droits d'auteur sur les rétroviseurs litigieux antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 22 août 2021, dont il est expressément précisé qu'elle ne pouvait intervenir qu'à compter du 1er janvier 2023 ; que cette loi ne pouvait disposer que pour l'avenir sauf à remettre en cause rétroactivement des droits dont la validité n'était nullement contestée, en violation du droit au respect des biens ; que pour appliquer néanmoins rétroactivement la loi du 22 août 2021, la cour d'appel se borne à affirmer que « cette rétroactivité n'éta[i]t pas contraire à la protection du droit de propriété » ; qu'en prononçant ainsi, quand l'application rétroactive de la loi en cause revenait à priver arbitrairement la société [8] des droits de propriété intellectuelle dont elle disposait sur les rétroviseurs litigieux, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision en violation des articles 112-1 du code pénal, 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme, 17 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
23. Les moyens sont réunis.
24. Pour relaxer les prévenus du chef de contrefaçon par atteinte aux droits d'auteur, l'arrêt attaqué énonce que les textes d'incrimination et de pénalité régissent la protection de ces droits tels que prévus par les dispositions du livre I de la première partie du code de la propriété intellectuelle et qu'il en résulte que la modification de la protection de leur propriété constitue une loi pénale lorsqu'elle a pour conséquence de modifier les éléments constitutifs de cette infraction.
25. Les juges constatent que l'article L. 122-5, 12°, du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de la loi précitée du 22 août 2021, prévoit que l'auteur ne peut interdire la reproduction, l'utilisation et la commercialisation des pièces destinées à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur.
26. Ils retiennent que cette modification, qui diminue le champ d'incrimination, est une loi pénale plus douce et qu'elle s'applique immédiatement selon le principe rappelé par l'article 112-1, alinéa 3, du code pénal.
27. Ils précisent que cette rétroactivité n'est pas contraire à la protection du droit de propriété et que les pièces litigieuses, constituées de rétroviseurs, qui s'intègrent à l'esthétique et participent à l'apparence d'un véhicule terrestre à moteur, entrent dans le champ d'application des dispositions nouvelles.
28. En statuant ainsi, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés aux moyens.
29. En premier lieu, les dispositions législatives modifiant l'article L. 122-5, 12°, du code de la propriété intellectuelle ont redéfini, dans un sens favorable aux prévenus, le champ de l'incrimination pénale tendant à la protection des droits d'auteur.
30. En second lieu, il convient de se référer aux motifs figurant au paragraphe 18.
31. Ainsi, les moyens doivent être écartés.
Sur les deuxième et cinquième moyens proposés pour la société [8] et le troisième moyen proposé pour les sociétés [2], [1] et [7]
Enoncé des moyens
32. Le deuxième moyen proposé pour la société [8] critique l'arrêt infirmatif attaqué en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes au titre de son action civile exercée contre la société [5] et M. [I], alors :
« 1°/ que pour écarter la contrefaçon de marques, la cour d'appel a retenu que « les rétroviseurs litigieux n'étant pas soumis à la protection au titre des dessins et modèles ni à celle des droits d'auteur, ils ont la qualité de pièce libre de droit » et qu'il en résultait que l'utilisation des noms des modèles de voitures était conforme aux dispositions de l'article L. 713-6 du code de la propriété intellectuelle (arrêt, p. 17) ; que la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen entraînera donc, par voie de conséquence, celle de l'arrêt en ce qu'il a rejeté les demandes de la société [8] au titre de son action civile pour contrefaçon de marques ;
