Crim. 11 juin 2025 n° 24-86.313 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 24-86.313 F-B
N° 00773
SB4 11 JUIN 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JUIN 2025
M. [V] [E] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-9, en date du 26 septembre 2024, qui, pour exercice illégal de la profession de médecin et tromperie aggravée, l'a condamné à un an d'emprisonnement avec sursis, 15 000 euros d'amende et une interdiction professionnelle définitive, a ordonné la publication de la décision, et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire personnel et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, et les conclusions de Mme Gulphe-Berbain, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [V] [E], radié du tableau de l'ordre des médecins depuis le 1er mars 2018, a poursuivi après cette date une activité dans le cadre de laquelle il se présentait notamment comme « naturopathe ».
3. Il a été poursuivi des chefs d'exercice illégal de la profession de médecin et tromperie sur une prestation de service entraînant un danger pour la santé de l'homme et de l'animal.
4. Le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable de ces chefs, l'a condamné à diverses peines, et a prononcé sur les intérêts civils.
5. M. [E] et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses première et deuxième branches, les troisième, quatrième et cinquième moyens
6. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté le moyen de nullité de la perquisition réalisée au cabinet du prévenu, alors :
3°/ qu'en jugeant régulière la présence d'un représentant du conseil de l'ordre lors de la perquisition, sans répondre au prévenu qui faisait valoir qu'en raison de sa radiation définitive du tableau de l'ordre des médecins, il ne relevait plus du régime légal, réglementaire et disciplinaire applicable à cette profession, de sorte que la présence d'un tiers représentant l'un des plaignants portait atteinte aux principes d'impartialité, de neutralité et de secret de l'enquête, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles 11, 56-3 du code de procédure pénale et R. 4127-4 du code de la santé publique.
Réponse de la Cour
8. Pour écarter le moyen de nullité de la perquisition des locaux professionnels du prévenu, l'arrêt attaqué énonce que la présence d'un membre du conseil départemental de l'ordre des médecins, imposée par l'article 56-3 du code de procédure pénale, est justifiée tant par la nature des faits reprochés que par l'ancienne qualité de médecin du prévenu.
9. Les juges retiennent que la présence de ce représentant permet de garantir le respect du secret médical des patients ou anciens patients de M. [E].
10. Ils ajoutent que l'intéressé ne démontre l'existence d'aucun grief.
11. C'est à tort que la cour d'appel a, d'une part, retenu que la présence d'un représentant du conseil départemental de l'ordre des médecin était imposée par l'article 56-3 du code de procédure pénale, alors que ce texte ne s'appliquait plus à M. [E], radié du tableau de l'ordre des médecins, d'autre part, fondé sa décision sur l'inexistence d'un grief alors que la présence, lors d'une perquisition, d'un tiers étranger à la procédure est de nature à constituer une violation du secret de l'enquête portant nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée.
12. Cependant, l'arrêt n'encourt pas la censure, dès lors que les juges se sont déterminés par des motifs dont il résulte que la présence d'un représentant du conseil départemental de l'ordre des médecins, requise par le magistrat du ministère public, était au nombre des mesures prises en application de l'article 56, alinéa 3, du code de procédure pénale pour que soit assuré le respect du secret professionnel.
13. Ainsi, le moyen doit être écarté.
14. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
Crim. 11 juin 2025 n° 23-83.474 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° G 23-83.474 FS-B
N° 00689
SL2 11 JUIN 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JUIN 2025
Les sociétés [8], [2], [1] et [7], parties civiles, ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-14, en date du 23 mai 2023, qui les a déboutées de leurs demandes après relaxe de M. [D] [I] et de la société [5] notamment des chefs de contrefaçons.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de M. Samuel, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat des sociétés [2], [1] et [7], les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, Lassalle-Byhet, avocat de la société [8], les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [D] [I] et de la société [5], et les conclusions de M. Desportes, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Samuel, conseiller rapporteur, MM. Sottet, Coirre, Mme Hairon, M. Busché, Mme Carbonaro, conseillers de la chambre, MM. Joly, Leblanc, Charmoillaux, Rouvière, conseillers référendaires, M. Desportes, premier avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Une enquête a établi que la société [5] (la société), filiale du groupe espagnol [4] et dont le dirigeant est M. [D] [I], revendait des rétroviseurs fabriqués par ce groupe, lui-même équipementier de première monte des constructeurs français [8], [6] et [3].
3. A l'issue de l'information ouverte sur ces faits, la société et M. [I] ont été renvoyés de divers chefs devant le tribunal correctionnel qui les a déclarés coupables notamment de détention de marchandises présentées sous une marque contrefaisante, importation et vente ou mise en vente de telles marchandises, détention de marchandises contrefaisantes (dessin ou modèle) sans document justificatif régulier constitutive d'un fait réputé importation en contrebande, importation sans déclaration en douane applicable à une marchandise prohibée.
4. Le premier juge a également prononcé sur les intérêts civils en allouant diverses sommes aux sociétés [8], [2], [1] et [7], constituées parties civiles.
5. Les deux prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le troisième moyen, pris en ses cinquième et sixième branches, proposé pour la société [8] et le premier moyen, pris en ses cinquième et sixième branches, proposé pour les sociétés [2], [1] et [7]
6. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen, pris en ses quatre premières branches, proposé pour les sociétés [2], [1] et [7] et le premier moyen et le troisième moyen, pris en ses quatre premières branches, proposés pour la société [8]
Enoncé des moyens
7. Le moyen proposé pour les sociétés [2], [1] et [7] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il les a déboutées de l'intégralité de leurs demandes après avoir renvoyé les prévenus des fins de la poursuite du chef de contrefaçon de dessins et modèles, alors :
« 1°/ que le principe de l'application immédiate de la loi pénale plus douce ne trouve pas à s'appliquer lorsque les poursuites ont été engagées à raison d'un comportement qui reste incriminé et que les sanctions encourues n'ont pas été modifiées dans un sens moins sévère ; que pour infirmer le jugement ayant déclaré les prévenus coupables de contrefaçons de dessins et modèles, pour avoir porté atteinte au droit des sociétés [2], [1] et [7], sciemment, sans leur consentement, par la détention, l'offre à la vente, la mise sur le marché et l'importation de rétroviseurs incorporant le dessin ou le modèle protégé, en violation des droits conférés par l'enregistrement du modèle, la cour d'appel affirme qu'il « est exact que la loi du 22 août 2021 n'a modifié ni les peines encourues, ni la définition de la protection des dessins et modèles, mais elle a en revanche créé un régime exonératoire de responsabilité pénale, dont peut se prévaloir l'équipementier d'origine. [Que] cette modification, qui diminue le champ d'incrimination, est une loi pénale plus douce, puisque favorable au prévenu » ; qu'en prononçant ainsi quand ces dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle limitant la protection conférée par l'enregistrement d'un dessin ou modèle et précisant les objets susceptibles de bénéficier de cette protection n'étaient pas de nature pénale et ne pouvaient s'appliquer aux infractions commises avant leur entrée en vigueur dès lors que la définition du délit de contrefaçon par les articles L. 513-4 et L. 521-1 du code de la propriété intellectuelle, comme les sanctions pénales prévues par l'article L. 521-10 du même code, demeuraient en vigueur et n'avaient pas été modifiées, la cour d'appel a méconnu les articles 112-1, alinéa 3, du code pénal, L. 513-4, L. 521-1 et L. 521-10 du code de la propriété intellectuelle, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ que en vertu des propres énonciations de l'article 32 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle limitant la protection des dessins et modèles n'entreront en vigueur qu'à compter du 1er janvier 2023 ; qu'il en résulte que ces dispositions ne peuvent s'appliquer que pour l'avenir sans pouvoir effacer rétroactivement les atteintes portées aux droits légalement conférés par l'enregistrement de dessins et modèles antérieurement au 1er janvier 2023 ; qu'en décidant néanmoins de l'application rétroactive de ces dispositions, cependant que les titres de propriété intellectuelle dont disposaient les sociétés parties civiles sur les rétroviseurs litigieux s'agissant des dessins et modèles, étaient opposables à la société [5] et à M. [I] à l'époque des faits, sans pouvoir être remis en cause par les dispositions nouvelles applicables aux seuls faits de fabrication et commercialisation postérieurs au 1er janvier 2023, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 32 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 et privé sa décision de toute base légale au regard des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que toute personne a droit à la propriété et nul ne peut être privé arbitrairement de propriété ; qu'il est constant que la protection juridique des droits de propriété intellectuelle ne peut être annulée que par une décision de justice ; qu'en l'absence de toute annulation des droits de propriété intellectuelle dont disposaient les sociétés [2], [1] et [7] sur les rétroviseurs litigieux par une décision de justice, l'entrée en vigueur de la loi du 22 août 2021, dont il est expressément précisé qu'elle ne pouvait intervenir qu'à compter du 1er janvier 2023, ne pouvait disposer que pour l'avenir sans pouvoir remettre en cause rétroactivement des droits dont la validité n'était nullement contestée, sauf à porter une atteinte injustifiée au droit de propriété des titulaires des droits ; que pour appliquer néanmoins rétroactivement la loi du 22 août 2021, la cour d'appel se borne à affirmer que « cette rétroactivité n'éta[i]t pas contraire à la protection du droit de propriété » ; qu'en prononçant ainsi quand l'application rétroactive de la loi en cause revenait à priver arbitrairement le titulaire d'un titre de son droit de propriété, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision, et méconnu les articles 112-1 du code pénal, Ier du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme, 17 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
4°/ que, subsidiairement, même à supposer que les dispositions de l'article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021, puissent être considérées comme rétroactivement applicables aux faits de la présente espèce, ces dispositions limitent expressément les droits conférés par l'enregistrement d'un dessin ou modèle aux seuls « actes visant à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur ou à une remorque, au sens de l'article L. 110-1 du code de la route, et qui », à l'exception des pièces relatives au vitrage, « sont réalisés par l'équipementier ayant fabriqué la pièce d'origine » ; que pour faire néanmoins bénéficier de ces dispositions les prévenus dont il n'était pas contesté qu'ils n'étaient pas un équipementier ayant fabriqué la pièce d'origine, mais un simple distributeur, la cour d'appel affirme, après avoir rappelé que « le législateur a souhaité mettre fin à la protection des pièces contribuant à l'apparence d'un véhicule pour favoriser le consommateur », que « les participants à la chaîne commerciale entre l'équipementier et le consommateur ne peuvent donc être poursuivis » ; qu'en prononçant ainsi par une interprétation extensive et contraire au texte des dispositions litigieuses que rien ne justifiait, s'agissant d'une exception aux droits, se devant au contraire d'être interprétée de manière restrictive, au regard de surcroît des appréhensions ayant entouré les différents projets législatifs allant dans le sens d'une libéralisation, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle et privé sa décision de toute base légale. »
8. Le premier moyen proposé pour la société [8] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes au titre de son action civile exercée contre la société [5] et M. [I], alors « qu'il résulte de l'article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle que seul l'équipementier ayant fabriqué la pièce d'origine peut bénéficier de l'exception aux droits conférés par l'enregistrement d'un dessin ou d'un modèle prévue par ce texte ; qu'en retenant, pour écarter toute faute de la société [5] et de M. [I] et, partant, rejeter les demandes au titre de l'action civile, qu'en application de l'article L. 513-6, 4°, b), du code de la propriété intellectuelle, « les participants à la chaîne commerciale entre l'équipementier et le consommateur ne peuvent [...] être poursuivis » (cf. arrêt, p. 14, in medio), la chambre des appels correctionnelle a méconnu le texte précité. »
9. Le troisième moyen proposé pour la société [8] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes au titre de son action civile exercée contre la société [5] et M. [I], alors :
« 1°/ que le principe de l'application immédiate de la loi pénale plus douce ne trouve pas à s'appliquer lorsque les poursuites ont été engagées à raison d'un comportement qui reste incriminé et que les sanctions encourues n'ont pas été modifiées dans un sens moins sévère ; que pour écarter la contrefaçon de dessins et modèles, la cour d'appel a retenu qu'il « est exact que la loi du 22 août 2021 n'a modifié ni les peines encourues, ni la définition de la protection des dessins et modèles, mais elle a en revanche créé un régime exonératoire de responsabilité pénale, dont peut se prévaloir l'équipementier d'origine. [Que] cette modification, qui diminue le champ d'incrimination, est une loi pénale plus douce, puisque favorable au prévenu » ; qu'en prononçant ainsi, quand ces dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle limitant la protection conférée par l'enregistrement d'un dessin ou modèle et précisant les objets susceptibles de bénéficier de cette protection n'étaient pas de nature pénale et ne pouvaient s'appliquer aux infractions commises avant leur entrée en vigueur dès lors que la définition du délit de contrefaçon par les articles L. 513-4 et L. 521-1 du code de la propriété intellectuelle, comme les sanctions pénales prévues par l'article L. 521-10 du même code, demeuraient en vigueur et n'avaient pas été modifiées, la cour d'appel a méconnu les articles 112-1 alinéa 3 du code pénal, L. 513-4, L. 521-1 et L. 521-10 du code de la propriété intellectuelle, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ qu'en vertu des propres énonciations de l'article 32 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle limitant la protection des dessins et modèles n'entreront en vigueur qu'à compter du 1er janvier 2023 ; qu'il en résulte que ces dispositions ne peuvent s'appliquer que pour l'avenir sans pouvoir effacer rétroactivement les atteintes portées aux droits légalement conférés par l'enregistrement de dessins et modèles antérieurement au 1er janvier 2023 ; qu'en décidant néanmoins de l'application rétroactive de ces dispositions, cependant que les droits de propriété intellectuelle dont disposait la société [8], partie civile, sur les rétroviseurs litigieux s'agissant des dessins et modèles, étaient opposables à la société [5] et à M. [I] à l'époque des faits, sans pouvoir être remis en cause par les dispositions nouvelles applicables aux seuls faits de fabrication et commercialisation postérieurs au 1er janvier 2023, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 32 de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 et privé sa décision de toute base légale au regard des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que toute personne a droit à la propriété et nul ne peut être privé arbitrairement de propriété ; qu'en l'absence de toute annulation des droits de propriété intellectuelle dont disposait la société [8] sur les rétroviseurs litigieux par une décision de justice, l'entrée en vigueur de la loi du 22 août 2021, dont il est expressément précisé qu'elle ne pouvait intervenir qu'à compter du 1er janvier 2023, ne pouvait disposer que pour l'avenir sans pouvoir remettre en cause rétroactivement des droits dont la validité n'était nullement contestée, sauf à porter une atteinte injustifiée au droit de propriété des titulaires des droits ; que pour appliquer néanmoins rétroactivement la loi du 22 août 2021, la cour d'appel se borne à affirmer que « cette rétroactivité n'éta[i]t pas contraire à la protection du droit de propriété » ; qu'en prononçant ainsi, quand l'application rétroactive de la loi en cause revenait à priver arbitrairement le titulaire d'un titre de son droit de propriété, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision, et méconnu les articles 112-1 du code pénal, 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme, 17 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
4°/ subsidiairement, qu'il résulte de l'article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle que seul l'équipementier ayant fabriqué la pièce d'origine peut bénéficier de l'exception aux droits conférés par l'enregistrement d'un dessin ou d'un modèle prévue par ce texte ; qu'en retenant, pour écarter toute faute de la société [5] et de M. [I] et, partant, rejeter les demandes au titre de l'action civile, qu'en application de l'article L. 513-6, 4°, b), du code de la propriété intellectuelle, « les participants à la chaîne commerciale entre l'équipementier et le consommateur ne peuvent [...] être poursuivis » (cf. arrêt, p. 14, in medio), la cour d'appel a méconnu le texte précité. »
Réponse de la Cour
10. Les moyens sont réunis.
11. Pour relaxer les prévenus du chef de contrefaçon par atteinte aux droits des dessins ou modèles, l'arrêt attaqué énonce que les incriminations et pénalités régissant la protection de ces droits sont prévues par les dispositions du chapitre I du titre II du livre V du code de la propriété intellectuelle et que la loi modifiant les textes définissant la répression de la violation de ces droits est une loi pénale lorsqu'elle a pour conséquence de changer les éléments constitutifs de cette infraction.
12. Les juges rappellent que la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets a modifié l'article L. 513-6 de ce code en précisant, au 4°, que les droits conférés par l'enregistrement d'un dessin ou modèle ne s'exercent pas à l'égard d'actes qui visent à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur et qui sont réalisés par l'équipementier ayant fabriqué la pièce d'origine.
13. Pour appliquer immédiatement aux prévenus ces dispositions entrées en vigueur le 1er janvier 2023, postérieurement aux faits, ils retiennent qu'elles n'ont modifié ni les peines encourues ni la définition de la protection des dessins et modèles, mais qu'elles ont créé un régime exonératoire de responsabilité pénale dont peut se prévaloir l'équipementier d'origine et s'analysent en une loi pénale plus douce.
14. Ils précisent que l'exonération de responsabilité pénale de l'équipementier d'origine concerne les pièces qu'il fabrique et qu'il peut de ce fait librement céder, que les participants à la chaîne commerciale entre ce dernier et le consommateur ne peuvent donc être poursuivis et qu'une lecture contraire de la loi la rendrait inutile si l'équipementier ne pouvait pas céder les pièces qu'il produit licitement.
15. Ils relèvent enfin que l'application immédiate de ces dispositions n'est pas contraire au droit de propriété.
16. En statuant ainsi, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés aux moyens pour les motifs qui suivent.
17. En premier lieu, les dispositions législatives modifiant l'article L. 513-6 du code de la propriété intellectuelle ont redéfini, dans un sens favorable aux prévenus, le champ de l'incrimination pénale tendant à la protection des droits en matière de dessins et modèles.
18. En deuxième lieu, ces dispositions portent auxdits droits une atteinte proportionnée au but légitime poursuivi, les travaux parlementaires établissant qu'elles ont pour objet de favoriser, par l'ouverture à la concurrence du marché des pièces détachées visibles, l'entretien et la réparation des véhicules automobiles afin d'éviter que, en raison du coût excessif par rapport à leur amortissement, des véhicules qui pourraient continuer à rouler ne soient mis au rebut.
19. En troisième et dernier lieu, en interprétant ces dispositions comme étant applicables non seulement à l'équipementier d'origine, mais aussi à la chaîne commerciale existant entre lui et le consommateur, la cour d'appel leur a conféré leur exacte portée sans méconnaître le principe d'interprétation stricte de la loi pénale.
20. Ainsi, les moyens doivent être écartés.
Sur le deuxième moyen proposé pour les sociétés [2], [1] et [7] et le quatrième moyen proposé pour la société [8]
Enoncé des moyens
21. Le moyen proposé pour les sociétés [2], [1] et [7] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il les a déboutées de l'intégralité de leurs demandes après avoir renvoyé les prévenus des fins de la poursuite du chef de contrefaçon de droits d'auteur, alors :
« 1°/ que les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle instaurant une nouvelle exception au droit d'auteur, introduite à son article L. 122-5 12°, s'agissant de « la reproduction, l'utilisation et la commercialisation des pièces destinées à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur ou à une remorque, au sens de l'article L. 110-1 du code de la route » ne s'appliquent pas aux infractions commises avant leur entrée en vigueur, dès lors qu'elles ne sont pas de nature pénale et que le texte législatif support légal de l'incrimination demeure en vigueur ; que pour infirmer le jugement ayant déclaré les prévenus coupables de contrefaçons de droits d'auteur, pour avoir importé des oeuvres contrefaisantes au mépris des lois et réglements relatifs a la propriété de leur auteur, les sociétés [2], [1] et [7], la cour d'appel affirme « que les textes d'incrimination et de pénalité régissant la protection des droits d'auteur sont régis par les dispositions du livre I de la première partie du code de la propriété intellectuelle, qu'il en résulte que la modification de la protection de la propriété des droits d'auteur est une loi pénale lorsqu'elle a pour conséquence de modifier les éléments constitutifs d'une infraction » ; qu'en prononçant ainsi, quand l'exception au droit d'auteur introduite à l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle n'est pas un texte de nature pénale et que la définition comme les sanctions du délit de contrefaçon de droits d'auteur par les articles L. 335-2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle n'ont pas été modifiées et demeurent en vigueur, la cour d'appel a méconnu les articles 112-1 alinéa 3 du code pénal, L. 335-2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ que en vertu des propres énonciations de l'article 32 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021, les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle instaurant une nouvelle exception au droit d'auteur à son article L. 122-5 12° n'entreront en vigueur qu'à compter du 1er janvier 2023 ; qu'il en résulte que ces dispositions ne peuvent s'appliquer que pour l'avenir sans pouvoir effacer rétroactivement les atteintes portées aux droits d'auteur régulièrement protégés antérieurement au 1er janvier 2023 ; qu'en décidant néanmoins de l'application rétroactive de ces dispositions, cependant que les titres de propriété intellectuelle dont disposaient les sociétés parties civiles sur les rétroviseurs litigieux s"agissant des droits d'auteur, étaient opposables à la société [5] et à M. [I] à l'époque des faits, sans pouvoir être remis en cause par les dispositions nouvelles applicables aux seuls faits de commercialisation postérieurs au 1er janvier 2023, la cour d"appel a méconnu le sens et la portée de l'article 32 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 et privé sa décision de toute base légale au regard des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que toute personne a droit à la propriété et nul ne peut être privé arbitrairement de propriété ; qu'il n'est pas contesté que les sociétés [2], [1] et [7] bénéficiaient de la protection des droits d'auteur sur les rétroviseurs litigieux antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 22 août 2021, dont il est expressément précisé qu'elle ne pouvait intervenir qu'à compter du 1er janvier 2023 ; que cette loi ne pouvait disposer que pour l'avenir sauf à remettre en cause rétroactivement des droits dont la validité n'était nullement contestée, en violation du droit au respect des biens ; que pour appliquer néanmoins rétroactivement la loi du 22 août 2021, la cour d'appel se borne à affirmer que « cette rétroactivité n 'éta[i]t pas contraire à la protection du droit de propriété » ; qu'en prononçant ainsi quand l'application rétroactive de la loi en cause revenait à priver arbitrairement les sociétés parties civiles des droits de propriété intellectuelle dont elles disposaient sur les rétroviseurs litigieux, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision, en violation des articles 112-1 du code pénal, 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme, 17 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
22. Le moyen proposé pour la société [8] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes après avoir renvoyé les prévenus des fins de la poursuite du chef de contrefaçon de droits d'auteur, alors :
« 1°/ que les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle instaurant une nouvelle exception au droit d'auteur, introduite à son article L. 122-5, 12°, s'agissant de « la reproduction, l'utilisation et la commercialisation des pièces destinées à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur ou à une remorque, au sens de l'article L. 110-1 du code de la route » ne s'appliquent pas aux infractions commises avant leur entrée en vigueur, dès lors qu'elles ne sont pas de nature pénale et que le texte législatif support légal de l'incrimination demeure en vigueur ; que pour écarter la contrefaçon de droits d'auteur, la cour d'appel a relevé « que les textes d'incrimination et de pénalité régissant la protection des droits d'auteur sont régis par les dispositions du livre I de la première partie du code de la propriété intellectuelle, qu'il en résulte que la modification de la protection de la propriété des droits d'auteur est une loi pénale lorsqu'elle a pour conséquence de modifier les éléments constitutifs d'une infraction » ; qu'en prononçant ainsi, quand l'exception au droit d'auteur introduite à l'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle n'est pas un texte de nature pénale et que la définition comme les sanctions du délit de contrefaçon de droits d'auteur par les articles L. 335-2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle n'ont pas été modifiées et demeurent en vigueur, la cour d'appel a méconnu les articles 112-1 alinéa 3 du code pénal, L. 335-2 et L. 335-3 du code de la propriété intellectuelle, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ que en vertu des propres énonciations de l'article 32 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021, les dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle instaurant une nouvelle exception au droit d'auteur, introduite à son article L. 122-5 12° n'entreront en vigueur qu'à compter du 1er janvier 2023 ; qu'il en résulte que ces dispositions ne peuvent s'appliquer que pour l'avenir sans pouvoir effacer rétroactivement les atteintes portées aux droits d'auteur régulièrement protégés antérieurement au 1er janvier 2023 ; qu'en décidant néanmoins de l'application rétroactive de ces dispositions, cependant que les droits d'auteur dont disposait la société [8] sur les rétroviseurs litigieux étaient opposables à la société [5] et à M. [I] à l'époque des faits, sans pouvoir être remis en cause par les dispositions nouvelles applicables aux seuls faits de commercialisation postérieurs au 1er janvier 2023, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 32 de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 et privé sa décision de toute base légale au regard des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que toute personne a droit à la propriété et nul ne peut être privé arbitrairement de propriété ; qu'il n'est pas contesté que la société [8] bénéficiait de la protection des droits d'auteur sur les rétroviseurs litigieux antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 22 août 2021, dont il est expressément précisé qu'elle ne pouvait intervenir qu'à compter du 1er janvier 2023 ; que cette loi ne pouvait disposer que pour l'avenir sauf à remettre en cause rétroactivement des droits dont la validité n'était nullement contestée, en violation du droit au respect des biens ; que pour appliquer néanmoins rétroactivement la loi du 22 août 2021, la cour d'appel se borne à affirmer que « cette rétroactivité n'éta[i]t pas contraire à la protection du droit de propriété » ; qu'en prononçant ainsi, quand l'application rétroactive de la loi en cause revenait à priver arbitrairement la société [8] des droits de propriété intellectuelle dont elle disposait sur les rétroviseurs litigieux, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision en violation des articles 112-1 du code pénal, 1er du premier protocole additionnel de la Convention européenne des droits de l'homme, 17 de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
23. Les moyens sont réunis.
24. Pour relaxer les prévenus du chef de contrefaçon par atteinte aux droits d'auteur, l'arrêt attaqué énonce que les textes d'incrimination et de pénalité régissent la protection de ces droits tels que prévus par les dispositions du livre I de la première partie du code de la propriété intellectuelle et qu'il en résulte que la modification de la protection de leur propriété constitue une loi pénale lorsqu'elle a pour conséquence de modifier les éléments constitutifs de cette infraction.
25. Les juges constatent que l'article L. 122-5, 12°, du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de la loi précitée du 22 août 2021, prévoit que l'auteur ne peut interdire la reproduction, l'utilisation et la commercialisation des pièces destinées à rendre leur apparence initiale à un véhicule à moteur.
26. Ils retiennent que cette modification, qui diminue le champ d'incrimination, est une loi pénale plus douce et qu'elle s'applique immédiatement selon le principe rappelé par l'article 112-1, alinéa 3, du code pénal.
27. Ils précisent que cette rétroactivité n'est pas contraire à la protection du droit de propriété et que les pièces litigieuses, constituées de rétroviseurs, qui s'intègrent à l'esthétique et participent à l'apparence d'un véhicule terrestre à moteur, entrent dans le champ d'application des dispositions nouvelles.
28. En statuant ainsi, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés aux moyens.
29. En premier lieu, les dispositions législatives modifiant l'article L. 122-5, 12°, du code de la propriété intellectuelle ont redéfini, dans un sens favorable aux prévenus, le champ de l'incrimination pénale tendant à la protection des droits d'auteur.
30. En second lieu, il convient de se référer aux motifs figurant au paragraphe 18.
31. Ainsi, les moyens doivent être écartés.
Sur les deuxième et cinquième moyens proposés pour la société [8] et le troisième moyen proposé pour les sociétés [2], [1] et [7]
Enoncé des moyens
32. Le deuxième moyen proposé pour la société [8] critique l'arrêt infirmatif attaqué en ce qu'il l'a déboutée de toutes ses demandes au titre de son action civile exercée contre la société [5] et M. [I], alors :
« 1°/ que pour écarter la contrefaçon de marques, la cour d'appel a retenu que « les rétroviseurs litigieux n'étant pas soumis à la protection au titre des dessins et modèles ni à celle des droits d'auteur, ils ont la qualité de pièce libre de droit » et qu'il en résultait que l'utilisation des noms des modèles de voitures était conforme aux dispositions de l'article L. 713-6 du code de la propriété intellectuelle (arrêt, p. 17) ; que la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen entraînera donc, par voie de conséquence, celle de l'arrêt en ce qu'il a rejeté les demandes de la société [8] au titre de son action civile pour contrefaçon de marques ;
2°/ qu'aux termes de l'article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle, est constitutif du délit de contrefaçon de marques le fait de détenir sans motif légitime, d'importer, d'exporter, d'offrir à la vente ou de vendre des marchandises sous une marque contrefaisante, notamment par suppression de la marque ; qu'en l'espèce, tout en relevant qu'il était « exact que les rétroviseurs portaient les références des marques [6] ou [8] ou un logo distinctif, références qui ont été supprimées par grattage », la cour d'appel a simplement retenu, pour écarter la contrefaçon de marque, que ce délit aurait été commis par le fabricant espagnol, non poursuivi et ayant fait l'objet d'une relaxe (arrêt, p. 17) ; qu'en statuant par un tel motif inopérant, cependant qu'indépendamment du point de savoir qui était l'auteur des actes de suppression, le simple fait de détenir sans motif légitime, d'importer, d'exporter, d'offrir à la vente ou de vendre les rétroviseurs litigieux, sur lesquels les références des marques de la société [8] avaient été supprimées, caractérisait une contrefaçon de marques, la cour d'appel a violé l'article L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle. »
33. Le cinquième moyen proposé pour la société [8] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes après avoir renvoyé les prévenus des fins de poursuite du chef de contrefaçon de marques, alors « que la cassation à intervenir sur les troisième et/ou quatrième moyen entraînera, par voie de conséquence, celle de l'arrêt en ce qu'il a rejeté les demandes de la société [8] au titre de son action civile pour contrefaçon de marques. »
34. Le troisième moyen proposé pour les sociétés [2], [1] et [7] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il les a déboutées de l'intégralité de leurs demandes après avoir renvoyé les prévenus des fins de la poursuite du chef de contrefaçon de marques, alors :
« 1°/ que la cassation à intervenir sur l'un comme l'autre des deux premiers moyens privera nécessairement de fondement les dispositions de l'arrêt ayant débouté les parties civiles de leurs demandes ensuite de la relaxe prononcée du chef de contrefaçon de marques ; qu'en effet la cassation des dispositions de l'arrêt ayant conclu à la relaxe tant s'agissant des faits de contrefaçon de dessins et modèles que de contrefaçon de droit d'auteur, dont il résultera que les rétroviseurs litigieux n'étaient pas des pièces libres de droit ne pourra qu'entraîner la cassation des dispositions de l'arrêt relatives à la contrefaçon de marque, dont la relaxe a été justifiée par la cour d'appel, aux motifs que, « contrairement aux arguments de la défense, les rétroviseurs litigieux n'étant pas soumis à la protection au titre des dessins et modèles ni à celle des droits d'auteur, ils ont la qualité de pièce libre de droit ;
2°/ que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'il résulte en l'espèce des propres constatations de l'arrêt attaqué « qu'il est exact que les rétroviseurs portaient les références des marques [6] ou [8] ou un logo distinctif références qui ont été supprimées par grattage, ce délit commis par le fabricant espagnol, non poursuivi, ayant fait l'objet d'une relaxe » ; que le monopole conféré aux sociétés [2], [1] et [7] par le droit de marques qu'elles détiennent les autorisait à s'opposer à toute commercialisation en France de pièces sur lesquelles les marques [6] ou [3] avaient été supprimées ; qu'en justifiant la relaxe des prévenus du chef de contrefaçon de marque de leur seule relaxe du chef de suppression de marque dont la commission était imputée au seul fabricant espagnol, quand la simple détention, offre en vente ou vente de telles pièces était constitutive du délit de contrefaçon, indépendamment des actes délictueux commis par le fabricant lui-même, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 716-10 du code de la propriété intellectuelle et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
35. Les moyens sont réunis.
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, et le cinquième moyen proposés pour la société [8], et le troisième moyen, pris en sa première branche, proposé pour les sociétés [2], [1] et [7]
36. Les griefs sont devenus inopérants, par suite du rejet des premier, troisième et quatrième moyens proposés pour la société [8] et des premier et deuxième moyens proposés pour les sociétés [2], [1] et [7].
Sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, proposé pour la société [8], et le troisième moyen, pris en sa seconde branche, proposé pour les sociétés [2], [1] et [7]
37. Pour relaxer les prévenus du chef de contrefaçon de marques, l'arrêt attaqué énonce, s'agissant de la suppression de la référence des marques ou logos sur les rétroviseurs [6] ou [8], qu'elle a été effectuée par le fabricant espagnol qui n'a pas été poursuivi, de sorte que les prévenus, poursuivis du chef de suppression des marques en violation des droits conférés par leur enregistrement, ont été relaxés et que cette décision est définitive par suite de la limitation de l'appel du parquet.
38. En l'état de ces énonciations, et dès lors que l'article L. 706-10, b), du code de la propriété intellectuelle, dans sa version en vigueur du 22 décembre 2007 au 16 mars 2011 applicable aux faits, n'incrimine ni la détention, ni l'offre à la vente, ni la vente de marchandises sur lesquelles les marques ont été supprimées, mais seulement la vente de marchandises présentées sous une marque contrefaisante, l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués.
39. Dès lors, les moyens doivent être écartés.
40. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
Civ.2 5 juin 2025 n° 23-12.674
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
AF1
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 5 juin 2025
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 567 F-D
Pourvoi n° B 23-12.674
Aide juridictionnelle totale en défense au profit de M. [R]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 4 avril 2023.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUIN 2025
La caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° B 23-12.674 contre le jugement rendu le 23 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Rennes (2e chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [T] [R], domicilié [Adresse 1],
2°/ à M. [U] [P], domicilié [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Labaune, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Labaune, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Rennes, 23 décembre 2022), rendu en dernier ressort, M. [R] (le tiers responsable) a été déclaré coupable, par une juridiction pénale, des faits d'outrage à une personne chargée d'une mission de service public et déclaré entièrement responsable des dommages subis par M. [P] (la victime).
2. Le tiers responsable a également été condamné par le juge pénal à indemniser le préjudice moral subi par la victime en raison de l'infraction.
3. La caisse primaire d'assurance maladie d'Ille-et-Vilaine (la caisse) a fait assigner le tiers responsable devant une juridiction civile pour obtenir le remboursement de ses créances au titre des prestations versées à la victime à la suite de l'infraction.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
4. La caisse fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « qu'aucun principe ni aucune règle n'impose à la caisse de solliciter auprès du tiers responsable le remboursement des frais qu'elle a exposés au profit de la victime devant le juge pénal, dès lors que cette dernière s'est constituée partie civile ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 4 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :
5. Il résulte de ce texte que l'organisme social tiers payeur qui n'est pas intervenu à l'instance pénale conserve la faculté de demander directement au tiers responsable, devant la juridiction civile, dans la limite de la part de préjudice soumis à son recours, le remboursement des prestations versées à la victime en relation de causalité avec le dommage.
6. Pour rejeter les demandes de la caisse en remboursement des prestations versées à la victime au titre des dépenses de santé et des pertes de gains professionnels, le jugement relève que la juridiction pénale n'a reconnu aucun préjudice à la victime au titre de ces postes et que la caisse, qui avait été informée de l'instance pénale, n'y est pas intervenue pour faire valoir les débours qu'elle avait engagés dans l'intérêt de la victime. Il retient qu'il appartenait à la caisse de solliciter, dans les conditions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, la nullité du jugement rendu par la juridiction pénale qui ne lui avait pas été déclaré commun.
7. En statuant ainsi, alors qu'il constatait que la caisse n'était pas intervenue à l'instance pénale, de sorte qu'il lui appartenait d'évaluer les préjudices de la victime au titre des postes pris en charge par les prestations servies et de procéder aux imputations correspondantes afin de déterminer les sommes dues à la caisse au titre de son recours subrogatoire, le tribunal a violé le texte susvisé.
Civ.3 5 juin 2025 n° 23-11.500 B
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 5 juin 2025
Cassation
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 283 FS-B
Pourvoi n° A 23-11.500
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 5 JUIN 2025
1°/ Mme [M] [I], domiciliée [Adresse 1],
2°/ l'élevage des Dunes des sages, dont le siège est [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° A 23-11.500 contre l'ordonnance rendue le 17 janvier 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (juridiction premier président, recours en matière de visites et saisies domiciliaires), dans le litige les opposant à la direction départementale de la protection des populations de la Gironde, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Brillet, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de Mme [I] et de l'élevage des Dunes des sages, et l'avis de Mme Delpey-Corbaux, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 avril 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Brillet, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, M. Pety, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, Mme Delpey-Corbaux, avocat général, et Mme Maréville, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Bordeaux, 17 janvier 2023), Mme [I] exploite un élevage de chiens sous la dénomination des Dunes des sages.
2. Mme [I] a fait appel de l'ordonnance d'un juge des libertés de la détention ayant, sur la requête du directeur départemental de la protection des populations de la Gironde (la DDPP) visant les articles L. 172-5 du code de l'environnement et les articles L. 206-1 et L. 214-23 du code rural et de la pêche maritime, autorisé certains agents de cette direction à procéder à des perquisitions et saisies à son domicile et au sein de l'élevage.
Recevabilité du pourvoi, en ce qu'il est formé par l'élevage des Dunes des sages, examinée d'office
3. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 16 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 32 de ce code.
4. Aux termes de ce texte, est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.
5. L'élevage des Dunes des sages ne disposant pas de la personnalité juridique, le pourvoi, en tant que formé par celui-ci, est irrecevable.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. Mme [I] fait grief à l'ordonnance de confirmer la décision du juge des libertés et de la détention ayant autorisé les agents de la DDPP à procéder, sans l'assentiment des personnes chez qui ces opérations auront lieu, à des perquisitions et saisies, alors « qu'en matière environnementale, l'autorisation d'effectuer une visite domiciliaire, sans le consentement de la personne concernée, ne peut être demandée au juge des libertés et de la détention, lorsqu'il n'y a pas flagrance, que par le procureur de la République et selon les formes du code de procédure pénale ; qu'en retenant que la DDPP tient de l'article L. 172-5 du code de l'environnement le pouvoir de saisir elle-même le juge des libertés et de la détention par requête pour que ses agents soient autorisés à accéder aux locaux en cas de refus du propriétaire des lieux ou lorsque ceux-ci comprennent des parties à usage d'habitation et que, par conséquent, les griefs faits à l'ordonnance déférée, tenant au non-respect des dispositions de l'article 76 du code de procédure pénale relatives aux perquisitions, visites domiciliaires et saisies effectuées dans le cadre d'une enquête préliminaire, autorisées par le juge des libertés et de la détention sur saisine du ministère public, en ce que la requête n'émane pas de ce dernier et en ce que l'ordonnance ne vise pas la qualification des infractions pénales recherchées sont inopérants même si l'ordonnance vise improprement ces dispositions, lorsque seul l'article 76 précité était applicable, le premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 172-5 du code de l'environnement et a commis un excès de pouvoir. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 172-5, dernier alinéa, du code de l'environnement et 76, alinéa 4, du code de procédure pénale :
7. Selon le premier de ces textes, dans leurs missions de recherche et de constat des infractions prévues par le code de l'environnement, les fonctionnaires et agents habilités à cet effet ne peuvent procéder à la visite des domiciles et des locaux comportant des parties à usage d'habitation, à défaut d'assentiment de l'occupant des lieux, qu'en présence d'un officier de police judiciaire agissant conformément aux dispositions du code de procédure pénale relatives aux visites domiciliaires, perquisitions et saisies des pièces à conviction.
