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Com. 25 novembre 2020 n° 19-13.237

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
DB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Rejet

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 685 F-D
Pourvoi n° F 19-13.237



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020
M. F... A..., domicilié, [...] , a formé le pourvoi n° F 19-13.237 contre l'arrêt rendu le 31 août 2018 par la cour d'appel de Basse-Terre (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Eos France, anciennement dénommée Eos Crédirec, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Banque française commerciale Antilles Guyane (BFCAG), défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseiller, les observations de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de M. A..., de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société Eos France, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Graff-Daudret, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 31 août 2018), par un acte du 22 avril 2005, la société Banque française commerciale Antilles Guyane, aux droits de laquelle est venue la société Eos Crédirec, elle-même devenue Eos France (la banque), a consenti à la société Calieco (la société) un prêt, garanti par le cautionnement de M. A... et le nantissement du fonds de commerce dont l'acquisition était financée par le prêt.
2. La société ayant été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné en paiement la caution, qui lui a opposé sa décharge sur le fondement des dispositions de l'article 2314 du code civil.
3. La cour d'appel a rejeté cette demande.

Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. M. A... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer diverses sommes à la banque, alors :
« 1° / que chaque cocontractant a l'obligation de respecter le contrat auquel il a consenti tel qu'il a été conçu, outre celle de se montrer loyal dans la manière d'exécuter les obligations mises à sa charge et d'exercer son pouvoir contractuel ; qu'en particulier, la banque, qui est titulaire d'une créance garantie à la fois par un nantissement de fonds de commerce et par un cautionnement, est tenue, à l'endroit de la caution, de tout mettre en oeuvre pour alléger le poids de l'obligation garantie et éviter ainsi de priver la caution d'un droit pouvant lui profiter ; qu'en se bornant à relever, pour écarter l'exception que M. F... A... tirait des articles 2037 ancien et 2314 actuel du code civil, que la perte du nantissement constitué par l'auteur de la banque est due à la procédure de liquidation judiciaire diligentée contre la soci été, sans rechercher si, comme il était soutenu, l'auteur de la banque, n'a pas tardé à exercer son droit de créancier nanti et privé ainsi M. F... A... d'un droit pouvant lui profiter, la cour d'appel a violé les articles 1134 ancien, 1104 actuel, 2037 ancien et 2314 actuel du code civil ;
2°/ que M. F... A... faisait valoir que "la Eos Crédirec venant aux droits de la Bfc n'ayant jamais sollicité l'attribution judiciaire de son gage et cette dernière étant désormais impossible en raison de la liquidation judiciaire intervenue", elle lui a fait perdre un droit pouvant lui profiter, et que,"si elle l'avait fait [obtenir l'attribution judiciaire de son gage], sa créance aurait été totalement soldée et M. A... n'aurait pas été poursuivi", de sorte que "la faute de la banque a [] bien causé un préjudice à M. A... qui n'aurait été tenu d'aucun paiement si la banque avait réalisé son gage" ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. Aux termes de l'article L. 142-1, alinéa 2, du code de commerce, le nantissement d'un fonds de commerce ne donne pas au créancier gagiste le droit de se faire attribuer le fonds en paiement et jusqu'à due concurrence, cette règle n'étant pas écartée en cas de liquidation judiciaire. Il résulte en outre de l'article 2314 du code civil que la caution qui se prévaut des dispositions de ce texte doit démontrer la perte, par le fait exclusif du créancier, du droit dans lequel elle pouvait être subrogée, cette perte pouvant résulter du dépérissement de l'assiette du gage.
6. M. A... s'étant borné, dans ses conclusions d'appel, à reprocher à la banque d'avoir négligé de solliciter l'attribution judiciaire du fonds de commerce nanti à son profit, en faisant valoir que, si elle l'avait fait, la créance aurait été soldée, la cour d'appel n'avait pas à effectuer les recherches invoquées, qui étaient inopérantes.
7. Le moyen n'est donc pas fondé.




Civ.1 25 novembre 2020 n° 19-18.144

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1
CF


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation

Mme BATUT, président


Arrêt n° 734 F-D
Pourvoi n° Q 19-18.144





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020
Mme A... G..., épouse M..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° Q 19-18.144 contre l'arrêt rendu le 24 janvier 2019 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre civile, section A), dans le litige l'opposant à la société Devictor immobilier, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme G..., de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Devictor immobilier, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 24 janvier 2019), suivant mandat de vente non exclusif du 23 septembre 2014, modifié par avenant du 25 septembre suivant, Mme G... a confié à la société Devictor immobilier (l'agent immobilier) la vente de son appartement au prix de 205 000 euros moyennant une rémunération à sa charge de 10 000 euros, ce mandat devant prendre fin le 25 décembre 2015. Le 5 novembre 2015, l'agent immobilier a avisé Mme G... qu'un acquéreur formait une proposition au prix de 165 000 euros net vendeur, et lui a transmis l'offre par courriel. Le 7 novembre suivant, Mme G... a retourné l'offre signée, puis s'est rétractée dès le lendemain, sollicitant un délai de réflexion de trois jours supplémentaires.
2. Le 30 novembre 2015, l'agent immobilier l'a mise en demeure de lui payer la rémunération prévue au mandat puis, le 13 janvier 2016, l'a assignée en paiement de la clause pénale.
Examen du moyen
Sur le moyen relevé d'office
3. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.
Vu l'article 6, I, alinéa 5, de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 :
4. Selon ce texte, aucun bien, effet, valeur, somme d'argent, représentatif de commissions, de frais de recherche, de démarche, de publicité ou d'entremise quelconque, n'est dû aux personnes visées par le premier article de la loi ou ne peut être exigé ou accepté par elles avant qu'une des opérations visées à cet article ait été effectivement conclue et constatée dans un seul acte écrit contenant l'engagement des parties.
5. Il en résulte que le mandat d'entremise donné à l'une de ces personnes ne lui permet pas d'engager son mandant pour l'opération envisagée à moins qu'une clause ne l'y autorise expressément, de sorte que le refus du mandant de réaliser la vente avec une personne qui lui est présentée par son mandataire ne peut lui être imputé à faute pour justifier sa condamnation au paiement de dommages-intérêts, à moins qu'il ne soit établi que ce mandant a conclu l'opération en privant le mandataire de la rémunération à laquelle il aurait pu légitimement prétendre.
6. Pour condamner Mme G... à payer à l'agent immobilier une certaine somme en application de la clause pénale, l'arrêt énonce qu'aux termes de cette clause, en cas de non-respect des obligations mises à la charge du mandant, comme l'engagement de signer aux prix, charges et conditions convenues, toute promesse de vente ou tout compromis de vente, avec tout acquéreur présenté par le mandataire, le mandant s'engage à verser au mandataire une indemnité compensatrice forfaitaire d'un montant égal à celui de la rémunération prévue, et que Mme G... n'a pas respecté cet engagement.
7. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la vente n'avait pas été effectivement conclue, de sorte que l'agent immobilier ne pouvait se prévaloir des dispositions de la clause litigieuse, la cour d'appel a violé le texte susvisé.




Com. 25 novembre 2020 n° 18-26.219

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 691 F-D
Pourvoi n° W 18-26.219







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société Margot, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° W 18-26.219 contre l'arrêt rendu le 6 novembre 2018 par la cour d'appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Corbion, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , exerçant sous l'enseigne Alarcon métal, défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Margot, de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de la société Corbion, et l'avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué, statuant en matière de référé (Poitiers, 6 novembre 2018), le 8 avril 2016, la société Corbion, entreprise de serrurerie et de métallerie, et la société Margot, maître de l'ouvrage, ont conclu un marché de travaux privés, pour le lot n° 6B - serrurerie métallerie - dans le cadre de la rénovation d'un ensemble immobilier et sa transformation en un hôtel quatre étoiles.
2. Invoquant le non-respect des délais contractuels, la société Margot a déduit une somme de 6 000 euros de la situation n° 2 de travaux du 28 juillet 2016 qu'elle payait.
3. La société Corbion a assigné la société Margot en référé en paiement, notamment, d'une provision au titre du remboursement des pénalités de retard indûment retenues. La société Margot a présenté une demande reconventionnelle de livraison et installation de quatre jardinières manquantes.
Examen des moyens
Sur le second moyen, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. La société Margot fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Corbion la somme de 6 000 euros au titre des pénalités indûment retenues, alors « que dans le cas où l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge statuant en référé peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution d'une obligation ; qu'en ordonnant la restitution de la retenue pour pénalité de retard quand la société Margot faisait valoir qu'une expertise avait été ordonnée à sa demande le 5 avril 2018 par le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de La Rochelle destinée à déterminer notamment les responsabilités dans le retard de chantier, la cour d'appel a tranché une contestation sérieuse en violation de l'article 873 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 873 du code de procédure civile :
6. Selon le second alinéa de ce texte, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
7. Pour condamner la société Margot au paiement d'une provision de 6 000 euros, l'arrêt constate le peu de cohérence de certains documents versés aux débats puis retient qu'à la lecture des pièces contractuelles, il n'est pas établi que l'obligation de livraison ait pu exister avant la date du 8 juillet 2016 et qu'en outre, si les modalités pour retard d'exécution sont effectivement prévues à la page 11 du contrat, les modalités de calcul des pénalités ne sont pas expliquées par la société Margot.
8. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a tranché une contestation sérieuse, a violé le texte susvisé.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-21.369

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1088 F-D
Pourvoi n° V 19-21.369
Aide juridictionnelle totale en demandeau profit de M. C....Admission du bureau d'aide juridictionnelleprès la Cour de cassationen date du 20 juin 2019.




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
M. S... C..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° V 19-21.369 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2018 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme J... Q..., domiciliée [...] , prise en qualité de mandataire liquidateur de la société AZ Burger,
2°/ à l'AGS CGEA de Châlon-sur-Saône, délégation Unedic-AGS, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Pecqueur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. C..., de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de Mme Q..., ès qualités, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pecqueur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 8 juin 2018), M. C..., engagé par contrat de travail à durée indéterminée du 14 mars 2014 par la société AZ burger (la société), a rompu la période d'essai le 28 mai 2014 et saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement de diverses sommes.
2. La société a été placée en redressement judiciaire par jugement du 10 décembre 2015 puis en liquidation judiciaire le 15 mars 2018 par le tribunal de commerce de Villefranche-Tarare.
Examen des moyens
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
3. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour non-respect de la durée légale du travail et des repos, alors « que le défaut de respect du repos quotidien de onze heures cause nécessairement un préjudice au salarié dont le juge doit fixer la réparation ; qu'en constatant l'existence d'un manquement de l'employeur à cette obligation tout en retenant pour rejeter la demande de dommages-intérêts formulée à ce titre par M. S... C... que ce dernier n'établissait pas l'existence d'un préjudice, la cour d'appel a violé l'article L. 3131-1 du code du travail et l'article 3 de la directive n° 2003/88/CE. »
Réponse de la Cour
4. L'existence d'un préjudice et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d'appréciation des juges du fond.
5. La cour d'appel, par une appréciation souveraine, a estimé que le salarié ne produisait aucun élément de nature à établir l'existence d'un préjudice.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes au titre du rappel de salaires, de l'indemnité compensatrice de congés payés et de l'indemnité pour travail dissimulé, alors « qu'en présence d'un contrat de travail écrit, il appartient à la partie qui se prévaut de son caractère fictif d'en apporter la preuve ; qu'en écartant des éléments versés aux débats comme étant insuffisants à faire la preuve du lien de subordination quand il appartenait à l'employeur de prouver le caractère fictif du contrat de travail, l'arrêt attaqué a renversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1315 devenu 1353 du code civil :
8. Il résulte de ce texte qu'en présence d'un contrat de travail apparent, il appartient à la partie qui se prévaut de son caractère fictif d'en apporter la preuve.
9. Pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt, après avoir retenu l'existence d'un contrat de travail apparent pour la période du 3 février 2014 au 14 mars 2014, énonce que l'employeur a fait référence dans un courrier à un contrat du 14 mars 2014, sans susciter d'observations du salarié, qu'il n'existe aucun élément de nature à établir que le salarié a travaillé pour le compte et sous la subordination de la société AZ burger dès lors que le lien de subordination entre S... C... et cette entreprise ne saurait résulter de l'attestation de L... A..., ouvrier sur le chantier ni des échanges de courriels entre le salarié, le gérant de la société AZ burger et les fournisseurs en l'état inexploitables par la cour eu égard à leur contenu peu clair et que l'attestation de I... Y... ne saurait à elle seule faire la preuve du lien de subordination en cause.
10. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté l'existence d'un contrat de travail apparent, ce dont il résultait que la preuve de son caractère fictif devait être apportée par le liquidateur judiciaire, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé.




Civ.1 25 novembre 2020 n° 19-21.060 B

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1
CF


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation

Mme BATUT, président


Arrêt n° 714 FS-P+B+I
Pourvoi n° J 19-21.060



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société Chaîne thermale du soleil, société par actions simplifiée, dont le siège est 32 avenue de l'Opéra, 75002 Paris, a formé le pourvoi n° J 19-21.060 contre le jugement rendu le 27 mai 2019 par le tribunal d'instance de Manosque, dans le litige l'opposant :
1°/ à M. L... H...,
2°/ à Mme F... H...,
domiciliés tous deux [...],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de la société Chaîne thermale du soleil, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. et Mme H..., et l'avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, Kloda, Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Lavigne, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Manosque, 27 mai 2019), rendu en dernier ressort, par acte du 15 juin 2017, M. et Mme H... ont souscrit un contrat d'hébergement auprès de la société Chaîne thermale du soleil (la société) pour la période du 30 septembre 2017 au 22 octobre 2017 pour un montant total de 926,60 euros, payé le 30 septembre 2017. Le 4 octobre, M. H..., hospitalisé en urgence, a dû mettre un terme à son séjour. Mme H... a quitté le lieu d'hébergement le 8 octobre.
2. Soutenant n'avoir pu profiter des deux dernières semaines de leur séjour en raison d'une circonstance revêtant les caractères de la force majeure, M. et Mme H... ont assigné la société en résolution du contrat et indemnisation.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. La société fait grief au jugement de prononcer la résiliation du contrat à compter du 9 octobre 2017 et de la condamner au paiement d'une certaine somme, alors « que, si la force majeure permet au débiteur d'une obligation contractuelle d'échapper à sa responsabilité et d'obtenir la résolution du contrat, c'est à la condition qu'elle empêche l'exécution de sa propre obligation ; qu'en retenant que l'état de santé de M. H... était constitutif d'une situation de force majeure de nature à justifier la résolution du contrat et la condamnation de la société à lui reverser les sommes perçues, quand ces difficultés de santé ne l'empêchaient aucunement d'exécuter l'obligation dont il était débiteur, mais uniquement de profiter de la prestation dont il était créancier, le tribunal d'instance a violé l'article 1218 du code civil. »

Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
4. M. et Mme H... contestent la recevabilité du moyen. Ils soutiennent qu'il serait contraire aux arguments développés par la société devant le tribunal d'instance.
5. Cependant la société a contesté l'application de la force majeure dans ses conclusions.
6. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu l'article 1218, alinéa 1, du code civil :
7. Aux termes de ce texte, il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur.
8. Il en résulte que le créancier qui n'a pu profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat en invoquant la force majeure.
9. Pour prononcer la résiliation du contrat à compter du 9 octobre 2017, après avoir énoncé qu'il appartenait aux demandeurs de démontrer la force majeure, le jugement retient que M. H... a été victime d'un problème de santé imprévisible et irrésistible et que Mme H... a dû l'accompagner en raison de son transfert à plus de cent trente kilomètres de l'établissement de la société, rendant impossible la poursuite de l'exécution du contrat d'hébergement.
10. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que M. et Mme H... avaient exécuté leur obligation en s'acquittant du prix du séjour, et qu'ils avaient seulement été empêchés de profiter de la prestation dont ils étaient créanciers, le tribunal a violé le texte susvisé.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-17.246

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1116 F-D
Pourvoi n° P 19-17.246



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
1°/ M. N... G..., domicilié [...] ,
2°/ le syndicat CFDT de la métallurgie de l'Ain, dont le siège est [...] ,
ont formé le pourvoi n° P 19-17.246 contre l'arrêt rendu le 29 mars 2019 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige les opposant à la société Schneider Electric Telecontrol, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. G... et du syndicat CFDT de la métallurgie de l'Ain, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Schneider Electric Telecontrol, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 29 mars 2019), M. G... a été engagé par la société Schneider Electric Telecontrol, à compter du 13 juin 1997. En dernier lieu, il occupait le poste d'ingénieur chargé d'essais, statut cadre. La rémunération du salarié était composée d'une partie fixe et d'une partie variable, dénommée short term incentive plan, dépendant d'objectifs fixés unilatéralement par l'employeur.
2. Le 17 juin 2015, le salarié et le syndicat CFDT de la métallurgie de l'Ain (le syndicat) ont saisi la juridiction prud'homale aux fins de solliciter des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et des rappels de salaire.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
2. Le salarié et le syndicat font grief à l'arrêt de ne condamner l'employeur à payer au salarié que certaines sommes à titre de rappel de rémunération variable de l'année 2013 outre les congés payés afférents et de le débouter du surplus de ses demandes au titre de la rémunération variable, alors « que lorsque la part variable de la rémunération prévue au contrat de travail dépend de la réalisation d'objectifs fixés unilatéralement par l'employeur et que celui-ci s'abstient de préciser au salarié les objectifs à réaliser ainsi que les conditions de calcul vérifiables, et en l'absence de période de référence dans le contrat de travail, la totalité du potentiel de cette rémunération variable est due, en application du taux maximum d'atteinte des objectifs, et ce, que son versement soit ou non obligatoire ; que selon les objectifs fixés, un taux d'atteinte des objectifs de 200 % correspondait à un bonus cible de 12 %, tandis qu'une atteinte des objectifs à 100 % correspondait à un bonus cible de 6 % ; que pour l'année 2013, la cour d'appel a relevé que les objectifs assignés à l'exposant n'étaient pas complètement arrêtés le 29 novembre 2013, alors qu'ils étaient censés lui être communiqués avant le 31 mai de chaque année, ce dont il résultait que celui-ci était en droit de prétendre au bonus maximum de 12 %, correspondant à un taux d'atteinte des objectifs de 200 % ; qu'en limitant pour l'année 2013 la prime d'objectifs au bonus cible de 6 %, correspondant à un taux d'atteinte des objectifs de 100 %, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations et, partant, a violé l'article 1134, alinéa 2, du code civil alors applicable, devenu l'article 1193 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
4. Selon ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.
5. Pour limiter à certaines sommes le rappel de rémunération variable de l'année 2013, outre les congés payés afférents, et débouter le salarié du surplus de ses demandes au titre de la rémunération variable, l'arrêt retient que le salarié fait valoir que les objectifs lui étaient communiqués très tardivement, ce dont il rapporte la preuve en ce qui concerne l'année 2013, par la production des courriels de son supérieur hiérarchique qui démontrent qu'ils n'étaient pas complètement arrêtés le 29 novembre 2013, alors qu'ils étaient censés lui être communiqués avant le 31 mai de chaque année. Il ajoute que le salarié sollicite, en conséquence de l'inopposabilité des objectifs des années 2011 à 2014, le versement du bonus cible maximum de 12 %, lequel correspond à un taux d'atteinte des objectifs de 200 %. Il en déduit que l'inopposabilité des objectifs servant à la détermination du montant de la rémunération variable a pour conséquence le paiement de l'intégralité du montant de cette rémunération variable, soit en l'espèce à l'équivalent du bonus cible de 6 % correspondant à 100 % d'atteinte de ses objectifs et pas au-delà.
6. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté l'inopposabilité au salarié des objectifs servant à la détermination du montant de la rémunération variable pour l'année 2013, de sorte que celle-ci devait lui être versée intégralement à hauteur du bonus cible maximum de 12 %, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé.
Sur les deuxième et troisième moyens réunis
Enoncé du moyen
7. Le salarié et le syndicat font grief à l'arrêt de les débouter leurs demandes de dommages-intérêts, alors :
« 1°/ que la cassation à intervenir sur les chefs de dispositifs concernant les rappels de salaire au titre de la rémunération variable s'étendra au chef de dispositif relatif aux dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, en application de l'article 1134, devenu l'article 1103 du code civil, l'article L. 1222-1 du code du travail, ensemble les articles 624 et 625 du code de procédure civile ;
2°/ que la méconnaissance des règles d'attribution de la rémunération variable cause un préjudice à l'intérêt collectif des salariés que le syndicat représente et dont il est bien-fondé à demander réparation ; que la cassation sur le premier moyen relatif aux rappels de salaire à ce titre entraînera la censure par voie de conséquence du chef ici querellé, en application des articles L. 2131-1 et L. 2132-3 du code du travail, de l'article 1134, alinéa 2, du code civil applicable à l'époque des faits, devenu l'article 1193 du code civil, ensemble les articles 624 et 625 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
8. La cassation à intervenir sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif ayant rejeté les demandes de dommages-intérêts du salarié et du syndicat, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-11.853