2°/ qu'aux termes de l'article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle, est constitutif du délit de contrefaçon de marques le fait de détenir sans motif légitime, d'importer, d'exporter, d'offrir à la vente ou de vendre des marchandises sous une marque contrefaisante, notamment par suppression de la marque ; qu'en l'espèce, tout en relevant qu'il était « exact que les rétroviseurs portaient les références des marques [6] ou [8] ou un logo distinctif, références qui ont été supprimées par grattage », la cour d'appel a simplement retenu, pour écarter la contrefaçon de marque, que ce délit aurait été commis par le fabricant espagnol, non poursuivi et ayant fait l'objet d'une relaxe (arrêt, p. 17) ; qu'en statuant par un tel motif inopérant, cependant qu'indépendamment du point de savoir qui était l'auteur des actes de suppression, le simple fait de détenir sans motif légitime, d'importer, d'exporter, d'offrir à la vente ou de vendre les rétroviseurs litigieux, sur lesquels les références des marques de la société [8] avaient été supprimées, caractérisait une contrefaçon de marques, la cour d'appel a violé l'article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle. »
33. Le cinquième moyen proposé pour la société [8] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes après avoir renvoyé les prévenus des fins de poursuite du chef de contrefaçon de marques, alors « que la cassation à intervenir sur les troisième et/ou quatrième moyen entraînera, par voie de conséquence, celle de l'arrêt en ce qu'il a rejeté les demandes de la société [8] au titre de son action civile pour contrefaçon de marques. »
34. Le troisième moyen proposé pour les sociétés [2], [1] et [7] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il les a déboutées de l'intégralité de leurs demandes après avoir renvoyé les prévenus des fins de la poursuite du chef de contrefaçon de marques, alors :
« 1°/ que la cassation à intervenir sur l'un comme l'autre des deux premiers moyens privera nécessairement de fondement les dispositions de l'arrêt ayant débouté les parties civiles de leurs demandes ensuite de la relaxe prononcée du chef de contrefaçon de marques ; qu'en effet la cassation des dispositions de l'arrêt ayant conclu à la relaxe tant s'agissant des faits de contrefaçon de dessins et modèles que de contrefaçon de droit d'auteur, dont il résultera que les rétroviseurs litigieux n'étaient pas des pièces libres de droit ne pourra qu'entraîner la cassation des dispositions de l'arrêt relatives à la contrefaçon de marque, dont la relaxe a été justifiée par la cour d'appel, aux motifs que, « contrairement aux arguments de la défense, les rétroviseurs litigieux n'étant pas soumis à la protection au titre des dessins et modèles ni à celle des droits d'auteur, ils ont la qualité de pièce libre de droit ;
2°/ que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'il résulte en l'espèce des propres constatations de l'arrêt attaqué « qu'il est exact que les rétroviseurs portaient les références des marques [6] ou [8] ou un logo distinctif références qui ont été supprimées par grattage, ce délit commis par le fabricant espagnol, non poursuivi, ayant fait l'objet d'une relaxe » ; que le monopole conféré aux sociétés [2], [1] et [7] par le droit de marques qu'elles détiennent les autorisait à s'opposer à toute commercialisation en France de pièces sur lesquelles les marques [6] ou [3] avaient été supprimées ; qu'en justifiant la relaxe des prévenus du chef de contrefaçon de marque de leur seule relaxe du chef de suppression de marque dont la commission était imputée au seul fabricant espagnol, quand la simple détention, offre en vente ou vente de telles pièces était constitutive du délit de contrefaçon, indépendamment des actes délictueux commis par le fabricant lui-même, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
35. Les moyens sont réunis.
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, et le cinquième moyen proposés pour la société [8], et le troisième moyen, pris en sa première branche, proposé pour les sociétés [2], [1] et [7]
36. Les griefs sont devenus inopérants, par suite du rejet des premier, troisième et quatrième moyens proposés pour la société [8] et des premier et deuxième moyens proposés pour les sociétés [2], [1] et [7].
Sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, proposé pour la société [8], et le troisième moyen, pris en sa seconde branche, proposé pour les sociétés [2], [1] et [7]
37. Pour relaxer les prévenus du chef de contrefaçon de marques, l'arrêt attaqué énonce, s'agissant de la suppression de la référence des marques ou logos sur les rétroviseurs [6] ou [8], qu'elle a été effectuée par le fabricant espagnol qui n'a pas été poursuivi, de sorte que les prévenus, poursuivis du chef de suppression des marques en violation des droits conférés par leur enregistrement, ont été relaxés et que cette décision est définitive par suite de la limitation de l'appel du parquet.