8. Si, en matière d'enquête préliminaire, le juge des libertés et de la détention peut, dans les conditions prévues par le second de ces textes, décider que les perquisitions, visites domiciliaires et saisies seront effectuées sans l'assentiment de la personne chez qui elles ont lieu, il ne peut être saisi à cette fin que par le procureur de la République.
9. Il en résulte que le juge des libertés et de la détention ne peut pas être saisi, sur le fondement de ces textes, par les fonctionnaires et agents précités pour être autorisés à procéder à une visite des domiciles et des locaux comportant des parties à usage d'habitation aux fins de recherche et de constat des infractions prévues par ce code.
10. Pour confirmer l'ordonnance ayant autorisé certains agents de la DDPP à procéder, sans son assentiment, à des perquisitions et saisies aux domicile et dépendances de Mme [I] et au sein de l'élevage des Dunes des sages, l'ordonnance constate que le juge des libertés et de la détention a été saisi sur le fondement de divers textes, notamment l'article L. 172-5 du code de l'environnement.
11. Elle retient qu'en application de ces dispositions, la DDPP, dans le cadre de ses pouvoirs de contrôle administratif et de recherche et constatation d'infractions, peut elle-même saisir le juge des libertés et de la détention par requête pour que ses agents soient autorisés à accéder aux locaux en cas de refus opposé par le propriétaire des lieux ou lorsque ceux-ci comprennent des parties à usage d'habitation.
12. Elle ajoute que les contestations tirées des dispositions de l'article 76 du code de procédure pénale relatives aux perquisitions, visites domiciliaires et saisies effectuées dans le cadre d'une enquête préliminaire autorisées par le juge des libertés et de la détention, prévoyant que la requête émane du procureur de la République et que l'ordonnance vise la qualification des infractions pénales recherchées, sont inopérantes, le visa de ce texte, impropre, restant sans effet sur la régularité de la décision.
13. En statuant ainsi, le premier président, qui ne pouvait pas autoriser des perquisitions et des saisies à la demande de la DDPP, a violé les textes susvisés.
Et sur le second moyen
Enoncé du moyen
14. Mme [I] fait le même grief à l'ordonnance, alors « que le juge des libertés et de la détention ne tient de l'article L. 206-1 du code rural et de la pêche maritime que le pouvoir d'autoriser l'accès aux locaux et ne peut autoriser les agents à effectuer des perquisitions et saisies ; qu'en confirmant l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé, sur le fondement de l'article L. 206-1 du code rural et de la pêche maritime, les agents appartenant à la DDPP à procéder, sans l'assentiment des personnes chez qui ces opérations auront lieu, à des perquisitions et saisies chez Mme [I] et au sein de l'élevage des Dunes des sages et non à une visite domiciliaire, le premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 206-1 du code rural et de la pêche maritime et a excédé ses pouvoirs. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 206-1, I, alinéa 1er, et L. 214-23, I, 5°, du code rural et de la pêche maritime :
15. Selon le second de ces textes, pour l'exercice des inspections, des contrôles et des interventions de toute nature qu'implique l'exécution des mesures de protection des animaux prévues aux articles L. 214-3 à L. 214-18, L. 215-10 et L. 215-11, des règlements communautaires ayant le même objet et des textes pris pour leur application, les fonctionnaires et agents habilités à cet effet peuvent solliciter du juge des libertés et de la détention, dans les formes et conditions prescrites par l'article L. 206-1, l'autorisation d'accéder à des locaux professionnels ou à des locaux comprenant des parties à usage d'habitation, dont l'accès leur a été refusé par l'occupant, pour y procéder à des contrôles.
16. Aux termes du premier, lorsque l'accès aux locaux est refusé aux agents, ou lorsque ceux-ci comprennent des parties à usage d'habitation, cet accès peut être autorisé par ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire dans le ressort duquel sont situés les lieux à visiter.
17. Pour confirmer l'ordonnance ayant autorisé certains agents de la DDPP à procéder, sans son assentiment, à des perquisitions et saisies aux domicile et dépendances de Mme [I] et au sein de l'élevage des Dunes des sages, l'ordonnance constate que le juge des libertés et de la détention a été saisi sur le fondement de divers textes, notamment les articles L. 206-1 et L. 214-23 du code rural et de la pêche maritime.
18. Elle retient qu'en application de ces dispositions, la DDPP, dans le cadre de ses pouvoirs de contrôle administratif et de recherche et constatation d'infractions, peut elle-même saisir le juge des libertés et de la détention par requête pour que ses agents soient autorisés à accéder aux locaux en cas de refus opposé par le propriétaire des lieux ou lorsque ceux-ci comprennent des parties à usage d'habitation.
19. Elle ajoute que les contestations tirées des dispositions de l'article 76 du code de procédure pénale relatives aux perquisitions, visites domiciliaires et saisies effectuées dans le cadre d'une enquête préliminaire autorisées par le juge des libertés et de la détention, prévoyant que la requête émane du procureur de la République et que l'ordonnance vise la qualification des infractions pénales recherchées, sont inopérantes, le visa de ce texte, impropre, restant sans effet sur la régularité de la décision.
20. En statuant ainsi, alors que le juge des libertés et de la détention, saisi sur le fondement de l'article L. 206-1 du code rural et de la pêche maritime, ne peut autoriser les fonctionnaires et agents habilités à procéder à des perquisitions et des saisies, mais peut seulement les autoriser à accéder à certains locaux, le premier président a violé les textes susvisés.
Crim. 4 juin 2025 n° 25-83.267
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Z 25-83.267 F-D
N° 00941
RB5 4 JUIN 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JUIN 2025
M. [J] [K] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Chambéry, en date du 25 avril 2025, qui a autorisé sa remise différée aux autorités judiciaires espagnoles en exécution d'un mandat d'arrêt européen.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Leprieur, conseiller, les observations de Me Bardoul, avocat de M. [J] [K], et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 4 juin 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Leprieur, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Un mandat d'arrêt européen a été émis le 14 mars 2025 à l'encontre de M. [J] [K], de nationalité française, par un juge d'instruction de Valence (Espagne), aux fins de poursuites pour des faits de trafic de stupéfiants en bande organisée.
3. M. [K] a été interpellé le 8 avril 2025. Placé sous écrou extraditionnel le 9 avril 2025, il n'a pas consenti à sa remise ni renoncé au principe de spécialité.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses trois premières branches ainsi qu'en sa cinquième branche
4. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté toutes les demandes de M. [K], constaté que la traduction assermentée du mandat d'arrêt européen est parvenue à la chambre de l'instruction au moment de l'audience, autorisé la remise de l'intéressé aux autorités judiciaires espagnoles et dit que la remise serait différée jusqu'à l'exécution de la peine d'emprisonnement prononcée le 19 décembre 2024 par le tribunal correctionnel de Thonon-les-Bains, alors :
« 4°/ que l'article 695-32 du code de procédure pénale, qui permet de subordonner la remise de la personne recherchée à la garantie qu'elle effectuera en France la peine qui sera éventuellement prononcée par l'autorité judiciaire de l'Etat d'émission pour les faits objet du mandat, est applicable à une personne qui fait l'objet d'un mandat d'arrêt européen aux fins de poursuites ; que par conséquent, lorsque la demande d'application de l'article susmentionné est faite devant la chambre de l'instruction qui doit statuer sur la remise, elle doit être examinée, même si l'intéressé est réclamé aux fins de poursuites pénales et non pour l'exécution d'une peine ; qu'en jugeant dès lors que la question posée est en l'état prématurée dans la mesure où M. [K] n'a à ce jour fait l'objet d'aucune condamnation définitive, qu'il est présumé innocent à ce stade de la procédure, que cette situation pourra être évoquée dès lors que l'intéressé sera éventuellement condamné, la chambre de l'instruction a violé les articles 591 et 695-32 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 695-32 du code de procédure pénale :
6. Aux termes de ce texte, lorsque la personne recherchée est de nationalité française ou réside régulièrement sur le territoire national de façon ininterrompue depuis au moins cinq ans, l'exécution du mandat d'arrêt européen peut être subordonnée à la vérification qu'elle peut être renvoyée en France pour y effectuer la peine qui sera éventuellement prononcée par l'autorité judiciaire de l'Etat d'émission pour les faits faisant l'objet du mandat.
7. Pour écarter le moyen tiré de l'article 695-32 du code de procédure pénale et autoriser la remise de M. [K] aux autorités judiciaires espagnoles, l'arrêt attaqué énonce que la question posée est en l'état prématurée dans la mesure où il n'a à ce jour fait l'objet d'aucune condamnation définitive et est présumé innocent.
8. Les juges ajoutent que cette situation pourra être évoquée dès lors que l'intéressé sera éventuellement condamné.
9. En statuant ainsi, alors que les dispositions de l'article précité sont applicables à la personne recherchée sur le fondement d'un mandat d'arrêt européen délivré aux fins de poursuites, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé.
10. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Crim. 4 juin 2025 n° 25-80.022
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° X 25-80.022 F-D
N° 00768
GM 4 JUIN 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JUIN 2025
M. [C] [S] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 10e chambre, en date du 6 novembre 2024, qui, pour abandon de famille, l'a condamné à sept mois d'emprisonnement, et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire personnel a été produit.
Sur le rapport de M. Mallard, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Crocq, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Mallard, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [C] [S] a été convoqué du chef d'abandon de famille devant le tribunal correctionnel qui, par jugement du 14 décembre 2022, l'a déclaré coupable, l'a condamné à quatre mois d'emprisonnement, et a prononcé sur les intérêts civils.
3. Le prévenu et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le moyen est pris de la violation de l'article 503-1 du code de procédure pénale.
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a été qualifié de contradictoire à signifier à l'égard du prévenu, alors que ce dernier, non comparant, n'a pas été cité à son adresse déclarée.
Réponse de la Cour
Vu l'article 503-1 du code de procédure pénale :
6. Selon ce texte, le commissaire de justice doit délivrer la citation devant la cour d'appel à l'adresse déclarée par le prévenu appelant.
7. L'arrêt attaqué, qualifié de contradictoire à signifier, mentionne que le prévenu, non comparant et non représenté, a été cité par acte délivré le 23 août 2024 à étude d'huissier de justice.
8. Il résulte des pièces de procédure que la citation a été délivrée à [Localité 2], alors que, dans son acte d'appel, le demandeur avait déclaré une adresse à [Localité 1], et qu'il n'a pas effectué de changement d'adresse, dans les conditions prévues par l'article 503-1 susvisé.
9. En prononçant ainsi, la cour d'appel, à qui il appartenait de constater l'irrégularité de la citation et d'inviter le ministère public à faire citer le prévenu à son adresse déclarée, a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé.
10. La cassation est par conséquent encourue.
Civ.1 4 juin 2025 n° 23-23.860 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
IJ
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 4 juin 2025
Rejet
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 410 F
Pourvoi n° K 23-23.860
Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. [J] [I] [U]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 10 octobre 2023.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 4 JUIN 2025
M. [J] [I] [U], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23-23.860 contre l'ordonnance rendue le 15 mai 2023 par le premier président de la cour d'appel de Lyon, dans le litige l'opposant au préfet de Haute-Savoie, domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de Me Bertrand, avocat de M. [U], et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Tifratine, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Lyon, 15 mai 2023), le 11 mai 2023, M. [U], de nationalité algérienne, en situation irrégulière sur le territoire français, a été placé en rétention administrative le 11 mai 2023 par le préfet de Haute-Savoie en exécution d'une obligation de quitter ce territoire.
2. Le 12 mai 2023, le préfet a saisi un juge des libertés et de la détention d'une demande de prolongation de la mesure en application de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA).
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. M. [J] [I] [U] fait grief à l'ordonnance de déclarer régulière la procédure diligentée à son encontre et d'ordonner la prolongation de sa rétention pour une durée de vingt-huit jours, alors :
« 1°/ que peuvent seuls avoir accès aux données à caractère personnel et aux informations enregistrées dans le fichier des personnes recherchées, dans le cadre de leurs attributions légales et pour les besoins exclusifs des missions qui leur sont confiées, les agents des services de la police nationale individuellement désignés et spécialement habilités ; que s'il ne résulte pas des pièces du dossier que l'agent ayant consulté le fichier des personnes recherchées était expressément habilité à cet effet, la procédure se trouve entachée d'une nullité d'ordre public, sans que l'étranger qui l'invoque ait à démontrer l'existence d'une atteinte portée à ses droits ; qu'en considérant que "l'éventuelle absence d'habilitation de l'agent de police judiciaire ayant procédé à la consultation du fichier des personnes recherchées le 10 mai 2023 n'était pas de nature à entraîner la nullité de la procédure de garde à vue ni de la procédure de rétention" (ordonnance attaquée, p. 2 al. 8), le premier président a violé les articles 15-5 et 230-10 du code de procédure pénale et l'article 5 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-1219 du 2 août 2017 ;
2°/ que peuvent seuls avoir accès aux données à caractère personnel et aux informations enregistrées dans le fichier des personnes recherchées, dans le cadre de leurs attributions légales et pour les besoins exclusifs des missions qui leur sont confiées, les agents des services de la police nationale individuellement désignés et spécialement habilités ; que s'il ne résulte pas des pièces du dossier que l'agent ayant consulté le fichier des personnes recherchées était expressément habilité à cet effet, la procédure se trouve nécessairement entachée d'une nullité d'ordre public, sans que l'étranger qui l'invoque ait à démontrer l'existence d'une atteinte portée à ses droits ; qu'en considérant que l'éventuelle absence d'habilitation de l'agent de police judiciaire ayant procédé à la consultation du fichier des personnes recherchées le 10 mai 2023 n'était pas de nature à entraîner la nullité de la procédure de garde à vue ni celle de la procédure de rétention, au motif qu'en l'espèce, la consultation de ce fichier n'était pas "le support nécessaire" de la mesure de rétention (ordonnance attaquée, p. 2 al. 8), le premier président s'est déterminé par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard des articles 15-5 et 230-10 du code de procédure pénale et de l'article 5 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010, dans sa rédaction issue du décret 2017-1219 du 2 août 2017 ;
3°/ que peuvent seuls avoir accès aux données à caractère personnel et aux informations enregistrées dans le fichier des personnes recherchées, dans le cadre de leurs attributions légales et pour les besoins exclusifs des missionsqui leur sont confiées, les agents des services de la police nationale individuellement désignés et spécialement habilités ; qu'en affirmant, par motif éventuellement adopté, que l'agent de police judiciaire M. [F], qui avait consulté le fichier des personnes recherchées, avait "qualité à effectuer cette consultation en tant qu'agent des services de la police nationale" (ordonnance du 13 mai 2023, p. 2 al. 13), sans rechercher si cet agent des services de la police nationale avait été "spécialement habilité" pour procéder à la consultation du fichier des personnes recherchées, le premier président a privé sa décision de base légale au regard des articles 15-5 et 230-10 du code de procédure pénale et de l'article 5 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010, dans sa rédaction issue du décret 2017-1219 du 2 août 2017. »
Réponse de la Cour
4. Selon l'article 15-5 du code de procédure pénale, issu de la loi n° 2023-22 du 24 janvier 2023, seuls les personnels spécialement et individuellement habilités à cet effet peuvent procéder à la consultation de traitements au cours d'une enquête ou d'une instruction. La réalité de cette habilitation spéciale et individuelle peut être contrôlée à tout moment par un magistrat, à son initiative ou à la demande d'une personne intéressée. L'absence de la mention de cette habilitation sur les différentes pièces de procédure résultant de la consultation de ces traitements n'emporte pas, par elle-même, nullité de la procédure.
5. Si c'est à tort que le premier président n'a pas recherché, comme il le lui était demandé, si l'agent du service de police ayant consulté le fichier des personnes recherchées était expressément habilité à cet effet, l'ordonnance n'encourt pas pour autant la censure, dès lors que le premier président a constaté que, indépendamment de cette consultation, d'autres éléments figurant à la procédure, notamment des échanges avec la préfecture de Haute-Savoie avaient permis de déterminer que M. [U] se trouvait en situation irrégulière sur le territoire national et faisait l'objet d'une mesure d'éloignement et de fonder les procédures de garde à vue et de rétention.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.
Crim. 3 juin 2025 n° 25-81.868 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° D 25-81.868 F-B
N° 00905
SB4 3 JUIN 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025
M. [I] [P] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 3e section, en date du 18 février 2025, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'assassinat, violences aggravées, arrestation, enlèvement, détention ou séquestration arbitraire, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Merloz, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [I] [P], et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 juin 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Merloz, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, Mme Merloz, conseiller référendaire, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [I] [P] a été mis en examen des chefs susvisés et placé sous mandat de dépôt criminel le 3 février 2023.
3. Saisi par ordonnance du 21 janvier 2025 d'un juge d'instruction suppléant le juge d'instruction en charge de l'information, le juge des libertés et de la détention a prolongé la détention provisoire par ordonnance du 30 janvier 2025.
4. Par arrêté du 28 janvier 2025, le magistrat en charge de l'information a été nommé dans un cabinet ministériel avec effet rétroactif à compter du 14 janvier précédent.
5. M. [P] a relevé appel de l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la nullité de la saisine du juge des libertés et de la détention et de l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire, alors :
« 1°/ qu'il résulte de l'article 84 du code de procédure pénale qu'en cas de nomination à un autre poste du juge chargé de l'information, celui-ci ne peut plus être suppléé dans ses fonctions et le président du tribunal doit désigner un nouveau juge pour poursuivre l'instruction ; qu'en l'espèce, l'arrêt constate que par un arrêté du 28 janvier 2025 du garde des sceaux publié le 31 janvier 2025 au journal officiel, M. Grégory Martin-Dit-Neuville, juge d'instruction initialement chargé du dossier de M. [P], a été nommé conseiller ministériel auprès du garde des sceaux « à compter du 14 janvier 2025 » ; que c'est donc à cette dernière date, 14 janvier 2025, peu important la date de l'arrêté rétroactif de nomination ou la date de sa publication, que le juge d'instruction a été nommé à un autre poste et ne pouvait en conséquence plus être suppléé ; qu'en décidant que ce juge d'instruction avait pu être suppléé régulièrement le 21 janvier 2025 pour saisir le juge de les libertés et de la détention aux fins de prolongation de la détention provisoire, au motif qu'à cette date, l'arrêté portant nomination « n'avait pas été pris » de sorte que le magistrat « n'était pas encore nommé à un autre poste » (arrêt, p. 13, § 3), la chambre de l'instruction a méconnu la portée du principe sus-énoncé et a violé le texte susvisé ; la cassation interviendra sans renvoi et avec remise en liberté immédiate du mis en examen dont le titre de détention a expiré le 3 février 2025 ;
2°/ qu'en tout état de cause, à supposer que le magistrat nommé au ministère de la justice pouvait encore être suppléé, il appartenait à la chambre de l'instruction de vérifier que les conditions de cette suppléance étaient réunies, à savoir notamment, aux termes du quatrième alinéa de l'article 84 du code de procédure pénale, la condition d'urgence ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, elle a privé sa décision de motifs au regard de ce texte et a violé l'article 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
7. C'est à tort que, pour rejeter l'exception de nullité de l'ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention, l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte de l'article 84, alinéa 3, du code de procédure pénale qu'en cas de nomination à un autre poste du magistrat chargé de l'information, le président de la juridiction doit désigner le juge d'instruction chargé de le remplacer et que ce magistrat ne peut en aucun cas être suppléé en application des dispositions prévues à l'alinéa 4 du même texte.
8. En effet, l'article 84, alinéa 4, du code de procédure pénale permet, en cas d'urgence et pour des actes isolés, à tout juge d'instruction du tribunal de suppléer un autre juge d'instruction du même tribunal, peu important la cause de l'empêchement.
9. Cependant, l'arrêt n'encourt pas la censure dès lors que, d'une part, l'ordonnance critiquée a été prise au visa de l'urgence, d'autre part, le juge suppléant n'a pas à justifier l'urgence qui est présumée, s'agissant au surplus, en l'espèce, de la saisine du juge des libertés et de la détention aux fins de prolongation de la détention provisoire.
10. Ainsi, le moyen doit être écarté.
11. Par ailleurs, l'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.
Crim. 3 juin 2025 n° 24-82.142
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° F 24-82.142 F-D
N° 00738
ODVS 3 JUIN 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025
M. [M] [U] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-13, en date du 1er mars 2024, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de travail dissimulé et infraction à la législation relative aux commerçants et artisans, a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [M] [U], et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 16 décembre 2015, le tribunal correctionnel a déclaré M. [M] [U] coupable des infractions susvisées et a renvoyé l'affaire sur intérêts civils.
3. Par un nouveau jugement du 15 juin 2021, ce même tribunal, siégeant en formation à juge unique, a condamné l'intéressé à indemniser l'URSSAF d'Île-de-France de son préjudice financier.
4. M. [U] a relevé appel de cette décision
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce que le tribunal a siégé en formation collégiale, alors « que selon l'article 510 alinéa 2 du code de procédure pénale, lorsque le jugement attaqué a été rendu selon les modalités prévues au troisième alinéa de l'article 398 ou selon celles prévues à l'avant-dernier alinéa de l'article 464, la chambre des appels correctionnels est composée d'un seul de ces magistrats exerçant les pouvoirs confiés au président de chambre ; que la cour d'appel peut d'office décider de statuer en formation collégiale, sous réserve de constater la complexité de l'affaire ; qu'en l'espèce, le tribunal correctionnel avait statué sur les intérêts civils à juge unique ; que dès lors la cour d'appel qui a statué en formation collégiale, sans qu'il soit justifié de la complexité de l'affaire, a méconnu l'article 510 alinéa 2 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 464, alinéa 4, et 510, alinéa 2, du code de procédure pénale :
6. Selon le premier de ces textes, lorsque, après avoir statué sur l'action publique, le tribunal renvoie l'affaire à une date ultérieure pour statuer sur l'action civile, il est composé du seul président siégeant à juge unique.
7. Il résulte du second que, lorsque le jugement attaqué a été ainsi rendu en formation à juge unique, la chambre des appels correctionnels est composée d'un seul conseiller, sauf si le prévenu est en détention provisoire pour les faits qui lui sont reprochés, si l'appelant demande expressément que l'affaire soit examinée par une formation collégiale ou si le renvoi devant une telle formation semble justifié en raison de la complexité des faits.
8. En l'espèce, le tribunal correctionnel a prononcé sur les intérêts civils en formation à juge unique et la cour d'appel a siégé en formation collégiale.
9. En statuant dans une composition collégiale, en l'absence de toute demande des parties ou du ministère public, sans motiver sa décision au regard des critères légaux permettant de justifier un tel choix, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
10. La cassation est ainsi encourue.
Crim. 3 juin 2025 n° 23-81.916
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 23-81.916 F-D
N° 00742
ODVS 3 JUIN 2025
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025
Mme [B] [W] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, en date du 7 mars 2023, qui, pour violation de domicile et outrage, l'a condamnée à une interdiction de pénétrer dans les lieux pendant une durée de trois ans et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de Mme Merloz, conseiller référendaire, les observations de Me Bardoul, avocat de Mme [B] [W], les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [S] [T], et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Merloz, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 15 juin 2014, le tribunal de grande instance a adjugé un immeuble ayant appartenu à Mme [B] [W] au profit de Mme [I] [C], épouse [T].
3. Mme [W] refusant de quitter le logement, une procédure d'expulsion a été initiée.
4. Le 1er août 2018, après qu'un huissier de justice a procédé à la clôture des lieux en exécution de la mesure d'expulsion, Mme [W] s'est introduite, par effraction, dans le logement litigieux.
5. Le 5 novembre 2018, Mme [T] a finalement obtenu les clés de la propriété.
6. Le 27 décembre 2018, Mme [W] s'est de nouveau introduite dans l'habitation en ayant recours à un serrurier pour forcer les verrous et la chaîne fermant l'entrée.
7. Convoquée devant le tribunal correctionnel notamment du chef de violation de domicile, Mme [W] a été déclarée coupable et condamnée à une interdiction de pénétrer dans les lieux pendant une durée de trois ans.
8. La prévenue, le ministère public et une partie civile ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur premier moyen
9. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré Mme [W] irrecevable en son exception de faux, l'a déclarée coupable des faits qui lui étaient reprochés et l'a, en conséquence, condamnée à une peine d'interdiction de pénétrer les lieux sis [Adresse 1] à [Localité 2] pour une durée de trois ans et à indemniser MM. [H] et [T] sur le plan civil, alors :
« 1°/ que l'article 226-4 du code pénal, dans sa rédaction issue de la loi du 24 juin 2015, dispose que l'introduction dans le domicile d'autrui à l'aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ; que l'article susvisé, qui réprime le fait de s'introduire ou de se maintenir au domicile d'autrui, n'a pas pour objet de garantir d'une manière générale les propriétés immobilières contre une usurpation ; qu'en déclarant coupable Mme [W] de violation de domicile pour s'être introduite et maintenue les 1er août 2018 et 27 décembre 2018 dans les biens sis [Adresse 1] à [Localité 2] dont la société [3] avait été expulsée par suite de la vente par adjudication dudit bien quand la cour constatait que l'adjudicataire n'avait obtenu les clefs du bien en cause que le 5 novembre 2018 et sans établir en quoi l'adjudicataire avait pris possession des biens en cause et y avait établi un domicile à la date des faits litigieux par suite de l'expulsion, la cour d'appel a violé les articles 226-4 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 226-4 du code pénal, dans sa version en vigueur à la date des faits :
11. Seul constitue un domicile, au sens de ce texte, le lieu où une personne, qu'elle y habite ou non, a le droit de se dire chez elle, quels que soient le titre juridique de son occupation et l'affectation donnée aux locaux, ledit texte n'ayant pas pour objet de garantir d'une manière générale les propriétés immobilières contre une usurpation.
12. Pour déclarer la prévenue coupable de violation de domicile, l'arrêt attaqué retient que, expulsée du logement litigieux qui a fait l'objet d'une procédure de saisie immobilière et a été adjugé à Mme [T], la prévenue s'est introduite à deux reprises, le 1er août et le 27 décembre 2018, dans ledit logement, en forçant les chaînes apposées à l'entrée, actes constitutifs de voies de fait.
13. Les juges ajoutent que Mme [T] est régulièrement adjudicataire de l'immeuble litigieux, conformément à la procédure de saisie immobilière et du jugement d'adjudication du 15 juin 2017, signifié à la société dont Mme [W] est la gérante, Mme [T] n'ayant cependant pu obtenir les clés du logement que le 5 novembre 2018.
14. Ils relèvent encore, en substance, que Mme [W] ne pouvait se prétendre titulaire d'un bail sur le logement, ce dont elle avait connaissance, et qu'elle s'était introduite en forçant les ouvertures après son expulsion.
15. En statuant ainsi, alors qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que Mme [T], adjudicataire, n'a obtenu les clés du logement que postérieurement aux premiers faits visés par la prévention et que ni elle ni son époux n'avaient, eux-mêmes, jamais occupé le bien immobilier litigieux, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
16. La cassation est par conséquent encourue de ce chef, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs.
Portée et conséquences de la cassation
17. La cassation à intervenir concerne les seules dispositions relatives à la déclaration de culpabilité de Mme [W] du chef de violation de domicile, faits commis les 1er août et 27 décembre 2018, ainsi que, par voie de conséquence, la peine prononcée, et la condamnation sur les intérêts civils relative à cette infraction. Les autres dispositions seront donc maintenues.
Crim. 3 juin 2025 n° 25-82.296
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° U 25-82.296 F-D
N° 00908
SB4 3 JUIN 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025
M. [M] [Y] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 10e section, en date du 25 février 2025, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de traite d'êtres humains en bande organisée, administration de substances nuisibles et violences aggravées, a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant sa demande de mise en liberté.
Un mémoire personnel a été produit.
Sur le rapport de M. Hill, conseiller, et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 juin 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Hill, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 26 octobre 2023, M. [M] [Y] a été mis en examen des chefs susvisés et placé en détention provisoire.
3. Par ordonnance du 8 janvier 2025, le juge des libertés et de la détention a rejeté sa demande de mise en liberté.
4. Cette ordonnance a été notifiée à la personne mise en examen le 10 janvier 2025.
5. Le 14 février suivant, l'avocat de M. [Y] a relevé appel de cette décision, mentionnant sur l'acte d'appel l'absence de notification en langue arabe de l'ordonnance susvisée.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable, pour dépassement du délai d'appel, le recours de M. [Y] contre l'ordonnance du juge des libertés du 8 janvier 2025 rejetant sa demande de mise en liberté, alors :
1°/ que le délai d'appel contre une ordonnance de rejet de demande de mise en liberté, pièce essentielle à la défense, ne commence à courir qu'à compter de la notification en langue étrangère comprise par le détenu, permettant à celui-ci d'exercer une voie de recours et les droits de la défense ; qu'en énonçant, pour déclarer irrecevable le recours de l'exposant, que la notification en français et sans traduction à ce dernier était opposable et susceptible de constituer le point de départ d'un délai d'appel, au motif que l'exposant aurait une « compréhension suffisante de la procédure » (arrêt, p. 4) et ne démontrerait pas son « incapacité de comprendre le sens de la décision » (arrêt, p. 4), la chambre de l'instruction a méconnu les articles 6,§ 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, et les articles préliminaire, 803-5 et D. 594-6 du code de procédure pénale ;
2°/ que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'appelée à chercher si une notification en langue française était opposable à l'exposant et constituait le point de départ du délai d'appel, la chambre de l'instruction a, tout à la fois, caractérisé, d'une part, que « tant au cours de sa garde à vue que devant le magistrat instructeur [...] M. [M] [Y] a bénéficié d'un interprète en langue arabe » (arrêt, p.3), d'autre part, jugé qu'il ne démontrait pas son « incapacité de comprendre le sens de la décision » (arrêt, p. 4) ; qu'en statuant par de tels motifs contradictoires, la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une contradiction de motifs qui ne satisfait pas aux exigences de l'article 593 du code de procédure pénale ;
3°/ qu'il appartient aux autorités judiciaires de prouver que la personne mise en cause parle suffisamment la langue de la procédure et non à cette dernière de démontrer que tel n'est pas le cas ; qu'en énonçant néanmoins, pour déclarer tardif son recours, que l'exposant ne démontrait pas son « incapacité de comprendre le sens de la décision » (arrêt, p. 4), et, en se fondant pour ce faire, sur sa « compréhension suffisante de la procédure, des décisions qui lui étaient opposées et des moyens de faire valoir ses droits» (arrêt, p. 4), sans rechercher s'il avait une connaissance suffisante de la langue française, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 186, 199 alinéa 4, 803-5 et D. 594-6 du code de procédure pénale.
Réponse de la Cour
7. Pour déclarer irrecevable l'appel du demandeur, l'arrêt attaqué relève que, selon l'administration pénitentiaire, la personne mise en examen a une maîtrise imparfaite du français mais le comprend et s'exprime relativement correctement et que ce constat, nécessairement subjectif, contesté par l'avocat de l'intéressé, est conforté par les déclarations de ce dernier tenant au suivi de cours de français.
8. Les juges énoncent encore que M. [Y] a révélé, tout au long de cette procédure, qu'il avait une compréhension suffisante de cette dernière, des décisions qui lui étaient opposées et des moyens de faire valoir ses droits et qu'il a ainsi régulièrement, et seul, interjeté appel le 23 août 2024, soit dans le délai légal de dix jours prévu par l'article 186 du code de procédure pénale, d'une ordonnance de rejet de demande de mise en liberté du 20 août 2024.
9. Ils ajoutent qu'il n'est pas démontré en quoi, lors de la notification de l'ordonnance de rejet du 8 janvier 2025, il se serait trouvé dans l'incapacité de comprendre le sens de la décision puis d'en interjeter appel dans le délai légal, tout comme il l'avait précédemment fait.
10. Ils relèvent encore qu'aucune mention relative à une mauvaise compréhension ou à une demande de traduction n'a été portée par le greffe pénitentiaire lors de cette notification.
11. En prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a, sans insuffisance ni contradiction, justifié sa décision.
12. Par ailleurs, l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.
Crim. 3 juin 2025 n° 24-81.304
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° V 24-81.304 F-D
N° 00741
ODVS 3 JUIN 2025
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025
Les sociétés [4], [2] et [3] et le ministre de l'économie ont formé des pourvois contre l'ordonnance du premier président de la cour d'appel de Lyon, en date du 16 janvier 2024, qui a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Auvergne-Rhône-Alpes à effectuer des opérations de visite et de saisie en vue de la recherche de la preuve de pratiques anticoncurrentielles et a prononcé sur leurs demandes en annulation desdites opérations.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de M. Hill, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat des sociétés [4], [2] et [3], les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Auvergne-Rhône-Alpes et la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraude, et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Hill, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Les 19 et 20 mai 2022, des opérations de visite et saisie, autorisées par le juge des libertés et de la détention sur le fondement de l'article L. 450-4 du code de commerce, ont été pratiquées dans les locaux des sociétés [4], [2] et [3] (les sociétés [1]).
3. Ces dernières ont relevé appel de l'ordonnance et exercé un recours contre le déroulement de ces opérations.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche, et le troisième moyen proposés pour les sociétés [1]
4. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen, pris en ses première, troisième, quatrième et cinquième branches, proposé pour les sociétés [1]
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a confirmé l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention le 13 mai 2022, a rejeté les recours des sociétés [1] tendant à voir annuler et, subsidiairement, réformer cette ordonnance, et a rejeté leurs demandes tendant à voir constater que les opérations de visites et saisies des 19 et 20 mai 2022 menées au sein des locaux des sociétés [1] ainsi que les saisies subséquentes sont nulles de plein droit, à voir ordonner la restitution et la suppression définitive des éventuelles copies de l'ensemble des documents saisis sous format électronique et papier au sein des locaux des sociétés [1] et à voir interdire à la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités d'Auvergne-Rhône-Alpes (DREETS), la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraude, et l'Autorité de la concurrence de faire un quelconque usage de ces documents et de leur contenu, en original ou en copie, alors :
« 1°/ que si le juge des libertés et de la détention se prononce au terme d'une procédure non contradictoire sur la requête par laquelle l'administration lui demande l'autorisation de procéder à des visites domiciliaires, le recours ouvert par l'article L. 450-4 du code de commerce au bénéfice de l'entreprise visitée doit être instruit et jugé dans le respect du principe du contradictoire ; qu'il en résulte que l'administration qui, à l'appui de sa requête aux fins d'être autorisée à procéder à des visites domiciliaires, a fait le choix de communiquer dans leur intégralité certains documents au juge des libertés et de la détention, ne peut licitement prétendre restreindre le droit de l'entreprise visitée d'obtenir, pour les besoins de son recours, communication de ces documents, en ne lui remettant qu'une version « non-confidentielle » de ceux-ci, expurgée de certaines mentions délibérément occultées ; qu'en l'espèce, les sociétés [1] rappelaient que la DREETS avait communiqué au juge des libertés et de la détention une version confidentielle des annexes 3 et 9-1 à sa requête ainsi qu'une version non-confidentielle, qu'elle disait avoir confectionnée pour protéger le secret d'enquêtes en cours ; qu'elles rappelaient que l'accès à la version confidentielle soumise au juge des libertés et de la détention leur avait été refusé, seule la version non-confidentielle, comportant de larges occultations, leur ayant étant communiquée ; qu'en relevant que la procédure devant le juge des libertés et de la détention n'était pas contradictoire, qu'il ne pouvait y avoir de violation du contradictoire à ce stade et que les sociétés [1] n'étaient pas fondées « à invoquer une atteinte du principe du contradictoire concernant la saisine sur simple requête du juge des libertés et de la détention, qui ne suppose aucun contradictoire, et ne peut pas plus invoquer une telle atteinte dans le cadre de la procédure d'appel en ce que les versions non occultées de ces deux annexes ne sont pas versées aux débats », cependant qu'il lui appartenait, pour garantir le droit au contradictoire et le droit à un recours effectif, de s'assurer que les sociétés requérantes aient accès aux mêmes pièces que celles que l'administration avaient soumises aux juges des libertés et de la détention, le premier président a violé l'article L.450-4 du code de commerce, ensemble l'article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l'Homme ;
3°/ que la seule circonstance que les occultations réalisées par l'administration auraient trait à des enquêtes en cours est impropre à justifier que l'entreprise visitée se voie refuser l'accès aux versions confidentielles de pièces communiquées par l'administration à l'appui de sa requête aux fins d'autorisation de procéder à des visites et saisies domiciliaires, dès lors que ces pièces ont été communiquées au juge des libertés et de la détention et que ce dernier s'y est référé pour prononcer une décision leur faisant grief ; qu'en jugeant le contraire, le Premier Président a violé l'article L.450-4 du code de commerce, ensemble l'article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l'Homme ;
4°/ en toute hypothèse qu'à supposer même que le secret de l'enquête puisse être opposé à l'entreprise visitée et puisse justifier que les pièces produites par l'administration au soutien de sa requête ne lui soient communiquées que dans des versions non-confidentielles comportant des occultations, il n'en appartiendrait pas moins au Premier Président de la cour d'appel, auquel le secret de l'enquête n'est pas opposable et qui est tenu d'apprécier le bien-fondé de la requête, d'analyser lui-même l'ensemble des pièces soumises au juge des libertés et de la détention ; qu'en refusant de procéder lui-même à l'analyse des versions confidentielles des annexes 3 et 9-1 soumises au juge des libertés et de la détention et en jugeant qu'aucune « atteinte » ne saurait être invoquée « dans le cadre de la procédure d'appel en ce que les versions non occultées des annexes [en litige] n'ont pas été porté à [sa] connaissance », le Premier Président de la cour d'appel a méconnu son office, en violation des articles L.450-4 du code de commerce et 6 § 1 de la convention européenne des droits de l'Homme ;
5°/ qu'il en va d'autant plus ainsi que l'analyse des versions confidentielles communiquées par l'administration au juge des libertés et de la détention était nécessaire aux fins de vérifier si les occultations réalisées étaient justifiées et proportionnées à l'atteinte portée au principe du contradictoire et de s'assurer que ces occultations ne dissimulaient pas d'éventuels éléments à décharge ; qu'en refusant d'analyser lui-même les versions confidentielles des annexes 3 et 9-1 soumises au juge des libertés et de la détention, au motif qu'aucune « atteinte » ne saurait être invoquée « dans le cadre de la procédure d'appel en ce que les versions non occultées des annexes [en litige] n'ont pas été porté à [sa] connaissance », le Premier Président de la cour d'appel a violé l'article L.450-4 du code de commerce, ensemble l'article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l'Homme. »
Réponse de la Cour
6. Le moyen n'est pas fondé pour les motifs qui suivent.
7. En premier lieu, le premier président s'est assuré que le juge des libertés et de la détention a caractérisé l'existence de présomptions de pratiques commerciales anticoncurrentielles au regard de l'ensemble des éléments d'information fournis par l'administration et non pas seulement des versions confidentielles des deux annexes litigieuses.