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
IK


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1103 F-D
Pourvoi n° B 19-11.853
Aide juridictionnelle totale en défenseau profit de M. D....Admission du bureau d'aide juridictionnelleprès la Cour de cassationen date du 9 août 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société Domaine de Bellegarde, société civile particulière, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° B 19-11.853 contre l'arrêt rendu le 29 novembre 2018 par la cour d'appel de Caen (chambre sociale, section 1), dans le litige l'opposant à M. S... D..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Domaine de Bellegarde, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. D..., après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sornay, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 29 novembre 2018), M. D... a été engagé à compter du mois d'octobre 2008 par la société Domaine de Bellegarde (la société), dont le gérant était M. X... , en qualité de « gardien-homme de toutes mains » dans le cadre d'un contrat de travail à temps partiel de 15 heures par mois, soumis à la convention collective nationale des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999.
2. Ayant démissionné de ses fonctions à compter du 24 juin 2015, le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 29 septembre 2015 afin d'obtenir notamment la condamnation de l'employeur à lui payer un rappel d'heures complémentaires et les congés payés afférents ainsi que la requalification de sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse et la condamnation de l'employeur à lui payer diverses sommes à titre d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses trois premières branches, ci-après annexé
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen unique pris en sa sixième branche
Enoncé du moyen
4. La société fait grief à l'arrêt attaqué de la condamner à payer au salarié la somme de 22 200 euros nets au titre d'arriérés de salaire sur la base de 14 euros/heure et les congés payés afférents, alors « que le juge ne doit pas dénaturer les écrits produits devant lui ; qu'au cas présent la société produisait des bulletins de paie CESU sur lesquels l'identité de l'employeur était expressément indiquée comme étant ''Monsieur L... X... '', domicilié [...] '' ; qu'en considérant que ces bulletins de paie émanaient de la société, dont le siège est ''[...] '' pour en déduire que ''l'employeur produisait des éléments contradictoires sur la durée de travail effective du salarié'', la cour d'appel a dénaturé les bulletins de salaire CESU produits devant elle, en violation du principe susvisé. »
Réponse de la Cour
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :
5. Pour condamner l'employeur à verser au salarié une certaine somme à titre de rappels de salaire outre congés payés afférents, l'arrêt retient que si les récapitulatifs mensuels des heures travaillées, qui portent la signature du salarié et la mention manuscrite « certifié exact », indiquent que le salarié devait accomplir son temps partiel de 15 heures par mois à raison de 3,75 heures par semaine et si les bulletins de paye portent uniformément une durée mensuelle de 15 heures, ces derniers sont remis en question par les bulletins de paye CESU communiqués par l'employeur qui mentionnent parfois un nombre de 20 heures mensuelles accomplies et un taux horaire de 12 euros, alors qu'il s'agit d'un système déclaratif.
6. En statuant ainsi, alors que les bulletins de paie CESU, produits par l'employeur pour établir que le salarié occupait simultanément un autre emploi, mentionnaient en qualité d'employeur le nom personnel de M. X... et non celui de la société, la cour d'appel, qui en a dénaturé les termes clairs et précis, a violé le principe susvisé.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-14.275

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
IK


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle sans renvoi

M. SCHAMBER, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1104 F-D

Pourvois n°J 18-20.412B 18-20.428J 19-14.275 JONCTION





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
I - La société [...] , société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° J 18-20.412, contre l'arrêt rendu le 30 mai 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 10) dans le litige l'opposant :
1°/ à M. H... K..., domicilié [...]
2°/ à Pôle emploi Ile-de-France, dont le siège est [...]
défendeurs à la cassation.
II. M. H... K... a formé le pourvoi n° B 18-20.428 contre le même arrêt dans le litige l'opposant à la société [...] , défenderesse à la cassation.
III. La société [...] a formé le pourvoi n° J 19-14.275, contre les arrêts rendus le 30 mai 2018 et 13 février 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 10) dans le litige l'opposant :
1°/ à M. H... K...,
2°/ à Pôle emploi Ile-de-France,
3°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié [...]
défendeurs à la cassation.
La demanderesse au pourvoi n° Y 18-20.412 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le demandeur au pourvoi n° B 18-20.428 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi n° Y 18-20.412 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société [...] , de la SCP Didier et Pinet, avocat de M. K..., après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n°J 18-20.412, B 18-20.428 et J 19-14.275 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon les arrêts attaqués (Paris, 30 mai 2018 et 13 février 2019) rendus sur renvoi après cassation (Soc., 15 décembre 2016, pourvoi n° 15-15.046), M. K... a été engagé le 1er septembre 1979 en qualité de conseiller de direction par la société [...] . Au dernier état de la relation de travail, il occupait les fonctions de vice-président.
3. Le 14 décembre 2009, le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la résiliation judiciaire du contrat de travail. Il a été licencié le 2 juillet 2010.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, le septième moyen, pris en ses deux dernières branches du pourvoi n° J 18-20.412, le second moyen du pourvoi n° J 19-14.275
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner à la cassation.
Sur le deuxième moyen du pourvoi n° J 18-20.412
Enoncé du moyen
5. L'employeur fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables les demandes tendant à remettre en cause le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail et de le condamner au paiement de sommes en conséquence d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que si par principe la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce, elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'en jugeant que faute pour la Cour de cassation d'avoir cassé l'arrêt confirmatif en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire du contrat en lui faisant produire les conséquences d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, elle ne pouvait plus connaître de cet aspect du litige qui était revêtu de l'autorité de chose jugée, cependant que prononcée en raison du non-paiement intégral des bonus dus, la résiliation était dans un lien de dépendance nécessaire avec le chef de dispositif expressément censuré relatif au rappel de salaire au titre de ce bonus, en sorte que cette demande de résiliation devait être de nouveau examinée, la cour d'appel a violé les articles 624 et 625, alinéa 1er, du code de procédure civile et 1351 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
6. Dans son arrêt du 20 janvier 2015, la cour d'appel de Paris a dit que l'arriéré de paiement de bonus, dont il est ordonné le paiement, et le retard apporté au paiement du bonus 2005 versé en juillet 2010 alors que la société était mise en demeure depuis octobre 2009 de payer des arriérés de bonus, justifiaient le prononcé de la résiliation judiciaire.
7. Dans le dispositif de sa décision, elle a ordonné le paiement de la somme de 75 000 euros à titre de rappel de salaire au titre des bonus pour les années 2004/2005.
8. Ce chef de dispositif a été cassé par arrêt rendu par la chambre sociale de la Cour de cassation le 15 décembre 2016.
9. Il en résulte que, contrairement à ce qui est soutenu par le moyen, la résiliation judiciaire du contrat de travail n'était pas uniquement justifiée par le non-paiement intégral des bonus mais également par le retard dans leur paiement en sorte que, nonobstant la cassation sur le chef de dispositif condamnant l'employeur au paiement de bonus, la décision de résiliation, qui subsistait pour d'autres motifs, ne se trouvait pas en lien de dépendance nécessaire avec le chef de dispositif cassé.
10. Le moyen, inopérant, n'est donc pas fondé.
Sur le troisième moyen du pourvoi n° J 18-20.412
Enoncé du moyen
11. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à une certaine somme au titre de rappels de salaire au titre des bonus dus pour les années 2004 à 2010, alors :
« 1°/ que tenus de motiver leur décision, les juges du fond doivent préciser l'origine de leurs constatations ; qu'en l'espèce, pour dire que le versement du bonus annuel alloué au salarié revêtait les caractères d'un usage, la cour d'appel a affirmé péremptoirement, par motifs propres, qu' ''il est patent'' que sur la période 2000 à 2005, les vice-présidents avaient perçu régulièrement des bonus évoluant généralement en fonction de leur rémunération fixe et présentant des pourcentages constants hormis pour deux salariés en raison des circonstances ponctuelles et, par motifs adoptés, que l'attribution de ce bonus n'était conditionnée ni par les résultats de l'entreprise, ni par la performance du salarié ; que cependant ces circonstances étaient expressément contestées par l'employeur qui produisait de nombreux éléments, dont un constat d'huissier, de même que les bulletins de paie des salariés concernés faisant apparaître que, loin de connaître une progression constante, les bonus versés avaient varié à la hausse comme à la baisse, et ce fortement, qu'ils représentaient un pourcentage de la rémunération distinct selon les salariés et qu'il n'avait jamais correspondu à un montant fixe, l'employeur fournissant en outre diverses pièces dont il résultait que ''les bonus ne constituaient en aucun cas une forme de 13ème mois'', qu'ils étaient ''discrétionnaire[s]'' ainsi que le salarié l'avait lui-même reconnu, dans une note manuscrite de mars 2005, en indiquant ''en plus du salaire, un bonus peut éventuellement être attribuéA chaque niveau hiérarchique, le bonus résulte de la performance globale du cabinet, au cours de l'année, de la politique de distribution décidée par la Direction, de la performance individuelle du consultant'' ; qu'en procédant sur ces différents points, par voie d'affirmation péremptoire, malgré l'existence d'une contestation entre les parties et l'offre de preuve fournie par l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que le juge ne peut retenir l'existence d'un usage sans caractériser que celui-ci remplit les conditions de fixité, de constance et de généralité ; qu'en l'espèce, pour dire que le versement du bonus annuel alloué au salarié revêtait les caractères d'un usage, la cour d'appel s'est bornée à constater que les vice-présidents avaient régulièrement perçu des bonus annuels évoluant ''généralement'' en fonction de leur rémunération fixe et présentant des pourcentages ''constants'' ; qu'en statuant ainsi, sans faire ressortir que les progression enregistrées, de même que les ratios salaire/bonus constatés, au demeurant non quantifiés, étaient communs à tous les vice-présidents, et à tout le moins à une multitude d'entre eux, de sorte que des règles prédéterminées pouvaient être identifiées, la cour d'appel qui a statué par des motifs impropres à caractériser que le versement du bonus litigieux revêtait un critère de fixité, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et L. 1221-1 du code du travail ;
3°/ que la condition de fixité de l'usage doit être appréciée non pas au regard de la situation individuelle du salarié mais au regard de la collectivité des salariés bénéficiant de l'avantage litigieux ; que pour dire que le versement du bonus litigieux constituait un usage, les premiers juges ont constaté que ce bonus avait régulièrement progressé jusqu'à représenter, pendant près de vingt ans, plus d'un tiers du salaire du salarié ; qu'en statuant ainsi, sans constater que l'ensemble des personnes relevant de la même catégorie que l'intéressé avait vu leur bonus connaître une évolution strictement comparable, la cour d'appel qui, par motifs réputés adoptés, ne s'est déterminée qu'au regard de la situation personnelle du salarié, a statué par un motif inopérant et a privé ce faisant sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et L. 1221-1 du code du travail ;
4°/ que le salarié ne peut prétendre à un rappel de salaire que sous déduction des sommes déjà perçues à ce titre ; qu'il ressort en l'espèce des propres constatations de l'arrêt attaqué que le salarié avait perçu, au titre du bonus 2006, une somme de 50 000 euros ; qu'en se limitant dès lors à entériner la condamnation prononcée par les premiers juges qui avaient alloué au salarié, au titre bonus 2006, le montant maximal de celui-ci, soit 165 000 euros, sans déduire de cette somme la part du bonus dont elle avait expressément constaté le versement, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences de ses constatations, a violé les articles 1134 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et L. 1221-1 du code du travail ;
5°/ que s'agissant d'une prime annuelle, le droit à son paiement, en tout ou partie, pour un salarié ayant quitté l'entreprise, quel qu'en soit le motif, avant la date de versement, ne peut résulter que du contrat, d'une convention ou d'un usage dont il appartient au salarié de rapporter la preuve ; qu'en l'espèce, la société [...] faisait subsidiairement valoir que sauf à démontrer l'existence d'un usage en ce sens, le salarié ne pouvait prétendre au paiement proratisé du bonus 2010 dès lors qu'il avait été licencié le 2 juillet 2010, soit avant la date de son versement lequel intervenait en décembre ou en janvier de l'exercice suivant ; qu'en se bornant à entériner le montant de la condamnation prononcée par les premiers juges, ceux-ci ayant alloué au salarié, au titre du bonus 2010, une somme de 82 500 euros évaluée au prorata de son temps de présence dans l'entreprise, sans caractériser l'existence d'un usage ou d'une convention justifiant le paiement de ce bonus prorata temporis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et L. 1221-1 du code du travail ;
6°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que dans ses conclusions, oralement reprises, la société [...] contestait les calculs retenus par les premiers juges, en soulignant qu'ils étaient arrêtés sur une base erronée, le bonus du salarié ne pouvant excéder un taux compris entre 13 % et 15 %, ni être calculé au regard du bonus 2003, cette année correspondant au meilleur chiffre d'affaires jamais atteint par l'entreprise, l'employeur soulignant enfin que le niveau de bonus retenu à hauteur de 165 000 euros était sans commune mesure avec celui versé aux autres vice-présidents et sans rapport avec les performances du salarié et les capacités financières de l'entreprise ; qu'en se bornant à entériner les condamnations prononcées par les premiers juges sans répondre aux contestations élevées à leur encontre aboutissant à les réduire à une somme subsidiaire maximale de 75 000 euros, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
12. La cour d'appel qui, a, d'abord au terme d'une analyse des éléments produits, sans statuer par motifs péremptoires, retenu que tous les vice-présidents de la société avaient, pendant de nombreuses années, avant et après l'année 2003, bénéficié d'un bonus dans des conditions constantes pour chacun d'eux évoluant suivant un pourcentage en rapport avec leur rémunération fixe, a pu en déduire que le salarié rapportait la preuve de l'existence d'un usage présentant les caractères de généralité, constance et fixité.
13. La cour d'appel qui, ensuite, pour déterminer le montant du bonus dû au salarié a, au terme d'une appréciation souveraine des éléments produits et sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, retenu que, pour les années postérieures à l'année 2003, le bonus représentait une proportion de l'ordre de 50 % de la rémunération fixe du salarié, a légalement justifié sa décision.
14. La cour d'appel qui, enfin, pour calculer le montant des sommes dues au salarié a retenu que, pour l'année 2006 le bonus du salarié avait été limité à 50 000 euros, sans constater, ainsi que le soutient le moyen, que celui-ci avait été payé et qui, pour l'année 2010, a, alors que l'employeur soutenait, sans offre de preuve, qu'aucune prime n'était versée aux salariés qui avaient quitté la société avant la fin d'année, fixé le montant de la rémunération variable due en vertu d'un usage, dont elle avait retenu l'existence, à proportion de la rémunération fixe versée au salarié pour l'année 2010, justifié sa décision.
15. Le moyen, qui en sa troisième branche est inopérant comme critiquant des motifs non adoptés par la cour d'appel, n'est donc pas fondé.
Sur le premier moyen du pourvoi n° B 18-20.428
Enoncé du moyen
16. Le salarié fait grief à l'arrêt de limiter à une certaine somme le montant dommages-intérêts alloués pour licenciement sans cause réelle et sérieuse alors :
« 1°/ que dans ses conclusions d'appel M. K... justifiait du préjudice financier subi en raison de son licenciement ; il faisait valoir que compte tenu des plafonds d'indemnisation de l'assurance chômage, il avait perçu pendant trois années de prise en charge une somme totale de 210 349,50 euros nets (au lieu d'une rémunération nette de 1 397 937 euros sur trois ans), et qu'à l'issue de cette période, n'ayant pas retrouvé d'emploi il n'a perçu aucun revenu jusqu'à la date de prise d'effet de sa retraite à taux plein, soit le 1er avril 2014 ; qu'en conséquence l'intégralité de son préjudice financier s'élevait à la somme de 1 459 408 euros nets, soit 1 677 480 euros pour tenir compte des charges sociales ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, déterminantes pour l'issue du litige, la cour d'appel privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ qu'à l'appui de ses conclusions, M. K... produisait une attestation pôle emploi, un relevé de situation au 19 octobre 2010, les justificatifs des allocations perçues en 2011, 2012 et 2013, l'avis de prise en charge de l'ARE ; qu'en limitant l'indemnité allouée à M. K... à six mois de salaire, sans avoir procédé à aucune analyse, même sommaire, de ces éléments de nature à justifier l'ampleur du préjudice financier subi, la cour d'appel a derechef violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu'à l'appui de sa demande, M. K... produisait deux études comparatives de jurisprudence, de surcroît issues de la même juridiction, relatives aux indemnités allouées à des cadres de plus de 15 ans d'ancienneté, dans des entreprises comportant plus de 11 salariés, après la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ou après un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'il résultait de ces études que les salariés avaient tous obtenu entre 12 et 18 mois de salaire ; qu'en s'abstenant d'examiner ces documents, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que les juges sont tenus de motiver leur décision et ne peuvent se contenter d'une motivation de pure forme ; que pour limiter les dommages et intérêts à 270 000 euros, soit le minimum de six mois de salaire prévu par l'article L. 1235-3 du code du travail, la cour d'appel s'est bornée à se référer à l'effectif de l'entreprise, aux circonstances de la rupture, au montant de la rémunération (44 634 euros), à l'âge du salarié, son ancienneté (30 ans et 10 mois) à sa capacité à trouver un nouvel emploi et aux conséquences du licenciement à son égard tels qu'ils résultent des pièces et explications fournies ; qu'en statuant de la sorte, par une motivation de pure forme, sans viser ni identifier les éléments du dossier sur lesquels elle se fondait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
5°/ qu'aux termes de l'article L. 1235-1 du code du travail tel qu'issu de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, le juge ''justifie dans le jugement qu'il prononce le montant des indemnités qu'il octroie'' en cas de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; qu'à l'appui de sa décision fixant le montant des dommages et intérêts alloués à M. K... en réparation du préjudice subi du fait de son licenciement à l'indemnité minimale de six mois de salaire, la cour d'appel s'est bornée à énumérer un certain nombre de critères tenant notamment à l'ancienneté du salarié, à son âge, aux circonstances de la rupture et à sa capacité à trouver un nouvel emploi ; qu'en statuant ainsi sans justifier concrètement son appréciation en fonction des données de l'espèce, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1235-1 du code du travail ;
6°/ que la limitation de l'indemnité allouée au salarié en considération de son âge constitue une discrimination en raison de l'âge ; que pour limiter à six mois de salaire l'indemnité allouée à M. K... en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, la cour d'appel a pris expressément en considération l'âge du salarié ; qu'en statuant ainsi sans établir que ce critère était légitime et sans justifier en quoi l'âge du salarié pouvait conditionner le montant de l'indemnité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1132-1 et L. 1235-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
17. Le moyen pris en ses cinq premières branches ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation des juges du fond qui, appréciant la situation du salarié et sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, ont, sans statuer par une motivation de pure forme, souverainement fixé le montant des dommages-intérêts alloué en réparation du préjudice subi par la perte injustifiée de son emploi.
18. Il ne ressort pas des motifs retenus par la cour d'appel que le montant des dommages-intérêts alloué a été limité en considération de l'âge du salarié, le moyen, en sa sixième branche, manque par le fait qui lui sert de base.
19. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur les quatrième, cinquième, sixième et septième moyens, ce dernier pris en sa première branche, réunis, du pourvoi n° J 18-12.412
Enoncé du moyen
20. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement de certaines sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents, d'indemnité conventionnelle de licenciement, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des dommages-intérêts pour préjudice moral lié au harcèlement moral, des sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, alors que :
« 1°/ la cassation à intervenir de l'arrêt en ce qu'il a condamné la société [...] à verser au salarié une somme à titre de rappel de bonus s'étendra au chef de dispositif ayant condamné celle-ci à lui payer une indemnité compensatrice de préavis, une indemnité conventionnelle de licenciement, au regard d'un salarie mensuel brut après intégration dudit bonus, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°/ la cassation à intervenir de l'arrêt en ce qu'il a condamné la société [...] à verser au salarié une somme à titre de rappel de bonus s'étendra au chef de dispositif ayant condamné celle-ci à lui payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, appréciée au regard ''du montant de la rémunération versée au salarié (44 634 euros)'', en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
3°/ la cassation à intervenir de l'arrêt en ce qu'il a jugé que l'employeur avait irrégulièrement supprimé le bonus dû au salarié s'étendra nécessairement au chef de l'arrêt ayant retenu que ce fait faisait présumer, cumulé à d'autres, l'existence d'un harcèlement moral, en application de l'article 624 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
21. Le troisième moyen du pourvoi n° J 18-20.412 ayant été rejeté, le moyen pris d'une cassation par voie de conséquence, est privé de portée.
Sur le premier moyen du pourvoi n° J 19-14.275
Enoncé du moyen
22. L'employeur fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en rectification d'erreur matérielle, en omission de statuer, dit n'y avoir lieu à révision, de le débouter de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de le condamner aux dépens, alors que « la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui en est la suite, l'application ou l'exécution ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir de l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 30 mai 2018 ayant condamné l'employeur à payer à M. K... la somme de 897 500 € brut de rappels de salaire au titre des bonus dus pour les années 2004, 2005, 2006, 2007, 2008, 2009 et 2010 et à lui payer la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral en lien avec le harcèlement moral (pourvoi n°J 18-20.412) entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt présentement attaqué en ce qu'il a rejeté les requêtes en rectification d'erreur matérielle et en omission de statuer de la société [...] concernant les rappels de bonus et a dit n'y avoir lieu à réviser l'arrêt en ce qu'il a alloué à M. K... des dommages-intérêts en réparation du préjudice consécutif au harcèlement, en application de l'article 625 du code de procédure civile. »