38. En l'état de ces énonciations, et dès lors que l'article L. 706-10, b), du code de la propriété intellectuelle, dans sa version en vigueur du 22 décembre 2007 au 16 mars 2011 applicable aux faits, n'incrimine ni la détention, ni l'offre à la vente, ni la vente de marchandises sur lesquelles les marques ont été supprimées, mais seulement la vente de marchandises présentées sous une marque contrefaisante, l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués.
39. Dès lors, les moyens doivent être écartés.
40. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
Crim. 11 juin 2025 n° 24-86.313 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 24-86.313 F-B
N° 00773
SB4 11 JUIN 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JUIN 2025
M. [V] [E] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-9, en date du 26 septembre 2024, qui, pour exercice illégal de la profession de médecin et tromperie aggravée, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis, 15 000 euros d'amende et une interdiction professionnelle définitive, a ordonné la publication de la décision, et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire personnel et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, et les conclusions de Mme Gulphe-Berbain, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [V] [E], radié du tableau de l'ordre des médecins depuis le 1er mars 2018, a poursuivi après cette date une activité dans le cadre de laquelle il se présentait notamment comme « naturopathe ».
3. Il a été poursuivi des chefs d'exercice illégal de la profession de médecin et tromperie sur une prestation de service entraînant un danger pour la santé de l'homme et de l'animal.
4. Le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable de ces chefs, l'a condamné à diverses peines, et a prononcé sur les intérêts civils.
5. M. [E] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses première et deuxième branches, les troisième, quatrième et cinquième moyens
6. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté le moyen de nullité de la perquisition réalisée au cabinet du prévenu, alors :
3°/ qu'en jugeant régulière la présence d'un représentant du conseil de l'ordre lors de la perquisition, sans répondre au prévenu qui faisait valoir qu'en raison de sa radiation définitive du tableau de l'ordre des médecins, il ne relevait plus du régime légal, réglementaire et disciplinaire applicable à cette profession, de sorte que la présence d'un tiers représentant l'un des plaignants portait atteinte aux principes d'impartialité, de neutralité et de secret de l'enquête, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles 11, 56-3 du code de procédure pénale et R. 4127-4 du code de la santé publique.
Réponse de la Cour
8. Pour écarter le moyen de nullité de la perquisition des locaux professionnels du prévenu, l'arrêt attaqué énonce que la présence d'un membre du conseil départemental de l'ordre des médecins, imposée par l'article 56-3 du code de procédure pénale, est justifiée tant par la nature des faits reprochés que par l'ancienne qualité de médecin du prévenu.
9. Les juges retiennent que la présence de ce représentant permet de garantir le respect du secret médical des patients ou anciens patients de M. [E].
10. Ils ajoutent que l'intéressé ne démontre l'existence d'aucun grief.
11. C'est à tort que la cour d'appel a, d'une part, retenu que la présence d'un représentant du conseil départemental de l'ordre des médecin était imposée par l'article 56-3 du code de procédure pénale, alors que ce texte ne s'appliquait plus à M. [E], radié du tableau de l'ordre des médecins, d'autre part, fondé sa décision sur l'inexistence d'un grief alors que la présence, lors d'une perquisition, d'un tiers étranger à la procédure est de nature à constituer une violation du secret de l'enquête portant nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée.
12. Cependant, l'arrêt n'encourt pas la censure, dès lors que les juges se sont déterminés par des motifs dont il résulte que la présence d'un représentant du conseil départemental de l'ordre des médecins, requise par le magistrat du ministère public, était au nombre des mesures prises en application de l'article 56, alinéa 3, du code de procédure pénale pour que soit assuré le respect du secret professionnel.
13. Ainsi, le moyen doit être écarté.
14. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
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