8. En second lieu, il n'est pas démontré que la production des pièces invoquées par le moyen aurait été de nature à remettre en cause l'appréciation du juge sur les présomptions de pratiques anticoncurrentielles, ni sur la proportionnalité de la mesure coercitive demandée. 9. Enfin, l'accès au complet dossier et la discussion des pièces produites pourra s'exercer en cas d'engagement des poursuites pendant la phase juridictionnelle, lors de laquelle les principes du contradictoire et de l'égalité des armes sont garantis.
Sur le deuxième moyen proposé pour les sociétés [1]
Enoncé du moyen
10. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a confirmé l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention le 13 mai 2022, a rejeté les recours des sociétés [1] tendant à voir annuler et, subsidiairement, réformer cette ordonnance, et a rejeté leurs demandes tendant à voir constater que les opérations de visites et saisies des 19 et 20 mai 2022 menées au sein des locaux des sociétés [1] ainsi que les saisies subséquentes sont nulles de plein droit, à voir ordonner la restitution et la suppression définitive des éventuelles copies de l'ensemble des documents saisis sous format électronique et papier au sein des locaux des sociétés [1], à voir interdire à la DREETS, la DGCCRF et l'Autorité de la concurrence de faire un quelconque usage de ces documents et de leur contenu, en original ou en copie, et à voir condamner la DREETS à verser la somme de 30 000 euros aux sociétés [1], en application de l'article 700 du code de procédure civile, et aux tiers dépens, alors :
« 1°/ que le juge des libertés et de la détention ne peut faire état de déclarations anonymes dans son ordonnance qu'à la condition que ces déclarations lui aient été soumises au moyen de documents établis et signés par les agents de l'administration, permettant d'en apprécier la teneur, et que ces déclarations soient corroborées par d'autres éléments d'information ; que le juge des libertés et de la détention et le Président de la cour d'appel ne peuvent être en mesure d'apprécier la teneur de telles déclarations qu'à charge de vérifier l'existence et l'identité du déclarant, ainsi que sa crédibilité, ce qui implique de prendre connaissance d'une version non anonymisée de la déclaration que l'administration doit leur remettre ; qu'en jugeant qu'il ne « résulte d'aucun texte applicable en l'espèce, alors que les sociétés [1] n'excipent pas de l'existence d'une disposition impérative, qui impose au juge des libertés et de la détention de disposer ou à se faire procurer une version non anonyme des procès-verbaux dressés par l'administration recueillant les déclarations de personnes n'ayant pas souhaité que leur nom soit divulgué et que « le juge des libertés et de la détention n'avait pas l'obligation de procéder au contrôle de ces annexes par la nécessaire production d'une version révélant l'identité des déclarants », le Premier Président a violé l'article L.450-4 du code de commerce, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme ;
2°/ qu'en ajoutant que « la critique opérée par les sociétés [1] concernant la pertinence de cette appréciation est sans rapport avec le contrôle de régularité ici à effectuer, son moyen examiné à ce stade ne portant que sur la régularité de la prise en compte de déclarations anonymes », et que « l'examen de ses critiques au fond est inopérant à conduire à l'annulation de l'ordonnance déférée, mais seulement de nature au travers d'une nouvelle appréciation du premier président de nature à conduire le cas échéant à une infirmation de la décision du juge des libertés et de la détention », cependant que le juge des libertés et de la détention ne pouvait, sans exposer son ordonnance à l'annulation, fonder son autorisation sur des déclarations anonymes sans procéder à l'analyse des versions confidentielles desdites déclarations pour en apprécier concrètement le contenu, et qu'il lui appartenait lui-même de procéder à un tel examen, le Premier Président a violé l'article L.450-4 du code de commerce, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'Homme. »
Réponse de la Cour
11. Le moyen n'est pas fondé pour les motifs qui suivent.
12. En premier lieu, le juge, qui doit s'assurer du caractère suffisant des présomptions qui résultent des éléments d'information produits aux fins de justifier la visite, peut faire état de déclarations anonymes, dont l'article 450-2 du code de commerce n'impose pas qu'elles soient consignées dans un procès-verbal, dans la mesure où elles lui sont soumises au moyen de documents établis et signés par les agents de l'administration permettant d'en apprécier la teneur et qu'elles sont corroborées par d'autres éléments d'information.
13. En second lieu, dans le contentieux des autorisations de visites domiciliaires en matière de concurrence, aucun texte ne prévoit, lors du recueil de la déclaration anonyme, l'établissement d'une version non anonymisée ni n'exige que le juge des libertés et de la détention doive vérifier l'existence et l'identité du déclarant.
Sur les quatrième et cinquième moyens proposés pour les sociétés [1] Enoncé des moyens
14. Le quatrième moyen proposé pour les sociétés [1] critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a fait droit, de façon simplement partielle, aux recours formés par les parties visées en entête de l'ordonnance contre les opérations de visite et de saisie effectuées dans les locaux de la société [4], a limité l'annulation prononcée à la seule saisie opérée des 2 561 documents listés dans la pièce n° 10 de la société [4], et en ce qu'elle a rejeté leur demande d'annulation de l'ensemble des opérations de visites et de saisies qui sont intervenues au sein des locaux de la société [4] les 19 et 20 mai et les 7 et 8 juillet 2022, alors :
« 1°/ que la saisie de documents couverts par le secret des correspondances avocat-client doit entraîner l'annulation de l'ensemble des opérations pratiquées lorsque, bien que dûment avisés par l'entreprise visitée de l'existence de pièces couvertes par le secret des correspondances avocat client et en lien avec l'objet de l'enquête, l'administration décide néanmoins de placer les documents saisis sous scellés définitifs, et en acquiert la libre disposition ; que ces pratiques présentent en effet un caractère déloyal et portent une atteinte irrémédiable aux droits de la défense, de sorte qu'elles doivent emporter l'annulation des opérations dans leur ensemble ; qu'en se bornant à ordonner l'annulation de la saisie irrégulière de pièces couvertes par le secret des correspondances avocat-client, sans rechercher, comme il y était invité, si les pièces saisies n'étaient pas manifestement en lien avec l'objet de l'enquête et si ces pièces n'avaient pas été appréhendées par les agents de l'administration alors même qu'ils avaient été informés, notamment au stade de l'ouverture des scellés provisoires, de leur caractère protégeable et de leur lien avec l'objet de l'enquête, le Premier Président n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, de l'article L.450-4 du code de commerce, et de l'article 6§1 de la convention européenne des droits de l'Homme ;
2°/ en outre, que la seule possibilité reconnue à l'entreprise visitée d'obtenir la restitution des documents protégés ne suffit pas à garantir le droit de l'entreprise visitée à un recours effectif lorsque, bien que dûment avisés par l'entreprise visitée de l'existence, parmi les pièces saisies, de correspondances couvertes par le secret des correspondances avocat client et en lien avec l'objet de l'enquête, l'administration a néanmoins unilatéralement décidé de placer les documents saisis sous scellés définitifs et a, de la sorte, pu à sa guise les consulter ; qu'en se bornant dès lors à annuler la saisie des documents couverts par le secret des correspondances avocat-client, le Premier Président de la cour d'appel a violé l'article L.450-1 du code de commerce, ensemble l'article 6 § 1 de la convention européenne des droits de l'Homme. »
15. Le cinquième moyen proposé pour les sociétés [1] critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a fait droit, de façon simplement partielle aux recours formés par les parties visées en entête de cette ordonnance contre les opérations de visite et de saisie effectuées dans les locaux de la société [4], a limité l'annulation prononcée à la seule saisie opérée des 2 561 documents listés dans la pièce 10 de la société [4], et a rejeté leur demande tendant à voir annuler la saisie papier de la correspondance visée en pièce n° 9, alors « que la protection accordée aux correspondances avocat client s'étend aux échanges précontentieux impliquant un avocat ; qu'en l'espèce, les sociétés [1] faisaient valoir que l'administration avait saisi un échange de courriels précontentieux en lien avec l'objet de l'enquête et auquel son avocat était partie ; qu'en jugeant que cet échange ne présentait pas un caractère protégeable au motif que cette pièce correspondait essentiellement à des échanges de courriers purement internes, que l'avocat des sociétés [1] avait été mis en copie d'un des courriels seulement, et que ceux-ci ne faisaient état d'aucun conseil dispensé par un avocat, sans rechercher si cet échange ne correspondait pas à un échange précontentieux, mettant en cause un avocat, et étant à ce titre couvert par le secret des correspondances avocat-client, le Premier Président délégué n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 66-5 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971. »
Réponse de la Cour
16. Pour faire droit partiellement aux recours formés contre les opérations de visite et de saisie effectuées dans les locaux de la société [4] en annulant la saisie opérée des 2 561 documents listés dans la pièce n° 10 de ladite société, l'ordonnance attaquée énonce que l'exercice des droits de la défense visé par la société [4] suppose que les courriers qui seraient protégés par ce principe la concernent, et que sont protégés par le secret professionnel les courriels et courriers directs entre le client et l'avocat comme émetteur ou comme seul destinataire externe à l'entreprise, matérialisés par sa présence dans les émetteurs des messages ou dans les destinataires directs.
17. Le juge ajoute que la partie qui sollicite l'annulation de la saisie des pièces protégées doit indiquer celles qu'elle estime couvertes par la confidentialité et préciser pour chacune l'atteinte à l'exercice de ses droits à se défendre.
18. Il précise qu'il ne saurait être imposé au premier président de consulter l'intégralité des pièces saisies, bon nombre d'entre elles ne faisant l'objet d'aucune discussion, pour tenter de déterminer si certaines de ces pièces ont été illégalement saisies.
19. En statuant ainsi, le premier président n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.
Mais sur moyen proposé pour le ministère de l'économie
20. Le moyen proposé pour le ministère de l'économie critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a fait droit partiellement aux recours formés contre les opérations de visite et de saisie effectuées dans les locaux de la société [4], a annulé la saisie opérée des 2 561 documents listés dans la pièce 10 de la société [4] et ordonné la restitution par l'administration fiscale des pièces susvisées dans un délai de huit jours à compter de la notification de la présente ordonnance, alors:
« 1°/ que le seul fait que des correspondances couvertes par le secret professionnel soient échangées directement entre un avocat et son client ne suffit pas à les rendre insaisissables; que pour être insaisissables ces correspondances doivent consister en des documents en défense ou en conseil ayant trait aux droits de la défense en lien avec la procédure en cours ; qu'en estimant que l'annulation de la saisie des documents soumis au secret professionnel échangés entre l'avocat et son client suppose une atteinte en lien avec l'exercice des droits de la défense par la partie concernée et que tel est le cas lorsque les courriers litigieux sont échangés directement entre l'avocat et son client, le premier président a violé les articles 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, L. 450-4 du code de commerce, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ que le premier président, pour se prononcer sur une demande d'annulation de saisies de correspondances échangées entre un avocat et son client, doit rechercher si ces documents ont trait aux droits de la défense en lien avec la procédure en cours ; qu'il ne peut déduire la présence de ces éléments du seul fait que l'administration défenderesse au recours en annulation des opérations de saisie n'a pas démontré la saisissabilité de ces documents sauf à inverser la charge de la preuve ; qu'en l'espèce, en jugeant qu'il incombait à l'administration défenderesse au recours en annulation de pièces saisies de lui fournir ses explications sur l'atteinte alléguée par son adversaire et qu'à défaut pour la DREETS d'avoir fourni un listing des pièces saisies litigieuses et d'avoir réfuté le tableau adverse sur les correspondances prétendument protégées, il était dans l'impossibilité d'opérer un contrôle des correspondances saisies et devait faire droit à la demande d'annulation des documents saisis listés 24N0038/LDG/CBV en pièce 10 par la société [1], le premier président, qui a inversé la charge de la preuve, n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, L. 450-4 du code de commerce, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que le premier président de la cour d'appel, statuant sur un recours en annulation de saisies de correspondances échangées entre un avocat et son client, doit rechercher si ces documents ont trait à l'exercice des droits de la défense en lien avec la procédure en cours ; qu'en particulier, pour se prononcer sur la nullité de la saisie de correspondances échangées entre un avocat et son client effectuée dans le cadre des opérations de visite et saisie diligentées par les agents de la DREETS, le premier président de la cour d'appel doit vérifier, non seulement que les correspondances litigieuses ont trait au secret professionnel, mais aussi qu'il s'agit de documents en défense ou en conseil, ayant trait aux droits de la défense, en lien avec la procédure en cours ; qu'en se bornant, pour prononcer la nullité des saisies des documents listés en pièce 10 de la société [1], à affirmer que les sociétés ayant sollicité cette annulation avaient produit la liste de ces documents en faisant figurer « au regard de chaque pièce discutée les motifs succincts dans sa demande d'annulation de la saisie », et que l'administration était défaillante dans la preuve inverse en ce qu'elle avait simplement allégué que la saisie desdits documents était présumée régulière, sans aucunement rechercher, comme il y était pourtant tenu, si ces documents avaient bien trait aux droits de la défense, le premier président n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, L. 450-4 du code de commerce, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
4°/ que tout jugement, arrêt ou ordonnance doit comporter les motifs propres à justifier la décision et que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que le ministre en charge de l'économie, dans ses écritures, a fait valoir que la liste apportée par la société [1] et l'annotation figurant devant les documents listés (au nombre de 2561) sont insuffisantes à démontrer que ces correspondances sont en lien avec l'exercice des droits de la défense ; qu'en prononçant l'annulation des saisies de ces documents, sans répondre au moyen péremptoire des conclusions de l'administration dont il était saisi, le premier président n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, L. 450-4 du code de commerce, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la cour
Vu les articles 66-5 de la loi du 31 décembre 1971 et L. 450-4 du code de commerce :
21. Si, selon les principes rappelés par le premier de ces textes, les correspondances échangées entre le client et son avocat sont, en toutes matières, couvertes par le secret professionnel, il demeure qu'elles peuvent notamment être saisies dans le cadre des opérations de visite prévues par le second dès lors qu'elles ne concernent pas l'exercice des droits de la défense.
22. Il résulte du second de ces textes que le premier président, statuant sur la régularité de ces opérations, ne peut ordonner la restitution des correspondances entre l'occupant des lieux visités et un avocat en raison de leur confidentialité que si celles-ci ont trait à l'exercice des droits de la défense.
23. Pour faire droit partiellement à la demande de la société [4] que soient retirées des fichiers saisis les correspondances avec ses avocats, l'ordonnance attaquée retient qu'il appartient aux parties de fournir les éléments nécessaires pour permettre au premier président d'exercer son contrôle sur la légalité des opérations de visite et de saisie et, s'agissant du contrôle du respect du secret des correspondances entre avocats ou entre l'avocat et son client, de lui présenter concrètement les pièces litigieuses.
24. Le premier président ajoute que la partie qui sollicite l'annulation de la saisie des pièces protégées doit pour sa part indiquer les documents qu'elle estime couverts par la confidentialité et préciser pour chacune l'atteinte à l'exercice de ses droits à se défendre et qu'il incombe par ailleurs à l'administration de fournir ses explications sur l'atteinte alléguée par son adversaire en ce qu'il appartient de manière commune aux parties de participer à la manifestation de la vérité.
25. Il indique qu'il est vainement recherché dans les pièces du débat une quelconque liste dressée par la DREETS concernant les documents informatiques saisis susceptibles d'être concernés ou non par une atteinte au secret de la vie privée ou des correspondances entre l'avocat et son client ou réfutant le tableau adverse sur ces correspondances dites protégées et que dans sa pièce n° 10 bis la société [4] fait figurer au regard de chaque pièce discutée les motifs succincts de sa demande d'annulation de la saisie.
26. Il indique que la DREETS n'est pas fondée à se prévaloir d'une charge défaillante de la preuve par la société [4] tout en refusant à la production adverse la production des documents dits litigieux sous le sceau de la confidentialité et en se contentant d'affirmer qu'il est manifestement impossible à la lecture du tableau produit par ces sociétés de vérifier et de juger du caractère ou non protégé des correspondances en question.
27. Il ajoute que la société [4] identifie de manière précise les fichiers dits protégés, mais que la DREETS, qui a établi pour sa part son propre tableau dans le cadre des opérations d'ouverture des scellés, se dispense de manière incompréhensible de les fournir dans le cadre du présent recours alors qu'elle souligne qu'il est manifestement impossible de vérifier l'existence de la protection mise en avant par la société [4].
28. En se déterminant ainsi, le premier président a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.
29. En effet, la charge de la preuve que des documents ou correspondances couverts par le secret professionnel sont insaisissables, en ce qu'ils ont trait aux droits de la défense, incombe exclusivement à la partie qui conteste leur saisie devant le premier président.
30. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquence de la cassation
31. La cassation sera limitée aux seules dispositions relatives à l'annulation de la saisie des 2561 documents énumérés dans la pièce n° 10 et ordonnant leur restitution, toutes autres dispositions étant expressément maintenues.
Crim. 28 mai 2025 n° 25-81.998
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° V 25-81.998 F-D
N° 00881
28 MAI 2025
GM
QPC INCIDENTE : NON LIEU À RENVOI AU CC
M. BONNAL président,
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025
M. [F] [E] a présenté, par mémoire spécial reçu le 10 avril 2025, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bastia, en date du 27 février 2025, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, d'infractions à la législation sur les stupéfiants et blanchiment, en récidive, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire.
Sur le rapport de Mme Clément, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [F] [E], et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Clément, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« L'article 197 du Code de procédure pénale viole-t-il les droits de la défense garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et est-il entaché d'incompétence négative en violation de l'article 34 de la Constitution en ce qu'il n'impose à la Chambre de l'instruction qui constate l'absence au dossier de pièces de la procédure de renvoyer l'audience à une date ultérieure que « s'il lui apparaît que la connaissance de ces pièces est indispensable à l'examen de la requête ou de l'appel qui lui est soumis », quand l'exercice effectif des droits de la défense impose que la totalité du dossier soit mise à disposition de la défense, laquelle est seule à pouvoir apprécier si une pièce est utile ou non à l'exercice de ses droits, de sorte qu'en cas de constatation du manque d'une pièce, la Chambre de l'instruction devrait être tenue de renvoyer l'audience en tout état de cause ? »
2. La disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
3. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
4. La question posée ne présente pas un caractère sérieux pour les motifs qui suivent.
5. En premier lieu, l'article 197, alinéa 4, du code de procédure pénale, en limitant le report de l'audience par la chambre de l'instruction au cas d'absence d'une pièce indispensable à l'examen de la requête ou de l'appel qui lui est soumis, garantit un juste équilibre entre le droit des justiciables à un recours effectif devant les juges et les objectifs d'intérêt général de célérité dans le traitement des procédures et de bonne administration de la justice.
6. En deuxième lieu, le dossier de la procédure devant être mis à disposition de l'avocat avant l'audience de la chambre de l'instruction correspond à la copie de tous les actes de l'information accomplis jusqu'au jour où ce dossier est adressé au procureur général. La chambre de l'instruction, tenue de veiller au respect du contradictoire, ne peut fonder sa décision que sur les pièces ainsi communiquées aux parties.
7. En dernier lieu, les motifs du rejet du report de l'audience, le cas échéant, sont soumis au contrôle de la Cour de cassation.
8. En conséquence, il n'y a pas lieu au renvoi de la question posée au Conseil constitutionnel.
Crim. 28 mai 2025 n° 24-83.556 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° T 24-83.556 F-B
N° 00720
ECF 28 MAI 2025
ANNULATION PARTIELLE PAR VOIE DE RETRANCHEMENT SANS RENVOI
M. BONNAL président,
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025
M. [Z] [C] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre 5-1, en date du 14 mai 2024, qui, pour recel, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, 30 000 euros d'amende, cinq ans d'inéligibilité, et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Gillis, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [Z] [C], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025, l'avocat du demandeur ayant eu la parole en dernier, où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gillis, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 14 avril 2023, M. [Z] [C] a été condamné par le tribunal correctionnel, pour recel de détournements de fonds publics, à trois ans d'emprisonnement avec sursis, cinq ans d'inéligibilité avec exécution provisoire et une confiscation.
3. L'intéressé et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième moyens
4. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le septième moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a prononcé, à titre de peine complémentaire, la privation du droit d'éligibilité pour cinq ans et en a ordonné l'exécution provisoire, alors « que le juge pénal ne peut prononcer l'exécution provisoire de la peine d'inéligibilité sans avoir apprécié le caractère proportionné que cette mesure est susceptible de porter à l'exercice des mandats en cours et à la préservation de la liberté de l'électeur ; que l'arrêt attaqué, qui prononce l'exécution provisoire de la peine d'inéligibilité, ne comporte aucun motif ni sur l'atteinte portée aux mandats en cours du prévenu, maire d'une commune de plus de 150 000 habitants et président d'une métropole, ni sur la préservation de la liberté de l'électeur ; que l'exécution provisoire de la peine a ainsi été prononcée en violation des articles 131-10, 131-26-2 du code pénal, 471 et 593 du code de procédure pénale, 6 de la Déclaration des droits de 1789. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 131-10, 131-26, 2°, du code pénal, 471, alinéa 4, et 593 du code de procédure pénale et la décision du Conseil constitutionnel n° 2025-1129 QPC du 28 mars 2025 :
6. Il résulte des trois premiers textes que la peine d'inéligibilité peut être assortie de l'exécution provisoire.
7. Selon la décision précitée, lorsque le juge prononce une telle mesure, il lui revient, dans sa décision, d'apprécier le caractère proportionné de l'atteinte qu'elle est susceptible de porter à l'exercice d'un mandat en cours et à la préservation de la liberté de l'électeur.
8. Il résulte du dernier texte que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
9. Pour assortir de l'exécution provisoire la peine d'inéligibilité prononcée à l'encontre du prévenu, l'arrêt attaqué indique que cette mesure est justifiée eu égard à la gravité des manquements qui portent profondément atteinte à l'image des fonctions électives, aux circonstances de l'infraction qui mettent en cause la capacité de l'intéressé à exercer un mandat public électif à court ou moyen terme et à la nécessité de prévenir le risque de renouvellement de l'infraction par une réponse rapide et efficiente.
10. En se déterminant ainsi, sans rechercher si cette exécution provisoire portait une atteinte proportionnée à l'exercice d'un mandat en cours et à la préservation de la liberté de l'électeur, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision.
11. L'annulation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquences de l'annulation
12. L'annulation sera limitée aux dispositions ayant assorti de l'exécution provisoire la peine d'inéligibilité de cinq ans prononcée à l'encontre de M. [C].
13. Compte tenu de ce que la présente décision rend définitive la condamnation à la peine d'inéligibilité, l'annulation pourra avoir lieu sans renvoi par retranchement de cette seule disposition.
Crim. 28 mai 2025 n° 25-82.223
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 25-82.223 F-D
N° 00878
GM 28 MAI 2025
IRRECEVABILITE REJET
M. BONNAL président,
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025
M. [K] [T] a formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, en date du 13 mars 2025, qui, dans la procédure suivie contre lui, des chefs de viol aggravé et détention d'images pédopornographiques, a rejeté sa demande de mise en liberté.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Michon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [K] [T], et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Michon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. A la suite d'une information, M. [K] [T] a été, ainsi que de nombreux autres prévenus, mis en accusation des chefs rappelés ci-dessus devant la cour criminelle départementale par arrêt du 5 octobre 2023.
3. Il a été condamné à dix ans de réclusion criminelle par arrêt de cette juridiction du 19 décembre 2024, dont il a interjeté appel, et placé en détention.
4. Le 13 janvier 2025, M. [T] a formé une demande de mise en liberté devant la chambre de l'instruction.
Examen de la recevabilité du pourvoi n° 2025/10
5. Le demandeur, ayant épuisé, par l'exercice qu'il en avait fait le même jour, 13 mars 2025, en formant le pourvoi n° 2025/9, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision.
6. Seul est recevable le pourvoi n° 2025/9.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
7. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le moyen, pris en ses autres branches Enoncé du moyen
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la demande de mise en liberté de M. [T], alors :
« 3°/ que dans son mémoire régulièrement déposé, M. [T] expliquait que la détention provisoire pendant l'instruction avait eu des effets dévastateurs sur sa santé mentale, ce qui avait conduit à sa mise en liberté et à son suivi socio-judiciaire avec injonction de soin ; en retenant, pour juger justifié son maintien en détention, le risque de représailles pesant M. [T] sans répondre à cette articulation essentielle de son mémoire établissant l'effet délétère de la détention sur sa santé, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 593 du code de procédure pénale ;
4°/ que dans son mémoire régulièrement déposé, M. [T] rappelait les conclusions d'expertise établissant son absence de perversion sexuelle et de dangerosité ainsi que ses déclarations manifestant son empathie pour Mme [O] et la difficulté pour lui de vivre avec la conscience de ses actes ; en déduisant, pour juger justifié son maintien en détention, le risque de renouvellement de l'infraction du seul constat, non étayé, d'absence de prise de conscience de la gravité des faits, sans procéder à un examen global de la situation de M. [T] au regard de l'ensemble des circonstances qu'il invoquait, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 143-1, 144, 148-1 et 593 du code de procédure pénale ;
5°/ que dans son mémoire régulièrement déposé, M. [T] rappelait son contrôle judiciaire inviolé pendant deux ans d'instruction, sa comparution libre devant la cour criminelle départementale, y compris après les très lourdes réquisitions, et ses gages de réinsertion professionnelle et produisait une offre d'hébergement compatible avec une surveillance électronique ; qu'en jugeant insuffisantes ses garanties de représentation aux seuls motifs que, compte tenu de la lourde peine encourue, M. [T] pourrait être incité à ne pas se présenter devant la cour d'assises d'appel, sans procéder à un examen global de la situation de M. [T] au regard de l'ensemble des circonstances qu'il invoquait, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 143-1, 144, 148-1 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
9. Pour rejeter la demande de mise en liberté, l'arrêt attaqué énonce notamment que le déroulement du procès et les conditions dans lesquelles les accusés libres ont été pris à partie font craindre des actions violentes à l'égard des personnes mises en cause, dont M. [T], dont le nom a été diffusé sur les réseaux sociaux.
10. Les juges ajoutent que les risques de renouvellement de faits d'infraction sexuelle restent particulièrement élevés compte tenu de l'absence de prise en compte de la gravité des faits par le demandeur, mais aussi de sa consultation régulière de sites de rencontre proposant des pratiques sexuelles déviantes et de sa consultation d'images pédopornographiques.
11. Ils précisent qu'il convient également de s'assurer de ses garanties de représentation en justice, M. [T] n'ayant pu que prendre conscience de la lourde peine encourue et étant, selon l'arrêt de première instance, sans emploi.
12. En statuant ainsi, par des motifs relevant de son appréciation souveraine et dès lors qu'elle n'avait pas à suivre le demandeur dans le détail de son argumentation, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.
13. Ainsi, le moyen doit être écarté.
14. Par ailleurs, l'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 143-1 et suivants du code de procédure pénale.
Crim. 28 mai 2025 n° 24-83.385
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° H 24-83.385 F-D
N° 00722
ECF 28 MAI 2025
CASSATION
M. BONNAL président,
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025
M. [L] [B] et la société [1] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa, chambre correctionnelle, en date du 2 avril 2024, qui, pour escroquerie, a condamné, le premier, à six mois d'emprisonnement avec sursis et 500 000 francs CFP d'amende, la seconde, à 4 000 000 de francs CFP d'amende, et pour fausse déclaration ou manoeuvre en Nouvelle-Calédonie ayant pour but ou effet d'obtenir une exonération attachée à l'importation de produits, et solidairement, à une amende douanière et au paiement des droits éludés.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de Mme Bloch, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de la société [1] et de M. [L] [B], les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction générale des douanes et droits indirects et de la direction du service des douanes de la Nouvelle-Calédonie, et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Bloch, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le service régional d'enquête des douanes de Nouméa a procédé au contrôle des opérations d'importation de marchandises réalisées par la société [1], gérée par M. [L] [B], qui a mis en évidence des minorations des valeurs déclarées en douane par cette société.
3. Par jugement du 14 octobre 2022, le tribunal correctionnel a condamné M. [B] à six mois d'emprisonnement avec sursis et 500 000 francs CFP d'amende, la société [1] à 4 000 000 francs CFP d'amende et, solidairement, à 21 025 549 francs CFP d'amende douanière et au paiement des droits éludés.
4. Les prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté l'intégralité des exceptions de nullité soulevées par les prévenus, a déclaré la société [1] et M. [B] coupables de fausses déclarations ayant pour but d'obtenir une exonération attachée à l'importation de produits et d'escroquerie, et a prononcé sur la peine, la sanction douanière et le paiement des droits, alors « qu'en vertu du principe du secret du délibéré, seuls doivent participer au délibéré les juges devant lesquels l'affaire a été plaidée, à l'exclusion du greffier et du représentant du ministère public ; en l'espèce, il résulte des mentions de l'arrêt que Mme Abentin, greffier, était présente « lors des débats, du délibéré », et que le ministère public était « représenté aux débats, au délibéré et au prononcé de l'arrêt par M. Philippe Faisandier, avocat général » ; en l'état de ces mentions, dont il résulte que le ministère public et le greffier ont participé au délibéré et qui, en toute hypothèse, ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer de la régularité de la composition de la juridiction lors du délibéré, la cour d'appel a violé le principe susvisé et l'article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l'Homme, et l'arrêt est nul. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 485, 486 et 512 du code de procédure pénale :
6. Selon ces textes, tout jugement ou arrêt doit établir la régularité de la composition de la juridiction qui l'a rendu.
7. Il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le greffier et le représentant du ministère public étaient présents lors du délibéré.
8. En l'état de ces énonciations, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer de la régularité de la composition de la juridiction.
9. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Et sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté l'intégralité des exceptions de nullité soulevées par les prévenus, a déclaré la société [1] et M. [B] coupables de fausses déclarations ayant pour but d'obtenir une exonération attachée à l'importation de produits et d'escroquerie, et a prononcé sur la peine, la sanction douanière et le paiement des droits, alors :
« 1°/ que selon l'article 406 du code de procédure pénale, devant la chambre des appels correctionnels, le président ou l'un des conseillers, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; la méconnaissance de cette obligation d'information fait nécessairement grief au prévenu ; en l'espèce, il résulte des mentions de l'arrêt qu'après que « le président a constaté l'absence des prévenus », M. [L] [B], prévenu, a été entendu « en personne et pour le compte de la Sarl [1] (RCS 521 179) en ses explications » ; ces mentions contradictoires sur la présence ou l'absence des prévenus à l'audience, qui ne peuvent être complétées par les notes d'audience non signées du greffier et du président, ne mettent pas la Cour de cassation en mesure d'établir si le président devait ou non leur notifier leur droit de se taire ; en cet état, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé, outre les droits de la défense, et l'arrêt est nul d'une nullité d'ordre public ;
2°/ que selon l'article 513 du code de procédure pénale, le prévenu ou son avocat auront toujours la parole en dernier ; cette même contradiction sur la présence ou l'absence des prévenus à l'audience ne permet pas non plus à la Cour de cassation de déterminer si les prévenus devaient avoir la parole en dernier, le récit du déroulement des débats s'achevant par les réquisitions du ministère public ; la cour d'appel a donc également violé l'article 513 du code de procédure pénale et les droits de la défense ;
3°/ que même à supposer que la chambre criminelle se considère en mesure d'affirmer que les prévenus n'étaient pas comparants, les énonciations de l'arrêt, qui ne peuvent être complétées par les notes d'audience non signées par le greffier et le président, n'établissent pas que leur avocat, qui était présent à l'audience, a eu la parole en dernier ; la cour d'appel a donc violé l'article 513 du code de procédure pénale et les droits de la défense. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 406, 512, 513, alinéa 4, et 593 du code de procédure pénale :
11. Selon le premier et le deuxième de ces textes, devant la chambre des appels correctionnels, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. La méconnaissance de l'obligation d'informer le prévenu du droit de se taire lui fait nécessairement grief.
12. Aux termes du troisième, le prévenu ou son avocat auront toujours la parole les derniers.
13. Il résulte du dernier que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
14. Il ressort des mentions de l'arrêt attaqué que, d'une part, M. [B] et la société [1], dont il est constaté l'absence à l'audience, sont représentés par leur avocat et le président n'a pas été en mesure de donner au prévenu, absent, l'avertissement prévu par les dispositions de l'article 132-29 du code pénal sur le sursis simple, d'autre part, lors des débats, M. [B] a été entendu en ses explications, enfin, l'avocat des prévenus l'a été en sa plaidoirie avant les réquisitions du ministère public.
15. En statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.
16. En effet, les mentions de l'arrêt, lesquelles ne peuvent être complétées par les notes d'audiences qui ne sont ni signées par le greffier, ni visées par le président, sont contradictoires sur la présence ou l'absence des prévenus à l'audience, de sorte qu'elles ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer s'ils devaient être informés de leur droit de se taire, et font apparaître que le ministère public a été entendu après que l'avocat des prévenus eut présenté ses moyens de défense.
17. La cassation est donc également encourue de ce chef.
Crim. 28 mai 2025 n° 25-82.171 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° G 25-82.171 F-B
N° 00879
GM 28 MAI 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025
M. [Z] [F] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 20 février 2025, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, d'importation de stupéfiants en bande organisée et associations de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Samuel, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [Z] [F], et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Samuel, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [Z] [F] a été mis en examen, le 5 août 2021, des chefs d'importation non autorisée de stupéfiants commise en bande organisée, participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement, participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime, blanchiment du produit d'un délit de trafic de stupéfiants et infractions à la législation sur les stupéfiants.
3. Il a été placé en détention provisoire le même jour.
4. Par ordonnance du 4 février 2025, le juge des libertés et de la détention a prolongé cette détention pour une durée de six mois.
5. M. [F] a relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
6. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté les moyens de nullité formulés par la défense, dit l'appel mal fondé et confirmé l'ordonnance en date du 4 février 2025 par laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la détention provisoire de M. [F] pour une durée de six mois, alors :
« 1°/ que la loi ne permet pas à l'interprète convoqué aux fins d'assister la personne mise en examen lors du débat contradictoire préalable à la prolongation de sa détention provisoire de comparaître à ce débat à distance par un moyen de télécommunication ; qu'au cas d'espèce, la défense faisait valoir que le second débat contradictoire tenu par le juge des libertés et de la détention, à supposer qu'il ne soit pas entaché d'excès de pouvoir, était irrégulier pour avoir été tenu en l'absence physique de l'interprète, qui a comparu par téléphone ; qu'en affirmant, pour refuser d'annuler ce débat, que si l'article 706-71, alinéa 8, du code de procédure pénale, vise uniquement l'assistance à distance de l'interprète au cours d'une audition, d'un interrogatoire ou d'une confrontation, ce texte « n'est pas exclusif du débat contradictoire en vue de la prolongation de la détention provisoire », la chambre de l'instruction a violé les articles 6, § 3, a) et e), de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 803-5, D. 594-4, 706-71, 145-2, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
2°/ qu'à supposer que la loi ne permette pas à l'interprète convoqué aux fins d'assister la personne mise en examen lors du débat contradictoire préalable à la prolongation de sa détention provisoire de comparaître à ce débat à distance par un moyen de télécommunication, c'est à la condition que soit établie l'impossibilité pour un interprète de se déplacer pour participer à ce débat ; qu'au cas d'espèce, la défense faisait valoir que le second débat contradictoire tenu par le juge des libertés et de la détention, à supposer qu'il ne soit pas entaché d'excès de pouvoir, était irrégulier pour avoir été tenu en l'absence physique de l'interprète, qui a comparu par téléphone, cependant même que rien n'établissait l'impossibilité pour un interprète de se déplacer ; que l'indisponibilité du seul interprète assermenté et inscrit sur une liste d'expert convoqué par le juge des libertés et de la détention était en effet connue depuis au moins une semaine, sans que ce juge n'ait convoqué aucun autre interprète susceptible d'assister l'exposant ; qu'en retenant, pour refuser d'annuler ce débat, que si « la mention de l'impossibilité pour l'interprète d'être physiquement présent lors du débat contradictoire ne figure pas sur le procès-verbal de débat », cependant « cette impossibilité physique se déduit des échanges entre le greffe et Mme [O], interprète initialement convoquée », quand en l'absence de toute démarche utile du juge pour tenir le débat en présence d'un interprète assermenté disponible, ces motifs sont insuffisants et inopérants à établir l'impossibilité pour un interprète de se déplacer, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 6, § 3, a) et e), de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 803-5, D. 594-4, 706-71, 145-2, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Sur le moyen, pris en sa première branche
8. Pour écarter le moyen pris de l'irrégularité de l'assistance d'un interprète par téléphone au cours d'un débat en vue de la prolongation de la détention provisoire, l'arrêt attaqué énonce que si l'avant-dernier alinéa de l'article 706-71 du code de procédure pénale dispose que l'assistance de l'interprète au cours d'une audition, d'un interrogatoire ou d'une confrontation peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunications en cas de nécessité résultant de l'impossibilité pour un interprète de se déplacer, ces dispositions n'excluent pas le débat contradictoire en vue de la prolongation de la détention provisoire.
9. Les juges ajoutent que les articles R. 53-33 et suivants du code de procédure pénale ne prévoient pas de formalisme particulier à cette occasion.
10. C'est à tort que la chambre de l'instruction étend au débat contradictoire prévu pour la prolongation de la détention provisoire des dispositions applicables seulement à une audition, un interrogatoire ou une confrontation.
11. L'arrêt attaqué n'encourt cependant pas la censure, dès lors que les juges constatent que M. [F], qui n'a notamment formulé aucune contestation contre la traduction des propos échangés après que l'interprète les lui a relus, ne démontre l'existence d'aucun grief qui serait résulté de ce que l'assistance de l'interprète s'est réalisée par téléphone.
12. Ainsi, le grief peut être écarté.
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
13. C'est à tort que le juge des libertés et de la détention n'a pas constaté dans le procès-verbal de débat contradictoire l'impossibilité pour l'interprète de se déplacer.
14. Cependant, l'arrêt qui a rejeté le moyen tiré de cette irrégularité n'encourt pas la censure, dès lors qu'il résulte des énonciations rappelées au paragraphe 11 que cette omission n'a pas eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de M. [F] au sens de l'article 802 du code de procédure pénale.
