Crim. 20 septembre 2016 n° 16-80.820 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Eric X..., - Mme Catherine Y...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 26 janvier 2016, qui, dans l'information suivie contre eux, des chefs de chantage et d'extorsion de fonds, a prononcé sur leur demande d'annulation de pièces de la procédure ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 6 septembre 2016 où étaient présents : M. Guérin, président, M. Bonnal, conseiller rapporteur, M. Straehli, M. Buisson, Mme Durin-Karsenty, M. Larmanjat, M. Ricard, conseillers de la chambre, M. Barbier, M. Talabardon, M. Ascensi, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Lagauche ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller BONNAL, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE, les avocats ayant eu la parole en dernier ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 26 avril 2016, joignant les pourvois et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs, et le mémoire en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, 8 et 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, préliminaire, 41, 81, 100-5, 170, 171, 174, 591, 593, 706-73, 706-96 et 802 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation du principe de la loyauté des preuves, et des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure ;
" aux motifs que, selon la Cour européenne des droits de l'homme, si l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme garantit le droit à un procès équitable, il ne réglemente pas pour autant l'admissibilité des preuves en tant que telles, matière qui relève au premier chef du droit interne ; qu'aux termes de l'article 427 du code de procédure pénale, hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve ; que toutefois, le principe de la liberté des preuves n'autorise pas les agents de l'autorité publique à s'émanciper des principes de légalité, de loyauté et de proportionnalité qui régissent la procédure pénale ; qu'ainsi, selon les articles 170 et 171 du code de procédure pénale, il y a nullité d'un acte ou d'une pièce de la procédure accompli ou dressé par un agent de l'autorité publique lorsque la méconnaissance d'une formalité substantielle prévue par une disposition de procédure pénale a porté atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne, notamment quand l'agent public a incité une personne à commettre l'infraction ; que la provocation policière est cependant admissible lorsqu'elle a pour seul effet de révéler l'existence des agissements délictueux afin d'en permettre la constatation ou d'en arrêter la continuation ; qu'en revanche aucune disposition légale ne permet au juge répressif d'écarter les pièces à conviction produites par les parties au seul motif qu'elles auraient été obtenues de façon illicite ou déloyale ; qu'ainsi des enregistrements réalisés clandestinement par une personne privée ne constituent pas, en eux-mêmes, des actes ou des pièces de l'information au sens de l'article 170 précité et comme tels susceptibles d'être annulés en application de l'article 171, mais sont des moyens de preuve qui peuvent être discutés contradictoirement ; qu'en l'espèce, il est constant que M. X... et Mme Y... ont fait paraître en mars 2012 un ouvrage très critique sur Mohamed VI intitulé « Le Roi prédateur » et qu'ils ont conclu avec les éditions du Seuil un second contrat portant sur la publication d'un livre enquête relatif, lui aussi, à la monarchie chérifienne et plus particulièrement à la famille royale ; que, le 23 juillet 2015, à 14 heures 29, M. X... a contacté le secrétaire particulier du roi du Maroc ; que l'avocat de celui-ci, Maître A...l'a rappelé et que les deux hommes ont fini par convenir d'un rendez-vous à Paris ; que, lors de leur première rencontre le 11 août 2015 à l'hôtel Royal Monceau, Maître A...a enregistré leur conversation à l'aide de son téléphone portable ; que, le 20 août 2015, Maître Boussier, avocat à Paris, dénonçait par écrit au procureur de la République de Paris, les faits qu'il qualifiait de « tentative de chantage et extorsion de fonds » en lui transmettant la retranscription par huissier de justice de la conversation que son confrère Maître A...avait eue avec M. X... et en affirmant que celui-ci avait proposé de renoncer à la parution de son ouvrage moyennant le versement d'une somme de 3 millions d'euros ; que, même si les propos tenus par M. X... ne sont pour l'essentiel pas audibles, cette retranscription – dont il n'est pas demandé l'annulation – démontre incontestablement que la conversation a, notamment, porté sur le versement d'une somme qualifiée, par Maître A..., de « conséquente » en contrepartie de l'abandon de la parution d'un nouvel ouvrage ; que, par soit-transmis du même jour, le procureur de la République a saisi la brigade de répression de la délinquance aux personnes afin qu'elle diligente une enquête « pour des faits de tentative d'extorsion de fonds » ; que deux autres rendez-vous ont eu lieu, le premier entre Maître A...et M. X... et le second, après ouverture d'une information judiciaire entre les deux premiers et Mme Y... ; que ces deux rencontres ont été confirmées par les enquêteurs qui avaient mis en place un dispositif de surveillances physiques puis requis des hôtels concernés la remise des bandes de vidéo-surveillance ; que les propos tenus au cours de ces deux derniers échanges ont été à nouveau enregistrés par Maître A...