Réponse de la Cour
23. Les troisième et septième moyens du pourvoi n° J 18-20.412 ayant été rejetés, le premier moyen du pourvoi, tiré d'une cassation par voie de conséquence, est sans portée.
Mais sur le second moyen du pourvoi n° B 18-20.428, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
24. Le salarié fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il condamne l'employeur à lui verser des dommages-intérêts pour préjudice moral, alors « que la censure qui s'attache à l'arrêt de cassation partielle est limitée à la portée du moyen qui lui sert de base et laisse subsister les dispositions non attaquées par le pourvoi, sauf les cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'en infirmant le jugement de première instance en ce qu'il a alloué à M. K... 30 000 euros de dommages-intérêts pour préjudice moral quand la cassation partielle de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 20 janvier 2015, ''seulement en ce qu'il condamne la société [...] à payer à M. K... les sommes de 75 000 euros à titre de rappel de salaire au titre des bonus annuels, et de 363 163,75 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, en ce qu'il limite les sommes allouées à M. K... à 92 652 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, à 9 265 euros au titre des congés payés afférents, à 300 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, en ce qu'il déboute M. K... du surplus de sa demande de rappel de salaire au titre des bonus annuels et de sa demande de dommages-intérêts pour harcè
Réponse de la Cour
Vu les articles 623, 624 et 625 du code de procédure civile :
25. Aux termes de l'article 624 du code de procédure civile la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire.
26. Par jugement du 5 septembre 2012, le conseil de prud'hommes de Paris a, en plus de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse fixée à 300 000 euros, alloué au salarié 30 000 euros de dommages-intérêts pour préjudice moral en retenant que les circonstances particulières qui avaient entouré la rupture du contrat de travail lui avaient causé un préjudice personnel distinct des dommages-intérêts sanctionnant le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
27. Par arrêt du 20 janvier 2015, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement sur ces points en retenant qu'en plus des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'éviction brutale des bureaux de l'entreprise en présence d'un huissier de justice était vexatoire et justifiait l'allocation de dommages-intérêts en raison d'un préjudice moral.
28. Dans l'arrêt du 15 décembre 2016, la Cour de cassation a rejeté le moyen de l'employeur tendant à la contestation du chef de dispositif se rapportant aux dommages-intérêts pour préjudice moral et a cassé partiellement l'arrêt rendu le 20 janvier 2015 seulement en ce qu'il condamnait l'employeur à payer au salarié des sommes à titre de rappel de salaire au titre des bonus annuels, d'indemnité conventionnelle de licenciement, limitait les sommes allouées à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre congés payés afférents, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en ce qu'il déboutait le salarié du surplus de ses demandes de rappel de salaire au titre des bonus annuels et de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral.
29. Il apparaît que la condamnation à des dommages-intérêts pour préjudice moral, se rapportant aux circonstances du départ du salarié mais non au bien fondé de la rupture, ne se trouvait pas dans un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire avec les chefs de dispositifs cassés, en sorte que la décision rendue par la cour d'appel de Paris le 20 janvier 2015 à ce titre, qui n'était pas atteinte par la cassation partielle prononcée, était devenue irrévocable.
30. En statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
31. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
32. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-21.991

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1097 F-D

Pourvois n°P 19-21.984à W 19-21.991 JONCTION





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
1°/ M. C... D..., domicilié [...] ,
2°/ M. K... T..., domicilié [...] ,
3°/ M. B... F..., domicilié [...] ,
4°/ M. K... W..., domicilié [...] ,
5°/ M. V... J..., domicilié [...] ,
6°/ M. U... S..., domicilié [...] ,
7°/ M. Y... E..., domicilié [...] ,
8°/ M. A... R..., domicilié [...] ,
ont formé respectivement les pourvois n° P 19-21.984, Q 19-21.985, R 19-21.986, S 19-21.987, T 19-21.988, U 19-21.989, V 19-21.990 et W 19-21.991 contre huit arrêts rendus le 4 juillet 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans les litiges les opposant à la société Sanofi chimie, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation commun annexé au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de M. Duval, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. D... et des sept autres demandeurs, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Duval, conseiller référendaire rapporteur, M. Ricour, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° P 19-21.984, Q 19-21.985, R 19-21.986, S 19-21.987, T 19-21.988, U 19-21.989, V 19-21.990 et W 19-21.991 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon les arrêts attaqués (Paris, 4 juillet 2018), M. D... et sept autres salariés de la société Sanofi chimie ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice d'anxiété résultant d'une exposition à l'amiante pendant l'exécution de leur contrat de travail.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. Les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leur demandes en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice d'anxiété, alors « qu'en application des règles de droit commun régissant l'obligation de sécurité de l'employeur, le salarié qui justifie d'une exposition à l'amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur, pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité, quand bien même il n'aurait pas travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ; qu'en refusant aux salariés faisant état de leur exposition aux poussières d'amiante au sein de l'établissement Vitry-sur-Seine l'indemnisation de leur préjudice d'anxiété consécutif à leur exposition, en considération du seul fait qu'ils n'avaient pas travaillé dans un établissement mentionné sur la liste ministérielle visée à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil alors applicable, ensemble les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, le premier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1389 du 22 septembre 2017, applicable au litige :
4. Il résulte de ces textes qu'en application des règles de droit commun régissant l'obligation de sécurité de l'employeur, le salarié qui justifie d'une exposition à l'amiante, générant un risque élevé de développer une pathologie grave, peut agir contre son employeur, pour manquement de ce dernier à son obligation de sécurité, quand bien même il n'aurait pas travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 modifiée.
5. Pour débouter les salariés de leurs demandes indemnitaires, les arrêts retiennent que le préjudice spécifique d'anxiété, et comme tel seul indemnisable, est établi par le seul fait pour un salarié d'avoir travaillé dans l'un des établissements mentionnés à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, ce qui rend inopérant tout débat sur la réalité pendant la période d'activité de l'intéressé d'une exposition personnelle ou non à l'amiante, de même que sur la nature ou le degré d'intensité de celle-ci. Les arrêts en déduisent que les salariés, qui ont travaillé dans un établissement ne relevant pas du dispositif de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, ne sont pas fondés en leurs demandes de dommages-intérêts.
6. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.




Soc. 25 novembre 2020 n° 18-13.772 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
IK


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

M. CATHALA, président


Arrêt n° 1122 FP-P+B+Isur le pourvoi incident

Pourvois n°R 18-13.771S 18-13.772 JONCTION





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société AGC France, société par actions simplifiée, dont le siège est 100 rue Léon Gambetta, BP 1, 59168 Boussois, a formé les pourvois n° R 18-13.771 et S 18-13.772 contre deux arrêts rendus le 19 janvier 2018 par la cour d'appel de Caen (1re chambre sociale), dans les litiges l'opposant respectivement :
1°/ à M. Q... W..., domicilié [...] ,
2°/ à M. F... T..., domicilié [...] ,
3°/ à Mme L... S..., domiciliée [...] , prise en qualité de mandataire liquidateur de la société AGC David miroiterie,


4°/ à l'AGS CGEA de Rouen, dont le siège est 73 rue de Martainville, CS 11716, 76108 Rouen cedex 1,
défendeurs à la cassation.
MM. W... et T... ont formé chacun un pourvoi incident contre les mêmes arrêts.
La demanderesse invoque, à l'appui de chacun de ses pourvois principaux, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de chacun de leur pourvoi incident, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société AGC France, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de MM. T... et W..., l'avis oral de Mme Berriat, avocat général et l'avis écrit de M. Weissmann, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 octobre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Leprieur, MM. Rinuy, Ricour, Mme Van Ruymbeke, M. Pietton, Mmes Cavrois, Pécaut-Rivolier, Monge, Richard, conseillers, Mmes Ala, Chamley-Coulet, M. Duval, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° R 18-13.771 et S 18-13.772 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon les arrêts attaqués (Caen, 19 janvier 2018), le groupe David, composé de la société David miroiterie et de la société David services, a été repris le 22 septembre 2010 par le groupe verrier japonais AGC (Asahi Glass Compagny limited). La société AGC France exerçait la présidence de la nouvelle société AGC David miroiterie venue aux droits de la société David miroiterie et ayant absorbé la société David services. Les actions de la société AGC David miroiterie étaient détenues par une autre société du groupe, également présidée par la société AGC France.
3. Les salariés non protégés ont été licenciés pour motif économique le 16 mai 2012, en raison de la cessation d'activité de la société AGC David miroiterie. Celle-ci a été placée le 9 janvier 2013 en liquidation judiciaire avec poursuite d'activité jusqu'au 9 avril 2013, Mme S... étant désignée en qualité de liquidatrice.
4. MM. W... et T..., salariés protégés, ont été licenciés le 18 avril 2013 par la liquidatrice après autorisation de l'inspecteur du travail.
5. Contestant leur licenciement, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement d'une indemnité supra conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts à l'encontre de la société AGC David miroiterie et de la société AGC France, invoquant la qualité de coemployeur de celle-ci.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi principal de la société AGC France, pris en sa première branche, ci-après annexé
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen du pourvoi principal de la société AGC France, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
7. La société AGC France fait grief aux arrêts d'allouer aux salariés une somme au titre de l'indemnité supra conventionnelle de licenciement, de dire qu'elle est tenue, in solidum avec la société AGC David miroiterie, au paiement de cette somme et de la condamner au paiement de cette somme, alors « qu'une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'en retenant, pour décider que la société AGC France avait la qualité de coemployeur des salariés à la cause, qu'à compter de février 2012, la société AGC David miroiterie a délégué à cette société la gestion de ses ressources humaines, que cette dernière lui a facturé son intervention, que dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David miroiterie a été assurée par une filiale de la société AGC France, moyennant redevance, que cette dernière société a géré sa trésorerie et, qu'entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, elle a repris les actifs de la société AGC David miroiterie à son profit ou au profit de ses filiales dans des conditions désavantageuses pour cette dernière, la cour d'appel a statué par des motifs ne permettant pas de caractériser une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société AGC David miroiterie, violant ainsi l'article L. 1221-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail :
8. La Cour juge de façon constante que, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur, à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière (Soc., 2 juillet 2014, n° 13-15.209 et s., Bull. 2014, V, n° 159, Molex ; Soc., 6 juillet 2016, n° 14-27.266 et s., Bull. 2016, V, n° 146, Continental ; Soc., 6 juillet 2016, n° 14-26.541, Bull. 2016, V, n° 145, Proma ; Soc., 6 juillet 2016, n° 15-15.481 à 15-15.545, Bull. 2016, V, n° 147, 3 Suisses).
9. Le premier de ces arrêts a ainsi été commenté par la chambre sociale (Site de la Cour, mensuel du droit du travail n° 56, juillet 2014, p. 4) : "L'arrêt confirme l'importance prise par ce critère d'immixtion dans la gestion économique et sociale de sa filiale par la société mère. Seule est susceptible d'être reprochée à une société mère son immixtion globale et permanente dans le fonctionnement de sa filiale, qui doit prendre à la fois une dimension économique et une dimension sociale. (...) Il n'y a immixtion sociale qu'à condition que la direction du personnel et la gestion des ressources humaines soient prises en main par la société mère qui ne permet plus à la filiale de se comporter comme le véritable employeur à l'égard de ses salariés. La situation de coemploi devrait donc rester exceptionnelle".
10. Il apparaît nécessaire eu égard à l'évolution du contentieux de préciser les critères applicables en la matière.
11. Il y a lieu de juger, en application de l'article L. 1221-1 du code du travail précité, que, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être qualifiée de coemployeur du personnel employé par une autre que s'il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière.
12. Pour dire que la société AGC France est tenue, in solidum avec la société AGC David miroiterie, au paiement et au remboursement de diverses sommes et la condamner au paiement de ces sommes, les arrêts retiennent que les sociétés AGC David miroiterie, AGC France, les autres filiales ou sous-filiales oeuvraient toutes dans le domaine du verre et en ce qui concerne les filiales - dont AGC David miroiterie - plus particulièrement dans la transformation du verre.
13. Les arrêts relèvent également que la société AGC France présidait, par l'intermédiaire d'un directeur, M. A..., qui la représentait, d'une part, la société AGC David miroiterie, d'autre part, la société Isatis, actionnaire de la société AGC David miroiterie. Ils constatent que M. A... avait réalisé des rapports et projets sur la situation de la société AGC David miroiterie, géré des litiges commerciaux, signé des contrats de location, de maintenance, des lettres d'embauche, d'avertissement, de rupture, ainsi qu'un accord salarial en février 2011 et accordé des congés payés, sans que soit démontrée l'existence de consignes particulières données par la société AGC David miroiterie à ces diverses occasions.
14. Les arrêts constatent encore que si les éléments produits ne permettent pas d'établir que les achats de fournitures et de machines étaient autorisés par la société AGC France ni que celle-ci fixait les prix de vente, il était imposé en revanche à la société AGC David miroiterie de traiter diverses commandes, rarement rentables, pour d'autres sociétés du groupe, qu'elle était parfois amenée à prêter ses machines à d'autres sociétés françaises du groupe et bénéficiait également de prêts.
15. Les arrêts retiennent enfin qu'il existait, entre les sociétés AGC France et AGC David miroiterie, une confusion de direction, d'intérêt et d'activités qui s'est traduite par une immixtion anormale de la société AGC France dans la gestion sociale de la société AGC David miroiterie, la seconde ayant délégué à la première, à compter de février 2012, la gestion de ses ressources humaines et la société AGC France lui ayant facturé son intervention. Ils ajoutent que cette confusion s'est également traduite par une immixtion anormale dans la gestion économique puisque, dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David miroiterie a été assurée par une autre filiale du groupe, moyennant redevance, et que la trésorerie a été gérée par la société AGC France. Les arrêts observent que, en outre, entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, la société AGC France a repris les actifs de la société AGC David miroiterie à son profit ou au profit d'autres filiales dans des conditions désavantageuses pour la société AGC David miroiterie.
16. En se déterminant ainsi, sans caractériser une immixtion permanente de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.
Et sur le moyen du pourvoi incident des salariés, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
17. Les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leur demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la légèreté blâmable de l'employeur, alors « que la décision de l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute ou à la légèreté blâmable de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui auraient causé cette faute ou légèreté blâmable dans l'exécution du contrat de travail ; qu'en déboutant le salarié au motif de l'absence de tout préjudice autre que celui découlant de la perte de son emploi qui ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires, la cour d'appel a violé l'article 1382 alors applicable du code civil, ensemble la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III. »
Réponse de la Cour
Vu le principe de séparation des pouvoirs, la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III :
18. La décision d'autorisation de licenciement prise par l'inspecteur du travail, à qui il n'appartient pas de rechercher si la cessation d'activité est due à la faute de l'employeur, ne fait pas obstacle à ce que le salarié, s'il s'y estime fondé, mette en cause devant les juridictions judiciaires compétentes la responsabilité de l'employeur en demandant réparation des préjudices que lui aurait causés une faute de l'employeur à l'origine de la cessation d'activité, y compris le préjudice résultant de la perte de son emploi.
19. Pour débouter les salariés de leur demande de dommages-intérêts au titre de la faute ou la légèreté blâmable de l'employeur les arrêts retiennent que les salariés ont été licenciés, après autorisation de l'inspection du travail, à raison de la liquidation judiciaire de l'employeur qui conduit à la fermeture définitive de son établissement et à sa cessation d'activité, ce qui implique la suppression de leur poste, et leur licenciement, aucun reclassement dans un emploi correspondant à leurs compétences n'étant possible.
20. Les arrêts constatent ensuite que les salariés soutiennent que la cessation d'activité de la société AGC David Miroiterie trouve son origine dans la faute ou la légèreté blâmable de la société et réclament des dommages-intérêts "à raison du préjudice subi", antérieur, selon eux, à la rupture de leur contrat de travail.
21. Les arrêts relèvent que, toutefois, ils caractérisent ce préjudice par le fait que "l'absence de faute et de légèreté blâmable aurait permis le maintien de l'engagement contractuel", considérant ce faisant, que leur préjudice est bien constitué par la perte de leur emploi et donc par le licenciement et n'établissent pas, ni même ne soutiennent, que la faute et la légèreté blâmable de leur employeur leur auraient occasionné un préjudice distinct.
22. Les arrêts retiennent enfin qu'en l'absence de tout préjudice autre que celui découlant de la perte d'emploi, qui ne saurait être apprécié par les juridictions judiciaires, ils seront déboutés de cette demande.
23. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le principe et les textes susvisés.




Soc. 25 novembre 2020 n° 17-19.523 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
IK