15. Dès lors, le moyen doit être écarté.
Sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
16. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit l'appel mal fondé et confirmé l'ordonnance en date du 4 février 2025 par laquelle le juge des libertés et de la détention a prolongé la détention provisoire de M. [F] pour une durée de six mois, alors « que si la personne mise en examen ne comprend pas la langue française, elle a droit, dans une langue qu'elle comprend, à la traduction des décisions de prolongation de sa détention provisoire ; que cette traduction doit être notifiée au mis en examen au plus tard la veille de l'audience devant la chambre de l'instruction, saisie de l'appel de cette décision, afin de lui permettre de formuler, par mémoire, les observations qu'appellent la lecture de cette ordonnance ; qu'à défaut, il appartient aux juges saisis de prononcer le renvoi de l'affaire à une date ultérieure ou de prononcer la remise en liberté de la personne détenue ; qu'au cas d'espèce, la défense faisait valoir que la traduction de l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire n'avait toujours pas été notifiée à M. [F] à la date du dépôt du mémoire devant la chambre de l'instruction, la veille de l'audience ; qu'il résulte de la procédure et des propres constatations des juges que cette traduction n'a été notifiée à l'exposant que le 19 février 2025, date de l'audience devant la chambre de l'instruction ; qu'il incombait dès lors aux juges de prononcer le renvoi de l'affaire à une date ultérieure ou de prononcer la remise en liberté de la personne détenue ; qu'en retenant néanmoins, pour ne pas renvoyer l'affaire et confirmer l'ordonnance litigieuse, que « [Z] [F] ne démontre pas en quoi la notification de cette traduction lui fait grief dans la mesure où il a préféré exercer immédiatement son droit de recours dès le 5 février 2025, sans attendre la notification de l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire traduite, qui aurait eu pour effet de reculer le point de départ du délai d'appel jusqu'au jour où cette notification a été faite », quand si M. [F] a pu exercer un recours contre une décision dont il avait nécessairement compris le sens, puisqu'il était demeuré détenu au-delà de la date d'expiration de son mandat de dépôt, il ne pouvait en revanche pas contester utilement les motifs de cette décision, faute d'avoir reçu notification de la traduction de l'ordonnance litigieuse en temps utile pour déposer un mémoire en ce sens, la chambre de l'instruction a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 803-5, D. 594-8, 145-2, 198, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
17. Pour écarter le moyen pris de la traduction tardive de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, l'arrêt attaqué énonce que ce magistrat a, le 6 février 2025, requis un interprète aux fins de traduire cette décision et que cette traduction, achevée le 11 février 2025, a été notifiée à M. [F] le 19 février suivant, dans un délai raisonnable.
18. Les juges ajoutent que M. [F] ne démontre pas en quoi les conditions de notification de cette traduction lui font grief dans la mesure où il a préféré exercer immédiatement son droit de recours, dès le 5 février 2025, sans attendre cette notification, qui aurait eu pour effet de reculer le point de départ du délai d'appel jusqu'au jour où elle a été faite.
19. En se déterminant ainsi, par des motifs dont il résulte que les droits de la défense n'ont pas été compromis, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.
20. Le moyen doit, dès lors, être écarté.
21. Par ailleurs, l'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.
Crim. 28 mai 2025 n° 23-84.729
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° X 23-84.729 F-D
N° 00710
ECF 28 MAI 2025
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025
M. [U] [G] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 15 mai 2023, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 8 avril 2021, pourvoi n° 20-80.530), pour escroquerie en récidive et usage de faux, l'a déclaré coupable et a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Wyon, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [U] [G], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [U] [G] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel, notamment pour escroquerie, faux et usage.
3. Le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable de ces délits par jugement du 18 mai 2018.
4. Le prévenu et le ministère public ont fait appel de cette décision. Par arrêt du 2 décembre 2019, la cour d'appel a déclaré M. [G] coupable de faux et usage et de tentative d'escroquerie, et a prononcé sur les intérêts civils.
5. Sur pourvoi de M. [G], la chambre criminelle de la Cour de cassation, par arrêt du 8 avril 2021, a cassé cette décision, et renvoyé l'affaire devant la même cour d'appel, autrement composée.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
6. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le troisième moyen
Énoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a relevé l'état de récidive légale à l'égard de M. [G] pour les faits d'escroquerie relatifs à la perception de la somme de 79 900 euros à titre de commission, déclaré M. [G] coupable des faits d'escroquerie relatifs à la perception de cette somme, en récidive, déclaré M. [G] coupable des faits d'usage de faux entre courant 2010 et courant 2013 au préjudice des sociétés [1], alors :
« 1°/ que l'arrêt de cassation du 8 avril 2021 avait censuré le premier arrêt d'appel en rappelant : « des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale fussent-ils concomitants » ; cette censure était ainsi explicitement fondée sur la jurisprudence établie de la Chambre criminelle antérieure à son revirement consacré par ses arrêts du 15 décembre 2021 (n° 21-81.864) ; l'arrêt statuant sur renvoi, par les motifs précités, se fonde au contraire expressément sur cette jurisprudence nouvelle ; en soumettant ainsi M. [G] dans la même procédure, à deux jurisprudences contraires, et en le privant du bénéfice de la doctrine jurisprudentielle qui lui avait été légalement appliquée à la date de son premier pourvoi, la Cour d'appel a violé les principes relatifs à la loyauté du procès, à la prévisibilité de la loi pénale, et aux règles du procès équitable, violant ainsi l'article préliminaire du code de procédure pénale et l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ qu'en statuant de la sorte, la Cour d'appel a appliqué au prévenu une jurisprudence plus sévère, en méconnaissance du principe de la non-rétroactivité de la loi pénale plus sévère, de l'article 112-1 du code pénal et de l'article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
8. Le moyen qui critique, sous couvert d'un grief pris de la prévisibilité de la loi pénale, l'application au cas d'espèce du principe ne bis in idem est nouveau et comme tel irrecevable.
Mais sur le deuxième moyen
Énoncé du moyen
9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce que, statuant sur renvoi de cassation, il n'a pas prononcé sur la peine, alors « que l'arrêt de cassation partielle du 8 avril 2021 cassait et annulait le précédent arrêt « en ses seules dispositions pénales et civiles afférentes aux poursuites des chefs d'escroquerie et de tentative de ce délit relatives à la perception de la somme de 79 900 ¿ à titre de commissions et du chef d'usage de faux commis entre courant 2010 et courant 2013 au préjudice des sociétés [1], toutes autres dispositions étant expressément maintenues » ; ce dispositif s'entend nécessairement d'une cassation sur la peine prononcée par la première Cour d'appel, dès lors que la déclaration de culpabilité est au moins pour partie remise en cause ; en s'abstenant de se prononcer sur la peine, et en supposant ainsi définitive la peine prononcée par la première Cour d'appel, dont l'arrêt a été pourtant annulé sur ce point, la Cour d'appel de renvoi a méconnu la portée de la cassation et l'étendue de ses pouvoirs, et violé les articles 464, 512, 593, 609 et 612 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 567, 609 et 612 du code de procédure pénale :
10. Il résulte de ces textes que la juridiction de renvoi est saisie dans la limite de la cassation prononcée.
11. L'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'escroquerie en récidive et d'usage de faux.
12. En omettant de statuer sur les peines, alors que la Cour de cassation avait prononcé l'annulation du précédent arrêt en ses dispositions pénales et civiles afférentes à une partie des faits poursuivis, qui comprenait nécessairement la cassation de l'intégralité des peines, la cour d'appel a méconnu les termes de sa saisine.
13. La cassation est, dès lors, encourue.
Et sur le quatrième moyen
Énoncé du moyen
14. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a renvoyé le jugement de l'action civile « à l'audience sur intérêts civils de la Cour d'appel de Douai », sans autre précision, alors « que le cours de la justice pénale, fût-il limité au jugement de l'action civile, ne peut être interrompu ; en renvoyant l'action civile à une audience dont la date n'est pas précisée, la Cour d'appel a violé les articles 4 du code civil, 461 du code de procédure pénale et 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, et s'est abstenue d'exercer sa compétence. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 4 du code civil, 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et 464 du code de procédure pénale :
15. Les juges ne sauraient, sans interrompre le cours de la justice, ordonner un sursis à statuer d'une durée indéterminée.
16. Le juge correctionnel, lorsqu'il ordonne, après avoir statué sur l'action publique, un renvoi à une audience ultérieure sur les intérêts civils, doit fixer la date de l'audience à laquelle il sera statué sur l'action civile dont il est saisi.
17. Après avoir prononcé sur la culpabilité de M. [G], puis déclaré les constitutions des parties civiles recevables et le prévenu entièrement responsable de leur préjudice, l'arrêt attaqué renvoie le dossier à une audience sur intérêts civils pour qu'il soit statué sur l'indemnisation de celles-ci.
18. En prononçant ainsi, sans fixer le terme à l'issue duquel l'affaire serait à nouveau appelée, la cour d'appel a méconnu les principes ci-dessus énoncés.
19. Dès lors, la cassation est encore encourue de ce chef.
Portée et conséquences de la cassation
20. La cassation à intervenir ne concerne l'arrêt attaqué qu'en ce qu'il a omis de prononcer sur les peines et de fixer une date de renvoi de l'affaire sur l'action civile. Les autres dispositions seront donc maintenues.
Crim. 27 mai 2025 n° 25-81.829
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° M 25-81.829 F-D
N° 00859
ODVS 27 MAI 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 27 MAI 2025
M. [K] [Z] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Orléans, en date du 13 février 2025, qui, dans la procédure suivie contre lui, en exécution d'un mandat d'arrêt européen, a rejeté sa demande de mise en liberté.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Hairon, conseiller, les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. [K] [Z], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Hairon, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Les autorités judiciaires allemandes ont émis un mandat d'arrêt européen à l'encontre de M. [K] [Z].
3. L'intéressé, détenu pour autre cause sur le territoire français dans le cadre d'une information, a été incarcéré, le 25 septembre 2023, après notification du mandat.
4. Le 1er février 2024, la chambre de l'instruction a accordé sa remise différée aux autorités judiciaires requérantes jusqu'à l'issue de la procédure en cours en France, soit jusqu'à l'expiration de la peine s'il devait être condamné à une peine d'emprisonnement dans le cadre de ces poursuites.
5. Le 3 septembre 2024, le juge d'instruction a ordonné la mise en liberté de M. [Z] et son placement sous contrôle judiciaire.
6. Le 29 janvier 2025, M. [Z] a saisi la chambre de l'instruction d'une demande de mise en liberté en application de l'article 695-34 du code de procédure pénale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première et troisième branches
7. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré non fondée sa demande de mise en liberté et l'a en conséquence rejetée, alors :
« 2°/ que en rejetant la demande de mise en liberté de M. [Z], aux motifs que la durée de l'écrou extraditionnel ne paraît pas avoir atteint une durée déraisonnable, tout en constatant que la chambre de l'instruction avait définitivement statué le 1er février 2024 en ordonnant sa remise différée aux autorités judiciaires allemandes du fait des poursuites engagées contre lui en France et son maintien sous écrou extraditionnel de sorte que la durée de la privation de liberté, qui durait déjà depuis plus d'un an sans que M. [Z] ait connaissance de la date d'un jugement en France et sans qu'il ne soit informé du déroulement de la procédure en Allemagne, excédait le délai raisonnable nécessaire pour atteindre le but visé par l'article 5, § 1, f) de la Convention européenne des droits de l'homme, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 696-10 et 696-16 du Code de procédure pénale ;
4°/ que en justifiant la durée du placement sous écrou extraditionnel de M. [Z] au regard de la gravité des faits et de la sévérité des tribunaux allemands s'il était déclaré coupable des faits qui lui étaient reprochés, alors que l'intéressé était recherché aux fins de poursuites et non d'exécution de peine, qu'il bénéficiait de la présomption d'innocence et que les autorités nationales devaient en conséquence faire preuve d'une diligence particulière afin de protéger les droits de l'intéressé, la chambre de l'instruction a violé les articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 696-10 et 696-16 du Code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
9. Pour rejeter la demande de mise en liberté, l'arrêt attaqué énonce que la chambre de l'instruction, qui ne doit se référer qu'aux garanties offertes par l'intéressé en vue de satisfaire à la demande des autorités d'émission du mandat et donc de garantir sa remise, n'est pas liée par la décision du juge d'instruction qui a ordonné la mise en liberté sous contrôle judiciaire.
10. Les juges ajoutent que le casier judiciaire de l'intéressé comporte une vingtaine de condamnations sanctionnant des infractions contre les biens prononcées par des juridictions proches du domicile familial où il vivait avec sa famille avant son interpellation.
11. Ils relèvent également une révocation de la libération conditionnelle accordée dans le cadre de l'exécution d'une peine de réclusion criminelle, soulignent que les faits qui lui sont reprochés par les autorités judiciaires allemandes s'inscrivent à un moment où il était sous le bénéfice de cette mesure et en déduisent une propension de M. [Z] à ne pas respecter la loi ni les avertissements de la justice ni les règles et cadres qu'elle lui fixe.
12. Ils en concluent que la situation conjugale et familiale de celui-ci, son passé judiciaire et les comportements transgressifs qu'il révèle ne sont pas de nature à offrir des garanties sérieuses et suffisantes en vue de la satisfaction de la demande des autorités judiciaires allemandes, pour permettre la remise en liberté de l'intéressé même sous contrôle judiciaire.
13. Les juges énoncent enfin qu'il n'apparaît pas que les autorités étatiques n'aient pas mené la procédure d'exécution du mandat d'arrêt européen avec la diligence requise, le mandat ayant été notifié le 25 septembre 2023 et la chambre de l'instruction ayant statué une première fois, le 5 octobre suivant, puis, après supplément d'information, définitivement, par une décision du 1er février 2024.
14. Ils concluent qu'au regard de l'ensemble de ces éléments la durée de l'incarcération n'est pas excessive.
15. En statuant ainsi, par des motifs dénués d'insuffisance et relevant de son appréciation souveraine, la chambre de l'instruction a fait une exacte application des dispositions visées au moyen.
16. Ainsi, le moyen ne peut être accueilli.
17. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
Crim. 27 mai 2025 n° 25-81.970 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 25-81.970 FS-B
N° 00868
ODVS 27 MAI 2025
CASSATION SANS RENVOI
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 27 MAI 2025
La procureure générale près la cour d'appel de Paris a formé un pourvoi contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre 2-14, en date du 19 février 2025, qui, dans la procédure suivie contre Mme [Y] [I] [K] du chef d'escroquerie en bande organisée, a ordonné mainlevée du mandat de dépôt à effet différé et l'a placée sous contrôle judiciaire.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Rouvière, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Rouvière, conseiller rapporteur, M. Sottet, Mme Goanvic, M. Coirre, Mme Hairon, M. Busché, Mme Carbonaro, conseillers de la chambre, MM. Joly, Leblanc, Charmoillaux, conseillers référendaires, M. Lagauche, avocat général, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le tribunal correctionnel a condamné Mme [Y] [I] [K] à quatre ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis probatoire, a décerné mandat de dépôt à effet différé et ordonné l'exécution provisoire de ce dernier.
3. La prévenue a relevé appel de cette décision et saisi la cour d'appel d'une requête aux fins de mainlevée du mandat de dépôt à effet différé.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le moyen est pris de la violation des articles 464-2 et 465 du code de procédure pénale.
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré recevable la demande de mainlevée du mandat de dépôt à effet différé assorti de l'exécution provisoire, avant tout débat au fond, alors :
1°/ que l'article 464-2 du code de procédure pénale, qui permet au tribunal correctionnel de décerner un mandat de dépôt à effet différé en cas de prononcé d'une peine d'emprisonnement d'au moins six mois, et, quand sont réunies les conditions des articles 397-4, 465 ou 465-1 du même code, d'en ordonner l'exécution provisoire, n'assimile pas le mandat de dépôt à effet différé aux mandats de dépôt ou d'arrêt, de sorte qu'aucun texte ne permet de solliciter la mainlevé
Réponse de la Cour
Vu les articles 464-2 et 465 du code de procédure pénale :
6. Il résulte de ces textes que le mandat de dépôt à effet différé prévu par le premier n'est pas soumis au même régime que les mandats de dépôt et d'arrêt prévus par le second.
7. Pour dire recevable la requête de Mme [I] [K] et la placer sous contrôle judiciaire, l'arrêt attaqué énonce que le mandat de dépôt à effet différé n'a pas une nature différente du mandat de dépôt et que l'exécution provisoire lui confère le caractère d'une mesure de sûreté, de sorte que l'article 465 du code de procédure pénale s'applique au mandat de dépôt à effet différé.
8. En statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés, le second par fausse application, et le principe ci-dessus énoncé.
9. La cassation est par conséquent encourue, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre grief.
Portée et conséquences de la cassation
10. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.
Crim. 20 mai 2025 n° 24-85.348 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 24-85.348 F-B
N° 00639
RB5 20 MAI 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 20 MAI 2025
M. [M] [S] a formé un pourvoi contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 25 juillet 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'assassinat et tentative, en bande organisée, associations de malfaiteurs et infractions à la législation sur les armes, a confirmé l'ordonnance de mise à l'isolement judiciaire rendue par le juge d'instruction.
Par ordonnance du 7 octobre 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [M] [S], et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [M] [S] a été mis en examen des chefs susvisés et placé en détention provisoire le 4 décembre 2023.
3. Par ordonnance du 7 mai 2024, le juge d'instruction a placé l'intéressé sous le régime de l'isolement judiciaire.
4. Un recours contre cette décision a été exercé le 13 mai suivant.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu à mainlevée de l'isolement judiciaire concernant M. [S] et, en conséquence, a confirmé l'ordonnance entreprise et ordonné la transmission du dossier à la juge d'instruction, alors :
« 1°/ d'une part, que par mémoire distinct et motivé, l'exposant sollicite le renvoi au Conseil constitutionnel d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les dispositions de l'article 145-4-1, alinéa 1er, in fine, du code de procédure pénale, telles que précisées par celles de l'article R. 57-5-7, alinéa 2, du même Code, en ce qu'elles ne prévoient pas les modalités de traitement, par le président de la Chambre de l'instruction, du recours formé contre l'ordonnance de placement à l'isolement judiciaire, et en particulier le délai légal dans lequel ce recours doit être jugé, et en ce qu'elles n'indiquent pas a minima que ce délai doit être bref, ne garantissent pas le droit à un recours juridictionnel effectif, à la liberté individuelle et à la sureté garantis par les articles 2, 7 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et 66 de la Constitution ; que la déclaration d'inconstitutionnalité ou la réserve d'interprétation qui sera prononcée par le Conseil constitutionnel privera de fondement l'ordonnance attaquée.
2°/ d'autre part, qu'en matière de privation de liberté, le droit à un recours juridictionnel effectif impose que le juge judiciaire statue dans les plus brefs délais ; que dans le cadre d'une information judiciaire, un tel délai ne saurait excéder 20 jours ; qu'au cas d'espèce, par ordonnance du juge d'instruction en date du 7 mai 2024, l'exposant a été placé à l'isolement judiciaire pour la durée de son titre de détention ; que le 13 mai 2024, il a formé un recours contre cette décision, recours qui n'a été transmis au président de la chambre de l'instruction que le 25 juin suivant de sorte que par courrier du 11 juin 2024, Monsieur [S] a sollicité de ce dernier qu'il ordonne la mainlevée de son isolement « sans titre » ; qu'en retenant, par une ordonnance rendue le 25 juillet 2024 - soit plus de deux mois après l'introduction du recours - qu'il n'y avait pas lieu de prononcer la mainlevée de la mesure d'isolement judiciaire au motif que le recours formé contre une ordonnance de placement en isolement judiciaire n'était soumis à aucun délai quand le respect dû aux droits à un recours juridictionnel effectif, à la liberté individuelle et à la sûreté, constitutionnellement et conventionnellement garantis, impose qu'un tel recours soit traité à bref délai, le président de la chambre de l'instruction a violé le droit à la sureté garanti par les articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme et 66 de la Constitution, ensemble des articles 145-4-1 et 57-5-7 du code de procédure pénale ;
3°/ de troisième part, qu'en matière de privation de liberté, le droit à un recours juridictionnel effectif impose que le juge judiciaire statue dans les plus brefs délais ; que dans le cadre d'une information judiciaire, un tel délai ne saurait excéder 20 jours ; qu'au cas d'espèce, par ordonnance du juge d'instruction en date du 7 mai 2024, l'exposant a été placé à l'isolement judiciaire pour la durée de son titre de détention ; que le 13 mai 2024 il a formé un recours contre cette décision, recours qui n'a été transmis au Président de la chambre de l'instruction que le 25 juin suivant de sorte que par courrier en date du 11 juin 2024, Monsieur [S] a sollicité de ce dernier qu'il ordonne la mainlevée de son isolement « sans titre » ; qu'en retenant, pour rejeter cette demande, que « le président de la chambre de l'instruction a été saisi de ce recours au-delà du délai vingt jours évoqué par la défense du mis en examen, puisque le dossier a été mis à sa disposition à partir du 25 juin 2024, date à laquelle le dossier est parvenu au secrétariat qui centralise ce type de recours » quand le retard pris par l'administration judiciaire dans l'enregistrement, la transcription ou la transmission d'un recours ne saurait couvrir l'irrégularité tirée de ce que ledit recours n'a pas été traité dans les plus brefs délais, le président de la chambre de l'instruction, qui a statué par des motifs inopérants et impropres à écarter l'irrégularité invoquée, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, 66 de la Constitution, 154-4-1, R.57-5-7, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
4°/ enfin, qu'en matière de privation de liberté, le droit à un recours juridictionnel effectif impose que le juge judiciaire statue dans les plus brefs délais ; que dans le cadre d'une information judiciaire, un tel délai ne saurait excéder 20 jours ; qu'au cas d'espèce, par ordonnance du juge d'instruction en date du 7 mai 2024, l'exposant a été placé à l'isolement judiciaire pour la durée de son titre de détention ; que le 13 mai 2024 il a formé un recours contre cette décision, recours qui n'a été transmis au Président de la chambre de l'instruction que le 25 juin suivant de sorte que par courrier en date du 11 juin 2024, Monsieur [S] a sollicité de ce dernier qu'il ordonne la mainlevée de son isolement « sans titre » ; qu'en retenant, pour rejeter cette demande, que « le délai d'examen du présent recours se fait dans un délai raisonnable » sans rechercher s'il avait été statué sur le recours litigieux dans les plus brefs délais, le Président de la chambre de l'instruction a violé les articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, 66 de la Constitution, 145-4-1, R.57-5-7, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Sur le moyen, pris en sa première branche
6. Par arrêt du 26 novembre 2024 (Crim., 26 novembre 2024, pourvoi n° 24-85.348), la Cour de cassation a renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité posée par l'intéressé, invoquant la non-conformité aux principes constitutionnels du droit à un recours effectif, de la liberté individuelle et du droit à la sûreté de l'article 145-4-1, alinéa 1, du code de procédure pénale, en ce qu'il ne prévoit pas que la décision prononçant sur un recours en matière de placement ou maintien à l'isolement judiciaire doit intervenir, à défaut d'indication expresse, à bref délai.
7. Le Conseil constitutionnel (Cons. const., 14 février 2025, décision n° 2024-1122 QPC) a déclaré conformes à la Constitution les dispositions critiquées.
8. Dès lors, le grief est devenu sans objet.
Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches
9. La mesure d'isolement judiciaire ne relevant pas des dispositions de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, les griefs sont inopérants.
10. Ainsi, le moyen ne peut être accueilli.
11. Par ailleurs, l'ordonnance est régulière en la forme.
Crim. 20 mai 2025 n° 24-86.069
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Z 24-86.069 F-D
N° 00640
RB5 20 MAI 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 20 MAI 2025
M. [D] [W] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 6e section, en date du 3 octobre 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs et refus de remettre aux autorités judiciaires la convention secrète de chiffrement d'un moyen de cryptologie, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.
Par ordonnance du 16 décembre 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Thomas, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [D] [W], et les conclusions de M. Dureux, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Thomas, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Mis en examen des chefs susvisés, M. [D] [W] a, le 20 février 2024, déposé une requête en annulation d'actes et de pièces de la procédure, après avoir déposé une première requête en annulation le 27 juillet 2023 ayant donné lieu à un arrêt du 22 février 2024.
Examen des moyens
Sur les premier et second moyens
Enoncé des moyens
3. Le premier moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise du 7 juin 2023 (D 409), alors :
« 1°/ d'une part que l'article 166 du Code de procédure pénale impose sans exception que les rapports d'expertise soient signés de leurs auteurs, lesquels ne peuvent donc être anonymes, fussent-ils policiers ou gendarmes ; que l'article 15-4 du Code de procédure pénale n'est pas applicable aux rapports d'expertise qui ne constituent pas des actes d'enquête au sens de ce texte ; qu'au cas d'espèce, il résulte de la procédure que le rapport d'expertise en date du 7 juin 2023 ne comporte pas le nom de son auteur et des personnes l'ayant assisté dans ses opérations, lesquels sont tous désignés par leur numéro de RIO ; qu'en affirmant, pour refuser d'annuler ce rapport, que « l'anonymisation du fonctionnaire de la police nationale scientifique, désigné pour procéder aux investigations expertales, au nom du SNPS, était possible », a violé les articles 15-4, 166, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
2°/ d'autre part que la Chambre de l'instruction est tenue de vérifier la régularité des actes et pièces arguées de nullité devant elle ; qu'elle est en particulier tenue de s'assurer de l'habilitation des auteurs d'un acte pour accomplir cet acte ; qu'en affirmant, pour rejeter le moyen tiré de l'anonymisation irrégulière de l'auteur du rapport d'expertise, qu'elle n'était pas tenue de vérifier l'habilitation du fonctionnaire de la police scientifique désigné par son numéro de RIO, la Chambre de l'instruction a méconnu son office en violation des articles 15-4, 157-1, 157-2, 159, 166, 170, 173, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
3°/ enfin que la Chambre de l'instruction est tenue de vérifier la régularité des actes et pièces arguées de nullité devant elle ; qu'elle est en particulier tenue de s'assurer de l'habilitation des auteurs d'un acte pour accomplir cet acte, l'absence d'une telle habilitation affectant la validité de l'établissement des preuves et de leur authentification ; qu'au cas d'espèce, devant la Chambre de l'instruction, Monsieur [W] faisait valoir que du fait de l'anonymisation du rapport, l'apposition de la seule mention en page de garde : « RIO [Numéro identifiant 1] Habilitée en Stupéfiants (Spécialité G.1.8) agissant au nom du SNPS » ne permettait pas de s'assurer que l'auteur du rapport identifié par son seul RIO était habilité par le directeur du SNPS à signer le rapport au nom de ce service en application de l'article 3 du décret n° 2020-1179 du 30 décembre 2020, et sollicitait en conséquence qu'une mesure de vérification de l'identité de l'agent signataire soit effectuée pour que son habilitation à signer au nom du SNPS soit contrôlée ; qu'en affirmant, pour rejeter ce moyen sans procéder à une mesure de vérification, que « l'obligation pour le chef du service de police scientifique de dresser une liste des personnes habilitées à signer les rapports d'expertise au nom du SNPS n'est pas prescrite à peine de nullité du rapport et ne constitue pas non plus une disposition substantielle de procédure pénale », quand cette habilitation touche à l'authenticité des preuves, la Chambre de l'instruction a violé les articles 15-4, 157-1, 157-2, 159, 166, 170, 173, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble l'article 3 du décret n° 2020-1179 du 30 décembre 2020. »
4. Le second moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation du rapport d'expertise du 7 juin 2023 (D 409), alors :
« 1°/ d'une part que l'ordonnance de commission d'expert du 23 février 2023 donnait uniquement mission au SNPS de « rechercher, identifier et procéder à l'analyse génétique des traces biologiques présentes sur les scellés » et à « transmettre au FNAEG le ou les profils génétiques obtenus » ; qu'en considérant que cette ordonnance donnait mission au SNPS de solliciter du FNAEG le rapprochement des profils identifiés avec les profils déjà présents dans le fichier, la Chambre de l'instruction a dénaturé cette ordonnance en violation des articles 156, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
2°/ d'autre part que les dispositions de l'article 706-54 du Code de procédure pénale ne permettent au FNAEG de procéder à des opérations de rapprochement de profils génétiques que sur réquisitions des enquêteurs ; qu'en affirmant, pour rejeter le moyen d'annulation des opérations de rapprochement tiré de ce qu'elles étaient intervenues en l'absence de réquisitions en ce sens, que ces rapprochements pouvaient être effectués d'initiative par le FNAEG, la Chambre de l'instruction a violé les articles 706-54, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
3°/ enfin que devant la Chambre de l'instruction, l'exposant soutenait que l'identification du fonctionnaire ayant réalisé le rapprochement par un simple numéro de RIO l'empêchait de vérifier son habilitation à consulter les fichiers du FNAEG ; qu'en négligeant de répondre à ce moyen, la Chambre de l'instruction a violé les articles R. 53-18, 706-54, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
5. Les moyens sont réunis.
6. Le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que la chambre de l'instruction a rejeté ses moyens pris de la nullité du rapport d'expertise de produits établi le 7 juin 2023 coté D 409 ainsi que du rapport de rapprochement positif d'une trace génétique établi le 21 juin 2023 coté D 412, dès lors que de tels moyens étaient irrecevables en application de l'article 174, alinéa 1er, du code de procédure pénale.
7. En effet, il résulte de l'arrêt rendu sur la première requête en nullité de M. [W] que la procédure avait été transmise à la chambre de l'instruction et tenue à la disposition des avocats des parties au greffe de cette juridiction jusqu'à la cote D 502, de sorte qu'il appartenait au requérant, sauf s'il n'avait pu les connaître, de proposer les moyens pris de la nullité des actes cotés D 409 et D 412 au plus tard la veille de l'audience à la juridiction saisie de cette première requête.
8. Dès lors qu'il s'en est abstenu et n'a pas fait état de motifs qui l'auraient empêché de les connaître, le requérant devait être déclaré irrecevable en sa seconde requête faisant état de moyens pris de nullité d'actes et de pièces de la procédure déjà soumis à l'examen de la première chambre de l'instruction.
9. Les moyens doivent, en conséquence, être écartés.
10. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
Crim. 20 mai 2025 n° 24-84.715
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° C 24-84.715 F-D
N° 00649
RB5 20 MAI 2025
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 20 MAI 2025
Mme [X] [E] a formé un pourvoi contre le jugement du tribunal de police de Caen, en date du 13 mars 2024, qui, pour contraventions au code de la route, l'a condamnée à 135 euros d'amende et l'a déclarée pécuniairement redevable de deux amendes de 68 euros chacune.
Un mémoire personnel a été produit.
Sur le rapport de M. Hill, conseiller, et les conclusions de M. Dureux, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Hill, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte du jugement attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Mme [X] [E] a été citée devant le tribunal de police pour contravention de stationnement très gênant et pour deux contraventions d'excès de vitesse.
Sur le premier moyen
3. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur les deuxième et troisième moyens
Enoncé des moyens
4. Le deuxième moyen est pris d'une violation des articles 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 537 et 593 du code de procédure pénale.
5. Le moyen critique le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré la prévenue pécuniairement redevable des deux contraventions d'excès de vitesse, alors que, d'une part, les motifs retenus par le tribunal sont insuffisants, d'autre part, les éléments partiels du carnet métrologique versés au dossier ne constituent pas des preuves suffisantes, toutes les pages du carnet n'ayant pas été versées à la procédure, que le lieu d'installation du cinémomètre n'est pas précisé, et que dès lors la prévenue n'est pas en mesure de vérifier si les pièces versées en procédure correspondent à celles du cinémomètre ayant servi pour relever l'infraction.
6. Le troisième moyen est pris de la violation des articles 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 537 et 593 du code de procédure pénale.
7. Le moyen critique le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré la prévenue pécuniairement redevable, alors que les éléments partiels du carnet métrologique versés au dossier ne sont pas des preuves suffisantes, et qu'il apparaît que les contrôles qui figurent sur le carnet n'ont pas été effectués dans le délai réglementaire.
Réponse de la Cour
8. Les moyens sont réunis.
Vu l'article 593 du code de procédure pénale :
9. Selon ce texte tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
10. Pour déclarer Mme [E] pécuniairement redevable des amendes encourues pour deux excès de vitesse, le jugement attaqué énonce que la prévenue est la titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule avec lequel il est régulièrement établi qu'ont été commises des contraventions mentionnées par les articles L. 121-2, L. 121-3 du code de la route, qu'elle n'apporte pas la preuve du vol ou de tout autre événement de force majeure ni d'éléments permettant d'établir qu'elle n'est pas l'auteur véritable des infractions.
11. En prononçant ainsi, alors qu'il lui appartenait de répondre aux moyens soulevés par la prévenue mentionnés dans les notes d'audience, de rechercher et de vérifier les informations relatives à l'identification du cinémomètre et à ses contrôles périodiques, le tribunal n'a pas justifié sa décision.
12. D'où il suit que la cassation est encourue.
Portée et conséquences de la cassation
13. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives aux deux contraventions d'excès de vitesse. Les autres dispositions seront donc maintenues.
Civ.1 14 mai 2025 n° 23-22.013
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION ______________________
Arrêt du 14 mai 2025
Cassation sans renvoi
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 324 F-D
Pourvoi n° C 23-22.013
Aide juridictionnelle totale en demande au profit de Mme [M]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 23 mars 2023.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 MAI 2025
Mme [D] [M], domiciliée [Adresse 1], EPSM [6], [Localité 3], a formé le pourvoi n° C 23-22.013 contre l'ordonnance rendue le 6 septembre 2023 par le premier président de la cour d'appel de Douai (chambre des Libertés Individuelles soins psychiatriques), dans le litige l'opposant :
1°/ au préfet du Nord, domicilié [Adresse 2],
2°/ au Mandataire judiciaire à la protection des majeurs, domicilié EPSM [6], site d'[Localité 3], [Adresse 4], Curateur,
3°/ au directeur de l'EPSM [Localité 5] métropole, domicilié [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de Mme [M], et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 18 mars 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à Mme [M] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre « Monsieur le mandataire judiciaire à la protection des majeurs ».
Faits et procédure
2. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Douai, 6 septembre 2023), le 14 mai 2013, Mme [M] a été admise en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète par arrêté du préfet du Nord à la suite d'une garde à vue consécutive à une agression par arme blanche.
3. Le 3 août 2014, un juge d'instruction, constatant l'irresponsabilité pénale pour trouble mental de Mme [M], a rendu une ordonnance de non-lieu à suivre contre elle.
4. Par arrêté du 6 août 2014, le préfet du Nord a abrogé l'arrêté du 14 mai 2013 aux motifs qu'en application de l'article D. 47-29-4 du code de procédure pénale, une décision judiciaire du 3 août 2014, qui se substituait à l'arrêté d'admission, avait ordonné l'admission en soins psychiatriques sans consentement de Mme [M] et dit que Mme [M] demeurait en hospitalisation en exécution de la décision judiciaire.
5. La mesure a été contrôlée par un juge tous les six mois en application de l'article L. 3211-12-1, I, 3° du code la santé publique et un maintien de la mesure a été ordonné le 22 février 2023.
6. Le 2 août 2023, le préfet du Nord a saisi le juge des libertés et de la détention aux fins de contrôle de la mesure sur le fondement de l'article L. 3211-12-1, 3° du code de la santé publique.
Recevabilité du pourvoi examinée d'office, en ce qu'il est dirigé contre le directeur de l'EPSM de [Localité 5]
7. Après avis donné aux parties conformément à l'article 16 du code de procédure civile, il est fait application des articles R. 3211-13 et R. 3211-19 du code de la santé publique.
8. Le pourvoi formé contre le directeur de l'EPSM de [Localité 5], présent à l'audience pour avoir été avisé conformément aux textes susmentionnés, mais qui n'était pas partie à l'instance, n'est pas recevable.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
9. Mme [M] fait grief à l'ordonnance de confirmer l'ordonnance rendue par le juge des libertés et de la détention ordonnant son maintien en soins sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète, alors « qu'une copie de l'arrêté d'admission en soins psychiatriques est communiquée au juge des libertés et de la détention quand l'admission en soins psychiatriques a été ordonnée par le préfet, en application des articles R. 3211-12 et R. 3211-24 du code de la santé publique ; qu'en l'espèce, la saisine du Juge des Libertés et de la Détention n'est accompagnée d'aucune décision d'admission, ainsi que le constate l'ordonnance attaquée ; qu'en rejetant la demande de mainlevée, la magistrate déléguée par le premier président a entaché sa décision d'une violation des articles R. 3211-12, et R. 3211-24 du code de la santé publique. »
Réponse de la Cour
Vu les articles R. 3211-12, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2024-570 du 20 juin 2024, et R. 3211-24 du code de la santé publique :
10. Selon le premier de ces textes, sont notamment communiquées au juge des libertés et de la détention afin qu'il statue, quand l'admission en soins psychiatriques a été ordonnée par le préfet, une copie de l'arrêté d'admission en soins psychiatriques et, le cas échéant, une copie de l'arrêté le plus récent ayant maintenu la mesure de soins, et quand l'admission en soins psychiatriques a été ordonnée par une juridiction, une copie de la décision et de l'expertise mentionnées à l'article 706-135 du code de procédure pénale.
11. Selon le second, la saisine est accompagnée des pièces prévues à l'article R. 3211-12.
12. Il s'en déduit que la décision de maintien en soins sans consentement prise en l'absence de ces pièces est irrégulière.
13. Pour autoriser la prolongation de la mesure de soins sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète, après avoir relevé que le préfet avait considéré à tort que le juge d'instruction avait ordonné l'admission en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète au lieu de prendre lui-même un nouvel arrêté d'admission en soins psychiatriques sans consentement sous cette forme, l'ordonnance retient que l'article R. 3211-12 de code de la santé publique n'assortit pas le défaut de production d'une pièce visée d'une irrecevabilité de la requête et qu'aucune irrégularité de la procédure de soins psychiatriques sans consentement, antérieure à l'audience à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention se prononce sur la mesure, ne peut être soulevée lors d'une instance ultérieure devant ce même juge.
14. En statuant ainsi, alors qu'il avait constaté l'absence de production de la décision d'admission devant accompagner la requête en prolongation dont il était saisi, le premier président a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
15. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
16. Les délais légaux pour statuer étant expirés, il ne reste plus rien à juger.
Crim. 14 mai 2025 n° 24-81.576 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 24-81.576 F-B
N° 00615
GM 14 MAI 2025
EXTINCTION DE L'ACTION PUBLIQUE REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 14 MAI 2025
[D] [V] et M. [Z] [N] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Papeete, chambre correctionnelle, en date du 1er février 2024, qui a condamné, le premier, pour corruption active, le second, pour corruption passive et abus de confiance, à trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis probatoire, 11 000 000 de francs CFP d'amende et a ordonné la publication de la décision.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Gillis, conseiller référendaire, les observations de la société Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocats de [D] [V], et de la société Buk Lament-Robillot, avocats de M. [Z] [N], et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 2 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gillis, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. [D] [V] et M. [Z] [N] ont été condamnés par le tribunal correctionnel de Papeete par jugement du 21 juin 2022 le premier, pour corruption active, le second, pour corruption passive.
3. Les intéressés, ainsi que le ministère public, ont relevé appel de cette décision.
Examen du pourvoi formé par [D] [V]
Vu l'article 606 du code de procédure pénale :
4. Il résulte de la copie intégrale de l'acte de décès produite aux débats que [D] [V] est décédé le [Date décès 1] 2024.