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

M. CATHALA, président


Arrêt n° 1119 FP-P+B+R+I
Pourvoi n° X 17-19.523



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
M. P... O..., domicilié au Cabinet de M. Y..., [...] , a formé le pourvoi n° X 17-19.523 contre l'arrêt rendu le 16 mars 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige l'opposant à l'Agence France Presse, organisme autonome, dont le siège est 11 à 13 place de la Bourse, 75002 Paris, défenderesse à la cassation.
L'Agence France presse a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation également annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Richard, conseiller, les observations écrites de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. O..., de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de l'Agence France Presse, les plaidoiries de de Me Grévy et celles de Me J..., l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 octobre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Richard, conseiller rapporteur, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Leprieur, MM. Rinuy, Ricour, Pietton, Mmes Capitaine, Cavrois, Pécaut-Rivolier, Monge, conseillers, Mmes Duvallet, Ala, Chamley-Coulet, M. Duval, conseillers référendaires, Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt :
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 mars 2017), M. O..., engagé par l'Agence France Presse (AFP) le 9 septembre 1991, a saisi la juridiction prud'homale le 17 février 2012 de diverses demandes en paiement. Il a fait l'objet d'une mise à pied conservatoire le 27 février 2015 et a été licencié pour faute grave le 23 mars 2015, au motif d'une usurpation de données informatiques.
Examen des moyens
Sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié et les trois moyens du pourvoi incident de l'employeur, ci-après annexés
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen du pourvoi principal du salarié, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. Le salarié fait grief à l'arrêt de juger son licenciement justifié par une faute grave et de le débouter de sa demande principale de réintégration et de ses demandes subsidiaires d'indemnité de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « qu'aux termes de l'article 32 du règlement intérieur de l'AFP, aucune sanction autre qu'un simple avertissement ne sera notifiée sans qu'aient été préalablement avisés les délégués du personnel de la catégorie de l'intéressé ; que le caractère préalable de l'information a pour finalité d'offrir au salarié une protection supplémentaire par l'assistance ou l'intervention des représentants du personnel, laquelle ne peut avoir d'effet utile que si l'information est effectuée dans un délai suffisant rendant l'assistance effective ; que la cour d'appel a relevé que les délégués du personnel avaient été avisés le 23 mars 2015 à 19 heures 38 d'un licenciement par lettre datée du 23 mars 2015 et notifiée au plus tôt le 24 mars, dans un délai lui permettant de modifier sa position ; qu'en statuant de la sorte, quand il n'était pas contesté par l'AFP que la lettre de licenciement avait été envoyée le 23 mars 2015, pour une première présentation le 24 mars 2015, de sorte que l'information des représentants du personnel effectuée postérieurement à l'envoi de la lettre de licenciement ne permettait pas au salarié de se faire assister utilement pour permettre le cas échéant à l'employeur de revenir sur sa décision, la cour d'appel a violé l'article 32 du règlement intérieur de l'AFP, ensemble l'article L. 1232-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
4. La cour d'appel qui a, d'une part, relevé que l'article 32 du règlement intérieur de la société prévoit qu'aucune sanction autre qu'un simple avertissement ne sera notifiée sans qu'aient été préalablement avisés les délégués du personnel de la catégorie de l'intéressé et, d'autre part, constaté que l'avis aux délégués du personnel avait été effectué le 23 mars 2015 et que la notification du licenciement, au sens des dispositions conventionnelles applicables, était intervenue le 24 mars 2015, en a déduit à bon droit que l'employeur avait respecté l'article 32 précité.
5. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le second moyen du pourvoi principal du salarié, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
6. Le salarié fait les mêmes griefs à l'arrêt, alors « qu'aux termes de l'article 51 de la convention d'entreprise AFP du 29 octobre 1976, les conflits individuels seront soumis à la commission paritaire amiable ; qu'il en résulte que ce texte institue une procédure particulière obligatoire permettant de rechercher une solution amiable ; qu'en jugeant qu'en cas de licenciement, sa saisine préalable par l'employeur ne constituait pas une obligation, mais qu'il appartenait seulement à la partie la plus diligente de la saisir, la cour d'appel a violé l'article 51 de la convention d'entreprise AFP du 29 octobre 1976, ensemble l'article L. 1232-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
7. Selon l'article 51 de la convention d'entreprise AFP du 29 octobre 1976, les conflits individuels seront soumis à une commission paritaire amiable, ayant uniquement une mission conciliatrice. Si l'une des parties récuse cette commission, ou si la tentative de conciliation échoue, les intéressés pourront toujours porter le différend devant toute juridiction française compétente en la matière. Le recours à la commission paritaire amiable est notifié par la partie la plus diligente à l'autre partie par lettre exposant le ou les points sur lesquels porte le litige.
8. La cour d'appel en a exactement déduit que l'employeur n'avait pas l'obligation de saisir la commission paritaire amiable préalablement au licenciement.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le second moyen du pourvoi principal du salarié, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
10. Le salarié fait grief à l'arrêt de juger son licenciement justifié par une faute grave et de le débouter de sa demande principale de réintégration et de ses demandes subsidiaires d'indemnité de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que le licenciement pour faute grave, dont la preuve incombe à l'employeur, ne peut être justifié par des éléments de preuve obtenus de façon illicite et dont la production est de ce fait irrecevable ; que constituent un moyen de preuve illicite les informations collectées, avant toute déclaration à la CNIL, par un système de traitement automatisé de données personnelles comme la collecte des adresses IP, permettant d'identifier indirectement une personne physique ou encore le traçage des fichiers de journalisation ; que la cour d'appel a retenu que les logs, fichiers de journalisation et adresses IP, qui constituaient un traçage informatique, n'étaient pas soumis à une déclaration de la CNIL, ni à une information du salarié, dès lors qu'ils n'avaient pas pour vocation première le contrôle des utilisateurs ; qu'en statuant de la sorte, par un motif inopérant, quand seule la condition de la possible identification d'une personne physique était déterminante, la cour d'appel a violé les articles 2 et 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ensemble les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail, l'article 9 du code de procédure civile et l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 2 et 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée par la loi n° 2004-801 du 6 août 2004, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données, les articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales :
11. Les adresses IP, qui permettent d'identifier indirectement une personne physique, sont des données à caractère personnel, au sens de l'article 2 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, de sorte que leur collecte par l'exploitation du fichier de journalisation constitue un traitement de données à caractère personnel et doit faire l'objet d'une déclaration préalable auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés en application de l'article 23 de la loi précitée.
12. Toutefois, ainsi que la Cour l'a déjà jugé (Soc., 9 novembre 2016, pourvoi n° 15-10.203, Bull. 2016, V, n° 209), le droit à la preuve peut justifier la production d'éléments portant atteinte à la vie personnelle d'un salarié à la condition que cette production soit nécessaire à l'exercice de ce droit et que l'atteinte soit proportionnée au but poursuivi. De même, elle a déjà jugé (Soc., 31 mars 2015, pourvoi n° 13-24.410, Bull. 2015, V, n° 68), qu'un salarié ne peut s'approprier des documents appartenant à l'entreprise que s'ils sont strictement nécessaires à l'exercice des droits de sa défense dans un litige l'opposant à son employeur, ce qu'il lui appartient de démontrer.
13. Il résulte par ailleurs de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, s'agissant plus particulièrement de la surveillance des employés sur le lieu de travail, qu'elle a estimé que l'article 8 de la Convention de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales laissait à l'appréciation des États le choix d'adopter ou non une législation spécifique concernant la surveillance de la correspondance et des communications non professionnelles des employés (CEDH, K..., 5 sept. 2017, n° 61496/08, § 119). Elle a rappelé que, quelle que soit la latitude dont jouissent les États dans le choix des moyens propres à protéger les droits en cause, les juridictions internes doivent s'assurer que la mise en place par un employeur de mesures de surveillance portant atteinte au droit au respect de la vie privée ou de la correspondance des employés est proportionnée et s'accompagne de garanties adéquates et suffisantes contre les abus (K..., précité, § 120).
14. La Cour européenne des droits de l'homme a jugé également que, pour déterminer si l'utilisation comme preuves d'informations obtenues au mépris de l'article 8 ou en violation du droit interne a privé le procès du caractère équitable voulu par l'article 6, il faut prendre en compte toutes les circonstances de la cause et se demander en particulier si les droits de la défense ont été respectés et quelles sont la qualité et l'importance des éléments en question (CEDH, 17 oct. 2019, Lopez Ribalda, n° 1874/13 et 8567/13, § 151).
15. Enfin, aux termes de l'article 13. 1 g) de la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, applicable à l'époque des faits, les États membres peuvent prendre des mesures législatives visant à limiter la portée des obligations et des droits prévus à l'article 6 paragraphe 1, à l'article 10, à l'article 11 paragraphe 1 et aux articles 12 et 21, lorsqu'une telle limitation constitue une mesure nécessaire pour sauvegarder la protection de la personne concernée ou des droits et libertés d'autrui.
16. Il y a donc lieu de juger désormais que l'illicéité d'un moyen de preuve, au regard des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée par la loi n° 2004-801 du 6 août 2004, dans sa version antérieure à l'entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données, n'entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier si l'utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d'éléments portant atteinte à la vie personnelle d'un salarié à la condition que cette production soit indispensable à l'exercice de ce droit et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi.
17. Pour juger le licenciement fondé sur une faute grave et débouter le salarié de sa demande principale de réintégration et de ses demandes subsidiaires d'indemnité de préavis et de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que selon un procès-verbal de constat d'huissier, le recoupement des informations de fichiers de journalisation extraites de données du gestionnaire centralisé de logs de l'AFP sur la journée du 30 janvier 2015 et la plage horaire de 12 heures 02 à 16 heures 02 et de l'adresse utilisée pour l'envoi des messages incriminés, a permis de constater que l'adresse IP utilisée est celle de M. O.... Il énonce également que les logs, fichiers de journalisation et adresses IP, qui constituent un traçage informatique que ne peut ignorer le salarié compte tenu de ses fonctions, ne sont pas soumis à une déclaration à la CNIL, ni ne doivent faire l'objet d'une information du salarié en sa qualité de correspondant informatique et libertés, lorsqu'ils n'ont pas pour vocation première le contrôle des utilisateurs. Il ajoute que seule la mise en oeuvre d'un logiciel d'analyse des différents journaux (applicatifs et systèmes) permettant de collecter des informations individuelles poste par poste pour contrôler l'activité des utilisateurs doit être déclarée à la CNIL en ce qu'il s'agit d'un traitement automatisé d'informations nominatives. L'arrêt en conclut que s'agissant non pas de la mise en oeuvre d'un tel logiciel, mais d'un simple traçage issu des fichiers de journalisation, pour lesquels la charte des ressources informatiques et internet en vigueur à l'AFP précise qu'ils sont conservés par l'administrateur pour une durée pouvant atteindre six mois, la preuve opposée au salarié est légale et ne procède pas d'une exécution déloyale du contrat.
18. En statuant ainsi, alors que l'exploitation des fichiers de journalisation, qui permettent d'identifier indirectement une personne physique, constitue un traitement de données à caractère personnel au sens de l'article 2 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée, et était ainsi soumise aux formalités préalables à la mise en oeuvre de tels traitements prévues au chapitre IV de ladite loi, ce dont il résultait que la preuve était illicite et, dès lors, les prescriptions énoncées au paragraphe 16 du présent arrêt invocables, la cour d'appel a violé les textes susvisés.




Soc. 25 novembre 2020 n° 18-13.769 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

M. CATHALA, président


Arrêt n° 1120 FP-P+B+R+I
Pourvoi n° P 18-13.769



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société AGC France, société par actions simplifiée, dont le siège est 100 rue Léon Gambetta, BP 1, 59168 Boussois, a formé le pourvoi n° P 18-13.769 contre l'arrêt rendu le 19 janvier 2018 par la cour d'appel de Caen (1re chambre sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. I... G..., domicilié [...] ,
2°/ à M. P... RY... , domicilié [...] ,
3°/ à M. H... T..., domicilié [...] ,
4°/ à Mme L... S..., domiciliée [...] ,
5°/ à M. R... S..., domicilié [...] ,
6°/ à M. N... M..., domicilié [...] ,
7°/ à M. U... V..., domicilié [...] ,
8°/ à M. X... O..., domicilié [...] ,
9°/ à M. JY... A..., domicilié [...] ,
10°/ à M. K... E..., domicilié [...] ,
11°/ à M. Y... B..., domicilié [...] ,
12°/ à M. Q... F..., domicilié [...] ,
13°/ à l'ATC tutelle, dont le siège est BP 70222, 14653 Carpiquet cedex, prise en qualité de curatelle renforcée de M. Q... F...,
14°/ à M. W... D..., domicilié [...] ,
15°/ à Mme GS... LU..., domiciliée [...] ,
16°/ à M. J... C..., domicilié [...] ,
17°/ à M. JA... O..., domicilié [...] ,
18°/ à M. Q... BB..., domicilié [...] ,
19°/ à M. SW... MJ..., domicilié [...] ,
20°/ à Mme JM... UN..., domiciliée [...] , prise en qualité de mandataire liquidateur de la société AGC David miroiterie,
21°/ à l'AGS-CGEA de Rouen, dont le siège est 73 rue Martainville, CS 11716, 76108 Rouen cedex,
22°/ à Pôle emploi, dont le siège est 1-5 avenue du docteur Gley, 75987 Paris cedex 20,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, les observations écrites de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société AGC France, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. G... et des dix-sept autres salariés et de l'ATC tutelle, ès qualités, les plaidoiries de Me Buk Lament et celles de Me BX..., l'avis écrit de M. Weissmann, avocat général référendaire et l'avis oral de Mme Berriat, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 octobre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, Mme Farthouat-Danon, M. Schamber, Mme Leprieur, MM. Rinuy, Ricour, Mme Van Ruymbeke, M. Pietton, Mmes Cavrois, Pécaut-Rivolier, Monge, Richard, conseillers, Mmes Ala, Chamley-Coulet, M. Duval, conseillers référendaires, Mme Berriat, avocat général, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 19 janvier 2018), le groupe David, composé de la société David miroiterie et de la société David services, a été repris le 22 septembre 2010 par le groupe verrier japonais AGC (Asahi Glass Compagny Limited). La société AGC France exerçait la présidence de la nouvelle société AGC David miroiterie venue aux droits de la société David miroiterie et ayant absorbé la société David services. Les actions de la société AGC David miroiterie étaient détenues par une autre société du groupe, également présidée par la société AGC France.
2. Les salariés non protégés ont été licenciés pour motif économique le 16 mai 2012, en raison de la cessation d'activité de la société AGC David miroiterie. Celle-ci a été placée le 9 janvier 2013 en liquidation judiciaire avec poursuite d'activité jusqu'au 9 avril 2013, Mme UN... étant désignée en qualité de liquidatrice.
3. Contestant leur licenciement, les salariés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de dommages-intérêts à l'encontre de la société AGC David miroiterie et de la société AGC France, invoquant la qualité de coemployeur de celle-ci.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La société AGC France fait grief à l'arrêt de la déclarer coemployeur avec la société AGC David miroiterie, de dire qu'elle est tenue, in solidum avec cette dernière société, au paiement et au remboursement de diverses sommes, et de la condamner au paiement de ces sommes, alors « qu'une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur à l'égard du personnel employé par une autre, hors l'existence d'un lien de subordination, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière ; qu'en retenant, pour décider que la société AGC France avait la qualité de coemployeur des salariés à la cause, qu'à compter de février 2012, la société AGC David miroiterie a délégué à cette société la gestion de ses ressources humaines, que cette dernière lui a facturé son intervention, que dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David miroiterie a été assurée par une filiale de la société AGC France, moyennant redevance, que cette dernière société a géré sa trésorerie et, qu'entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, elle a repris les actifs de la société AGC David miroiterie à son profit ou au profit de ses filiales dans des conditions désavantageuses pour cette dernière, la cour d'appel a statué par des motifs ne permettant pas de caractériser une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société AGC David miroiterie, violant ainsi l'article L. 1221-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 1221-1 du code du travail :
5. La Cour juge de façon constante que, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être considérée comme un coemployeur, à l'égard du personnel employé par une autre, que s'il existe entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion dans la gestion économique et sociale de cette dernière (Soc., 2 juillet 2014, n° 13-15.209 et s., Bull. 2014, V, n° 159, Molex ; Soc., 6 juillet 2016, n° 14-27.266 et s., Bull. 2016, V, n° 146, Continental ; Soc., 6 juillet 2016, n° 14-26.541, Bull. 2016, V, n° 145, Proma ; Soc., 6 juillet 2016, n° 15-15.481 à 15-15.545, Bull. 2016, V, n° 147, 3 Suisses).
6. Le premier de ces arrêts a ainsi été commenté par la chambre sociale (Site de la Cour, mensuel du droit du travail n° 56, juillet 2014, p. 4) : "L'arrêt confirme l'importance prise par ce critère d'immixtion dans la gestion économique et sociale de sa filiale par la société mère. Seule est susceptible d'être reprochée à une société mère son immixtion globale et permanente dans le fonctionnement de sa filiale, qui doit prendre à la fois une dimension économique et une dimension sociale. (...) Il n'y a immixtion sociale qu'à condition que la direction du personnel et la gestion des ressources humaines soient prises en main par la société mère qui ne permet plus à la filiale de se comporter comme le véritable employeur à l'égard de ses salariés. La situation de coemploi devrait donc rester exceptionnelle."
7. Il apparaît nécessaire eu égard à l'évolution du contentieux de préciser les critères applicables en la matière.
8. Il y a lieu de juger, en application de l'article L. 1221-1 du code du travail précité, que, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe ne peut être qualifiée de coemployeur du personnel employé par une autre que s'il existe, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une immixtion permanente de cette société dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière.
9. Pour déclarer la société AGC France coemployeur avec la société AGC David miroiterie, dire qu'elle est tenue, in solidum avec cette dernière société, au paiement et au remboursement de diverses sommes et la condamner au paiement de ces sommes, l'arrêt retient que les sociétés AGC David miroiterie, AGC France, les autres filiales ou sous-filiales oeuvraient toutes dans le domaine du verre et en ce qui concerne les filiales -dont AGC David miroiterie- plus particulièrement dans la transformation du verre.
10. L'arrêt relève également que la société AGC France présidait, par l'intermédiaire d'un directeur, M. KR..., qui la représentait, d'une part, la société AGC David miroiterie, d'autre part, la société Isatis, actionnaire de la société AGC David miroiterie. Il constate que M. KR... avait réalisé des rapports et projets sur la situation de la société AGC David miroiterie, géré des litiges commerciaux, signé des contrats de location, de maintenance, des lettres d'embauche, d'avertissement, de rupture, ainsi qu'un accord salarial en février 2011 et accordé des congés payés, sans que soit démontrée l'existence de consignes particulières données par la société AGC David miroiterie à ces diverses occasions.
11. L'arrêt constate encore que si les éléments produits ne permettent pas d'établir que les achats de fournitures et de machines étaient autorisés par la société AGC France ni que celle-ci fixait les prix de vente, il était imposé en revanche à la société AGC David miroiterie de traiter diverses commandes, rarement rentables, pour d'autres sociétés du groupe, qu'elle était parfois amenée à prêter ses machines à d'autres sociétés françaises du groupe et bénéficiait également de prêts.
12. L'arrêt retient enfin qu'il existait, entre les sociétés AGC France et AGC David miroiterie, une confusion de direction, d'intérêt et d'activités qui s'est traduite par une immixtion anormale de la société AGC France dans la gestion sociale de la société AGC David miroiterie, la seconde ayant délégué à la première, à compter de février 2012, la gestion de ses ressources humaines et la société AGC France lui ayant facturé son intervention. Il ajoute que cette confusion s'est également traduite par une immixtion anormale dans la gestion économique puisque, dès septembre 2010, la gestion administrative de la société AGC David miroiterie a été assurée par une autre filiale du groupe, moyennant redevance, et que la trésorerie a été gérée par la société AGC France. L'arrêt observe que, en outre, entre la fermeture du site en avril 2012 et la liquidation judiciaire en janvier 2013, la société AGC France a repris les actifs de la société AGC David miroiterie à son profit ou au profit d'autres filiales dans des conditions désavantageuses pour la société AGC David miroiterie.
13. En se déterminant ainsi, sans caractériser une immixtion permanente de la société AGC France dans la gestion économique et sociale de la société employeur, conduisant à la perte totale d'autonomie d'action de cette dernière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.




Civ.1 25 novembre 2020 n° 19-14.503

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Rejet

Mme BATUT, président


Arrêt n° 735 F-D
Pourvoi n° H 19-14.503



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020
Le syndicat des copropriétaires de la copropriété [...], dont le siège est [...] , représenté par son syndic, la société [...], dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° H 19-14.503 contre l'arrêt rendu le 24 janvier 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-9), dans le litige l'opposant à la société Nouvelle Restaurant bar plage réserve Miramar, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat du syndicat des copropriétaires de la copropriété [...], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Nouvelle Restaurant bar plage réserve Miramar, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 janvier 2019), un arrêt du 11 janvier 2008, devenu irrévocable, a reconnu au syndicat des copropriétaires de la copropriété [...] (le syndicat), un droit d'usage permanent d'un passage souterrain reliant cet immeuble à la plage et condamné la société Nouvelle Restaurant bar plage réserve Miramar (la société), exploitant un restaurant sur celle-ci, à ne pas entraver le passage des copropriétaires dans le souterrain, sous astreinte provisoire par infraction constatée.
2. Invoquant la violation à trois reprises de l'obligation impartie, le syndicat a saisi un juge de l'exécution qui a liquidé l'astreinte prononcée à l'encontre de la société à la somme de 3 000 euros et prononcé une nouvelle astreinte provisoire par jour de retard passé le délai d'un mois. Le 3 octobre 2012, la ville de Cannes a érigé un mur afin de bloquer l'accès du tunnel, en vertu d'un arrêté municipal du 20 septembre 2012 motivé par la dangerosité du souterrain. Par arrêt du 25 janvier 2016, devenu, irrévocable, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé cet arrêté et ordonné le rétablissement du passage dans le souterrain dans un délai de deux mois.
3. Invoquant de nouvelles violations de l'obligation impartie entre le 1er mars 2012 et le 30 novembre 2012, le syndicat a saisi le juge de l'exécution, par acte du 1er avril 2015, aux fins de liquidation de l'astreinte prononcée le 24 janvier 2012.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. Le syndicat fait grief à l'arrêt de limiter la liquidation de l'astreinte à la somme de 1 000 euros et de rejeter ses demandes, alors :
« 1° / que l'obligation de rétablir l'accessibilité à une plage constitue une obligation de faire de sorte que la preuve de son exécution pèse sur le débiteur de cette obligation ; qu'en énonçant que l'obligation assortie d'astreinte mise à la charge de la société par l'arrêt définitif rendu le 11 janvier 2008 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence est de ne pas entraver le passage souterrain reliant l'immeuble de la copropriété [...] à la plage et que s'agissant d'une obligation de ne pas faire, il appartient au syndicat des copropriétaires, demandeur à l'action en liquidation, de rapporter la preuve de la transgression imputable à la débitrice sans rechercher si le dispositif de l'arrêt portant condamnation de la société à ne pas entraver en toutes saisons le libre passage des copropriétaires, y compris les personnes à mobilité réduite, dans le souterrain reliant l'immeuble à la plage sans limitation dans le temps et les saisons, assortie d'une astreinte par la cour d'appel ne devait pas, en raison de son ambiguïté, être compris à la lumière des motifs du même arrêt comme imposant tout à la fois à la société de prendre toutes dispositions pour permettre aux copropriétaires d'accéder à la plage par le souterrain dans des conditions de sécurité et de facilité suffisantes y compris pour des personnes handicapées et en toutes saisons, ce qui n'était pas le cas à la date de la décision ainsi qu'il s'évinçait des constatations des juges du fond, de sorte que la société se trouvait ainsi tenue d'une obligation de faire, puis, une fois ce passage rétabli, de ne pas entraver à l'avenir le passage souterrain reliant l'immeuble de la copropriété [...], d'où il résultait qu'il incombait à cette société de rapporter la preuve de l'exécution de l'obligation de faire ainsi mise à sa charge en justifiant à cet effet du rétablissement du passage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1353 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;
2°/ que l'obligation de rétablir l'accessibilité à une plage constitue une obligation de faire de sorte que la preuve de son exécution pèse sur le débiteur de cette obligation ; qu'en énonçant que l'obligation assortie astreinte mise à la charge de la société par l'arrêt définitif rendu le 11 janvier 2008 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence est de ne pas entraver le passage souterrain reliant l'immeuble de la copropriété [...] à la plage et que s'agissant d'une obligation de ne pas faire, il appartient au syndicat des copropriétaires, demandeur à l'action en liquidation, de rapporter la preuve de la transgression imputable à la débitrice quand il s'évinçait tant des motifs que du dispositif du jugement rendu le 24 janvier 2012 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Grasse ayant liquidé l'astreinte prononcée à l'encontre de la société par l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 11 janvier 2008 puis assorti cette décision d'une nouvelle astreinte de 1 000 euros non plus par infraction constatée mais par jour, passé le délai d'un mois à compter de la signification de la décision, qu'il incombait à la société, débitrice d'une obligation de faire, de justifier de l'exécution de cette obligation en rapportant la preuve du rétablissement d'un libre accès du tunnel souterrain, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil ;
3°/ que l'obligation de rétablir l'accessibilité à une plage constitue une obligation de faire de sorte que la preuve de son exécution pèse sur le débiteur de cette obligation ; qu'en énonçant que l'obligation assortie astreinte mise à la charge de la société par l'arrêt définitif rendu le 11 janvier 2008 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence est de ne pas entraver le passage souterrain reliant l'immeuble de la copropriété [...] à la plage et que s'agissant d'une obligation de ne pas faire, il appartient au syndicat des copropriétaires, demandeur à l'action en liquidation, de rapporter la preuve de la transgression imputable à la débitrice tout en constatant qu'il ressortait du procès-verbal de constat d'huissier établi le 1er mars 2012 que « l'accès est entravé par le déclenchement d'une alarme sonore puissante et l'impossibilité au bout du couloir d'accéder à la plage en raison de la présence d'un mur carrelé le seul moyen de se rendre à cette plage étant de passer par l'intérieur du restaurant dont la porte d'entrée est fermée avec à l'arrière un rideau métallique baissé » et que « la circonstance que le gardien de la copropriété dispose de la clé du tunnel lui permettant d'accéder aux installations du syndicat du restaurant ne saurait satisfaire à l'accessibilité illimitée des copropriétaires à la plage » d'où il résultait que « l'infraction est donc constituée » à la date du 1er mars 2012 de sorte qu'il incombait par conséquent à la société de rapporter la preuve du rétablissement d'un accès libre et direct à la plage, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil ;
4°/ que le juge ne peut dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'il résultait des constatations figurant dans le procès-verbal de constat établi le 25 octobre 2012 par M. V..., huissier de justice, que : « Dans l'angle Sud/Est de ceux-ci on accède à une porte métallique. Cette porte ouvre sur le passage menant à la plage. Derrière cette porte, à 80 centimètres environ, est édifié un mur en parpaings bouchant totalement le passage. Ce mur est actuellement percé d'une petite ouverture en son milieu de quelques centimètres de diamètre. Madame T... nous demande de constater l'encombrement persistant du passage par la société qui exploite le restaurant de plage. Par l'ouverture existante, nous constatons qu'a été édifiée, à 1 mètre environ du mur en parpaings, une cloison en carreaux de plâtre munie d'une porte, lesquelles cloison et porte ferment également la totalité du passage. Toujours par l'ouverture existante, nous constatons la présence dans le passage de différents meubles et objets, à savoir : - vestiaires métalliques, - caisses de bouteilles en plastiquenotamment » ; qu'en faisant abstraction de ces constatations en ce qu'elles faisaient état, au-delà du mur en parpaings édifié le 3 octobre 2012 par la commune de Cannes, d'une cloison en carreaux de plâtre munie d'une porte fermant également la totalité du passage, la cour d'appel a dénaturé par omission le procès-verbal de constat en date du 25 octobre 2012 et a violé le principe susvisé ;
5°/ que le juge de l'exécution ne peut pas modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ; que, dans l'arrêt rendu le 11 janvier 2008, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a dit que le syndicat peut utiliser le passage souterrain reliant l'immeuble à la plage sans limitation dans le temps et les saisons ; qu'en énonçant, par motifs adoptés des premiers juges, que « le libre accès des copropriétaires à la plage et non pas au seul restaurant de plage, ainsi que l'a jugé la cour d'appel, pour ainsi profiter des joies de la plage ou simplement pour se prélasser au soleil, doit aussi s'apprécier à l'aune de l'intérêt concret qu'il y a pour eux de s'y rendre, lequel ne peut se comprendre que comme devant s'exercer en saison et surtout en haute saison, soit tout-au plus en saison pendant quatre à six mois dans l'année, de la mi-avril à la mi-octobre, et en haute saison pendant les deux mois d'été, périodes pendant lesquelles il n'est pas allégué que le restaurant serait fermé (cf. le constat précité a été dressé le 1er mars 2012 » pour en déduire « qu'il convient par conséquent de juger qu'il n'est pas justifié par le syndicat des copropriétaires d'une entrave avérée au libre accès à la plage excepté ce 1er mars 2012 », la cour d'appel a violé l'article R. 121-1, alinéa 2, du code des procédures civiles d'exécution. »
Réponse de la Cour
5. L'arrêt énonce, d'abord, exactement, que l'obligation mise à la charge de la société de ne pas entraver le passage des copropriétaires dans le souterrain en cause constitue une obligation de ne pas faire, de sorte que la preuve de sa violation pèse sur le syndicat.
6. Il relève, ensuite, que si un constat d'huissier de justice du 1er mars 2012 établit à cette date une violation par la société de cette obligation, le syndicat ne produit que deux autres constats dressés les 23 et 25 octobre 2012, alors que la plage était inaccessible par le souterrain depuis le 3 octobre 2012 du fait de l'édification irrégulière d'un mur par la ville de Cannes.
7. De ces constatations et appréciations, ne procédant pas d'une dénaturation, la cour d'appel a souverainement estimé que la preuve d'un encombrement qui se serait prolongé sans interruption jusqu'au 3 octobre 2012 n'était pas rapportée par le syndicat.
8. Le moyen, inopérant en sa cinquième branche, qui s'attaque à des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
9. Le syndicat fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts, alors « que la cassation de l'arrêt en ce que, après avoir constaté le défaut de justification par la société d'une cause étrangère, il a liquidé toutefois l'astreinte à la seule somme de 1 000 euros, condamné par conséquent la société susnommée à payer cette somme au syndicat, et rejeté le surplus des demandes du syndicat qui entendait voir condamner la société à lui payer la somme de 270 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte, ne pourra qu'entraîner par voie de conséquence la cassation de ce même arrêt en ce qu'il a débouté le syndicat de sa demande tendant à voir condamner la société au paiement de la somme de 10 000 euros à titre de dommages-intérêts et ce en application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
10. Le premier moyen étant rejeté, le second, qui invoque une cassation par voie de conséquence est sans portée.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-20.902