5. Selon l'article 6 du code de procédure pénale, l'action publique s'éteint par le décès du prévenu.
6. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur le pourvoi, l'arrêt attaqué n'ayant statué que sur l'action publique.
Examen du pourvoi formé par M. [N]
Examen des moyens
Sur les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens
7. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [N] coupable d'abus de confiance et de corruption passive, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis probatoire, à une amende de 11 000 000 de francs CFP et à la diffusion à ses frais de la décision au journal officiel, alors :
« 1°/ que devant la chambre des appels correctionnels, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire, avant toute prise de parole sur une demande de renvoi ; qu'en ne notifiant pas, contrairement aux mentions de l'arrêt, au prévenu son droit de faire des déclarations, de répondre aux questions ou de se taire à l'audience du 7 septembre 2023, ainsi que le révèle les notes d'audience, la cour d'appel a violé les articles préliminaire, 406, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
2°/ que devant la chambre des appels correctionnels, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; qu'à supposer que la mention de l'arrêt selon laquelle le prévenu a eu notification de ses droits à l'audience du 7 septembre 2023 soit exacte, la cour d'appel, faute d'avoir renouveler cette information lors de l'audience au fond du 2 novembre 2023, a violé les articles préliminaire, 406, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. »
Réponse de la Cour
9. L'arrêt attaqué indique que M. [N] a été cité à comparaître à l'audience devant la chambre des appels correctionnels le 7 septembre 2023 et que, lors de cette audience, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 2 novembre 2023.
10. Il importe peu qu'à cette seconde audience le prévenu n'ait pas été informé de son droit de se taire dès lors que, selon les mentions de l'arrêt, qui font foi jusqu'à inscription de faux, il a été procédé à cette formalité lors de la première audience à laquelle M. [N] a comparu.
11. En effet, si l'article 406 du code de procédure pénale, applicable selon l'article 512 du même code devant la chambre des appels correctionnels, prescrit au président d'informer le prévenu comparant de son droit de se taire, après la constatation de son identité et l'indication de l'acte qui saisit la juridiction, l'avant-dernier alinéa de l'article préliminaire de ce code prévoit que la notification de ce droit a lieu lors de la première présentation du prévenu devant une juridiction, ce dont il résulte que le renouvellement de cette information n'est pas nécessaire en cas de renvoi de l'affaire à une audience ultérieure.
12. Dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté.
13. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
Crim. 14 mai 2025 n° 25-81.585
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° W 25-81.585 F-D V 25-81.584 N° 00786
RB5 14 MAI 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 14 MAI 2025
M. [C] [R] a formé des pourvois :
- contre l'arrêt n° 241 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 31 décembre 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'assassinat aggravé et association de malfaiteurs, en récidive, a prononcé sur la publicité des débats (pourvoi n° 25-81.585) ;
- contre l'arrêt n° 242 de ladite chambre de l'instruction, en date du même jour, qui, dans la même information, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire (pourvoi n° 25-81.584).
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires ont été produits.
Sur le rapport de Mme Jaillon, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [C] [R], et les conclusions de Mme Gulphe-Berbain, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Jaillon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre,et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte des arrêts attaqués et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 8 décembre 2024, M. [C] [R] a été mis en examen des chefs susvisés.
3. Par ordonnance du même jour, le juge des libertés et de la détention l'a placé en détention provisoire.
4. M. [R] a relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi formé contre l'arrêt n° 241
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a fait droit à l'opposition du ministère public relativement à la publicité des débats sur l'appel de l'ordonnance l'ayant placé en détention provisoire et ordonné que les débats se poursuivront en chambre du conseil, alors « qu'en matière de détention provisoire, si la personne mise en examen est majeure, les débats devant la chambre de l'instruction se déroulent et l'arrêt est rendu en audience publique ; que toutefois, le ministère public, notamment, peut avant l'ouverture des débats, s'opposer à cette publicité si celle-ci est de nature à entraver les investigations spécifiques nécessitées par l'instruction, à porter atteinte à la présomption d'innocence ou à la sérénité des débats ou à nuire à la dignité de la personne ou aux intérêts d'un tiers, ou si l'enquête porte sur des faits mentionnés aux articles 706-73 et 706-73-1 ; que la décision qui fait droit à cette opposition doit être motivée concrètement en se référant aux circonstances de l'affaire, cette motivation ne pouvant être constituée par la seule reproduction littérale des termes de la loi ; que la chambre de l'instruction, qui s'est bornée à énoncer que « la publicité est de nature à entraver les investigations spécifiques nécessitées par l'instruction », sans aucune précision ni sur la nature de ces investigations ni sur les raisons pour lesquels la publicité des débats pourrait les entraver, n'a pas motivé sa décision et ainsi méconnu les articles 5 et 6 de la convention européenne des droits de l'homme, 199, alinéa 2, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
6. Pour faire droit à l'opposition du ministère public à la publicité des débats, l'arrêt, qui relève que la personne mise en examen et son avocat ont déclaré s'en rapporter, énonce que la publicité est de nature à entraver les investigations spécifiques nécessitées par l'instruction.
7. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction, qui a fait droit à la requête du ministère public en en adoptant les motifs, dès lors que la personne mise en examen et son avocat ont déclaré s'en rapporter sans émettre aucune objection à la tenue des débats en chambre du conseil, de sorte qu'aucun grief ne peut être retenu, a justifié sa décision.
8. Dès lors, le moyen doit être écarté.
Sur le moyen du pourvoi formé contre l'arrêt n° 242
Sur le moyen, pris en sa première branche
9. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté sa demande de renvoi et confirmé l'ordonnance qui l'avait placé en détention provisoire et sous mandat de dépôt, alors :
« 2°/ que si la chambre de l'instruction est avisée que des pièces sont manquantes, elle renvoie l'audience à une date ultérieure s'il lui apparaît que la connaissance de ces pièces est indispensable à l'examen de la requête ou de l'appel qui lui est soumis ; qu'en vertu du principe de l'égalité des armes, tout élément à décharge est indispensable à l'examen de la requête, et que toute pièce qui présente un lien avec les faits objet de l'instruction est susceptible de constituer un élément à décharge ; que la chambre de l'instruction, saisie de l'appel d'une ordonnance de placement en détention provisoire, doit donc renvoyer l'audience à une date ultérieure lorsqu'il apparait que des pièces en lien avec les faits objet de l'instruction sont manquantes ; que dès lors, la chambre de l'instruction, ayant relevé que les indices retenus contre M. [R] résultaient des déclarations faites lors de quatre auditions, par M. [S], lequel mettait également en cause un certain nombre d'autres protagonistes sardes interpellés en même temps que M. [R], et que manquaient au dossier les pièces relatives à une cinquième audition de M. [S] ainsi que celles relatives à l'interpellation des protagonistes sardes « quand bien même les déclarations des personnes sardes interpellées tendraient à contredire les déclarations de [O] [S], ce qui n'est à ce stade qu'une supposition », ne pouvait rejeter la demande de renvoi ; qu'elle a ainsi violé les articles 5 et 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 144, 197, alinéa 4, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
11. Pour rejeter le moyen tiré de l'absence à la procédure de pièces citées par la défense et confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention plaçant M. [R] en détention provisoire, l'arrêt attaqué énonce qu'il n'apparaît pas que la connaissance de ces pièces est indispensable à l'examen de l'appel et en particulier à l'examen des indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation de l'intéressé aux faits qui lui sont reprochés, tels que les conteste sa défense.
12. Les juges relèvent notamment qu'il a été mis en cause par plusieurs personnes, dont M. [O] [S] qui s'est lui-même incriminé et que l'audition de ce dernier le 18 mai 2024, à laquelle ne se réfèrent expressément ni les réquisitions du ministère public, ni l'ordonnance du juge d'instruction aux fins de saisine du juge des libertés et de la détention, ni l'ordonnance de placement en détention provisoire, n'est pas essentielle à l'examen de l'appel.
13. Ils retiennent aussi que le contenu du renseignement anonyme retranscrit par le parquet général et retenu dans ses réquisitions est rédigé en termes généraux, ne met pas spécifiquement en cause M. [R] et ne permet pas d'orienter l'enquête du fait même de sa nature.
14. Ils ajoutent que, s'agissant des déclarations d'autres personnes interpellées et de la téléphonie de l'un des protagonistes, ni le ministère public, ni le juge d'instruction, ni le juge des libertés et de la détention n'y font référence pour motiver la nécessité du placement en détention provisoire de l'intéressé.
15. En se déterminant ainsi, par des motifs suffisants et exempts de contradiction, la chambre de l'instruction, qui s'est assurée que la connaissance des pièces manquantes n'était pas indispensable à l'examen de l'appel, a fait l'exacte application de l'article 197 du code de procédure pénale.
16. Dès lors, le moyen doit être rejeté.
17. Par ailleurs, les arrêts sont réguliers en la forme et s'agissant de l'arrêt n° 242, au regard des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.
Crim. 14 mai 2025 n° 25-81.620
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° J 25-81.620 F-D
N° 00788
RB5 14 MAI 2025
CASSATION SANS RENVOI
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 14 MAI 2025
M. [F] [R] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Fort-de-France, en date du 18 décembre 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, d'infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, a constaté l'irrégularité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire et a ordonné son placement sous cette mesure.
Un mémoire personnel a été produit.
Sur le rapport de M. Michon, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Fusina, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Michon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [F] [R] a été mis en examen des chefs susvisés le 22 novembre 2024. Il a été présenté devant le juge des libertés et de la détention qui, après un débat du même jour, a ordonné son incarcération provisoire dans l'attente du débat contradictoire qui s'est tenu le 27 novembre 2024. Ni le procès-verbal de la première présentation devant le juge des libertés et de la détention ni l'ordonnance d'incarcération provisoire n'ont été signés par ce magistrat.
3. Par ordonnance du 27 novembre 2024, ce juge a placé M. [R] en détention provisoire.
4. Ce dernier a interjeté appel de la décision.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen est pris de la violation des articles 5, §§ 1 et 4 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 145 et 591 du code de procédure pénale.
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a traité le recours de M. [R] comme une saisine directe au sens de l'article 148, alinéa 5, du code de procédure pénale et a ordonné son placement en détention provisoire, alors que la chambre de l'instruction, saisie ici non pas d'une demande de mise en liberté mais d'un placement en détention provisoire, ne pouvait procéder ainsi faute de titre de détention valable.
Réponse de la Cour
Vu l'article 201, alinéa 2, du code de procédure pénale :
7. Il se déduit de ce texte que, lorsque la chambre de l'instruction constate qu'une personne mise en examen est détenue en vertu d'un titre nul, elle doit prononcer d'office sa mise en liberté, sans possibilité d'évoquer et de substituer sa propre décision à celle qu'elle vient d'annuler.
8. Pour dire que l'appel de M. [R] s'analyse comme une saisine directe de la chambre de l'instruction et placer ce dernier en détention provisoire, l'arrêt attaqué énonce que l'ordonnance d'incarcération provisoire, le procès-verbal de débat contradictoire ainsi que l'ordonnance se prononçant sur la publicité des débats, actes en date du 22 novembre 2024 portant tous trois sur la situation de M. [R], sont dépourvus de la signature du juge des libertés et de la détention, que le demandeur a été présenté au juge des libertés et de la détention sans titre, et, dès lors, que l'ordonnance de placement en détention provisoire, le procès-verbal de débat contradictoire, l'ordonnance relative à la publicité des débats et le mandat de dépôt le concernant du 27 novembre 2024 sont irréguliers.
9. Les juges ajoutent qu'ils ne sauraient cependant ordonner la mise en liberté de M. [R] sur le fondement de ce seul constat, car faute pour le juge des libertés et de la détention d'avoir valablement statué dans le délai légal de trois jours, le recours de la personne mise en examen devant la chambre de l'instruction doit nécessairement s'analyser en une saisine directe de cette juridiction, au sens de l'article 148, alinéa 5, du code de procédure pénale.
10. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
11. En effet, lorsque la chambre de l'instruction annule un titre de placement en détention provisoire en raison d'irrégularités affectant la décision du juge des libertés et de la détention, elle ne peut évoquer et statuer à nouveau sur le bien-fondé de la détention. Cette situation est différente de celle dans laquelle la décision d'un juge des libertés et de la détention sur une demande de mise en liberté doit être annulée puisque, dans ce cas, la validité du titre de détention n'est pas affectée (Crim., 8 juillet 2020, pourvoi n° 20-81.915, publié au Bulletin).
12. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
13. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.
14. M. [R] doit être remis en liberté, sauf s'il est détenu pour autre cause.
15. Cependant, les dispositions de l'article 803-7, alinéa 1, du code de procédure pénale permettent à la Cour de cassation de placer sous contrôle judiciaire la personne dont la détention provisoire est irrégulière en raison de la méconnaissances des formalités prévues par ce même code, dès lors qu'elle trouve dans les pièces de la procédure des éléments d'information pertinents et que la mesure apparaît indispensable pour assurer l'un des objectifs énumérés à l'article 144 du même code.
16. En l'espèce, il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable que M. [R] ait pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont le juge d'instruction est saisi.
17. La mesure de contrôle judiciaire est indispensable afin de :
- empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices, en ce que le grand nombre d'individus concernés, et les investigations restant à réaliser, notamment l'identification des fournisseurs et d'un possible complice travaillant dans un aéroport parisien, nécessitent d'éviter tout contact ;
- mettre fin à l'infraction ou prévenir son renouvellement, en ce que M. [R] a été condamné à plusieurs reprises, dit avoir travaillé de façon non déclarée et que le trafic de stupéfiants en question est particulièrement lucratif.
18. Afin d'assurer ces objectifs, M. [R] sera astreint à se soumettre aux obligations précisées au dispositif.
19. Le magistrat chargé de l'information est compétent pour l'application des articles 139 et suivants et 141-2 et suivants du code de procédure pénale.
Crim. 14 mai 2025 n° 25-81.509
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° P 25-81.509 F-D
N° 00794
RB5 14 MAI 2025
CASSATION PARTIELLE
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 14 MAI 2025
Mmes [BI] [IT], [JC] [IJ] [TH], [TW] [NU], [N] [AZ], [NM] [IM], [IS] [JB] [TS], [P] [U], [IO] [YH], [OA] [B], [TZ] [M], [DK] [K], [TP] [R], [YO] [Y], [X] [BK], [YR] [IN], [AX] [YV], [YN] [TL], [IP] [YW], [JC] [BA], [TJ] [NZ], [NL] [DM], [YP] [EB], [TK] [CE], [EA] [ZB], [TN] [UA], [IU] [ZD], [YX] [AW], les associations [2], [3], [4], [5], parties civiles, ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 6e section, en date du 6 février 2025, qui, après non-lieux partiels et requalifications, a renvoyé devant la cour criminelle départementale de Paris M. [NW] [IR] sous les accusations de viols et complicité, aggravés, et traite des êtres humains en bande organisée, M. [TX] [IK] sous les accusations de viols et proxénétisme, aggravés, traite des êtres humains en bande organisée, diffusion de l'enregistrement d'images relatives à la commission d'une atteinte volontaire à l'intégrité de la personne, recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé et blanchiment, MM. [IL] [NY] et [TO] [YG] sous les accusations de viols aggravés, traite des êtres humains en bande organisée, diffusion de l'enregistrement d'images relatives à la commission d'une atteinte volontaire à l'intégrité de la personne et recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé, MM. [YK] [EC] et [YT] [TM] sous les accusations de viols aggravés et diffusion de l'enregistrement d'images relatives à la commission d'une atteinte volontaire à l'intégrité de la personne, M. [YZ] [AG] sous les accusations de viols aggravés, diffusion de l'enregistrement d'images relatives à la commission d'une atteinte volontaire à l'intégrité de la personne et recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé, MM. [G] [D], [AV] [IV], [L] [DR], [JA] [S], [NJ] [O], [NO] [IZ], [TI] [TF], [J] [YL] et [OB] [NT] [V] sous l'accusation de viols aggravés, et renvoyé devant le tribunal correctionnel MM. [DX] [YM] et [IX] [IK] sous les préventions respectives de recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé et blanchiment.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de Mme Piazza, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de Mmes [BI] [IT], [TW] [NU], [NM] [IM], [JC] [IJ] [TH] et [N] [AZ], les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mmes [TZ] [M], [IU] [ZD], et [TJ] [NZ], les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet, avocat de [IS] [JB] [TS], [P] [I] [U], [AX] [YV] et [IO] [YH], les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de Mmes [OA] [B], [DK] [K], [TP] [R], [X] [BK], [YN] [TL], [IP] [YW], [TK] [CE] et [TN] [UA], les associations [2], [3], [5], les observations de la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat de Mmes [YP] [EB], [YX] [AW], [JC] [BA], les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur et Ghnassia, avocat de Mmes [EA] [ZB], [NL] [DM], [YR] [IN] et [YO] [Y], l'association [4], les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. [TX] [IK], les observations de la SCP Boucard, Capron, Maman, avocat de MM. [IL] [NY] et [TI] [TF], les observations de la SCP Gaschignard, Loiseau, Massignon, avocat de M. [DX] [YM], et les conclusions de M. Fusina, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 mai 2025, où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Piazza, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Les gendarmes de la section de recherches de [Localité 6] ont découvert en mars 2020 l'existence d'un site de vidéos pornographiques proposant des tournages, dirigé par M. [TX] [IK], à l'origine de plusieurs déclarations dans la presse sur son commerce et faisant l'objet de plusieurs plaintes pour viols de jeunes femmes vivant dans différentes régions de France.
3. Une information a été ouverte des chefs susvisés, le 17 octobre 2020, suivie de plusieurs réquisitoires supplétifs, à l'issue de laquelle, par ordonnance du juge d'instruction en date du 31 août 2023, après non-lieux partiels et requalifications, MM. [G] [D], [JA] [S], [NJ] [O], [AV] [IV], [YT] [TM], [NW] [IR], [L] [DR], [DX] [YM], [OB] [NT] [V], [J] [YL], [YZ] [AG], [IL] [NY], [NO] [IZ], [TX] [IK], [TI] [TF], [YK] [EC], [TO] [YG] ont été renvoyés devant la cour criminelle départementale sous les accusations de viols et proxénétisme, aggravés, traite des êtres humains aggravée et en bande organisée, diffusion d'enregistrement d'images relatives à la commission d'une atteinte volontaire à l'intégrité de la personne, travail dissimulé et blanchiment, et après disjonction, M. [IX] [IK] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel sous la prévention de blanchiment.
4. MM. [TX] [IK], [YG], [NT] [V], [TF], [IR], [YM], [S], [YL], [IZ], [D], [DR] ont relevé appel de l'ordonnance.
5. Le procureur de la République a relevé appel de l'ordonnance rendue à l'égard de l'ensemble des personnes mises en examen, à l'exception de M. [O].
6. Mmes [YS] [Z], [NM] [IM] [DL] [NR], [AX] [YV], [IY] [ED], [TK] [CE], [OA] [B], [JC] [BA], [X] [BK], [TG] [TU], [IS] [YI] [TS], [YO] [Y], [NL] [DM], [YR] [IN], [EA] [ZB], [N] [II], [TW] [NU], [IU] [ZD], [TZ] [M], [TJ] [NZ], [DK] [K], [YN] [TL], [BI] [IT], [JC] [IJ] [TH], [TN] [UA], [P] [I] [U], [IY] [A], [IO] [YH], [YP] [EB], [YX] [AW], [TP] [R], [IP] [YW], ainsi que les associations [3], [2], [5], la [4], parties civiles, ont également relevé appel de l'ordonnance.
Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, et le quatrième moyen proposés pour Mme [IT], le deuxième moyen, le troisième moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, les cinquième et sixième moyens proposés pour Mme [IJ] [TH], le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, les quatrième et cinquième moyens proposés pour Mme [II], les premier et troisième moyens proposés pour Mme [IM], les premier, troisième et quatrième moyens proposés pour Mme [NU], le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches, et le troisième moyen, pris en sa seconde branche, proposés pour Mme [BA], les premier, deuxième, cinquième et septième moyens proposés pour Mme [EB], le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses cinquième et sixième branches, et les troisième, quatrième et cinquième moyens proposés pour Mme [AW], le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, le troisième moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches, les quatrième et sixième moyens proposés pour Mme [YV], le deuxième moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches, proposés pour Mme [YH], le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, le deuxième moyen, pris en ses deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches, le troisième moyen, le quatrième moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, les sixième et septième moyens proposés pour Mme [YI] [TS], le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, les deuxième, troisième, cinquième, sixième, septième et huitième moyens proposés pour Mme [I] [U], le premier moyen, pris en sa première branche, et le second moyen proposés pour Mme [IN], le second moyen proposé pour Mme [DM], le second moyen proposé pour Mme [ZB], les premier et deuxième moyens, le troisième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, le quatrième moyen, pris en sa seconde branche, les cinquième, sixième et septième moyens proposés pour Mmes [B], [K], [R], [BK], [TL], [YW], [CE], [UA] et les associations [3], [2] et [5], les premier, quatrième et cinquième moyens proposés pour Mmes [M], [ZD] et [NZ]
7. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, le deuxième moyen, pris en sa première branche, proposés pour Mme [YI] [TS], et le premier moyen, pris en sa première branche, proposé pour Mme [YV]
Enoncé des moyens
8. Le premier moyen proposé pour Mme [YI] [TS] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation M. [IR] pour viols au préjudice de Mme [YI] [TS] seulement aggravés par la sérialité et non par l'utilisation d'un réseau de communication électronique pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, alors :
« 1°/ que la peine encourue pour le crime de viol est aggravée lorsque la victime a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de communication électronique ; que cette circonstance aggravante est constituée si un réseau de communication électronique permettant la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, tel que Facebook ou Telegram, a été utilisé par l'auteur des faits pour contacter directement la victime, fût-ce par un message personnel ; qu'en énonçant, pour écarter la circonstance aggravante d'utilisation d'un réseau de communication électronique, que « l'entrée en contact de M. [IR] avec [les parties civiles] ne s'est pas faite par la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé » et que M. [IR] « a accompli une démarche individuelle à partir du compte Facebook ou Télégram de la prétendue [H] [OC], en direction de chacune des jeunes femmes qu'il avait préalablement sélectionnées après examen de leurs propres profils » (arrêt, p. 334 et 335), la chambre de l'instruction a méconnu l'article 222-24, 8° du code pénal. »
9. Le deuxième moyen proposé pour Mme [YI] [TS] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation M. [IR] pour complicité de viols en réunion au préjudice de Mme [YI] [TS] non aggravée par la sérialité des faits, par l'utilisation d'un réseau de communication électronique pour la diffusion de messages à un public non déterminé ni par le fait d'être accompagnés ou suivis de torture ou d'actes de barbarie, alors :
« 1°/ que la peine encourue pour le crime de complicité de viol est aggravée lorsque la victime a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de communication électronique ; que cette circonstance aggravante est constituée si un réseau de communication électronique permettant la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, tel que Facebook ou Telegram, a été utilisé par l'auteur des faits pour contacter directement la victime, fût-ce par un message personnel ; qu'en énonçant, pour écarter la circonstance aggravante d'utilisation d'un réseau de communication électronique, que « l'entrée en contact de M. [IR] avec [les parties civiles] ne s'est pas faite par la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé » et que M. [IR] « a accompli une démarche individuelle à partir du compte Facebook ou Télégram de la prétendue [H] [OC], en direction de chacune des jeunes femmes qu'il avait préalablement sélectionnées après examen de leurs propres profils » (arrêt, p. 334 et 335), la chambre de l'instruction a méconnu les articles 121-6, 121-7 et 222-24, 8° du code pénal. »
10. Le premier moyen proposé pour Mme [YV] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation M. [IR] pour viols au préjudice de Mme [YV] seulement aggravés par la sérialité et non par l'utilisation d'un réseau de communication électronique, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, alors :
« 1°/ que la peine encourue pour le crime de viol est aggravée lorsque la victime a été mise en contact avec l'auteur des faits grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, d'un réseau de communication électronique ; que cette circonstance aggravante est constituée si un réseau de communication électronique permettant la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, tel que Facebook ou Telegram, a été utilisé par l'auteur des faits pour contacter directement la victime, fût-ce par un message personnel ; qu'en énonçant, pour écarter la circonstance aggravante d'utilisation d'un réseau de communication électronique, que « l'entrée en contact de M. [IR] avec [les parties civiles] ne s'est pas faite par la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé » et que M. [IR] « a accompli une démarche individuelle à partir du compte Facebook ou Télégram de la prétendue [H] [OC], en direction de chacune des jeunes femmes qu'il avait préalablement sélectionnées après examen de leurs propres profils » (arrêt, p. 334 et 335), la chambre de l'instruction a méconnu l'article 222-24, 8° du code pénal. »
Réponse de la Cour
11. Les moyens sont réunis.
12. Pour dire n'y avoir lieu à retenir la circonstance aggravante d'utilisation d'un réseau de communication électronique pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, l'arrêt attaqué énonce que M. [IR] n'est pas entré en contact avec les futures actrices par la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé, qu'il a accompli une démarche individuelle envers elles à partir du compte Facebook ou Télégram de la prétendue [H] [OC], après qu'il eut sélectionné leurs profils, certaines d'entre elles ayant une activité dans l'érotisme.
13. Les juges précisent que Mme [K] a pris contact avec [H] [OC] qui lui avait été recommandée comme pouvant procurer des contacts pour une activité de prostitution et que certaines actrices ont elles-mêmes pris l'initiative d'un contact avec les réalisateurs, ont été recrutées lors d'un salon de l'érotisme ou par l'intermédiaire de MM. [TX] [IK] ou [NY].
14. Ils en déduisent que l'entrée en contact de M. [IR] avec les victimes ne s'étant pas faite grâce à l'utilisation, pour la diffusion de messages à destination d'un public non déterminé d'un réseau de communication électronique, la circonstance aggravante susvisée ne peut être retenue.
15. En se déterminant ainsi, dès lors qu'elle constatait que M. [IR] a utilisé un compte Facebook ouvert sous le faux nom d'[H] [OC] pour sélectionner et contacter les victimes, de sorte que la condition d'incrimination de diffusion sur les réseaux en direction d'un public indéterminé n'était pas remplie, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.
16. Ainsi, les moyens doivent être écartés.
Mais sur le deuxième moyen, pris en ses deux premières branches, proposé pour Mme [IT], le troisième moyen, pris en ses deux premières branches, proposé pour Mme [IJ] [TH], le deuxième moyen, pris en ses première, deuxième et cinquième branches, proposé pour Mme [II], le deuxième moyen, pris en ses trois premières branches, proposé pour Mme [BA], le deuxième moyen, pris en ses quatre premières branches, proposé pour Mme [AW], le troisième moyen, pris en ses trois premières branches, proposé pour Mme [YV], le second moyen, pris en ses trois premières branches, proposé pour Mme [YH], le troisième moyen, pris en sa première branche, proposé pour Mmes [B], [K], [R], [BK], [TL], [YW], [CE], [UA], les associations [3], [2] et [5], le deuxième moyen proposé pour Mmes [M], [ZD] et [NZ] et le moyen proposé pour l'association [4]
Enoncé des moyens
17. Le deuxième moyen proposé pour Mme [IT] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la mise en accusation et le renvoi devant la cour criminelle départementale de Paris de MM. [TX] [IK], [TF], [YL] pour viols en réunion et M. [IR] pour complicité de viols en réunion sans retenir la circonstance aggravante de sexisme et de racisme, alors :
« 1°/ que les articles 132-76 et 132-77 du code pénal s'appliquent, pour le premier, lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une prétendue race, une ethnie, une nation et pour le second, lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ; que ces dispositions répriment les propos sexistes et racistes portant en eux-mêmes atteinte à l'honneur ou à la considération, peu important qu'ils ne comportent aucune allégation, ni aucune imputation d'un quelconque fait ; que l'arrêt constate que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » ou les désignant par leur supposée appartenance communautaire ou ethnique, tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général, ainsi que, pour certaines d'entre elles, la couleur de leur peau ou, notamment, leur appartenance à la communauté maghrébine ou musulmane » et que « ces propos comportent des expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris » (cf. arrêt p. 336 dernier al.) ; qu'en écartant néanmoins la circonstance aggravante de sexisme au motif que « ces propos ne comportent en eux-mêmes, aucune allégation ni aucune imputation d'un quelconque fait », pour en déduire qu'ils n'auraient « pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes », la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 132-76 et 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que l'article 132-77 du code pénal s'applique lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ; que la chambre de l'instruction a constaté que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » (?), tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général (?) »; qu'elle a également retenu que ces propos avaient été tenus dans le cadre de « la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels »; qu'en retenant qu'il ne serait pas établi que les propos étaient précisément tenus en raison de l'appartenance des victimes au sexe féminin, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. »
18. Le troisième moyen proposé pour Mme [IJ] [TH] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la mise en accusation et le renvoi devant la cour criminelle départementale de Paris de MM. [TX] [IK], [NY], [TF], [YL] et [O] pour viols en réunion et M. [IR] pour complicité de viols en réunion sans retenir la circonstance aggravante de sexisme, alors :
« 1°/ que l'article 132-77 du code pénal s'applique lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ; que ces dispositions répriment les propos sexistes portant en eux-mêmes atteinte à l'honneur ou à la considération, peu important qu'ils ne comportent aucune allégation, ni aucune imputation d'un quelconque fait ; que l'arrêt constate que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » ou les désignant par leur supposée appartenance communautaire ou ethnique, tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général » et que « ces propos comportent des expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris » (cf. arrêt p. 336 dernier al.) ; qu'en écartant néanmoins la circonstance aggravante de sexisme au motif que « ces propos ne comportent en eux-mêmes, aucune allégation ni aucune imputation d'un quelconque fait », pour en déduire qu'ils n'auraient « pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes », la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que l'article 132-77 du code pénal s'applique lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ; que la chambre de l'instruction a constaté que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » (?), tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général (?) »; qu'elle a également retenu que ces propos avaient été tenus dans le cadre de « la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels »; qu'en retenant qu'il ne serait pas établi que les propos étaient précisément tenus en raison de l'appartenance des victimes au sexe féminin, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. »
19. Le deuxième moyen proposé pour Mme [II] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la mise en accusation et le renvoi devant la cour criminelle départementale de Paris de M. [TX] [IK] pour viols en réunion, M. [NY] pour viols en réunion, M. [YL] pour viols en réunion sans retenir la circonstance aggravante de sexisme et de racisme, alors :
« 1°/ que les articles 132-76 et 132-77 du code pénal s'appliquent, pour le premier, lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une prétendue race, une ethnie, une nation et pour le second, lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ; que ces dispositions répriment les propos sexistes et racistes portant en eux-mêmes atteinte à l'honneur ou à la considération, peu important qu'ils ne comportent aucune allégation, ni aucune imputation d'un quelconque fait ; que l'arrêt constate que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » ou les désignant par leur supposée appartenance communautaire ou ethnique, tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général, ainsi que, pour certaines d'entre elles, la couleur de leur peau ou, notamment, leur appartenance à la communauté maghrébine ou musulmane » et que « ces propos comportent des expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris » (cf. arrêt p. 336 dernier al.) ; qu'en écartant néanmoins la circonstance aggravante de sexisme au motif que « ces propos ne comportent en eux-mêmes, aucune allégation ni aucune imputation d'un quelconque fait », pour en déduire qu'ils n'auraient « pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes », la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 132-76 et 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que l'article 132-77 du code pénal s'applique lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ;que la chambre de l'instruction a constaté que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » (?), tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général (?) »; qu'elle a également retenu que ces propos avaient été tenus dans le cadre de « la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels »; qu'en retenant qu'il ne serait pas établi que les propos étaient précisément tenus en raison de l'appartenance des victimes au sexe féminin, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
5°/ que dans ses écritures d'appel, Mme [II], de nationalité estonienne et russophone, faisait valoir que lors de la 2ème vidéo réalisée par M. [NY], M. [YL] avait tenu des propos véhiculant des stéréotypes sexistes et racistes : « c'est une bonne langue de russe » ; « elles sucent comme ça en Russie ? » ; qu'en omettant de se prononcer sur l'atteinte à l'honneur et à la considération portée par ces propos, qui n'ont été proférés que parce qu'elle était une femme et russophone, la cour d'appel a violé l'article 593 du code de procédure pénale. »
20. Le deuxième moyen proposé pour Mme [BA] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation MM. [TX] [IK], [IR] et [NY] pour traite des êtres humains en bande organisée, M. [YG] pour traite des êtres humains, MM. [TX] [IK], [NY] et [D] pour viols en réunion, M. [IR] pour complicité de viols en réunion, M. [YG] pour viol aggravé par la sérialité et a écarté la circonstance aggravante de sexisme, alors :
« 1°/ que l'article L. 132-77 du code pénal s'applique lorsqu'« un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui (soit) portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe » ; que ce texte réprime les propos sexistes portant en eux-mêmes atteinte à l'honneur ou à la considération, peu important qu'ils ne comportent aucune allégation, ni aucune imputation d'un quelconque fait ; que la cour d'appel a constaté que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » (?) tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général (?) » (cf. arrêt p. 336 pénultième al.), et que « ces propos comportent des expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris » (cf. arrêt p. 336 dernier al.) ; qu'en écartant néanmoins la circonstance aggravante de sexisme au motif que « ces propos ne comportent en eux-mêmes, aucune allégation ni aucune imputation d'un quelconque fait », pour en déduire qu'ils n'auraient « pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes », la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que l'article L. 132-77 du code pénal s'applique lorsqu'« un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe, soit établissent que les faits ont été commis contre la victime pour l'une de ces raisons » ; que la cour d'appel a constaté que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » (?) tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général (?) » (cf. arrêt p. 336 pénultième al.) ; que la cour d'appel a également retenu que ces propos avaient été tenus dans le cadre de « la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels » (cf. arrêt p. 337, al. 3) ; qu'en retenant qu'il ne serait pas établi que les propos étaient précisément tenus en raison de l'appartenance des victimes au sexe féminin, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
3°/ que dans ses écritures d'appel, Mme [BA] faisait valoir qu'elle s'était entendu traiter, par M. [YG], de « slut » (salope), « bitch, fucking bitch » (salope, putain de salope), « gros cul » ; qu'en omettant de se prononcer sur l'atteinte à l'honneur et à la considération portée par ces propos tenus par M. [YG], qui n'ont été proférés que parce qu'elle était une femme, la cour d'appel a violé l'article 593 du code de procédure pénale. »
21. Le deuxième moyen proposé pour Mme [AW] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation MM. [TX] [IK] et [YL] pour viols en réunion et M. [TX] [IK] pour traite des êtres humains en bande organisée et M. [IR] pour traite d'être humain en bande organisée et viols en série et a écarté la circonstance aggravante de sexisme, alors :
« 1°/ que l'article L. 132-77 du code pénal s'applique lorsqu'« un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui (soit) portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe » ; que ce texte réprime les propos sexistes portant en eux-mêmes atteinte à l'honneur ou à la considération, peu important qu'ils ne comportent aucune allégation, ni aucune imputation d'un quelconque fait ; que la cour d'appel a constaté que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » (?) tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général (?) » (cf. arrêt p. 336 pénultième al.), et que « ces propos comportent des expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris » (cf. arrêt p. 336 dernier al.) ; qu'en écartant néanmoins la circonstance aggravante de sexisme au motif que « ces propos ne comportent en eux-mêmes, aucune allégation ni aucune imputation d'un quelconque fait », pour en déduire qu'ils n'auraient « pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes », la cour d'appel a exigé une condition que le texte ne comporte pas, en violation de l'article 132-77 du code pénal, et des articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que l'article L. 132-77 du code pénal s'applique lorsqu'« un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe, soit établissent que les faits ont été commis contre la victime pour l'une de ces raisons » ; que la cour d'appel a constaté que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » (?) tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général (?) » (cf. arrêt p. 336 pénultième al.) ; que la cour d'appel a également retenu que ces propos avaient été tenus dans le cadre de « la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels » (cf. arrêt p. 337, al. 3) ; qu'en retenant qu'il ne serait pas établi que les propos étaient précisément tenus en raison de l'appartenance des victimes au sexe féminin, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses constatations en violation de l'article 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
3°/ que dans ses écritures d'appel, Mme [AW] faisait valoir qu'elle avait subi les propos suivants tenus par M. [IK] : « je vais vérifier ta carte d'identité, parce que?au moins, comme ça au moins si t'as moins de 18 ans j'aurais niqué avant », « je vais laisser mes compères s'amuser avec la petite salope », « de la bonne petite cochonne », « elle aime la bite la cochonne hein », « je ne t'embrasse pas, t'as bouffé des bites », « l'abime pas trop on en a encore besoin après quand même hein », « on t'a tous bien défoncée », « on voit qu'elle a l'habitude de se faire défoncer le cul [IW] hein », « putain on t'a souillée [?] souillée de sperme », « t'as l'air d'un bon vide couille quand même », « c'est un bon gros cul ça », « ah putain je me viderais bien les couilles dans ta bouche déjà là », « t'es une bonne salope toi hein. T'es une bonne salope ? » (cf. mémoire du 2 novembre 2023, p. 9) ; qu'en omettant de se prononcer sur l'atteinte à l'honneur et à la considération portée par ces propos tenus par M. [IK] à Mme [AW], qui n'ont été proférés que parce qu'elle était une femme, la cour d'appel a violé l'article 593 du code de procédure pénale ;
4°/ que Mme [AW] faisait valoir que M. [IR] avait déclaré devant le magistrat instructeur qu'il agissait en considération du fait que les victimes étaient des femmes, et plus précisément « des jeunes femmes, certes naïves, mais euh?ouvertes sur les choses qui ont un rapport avec l'univers sexuel. Mais en parallèle, et c'est là où c'est paradoxal, tout en ayant une réelle affection vraiment pour ces jeunes femmes. » (cf. mémoire du 2 novembre 2023) ; qu'en omettant de s'expliquer sur ces propos qui démontraient que c'est bien le sexe féminin des victimes qui a été déterminant des agissements de M. [IR], la cour d'appel a violé l'article 593 du code de procédure pénale. »
22. Le troisième moyen proposé pour Mme [YV] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation MM. [TX] [IK], [IR], [NY], [IZ], [YL], [TF] et [DR] pour viols au préjudice de Mme [YV] non aggravés par celle tirée de leur commission en raison de son sexe, alors :