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle sans renvoi

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1094 F-D
Pourvoi n° N 19-20.902
Aide juridictionnelle totale en défenseau profit de Mme R....Admission du bureau d'aide juridictionnelleprès la Cour de cassationen date du 26 septembre 2019.



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société La Maison Bleue-Thiais, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Eveil et Sens, a formé le pourvoi n° N 19-20.902 contre l'arrêt rendu le 6 juin 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant à Mme D... R..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Gilibert, conseiller, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société La Maison Bleue-Thiais, de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de Mme R..., après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Gilibert, conseiller rapporteur, M. Ricour, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 juin 2019), Mme R... a été engagée le 4 février 2008 par la société Eveil et Sens, aux droits de laquelle vient la société La Maison Bleue-Thiais (la société), en qualité d'agent polyvalent.
2. La salariée a été licenciée le 9 août 2013, pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, ci-après annexé
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée les sommes de 2 687,60 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et de 286,76 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, alors « que l'indemnité de préavis étant une créance de nature salariale, les intérêts moratoires ne peuvent courir qu'à compter de son exigibilité ; qu'en faisant courir les intérêts sur l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis à compter de la réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, alors pourtant qu'elle avait constaté que si la salariée avait saisi, le 31 mars 2011, le conseil de prud'hommes de Créteil de ''demandes en paiement'', elle n'avait été licenciée que le 9 août 2013, la cour d'appel a violé l'article 1153 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour
Vu l'article 1153 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable au litige :
5. Aux termes de ce texte, dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, les dommages-intérêts résultant du retard dans l'exécution ne consistent jamais que dans la condamnation aux intérêts au taux légal, sauf les règles particulières au commerce et au cautionnement. Ces dommages-intérêts sont dus sans que le créancier soit tenu de justifier d'aucune perte. Ils ne sont dus que du jour de la sommation de payer ou d'un autre acte équivalent telle une lettre missive s'il en ressort une interpellation suffisante, excepté dans le cas où la loi les fait courir de plein droit.
6. L'arrêt fixe le point de départ des intérêts au taux légal sur les sommes allouées à titre d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, à la date de la réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes de Paris.
7. En statuant ainsi, alors que la salariée ayant été licenciée le 9 août 2013, postérieurement à l'introduction de la procédure prud'homale, les intérêts moratoires sur les sommes dues à titre d'indemnité de préavis et congés payés afférents ne pouvaient courir à compter d'une date antérieure à leur exigibilité, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
9. Les intérêts au taux légal sur les sommes de 2 687,60 euros et 286,76 euros courront à compter du 16 mai 2014, date de la demande.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-14.549

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Rejet

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1083 F-D
Pourvoi n° H 19-14.549



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société Euro cargo rail, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° H 19-14.549 contre l'arrêt rendu le 31 janvier 2019 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale, prud'hommes), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. B... D..., domicilié [...] ,
2°/ à Pôle emploi Hauts-de-France, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Pecqueur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Euro cargo rail, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. D..., après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pecqueur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 31 janvier 2019), M. D... a été engagé par la société Euro cargo rail par contrat à durée indéterminée à effet du 15 octobre 2007 en qualité de conducteur de train, statut « agent de maîtrise ». La lettre d'engagement prévoyait une formation de huit mois pour obtenir l'habilitation requise et occuper ensuite le poste de « conducteur de train / agent de formation / reconnaisseur / chef de manoeuvre / agent de desserte ».
2. Licencié par lettre du 6 novembre 2014 pour insuffisance professionnelle, il a saisi la juridiction prud'homale.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à des dommages-intérêts, au remboursement des indemnités de chômage et à la remise d'une nouvelle attestation destinée à Pôle emploi, alors :
« 1° / que le juge ne peut pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en l'espèce, l'article 5.1 du règlement intérieur de la société Euro cargo rail indiquait qu'il s'appliquait « si des faits survenus dans le cadre du travail apparaissent dangereux pour la sécurité des salariés ou des tiers et semblent fonder une éventuelle sanction à l'encontre d'un salarié » ; qu'en affirmant que l'article 5.1 du règlement intérieur devait être appliqué pour toute situation de danger pour la sécurité, indépendamment à ce stade de toute qualification fautive, de telle sorte que les garanties procédurales de cet article devaient être appliquées au cas de M. D..., la cour d'appel a dénaturé le règlement intérieur précité, en méconnaissance de l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
2°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, M. D... se bornait dans ses conclusions d'appel à se prévaloir des formalités prévues par le règlement intérieur, qui selon lui devaient s'appliquer à tout licenciement, et à contester le caractère réel et sérieux des motifs mis en avant par l'employeur ; qu'en retenant que les agissements reprochés à M. D... devaient être qualifiés de fautifs plutôt que d'insuffisance professionnelle et qu'en conséquence le licenciement était sans cause réelle et sérieuse comme n'étant pas fondé sur son véritable motif, la cour d'appel, qui a soulevé d'office ce moyen, sans inviter les parties à s'en expliquer préalablement, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
3°/ que la méconnaissance de règles élémentaires ou fondamentales par le salarié n'implique pas nécessairement que son comportement soit qualifié de fautif ; que le non-respect de ces règles peut procéder d'une insuffisance professionnelle, sauf mauvaise volonté délibérée ; que dès lors, en affirmant que le non-respect de règles fondamentales et élémentaires de conduite, en particulier de vitesse et de sécurité, « ne peut que traduire () une mauvaise volonté délibérée », la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;
4°/ que c'est le motif de rupture mentionné dans la lettre de licenciement qui détermine le caractère disciplinaire ou non du licenciement, peu important le recours de l'employeur à d'éventuelles mesures disciplinaires préalables ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a estimé, au vu des deux plans d'actions individuels dont M. D... avait fait l'objet en 2011 puis en juillet 2014, que l'employeur avait lui-même considéré que le prétendu manque de rigueur de M. D... était fautif et qu'en conséquence il ne pouvait plus invoquer une insuffisance professionnelle lors du licenciement en novembre 2014 au sujet d'agissements similaires ; qu'en requalifiant dès lors le licenciement pour insuffisance professionnelle en licenciement disciplinaire, en considération de mesures antérieures au licenciement, quand seul le motif de rupture mentionné dans la lettre de licenciement détermine le caractère disciplinaire ou non du licenciement, la cour d'appel a statué par des motifs impropres et violé les articles L. 1232-1, L. 1232-6 et L. 1235-1 du code du travail ;
5°/ que les juges sont tenus de se prononcer sur l'ensemble des griefs mentionnés dans la lettre de licenciement ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement du 6 novembre 2014 reprochait à M. D... une insuffisance professionnelle découlant du caractère sérieux et répété des incidents constatés depuis le début de l'année et mentionnait à ce titre non seulement des incidents des 16, 24 et 29 septembre 2014, mais également des événements sécurité des 14 mars, 20 mars, 30 mars, 18 avril et 20 juin 2014 ; qu'en se contentant de se prononcer sur les incidents des 16, 24 et 29 septembre 2014, sans examiner les autres griefs mentionnés dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-6 du code du travail. »
Réponse de la Cour
4. Ayant constaté que la lettre de licenciement reprochait au salarié, qui avait déjà fait l'objet d'un avertissement pour des faits similaires, le non-respect de règles fondamentales et élémentaires de conduite ferroviaire, en particulier de vitesse et de sécurité, et que ces faits procédaient d'une mauvaise volonté délibérée de l'intéressé, la cour d'appel en a exactement déduit, sans relever de moyen d'office, et hors toute dénaturation, que le licenciement avait été prononcé pour des motifs disciplinaires et que, la procédure prévue en ce cas par le règlement intérieur n'ayant pas été respectée, il était dépourvu de cause réelle et sérieuse.
5. Le moyen, qui, en sa cinquième branche, critique des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-15.144

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Rejet

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1086 F-D
Pourvoi n° D 19-15.144
Aide juridictionnelle totale en demandeau profit de M. W....Admission du bureau d'aide juridictionnelleprès la Cour de cassationen date du 14 février 2019.



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
M. F... W..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° D 19-15.144 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2018 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale, prud'hommes), dans le litige l'opposant à la société Artemis security, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Pecqueur, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de M. W..., de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Artemis security, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présentes Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pecqueur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 26 janvier 2018), M. W... a été engagé par contrat à durée indéterminée à effet du 30 juillet 2013 par la société Artemis security en qualité d'agent de sécurité avec une période d'essai de deux mois.
2. Le salarié a été placé en arrêt maladie du 16 au 25 septembre 2013 inclus.
3. Le 3 octobre 2013, l'employeur lui a notifié la rupture de la période d'essai.
4. Estimant cette rupture abusive, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts alors « que la période d'essai permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail ; qu'en l'espèce, il est constant et constaté par l'arrêt, que la société ADG, qui a conclu le contrat de travail, est en réalité la même société que la Sas Artemis Security, qui a comparu en qualité d'employeur devant les juges du fond ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait débouter le salarié de ses demandes au prétexte que l'employeur n'avait pu évaluer ses compétences dans le cadre de précédents contrats de travail, du fait d'une sous-traitance conclue par un autre employeur, car il n'était pas sous la subordination de la Sas Groupe ADG, quand M. W... ayant établi qu'il avait travaillé en avril, mai et juin 2013 sur un chantier en sous-traitance du groupe ADG, pendant environ deux mois, et fait valoir que son employeur connaissait déjà les capacités professionnelles de M. W..., lorsqu'il a conclu son contrat de travail le 30 juillet 2013 ; il incombait à la cour d'appel de rechercher in concreto si l'employeur avait été en mesure de connaître les compétences du salarié, qui occupait des fonctions identiques et avait été placé dans des conditions normales d'emploi, peu important l'absence de transfert du lien de subordination ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles L. 1221-19, L. 1221-20 et L. 1231-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
6. La cour d'appel qui, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, a estimé que la rupture de la période d'essai était due au caractère non concluant de l'essai et que l'employeur n'avait commis aucun abus dans l'exercice de son droit de résiliation, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
7. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes de rappels de salaires et congés payés y afférents, alors :
« 1°/ que l'employeur a l'obligation de payer le salaire convenu de sorte qu'en cas de retenue, il lui appartient de justifier la cause de sa libération sans pouvoir se constituer de preuve à lui-même ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait retenir que la preuve de l'absence injustifiée de M. W... les 28 et 29 septembre 2013 résultait du détail des planifications établi et produit par l'employeur car en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé le principe susvisé et l'article 1315 ancien, devenu 1353, nouveau, du code civil ;
2°/ que le pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve par les juges du fond n'est pas un pouvoir discrétionnaire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait rejeter la demande de rappel de salaires des 28 et 29 septembre 2013 qui n'avaient pas été payés à M. W... au motif général que le témoignage de M. H... n'était pas probant et au motif erroné que ce salarié affecté à un poste en journée, ne peut sérieusement attester de la présence de M. W... sur son poste de nuit", dès lors qu'elle avait elle-même constaté que le travail de M. H... s'effectuait de 6 à 18 heures, ce que confirmait le tableau de planification de septembre 2013 produit par l'employeur, de sorte que ce salarié pouvait régulièrement attester que M. W... était présent sur son lieu de travail les 28 et 29 septembre à 18 heures pour effectuer sa vacation du week-end ; qu'en statuant par ces motifs erronés et généraux, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. Appréciant souverainement les éléments de preuve produits aux débats, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a estimé que la preuve de l'absence injustifiée du salarié était rapportée.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.




Civ.1 25 novembre 2020 n° 19-18.880

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1
CF


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation

Mme BATUT, président


Arrêt n° 719 F-D
Pourvoi n° Q 19-18.880







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020
1°/ M. G... K...,
2°/ Mme V... R..., épouse K...,
domiciliés tous deux [...],
ont formé le pourvoi n° Q 19-18.880 contre l'arrêt rendu le 16 mai 2019 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige les opposant :
1°/ à M. S... H..., domicilié [...] ,
2°/ à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [...] ,
3°/ à la société caisse régionale de Crédit agricole mutuel Val de France, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Teiller, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. et Mme K..., de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. H... et de la société Allianz, de la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Val de France, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Teiller, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 16 mai 2019), après la défaillance de la société AgriTP dans le remboursement d'un prêt à elle consenti, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Val de France (la banque), se prévalant d'un engagement de caution solidaire, a assigné en paiement des sommes dues M. et Mme K... qui ont donné mandat à M. H... (l'avocat), assuré auprès de la société Allianz IARD (l'assureur), de les représenter à l'instance. Condamnés en première instance, M. et Mme K... ont formé appel. Par ordonnance du 19 décembre 2013, le conseiller de la mise en état a jugé leur recours irrecevable comme tardif.
2. M. et Mme K... ont assigné l'avocat et son assureur en responsabilité et indemnisation.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. M. et Mme K... font grief à l'arrêt de limiter la condamnation in solidum de l'avocat et de son assureur à leur payer une certaine somme à titre de dommages-intérêts et de rejeter le surplus de leurs demandes, alors « que la perte de chance subie par le justiciable qui a été privé de la possibilité de faire valoir ses droits par la faute d'un avocat se mesure à la seule probabilité de succès du recours qui n'a pu être exercé ; qu'il incombe au juge de déterminer cette probabilité, en reconstituant fictivement le débat judiciaire qui n'a pu s'instaurer par la faute de l'avocat ; qu'en affirmant que le préjudice de M. et Mme K..., résultant des fautes de l'avocat à avoir procédé tardivement au dépôt de la déclaration d'appel contre le jugement rendu à leur encontre par le tribunal de grande instance de Chambéry le 13 juin 2013 et manqué à son obligation d'information et de conseil, s'analysait en une perte de chance de voir la cour d'appel de Chambéry examiner leurs moyens d'appel contre ledit jugement et en refusant d'examiner elle-même la pertinence de ces moyens, par la reconstitution fictive du débat judiciaire qui n'avait pu s'instaurer, afin de déterminer les chances de succès du recours dont M. et Mme K... avaient été privés, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
4. La perte de chance subie par le justiciable qui a été privé de la possibilité de faire valoir ses droits, en raison des manquements de son conseil, se mesure à la seule probabilité de succès du recours qui n'a pas été exercé. Pour apprécier les chances de succès de la voie de droit envisagée, il incombe aux juges du fond de reconstituer la discussion qui n'a pu s'instaurer devant la juridiction par la faute de l'avocat au vu des conclusions des parties et des pièces produites aux débats.
5. Tout en retenant que M. et Mme K... avaient, en raison de la faute de l'avocat, perdu une chance de voir leurs moyens de fond présentés en cause d'appel, la cour d'appel a énoncé qu'il ne lui appartenait pas d'examiner la pertinence de ces moyens puisqu'elle n'était pas saisie de l'appel du jugement rendu le 13 mars 2013 par le tribunal de grande instance de Chambéry.
6. En statuant ainsi, elle a violé le texte susvisé.
Et sur le moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
7. M. et Mme K... font le même grief à l'arrêt, alors « que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet d'un jugement ; qu'il faut que la chose jugée soit la même et qu'elle oppose les mêmes parties ; qu'en affirmant que les autres demandes de M. et Mme K... formées contre l'avocat et l'assureur en indemnisation du préjudice résultant des condamnations prononcées par le jugement du tribunal de grande instance de Chambéry du 13 juin 2013, se heurtaient à l'autorité de la chose jugée attachée à ce jugement, cependant que celui-ci opposait la banque à M. et Mme K... et avait prononcé des condamnations sur le fondement d'un cautionnement, ce dont il résultait une absence d'identité de parties et d'objet entre les deux instances, la cour d'appel a violé les articles 480 du code de procédure civile et 1351 devenu 1355 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1351, devenu 1355 du code civil, et 480 du code de procédure civile :
8. Aux termes du premier de ces textes, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
9. Pour rejeter certaines des demandes en indemnisation de M. et Mme K..., résultant des condamnations prononcées par le jugement du tribunal de grande instance de Chambéry du 13 juin 2013, l'arrêt retient qu'elles se heurtent à l'autorité de la chose jugée.
10. En statuant ainsi, alors que ni l'objet, ni la cause, ni les parties des deux instances n'étaient identiques, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Mise hors de cause
11. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause, sur sa demande, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Val de France dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.




Civ.1 25 novembre 2020 n° 18-26.333

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1
CF


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Rejet

Mme BATUT, président


Arrêt n° 726 F-D
Pourvoi n° V 18-26.333



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020
1°/ M. F... R...,
2°/ Mme A... R...,
3°/ M. Y... R...,
domiciliés tous trois [...],
ont formé le pourvoi n° V 18-26.333 contre l'arrêt rendu le 25 octobre 2018 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige les opposant à la société HSBC France, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Kerner-Menay, conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de MM. F... et Y... R... et de Mme A... R..., de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société HSBC France, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présentes Mme Batut, président, Mme Kerner-Menay, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 25 octobre 2018), suivant une offre préalable acceptée le 21 décembre 2011, la société HSBC France (la banque) a consenti à M. F... R..., Mme A... R..., son épouse, et M. Y... R... (les emprunteurs), un prêt immobilier d'un montant de 240 000 euros, remboursable en deux cent quarante mensualités.
2. L'article 8 des conditions générales du prêt prévoyait que le prêteur pourrait rendre exigible la totalité du prêt si les renseignements, déclarations et documents de toute nature fournis par l'emprunteur venaient à se révéler faux ou inexacts, alors qu'ils étaient déterminants pour l'octroi du prêt.
3. Soutenant que les emprunteurs avaient produit des documents falsifiés quant à leur situation financière, la banque les a, par lettres du 22 octobre 2014, informés de sa décision de rendre exigible le prêt et, par acte du 20 mars 2015, assignés en paiement de la somme de 235 217,85 euros en principal, outre les intérêts.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de les condamner au paiement de la somme demandée par la banque, alors :
« 1°/ que l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; que méconnaît les termes du litige le juge qui tient pour constant un fait qui était contesté par une partie ; que, dans leurs conclusions devant la cour d'appel, les emprunteurs soutenaient que la banque « se content[ait] d'affirmer que la lecture des codes-barres des avis d'imposition prétendument falsifiés relèveraient une numérotation non conforme à la numérotation apparaissant clairement en chiffres dans les avis en cause, et en outre que la numérotation résultant de la lecture des codes-barres se retrouveraient sur les avis des différents contribuables » et que « ce faisant, la SA HSBC n'expliqu[ait] pas comment elle est parvenue à lire les codes-barres critiqués et ne verse aux débats aucun document permettant de corroborer ses propres assertions et échoue donc à rapporter la preuve des falsifications invoquées » ; qu'en affirmant qu'« il est constant que les avis d'imposition 2010 et 2011 fournis par M. Y... R... comportaient une anomalie caractérisée par une différence entre les numéros d'avis d'imposition et la lecture du code-barre devant révéler ce même numéro », cependant que la réalité de cette discordance était contestée par les emprunteurs, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
2°/ le juge ne peut procéder par voie d'affirmation et doit viser ou analyser ne serait-ce que sommairement les éléments sur lesquels il fonde sa décision ; qu'en l'espèce, en énonçant que « la lecture du code barre de l'avis d'imposition sur les revenus 2011 fourni par M. Y... R... fait apparaître le même numéro d'avis d'imposition que celui figurant sur l'avis d'imposition 2011 de M. et Mme F... R..., sachant que ce même numéro figure également sur les avis d'imposition de parfaits tiers au dossier de prêt des consorts R... », sans expliquer sur quel élément ou procédé elle s'était fondée pour établir le résultat de la lecture du code-barre de l'avis d'imposition de M. Y... R..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu'il ressort de l'arrêt attaqué que la déchéance du terme prévue à l'article 8 des conditions générales du contrat de prêt souscrit par les emprunteurs auprès de la banque le 7 décembre 2011, était soumise notamment à la condition que « les renseignements, déclarations et documents de toute nature fournis par l'emprunteur viennent à se révéler faux ou inexacts » ; que, pour conclure à la falsification des avis d'impôts de M. Y... R..., la cour d'appel s'est contentée de constater l'existence d'une « anomalie » consistant en une discordance entre les numéro des avis et ceux qui seraient résultés de la lecture des codes-barres y figurant ; qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à caractériser une falsification de ces documents, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
4°/ qu'il ressort de l'arrêt attaqué que la déchéance du terme prévue à l'article 8 des conditions générales du contrat de prêt souscrit par les emprunteurs auprès de la banque le 7 décembre 2011, était soumise notamment à la condition que « les renseignements, déclarations et documents de toute nature fournis par l'emprunteur viennent à se révéler faux ou inexacts, alors qu'ils étaient déterminants pour l'octroi du prêt » ; qu'en se fondant, pour juger cette condition satisfaite, sur la seule anomalie affectant le numéro des avis d'impôts de M. Y... R..., sans rechercher si le montant de l'impôt et des revenus déclarés par M. Y... R..., seuls éléments déterminants pour octroyer le prêt, étaient eux-mêmes erronés et avaient fait l'objet de falsifications, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
5. Après avoir procédé à l'analyse des éléments de preuve versés aux débats et estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que la lecture du code-barre figurant sur l'avis d'imposition 2011 de M. Y... R... faisait apparaître un numéro d'avis d'imposition différent de celui de l'avis lui-même et qui était identique à celui des coemprunteurs et de tiers au contrat, la cour d'appel, qui n'a pas modifié l'objet du litige et n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a pu en déduire que les prêts avaient été obtenus au moyen d'avis d'imposition falsifiés, de sorte que la demande de la banque était justifiée.
6. Le moyen n'est donc pas fondé.




Com. 25 novembre 2020 n° 19-12.557

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
CH.B


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Rejet et irrecevabilité de la requête en rectification d'erreur matérielle

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 693 F-D
Pourvoi n° S 19-12.557



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société Initial, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , exerçant sous l'enseigne Initial services textiles, a formé le pourvoi n° S 19-12.557 contre l'arrêt rendu le 21 septembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l'opposant à la société Rajpoot, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , anciennement dénommée Siricasi, défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société Initial exerçant sous l'enseigne Initial services textiles, de Me Balat, avocat de la société Rajpoot, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 septembre 2018), la société Rajpoot et la société Initial ont conclu un contrat multiservices pour la location et l'entretien d'articles professionnels de textile, d'une durée de quatre années, moyennant des redevances mensuelles d'un montant de 398,83 euros HT (478,60 euros TTC).
2. La société Rajpoot a fait opposition à une ordonnance du 8 décembre 2015 lui enjoignant de payer à la société Initial la somme de 24 791,61 euros en principal, au titre des redevances impayées et d'une indemnité de résiliation.
Examen de la requête en rectification d'erreur matérielle
3. La requête, qui, sous le couvert d'une demande de rectification d'une erreur matérielle, tend en réalité à réparer une omission de statuer ne pouvant l'être que par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, est irrecevable.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La société Initial fait grief à l'arrêt de limiter à 1 650 euros la condamnation de la société Rajpoot au paiement de l'indemnité de résiliation et de la pénalité afférente, alors :
« 1°/ que, d'une part, les termes du litige sont fixés par les prétentions respectives des parties ; que la société Initial sollicitait, outre le paiement de la clause pénale prévue à l'article 7.4 des conditions générales du contrat conclu avec la société Rajpoot, le paiement de l'indemnité de résiliation prévue au paragraphe 11 de ces conditions générales ; que la société Rajpoot, en réponse, sollicitait que la société Initial soit déboutée de "toutes ses demandes" mais ne formulait aucun moyen au soutien du rejet de la demande de la société Initial au titre de l'indemnité de résiliation se bornant à solliciter la modération de la clause pénale prévue à l'article 7.4 des conditions générales du contrat ; pour rejeter la demande de la société Initial au titre de l'indemnité de résiliation et considérer qu'il s'agissait d'une clause pénale qu'il y avait lieu de minorer, la cour d'appel a relevé que "la société Rajpoot invoque le caractère selon elle manifestement excessif des clauses pénales en priant la cour de les modérer" ; qu'en statuant de la sorte quand la société Rajpoot n'avait jamais qualifié l'indemnité de résiliation de clause pénale et n'avait, en conséquence, pas demandé sa modération, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ que, d'autre part, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et ne peut retenir dans sa décision que les moyens invoqués par les parties et sur lesquels elles ont contradictoirement débattu ; qu'en retenant que l'indemnité de résiliation prévue au paragraphe 11 des conditions générales du contrat conclu entre la société Initial et la société Rajpoot était une clause pénale et en la minorant quand la société Rajpoot n'avait jamais soutenu que l'indemnité de résiliation prévue au paragraphe 11 des conditions générales devait être requalifiée en clause pénale mais faisait seulement valoir que la clause pénale prévue au paragraphe 7.4 desdites clauses devait être minorée, de sorte que ce moyen n'avait pas été discuté entre les parties, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
3°/ que, de surcroît, les juges du fond ne peuvent dénaturer les documents de la cause ; qu'en relevant que "le contrat, d'une durée initiale de quatre années, ne stipule pas la faculté pour les parties de se délier avant son terme sauf résiliation pour faute" pour en déduire que le paragraphe 11 des conditions générales du contrat dont la société Initial réclamait l'application au soutien de sa demande d'indemnité de résiliation devait être requalifié en clause pénale, quand cette clause énonce, en son dernier alinéa, que "le client qui procéderait à une résiliation unilatérale du contrat serait astreint aux mêmes pénalités et clause de compensation que celles prévues en cas de résiliation du contrat dans le présent article", la cour d'appel en a dénaturé les termes en violation du principe susvisé, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
4°/ que, enfin, selon le paragraphe 11 des conditions générales du contrat à durée déterminée d'une durée de quatre ans conclu par la société Rajpoot auprès de la société Initial, en cas de rupture anticipée à l'initiative du client, celui-ci devait s'acquitter d'une indemnité de résiliation égale à la moyenne des factures établies durant les douze derniers mois et multipliée par le nombre de mois restant à courir jusqu'à l'échéance du contrat ; qu'en jugeant que cette clause était une clause pénale pour la minorer quand celle-ci était uniquement destinée à maintenir l'équilibre financier du contrat conclu pour une durée déterminée en cas de résiliation anticipée par le client, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
5. Lorsqu'une cour d'appel répond à une prétention dans les motifs de son arrêt sans qu'aucun chef du dispositif de celui-ci n'énonce sa décision sur ce point, elle commet une omission de statuer qui peut être réparée par la procédure prévue par l'article 463 du code de procédure civile. Dans une telle hypothèse, les moyens qui critiquent les motifs ne sont pas recevables. Tel est le cas en l'espèce, dès lors que l'arrêt, s'il précise dans ses motifs [p. 6] que la société Rajpoot sera condamnée à payer à la société Initial la somme globale de 1 650 euros au titre de l'indemnité de résiliation et de la pénalité, ne prononce pas une telle condamnation.
Le moyen est donc irrecevable.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-21.470

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1112 F-D
Pourvoi n° E 19-21.470
Aide juridictionnelle totale en demandeau profit de Mme S....Admission du bureau d'aide juridictionnelleprès la Cour de cassationen date du 20 juin 2019.



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
Mme B... S..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° E 19-21.470 contre l'arrêt rendu le 19 juin 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige l'opposant à la société La main tendue, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Rouchayrole, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mme S..., de la SCP Krivine et Viaud, avocat de la société La main tendue, après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Rouchayrole, conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 juin 2018), Mme S... a été engagée le 19 novembre 2010 par la société La main tendue en qualité d'assistante de vie selon contrat de travail à temps partiel, pour une durée mensuelle initiale de travail de 45 heures portée ensuite par avenant à 130 heures.
2. Le 5 juin 2015, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes de requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat à temps complet, de résiliation judiciaire de son contrat et en paiement de diverses sommes.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein et de rappels de salaires afférents sur la base d'un temps plein du 1er janvier 2011 au 30 novembre 2014, alors « que tout jugement doit être motivé ; que les juges du fond doivent répondre aux conclusions des parties ; que les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée du travail effectuée par un salarié à temps partiel à un niveau égal ou supérieur à la durée légale du travail ; que lorsque le volume d'heures complémentaires atteint ou dépasse la durée légale, fût-ce pour une durée limitée, cela entraîne la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps plein ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, la salariée faisait valoir que, bien que son contrat de travail prévoyait une durée mensuelle de travail de 130 heures, elle avait travaillé jusqu'à plus de 180 heures par mois" ; qu'il ressortait de son tableau récapitulatif de ses rappels de salaires qu'elle avait travaillé au-delà de la durée légale de travail à sept reprises en mars 2011, juillet 2011, août 2011, novembre 2011, mars 2013, avril 2013 et mai 2013, ce qui était corroboré par les bulletins de paie qu'elle avait produits ; qu'en la déboutant de ses demandes de requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein et de rappels de salaires afférents, sans répondre à aucun moment au moyen tiré du dépassement de la durée légale du travail, la cour d'appel a violé les articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
4. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé.
5. Pour rejeter la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet, l'arrêt retient qu'il n'est pas établi que la salariée ait travaillé à temps plein à compter de l'avenant du 1er mars 2011.
6. En statuant ainsi, par une affirmation péremptoire, sans examiner, même sommairement, les éléments que la salariée produisait au soutien du moyen selon lequel elle avait exécuté des horaires dépassant la durée légale du travail, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
7. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de rappels de salaires au titre des temps de déplacement, alors « que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail ; qu'en l'espèce, pour déclarer prescrite sa demande de rappel de salaires au titre des temps de déplacement, la cour d'appel a jugé que le manquement était avéré, dans la limite de la prescription, soit pour une demande formulée la première fois en avril 2018, à partir d'avril 2015 au regard du délai de prescription applicable et prévu à l'article L. 3245-1 du code du travail et que la demande se limitant à la période de janvier 2014 à mars 2015, elle était prescrite et ne pouvait entraîner condamnation à paiement ; qu'en statuant ainsi, tandis que la prescription avait été interrompue par la saisine du conseil de prud'hommes le 5 juin 2015, la cour d'appel a violé les articles 2241 du code civil, L. 3245-1 et R. 1452-1 du code du travail dans leur rédaction applicable au litige. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 2241 du code civil, R. 1452-1 et R. 1452-6 du code du travail, ces deux derniers dans leur rédaction issue du décret n° 2008-244 du 7 mars 2008 alors applicable :
8. Selon le premier de ces textes, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion.
9. Suivant le deuxième, la saisine du conseil de prud'hommes, même incompétent, interrompt la prescription.
10. Aux termes du troisième, toutes les demandes liées au contrat de travail font, qu'elles émanent du demandeur ou du défendeur, l'objet d'une même instance. Cette règle n'est pas applicable lorsque le fondement des prétentions est né ou révélé postérieurement à la saisine du conseil de prud'hommes.
11. Il en résulte que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, au cours d'une même instance, concernent l'exécution du même contrat de travail
12. Pour déclarer irrecevable comme prescrite la demande de la salariée de rappels de salaires au titre des temps de déplacement, la cour d'appel, qui a relevé que la demande avait été formulée pour la première fois en avril 2018 et qu'elle portait sur la période de janvier 2014 à mars 2015, en a déduit que cette demande était prescrite et ne pouvait entraîner condamnation à paiement, le point de départ du délai légal de prescription de trois ans remontant au mois d'avril 2015.
13. En statuant ainsi, alors que la prescription avait été interrompue par la saisine du conseil de prud'hommes le 5 juin 2015, même si la demande avait été présentée en cours d'instance, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Sur le troisième moyen, pris en sa première branche
14. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de ses demandes subséquentes en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, d'une indemnité de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement nul, alors « que la cassation à intervenir sur le premier et/ou le deuxième moyen de cassation, relatifs à la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein et aux rappels de salaires au titre des temps de déplacement, emportera par voie de conséquence et en application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif ayant débouté la salariée de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de ses demandes subséquentes. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 624 du code de procédure civile :
15. La cassation sur le premier et le deuxième moyens du pourvoi entraîne la cassation, par voie de conséquence, des chefs du dispositif ayant débouté la salariée de ses demandes de résiliation judiciaire de son contrat de travail et en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, d'une indemnité de licenciement et des dommages-intérêts pour licenciement nul, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-13.918

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Rejet

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1082 F-D
Pourvoi n° W 19-13.918



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
Mme M... J..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° W 19-13.918 contre l'arrêt rendu le 16 janvier 2019 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme Q... V... , domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Pecqueur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme J..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme V... , après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présentes Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pecqueur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Reims,16 janvier 2019), Mme V... a été engagée le 1er février 2016 en qualité d'assistante maternelle par Mme J.... Le 16 mars 2018, celle-ci a notifié à la salariée le retrait de la garde de l'enfant. Mme V... a adressé, le 23 mars 2018, à Mme J... un certificat médical de grossesse.
2. Après avoir convoqué, le 28 mars 2018, la salariée à un entretien préalable au licenciement, Mme J... l'a licenciée, le 16 avril suivant, pour motif économique.
3. Mme V... a saisi la formation de référé de la juridiction prud'homale de demandes tendant à l'annulation du retrait du 16 mars 2018 et du licenciement du 16 avril 2018 ainsi qu'à sa réintégration.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. Mme J... fait grief à l'arrêt de dire que la décision de retrait de l'enfant constituait un trouble manifestement illicite, alors :
« 1°/ que si, aux termes de l'article L. 1225-5, alinéa 1, du code du travail, le licenciement d'une salariée est annulé lorsque, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, l'intéressée envoie à son employeur un certificat médical justifiant qu'elle est enceinte, il résulte de l'alinéa 2 de ce texte que ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque le licenciement est prononcé par impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement ; qu'aux termes des articles L. 423-24 du code de l'action sociale et des familles et 18 de la Convention collective nationale des assistants maternels du particulier employeur du 1er juillet 2004 étendue par arrêté du 17 décembre 2004, le particulier employeur qui décide de ne plus confier d'enfant à une assistante maternelle qu'il employait depuis plus de trois mois doit notifier à l'intéressée sa décision de rompre le contrat par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; que ce droit de retrait s'exerce librement ; que, le 16 mars 2018, Mme J..., employeur, a exercé son droit de retrait concernant sa fille U... S..., auprès de Mme V... , assistante maternelle, au motif qu'étant enceinte de son deuxième enfant, elle souhaitait profiter de son congé maternité pour rester auprès de sa fille alors âgée de trois ans ; qu'en énonçant néanmoins « que le fait de retirer l'enfant à la salariée alors que cette dernière est enceinte est illégal car contraire à la loi et qu'il y a lieu d'annuler la décision de retrait de l'enfant à compter du 16 mars 2018 », sans rechercher, comme elle y était invitée, si le droit de retrait avait été exercé pour un motif étranger à la grossesse de la salariée, la cour d'appel a violé l'article 18 de la Convention collective nationale des assistants maternels du particulier employeur du 1er juillet 2004 étendue par arrêté du 17 décembre 2004, ensemble les articles L. 423-24 du code de l'action sociale et des familles et L. 1225-5, alinéa 1, du code du travail ;
2°/ que si, aux termes de l'article L. 1225-5, alinéa 1, du code du travail, le licenciement d'une salariée est annulé lorsque, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, l'intéressée envoie à son employeur un certificat médical justifiant qu'elle est enceinte, il résulte de l'alinéa 2 de ce texte que ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque le licenciement est prononcé par impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement ; que, pour prononcer l'annulation de la décision de retrait de l'enfant U... S... auprès de Mme V... , motivée par le congé maternité de l'employeur Mme J... qui projetait de garder son enfant, la cour d'appel a retenu, par motifs adoptés, « que la rupture du contrat de travail de Madame V... est illicite, son employeur, Madame J... n'ayant pas pris en considération le fait qu'elle était également enceinte » ; qu'en se prononçant en ce sens, alors qu'elle avait constaté que l'employeur Mme J... n'avait pas pris en considération la grossesse de Mme V... pour exercer son droit de retrait, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article L. 1225-5, alinéa 1, du Code du travail ;
3°/ qu'aux termes de l'article R. 1455-6 du code du travail, "la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite" ; que selon l'article R. 1455-7 du même code, "dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire" ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé, pour accueillir la demande de la salariée, que "le conseil de prud'hommes d'Epernay, statuant en la forme des référés, a exactement considéré, comme sollicité par Q... V... , que la décision de retrait de l'enfant du 16 mars 2018 était illégale, et constituait un trouble manifestement illicite, relevant de sa compétence, et à laquelle il a mis fin" ; qu'en se prononçant en ce sens, par voie de simple affirmation, sans exposer en quoi le retrait, dans les conditions prévues par l'article 18 de la Convention collective du particulier employeur, de l'enfant de trois ans, par sa mère, qui souhaitait profiter de son congé maternité pour la garder à ses côtés, constituait un trouble manifestement illicite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 1455-5, R. 1455-6 et R. 1455-7 du code du travail. »
Réponse de la Cour
5. La cour d'appel a constaté, par motifs propres et adoptés, d'une part que l'assistante maternelle avait adressé dans les quinze jours suivant le retrait notifié le 16 mars 2018 un certificat médical attestant de son état de grossesse, d'autre part que l'employeur, au motif de son propre état de grossesse, avait retiré à la salariée la garde de l'enfant, ce dont il résultait que la rupture n'était pas fondée sur l'un des cas limitativement prévus à l'article L. 1225-5 du code du travail.
6. Par de tels motifs, la cour d'appel, qui a caractérisé un trouble manifestement illicite, a, sans être tenue de faire d'autres recherches que ces constatations rendaient inopérantes, légalement justifié sa décision.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
7. Mme J... fait grief à l'arrêt de déclarer le licenciement nul, d'ordonner la réintégration de l'assistante maternelle et de la condamner au paiement de salaires à compter du mois de mai 2018, alors :
« 1°/ que la cassation à intervenir de l'arrêt ayant dit que la décision de retrait de l'enfant U... S... en date du 16 mars 2018 était illégale et constituait un trouble manifestement illicite, relevant de la compétence du juge des référés, entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'arrêt en ce qu'il a déclaré nul le licenciement économique motivé par le retrait de l'enfant et la suppression du poste de l'assistante maternelle et condamné Mme J... à réintégrer Mme V... et à lui payer diverses sommes sur ce fondement, en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°/ que si, aux termes de l'article L. 1225-5, alinéa 1, du code du travail, le licenciement d'une salariée est annulé lorsque, dans un délai de quinze jours à compter de sa notification, l'intéressée envoie à son employeur un certificat médical justifiant qu'elle est enceinte, il résulte de l'alinéa 2 de ce texte que ces dispositions ne s'appliquent pas lorsque le licenciement est prononcé par impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement ; que pour décider que le licenciement de Mme V... , prononcé au motif de la suppression de son poste d'assistante maternelle consécutive à la décision de Mme J... d'exercer son droit de retrait, devait être déclaré nul, la cour d'appel a énoncé que « il s'évince de la reproduction de la lettre de licenciement adressée à Q... V... que l'impossibilité de maintenir le contrat liant les parties, pour un motif étranger (à la grossesse) ou à l'accouchement de la salariée n'est pas établie du seul fait du congé de maternité de l'employeur » ; qu'en se prononçant en ce sens, alors qu'il ressortait de la lettre de licenciement que Mme J..., placée en congé maternité, projetait de garder son enfant et, en conséquence, n'avait plus besoin des services d'une tierce personne à cet effet, ce qui constituait un motif étranger à la grossesse de la salariée, la cour d'appel a dénaturé la lettre de licenciement précitée, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
3°/ qu'il résulte de l'article L. 423-2 du Code de l'action sociale et des familles que les dispositions propres au droit du licenciement ne sont pas applicables aux assistants maternels et familiaux ; qu'aux termes de l'article L. 423-24 du même code, le particulier employeur qui décide de ne plus confier d'enfant à un assistant maternel qu'il employait depuis trois mois doit notifier à l'intéressé sa décision de rompre le contrat par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; que ce droit de retrait qui s'exerce librement ne peut être sanctionné que par l'allocation de dommages et intérêts en cas de retrait abusif ; que partant, en déclarant nul le licenciement de Mme V... et en ordonnant la réintégration de cette dernière, outre la condamnation consécutive du particulier employeur au paiement de diverses sommes à titre de salaires et de congés payés afférents, la cour d'appel a violé les articles L. 423-2 et L. 423-24 du code de l'action sociale et des familles ;
4°/ que le droit à réintégration du salarié n'étant pas absolu, le juge doit rechercher, au regard des faits de l'espèce, si la réintégration du salarié dans son emploi ou un emploi équivalent est possible ou impossible ; qu'en l'espèce, la cour d'appel aurait dû rechercher si, compte tenu non seulement de l'intérêt de l'enfant mais également de l'âge de celui-ci, la réintégration de l'assistante maternelle dans son emploi était matériellement possible ; qu'en ne procédant pas à une telle recherche qui pourtant s'imposait, et en se bornant à ordonner sans autre motivation la réintégration de l'assistante maternelle, la cour d'appel a violé les articles L. 423-2 et L. 423-24 du code de l'action sociale et des familles, ensemble l'article L. 1225-5 du code du travail. »
Réponse de la Cour
8. D'abord, le rejet du premier moyen rend sans portée la première branche qui invoque une cassation par voie de conséquence.
9. Ensuite, la cour d'appel, qui a relevé, hors toute dénaturation de la lettre de licenciement du 16 avril 2018, que l'impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement n'était pas établie du seul fait du congé de maternité de l'employeur, en a exactement déduit, sans être tenue de faire une recherche qui ne lui était pas demandée, que le licenciement était constitutif d'un trouble manifestement illicite et que la réintégration de la salariée devait être ordonnée.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-22.898