« 1°/ que le peine encourue pour le crime de viol est aggravée lorsqu'il est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ; que la circonstance aggravante est constituée si les propos ayant précédé, accompagné ou suivi l'acte de viol ont porté atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime en raison de son sexe même si ces propos ne comportent pas l'allégation ou l'imputation d'un fait précis ; qu'en retenant que des propos tels que « salope », « pute » ou « vide-couilles » « comportent des expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris. Toutefois, ces propos ne comportent en eux-mêmes, aucune allégation ni aucune imputation d'un quelconque fait et n'ont pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes » (arrêt, p. 336), la chambre de l'instruction a méconnu les articles 132-77 et 222-23 du code pénal ;
2°/ en tout état de cause, que de tels propos, qui assimilent les victimes à un stéréotype de femmes soumises à la domination sexuelle des hommes et devant être traitées comme des êtes inférieurs aux hommes, portent atteinte à leur honneur et à leur considération à raison de leur sexe ; qu'en décidant le contraire, la chambre de l'instruction a méconnu les article 132-77 et 222-23 du code pénal ;
3°/ que les actes et propos portant atteinte à l'honneur et à la considération d'une personne à raison de son sexe caractérisent la circonstance aggravante de sexisme même s'ils ont été proférés à l'occasion du tournage de ce qui est considéré par son auteur ou son réalisateur comme une oeuvre pornographique à partir du moment où ces propos précédent, accompagnent ou suivent des actes sexuels réels et non simulés pour des raisons artistiques ; qu'il en est, à plus forte raison, ainsi lorsque ces actes et propos précèdent, accompagnent ou suivent des actes sexuels constitutifs d'une atteintes à la personne humaine pénalement réprimée ; qu'en énonçant, pour écarter la circonstance aggravante de sexisme, que « les actes commis sur les actrices participent de la réalisation d'oeuvres de l'esprit, malgré les réserves que peut, évidemment, susciter cette classification ne serait-ce que du fait de l'absence d'écriture préalable d'un scénario » et que des propos tels que « salope », « pute » ou « vide-couilles » « ont été tenus à raison de l'objet de l'oeuvre, à savoir l'excitation sexuelle de spectateurs par la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels. Ces propos participent d'une mise en scène caractéristiques des productions de M. [TX] [IK] dont les acteurs ont déclaré qu'il exigeait d'eux de la grossièreté, non pas pour leur plaisir mais pour celui des spectateurs » (arrêt, p. 337) tout en mettant M. [TX] [IK] et M. [NY] en accusation du chef de traite des êtres humains en bande organisée au motif qu'ils ont, « en lien les uns avec les autres, accompli les actes nécessaires à l'arrivée de jeunes femmes sur les plateaux de tournage où elles devaient subir des actes sexuels auxquels elles n'avaient pas consenti préalablement et auxquels elles n'auraient pas consenti si elles avaient connu la destination des vidéos et auxquelles elles allaient être contraintes » (arrêt, p. 343) et tout en mettant MM. [TX] [IK], [NY], [IZ], [YL], [TF] et [DR] en accusation des chefs de viols en réunion après avoir relevé que « le visionnage des vidéos et de rush qui ont été saisis permet d'apprécier le fonctionnement des tournages dans un mélange d'autorité, de cynisme et de fausse bonhomie », qu'il « y apparaît que les scènes sont constituées par une simple succession de positions sexuelles, sans que soit racontée une quelconque histoire et sans mise en scène d'une quelconque affection entre les partenaires, le tout s'enchaînant au fil des injonctions du réalisateur », que « certains encouragements à pleurer de la part de M. [IK] adressés à une actrice en souffrance, n'apparaissent que comme résultant de la simple prise en compte de la réalité de cette souffrance avec incitation de l'actrice à évacuer ainsi le stress avant de poursuivre le tournage », que « le visionnage confirme les déclarations des actrices sur l'enchaînement des scènes sous la direction du réalisateur et sur la soumission des actrices qui subissent cet enchaînement et dont les souffrances ont été décrites plus haut comme résultant de la multiplication des pénétrations par des verges parfois trop volumineuses, notamment des pénétrations anales avec des blessures parfois visibles », qu'il confirme « également la survenue de hauts le c?ur à l'occasion de fellations trop profondes ou des tentatives d'évitement d'éjaculations sur le visage », que « l'identité et le nombre des participants n'étaient jamais portés à l'avance à la connaissance des actrices qui étaient mises devant le fait accompli sans qu'une quelconque possibilité de refus leur soit laissé » (arrêt, p. 351 et 352), que « les actes sexuels dénoncés par les victimes, spécialement la répétition des pénétrations allant jusqu'à plusieurs dizaines en une journée, ont à l'évidence été douloureux physiquement et moralement au point qu'un certain nombre d'actrices ont anticipé cette souffrance morale et physique consommant l'alcool et la cocaïne mis à leur disposition et qu'il en a été ainsi particulièrement dans le cadre des Bukkake ou gang bang confrontant les actrices à plusieurs dizaines d'hommes jouissant du spectacle de leur avilissement » (arrêt, p. 336), qu'« en définitive, il apparaît que les plaignantes ont au contraire tourné dans une ambiance et dans des conditions exclusives de toute liberté de refuser les actes, y compris lorsqu'elles subissaient des traumatismes physiques et que MM. [IK] et [NY] profitaient de cette soumission pour les instrumentaliser avec la certitude que leurs difficultés personnelles, sociales ou financière leur interdiraient de réagir » (arrêt, p. 351 et 352), la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en méconnaissance des articles 132-77 et 222-23 du code pénal. »
23. Le second moyen proposé pour Mme [YH] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation MM. [TX] [IK], [NY] et [IZ] pour viols en réunion au préjudice de Mme [YH] non aggravés par la circonstance aggravante de sexisme, alors :
« 1°/ que le peine encourue pour le crime de viol est aggravée lorsqu'il est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ; que la circonstance aggravante est constituée si les propos ayant précédé, accompagné ou suivi l'acte de viol ont porté atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime en raison de son sexe même si ces propos ne comportent pas l'allégation ou l'imputation d'un fait précis ; qu'en retenant que des propos tels que « salope », « pute » ou « vide-couilles » « comportent des expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris. Toutefois, ces propos ne comportent en eux-mêmes, aucune allégation ni aucune imputation d'un quelconque fait et n'ont pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes » (arrêt, p. 336), la chambre de l'instruction a méconnu les articles 132-77 et 222-23 du code pénal ;
2°/ en tout état de cause, que de tels propos, qui assimilent les victimes à un stéréotype de femmes soumises à la domination sexuelle des hommes et devant être traitées comme des êtes inférieurs aux hommes, portent atteinte à leur honneur et à leur considération à raison de leur sexe ; qu'en décidant le contraire, la chambre de l'instruction a méconnu les article 132-77 et 222-23 du code pénal ;
3°/ que les actes et propos portant atteinte à l'honneur et à la considération d'une personne à raison de son sexe caractérisent la circonstance aggravante de sexisme même s'ils ont été proférés à l'occasion du tournage de ce qui est considéré par son auteur ou son réalisateur comme une oeuvre pornographique à partir du moment où ces propos précédent, accompagnent ou suivent des actes sexuels réels et non simulés pour des raisons artistiques ; qu'il en est, à plus forte raison, ainsi lorsque ces actes et propos précèdent, accompagnent ou suivent des actes sexuels constitutifs d'une atteintes à la personne humaine pénalement réprimée ; qu'en énonçant, pour écarter la circonstance aggravante de sexisme, que « les actes commis sur les actrices participent de la réalisation d'oeuvres de l'esprit, malgré les réserves que peut, évidemment, susciter cette classification ne serait-ce que du fait de l'absence d'écriture préalable d'un scénario » et que des propos tels que « salope » « pute » ou « vide-couilles » « ont été tenus à raison de l'objet de l'oeuvre, à savoir l'excitation sexuelle de spectateurs par la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels. Ces propos participent d'une mise en scène caractéristiques des productions de M. [TX] [IK] dont les acteurs ont déclaré qu'il exigeait d'eux de la grossièreté, non pas pour leur plaisir mais pour celui des spectateurs » (arrêt, p. 337) tout en mettant M. [TX] [IK] et M. [NY] en accusation du chef de traite des êtres humains en bande organisée au motif qu'ils ont, « en lien les uns avec les autres, accompli les actes nécessaires à l'arrivée de jeunes femmes sur les plateaux de tournage où elles devaient subir des actes sexuels auxquels elles n'avaient pas consenti préalablement et auxquels elles n'auraient pas consenti si elles avaient connu la destination des vidéos et auxquelles elles allaient être contraintes » (arrêt, p. 343) et tout en mettant MM. [TX] [IK], [NY] et [IZ] en accusation des chefs de viols en réunion après avoir relevé que « le visionnage des vidéos et de rush qui ont été saisis permet d'apprécier le fonctionnement des tournages dans un mélange d'autorité, de cynisme et de fausse bonhomie », qu'il « y apparaît que les scènes sont constituées par une simple succession de positions sexuelles, sans que soit racontée une quelconque histoire et sans mise en scène d'une quelconque affection entre les partenaires, le tout s'enchaînant au fil des injonctions du réalisateur », que « certains encouragements à pleurer de la part de M. [IK] adressés à une actrice en souffrance, n'apparaissent que comme résultant de la simple prise en compte de la réalité de cette souffrance avec incitation de l'actrice à évacuer ainsi le stress avant de poursuivre le tournage », que « le visionnage confirme les déclarations des actrices sur l'enchaînement des scènes sous la direction du réalisateur et sur la soumission des actrices qui subissent cet enchainement et dont les souffrances ont été décrites plus haut comme résultant de la multiplication des pénétrations par des verges parfois trop volumineuses, notamment des pénétrations anales avec des blessures parfois visibles », qu'il confirme « également la survenue de hauts le c?ur à l'occasion de fellations trop profondes ou des tentatives d'évitement d'éjaculations sur le visage », que « l'identité et le nombre des participants n'étaient jamais portés à l'avance à la connaissance des actrices qui étaient mises devant le fait accompli sans qu'une quelconque possibilité de refus leur soit laissé » (arrêt, p. 351 et 352), que « les actes sexuels dénoncés par les victimes, spécialement la répétition des pénétrations allant jusqu'à plusieurs dizaines en une journée, ont à l'évidence été douloureux physiquement et moralement au point qu'un certain nombre d'actrices ont anticipé cette souffrance morale et physique consommant l'alcool et la cocaïne mis à leur disposition et qu'il en a été ainsi particulièrement dans le cadre des Bukkake ou gang bang confrontant les actrices à plusieurs dizaines d'hommes jouissant du spectacle de leur avilissement » (arrêt, p. 336), qu'« en définitive, il apparaît que les plaignantes ont au contraire tourné dans une ambiance et dans des conditions exclusives de toute liberté de refuser les actes, y compris lorsqu'elles subissaient des traumatismes physiques et que MM. [IK] et [NY] profitaient de cette soumission pour les instrumentaliser avec la certitude que leurs difficultés personnelles, sociales ou financière leur interdiraient de réagir » (arrêt, p. 351 et 352), la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en méconnaissance des articles 132-77 et 222-23 du code pénal. »
24. Le troisième moyen proposé pour Mmes [B], [K], [R], [BK], [TL], [YW], [CE], [UA] et les associations [3], [2] et [5] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation MM. [TX] [IK], [NY], [YK] [EC], [IZ], [TF], [TM], [YL], [YG], [D], [AG], [IV], [O] et [NT] [V] des chefs de viol en réunion, et M. [IR] du chef de complicité de viol en réunion, sans retenir à leur encontre la circonstance aggravante de racisme ou sexisme et les a renvoyés sous ces chefs d'accusation devant la cour criminelle départementale de Paris, alors :
« 1°/ que en application des articles 132-76 et 132-77 du code pénal, les peines encourues sont aggravées lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une prétendue race, une ethnie, une nation ou une religion déterminée selon le premier de ces deux textes, ou à raison de son sexe, son orientation sexuelle selon le second, soit établissent que les faits ont été commis contre la victime pour l'une de ces raisons ; qu'après avoir énoncé qu'avaient été tenus à l'égard des victimes des « propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » ou les désignant par leur supposée appartenance communautaire ou ethnique, tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général, ainsi que, pour certaines d'entre elles, la couleur de leur peau ou, notamment, leur appartenance à la communauté maghrébine ou musulmane » et que ces propos comportaient des « expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris », la chambre de l'instruction écarte la circonstance aggravante de sexisme et de racisme en relevant que ces propos « ne comportent en eux-mêmes, aucune allégation ni aucune imputation d'un quelconque fait et n'ont pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes » (arrêt, p. 336) ; qu'en statuant ainsi, quand la seule circonstance que ces propos, dont elle établissait par ailleurs le caractère raciste et sexiste, avaient été tenus avant ou pendant les viols commis sur les tournages suffisait à caractériser la circonstance aggravante de racisme et de sexisme sans que ne puisse y faire obstacle l'absence en leur sein d'allégation ou d'imputation diffamatoire, la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé les articles 132-76 et 132-77 du code pénal. »
25. Le deuxième moyen proposé pour Mmes [M], [ZD] et [NZ] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation M. [IR] du chef de complicité de viol en réunion et MM. [TX] [IK], [NY] et [TF] du seul chef de viol en réunion et a écarté la circonstance aggravante de sexisme et de racisme, alors :
« 1°/ qu'il suffit, pour caractériser la circonstance propos de sexisme ou de racisme, de constater que des propos racistes ou sexistes ont été tenus, fût-ce par un coauteur, avant, pendant ou après l'infraction principale ; qu'en l'espèce, pour écarter la circonstance aggravante de sexisme et de racisme, la chambre de l'instruction, qui a relevé l'existence de « propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » ou les désignant par leur supposée appartenance communautaire ou ethnique, tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général, ainsi que, pour certaines d'entre elles, la couleur de leur peau ou, notamment, leur appartenance à la communauté maghrébine ou musulmane » a retenu que ces propos « ne comportent en eux-mêmes, aucune allégation ni aucune imputation d'un quelconque fait et n'ont pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes » et que « ces propos n'établissent pas, au sens des articles susvisés que les faits commis à l'encontre des victimes l'auraient été, en l'occurrence, en raison de leur sexe féminin ni de leur appartenance ou supposée appartenance à une prétendue ethnie ou race » (arrêt, p. 336-337) ; qu'en statuant ainsi, quand la seule circonstance que ces propos, dont elle établissait par ailleurs le caractère raciste et sexiste, aient été tenus par un ou plusieurs co-auteurs avant ou pendant les viols commis sur les tournages suffisait à caractériser la circonstance aggravante de sexisme et de racisme, la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé les articles 132-76 et 132-77 du code pénal ;
2°/ qu'il suffit, pour caractériser la circonstance propos de sexisme ou de racisme, de constater que des propos racistes ou sexistes ont été tenus, fût-ce par un coauteur, avant, pendant ou après l'infraction principale ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction, bien qu'elle ait relevé l'existence de « propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » ou les désignant par leur supposée appartenance communautaire ou ethnique, tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général, ainsi que, pour certaines d'entre elles, la couleur de leur peau ou, notamment, leur appartenance à la communauté maghrébine ou musulmane », a retenu qu'« il y a lieu de considérer que les actes commis sur les actrices participent de la réalisation d'oeuvres de l'esprit » et que « ces propos n'établissent pas, au sens des articles susvisés que les faits commis à l'encontre des victimes l'auraient été, en l'occurrence, en raison de leur sexe féminin ni de leur appartenance ou supposée appartenance à une prétendue ethnie ou race » (arrêt, p. 337, §§ 1-2) ; qu'en statuant ainsi, quand la circonstance que ces propos aient été tenus dans le contexte de la réalisation d'une oeuvre de l'esprit n'était pas de nature à exclure leurs caractères existe, la chambre de l'instruction a violé les articles 132-76 et 132-77 du code pénal ;
3°/ que la circonstance aggravante de sexisme est caractérisée par tous propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction a relevé que les propos sexistes tenus lors des tournages avaient pour objet « la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels » (arrêt, p.337,§3) ; qu'elle a toute fois écarté la circonstance aggravante de sexisme au motif que « ces propos participent d'une mise en scène caractéristiques des productions de M. [TX] [IK] dont les acteurs ont déclaré qu'il exigeait d'eux de la grossièreté, non pas pour leur plaisir mais pour celui des spectateurs » (ibid.) ; qu'en statuant ainsi, sans constater que les actrices auraient consenti à être destinataires de ces propos, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 132-76 et 132-77 du code pénal ;
4°/ que la circonstance aggravante de sexisme est caractérisée par tous propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ; qu'il en va ainsi lorsque l'humanité ou la dignité de la victime sont niées à raison du sexe de celle-ci ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction a relevé que les propos sexistes tenus lors des tournages avaient pour objet « la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels » (arrêt, p. 337, § 3), ce dont il ressentait que la réification du corps féminin dans une intention sexiste était le but même des films tournés par les mis en examen ; qu'en retenant toutefois que les propos visés ont été tenus « à raison de l'objet de l'oeuvre » et non pas en raison du sexe des actrices en lui-même, la cour d'appel a violé l'article 132-77 du code pénal ;
5°/ que la circonstance aggravante de racisme est caractérisée par tous propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui établissent que les faits ont été commis contre la victime à raison de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une prétendue race, une ethnie, une nation ou une religion déterminée ; qu'en l'espèce, Mme [M] faisait valoir que les vidéos dans lesquelles elle avait tourné étaient intitulées « [BI], beurette » et « [BI] spécial migrant» (mémoire devant la chambre de l'instruction, p. 4,avant-dernier §), ce qui ressortait également de la procédure (D602) ; qu'en écartant la circonstance aggravante de racisme sans s'expliquer sur ces éléments, dont il résultait de ces éléments que les viols commis sur Mme [M] l'avaient été précisément dans le but d'instrumentaliser à des fins sexuelles son origine maghrébine réelle ou supposée, la cour d'appel a violé l'article 132-76 du code de procédure pénale ;
6°/ que les juridictions des États parties à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tenus de fournir une protection pénale effective et appropriée contre les discriminations, ne peuvent s'abstenir d'aggraver les infractions lorsqu'elles constatent le caractère discriminatoire de celles-ci ; qu'en rejetant les circonstances aggravantes de sexisme et de racisme, tout en constatant l'existence de « propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » ou les désignant par leur supposée appartenance communautaire ou ethnique, tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général, ainsi que, pour certaines d'entre elles, la couleur de leur peau ou, notamment, leur appartenance à la communauté maghrébine ou musulmane », la chambre de l'instruction a violé les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
26. Le moyen proposé pour l'association [4] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté les circonstances aggravantes de sexisme et de racisme, alors :
« 1°/ que les articles 132-76 et 132-77 du code pénal s'appliquent, pour le premier, lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une prétendue race, une ethnie, une nation et pour le second, lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ; que ces dispositions répriment les propos sexistes et racistes portant en eux-mêmes atteinte à l'honneur ou à la considération, peu important qu'ils ne comportent aucune allégation, ni aucune imputation d'un quelconque fait ; que l'arrêt constate que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » ou les désignant par leur supposée appartenance communautaire ou ethnique, tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général, ainsi que, pour certaines d'entre elles, la couleur de leur peau ou, notamment, leur appartenance à la communauté maghrébine ou musulmane » et que « ces propos comportent des expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris » (arrêt p.336 dernier al.) ; qu'en écartant néanmoins les circonstances aggravantes de sexisme ou de racisme aux motifs que « ces propos ne comportent en eux-mêmes, aucune allégation ni aucune imputation d'un quelconque fait », pour en déduire qu'ils n'auraient « pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes », la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 132-76 et 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que les articles 132-76 et 132-77 du code pénal s'appliquent lorsqu'un crime ou un délit est précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe ou à raison de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une prétendue race, une ethnie, une nation ; que l'arrêt constate que « sont visés des propos insultants tels que salope, pute ou « vide-couilles » ou les désignant par leur supposée appartenance communautaire ou ethnique, tenus envers les actrices victimes et mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général, ainsi que, pour certaines d'entre elles, la couleur de leur peau ou, notamment, leur appartenance à la communauté maghrébine ou musulmane » et que « ces propos comportent des expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris » (arrêt p.336 dernier al.) ; qu'en retenant qu'il ne serait pas établi que les propos auraient été tenus à raison du sexe des actrices en lui-même ni de leur appartenance ou supposée appartenance à une prétendue ethnie, religion ou race, la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles 132-76 et 132-77 du code pénal, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;
3°/ que la circonstance aggravante de discrimination est une circonstance objective, caractérisée par les termes employés ; que la notion d'oeuvre de l'esprit ne constitue pas un fait justificatif de la commission d'une infraction pénale ; qu'en retenant, pour écarter les circonstances aggravantes de sexisme et de racisme, que les propos litigieux auraient « été tenus à raison de l'objet de l'oeuvre, à savoir l'excitation sexuelle de spectateurs par la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels. Ces propos participent d'une mise en scène caractéristique des productions de M. [TX] [IK] dont les acteurs ont déclaré qu'ils exigeaient d'eux de la grossièreté, non pas pour leur plaisir mais pour celui des spectateurs », la chambre de l'instruction a statué par un motif inopérant et violé les articles 132-76 et 132-77 du code pénal ;
4°/ qu'à supposer que le consentement de la victime puisse exclure la circonstance aggravante d'emploi de propos sexistes ou racistes, encore faut-il que ce consentement soit caractérisé ; qu'en se bornant à retenir que les propos litigieux étaient tenus à raison de « l'objet de l'oeuvre » et que les acteurs avaient déclaré que M. [TX] [IK] exigeait d'eux de la grossièreté, sans constater que les actrices auraient consenti à subir des insultes sexistes et racistes pour le plaisir des spectateurs, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 132-76 et 132-77 du code pénal. »
Réponse de la Cour
27. Les moyens sont réunis.
Vu les articles 132-76 et 132-77 du code pénal :
28. Il résulte du premier de ces textes que la circonstance aggravante de racisme est constituée lorsque l'infraction est précédée, accompagnée ou suivie de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui, soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, soit établissent que les faits ont été commis contre la victime pour l'une de ces raisons.
29. Il résulte du second que la circonstance aggravante de sexisme est constituée lorsque l'infraction est précédée, accompagnée ou suivie de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui, soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe, de son orientation sexuelle ou identité de genre vraie ou supposée, soit établissent que les faits ont été commis contre la victime pour l'une de ces raisons.
30. Ces deux circonstances aggravantes ne sont applicables qu'aux crimes de viols commis depuis le 29 janvier 2017.
31. Par leur nature réelle inhérente au fait principal, ces circonstances étendent leurs effets à tout auteur ou complice des infractions qu'elles aggravent.
32. Pour dire n'y avoir lieu à retenir ces circonstances aggravantes, l'arrêt attaqué énonce que les auteurs des viols ont tenu envers les victimes des propos insultants tels que « salope », « pute » ou « vide-couilles » ou les désignant par leur supposée appartenance communautaire ou ethnique, mettant en cause leur féminité, leurs attributs sexuels, l'usage débridé qu'elles en feraient avec une appétence sans limite pour le sexe masculin et la sexualité en général, ainsi que, pour certaines d'entre elles, la couleur de leur peau ou, notamment, leur appartenance à la communauté maghrébine ou musulmane.
33. Les juges relèvent que ces propos comportent des expressions outrageantes, des invectives et des termes de mépris mais que, ne comportant en eux-mêmes aucune allégation ou imputation de quelconque fait, ils n'ont pu porter atteinte à l'honneur ou à la considération des plaignantes.
34. Ils précisent que ces propos n'établissent pas que les faits ont été tenus en raison du sexe féminin des victimes ou de leur appartenance supposée à une prétendue race.
35. Ils ajoutent que ces propos, tenus dans le contexte de la réalisation d'une oeuvre de l'esprit dont l'objet est l'excitation sexuelle de spectateurs par la mise en scène de femmes présentées comme entièrement disponibles sexuellement pour leurs partenaires qui les traitent comme des objets sexuels, participent d'une mise en scène caractéristique des productions de M. [TX] [IK], dont les acteurs ont déclaré qu'il exigeait d'eux de la grossièreté non pas pour leur plaisir mais pour celui des spectateurs.
36. Ils en déduisent que ne pouvant être considérés comme suffisamment établis qu'ils ont été tenus à raison du sexe des actrices ni de leur appartenance ou supposée appartenance à une prétendue ethnie, religion ou race, ces circonstances aggravantes ne sont pas retenues.
37. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté l'existence de propos sexistes et racistes tenus par les personnes mises en examen avant, pendant ou après la commission des viols, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés.
38. La cassation est par conséquent encourue.
Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche, proposé pour Mme [BA]
Enoncé du moyen
39. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation M. [YG] pour viol aggravé par la sérialité et a écarté la circonstance de réunion pour les viols commis par M. [YG] sur la personne de Mme [BA], alors :
« 1°/ que le viol est puni de vingt ans de réclusion criminelle lorsqu'il est commis par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice ; qu'est complice d'un crime ou d'un délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation ; que Mme [BA] faisait valoir dans ses écritures d'appel que le tournage réalisé par M. [YG] lors duquel celle-ci avait été violée avait été mis en oeuvre au moyen de complices puisqu'il s'inscrivait dans le cadre du stratagème mis en place par [H] [OC] (en réalité M. [IR]), [TX] [IK] et [IL] [NY], et avait été mis en oeuvre par M. [NY], qui l'avait organisé en amont, avait déposé Mme [BA] en bas de chez M. [YG], après lui avait expliqué « qu'il devait un service à quelqu'un », l'avait récupérée en voiture et lui avait remis l'argent de M. [YG] ; qu'en jugeant que la circonstance de réunion n'aurait pu être retenue que sous réserve de la présence physique des co-auteurs ou complices (cf. arrêt p. 334 al. 7 et 8), la cour d'appel a ajouté aux textes une condition qu'ils ne prévoient pas, en violation des articles 121-7 et 222-24, 6°, du code pénal. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 121-7, 222-24, 6°, du code pénal et 593 du code de procédure pénale :
40. Il résulte du premier de ces textes qu'est complice d'un crime ou d'un délit la personne qui, sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation.
41. Le deuxième prévoit que le viol est puni de vingt ans de réclusion criminelle lorsqu'il est commis par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice.
42. En application du troisième, tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
43. Pour dire n'y avoir lieu à retenir la circonstance aggravante de réunion du viol, l'arrêt attaqué énonce que celle-ci nécessite la présence physique des coauteurs ou complices.
44. Les juges constatent que le viol commis par M. [YG] au préjudice de Mme [BA] s'est déroulé hors la présence physique de coauteurs ou de complices et en déduisent que la circonstance aggravante de réunion n'est pas établie.
45. En se déterminant ainsi, alors qu'elle relevait par ailleurs que MM. [TX] [IK] et [NY], dont elle ordonne la mise en accusation du chef de viols en réunion ayant pour victime Mme [BA], ont accompagné la victime dans l'appartement de M. [YG], chez lequel allait se dérouler le crime et que leur présence physique lors de l'acte n'est pas une condition de la circonstance aggravante de réunion, la chambre de l'instruction a ajouté au texte et s'est contredite.
46. La cassation est par conséquent également encourue de ce chef.
Et sur le quatrième moyen proposé pour Mme [BA], le troisième moyen proposé pour Mme [EB], le quatrième moyen, pris en ses première, deuxième et cinquième branches, proposé pour Mme [YI] [TS], le premier moyen, pris en ses première, deuxième et cinquième branches, proposé pour Mme [I] [U], et le deuxième moyen proposé pour Mme [YV]
Enoncé des moyens
47. Le quatrième moyen proposé pour Mme [BA] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation MM. [TX] [IK], [NY] et [D] pour viols en réunion, M. [IR] pour complicité de viols en réunion et a écarté la circonstance aggravante d'infractions en concours, alors « que le viol est puni de vingt ans de réclusion criminelle lorsqu'il est commis en concours avec un ou plusieurs autres viols commis sur d'autres victimes ; que Mme [BA] démontrait que M. [IK] serait mis en accusation pour les viols de 46 femmes, M. [NY] pour les viols de 26 femmes, M. [D] pour les viols de 7 femmes et M. [IR] pour les viols de 31 femmes et la complicité de viols de 31 femmes ; qu'en écartant pourtant la circonstance aggravante de viols commis en série, en retenant que cette circonstance ne pourrait être cumulée avec la circonstance aggravante de réunion, la peine encourue restant celle de 20 ans de réclusion criminelle, de sorte que « cumuler des circonstances non aggravantes serait non seulement inutile mais nuisible à une bonne administration de la justice puisque ceci n'aboutirait qu'à une multiplication des questions à poser au moment du délibéré criminel, à savoir, pour chacune des personnes mises en accusation, autant de question par victime, par circonstance et par infraction aggravée » (cf. arrêt p. 335, antépénultième al.), cependant qu'il appartenait à la chambre de l'instruction de renvoyer les accusés devant la juridiction de jugement pour les infractions dont ils devaient répondre en tous leurs éléments, sans que les moyens matériels et financiers de la justice ne puissent être invoqués pour restreindre ces éléments, la cour d'appel a violé les articles 214 et 215 du code de procédure pénale, ensemble l'article 222-24, 10°, du code pénal. »
48. Le troisième moyen proposé pour Mme [EB] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation MM. [TX] [IK] et [NY] pour traite des êtres humains en bande organisée et viols en réunion et a écarté la circonstance aggravante d'infractions commises en concours, alors « que le viol est puni de vingt ans de réclusion criminelle lorsqu'il est commis en concours avec un ou plusieurs autres viols commis sur d'autres victimes ; que Mme [EB] démontrait que M. [IK] serait mis en accusation pour les viols de 46 femmes et M. [NY] pour les viols de 26 femmes ; qu'en écartant pourtant la circonstance aggravante de viols commis en série, en retenant que cette circonstance ne pourrait être cumulée avec la circonstance aggravante de réunion, la peine encourue restant celle de 20 ans de réclusion criminelle, de sorte que « cumuler des circonstances non aggravantes serait non seulement inutile mais nuisible à une bonne administration de la justice puisque ceci n'aboutirait qu'à une multiplication des questions à poser au moment du délibéré criminel, à savoir, pour chacune des personnes mises en accusation, autant de question par victime, par circonstance et par infraction aggravée » (cf. arrêt p. 335, antépénultième al.), cependant qu'il appartenait à la chambre de l'instruction de renvoyer les accusés devant la juridiction de jugement pour les infractions dont ils devaient répondre en tous leurs éléments, sans que les moyens matériels et financiers de la justice ne puissent être invoqués pour restreindre ces éléments, la cour d'appel a violé les articles 214 et 215 du code de procédure pénale, ensemble l'article 222-24, 10°, du code pénal. »
49. Le quatrième moyen proposé pour Mme [YI] [TS] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation MM. [TX] [IK], [IZ], [TF] et [TM] pour viols au préjudice de Mme [YI] [TS] seulement aggravés par la circonstance de réunion et non par celles tirées de leur commission en concours avec un ou plusieurs autres viols commis sur d'autres victimes et d'actes de torture et de barbarie, alors :
« 1°/ que les juridictions d'instruction doivent répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que Mme [YI] [TS] demandait à ce que MM. [IZ], [TX] [IK], [TF] et [TM] soient mis en accusation pour viols commis en concours avec un ou plusieurs autres viols commis sur d'autres victimes (mémoire, p. 12, 13 et 62) ; qu'en les mettant uniquement en accusation pour viols en réunion au préjudice de Mme [YI] [TS] sans statuer sur ses demandes tendant à voir aggraver cette qualification par la sérialité des faits, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 593 du code de procédure pénale et 222-24, 10° du code pénal ;
2°/ que les juridictions d'instruction ne peuvent pas, s'il existe des charges suffisantes qu'elles soient caractérisées par des faits distincts, écarter des circonstances aggravantes pour des raisons tenant à la bonne administration de la justice, ni les regarder comme de simples éléments de contexte dans l'appréciation des charges, même si leur cumul n'a pas pour effet d'augmenter le quantum de la peine encourue ; qu'en retenant, à supposer qu'elle se soit fondée sur ce motif pour écarter la circonstance aggravante de sérialité, que le cumul de circonstances qui n'entraîne pas l'aggravation de la peine de 20 ans encourue pour le crime de viol aggravé « serait non seulement inutile mais nuisible à une bonne administration de la justice puisque ceci n'aboutirait qu'à une multiplication des questions à poser au moment du délibéré criminel, à savoir, pour chacune des personnes mises en accusation, autant de questions par victime, par circonstance et par infraction aggravée » (arrêt, p. 335) et que les circonstances non retenues peuvent être appréciées comme élément de contexte dans l'appréciation des charges (ordonnance confirmée, p. 377), la chambre de l'instruction a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article 222-24, 10° du code pénal ensemble les articles 80, 80-1, 116 et 350 du code de procédure pénale ;
5°/ que la chambre de l'instruction peut modifier et compléter les qualifications données aux faits par le ministère public ou le juge d'instruction sans ordonner une nouvelle information si les chefs de poursuite qu'elle retient ont été compris dans les faits pour lesquels la personne a été mise en examen par le juge d'instruction et si les éléments matériels sur lesquels se fonde la requalification ont été discutés lors de l'information ; qu'il en est ainsi même si la peine encourue au titre de cette nouvelle qualification est plus sévère ; qu'en se fondant, pour écarter les circonstances aggravantes de sérialité et de torture ou actes de barbarie, à supposer qu'elle l'ait adopté, sur le motif pris par l'ordonnance du juge d'instruction que ces circonstances « n'ont pas fait l'objet de mises en examen supplétives » (ordonnance, p. 377) cependant que les circonstances aggravantes reposaient sur des faits inclus dans l'acte de saisine et précédemment notifiés à MM. [IZ], [TX] [IK], [TF] et [TM], mis en examen, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 80, 80-1, 116 et 202 du code de procédure pénale. »
50. Le premier moyen proposé pour Mme [I] [U] critique l'arrêt attaqué qu'il a mis en accusation MM. [TX] [IK], [IZ], [TF] et [TM] pour viols au préjudice de Mme [I] [U] seulement aggravés par la circonstance de réunion et non par celles tirées de leur commission en concours avec un ou plusieurs autres viols commis sur d'autres victimes et d'actes de torture et de barbarie, alors :
« 1°/ que les juridictions d'instruction doivent répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que Mme [I] [U] demandait à ce que MM. [IZ], [TX] [IK], [TF] et [TM] soient mis en accusation pour de viols commis en concours avec un ou plusieurs autres viols commis sur d'autres victimes (mémoire, p. 64 à 66) ; qu'en mettant uniquement en accusation ces derniers pour viols en réunion au préjudice de Mme [I] [U] sans statuer sur ses demandes tendant à voir aggraver cette qualification par la sérialité des faits, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 593 du code de procédure pénale et 222-24, 10° du code pénal ;
2°/ que les juridictions d'instruction ne peuvent pas, s'il existe des charges suffisantes qu'elles soient caractérisées par des faits distincts, écarter des circonstances aggravantes pour des raisons tenant à la bonne administration de la justice, ni les regarder comme de simples éléments de contexte dans l'appréciation des charges, même si leur cumul n'a pas pour effet d'augmenter le quantum de la peine encourue ; qu'en retenant, à supposer qu'elle se soit fondée sur ce motif pour écarter la circonstance aggravante de sérialité, que le cumul de circonstances qui n'entraîne pas l'aggravation de la peine de 20 ans encourue pour le crime de viol aggravé « serait non seulement inutile mais nuisible à une bonne administration de la justice puisque ceci n'aboutirait qu'à une multiplication des questions à poser au moment du délibéré criminel, à savoir, pour chacune des personnes mises en accusation, autant de questions par victime, par circonstance et par infraction aggravée » (arrêt, p. 335) et que les circonstances non retenues peuvent être appréciées comme élément de contexte dans l'appréciation des charges (ordonnance confirmée, p. 377), la chambre de l'instruction a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article 222-24, 10° du code pénal ensemble les articles 80, 80-1, 116 et 350 du code de procédure pénale ;
5°/ que la chambre de l'instruction peut modifier et compléter les qualifications données aux faits par le ministère public ou le juge d'instruction sans ordonner une nouvelle information si les chefs de poursuite qu'elle retient ont été compris dans les faits pour lesquels la personne a été mise en examen par le juge d'instruction et si les éléments matériels sur lesquels se fonde la requalification ont été discutés lors de l'information ; qu'il en est ainsi même si la peine encourue au titre de cette nouvelle qualification est plus sévère ; qu'en se fondant, pour écarter les circonstances aggravantes de sérialité et de torture ou actes de barbarie, à supposer qu'elle l'ait adopté, sur le motif pris par l'ordonnance du juge d'instruction que ces circonstances « n'ont pas fait l'objet de mises en examen supplétives » (ordonnance, p. 377) cependant que les circonstances aggravantes reposaient sur des faits inclus dans l'acte de saisine et précédemment notifiés à MM. [IZ], [TX] [IK], [TF] et [TM], mis en examen, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 80, 80-1, 116 et 202 du code de procédure pénale. »
51. Le deuxième moyen proposé pour Mme [YV] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a mis en accusation MM. [TX] [IK], [IZ], [YL], [TF], [DR] et [NY] pour viols au préjudice de Mme [YV] seulement aggravés par la circonstance de réunion et non par celle tirée de leur commission en concours avec un ou plusieurs autres viols commis sur d'autres victimes, alors :
« 1°/ que les juridictions d'instruction doivent répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que Mme [YV] demandait à ce que MM. [IZ], [TX] [IK], [YL], [TF], [DR] et [NY] soient mis en accusation pour viols commis en réunion et en concours avec un ou plusieurs autres viols commis sur d'autres victimes (mémoire, p. 17 in fine et 18) ; qu'en les mettant uniquement en accusation pour viols en réunion au préjudice de Mme [YV] sans statuer sur ses demandes tendant à voir aggraver cette qualification par la sérialité des faits, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 593 du code de procédure pénale et 222-24, 10° du code pénal ;
2°/ que les juridictions d'instruction ne peuvent pas, s'il existe des charges suffisantes qu'elles soient caractérisées par des faits distincts, écarter des circonstances aggravantes pour des raisons tenant à la bonne administration de la justice, ni les regarder comme de simples éléments de contexte dans l'appréciation des charges, même si leur cumul n'a pas pour effet d'augmenter le quantum de la peine encourue ; qu'en retenant, pour écarter la circonstance aggravante de sérialité, que le cumul de circonstances qui n'entraîne pas l'aggravation de la peine de 20 ans encourue pour le crime de viol aggravé « serait non seulement inutile mais nuisible à une bonne administration de la justice puisque ceci n'aboutirait qu'à une multiplication des questions à poser au moment du délibéré criminel, à savoir, pour chacune des personnes mises en accusation, autant de questions par victime, par circonstance et par infraction aggravée » (arrêt, p. 335) et que les circonstances non retenues peuvent être appréciées comme élément de contexte dans l'appréciation des charges (ordonnance confirmée, p. 377), la chambre de l'instruction a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé l'article 222-24, 8° du code pénal ensemble les articles 80, 80-1, 116 et 350 du code de procédure pénale ;
3°/ que la chambre de l'instruction peut modifier et compléter les qualifications données aux faits par le ministère public ou le juge d'instruction sans ordonner une nouvelle information si les chefs de poursuite qu'elle retient ont été compris dans les faits pour lesquels la personne a été mise en examen par le juge d'instruction et si les éléments matériels sur lesquels se fonde la requalification ont été discutés lors de l'information ; qu'il en est ainsi même si la peine encourue au titre de cette nouvelle qualification est plus sévère ; qu'en se fondant, pour écarter la circonstance aggravante de sérialité, à supposer qu'elle l'ait adopté, sur le motif pris par l'ordonnance du juge d'instruction que cette circonstance n'a « pas fait l'objet de mises en examen supplétives » (ordonnance, p. 377) cependant que la circonstance aggravante reposait sur des faits inclus dans l'acte de saisine et précédemment notifiés à M. [IR], mis en examen, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 80, 80-1, 116 et 202 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
52. Les moyens sont réunis.
Vu les articles 222-24, 10°, et 225-4-2, I, 1°, du code pénal :
53. Selon le premier de ces textes, le viol est aggravé lorsqu'il est commis en concours avec un ou plusieurs autres viols commis sur d'autres victimes.