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Désistement

M. SCHAMBER, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1108 F-D
Pourvoi n° H 19-22.898




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société NCV Production ([...]), société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° H 19-22.898 contre le jugement rendu le 23 juillet 2019 par le conseil de prud'hommes de Bourgoin-Jallieu (section industrie), dans le litige l'opposant à M. K... A..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société NCV Production, de Me Balat, avocat de M. A..., après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sornay, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Par acte déposé au greffe de la Cour de cassation le 24 septembre 2020, la SCP Foussard et Froger, avocat à cette Cour, a déclaré, au nom de société NCV Production ([...]), demandeur au pourvoi, se désister du pourvoi formé par elle contre le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Bourgoin-Jallieu le 23 juillet 2019, au profit de M. K... A....
2. En application de l'article 1026 du code de procédure civile, ce désistement, intervenu après le dépôt du rapport, doit être constaté par un arrêt.




Com. 25 novembre 2020 n° 18-25.992

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 690 F-D
Pourvoi n° Z 18-25.992



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société [...], société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Z 18-25.992 contre l'arrêt rendu le 19 octobre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Y..., société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Jeapi, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société [...], après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 octobre 2018), le 29 mai 2013, la société Y... a, en qualité de locataire, conclu avec la société Holding Lease France un contrat de location portant sur un photocopieur fourni par la société Jeapi, ainsi qu'un contrat de maintenance avec cette dernière. Le 14 août 2013, le contrat de location et le matériel correspondant ont été cédés à la société [...] (la société [...]).
2. Se plaignant de la mauvaise qualité tant du matériel que des prestations de maintenance, la société Y... a notifié à la société Jeapi la résiliation du contrat de maintenance et a fait opposition aux prélèvements bancaires de la société [...].
3. La société [...] a assigné la société Y... en résiliation du contrat de location pour inexécution, en paiement de loyers et d'indemnités et en restitution du matériel.
La société Y... a appelé en la cause la société Jeapi aux fins notamment de faire constater l'inexécution fautive et la résiliation anticipée du contrat de maintenance.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
4. La société [...] fait grief à l'arrêt de prononcer la caducité du contrat de location du 29 mai 2013 dont elle était la cessionnaire et, en conséquence, de rejeter sa demande tendant à ce que la société Y... soit condamnée à lui payer les sommes de 2 030,40 euros, de 9 024 euros et de 902,40 euros, en principal, alors « que le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en énonçant, pour prononcer la caducité du contrat de location du 29 mai 2013 et, en conséquence, rejeter la demande de la société [...] tendant à ce que la société Y... soit condamnée à lui payer diverses sommes, que les contrats de maintenance et de location financière étaient interdépendants de sorte que la résiliation du contrat de maintenance à la date du 13 janvier 2014 emportait caducité du contrat de location financière à la même date ce qui rendait sans effet les mises en demeure de payer délivrées par la société [...], la cour d'appel, qui a relevé d'office le moyen tiré de l'interdépendance des contrats et, corrélativement, de la caducité du contrat de location en raison de la résiliation du contrat de maintenance, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, a violé l'article 16 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
5. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
6. Pour prononcer la caducité du contrat de location du 29 mai 2013 et, en conséquence, rejeter les demandes en paiement formées par la société [...] contre la société Y..., l'arrêt retient que le contrat de maintenance conclu entre les sociétés Jeapi et Y... et le contrat de location financière sont interdépendants, de sorte que la résiliation du premier, à la date du 13 janvier 2014, emporte caducité du second à la même date et l'absence d'exigibilité des loyers trimestriels postérieurs.
7. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. La cassation prononcée sur le premier moyen entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif de l'arrêt qui condamne la société Jeapi à payer à la société [...] la somme de 2 100 euros, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire, l'arrêt ayant évalué à cette somme le préjudice subi par le bailleur en raison de la caducité du contrat de location.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-18.252

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Déchéance

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1077 F-D
Pourvoi n° H 19-18.252





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
M. D... C..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° H 19-18.252 contre l'arrêt rendu le 25 octobre 2017 par la cour d'appel de Rennes (7e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant à la société CMA-CGM, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Van Ruymbeke, conseiller, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. C..., après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présentes Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Van Ruymbeke, conseiller rapporteur, Mme Pecqueur, conseiller référendaire ayant voix délibérative, Mme Rémery, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Déchéance du pourvoi examinée d'office
1. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application de l'article 978 du code de procédure civile.
2. Selon l'article 978 du code de procédure civile, à peine de déchéance, le mémoire ampliatif doit être signifié au défendeur n'ayant pas constitué avocat au plus tard dans le mois suivant l'expiration du délai de quatre mois à compter du pourvoi.
3. M. C... s'est pourvu en cassation le 21 juin 2019 contre une décision rendue le 25 octobre 2017 par la cour d'appel de Rennes dans une instance l'opposant à la société CMA-CGM.
4. Le mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée, remis au greffe le 21 octobre 2019 , n'a pas été signifié à la société CMA-CGM, laquelle n'a pas constitué avocat.
5. La déchéance du pourvoi est donc encourue.




Soc. 25 novembre 2020 n° 18-24.364

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
LG


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Irrecevabilité (appel possible)

M. SCHAMBER, conseiller doyen faisantfonction de président


Arrêt n° 1117 F-D
Pourvoi n° E 18-24.364



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
Mme N... T..., domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° E 18-24.364 contre le jugement rendu le 10 septembre 2018 par le conseil de prud'hommes du Mans (section activités diverses), dans le litige l'opposant à Mme M... W..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de Mme T..., après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, et Mme Lavigne, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Recevabilité du pourvoi examinée d'office
Vu les articles 40 et 605 du code de procédure civile :
1. Après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des textes susvisés.
2. Selon le premier de ces textes, le jugement qui statue sur une demande indéterminée est, sauf disposition contraire, susceptible d'appel. Selon le second, le pourvoi en cassation n'est ouvert qu'à l'encontre des jugements rendus en dernier ressort.
3. Mme T... s'est pourvue en cassation contre un jugement statuant sur des demandes dont l'une, qui tendait à voir constater que le licenciement était abusif, présentait un caractère indéterminé.
4. En conséquence, le pourvoi formé contre ce jugement susceptible d'appel et inexactement qualifié en dernier ressort, est irrecevable.




Crim. 25 novembre 2020 n° 20-84.886 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° F 20-84.886 FS-P+B+I
N° 2710

EB225 NOVEMBRE 2020

CASSATION

M. SOULARD président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,DU 25 NOVEMBRE 2020


M. H... D... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 17 août 2020, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de tentative de meurtre sur personne dépositaire de l'autorité publique, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant sa demande de mise en liberté.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Thomas, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. H... D..., et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 novembre 2020 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Thomas, conseiller rapporteur, M. Bonnal, Mme Ménotti, M. Maziau, Mme Labrousse, MM. Seys, Dary, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Violeau, conseillers référendaires, M. Aldebert, avocat général, et M. Bétron, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Par ordonnance en date du 27 juillet 2020, le juge des libertés et de la détention a rejeté la demande de mise en liberté de M. D... formée par son avocat le 20 juillet 2020.
3. L'avocat de M. D... a relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Sur le moyen pris en sa première branche
4. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le moyen pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Pontoise du 27 juillet 2020 ayant rejeté la demande de mise en liberté de M. D..., alors :
« 2°/ qu'en tant que gardien de la liberté individuelle, il incombe au juge de veiller à ce que la détention provisoire soit, en toutes circonstances, mise en oeuvre dans des conditions respectant la dignité des personnes et de s'assurer que cette privation de liberté est exempte de tout traitement inhumain et dégradant ; que lorsque la description faite par le demandeur de ses conditions personnelles de détention est suffisamment crédible, précise et actuelle, pour constituer un commencement de preuve de leur caractère indigne, il appartient à la chambre de l'instruction, dans le cas où le ministère public n'aurait pas préalablement fait vérifier ces allégations, et en dehors du pouvoir qu'elle détient d'ordonner la mise en liberté de l'intéressé, de faire procéder à des vérifications complémentaires afin d'en apprécier la réalité ; qu'en affirmant, pour dire n'y avoir lieu à remise en liberté de M. D... ni à investigations complémentaires, qu'il n'est pas démontré que les conditions de détention de celui-ci seraient indignes ou constitueraient un traitement inhumain ou dégradant, quand M. D... faisait valoir qu'il vivait 20 heures par jour dans une cellule infestée de punaises et de cafards, sans assez de chaises pour que les détenus puissent tous s'asseoir, que les douches étaient repoussantes et jonchées de déjections de rats et que la cour de promenade la plus grande était de 40 m² pour 25 à 30 détenus, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision en violation des articles 3 et 5 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, 144, 148-4, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 593 du code de procédure pénale :
6. Il résulte de ce texte que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
7. Pour confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, en écartant le moyen pris de ce que M. D... donnait une description de ses conditions personnelles de détention à la maison d'arrêt de Fresnes suffisamment crédible, précise et actuelle pour constituer un commencement de preuve du caractère indigne de sa détention et justifier des vérifications complémentaires, l'arrêt attaqué énonce que sont décrites essentiellement les conditions générales de détention à la maison d'arrêt de Fresnes et que s'agissant des conditions personnelles de détention de l'intéressé, il est mentionné qu'il partage avec un seul co-détenu une cellule destinée à accueillir trois personnes et que les parloirs famille se déroulent actuellement à travers une vitre, ce qui l'empêche de toucher son fils âgé de deux ans.
8. Les juges ajoutent que l'intéressé ne démontre pas en quoi ses conditions personnelles de détention affecteraient sa santé physique ou psychologique, qu'il ne justifie pas de la prise d'anxiolytiques et du suivi psychologique pour dépression dont il fait état et qu'interrogé le 26 novembre 2019 par le juge d'instruction sur le déroulement de sa détention, il a mentionné des insomnies qu'il a attribuées à d'autres causes qu'à des conditions indignes de détention.
9. Les juges énoncent encore que l'obligation imposée à l'intéressé de voir sa famille derrière une vitre résulte de la crise sanitaire et ne saurait être assimilée à un traitement inhumain et dégradant.
10. Ils concluent qu'il n'est pas démontré que les conditions personnelles de détention de M. D... sont indignes et constituent un traitement inhumain et dégradant au sens de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme qui justifierait des vérifications complémentaires ou sa mise en liberté.
11. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision, pour les motifs qui suivent.
12. Saisie d'une description du demandeur qui évoquait une cellule infestée de punaises et de cafards, l'absence de chaise, la saleté repoussante des douches et le sous-dimensionnement de la cour de promenade, la chambre de l'instruction devait en apprécier le caractère précis, crédible et actuel, sans s'arrê
13. Les juges ne pouvaient non plus exiger de l'intéressé qu'il démontre que ses conditions personnelles de détention affectaient sa santé physique ou psychologique.
14. La cassation est en conséquence encourue.




Com. 25 novembre 2020 n° 19-12.258

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.
FB


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation

Mme MOUILLARD, président


Arrêt n° 684 F-D
Pourvoi n° S 19-12.258



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 NOVEMBRE 2020
1°/ M. M... G..., domicilié [...] ,
2°/ la Société financière de l'Océan Indien (SFOI), société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
ont formé le pourvoi n° S 19-12.258 contre l'arrêt rendu le 14 décembre 2018 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre commerciale), dans le litige les opposant à Mme D... K..., épouse G..., domiciliée [...] , défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. G... et de la Société financière de l'Océan Indien, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Graff-Daudret, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion,14 décembre 2018), rendu en référé, Mme K..., associée de la Société financière de l'Océan Indien (la société), dirigée par M. G..., l'a mise en demeure de lui rembourser le solde de son compte courant d'associé qui s'élevait à 94 600 euros.
2. A la suite de son refus, Mme K... a assigné en référé la société en paiement d'une provision.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. M. G... et la société font grief à l'arrêt de condamner cette dernière à payer une certaine somme à Mme K..., alors « que l'existence d'une contestation sérieuse, de nature à affecter les pouvoirs du juge des référés d'ordonner le paiement d'une provision, s'apprécie à la date de sa décision ; qu'en jugeant au contraire que ne pourrait être pris en compte un événement intervenu postérieurement à l'ordonnance de référé et démontrant l'existence d'une contestation sérieuse s'opposant à la demande de Mme K... tendant à voir verser une provision, la cour d'appel, qui a cru devoir se placer à la date où avait été rendue l'ordonnance de référé, a violé l'article 873 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 873 du code de procédure civile :
4. Il résulte de ce texte que l'existence d'une contestation sérieuse, de nature à affecter les pouvoirs de la juridiction des référés d'ordonner l'exécution d'une obligation ou d'allouer une provision, s'apprécie à la date à laquelle se prononce cette juridiction, tant en première instance qu'en appel.
5. Pour condamner la société à verser la provision demandée, l'arrêt retient que l'obligation de remboursement du compte courant d'associé de Mme K... n'est pas sérieusement contestable, nonobstant l'adoption par l'assemblée générale de la société, postérieurement à l'ordonnance de référé déférée à la cour d'appel, d'une résolution décidant le blocage des comptes courants d'associés.
6. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.




Civ.1 25 novembre 2020 n° 19-14.277

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1
CF


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

Mme BATUT, président


Arrêt n° 723 F-D
Pourvoi n° M 19-14.277



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020
1°/ La société Mutuelles du Mans IARD assurances mutuelles, société d'assurance mutuelle à cotisations fixes, dont le siège est [...] ,
2°/ Mme S... N...,
3°/ Mme E... N...,
domiciliés [...] ,
4°/ Mme L... N..., domiciliée [...] ,
tous trois venant aux droits de C... N...,
ont formé le pourvoi n° M 19-14.277 contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige les opposant :
1°/ à Mme G... BT... , domiciliée [...] ,
2°/ à M. U... I..., domicilié [...] ,
3°/ à M. R... A...,
4°/ à Mme F... Y..., épouse A...,
domiciliés [...] ,
5°/ à M. R... K..., domicilié [...] ,
6°/ à Mme T... BT... , domiciliée [...] ,
7°/ à Mme O... X..., domiciliée [...] , prise en qualité d'administratrice légale sous contrôle judiciaire de ses deux enfants mineurs, J... et W... M..., venant aux droits de D... M...,
8°/ à Mme MK... V..., domiciliée [...] ,
9°/ à Mme Q... H..., épouse B..., domiciliée [...] , prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de P... B...,
10°/ M. OS... B..., domicilié [...] ,
11°/ M. BU... B..., domicilié [...] ),
12°/ Mme FI... B...,
13°/ Mme FR... B...,
domiciliées toutes deux [...],
tous quatre venant aux droits de P... B...,
14°/ à M. BZ... JK...,
15°/ à Mme VJ... BM..., épouse JK...,
domiciliés tous deux [...],
16°/ à M. RM... YI..., domicilié [...] ,
17°/ à M. PR... SD...,
18°/ à Mme QA... RH..., épouse SD...,
domiciliés tous deux [...],
19°/ à M. FK... WO..., domicilié [...] ,
20°/ à M. XJ... MO...,
21°/ à Mme XM... JK..., épouse MO...,
domiciliés tous deux [...],
22°/ à M. XJ... UV...,
23°/ à Mme SA... SL..., épouse UV...,
domiciliés tous deux [...],
24°/ à Mme TW... LK..., domiciliée [...] ,
25°/ à Mme J... LK..., domiciliée [...] ,
venant tous deux aux droits de AU... LK...,
26°/ à M. YV... MG...,
27°/ à Mme CU... VC..., épouse MG...,
domiciliés tous deux [...],
28°/ à M. MV... HK...,
29°/ à Mme NO... BR..., épouse HK...,
domiciliés tous deux [...],
30°/ à Mme JC... M..., domiciliée [...] , venant aux droit de D... M...,
31°/ à M. BZ... QD..., domicilié chez M. HZ... RT... , [...] , pris en qualité de mandataire liquidateur de la SCI Les Gaudinelles, dont le siège social est [...] ,
32°/ à la société Atelier l'échelle, anciennement dénommée [...] et U... LN..., société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
33°/ à la société Crédit immobilier de France développement, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Crédit immobilier de France Rhône Alpes Auvergne,
34°/ à la société BNP Paribas Personal Finance, société anonyme, dont le siège est [...] ,
35°/ à la société My Money Bank, société anonyme, dont le siège est [...] ,
36°/ à la société Mutuelle des architectes français, dont le siège est [...] ,
37°/ à la société Crédit immobilier de France développement, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Crédit immobilier de France,
38°/ à la société SMJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , représentée par M. HZ... RT... , mandataire judiciaire, pris en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Les Gaudinelles,
39°/ à la société Crédit immobilier de France Rhône Alpes Auvergne, société anonyme, dont le siège est [...] , venant aux droits et aux obligations de la société Crédit immobilier de France financière Rhône Ain,
défendeurs à la cassation.
Mmes G... et T... BT... , M. I..., M. et Mme A..., M. K..., Mmes X..., ès qualités, et V..., Mme H..., tant en son nom personnel qu'ès qualités, MM. OS... et BU... B... et Mmes FI... et FR... B..., ès qualités, M. et Mme JK..., M. YI..., M. et Mme SD..., M. WO..., M. et Mme MO..., M. et Mme UV..., Mmes TW... et J... LK..., ès qualités, M. et Mme MG..., M. et Mme HK... et Mme JC... M..., ès qualités, ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Mutuelles du Mans IARD assurances mutuelles et de Mmes S..., E... et L... N..., de Me Le Prado, avocat de Mmes G... et T... BT... , M. I..., M. et Mme A..., M. K..., Mmes X..., ès qualités, et V..., Mme H..., tant en son nom personnel qu'ès qualités, MM. OS... et BU... B... et Mmes FI... et FR... B..., ès qualités, M. et Mme JK..., M. YI..., M. et Mme SD..., M. WO..., M. et Mme MO..., M. et Mme UV..., Mmes TW... et J... LK..., ès qualités, M. et Mme MG..., M. et Mme HK... et Mme JC... M..., ès qualités, de la SCP Boulloche, avocat de la société Atelier l'échelle, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société My Money Bank, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société Mutuelle des architectes français, après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société MMA assurances mutuelles et à Mmes S..., L... et E... N... (les consorts N...), venant aux droits de C... N..., du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Crédit immobilier de France développement, la société Crédit immobilier de France Rhône Alpes Auvergne et la société BNP Paribas Personal Finance.
Reprise d'instance
2. Il est donné acte à Mme Q... H..., M. OS... B..., M. BU... B..., Mme FI... B... et Mme FR... B... de leur reprise d'instance en qualité d'ayants droit de P... B..., décédé le 12 février 2019.

Faits et procédure
3. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 novembre 2018), suivant actes authentiques reçus entre le 10 novembre 2006 et le 10 décembre 2007 par C... N... (le notaire), la société civile immobilière Les Gaudinelles (le vendeur) a vendu des biens immobiliers en l'état futur d'achèvement à Mmes G... et T... BT... , M. I..., M. et Mme A..., M. K..., D... M..., Mme V..., P... B... et son épouse, M. et Mme JK..., M. YI..., M. et Mme SD..., M. WO..., M. et Mme MO..., M. et Mme UV..., AU... LK..., M. et Mme MG..., et M. et Mme HK... (les acquéreurs). Pour financer chacune de ces acquisitions, ceux-ci ont contracté un emprunt, avec déblocage progressif des fonds en fonction de l'avancement des travaux, auprès du Crédit immobilier de France Rhône Ain, du Crédit immobilier de France Île-de-France, de la société BNP Paris Invest immo, ou de la société GE Money bank (la banque).
4. Le chantier a été abandonné et les biens n'ont pas été livrés. Le vendeur a été placé en redressement judiciaire, puis en liquidation judiciaire par jugement du 26 novembre 2012.
5. Par actes délivrés à partir du 6 mars 2013, Mmes G... et T... BT... , M. I..., M. et Mme A..., M. K..., Mme O... X..., agissant en qualité d'administratrice légale sous contrôle judiciaire de ses deux enfants mineurs, J... et W... M..., venant aux droits de D... M..., Mme JC... M..., venant aux droits de D... M..., Mme V..., Mme H..., agissant en son nom propre et en qualité d'ayant droit de P... B..., MM. OS... et BU... B..., venant aux droits de P... B..., Mmes FI... et FR... B..., venant aux droits de P... B..., M. et Mme JK..., M. YI..., M. et Mme SD..., et M. et Mme HK... ont assigné M. QD..., en qualité de liquidateur judiciaire de la SCI Les Gaudinelles, la société Crédit immobilier de France Rhône Alpes Auvergne, venant aux droits du Crédit immobilier de France Rhône Ain, la société BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la société BNP Paris Invest immo, la société Crédit immobilier de France Île-de-France et la banque en annulation ou résolution des ventes et des prêts accessoires, ainsi que la société [...] , devenue la société Atelier l'échelle (l'architecte), et son assureur, la société Mutuelle des architectes de France, et le notaire et son assureur, la société MMA assurances mutuelles (l'assureur), en responsabilité et indemnisation. M. WO..., M. et Mme MO..., M. et Mme UV..., AU... LK..., aux droits duquel se trouvent Mmes TW... et J... LK..., et M. MG... et Mme VC... sont intervenus volontairement à l'instance le 24 mars 2014.
6. La résolution des contrats de vente conclus entre le vendeur et les acquéreurs a été prononcée ainsi que la résolution des contrats de prêt consentis par la banque à Mme G... BT... , et à M. et Mme MO..., par le Crédit immobilier de France financière Rhône Ain à M. I..., M. K..., Mme T... BT... , P... B..., Mme V..., M. YI..., Mme RH..., épouse SD..., M. WO..., M. et Mme UV..., M. MG... et Mme VC..., et M. et Mme HK..., par la société BNP Paribas Invest immo à Mme T... BT... , et M. et Mme JK..., par le Crédit immobilier de France Île-de-France à M. MG... et Mme VC.... La responsabilité du notaire et de l'architecte a été retenue au titre de différentes fautes.
Examen des moyens
Sur les trois premiers moyens du pourvoi principal, ci-après annexés
7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le quatrième moyen du pourvoi principal, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
8. Les consorts N... et l'assureur font grief à l'arrêt de condamner les premiers à payer à la banque les intérêts perdus afférents aux contrats de prêts résolus consentis à Mme G... BT... et à M. et Mme MO..., alors :
« 2°/ que la fonction de la responsabilité est de replacer la victime dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée sans la faute alléguée ; qu'en condamnant le notaire et son assureur à indemniser la banque des gains qu'elle avait tirés du prêt et qu'elle devrait restituer aux acquéreurs quand, sans la faute du notaire, la vente n'aurait pas été conclue, de sorte que la banque n'aurait pas consenti de prêt, ni perçu les gains en cause, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ;
3°/ qu'en toute hypothèse, la détermination d'un préjudice suppose de prendre en compte les inconvénients subis par le demandeur à l'action du fait de la faute invoquée, ainsi que les avantages en découlant ; qu'en condamnant le notaire et son assureur à indemniser la banque du gain manqué résultant de l'absence de perception des intérêts conventionnels qui auraient dû être versés par les acquéreurs jusqu'à l'échéance, sans rechercher si la résolution du prêt ne procurait pas à la banque un avantage lié à la restitution immédiate du capital emprunté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil. »
Réponse de la Cour
9. Ayant relevé que les fautes du notaire, à l'origine de la résolution de la vente, avaient entraîné la résolution de plein droit des prêts consentis à Mme G... BT... et à M. et Mme MO... par la banque, et avaient fait perdre à celle-ci les intérêts conventionnels auxquels elle aurait eu droit, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a pu en déduire qu'elle avait subi un préjudice en lien de causalité direct avec la faute commise par le notaire.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le cinquième moyen du pourvoi principal et le moyen du pourvoi incident, rédigés en termes identiques, réunis
Enoncé du moyen
11. Les consorts N... et l'assureur, d'une part, les acquéreurs, d'autre part, font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables l'ensemble des demandes en fixation de créance effectuées contre le vendeur en liquidation dans le cadre de la présente instance, alors « que les contestations portant sur le principe ou le montant d'une créance à l'encontre d'un débiteur placé en procédure collective, relèvent du juge du fond dès lors qu'elles posent une difficulté sérieuse ; qu'en jugeant irrecevables les demandes des acquéreurs tendant à voir consacrer la créance qu'ils détenaient à l'encontre du vendeur, placé en procédure collective aux motifs que l'instance avait été introduite postérieurement à l'ouverture de la procédure collective cependant que la détermination de ces créances, qui supposaient de trancher des contestations relatives à la résolution des ventes au montant des restitutions, aux responsabilités et aux compensations, posaient une question sérieuse relevant de la compétence du juge du fond, la cour d'appel a violé les articles L. 624-3 et R. 624-5 du code de commerce. »
Réponse de la Cour
12. Les acquéreurs et établissements de crédit ayant, comme ils en avaient l'obligation, s'agissant de créances postérieures à l'ouverture de la procédure collective du vendeur mais ne pouvant bénéficier du traitement préférentiel prévu par l'article L. 641-13 du code de commerce, déclaré leurs créances nées de la résolution des contrats qu'ils avaient conclus, leur demande de fixation de ces créances relevait exclusivement des attributions du juge de la vérification du passif, c'est-à-dire le juge-commissaire de la liquidation judiciaire du vendeur ou la cour d'appel statuant avec les pouvoirs de celui-ci. Si ces juridictions avaient estimé, d'office ou après avoir été saisis de ce point par les parties, que l'admission des créances litigieuses supposait, au préalable, de trancher des contestations sérieuses, notamment de se prononcer sur les causes de la résolution des contrats et ses conséquences, c'est à ces juridictions qu'il aurait appartenu de surseoir à statuer sur la fixation des créances, d'inviter les parties à saisir le juge du fond compétent pour trancher les contestations puis, une fois celles-ci jugées, de fixer elles-mêmes les créances au passif, en fonction de la décision du juge du fond, ce dernier, seulement chargé de se prononcer sur les contestations, n'ayant aucune compétence pour procéder à cette fixation. C'est dès lors à bon droit que, saisie par les acquéreurs et établissements de crédit de demandes tendant à la fixation de créances sans qu'ait été suivie la procédure normale de vérification du passif, la cour d'appel, tout en prononçant la résolution des contrats, a, dans le dispositif de l'arrêt, déclaré irrecevables ces demandes « dans le cadre de la présente instance. »
13. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le quatrième moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
14. Les consorts N... et l'assureur font grief à l'arrêt de statuer ainsi, alors, « que le juge doit chiffrer le montant des condamnations qu'il prononce ; qu'en condamnant le notaire à payer à la banque les intérêts perdus, sans les évaluer, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
15. La banque conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit.
16. Cependant, le moyen est né de la décision attaquée.
17. Il est en conséquence recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu l'article 12, alinéa 1, du code de procédure civile :
18. Aux termes de ce texte, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables.
19. L'arrêt condamne les consorts N... à payer à la banque les intérêts perdus afférents au contrat de prêt n° [...] et avenant n° 1020 782 827 7 consenti à Mme G... BT... , et au contrat de prêt n° [...] consenti à M. et Mme MO....
20. En statuant ainsi, sans déterminer le montant des intérêts alloués à la banque, la cour d'appel a méconnu son office et violé le texte susvisé.
Demande de mise hors de cause
21. Le pourvoi ne critique pas les chefs de dispositifs concernant la société [...] et U... LN... devenue société Atelier l'échelle, ni ceux concernant la société Mutuelle des architectes de France ; il convient en conséquence de les mettre hors de cause.




Soc. 25 novembre 2020 n° 19-14.748

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.
IK


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Cassation partielle

M. SCHAMBER, conseiller doyenfaisant fonction de président


Arrêt n° 1102 F-D

Pourvois n°Y 19-10.884Y 19-14.748 JONCTION





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020
I - La société DJO France, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° Y 19-10.884,
II - M. M... F..., domicilié [...] , a formé le pourvoi n° Y 19-14.748,
contre l'arrêt rendu le 22 novembre 2018 par la cour d'appel de Pau (chambre sociale), dans le litige les opposant.
La demanderesse au pourvoi n° Y 19-10.884 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le demandeur au pourvoi n° Y 19-14.748 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de M. Sornay, conseiller, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de la société DJO France, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. F..., après débats en l'audience publique du 7 octobre 2020 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sornay, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° Y 19-10.884 et Y 19-14.748 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 22 novembre 2018), M. F... a été engagé à compter du 12 novembre 2007 par la société DJO France en qualité de directeur administratif et financier du groupe.
3. Licencié pour faute grave le 2 décembre 2015, le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 29 décembre 2015 afin de faire constater l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement et d'obtenir la condamnation de son employeur à lui verser, outre des indemnités de rupture et des dommages-intérêts pour licenciement abusif, le paiement de son bonus contractuel au titre de l'année 2015, un rappel de salaire pour heures supplémentaires et repos compensateurs, et des dommages-intérêts pour travail dissimulé.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi de l'employeur n° Y 19-10.884, ci-après annexé
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen du pourvoi du salarié n° Y 19-14.748, pris en sa première branche
5. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'un bonus au titre de l'année 2015, alors « que lorsque le droit à un bonus variable résulte du contrat de travail et est soumis à des conditions de résultat, notamment d'atteinte d'objectifs, de réussite de missions et de qualité du travail, il appartient à l'employeur de justifier que ces objectifs qualitatifs et quantitatifs n'ont pas été réalisés pour en refuser le paiement ; qu'après avoir constaté que le contrat de travail du salarié stipulait une rémunération variable représentant ''25 % de la rémunération brute annuelle au maximum, bonus acquis, comme suit : un tiers en cas d'atteinte par la société de l'objectif de chiffre d'affaires fixé par le groupe ; un tiers en cas d'atteinte par la société de l'objectif de maîtrise des dépenses opérationnelles (OPEX) ; un tiers octroyé par le directeur financier Europe en fonction de la réussite des missions confiées au salarié et de la qualité de son travail. Ce bonus sera calculé trimestriellement et fera l'objet d'un versement à hauteur de 50 % à la fin de chaque période, et d'une régularisation en fin d'année'' et que le principe du ''bonus'' ne faisait pas débat, la cour d'appel qui, pour rejeter la demande du salarié en paiement du bonus au titre de l'année 2015, a retenu que les résultats étaient méconnus et a reproché à l'intéressé de n'avoir offert aucune proposition de calcul, a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1315 du code civil, devenu l'article 1353 de ce code :
6. Aux termes de ce texte, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
7. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'une certaine somme au titre de la part variable de sa rémunération pour l'année 2015 (bonus) l'arrêt, après avoir rappelé les dispositions contractuelles se rapportant à la partie variable de la rémunération dont le montant dépend pour partie d'une part des objectifs atteints au sein du groupe et de la société, et d'autre part de la réussite de missions confiées au salarié, et constaté que le principe du bonus ne faisait pas débat, retient que les bonus versés au salarié sont très variables quant à leur montant, que le versement de ces bonus est soumis à des conditions contractuelles de résultat, notamment d'atteinte d'objectifs, de réussite de missions et de qualité de travail, que ces résultats sont méconnus et que le salarié n'offre aucune proposition de calcul.
8. En statuant ainsi, alors qu'il appartient à l'employeur de communiquer les éléments nécessaires au calcul de la part de rémunération variable d'un salarié, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé.


Et sur le second moyen du même pourvoi, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
9. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, congés payés, repos compensateurs et indemnité pour travail dissimulé, alors « qu'en retenant que les pièces produites par M. F... ne pouvant ''être considérées comme constituant un justificatif suffisamment probant des horaires de travail qu'il aurait effectivement effectué
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail :
10. Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l'article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, l'employeur tient à la disposition de l'inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.
11. Enfin, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.
12. Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
13. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'heures supplémentaires pour la période de fin janvier 2013 au 2 décembre 2015, la cour d'appel a retenu qu'au soutien de ses prétentions, le salarié produisait aux débats un listing informatique établi pour les besoins de la cause reconstituant ses horaires de travail à compter de la semaine 27 jusqu'à la semaine 49 et un planning informatique portant sur un mois type (190 heures prestées soit 45 heures/semaine) mais que ces pièces étaient insuffisantes à étayer la demande d'heures supplémentaires de l'intéressé, lequel d'une part procédait par extrapolation, ce qui est impossible en matière de demande d'heures supplémentaires, et d'autre part produisait un décompte d'heures totalement imprécis et approximatif qui ne comportait notamment aucune indication de ses heures d'embauche et de débauche et par conséquent sur son amplitude horaire quotidienne de travail, ce dont l'arrêt déduit que les pièces versées aux débats par le salarié ne pouvaient être considérées comme constituant un justificatif suffisamment probant des horaires de travail qu'il aurait effectivement effectués et que l'intéressé ne pouvait qu'être débouté de ses demandes à ce titre.
14. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que le salarié présentait à l'appui de sa demande des éléments suffisamment précis afin de permettre à l'employeur d'y répondre, et que ce dernier n'avait fourni aucun élément de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par l'intéressé, la cour d'appel, qui a fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié, a violé le texte susvisé.




Civ.1 25 novembre 2020 n° 19-10.824

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION______________________

Audience publique du 25 novembre 2020



Rejet

Mme BATUT, président


Arrêt n° 720 F-D
Pourvoi n° G 19-10.824



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020
La société Marcassus sport, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formé le pourvoi n° G 19-10.824 contre l'arrêt rendu le 22 novembre 2018 par la cour d'appel de Toulouse (3e chambre), dans le litige l'opposant à M. S... I..., domicilié [...] , défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Avel, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Marcassus sport, de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de M. I..., après débats en l'audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Avel, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Randouin, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 22 novembre 2018) et les productions, le 21 décembre 2012, la société Marcassus sport (le vendeur) a vendu à M. I... (l'acheteur) un véhicule automobile pour un montant de 73 500 euros.
2. Des anomalies de fonctionnement étant apparues, une expertise amiable contradictoire a été effectuée à la demande de l'acheteur et le rapport a été déposé le 30 octobre 2014.
3. Le 25 mars 2015, l'acheteur a assigné en référé le vendeur aux fins d'obtenir une expertise judiciaire qui a été ordonnée le 28 avril 2015. L'expert a déposé son rapport le 30 décembre 2016, et l'acheteur a assigné au fond le vendeur par acte du 24 juillet 2017.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le vendeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à l'acheteur la somme de 23 634,83 euros au titre de la restitution d'une partie du prix de vente en application de la garantie des vices cachés, alors :
« 1°/ que le point de départ de la prescription biennale en matière de vice caché est fixé au jour de la découverte du vice par l'acheteur ; que la cour d'appel a constaté que le rapport d'expertise amiable contradictoire en date du 30 octobre 2014 avait conclu que le véhicule présentait des désordres apparus depuis l'achat et jamais solutionnés (voyant gestion moteur allumage récurrent, usure pneumatique très importante malgré une géométrie dans les normes) et que les vices, consistant en l'impossibilité de maintenir la proportion air/carburant dans le moteur et résultant de la géométrie des trains, n'avaient été révélés que par les opérations d'expertise amiable ; qu'elle a constaté que l'assignation au fond avait été délivrée le 24 juillet 2017 ; qu'il s'évinçait de ces constatations que l'action au fond n'avait pas été initiée dans le délai biennal expirant le 30 octobre 2016 et qu'elle était irrecevable ; qu'en énonçant cependant que la prescription biennale n'était pas acquise au jour de l'assignation au fond délivrée le 24 juillet 2017, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1648 du code civil ;
2°/ que la cour d'appel a constaté que le rapport d'expertise amiable contradictoire en date du 30 octobre 2014 avait conclu que le véhicule présentait des désordres apparus depuis l'achat et jamais solutionnés (voyant gestion moteur allumage récurrent, usure pneumatique très importante malgré une géométrie dans les normes) et que les vices, consistant en l'impossibilité de maintenir la proportion air/carburant dans le moteur et résultant de la géométrie des trains, n'avaient été révélés que par les opérations d'expertise amiable ; qu'elle a constaté que l'acheteur avait délivré le 25 mars 2015 une assignation en référé aux fins d'expertise judiciaire puis une assignation au fond le 24 juillet 2017 ; qu'en énonçant que l'assignation en référé avait interrompu le délai de prescription, sans préciser en quoi le rapport d'expertise amiable contradictoire était insuffisamment explicite sur l'existence des vices cachés et justifiait une nouvelle expertise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1648 du code civil ;
3°/ que l'interruption du délai biennal de prescription de l'article 1648 du code civil par une assignation aux fins d'expertise fait courir un nouveau délai de même durée que l'ancien, qui court à compter de l'ordonnance désignant l'expert ; que la cour d'appel a constaté que l'assignation en référé-expertise avait interrompu le délai de prescription à la date du 25 mars 2015 et qu'un expert judiciaire avait été désigné par une ordonnance du 28 avril 2015 ; qu'il s'évinçait de ces constatations qu'un nouveau délai de deux ans avait commencé à courir à compter du prononcé de l'ordonnance, expirant le 28 avril 2017 ; qu'en jugeant cependant que l'action au fond initiée le 24 juillet 2017 était recevable, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1648 du code civil ;
4°/ que la cour d'appel a relevé que l'expert concluait que « les cotes de la géométrie du train roulant du véhicule respectent les données du constructeur établies par le bureau d'études de celui-ci. Le constructeur interrogé sur ce point par l'expert a répondu que ladite usure est une caractéristique de ce type de véhicule, due aux données établies pour la géométrie des trains de suspension, et met en garde contre la tentation de modifier la géométrie pour réduire l'usure » ; qu'il s'évinçait de ces constatations que l'usure prématurée des pneumatiques était une simple caractéristique technique de ce type de véhicule et non un vice ; qu'en retenant cependant l'existence d'un vice lié à la géométrie des trains, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1641 du code civil. »
Réponse de la Cour
5. Aux termes de l'article 1648 du code civil, l'action résultant des vices rédhibitoires doit être intentée par l'acquéreur dans un délai de deux ans à compter de la découverte du vice. Ce délai est interrompu par une assignation en référé jusqu'à l'extinction de l'instance, conformément à l'article 2241 du code civil. Il est, en outre, suspendu lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès en application de l'article 2239 du code civil, le délai recommençant à courir à compter du jour où la mesure a été exécutée.
6. Après avoir estimé, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, en se fondant sur le rapport d'expertise judiciaire, que le véhicule présentait des vices cachés constitués de l'usure prématurée des pneumatiques et de l'impossibilité de réglage du rapport air/carburant et que ces vices n'avaient été révélés à l'acheteur que par les opérations d'expertise amiable, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que la prescription n'était pas acquise le 25 mars 2015, lors de l'assignation en référé, et que, le rapport d'expertise judiciaire ayant été déposé le 30 décembre 2016, elle ne l'était pas non plus le 24 juillet 2017, lors de l'assignation au fond, de sorte qu'elle a pu accueillir les demandes de l'acheteur.
7. Le moyen n'est donc fondé.




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