54. Selon le second, l'infraction de traite des êtres humains est aggravée lorsqu'elle est commise à l'égard de plusieurs personnes.
55. Pour dire n'y avoir lieu à retenir la circonstance aggravante de sérialité des viols en réunion commis par MM. [TX] [IK], [NY] et [D], de complicité de viols commis par M. [IR] au préjudice de Mme [BA], de viols en réunion et traite des êtres humains commis par MM. [TX] [IK] et [NY] au préjudice de Mme [EB], de viols en réunion commis par MM. [TX] [IK], [IZ], [TF] et [TM] au préjudice de Mmes [YI] [TS] et [I] [U], et de viols en réunion commis par MM. [TX] [IK], [IZ], [TF], [YL], [DR] et [NY] au préjudice de Mme [YV], l'arrêt attaqué énonce qu'il y a lieu de prendre en considération la pluralité des viols et le nombre considérable de victimes de ces viols.
56. Les juges précisent notamment que M. [IR] est mis en accusation pour le viol de trente-et-une femmes et la complicité de viol de trente-et-une autres, M. [TX] [IK] pour le viol de quarante-six femmes, MM. [NY] et [IZ] pour le viol de vingt-six femmes, M. [TF] pour le viol de vingt-et-une femmes, M. [YL] pour le viol de onze femmes, M. [D] pour le viol de sept femmes.
57. Ils retiennent l'infraction de traite des êtres humains à l'égard de MM. [TX] [IK] et [IR] au préjudice de quarante-quatre victimes, [NY] de vingt-six victimes, [YG] de trois victimes.
58. Ils énoncent que cumuler des circonstances qui n'entraînent pas aggravation des peines encourues est inutile et nuisible à une bonne administration de la justice, puisque cela aboutit à multiplier les questions lors du délibéré criminel.
59. Ils en déduisent que cette circonstance aggravante ne doit pas être retenue sauf pour M. [IR] qui a été interrogé sur les différents faits en concours.
60. En statuant ainsi, alors qu'elle relevait la sérialité des viols notamment commis par MM. [TX] [IK], [NY], [IZ], [TF], [YL] et [D] et la multiplicité des victimes des infractions de traite des êtres humains notamment commises par MM. [TX] [IK] et [NY], la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a méconnu les textes susvisés.
61. La cassation est par conséquent de nouveau encourue de ce chef.
Et sur le quatrième moyen proposé pour Mme [EB] et le cinquième moyen proposé pour Mme [YV]
Enoncé des moyens
62. Le moyen proposé pour Mme [EB] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à suivre contre M. [IR] pour les faits de complicité de viols en réunion, alors « qu'est complice d'un crime ou d'un délit la personne qui sciemment par aide ou assistance en a facilité la préparation ou la consommation ; qu'il est acquis au dossier que M. [IR] a contacté Mme [EB] à plusieurs repises, sous le pseudonyme d'[H] [OC], commentant les photos Instagram de cette dernière, montrant son intérêt et son admiration pour elle (cf. mémoire d'appel p. 22) afin de lui proposer des tournages de films pornographiques et du travail d'escort girl pour gagner de l'argent ; qu'après lui avoir expliqué les différentes possibilités et notamment les différents tarifs, il l'a mise en relation avec M. [IK], afin qu'elle tourne des scènes de film pornographique lorsqu'elle s'est retrouvée sans ressources à la suite de l'épidémie de Covid ; qu'à la suite du tournage des films, il en a tiré un profit personnel, recevant les vidéos de Mme [EB] sur sa boîte mail de la part de M. [IK] (cf. mémoire de Mme [EB] p. 24 al. 6) ; qu'en écartant la qualification de complicité de viols au motif que M. [IR] était poursuivi pour le recrutement et qu'il n'était pas resté en contact durant les tournages avec Mme [EB], cependant que toutes les caractéristiques de la complicité par l'emploi de véritables stratagèmes étaient réunies, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'article 121-7 du code pénal. »
63. Le moyen proposé pour Mme [YV] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu de mettre en accusation M. [IR] pour complicité de viols au préjudice de Mme [YV], alors « que l'interdiction de cumuler des qualifications lors de la déclaration de la culpabilité par application du principe ne bis in idem n'est susceptible de s'appliquer qu'au cas où un fait ou des faits identiques sont en cause et s'il résulte des textes d'incrimination que l'une d'elle correspond à un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l'autre ; qu'est complice d'un crime ou d'un délit la personne qui sciemment, par aide ou assistance, en a facilité la préparation ou la consommation ou qui par don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir aura provoqué à une infraction ou donné des instructions pour la commettre ; que la traite d'êtres humains est le fait de recruter une personne, de la transporter, de la transférer, de l'héberger ou de l'accueillir à des fins d'exploitation avec l'emploi de menace, de contrainte, de violence ou de manoeuvre dolosive visant la victime, sa famille ou une personne en relation habituelle avec la victime ; qu'en énonçant, pour dire ne pas y avoir lieu de mettre M. [IR] en accusation pour complicité de viols au préjudice de Mme [YV], « qu'il ne peut être considéré qu'il pourrait y avoir complicité du viol du fait du recrutement à charge d'une personne déjà poursuivie pour ce recrutement » du chef de traite d'êtres humains (arrêt, p. 357) et « que la traite en vue du viol ne peut être retenue en même temps que la complicité de viol par une aide ou assistance qui ne se distinguerait pas du recrutement » (arrêt, p. 338), tandis que la qualification de traite d'êtres humains ne vise pas expressément l'aide ou l'assistance ni le don, la promesse, l'ordre, l'abus d'autorité ou de pouvoir, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 225-4-1 et 121-7 du code pénal ensemble le principe ne bis in idem et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. »
Réponse de la Cour
64. Les moyens sont réunis.
Vu le principe ne bis in idem :
65. L'interdiction de cumuler les qualifications doit être réservée, outre à la situation dans laquelle la caractérisation des éléments constitutifs de l'une des infractions exclut nécessairement la caractérisation des éléments constitutifs de l'autre, aux cas où un fait ou des faits identiques sont en cause et où l'on se trouve dans l'une des deux hypothèses suivantes : dans la première, l'une des qualifications, telles qu'elles résultent des textes d'incrimination, correspond à un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l'autre, qui, seule, doit alors être retenue ; dans la seconde, l'une des qualifications retenues, dite spéciale, incrimine une modalité particulière de l'action répréhensible sanctionnée par l'autre infraction, dite générale.
66. L'interdiction du cumul de qualifications implique ainsi que soient remplies deux conditions qui doivent être simultanément réunies, l'une, tenant à l'identité des faits matériels caractérisant les infractions en concours, l'autre, à leur définition légale. Le cumul est autorisé lorsqu'une seule de ces conditions n'est pas remplie.
67. S'agissant de la seconde condition, il résulte des articles 121-7, 222-23 et 225-4-1 du code pénal définissant la complicité de viol et l'infraction de traite des êtres humains que la caractérisation des éléments constitutifs de l'une de ces infractions n'exclut pas la caractérisation des éléments constitutifs de l'autre.
68. Par ailleurs, aucune de ces infractions n'est un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l'autre.
69. Enfin, aucune de ces qualifications n'incrimine une modalité particulière de l'action répréhensible sanctionnée par l'autre infraction.
70. Il en résulte que les délits de complicité de viols et d'infraction de traite des êtres humains peuvent être retenus à l'encontre de la même personne relativement aux mêmes faits.
71. Pour dire n'y avoir lieu à suivre contre M. [IR] du chef de complicité de viols en réunion commis au préjudice de Mmes [EB] et [YV], l'arrêt attaqué énonce que M. [IR] a participé à la sélection et au recrutement des plaignantes, y compris en éprouvant lui-même leurs aptitudes sexuelles pour les adresser ensuite à MM. [TX] [IK] et [NY], après les avoir convaincues d'une diffusion des tournages exclusivement à l'étranger afin d'obtenir leur consentement aux relations sexuelles filmées, et qu'il est intervenu pour les empêcher de mettre un terme à leur collaboration lorsqu'elles le contactaient, perturbées par le déroulement du tournage.
72. Les juges précisent que M. [IR] a, à ces occasions, en parfaite connaissance de cause, assuré la pérennité du mensonge sur sa prétendue expérience positive des tournages pornographiques avec M. [TX] [IK] et sur la destination des vidéos.
73. Ils retiennent qu'il a ainsi sciemment facilité la préparation et la consommation des viols par une action spécifique, distincte des actes constitutifs de la traite des êtres humains, mais qu'il ne peut y avoir complicité de viol du fait du recrutement par une personne déjà poursuivie pour ce recrutement, les poursuites ne pouvant se cumuler que pour l'auteur principal.
74. En statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu la portée du principe susvisé.
75. D'une part, à supposer les faits identiques, le cumul des qualifications visées à la poursuite s'imposait à elle.
76. D'autre part, elle ne pouvait dire n'y avoir lieu à suivre contre M. [IR] du chef de complicité de viols commis au préjudice de Mmes [EB] et [YV] sans constater que les éléments constitutifs de cette infraction n'étaient pas réunis.
77. La cassation est, par conséquent, de nouveau encourue.
Et sur le premier moyen proposé pour Mme [IJ] [TH]
Enoncé du moyen
78. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté les demandes de supplément d'information et rejeté la demande de mise en accusation de M. [D] pour les faits de viols en réunion et de traite des êtres humains en bande organisée commis courant novembre et décembre 2018 au préjudice de Mme [IJ] [TH], alors « que le juge d'instruction est tenu de rechercher les personnes ayant pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il se trouve saisi ; que cette obligation s'impose également à la chambre de l'instruction ; que Mme [IJ] [TH] a demandé la mise en accusation de M. [G] [D] en tant qu'il a participé comme l'un des « acteurs » aux tournages au cours desquels elle a subi des viols en réunion ; que l'arrêt, qui ne s'explique que sur la participation d'[G] [D] à une brève scène, dans un hôtel à [Adresse 1], où il était l'unique partenaire (p. 340 §1), énonce (p. 178) que l'« exploitation des films et rushs concernant [JC] [IJ] alias [DO] » a permis de constater que dans « le film intitulé « French-bukkake [DO] Gang cast » : Etaient présent; [JC] [IJ], [TX] [IK], [TI] [TF], [J] [YL] et [G] [D]. Les hommes pénétraient vaginalement à tour de rôle [JC] [IJ] qui leur faisait aussi des fellations. [TX] [IK] éjaculait sur son visage. Le visage de [JC] [IJ] se crispait parfois de douleurs. D825 », « Les rushs de ce film étaient étudiés. [JC] [IJ] indiquait plusieurs fois avoir mal lors de pénétrations. D1661 » ; que la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles 80-1, 201, 202, 204 et 205 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 593 du code de procédure pénale :
79. Tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
80. Dans son mémoire, Mme [IJ] [TH] a demandé l'infirmation de l'ordonnance du juge d'instruction et la mise en accusation de M. [D] des chefs de viols en réunion et de traite des êtres humains en bande organisée commis à son préjudice par celui-ci, dont l'information démontre qu'il a participé au tournage du 13 novembre 2018 à [Localité 6] à l'occasion duquel elle a été victime du viol.
81. L'arrêt attaqué, qui ne répond pas spécifiquement à cette demande, relève toutefois qu'à l'occasion de l'un des films au cours duquel le visage de la victime se crispe et exprime sa douleur lors des pénétrations, M. [D] est présent avec MM. [TX] [IK], [TF] et [YL].
82. Les juges mettent en accusation MM. [TX] [IK], [TF] et [YL] de ce chef, sans mettre en accusation M. [D] du même chef.
83. En se déterminant ainsi sans répondre à la demande de Mme [IJ] [TH], alors qu'elle a constaté la présence de M. [D] avec MM. [TX] [IK], [TF] et [YL] sur la scène du viol, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision.
Et sur le troisième moyen proposé pour Mme [IT], le deuxième moyen proposé pour Mme [NU], le quatrième moyen proposé pour Mme [IJ] [TH], le troisième moyen proposé pour Mme [II], le moyen proposé pour Mme [Y], le premier moyen, pris en sa seconde branche, proposé pour Mme [IN], le premier moyen proposé pour Mme [DM], le premier moyen proposé pour Mme [ZB], le sixième moyen proposé pour Mme [EB], le cinquième moyen proposé pour Mme [YI] [TS], le quatrième moyen proposé pour Mme [I] [U], le premier moyen proposé pour Mme [YH], le quatrième moyen, pris en sa première branche, proposé pour Mmes [B], [K], [R], [BK], [TL], [YW], [CE], [UA] et les associations [3], [2] et [5], le troisième moyen proposé pour Mmes [M], [ZD] et [NZ], le deuxième moyen proposé pour Mme [IM], le sixième moyen proposé pour Mme [AW]
Enoncé des moyens
84. Le troisième moyen proposé pour Mme [IT] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, d'une part, dit qu'il ne résulte pas de l'information charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis, entre le 1er janvier 2013 et le 13 octobre 2020, les faits de proxénétisme en bande organisée et de proxénétisme aggravé à l'égard de plusieurs personnes au préjudice notamment de Mme [IT], en conséquence a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque de ces chefs, d'autre part, a ordonné la mise en accusation de MM. [TX] [IK] et [IR] du chef de traite d'être humain afin de permettre la commission contre les victimes des agressions sexuelles, sans retenir la traite d'être humain aux fins de proxénétisme, alors :
« 1°/ que constitue du proxénétisme le fait de tirer profit de la prostitution d'autrui; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui; qu'entre dans cette définition le fait, pour les actrices pornographiques, qui sont rémunérées, d'avoir des contacts physiques avec des acteurs, que ces derniers soient rémunérés ou non, et fût-ce pour les besoins d'une prétendue oeuvre cinématographique dès lors qu'il est ainsi concouru à la satisfaction des besoins sexuels d'autrui, qu'ils soient futurs spectateurs du film et/ou acteurs ; que par suite, entre dans la définition du proxénétisme le fait, pour les producteurs, de tirer profit de cette activité, peu important qu'elle ne soit pas immédiatement lucrative ; que la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 225-5 et 225-6 du code pénal, ensemble l'article 225-4-1 du code pénal ;
2°/ que le tournage pornographique qui a, comme en l'espèce, pour but et pour résultat, le plaisir sexuel des acteurs (base sur laquelle, selon [TX] [IK] lui-même, ils n'étaient pas rémunérés) constitue une opération de proxénétisme ; que la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 225-5 et 225-6 du code pénal, ensemble l'article 225-4-1 du code pénal ;
3°/ que la circonstance que les comportements en cause auraient pour but la création d'une oeuvre de l'esprit ne constitue pas un fait justificatif des infractions si celles-ci sont caractérisées ; la chambre de l'instruction a encore violé les textes susvisés. »
85. Le deuxième moyen proposé pour Mme [NU] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, d'une part, dit qu'il ne résulte pas de l'information charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis, entre le 1er janvier 2013 et le 13 octobre 2020, les faits de proxénétisme en bande organisée et de proxénétisme aggravé à l'égard de plusieurs personnes au préjudice, en conséquence a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque de ces chefs, d'autre part, a ordonné la mise en accusation de MM. [TX] [IK], [NY] et [IR] du chef de traite d'être humain afin de permettre la commission contre les victimes des agressions sexuelles, sans retenir la traite d'être humain aux fins de proxénétisme, alors :
« 1°/ que constitue du proxénétisme le fait de tirer profit de la prostitution d'autrui; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui; qu'entre dans cette définition le fait, pour les actrices pornographiques, qui sont rémunérées, d'avoir des contacts physiques avec des acteurs, que ces derniers soient rémunérés ou non, et fût-ce pour les besoins d'une prétendue oeuvre cinématographique dès lors qu'il est ainsi concouru à la satisfaction des besoins sexuels d'autrui, qu'ils soient futurs spectateur du film ou acteurs ; que par suite, entre dans la définition du proxénétisme le fait, pour les producteurs, de tirer profit de cette activité, peu important qu'elle ne soit pas immédiatement lucrative ; que la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 225-5 et 225-6 du code pénal, ensemble l'article 225-4-1 du code pénal ;
2°/ que le tournage pornographique par un producteur qui en tire profit, qui a, comme en l'espèce, pour but et pour résultat, le plaisir sexuel des acteurs (base sur laquelle, selon [TX] [IK] lui-même, ils n'étaient pas rémunérés) constitue une opération de proxénétisme ; que la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 225-5 et 225-6 du code pénal, ensemble l'article 225-4-1 du code pénal ;
3°/ que la circonstance que les mis en cause auraient pour but la création d'une oeuvre de l'esprit ne constitue pas un fait justificatif des infractions si celles-ci sont caractérisées ; que la chambre de l'instruction a encore violé le texte précité. »
86. Le quatrième moyen proposé pour Mme [IJ] [TH] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, d'une part, dit qu'il ne résulte pas de l'information charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis, entre le 1er janvier 2013 et le 13 octobre 2020, les faits de proxénétisme en bande organisée et de proxénétisme aggravé à l'égard de plusieurs personnes au préjudice, en conséquence a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque de ces chefs, d'autre part, a ordonné la mise en accusation de MM. [TX] [IK], [NY] et [IR] du chef de traite des êtres humains afin de permettre la commission contre les victimes des agressions sexuelles, sans retenir la traite d'être humain aux fins de proxénétisme, alors :
« 1°/ que constitue du proxénétisme le fait de tirer profit de la prostitution d'autrui; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui; qu'entre dans cette définition le fait, pour les actrices pornographiques, qui sont rémunérées, d'avoir des contacts physiques avec des acteurs, que ces derniers soient rémunérés ou non, et fût-ce pour les besoins d'une prétendue oeuvre cinématographique dès lors qu'il est ainsi concouru à la satisfaction des besoins sexuels d'autrui, qu'ils soient futurs spectateur du film ou acteurs ; que par suite, entre dans la définition du proxénétisme le fait, pour les producteurs, de tirer profit de cette activité, peu important qu'elle ne soit pas immédiatement lucrative ; que la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 225-5 et 225-6 du code pénal, ensemble l'article 225-4-1 du code pénal ;
2°/ que le tournage pornographique qui a, comme en l'espèce, pour but et pour résultat, le plaisir sexuel des acteurs (base sur laquelle, selon [TX] [IK] lui-même, ils n'étaient pas rémunérés), constitue une opération de proxénétisme ; que la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 225-5 et 225-6 du code pénal, ensemble l'article 225-4-1 du code pénal ;
3°/ que la circonstance que les comportements en cause auraient pour but la création d'une oeuvre de l'esprit ne constitue pas un fait justificatif des infractions si celles-ci sont caractérisées ; que la chambre de l'instruction a encore volé le texte précité. »
87. Le troisième moyen proposé pour Mme [II] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, d'une part, dit qu'il ne résulte pas de l'information charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis, entre le 1er janvier 2013 et le 13 octobre 2020, les faits de proxénétisme en bande organisée et de proxénétisme aggravé à l'égard de plusieurs personnes au préjudice notamment de Mme [II], en conséquence a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque de ces chefs, d'autre part, a ordonné la mise en accusation de MM. [TX] [IK], [NY] et [IR] du chef de traite des êtres humains afin de permettre la commission contre les victimes des agressions sexuelles, sans retenir la traite d'être humain aux fins de proxénétisme, alors :
« 1°/ que constitue du proxénétisme le fait de tirer profit de la prostitution d'autrui; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui; qu'entre dans cette définition le fait, pour les actrices pornographiques, qui sont rémunérées, d'avoir des contacts physiques avec des acteurs, que ces derniers soient rémunérés ou non, et fût-ce pour les besoins d'une prétendue oeuvre cinématographique dès lors qu'il est ainsi concouru à la satisfaction des besoins sexuels d'autrui, qu'ils soient futurs spectateurs du film et/ou également des acteurs ; que par suite, entre dans la définition du proxénétisme le fait, pour les producteurs, de tirer profit de cette activité, peu important qu'elle ne soit pas immédiatement lucrative ; que la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 225-5 et 225-6 du code pénal, ensemble l'article 225-4-1 du code pénal ;
2°/ que le tournage pornographique qui a, comme en l'espèce, pour but et pour résultat, le plaisir sexuel des acteurs (base sur laquelle, selon [TX] [IK] lui-même, ils n'étaient pas rémunérés) constitue une opération de proxénétisme ; que la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 225-5 et 225-6 du code pénal, ensemble l'article 225-4-1 du code pénal ;
3°/ que la circonstance que les contestations en cause auraient pour but la création d'une oeuvre de l'esprit ne constitue pas un fait justificatif des infractions si celles-ci sont caractérisées ; la chambre de l'instruction a encore violé les textes susvisés. »
88. Le moyen proposé pour Mme [Y] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté à l'encontre de MM. [TX] [IK] et [NY] la qualification de proxénétisme aggravé concernant les actes subis par Mme [Y], alors « que le proxénétisme est le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit : 1° D'aider, d'assister ou de protéger la prostitution d'autrui ; 2° De tirer profit de la prostitution d'autrui, d'en partager les produits ou de recevoir des subsides d'une personne se livrant habituellement à la prostitution ; 3° D'embaucher, d'entraîner ou de détourner une personne en vue de la prostitution ou d'exercer sur elle une pression pour qu'elle se prostitue ou continue à le faire ; que si la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui, elle peut donc concerner des individus ayant participé à des tournages pornographiques dans ce but ; qu'en l'espèce, il ressort des échanges contenus dans les pièces de la procédure et reproduit dans le mémoire de la partie civile que les vidéos étaient réalisées non seulement pour satisfaire le plaisir des « internautes » mais aussi des « acteurs » et des « producteurs » tandis que l'arrêt mentionne que « certains [acteurs] sont rémunérés et d'autres pas » (arrêt, p.337, §9) ; qu'en écartant la qualification de proxénétisme aggravé pour [TX] [IK] et [IL] [NY], qui ont commercialisé lesdites vidéos et en ont tirés des rémunérations, aux motifs que « les tournages pornographiques ne peuvent être considérés, ni par principe ni dans le cas d'espèce, comme du proxénétisme, quand bien même auraient été tenus des propos salaces au sujet de telle ou telle actrice, exprimant un désir sexuel, le besoin de l'assouvir et le cas échéant des préférences » (arrêt, pp.337-338), la chambre de l'instruction a violé les articles 225-5, 225-7 et 225-8 du code pénal, ensemble les 591 à 593 du code de procédure pénale. »
89. Le premier moyen proposé pour Mme [IN] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté à l'encontre de MM. [IR] et [TX] [IK] la qualification de proxénétisme aggravé concernant les actes subis par Mme [IN], alors :
« 2°/ que le proxénétisme est le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit : 1° D'aider, d'assister ou de protéger la prostitution d'autrui ; 2° De tirer profit de la prostitution d'autrui, d'en partager les produits ou de recevoir des subsides d'une personne se livrant habituellement à la prostitution ; 3° D'embaucher, d'entraîner ou de détourner une personne en vue de la prostitution ou d'exercer sur elle une pression pour qu'elle se prostitue ou continue à le faire ; que si la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui, elle peut donc concerner des individus ayant participé à des tournages pornographiques dans ce but ; qu'en l'espèce, il ressort des échanges contenus dans les pièces de la procédure et reproduit dans le mémoire de la partie civile que les vidéos étaient réalisées non seulement pour satisfaire le plaisir des « internautes » mais aussi des « acteurs » et des « producteurs » tandis que l'arrêt mentionne que « certains [acteurs] sont rémunérés et d'autres pas » (arrêt, p.337, §9) ; qu'en écartant la qualification de proxénétisme pour [NW] [IR], qui a participé au recrutement des actrices et a bénéficié d'avantages financiers et en nature, ainsi que pour [TX] [IK], qui a commercialisé lesdites vidéos et en a tirés des rémunérations, aux motifs que « les tournages pornographiques ne peuvent être considérés, ni par principe ni dans le cas d'espèce, comme du proxénétisme, quand bien même auraient été tenus des propos salaces au sujet de telle ou telle actrice, exprimant un désir sexuel, le besoin de l'assouvir et le cas échéant des préférences » (arrêt, pp.337-338), la chambre de l'instruction a violé les articles 225-5, 225-7 et 225-8 du code pénal, ensemble les 591 à 593 du code de procédure pénale. »
90. Le premier moyen proposé pour Mme [DM] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté à l'encontre de MM. [IR], [TX] [IK] et [NY] la qualification de proxénétisme aggravé concernant les actes subis par Mme [DM], alors « que le proxénétisme est le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit : 1° D'aider, d'assister ou de protéger la prostitution d'autrui ; 2° De tirer profit de la prostitution d'autrui, d'en partager les produits ou de recevoir des subsides d'une personne se livrant habituellement à la prostitution ; 3° D'embaucher, d'entraîner ou de détourner une personne en vue de la prostitution ou d'exercer sur elle une pression pour qu'elle se prostitue ou continue à le faire ; que si la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui, elle peut donc concerner des individus ayant participé à des tournages pornographiques dans ce but ; qu'en l'espèce, il ressort des échanges contenus dans les pièces de la procédure et reproduit dans le mémoire de la partie civile que les vidéos étaient réalisées non seulement pour satisfaire le plaisir des « internautes » mais aussi des « acteurs » et des « producteurs » tandis que l'arrêt mentionne que « certains [acteurs] sont rémunérés et d'autres pas » (arrêt, p.337, §9) ; qu'en écartant la qualification de proxénétisme pour [NW] [IR], qui a participé au recrutement des actrices et a bénéficié d'avantages financiers et en nature, ainsi que pour [TX] [IK] et [IL] [NY], qui ont commercialisé lesdites vidéos et en ont tirés des rémunérations, aux motifs que « les tournages pornographiques ne peuvent être considérés, ni par principe ni dans le cas d'espèce, comme du proxénétisme, quand bien même auraient été tenus des propos salaces au sujet de telle ou telle actrice, exprimant un désir sexuel, le besoin de l'assouvir et le cas échéant des préférences » (arrêt, pp.337-338), la chambre de l'instruction a violé les articles 225-5, 225-7 et 225-8 du code pénal, ensemble les 591 à 593 du code de procédure pénale. »
91. Le premier moyen proposé pour Mme [ZB] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté à l'encontre de MM. [IR], [TX] [IK] et [NY] la qualification de proxénétisme aggravé concernant les actes subis par Mme [ZB], alors « que le proxénétisme est le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit : 1° D'aider, d'assister ou de protéger la prostitution d'autrui ; 2° De tirer profit de la prostitution d'autrui, d'en partager les produits ou de recevoir des subsides d'une personne se livrant habituellement à la prostitution ; 3° D'embaucher, d'entraîner ou de détourner une personne en vue de la prostitution ou d'exercer sur elle une pression pour qu'elle se prostitue ou continue à le faire ; que si la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui, elle peut donc concerner des individus ayant participé à des tournages pornographiques dans ce but ; qu'en l'espèce, il ressort des échanges contenus dans les pièces de la procédure et reproduit dans le mémoire de la partie civile que les vidéos étaient réalisées non seulement pour satisfaire le plaisir des « internautes » mais aussi des « acteurs » et des « producteurs » tandis que l'arrêt mentionne que « certains [acteurs] sont rémunérés et d'autres pas » (arrêt, p.337, §9) ; qu'en écartant la qualification de proxénétisme pour [NW] [IR], qui a participé au recrutement des actrices et a bénéficié d'avantages financiers et en nature, ainsi que pour [TX] [IK] et [IL] [NY], qui ont commercialisé lesdites vidéos et en ont tirés des rémunérations, aux motifs que « les tournages pornographiques ne peuvent être considérés, ni par principe ni dans le cas d'espèce, comme du proxénétisme, quand bien même auraient été tenus des propos salaces au sujet de telle ou telle actrice, exprimant un désir sexuel, le besoin de l'assouvir et le cas échéant des préférences » (arrêt, pp.337-338), la chambre de l'instruction a violé les articles 225-5, 225-7 et 225-8 du code pénal, ensemble les 591 à 593 du code de procédure pénale. »
92. Le sixième moyen proposé pour Mme [EB] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de proxénétisme en bande au préjudice de Mme [EB], alors :
« 1°/ que le proxénétisme consiste pour quiconque, de quelque manière que ce soit, à aider ou assister la prostitution d'autrui, protéger cette activité, convaincre une personne de s'y livrer, en tirer profit ou en faciliter l'exercice ; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui ; que la participation rémunérée au tournage d'un film pornographique, impliquant des contacts physiques pour la satisfaction sexuelle des consommateurs de ces films, relève de la prostitution ; que le fait de contribuer au tournage de ces films, d'en tirer profit ou d'embaucher quelqu'un pour s'y livrer caractérise le délit de proxénétisme ; que la cour d'appel a constaté que « les actrices pornographiques sont rémunérées pour avoir des contacts physiques » (arrêt p. 337 al. 9) ; qu'en retenant que, dans l'esprit des réalisateurs, les tournages auraient pour objet « la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratif, la satisfaction des besoins sexuels d'autrui », sans rechercher si les tournages n'avaient pas également pour but de satisfaire les besoins sexuels des abonnés des sites sur lesquels les films ainsi réalisés étaient diffusés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 222-5 et 225-8 du code pénal ;
2°/ que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; que pour écarter la circonstance aggravante de sexisme, la cour d'appel a retenu que l'objet de l'oeuvre était « l'excitation sexuelle de spectateurs » et que les propos sexistes étaient tenus par les acteurs « non pas pour leur plaisir mais pour celui des spectateurs » (cf. arrêt p. 337, al. 3) ; qu'en retenant, pour écarter les actes de prostitution, que la réalisation des oeuvres cinématographiques ne serait pas faite pour « la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » (cf. arrêt p. 337 al. 9), la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires, en violation de l'article 593 du code de procédure pénale ;
3°/ subsidiairement que le proxénétisme consiste pour quiconque, de quelque manière que ce soit, à aider ou assister la prostitution d'autrui, protéger cette activité, convaincre une personne de s'y livrer, en tirer profit ou en faciliter l'exercice ; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'une autre personne ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que « certains [acteurs] sont rémunérés et d'autres pas » (arrêt, p. 337, § 9) ; qu'en disant n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de proxénétisme en bande organisée sans rechercher si la satisfaction des besoins sexuels des acteurs non rémunérés n'était pas le motif déterminant de leur participation au tournage, de sorte que le fait d'avoir mis en relation ces acteurs avec les actrices au cours des tournages caractérisait les faits de proxénétisme, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des articles 222-5 et 225-8 du code pénal ;
4°/ que le proxénétisme consiste pour quiconque, de quelque manière que ce soit, à aider ou assister la prostitution d'autrui, protéger cette activité, convaincre une personne de s'y livrer, en tirer profit ou en faciliter l'exercice ; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui ; que la participation rémunérée au tournage d'un film pornographique, impliquant des contacts physiques pour la satisfaction sexuelle d'autrui, relève de la prostitution ; que le fait de contribuer au tournage de ces films, d'en tirer profit ou d'embaucher quelqu'un pour s'y livrer caractérise le délit de proxénétisme ; que la cour d'appel a constaté que « les actrices pornographiques sont rémunérées pour avoir des contacts physiques » (arrêt p. 337 al. 9) ; qu'en retenant que, dans l'esprit des réalisateurs, les tournages auraient pour objet « la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit », que « si la recherche de cette satisfaction est inhérente à la réalisation d'actes sexuels demandée aux acteurs, il ne peut en être induit que cette satisfaction serait pour les réalisateurs l'objet même du tournage » et que « le désir sexuel et sa satisfaction étant mis en scène dans une oeuvre pornographique, il est donc nécessaire de le susciter et de l'entretenir chez les acteurs, condition sine qua non de leur capacité à obtenir l'érection et l'éjaculation recherchées » (arrêt, p. 337, §§ 10-11), sans s'expliquer sur le moyen par lequel Mme [EB] faisait valoir qu'outre le gain financier espéré, les réalisateurs cherchaient également à satisfaire leurs propres désirs sexuels, comme l'avait expressément reconnu M. [YM] en déclarant « j'ai tout de suite été attiré, elle était très excitante elle était très grande avec une grosse poitrine (?) C'est pour ça que je suis resté car j'avais envie d'avoir un rapport sexuel avec elle » (mémoire d'appel p. 30 in fine, pv d'audition de garde à vue ¿ D01342), ou comme l'avait montré M. [IK] qui avait cherché à lui imposer une sodomie après les tournages (cf. mémoire d'appel p. 32), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 222-5 et 225-8 du code pénal ;
5°/ en toute hypothèse que la circonstance qu'une infraction soit commise dans le cadre de la réalisation d'une oeuvre de l'esprit est insuffisante à exclure sa caractérisation ; qu'en écartant toutefois l'infraction de proxénétisme aggravé, au motif que « les tournages ont dans l'esprit des réalisateurs pour objet la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratif, la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » (arrêt, p. 337, § 9) ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante que les actes sexuels servaient à réaliser une oeuvre cinématographique pour écarter la qualification de proxénétisme, la cour d'appel a violé les articles 222-5 et 225-8 du code pénal. »
93. Le cinquième moyen proposé pour Mme [YI] [TS] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à mettre en accusation MM. [TX] [IK] et [IR] de proxénétisme en bande organisée au préjudice de Mme [YI] [TS], alors :
« 1°/ que Mme [YI] [TS] demandait à ce que M. [IR] soit mis en accusation du chef de proxénétisme (mémoire, p. 61 et 62) ; qu'en n'énonçant aucun motif sur ce point pour dire n'y avoir lieu de le mettre en accusation de ce chef, pour les faits autres que ceux au titre desquels M. [TX] [IK] a été mis en accusation pour proxénétisme (arrêt, p. 358), la chambre de l'instruction a insuffisamment motivé sa décision au regard de l'article 593 du code de procédure pénale ;
2°/ que la prostitution, qui est nécessaire à la qualification de l'infraction de proxénétisme, consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui et non pas ses propres besoins sexuels ; que le proxénétisme est caractérisé, notamment, par le fait de tirer profit de la prostitution d'autrui sans qu'il soit nécessaire que l'auteur de ce fait ait eu l'intention de satisfaire les besoins sexuels d'autrui ; qu'en énonçant, pour dire n'y avoir lieu à mettre en accusation MM. [TX] [IK] et [IR] pour proxénétisme, que « les tournages ont dans l'esprit des réalisateurs pour objet la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratifs, la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » et que « si la recherche de cette satisfaction est inhérente à la réalisation d'actes sexuels demandée aux acteurs, il ne peut en être induit que cette satisfaction serait pour les réalisateurs l'objet même du tournage » (arrêt, p. 337), la chambre de l'instruction a méconnu l'article 222-25 du code pénal ;
3°/ que le tournage de ce qui est considéré par son auteur ou son réalisateur comme une oeuvre pornographique peut être qualifié d'acte de prostitution et, par suite, de proxénétisme si les personnes qui y participent se livrent, contre rémunération, à des actes sexuels réels ; qu'il en est, à plus forte raison, ainsi lorsque ces actes sexuels constituent des atteintes à la personne humaine pénalement réprimées ; qu'en retenant, pour écarter la qualification de proxénétisme, que « les tournages ont dans l'esprit des réalisateurs pour objet la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratifs, la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » et que « le désir sexuel et sa satisfaction étant mis en scène dans une oeuvre pornographique, il est donc nécessaire de le susciter et de l'entretenir chez les acteurs » (arrêt, p. 337) tout en mettant M. [TX] [IK] et M. [IR] en accusation du chef de traite des êtres humains en bande organisée au motif qu'ils ont, « en lien les uns avec les autres, accompli les actes nécessaires à l'arrivée de jeunes femmes sur les plateaux de tournage où elles devaient subir des actes sexuels auxquels elles n'avaient pas consenti préalablement et auxquels elles n'auraient pas consenti si elles avaient connu la destination des vidéos et auxquelles elles allaient être contraintes » (arrêt, p. 343) et tout en mettant M. [TX] [IK] et M. [IR] en accusation des chefs de viols en réunion et complicité de viols en réunion après avoir relevé que « le visionnage des vidéos et de rush qui ont été saisis permet d'apprécier le fonctionnement des tournages dans un mélange d'autorité, de cynisme et de fausse bonhomie », qu'il « y apparaît que les scènes sont constituées par une simple succession de positions sexuelles, sans que soit racontée une quelconque histoire et sans mise en scène d'une quelconque affection entre les partenaires, le tout s'enchaînant au fil des injonctions du réalisateur », que « certains encouragements à pleurer de la part de M. [IK] adressés à une actrice en souffrance, n'apparaissent que comme résultant de la simple prise en compte de la réalité de cette souffrance avec incitation de l'actrice à évacuer ainsi le stress avant de poursuivre le tournage », que « le visionnage confirme les déclarations des actrices sur l'enchaînement des scènes sous la direction du réalisateur et sur la soumission des actrices qui subissent cet enchaînement et dont les souffrances ont été décrites plus haut comme résultant de la multiplication des pénétrations par des verges parfois trop volumineuses, notamment des pénétrations anales avec des blessures parfois visibles », qu'il confirme « également la survenue de hauts le c?ur à l'occasion de fellations trop profondes ou des tentatives d'évitement d'éjaculations sur le visage », que « l'identité et le nombre des participants n'étaient jamais portés à l'avance à la connaissance des actrices qui étaient mises devant le fait accompli sans qu'une quelconque possibilité de refus leur soit laissé » (arrêt, p. 351 et 352), que « les actes sexuels dénoncés par les victimes, spécialement la répétition des pénétrations allant jusqu'à plusieurs dizaines en une journée, ont à l'évidence été douloureux physiquement et moralement au point qu'un certain nombre d'actrices ont anticipé cette souffrance morale et physique consommant l'alcool et la cocaïne mis à leur disposition et qu'il en a été ainsi particulièrement dans le cadre des Bukkake ou gang bang confrontant les actrices à plusieurs dizaines d'hommes jouissant du spectacle de leur avilissement » (arrêt, p. 336), qu'« en définitive, il apparaît que les plaignantes ont au contraire tourné dans une ambiance et dans des conditions exclusives de toute liberté de refuser les actes, y compris lorsqu'elles subissaient des traumatismes physiques et que MM. [IK] et [NY] profitaient de cette soumission pour les instrumentaliser avec la certitude que leurs difficultés personnelles, sociales ou financière leur interdiraient de réagir » (arrêt, p. 351 et 352), la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en méconnaissance de l'article 225-5 du code pénal ;
4°/ en tout état de cause, que la finalité prétendument artistique d'une oeuvre pornographique ne peut être opposée qu'à des actes accomplis conformément à un scénario auquel les participants au tournage ont préalablement consenti ; que, pour écarter la qualification de proxénétisme, la chambre de l'instruction a énoncé que « si la recherche de cette satisfaction est inhérente à la réalisation d'actes sexuels demandée aux acteurs il ne peut en être induit que cette satisfaction serait pour les réalisateurs l'objet même du tournage. En effet les acteurs et actrices n'agissent que sous la direction du réalisateur, ce qui caractérise un, contrat de travail voire un contrat d'artiste amateur. Par ailleurs le désir sexuel et sa satisfaction étant mis en scène dans une oeuvre pornographique, il est donc nécessaire de le susciter et de l'entretenir chez les acteurs, condition sine qua non de leur capacité à obtenir l'érection et l'éjaculation recherchée » (arrêt, p. 337) ; qu'en statuant ainsi tout en admettant ¿ et sans mieux s'en expliquer ¿ que les jeunes femmes avaient, sur les plateaux de tournage, subi des actes sexuels auxquels elles n'avaient pas consenti préalablement (arrêt, p. 343) et que des actes de pénétration sexuelle avaient été pratiqués sur elles avec surprise, contrainte, violence ou menace (arrêt, p. 346 à 354), elle a méconnu l'article 225-5 du code pénal. »
94. Le quatrième moyen proposé pour Mme [I] [U] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu de mettre en accusation MM. [IR], [AG] et [NY] pour proxénétisme en bande organisée aggravé par la torture et la barbarie au préjudice de Mme [I] [U], alors :
« 1°/ que Mme [I] [U] demandait à ce que M. [IR], [AG] et [NY] soient mis en accusation pour proxénétisme, le premier pour avoir tiré profit de son exploitation en contrôlant des scènes et en ayant gratuitement accès aux vidéos, le deuxième pour voir mis en ligne des vidéos plus d'un an après leur tournage, le troisième pour avoir organisé des scènes et tiré profit des vidéos, et MM. [AG] et [NY] pour avoir produit des vidéos dans lesquelles elle apparaissait (mémoire, p. 46 et 66) ; qu'en se bornant à énoncer « qu'il n'a pas été réuni de charges suffisantes contre [IL] [NY] et [YZ] [AG] d'avoir participé aux faits de proxénétisme » retenus contre M. [TX] [IK] pour avoir fait participer des abonnés du site Frenchbukkake à des tournages ou à des rapports sexuels, (arrêt, p. 358) et « qu'il en est de même de M. [IR] qui n'apparaît pas impliqué dans cette pratique relevant de la seule initiative de M. [IK] »(ibid), sans rechercher si les faits reprochés à MM. [IR], [AG] et [NY] ne concernaient pas ceux retenus contre M. [TX] [IK], la chambre de l'instruction, qui a insuffisamment répondu aux conclusions de Mme [I] [U], a méconnu l'article 593 du code de procédure pénale ;
2°/ en tout état de cause, que la prostitution, qui est nécessaire à la qualification de l'infraction de proxénétisme, consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui et non pas ses propres besoins sexuels ; que le proxénétisme est caractérisé, notamment, par le fait de tirer profit de la prostitution d'autrui sans qu'il soit nécessaire que l'auteur de ce fait ait eu l'intention de satisfaire les besoins sexuels d'autrui ; qu'en énonçant, pour dire n'y avoir lieu à mettre en accusation MM. [IR], [AG] et [NY] pour proxénétisme, que « les tournages ont dans l'esprit des réalisateurs pour objet la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratifs, la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » et que « si la recherche de cette satisfaction est inhérente à la réalisation d'actes sexuels demandée aux acteurs, il ne peut en être induit que cette satisfaction serait pour les réalisateurs l'objet même du tournage » (arrêt, p. 337), la chambre de l'instruction a méconnu l'article 222-25 du code pénal ;
3°/ que le tournage de ce qui est considéré par son auteur ou son réalisateur comme une oeuvre pornographique peut être qualifié d'acte de prostitution et, par suite, de proxénétisme si les personnes qui y participent livrent, contre rémunération, à des actes sexuels réels ; qu'il en est, à plus forte raison, ainsi lorsque ces actes sexuels constituent des atteintes à la personne humaine pénalement réprimées ; qu'en retenant, pour écarter la qualification de proxénétisme, que « les tournages ont dans l'esprit des réalisateurs pour objet la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratifs, la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » et que « le désir sexuel et sa satisfaction étant mis en scène dans une oeuvre pornographique, il est donc nécessaire de le susciter et de l'entretenir chez les acteurs » (arrêt, p. 337) tout en mettant MM. [IR] et [NY] en accusation du chef de traite des êtres humains en bande organisée au motif qu'ils ont, « en lien les uns avec les autres, accompli les actes nécessaires à l'arrivée de jeunes femmes sur les plateaux de tournage où elles devaient subir des actes sexuels auxquels elles n'avaient pas consenti préalablement et auxquels elles n'auraient pas consenti si elles avaient connu la destination des vidéos et auxquelles elles allaient être contraintes » (arrêt, p. 343) et tout en mettant MM. [AG] et [NY] et M. [IR] en accusation des chefs de viols en réunion et complicité de viols en réunion après avoir relevé que « le visionnage des vidéos et de rush qui ont été saisis permet d'apprécier le fonctionnement des tournages dans un mélange d'autorité, de cynisme et de fausse bonhomie », qu'il « y apparaît que les scènes sont constituées par une simple succession de positions sexuelles, sans que soit racontée une quelconque histoire et sans mise en scène d'une quelconque affection entre les partenaires, le tout s'enchaînant au fil des injonctions du réalisateur », que « certains encouragements à pleurer de la part de M. [IK] adressés à une actrice en souffrance, n'apparaissent que comme résultant de la simple prise en compte de la réalité de cette souffrance avec incitation de l'actrice à évacuer ainsi le stress avant de poursuivre le tournage », que « le visionnage confirme les déclarations des actrices sur l'enchaînement des scènes sous la direction du réalisateur et sur la soumission des actrices qui subissent cet enchaînement et dont les souffrances ont été décrites plus haut comme résultant de la multiplication des pénétrations par des verges parfois trop volumineuses, notamment des pénétrations anales avec des blessures parfois visibles », qu'il confirme « également la survenue de hauts le c?ur à l'occasion de fellations trop profondes ou des tentatives d'évitement d'éjaculations sur le visage », que « l'identité et le nombre des participants n'étaient jamais portés à l'avance à la connaissance des actrices qui étaient mises devant le fait accompli sans qu'une quelconque possibilité de refus leur soit laissé » (arrêt, p. 351 et 352), que « les actes sexuels dénoncés par les victimes, spécialement la répétition des pénétrations allant jusqu'à plusieurs dizaines en une journée, ont à l'évidence été douloureux physiquement et moralement au point qu'un certain nombre d'actrices ont anticipé cette souffrance morale et physique consommant l'alcool et la cocaïne mis à leur disposition et qu'il en a été ainsi particulièrement dans le cadre des Bukkake ou gang bang confrontant les actrices à plusieurs dizaines d'hommes jouissant du spectacle de leur avilissement » (arrêt, p. 336), qu'« en définitive, il apparaît que les plaignantes ont au contraire tourné dans une ambiance et dans des conditions exclusives de toute liberté de refuser les actes, y compris lorsqu'elles subissaient des traumatismes physiques et que MM. [IK] et [NY] profitaient de cette soumission pour les instrumentaliser avec la certitude que leurs difficultés personnelles, sociales ou financière leur interdiraient de réagir » (arrêt, p. 351 et 352), la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en méconnaissance de l'article 225-5 du code pénal ;
4°/ en tout état de cause, que la finalité prétendument artistique d'une oeuvre pornographique ne peut être opposée qu'à des actes accomplis conformément à un scénario auquel les participants au tournage ont préalablement consenti ; que, pour écarter la qualification de proxénétisme, la chambre de l'instruction a énoncé que « si la recherche de cette satisfaction est inhérente à la réalisation d'actes sexuels demandée aux acteurs il ne peut en être induit que cette satisfaction serait pour les réalisateurs l'objet même du tournage. En effet les acteurs et actrices n'agissent que sous la direction du réalisateur, ce qui caractérise un, contrat de travail voire un contrat d'artiste amateur. Par ailleurs le désir sexuel et sa satisfaction étant mis en scène dans une oeuvre pornographique, il est donc nécessaire de le susciter et de l'entretenir chez les acteurs, condition sine qua non de leur capacité à obtenir l'érection et l'éjaculation recherchée » (arrêt, p. 337) ; qu'en statuant ainsi tout en admettant ¿ et sans mieux s'en expliquer ¿ que les jeunes femmes avaient, sur les plateaux de tournage, subi des actes sexuels auxquels elles n'avaient pas consenti préalablement (arrêt, p. 343) et que des actes de pénétration sexuelle avaient été pratiqués sur elles avec surprise, contrainte, violence ou menace (arrêt, p. 346 à 354), elle a méconnu l'article 225-5 du code pénal. »
95. Le premier moyen proposé pour Mme [YH] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à mettre en accusation MM. [TX] [IK], [IR], [NY] et [IZ] de proxénétisme en bande organisée au préjudice de Mme [YH], alors :
« 1°/ que Mme [YH] demandait à ce que M. [IR] soit mis en accusation du chef de proxénétisme (mémoire, p. 41 et 53) ; qu'en n'énonçant aucun motif sur ce point pour dire n'y avoir lieu de le mettre en accusation de ce chef, pour les faits autres que ceux au titre desquels M. [TX] [IK] a été mis en accusation pour proxénétisme (arrêt, p. 358), la chambre de l'instruction a insuffisamment motivé sa décision au regard de l'article 593 du code de procédure pénale ;
2°/ que la prostitution, qui est nécessaire à la qualification de l'infraction de proxénétisme, consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui et non pas ses propres besoins sexuels ; que le proxénétisme est caractérisé, notamment, par le fait de tirer profit de la prostitution d'autrui sans qu'il soit nécessaire que l'auteur de ce fait ait eu l'intention de satisfaire les besoins sexuels d'autrui ; qu'en énonçant, pour dire n'y avoir lieu à mettre en accusation MM. [TX] [IK], [IR], [NY] et [IZ] pour proxénétisme, que « les tournages ont dans l'esprit des réalisateurs pour objet la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratifs, la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » et que « si la recherche de cette satisfaction est inhérente à la réalisation d'actes sexuels demandée aux acteurs, il ne peut en être induit que cette satisfaction serait pour les réalisateurs l'objet même du tournage » (arrêt, p. 337), la chambre de l'instruction a méconnu l'article 222-25 du code pénal ;
3°/ que le tournage de ce qui est considéré par son auteur ou son réalisateur comme une oeuvre pornographique peut être qualifié d'acte de prostitution et, par suite, de proxénétisme si les personnes qui y participent se livrent, contre rémunération, à des actes sexuels réels ; qu'il en est, à plus forte raison, ainsi lorsque ces actes sexuels constituent des atteintes à la personne humaine pénalement réprimées ; qu'en retenant, pour écarter la qualification de proxénétisme, que « les tournages ont dans l'esprit des réalisateurs pour objet la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratifs, la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » et que « le désir sexuel et sa satisfaction étant mis en scène dans une oeuvre pornographique, il est donc nécessaire de le susciter et de l'entretenir chez les acteurs » (arrêt, p. 337) tout en mettant M. [TX] [IK], M. [IR] et M. [NY] en accusation du chef de traite des êtres humains en bande organisée au motif qu'ils ont, « en lien les uns avec les autres, accompli les actes nécessaires à l'arrivée de jeunes femmes sur les plateaux de tournage où elles devaient subir des actes sexuels auxquels elles n'avaient pas consenti préalablement et auxquels elles n'auraient pas consenti si elles avaient connu la destination des vidéos et auxquelles elles allaient être contraintes » (arrêt, p. 343) et tout en mettant M. [TX] [IK], M. [IR], M. [NY] et M. [IZ] en accusation des chefs de viols en réunion et complicité de viols en réunion après avoir relevé que « le visionnage des vidéos et de rush qui ont été saisis permet d'apprécier le fonctionnement des tournages dans un mélange d'autorité, de cynisme et de fausse bonhomie », qu'il « y apparaît que les scènes sont constituées par une simple succession de positions sexuelles, sans que soit racontée une quelconque histoire et sans mise en scène d'une quelconque affection entre les partenaires, le tout s'enchaînant au fil des injonctions du réalisateur », que « certains encouragements à pleurer de la part de M. [IK] adressés à une actrice en souffrance, n'apparaissent que comme résultant de la simple prise en compte de la réalité de cette souffrance avec incitation de l'actrice à évacuer ainsi le stress avant de poursuivre le tournage », que « le visionnage confirme les déclarations des actrices sur l'enchaînement des scènes sous la direction du réalisateur et sur la soumission des actrices qui subissent cet enchaînement et dont les souffrances ont été décrites plus haut comme résultant de la multiplication des pénétrations par des verges parfois trop volumineuses, notamment des pénétrations anales avec des blessures parfois visibles », qu'il confirme « également la survenue de hauts le c?ur à l'occasion de fellations trop profondes ou des tentatives d'évitement d'éjaculations sur le visage », que « l'identité et le nombre des participants n'étaient jamais portés à l'avance à la connaissance des actrices qui étaient mises devant le fait accompli sans qu'une quelconque possibilité de refus leur soit laissé » (arrêt, p. 351 et 352), que « les actes sexuels dénoncés par les victimes, spécialement la répétition des pénétrations allant jusqu'à plusieurs dizaines en une journée, ont à l'évidence été douloureux physiquement et moralement au point qu'un certain nombre d'actrices ont anticipé cette souffrance morale et physique consommant l'alcool et la cocaïne mis à leur disposition et qu'il en a été ainsi particulièrement dans le cadre des Bukkake ou gang bang confrontant les actrices à plusieurs dizaines d'hommes jouissant du spectacle de leur avilissement » (arrêt, p. 336), qu'« en définitive, il apparaît que les plaignantes ont au contraire tourné dans une ambiance et dans des conditions exclusives de toute liberté de refuser les actes, y compris lorsqu'elles subissaient des traumatismes physiques et que MM. [IK] et [NY] profitaient de cette soumission pour les instrumentaliser avec la certitude que leurs difficultés personnelles, sociales ou financière leur interdiraient de réagir » (arrêt, p. 351 et 352), la chambre de l'instruction n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en méconnaissance de l'article 225-5 du code pénal ;
4°/ en tout état de cause, que la finalité prétendument artistique d'une oeuvre pornographique ne peut être opposée qu'à des actes accomplis conformément à un scénario auquel les participants au tournage ont préalablement consenti ; que, pour écarter la qualification de proxénétisme, la chambre de l'instruction a énoncé que « si la recherche de cette satisfaction est inhérente à la réalisation d'actes sexuels demandée aux acteurs il ne peut en être induit que cette satisfaction serait pour les réalisateurs l'objet même du tournage. En effet les acteurs et actrices n'agissent que sous la direction du réalisateur, ce qui caractérise un, contrat de travail voire un contrat d'artiste amateur. Par ailleurs le désir sexuel et sa satisfaction étant mis en scène dans une oeuvre pornographique, il est donc nécessaire de le susciter et de l'entretenir chez les acteurs, condition sine qua non de leur capacité à obtenir l'érection et l'éjaculation recherchée » (arrêt, p. 337) ; qu'en statuant ainsi tout en admettant ¿ et sans mieux s'en expliquer ¿ que les jeunes femmes avaient, sur les plateaux de tournage, subi des actes sexuels auxquels elles n'avaient pas consenti préalablement (arrêt, p. 343) et que des actes de pénétration sexuelle avaient été pratiqués sur elles avec surprise, contrainte, violence ou menace (arrêt, p. 346 à 354), elle a méconnu l'article 225-5 du code pénal. »
96. Le quatrième moyen proposé pour Mmes [B], [K], [R], [BK], [TL], [YW], [CE], [UA] et les associations [3], [2] et [5] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il dit n'y avoir lieu à suivre à l'égard de quiconque du chef de proxénétisme en bande organisée, alors :
« 1°/ que le proxénétisme est le fait, par quiconque, de quelque manière que ce soit, notamment de tirer profit de la prostitution d'autrui ; que la prostitution est l'activité consistant à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui ; qu'il y a prostitution lorsque celui qui pratique un acte sexuel contre rémunération le fait, à travers des contacts physiques, tant avec celui qui sollicite cet acte pour assouvir ses propres besoins sexuels ou ceux d'autrui, qu'avec une personne dont ce dernier dirige le comportement ; que constitue en conséquence un acte de proxénétisme le fait pour un réalisateur ou un producteur de contenus audiovisuels à caractère pornographique de tirer profit, par la création d'un tel contenu et par les revenus associés à sa diffusion, de l'acte sexuel pratiqué par une personne rémunérée par ses soins avec un ou plusieurs partenaires dont il dirige le comportement pour les besoins de sa production ; que la circonstance que cet acte sexuel n'ait été sollicité pour répondre ni aux besoins sexuels de ce producteur ou réalisateur, ni à ceux des partenaires dont ce dernier dirige le comportement, est inopérante dès lors que ce acte est sollicité pour la réalisation d'un contenu audiovisuel à caractère pornographique ayant pour finalité la satisfaction des besoins sexuels de ceux qui le consultent ; qu'en refusant de qualifier de proxénétisme le fait pour [TX] [IK] et [IL] [NY] d'avoir produit et réalisé des contenus audiovisuels à caractère pornographique en rémunérant des femmes pour qu'elles pratiquent des actes sexuels avec des partenaires dont ils dirigeaient le comportement pour les besoins de leur production, au motif inopérant que ces actes n'avaient pas lieu pour satisfaire les besoins sexuels des intéressés et de ces partenaires, la chambre de l'instruction a violé l'article 225-5 du code pénal ensemble les articles 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. »
97. Le troisième moyen proposé pour Mmes [M], [ZD] et [NZ] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de proxénétisme en bande organisée et de proxénétisme aggravé à l'égard de plusieurs personnes à leur préjudice, alors :
« 1°/ que la prostitution consiste a se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'une autre personne, que celle-ci ait ou non des contacts physiques avec la personne se livrant à la prostitution ; que la participation rémunérée au tournage d'un film pornographique, impliquant des contacts physique pour la satisfaction sexuelle des consommateurs de ces films, relevant de la prostitution, le fait de contribuer au tournage de ces films, d'en tirer profit ou d'embaucher quelqu'un à s'y livrer caractérise le délit de proxénétisme ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de proxénétisme en bande organisée au motif que « si la recherche de cette satisfaction est inhérente a la réalisation d'actes sexuels demandée aux acteurs, il ne peut en être induit que cette satisfaction serait pour les réalisateurs l'objet même du tournage » et que « le désir sexuel et sa satisfaction étant mis en scène dans une oeuvre pornographique, il est donc nécessaire de le susciter et de l'entretenir chez les acteurs, condition sine qua non de leur capacité à obtenir l'érection et l'éjaculation recherchée » (arrêt, p. 337, §§ 10-11) ; qu'en se référant aux seuls besoins sexuels des acteurs, sans rechercher, comme il lui était demandé, si les tournages n'avaient pas également pour but de satisfaire les besoins sexuels des abonnés des sites sur lesquels les films ainsi réalisés étaient diffusés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 225-5 et 225-8 du code pénal ;
2°/ subsidiairement que le proxénétisme consiste pour quiconque, de quelque manière que ce soit, a aider ou assister la prostitution d'autrui, protéger cette activité, convaincre une personne de s'y livrer, en tirer profit ou en faciliter l'exercice ; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, a des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'une autre personne ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que « certains [acteurs] sont rémunérés et d'autres pas » (arrêt, p. 337, § 9) ; qu'en écartant l'infraction de proxénétisme en bande organisée au motif que « si la recherche de cette satisfaction est inhérente à la réalisation d'actes sexuels demandée aux acteurs, il ne peut en être induit que cette satisfaction serait pour les réalisateurs l'objet même du tournage » et que « le désir sexuel et sa satisfaction étant mis en scène dans une oeuvre pornographique, il est donc nécessaire de le susciter et de l'entretenir chez les acteurs, condition sine qua non de leur capacité à obtenir l'érection et l'éjaculation recherchée » (arrêt, p. 337, §§ 10- 1 1) ; qu'en disant n'y avoir lieu a suivre contre quiconque du chef de proxénétisme en bande organisée sans rechercher si la satisfaction des besoins sexuels des acteurs non-rémunérés n'était pas le motif déterminant de leur participation au tournage, de sorte que le fait d'avoir mis en relation ces acteurs avec les actrices au cours des tournage caractérisait les faits de proxénétisme, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des articles 225-5 et 225-8 du code pénal ;
3°/ en toute hypothèse que la circonstance qu'une infraction soit commise dans le cadre de la réalisation d'une oeuvre de l'esprit est indifférente à exclure sa caractérisation ; qu'en l'espèce, pour écarter l'infraction de proxénétisme aggravé, la chambre de l'instruction a considéré que « les tournages ont dans l'esprit des réalisateurs pour objet la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratif la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » (arrêt, p. 337, § 9) ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante que les actes sexuels servaient à réaliser une oeuvre cinématographique pour écarter la qualification de proxénétisme, la cour d'appel a violé les articles 225-5 et 225-8 du code pénal. »
98. Le deuxième moyen proposé pour Mme [IM] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, d'une part, dit qu'il ne résulte pas de l'information charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis, entre le 1er janvier 2013 et le 13 octobre 2020, les faits de proxénétisme en bande organisée et de proxénétisme aggravé à l'égard de plusieurs personnes au préjudice notamment de Mme [IM], en conséquence a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque de ces chefs, d'autre part, a ordonné la mise en accusation de MM. [TX] [IK], [NY] et [IR] du chef de traite d'être humain afin de permettre la commission contre les victimes des agressions sexuelles, sans retenir la traite d'être humain aux fins de proxénétisme, alors :
« 1°/ que constitue du proxénétisme le fait de tirer profit de la prostitution d'autrui; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui; qu'entre dans cette définition le fait, pour les actrices pornographiques, qui sont rémunérées, d'avoir des contacts physiques avec des acteurs, que ces derniers soient rémunérés ou non, et fût-ce pour les besoins d'une prétendue oeuvre cinématographique dès lors qu'il est ainsi concouru à la satisfaction des besoins sexuels d'autrui, qu'ils soient futurs spectateurs du film et/ou également des acteurs ; que par suite, entre dans la définition du proxénétisme le fait, pour les producteurs, de tirer profit de cette activité, peu important qu'elle ne soit pas immédiatement lucrative ; que la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 225-5 et 225-6 du code pénal, ensemble l'article 225-4-1 du code pénal ;
2°/ que le tournage pornographique qui a, comme en l'espèce, pour but et pour résultat, le plaisir sexuel des acteurs (base sur laquelle, selon [TX] [IK] lui-même, ils n'étaient pas rémunérés) constitue une opération de proxénétisme ; que la chambre de l'instruction, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 225-5 et 225-6 du code pénal, ensemble l'article 225-4-1 du code pénal ;
3°/ que la circonstance que les comportements en cause auraient pour but la création d'une oeuvre de l'esprit ne constitue pas un fait justificatif des infractions si celles-ci sont caractérisées ; la chambre de l'instruction a encore violé les textes susvisés. »
99. Le sixième proposé pour Mme [AW] critique l'arrêt en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à suivre contre MM. [TX] [IK] et [IR] du chef de proxénétisme en bande organisée au préjudice de Mme [AW], alors :
« 1°/ que le proxénétisme consiste pour quiconque, de quelque manière que ce soit, à aider ou assister la prostitution d'autrui, protéger cette activité, convaincre une personne de s'y livrer, en tirer profit ou en faciliter l'exercice ; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui ; que la participation rémunérée au tournage d'un film pornographique, impliquant des contacts physiques pour la satisfaction sexuelle des consommateurs de ces films, relève de la prostitution ; que le fait de contribuer au tournage de ces films, d'en tirer profit ou d'embaucher quelqu'un pour s'y livrer caractérise le délit de proxénétisme ; que la cour d'appel a constaté que « les actrices pornographiques sont rémunérées pour avoir des contacts physiques » (arrêt p. 337 al. 9) ; qu'en retenant que, dans l'esprit des réalisateurs, les tournages auraient pour objet « la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratif, la satisfaction des besoins sexuels d'autrui », sans rechercher si les tournages n'avaient pas également pour but de satisfaire les besoins sexuels des abonnés des sites sur lesquels les films ainsi réalisés étaient diffusés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 222-5 et 225-8 du code pénal ;
2°/ que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; que pour écarter la circonstance aggravante de sexisme, la cour d'appel a retenu que l'objet de l'oeuvre était « l'excitation sexuelle de spectateurs » et que les propos sexistes étaient tenus par les acteurs « non pas pour leur plaisir mais pour celui des spectateurs » (cf. arrêt p. 337, al. 3) ; qu'en retenant, pour écarter les actes de prostitution, que la réalisation des oeuvres cinématographiques ne serait pas faite pour « la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » (cf. arrêt p. 337 al. 9), la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires, en violation de l'article 593 du code de procédure pénale ;
3°/ subsidiairement que le proxénétisme consiste pour quiconque, de quelque manière que ce soit, à aider ou assister la prostitution d'autrui, protéger cette activité, convaincre une personne de s'y livrer, en tirer profit ou en faciliter l'exercice ; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'une autre personne ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que « certains [acteurs] sont rémunérés et d'autres pas » (arrêt, p. 337, § 9) ; qu'en disant n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de proxénétisme en bande organisée sans rechercher si la satisfaction des besoins sexuels des acteurs non rémunérés n'était pas le motif déterminant de leur participation au tournage, de sorte que le fait d'avoir mis en relation ces acteurs avec les actrices au cours des tournages caractérisait les faits de proxénétisme, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des articles 222-5 et 225-8 du code pénal ;
4°/ que le proxénétisme consiste pour quiconque, de quelque manière que ce soit, à aider ou assister la prostitution d'autrui, protéger cette activité, convaincre une personne de s'y livrer, en tirer profit ou en faciliter l'exercice ; que la prostitution consiste à se prêter, moyennant une rémunération, à des contacts physiques de quelque nature qu'ils soient, afin de satisfaire les besoins sexuels d'autrui ; que la participation rémunérée au tournage d'un film pornographique, impliquant des contacts physiques pour la satisfaction sexuelle d'autrui, relève de la prostitution ; que le fait de contribuer au tournage de ces films, d'en tirer profit ou d'embaucher quelqu'un pour s'y livrer caractérise le délit de proxénétisme ; que la cour d'appel a constaté que « les actrices pornographiques sont rémunérées pour avoir des contacts physiques » (arrêt p. 337 al. 9) ; qu'en retenant que, dans l'esprit des réalisateurs, les tournages auraient pour objet « la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit », que « si la recherche de cette satisfaction est inhérente à la réalisation d'actes sexuels demandée aux acteurs, il ne peut en être induit que cette satisfaction serait pour les réalisateurs l'objet même du tournage » et que « le désir sexuel et sa satisfaction étant mis en scène dans une oeuvre pornographique, il est donc nécessaire de le susciter et de l'entretenir chez les acteurs, condition sine qua non de leur capacité à obtenir l'érection et l'éjaculation recherchées » (arrêt, p. 337, §§ 10-11), sans s'expliquer sur le moyen par lequel Mme [AW] faisait valoir que « les acteurs ont reconnu avoir tourné ces scènes afin de satisfaire leurs besoins sexuels » et que MM. [IK] et [IR] en ont tiré profit « le premier en raison des gains financiers générés, le second en raison de l'accès gratuit à l'abonnement French-Bukkake » (cf. mémoire d'appel du 2 novembre 2023 p. 13 antépénultième et pénultième al.), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 222-5 et 225-8 du code pénal ;
5°/ en toute hypothèse que la circonstance qu'une infraction soit commise dans le cadre de la réalisation d'une oeuvre de l'esprit est insuffisante à exclure sa caractérisation ; qu'en écartant toutefois l'infraction de proxénétisme aggravé, au motif que « les tournages ont dans l'esprit des réalisateurs pour objet la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit et non pas dans un esprit altruiste ou immédiatement lucratif, la satisfaction des besoins sexuels d'autrui » (arrêt, p. 337, § 9) ; qu'en se fondant sur la circonstance inopérante que les actes sexuels servaient à réaliser une oeuvre cinématographique pour écarter la qualification de proxénétisme, la cour d'appel a violé les articles 222-5 et 225-8 du code pénal. »
Réponse de la Cour
100. Les moyens sont réunis.
Vu les articles 225-5, 2°, 225-6, 1°, du code pénal et 593 du code de procédure pénale :
101. Il résulte des deux premiers de ces textes que le proxénétisme est le fait par quiconque, de quelque manière que ce soit, de tirer profit de la prostitution d¿autrui ou de faire office d'intermédiaire entre deux personnes dont l'une se livre à la prostitution et l'autre exploite ou rémunère la prostitution d'autrui.
102. Il résulte du troisième que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
103. Pour dire n'y avoir lieu à suivre du chef de proxénétisme aggravé contre quiconque, à l'exception de M. [TX] [IK], et mettre celui-ci en accusation de ce chef au seul préjudice de Mmes [I] [U], [NP], [K], [B], [NS], [UA] et des victimes non identifiées, l'arrêt attaqué énonce que si les actrices pornographiques sont rémunérées pour avoir des contacts physiques avec des acteurs, dont certains sont rémunérés, les tournages ont pour objet la réalisation d'une oeuvre cinématographique, source de profit, et non la satisfaction de besoins sexuels.
104. Les juges précisent que la recherche de cette satisfaction est inhérente à la réalisation d'actes sexuels demandés aux acteurs, qu'il ne peut en être déduit qu'elle constituerait l'objet du tournage, et que les acteurs et actrices agissent sous la direction du réalisateur, ce qui caractérise un contrat de travail ou un contrat d'artiste amateur.
105. Ils ajoutent que le désir sexuel et sa satisfaction étant, dans une oeuvre pornographique, mis en scène, il est nécessaire de les susciter et de les entretenir chez les acteurs, afin d'obtenir l'érection et l'éjaculation recherchés, et que les propos mis en exergue par les parties civiles apparaissent avoir été tenus pour susciter le désir des acteurs et obtenir leur adhésion.
106. Ils en déduisent que les tournages pornographiques ne peuvent être ni par principe ni dans le cas d'espèce considérés comme du proxénétisme quand bien même auraient été tenus des propos salaces au sujet de telle ou telle actrice, exprimant un désir sexuel, le besoin de l'assouvir et, le cas échéant, des préférences.
107. Ils relèvent cependant qu'à l'égard de personnes qui n'étaient pas des acteurs, M. [TX] [IK] a prostitué certaines actrices à leur insu en acceptant la participation aux actes sexuels d'abonnés au site Frenchbukkake.
108. Ils précisent que deux situations sont qualifiables de proxénétisme : dans la première d'entre elles, lorsqu'un abonné du site est appelé à participer à un tournage pornographique en contrepartie du prix de l'abonnement pour satisfaire des besoins sexuels, comme cela ressort notamment de l'audition de Mme [B], des interrogatoires de MM. [IV], [D] et [O] et des commentaires trouvés sur le site ; dans la seconde, lorsqu'un abonné du site est invité par le réalisateur à participer à une scène comportant des rapports sexuels en échange du prêt de son logement comme lieu de tournage, il y a paiement en nature à M. [TX] [IK] du prix d'une relation sexuelle afin de satisfaire des besoins sexuels, comme cela ressort notamment de l'audition de Mme [T], des interrogatoires de MM. [TF] et [TM], de l'exploitation de la vidéo « Gang » dans laquelle apparaît Mme [UA] et de l'exploitation des commentaires du site.
109. Ils retiennent que dans ces cas, en aidant, assistant et en tirant profit de la prostitution d'autrui notamment de celle de Mmes [I] [U], [NP], [K], [B], [NS], [UA] ainsi que de victimes non identifiées, M. [TX] [IK] a commis des faits qualifiables de proxénétisme.
110. Ils concluent que, d'une part, les faits de proxénétisme en bande organisée et de proxénétisme aggravé par la pluralité d'auteurs et de victimes, usage de contraintes, violences ou manoeuvres dolosives doivent être requalifiés en proxénétisme aggravé par la pluralité de victimes, pour la période du 1er janvier 2015 au 13 octobre 2020 située entre les premiers tournages et la date des interpellations, d'autre part, il n'a pas été réuni de charges suffisantes contre quiconque pour les faits de proxénétisme aggravé ayant pour victimes Mmes [NR], [YJ], [BK], [BE], [UB], [YI] [TS], [CE], [YW], [IT], [ZD], [F], [NU], [NK], [W], [YY] [C], [NV], [E], [YU], [TV] et [BI] [NX], [IM], [TR], [Z], [AW], [YV], [M], [IJ] [TH], [A], [II], [NZ], [IN], [BA], [YH], [TL], [T], [DZ], [NN], [DJ], [DM], [ZB], [R], [NI] [TT], [TY], [EB], [ED], et contre MM. [NY], [EC], [AG] et [IR] d'y avoir participé, un non-lieu étant ordonné en leur faveur pour les faits de proxénétisme aggravé ayant pour victimes Mmes [I] [U], [NP] et [K], [B], [NS] et [UA].
111. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision pour les motifs qui suivent.
112. D'une part, l'incrimination de proxénétisme peut être retenue contre celui qui, par quelque moyen que ce soit, tire profit ou s'enrichit, en violation de l'ensemble des règles qui régissent le tournage de films pornographiques, de la participation payante de tiers à des activités sexuelles filmées et de la vente de vidéos ainsi réalisées, activités pour lesquelles de jeunes prostituées rémunérées ont été recrutées par le biais d'une annonce trompeuse et qui, au prétexte d'une production cinématographique, seraient en réalité les victimes de viols multiples.
113. D'autre part, il appartenait à la chambre de l'instruction de rechercher, comme le lui demandaient les parties civiles, si les personnes mises en examen qui avaient fait office d'intermédiaire entre les victimes et M. [TX] [IK] ne relevaient pas de cette incrimination.
114. La cassation est par conséquent également encourue de ce chef.
Portée et conséquences de la cassation
115. La cassation à intervenir concerne les dispositions de l'arrêt attaqué disant n'y avoir lieu, de première part, à retenir les circonstances aggravantes de sexisme et de racisme pour les faits commis à compter du 29 janvier 2017 et la circonstance aggravante de sérialité, de deuxième part, à retenir la circonstance aggravante de réunion des viols reprochés à M. [YG] au préjudice de Mme [BA], de troisième part, à suivre contre M. [IR] du chef de complicité de viols ayant pour victimes Mmes [EB] et [YV], de quatrième part, à suivre contre M. [D] des chefs de viols en réunion et traite des êtres humains ayant pour victime Mme [IJ] [TH], de cinquième part, à suivre contre quiconque ainsi que, pour partie des victimes, contre M. [TX] [IK] du chef de proxénétisme aggravé.
116. Les autres dispositions seront donc maintenues.
Crim. 13 mai 2025 n° 25-81.465
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 25-81.465 F-D
N° 00772
SB4 13 MAI 2025
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 13 MAI 2025
M. [L] [G] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 7e section, en date du 4 février 2025, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de tentative de meurtre en bande organisée, violation de domicile, vol et tentative d'extorsion avec arme, a rejeté sa demande de mise en liberté.
Un mémoire personnel a été produit.
Sur le rapport de M. Busché, conseiller, et les conclusions de Mme Gulphe-Berbain, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Busché, conseiller rapporteur, M. Sottet conseillers de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [L] [G], mis en examen des chefs susvisés, a été placé en détention provisoire le 18 novembre 2022.
3. Par ordonnance du 28 août 2024, le juge d'instruction a requalifié les faits et ordonné son renvoi devant le tribunal correctionnel.
4. La partie civile a relevé appel de cette décision.
5. Par arrêt du 24 octobre 2024, la chambre de l'instruction a ordonné un supplément d'information.
6. M. [G] a formé une demande de mise en liberté.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
7. Le moyen est pris de la violation des articles 9 de la Convention européenne des droits de l'homme, 186-4 et 591 du code de procédure pénale.
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la demande de mise en liberté, alors qu'il résulte de l'article 186-4 du code de procédure pénale qu'en cas d'appel formé contre une ordonnance de renvoi, la chambre de l'instruction statue dans les deux mois suivant la date de la déclaration d'appel, faute de quoi la personne détenue est remise en liberté.
Réponse de la Cour
9. Pour rejeter la demande de mise en liberté, la chambre de l'instruction énonce qu'en ordonnant un supplément d'information par arrêt du 24 octobre 2024, elle a statué dans le délai prévu par l'article 186-4 du code de procédure pénale, soit dans les deux mois de la déclaration d'appel de l'ordonnance du 28 août 2024.
10. En l'état de ces énonciations, et dès lors que, si cette juridiction a statué dans le délai susmentionné, même pour ordonner un supplément d'information, l'ordonnance de maintien en détention provisoire conserve sa force exécutoire par application de l'article 179, alinéas 3 et 4, du même code, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.
11. Ainsi le moyen ne saurait être accueilli.
12. Par ailleurs, l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 143-1 et suivants du code de procédure pénale.
Crim. 13 mai 2025 n° 25-81.465
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 25-81.465 F-D
N° 00771
13 MAI 2025
SB4
QPC INCIDENTE : NON LIEU À RENVOI AU CC
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 13 MAI 2025
M. [G] [R] a présenté, par mémoire spécial reçu le 18 février 2025, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 7e section, en date du 4 février 2025, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de tentative de meurtre en bande organisée, violation de domicile, vol et tentative d'extorsion avec arme, a rejeté sa demande de mise en liberté.
Des observations ont été produites.
Sur le rapport de M. Busché, conseiller, les observations de la SCP le Guerer, Bouniol-Brochier, Lassale-Byhet, avocat de M. [U] [S], et les conclusions de Mme Gulphe-Berbain, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Busché, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions querellées des articles 179, alinéa 4, et 186-4 du code de procédure pénale, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, en ce qu'elles permettent une détention pour une durée illimitée, sont-elles conformes à la liberté individuelle et au principe de rigueur nécessaire garantis par les articles 9 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen et 66 de la Constitution de 1958 ? ».
2. La disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
3. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
4. La question posée ne présente pas un caractère sérieux, dès lors qu'il n'existe pas de jurisprudence constante de la Cour de cassation énonçant, au visa des articles 179, alinéa 4, et 186-4, du code de procédure pénale, que la détention provisoire peut être maintenue sans limite de durée lorsque la chambre de l'instruction, saisie de l'appel d'une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, ordonne un supplément d'information dans le délai imparti par le second de ces textes.
5. Au surplus, dans l'hypothèse où une telle jurisprudence interviendrait, la durée de la détention provisoire consécutive au maintien en détention en application des dispositions de l'article 179, alinéa 3, du code de procédure pénale ne pourrait excéder, comme la procédure elle-même, un délai raisonnable, et l'intéressé aurait la possibilité, à tout moment, de présenter une demande de mise en liberté à laquelle il devrait être répondu par décision motivée dans les stricts délais fixés par l'article 148-2 du même code.
6. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.
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