à l'insu de ses deux interlocuteurs ; qu'il n'est pas sérieusement soutenable, et d'ailleurs pas soutenu, que l'autorité publique a provoqué à la commission des infractions reprochées aux deux mis en examen ; que, de même, il est incontestable que les dispositions de l'article 706-96 du code de procédure pénale, qui permettent la mise en place, sur autorisation du juge d'instruction et sans le consentement des intéressés, d'un dispositif de captation et d'enregistrement de paroles et d'images, ne trouvaient pas à s'appliquer dans le cadre de cette enquête portant sur les délits de chantage et d'extorsion ; que les enregistrements contestés ne procèdent, dans leur confection, d'aucune intervention directe ou indirecte de l'autorité publique ; qu'il n'y a donc pas eu violation des dispositions de l'article 8-2 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'en effet, les éléments objectifs du dossier ne permettent pas de démontrer que les enquêteurs ni le procureur de la République ni le magistrat instructeur ont incité Maître A...à réaliser des enregistrements clandestins des propos échangés au cours des deux derniers rendez-vous avec les mis en examen ; que l'un des requérants reconnaît d'ailleurs que « les services de police, en connaissance de cause, ont laissé Maître A..., avocat inscrit au barreau de Paris, procéder à l'enregistrement clandestin, en dehors de tout cadre légal » (page 15 de la requête X... – soulignage de la cour) ; que le fait que Maître A...soit avocat et qu'il ait tenu régulièrement informé les services de police et l'autorité judiciaire des agissements des deux mis en cause, ne permet pas pour autant de l'assimiler à un agent de l'autorité publique ; qu'en effet, en application des articles 1 et 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, « la profession d'avocat est une profession libérale et indépendante » et celui qui l'exerce jure de le faire avec indépendance ; que les magistrats et les enquêteurs, qui savaient effectivement que Maître A...avait enregistré son premier entretien avec M. X..., qui pouvaient se douter qu'il allait à nouveau enregistrer clandestinement son deuxième entretien avec le même interlocuteur puis qui avaient certainement la conviction qu'il procéderait de même lors de l'entretien final avec M. X... et Mme Y..., ne disposaient d'aucun moyen juridique pour interdire à cet avocat de tenter de rapporter la preuve de la commission d'une infraction qui était en train de se commettre au préjudice de son client ; qu'ils se sont donc contentés de mettre en place un dispositif de surveillance et d'interpellation, dont la légalité n'est pas contestable, laissant l'avocat de la victime potentielle libre de se constituer des preuves personnelles ; qu'il ne saurait être déduit du fait que Maître A...a profité d'une suspension de l'entretien du 27 août pour confirmer aux policiers, de sa chambre d'hôtel, « l'intention parfaitement frauduleuse » de M. X... et de Mme Y... puis est retourné auprès d'eux « comme prévu », qu'il était manipulé par les agents de l'autorité publique ; que, d'ailleurs, l'expression litigieuse peut tout aussi bien s'entendre comme signifiant qu'il avait convenu avec ses deux interlocuteurs de revenir auprès d'eux après cette suspension ; que cette position en retrait des enquêteurs ne saurait être assimilée à une provocation à la commission de l'infraction ni à un contournement déloyal des moyens de preuve et se justifie puisqu'elle avait pour seul objectif que soit révélée l'existence des agissements délictueux de M. X... et de Mme Y... afin d'en permettre la constatation et d'en arrêter la continuation ; que les enregistrements litigieux et leurs retranscriptions sur procès-verbal ne constituent donc pas des pièces ou actes de procédure au sens de l'article 170 du code de procédure pénale ; que leur contenu pourra être discuté contradictoirement au cours de la procédure ; que les affirmations des intéressés selon lesquelles leur but « était [...] de donner la parole au Roi du Maroc et de recueillir ses commentaires » (page 2, dernier paragraphe de la requête X...) constituent des moyens de défense dont il appartient au juge d'instruction de vérifier la pertinence dans le cadre d'une instruction qui doit être menée à charge et à décharge ; que la retranscription des conversations ne permet pas d'identifier les sources de M. X... et de Mme Y... ; qu'ils permettent en revanche de suspecter que les deux intéressés ont participé à la commission d'infractions ; qu'ainsi, à supposer établi que les mis en examen avaient la qualité de journaliste, ce qui n'est pas démontré en l'état de la procédure soumise à l'examen de la cour, les dispositions de l'article 100-5 du code de procédure pénale selon lequel, à peine de nullité ne peuvent être transcrites les correspondances avec un journaliste permettant d'identifier une source en violation de l'article 2 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, n'ont pas été violées ; qu'il n'a pas non plus été porté atteinte à l'article 10 de la convention européenne des droits de l'homme relatif à la liberté d'expression ; qu'en toute hypothèse, l'interpellation, la garde à vue et la mise en examen des deux intéressés ne trouvent pas leur fondement nécessaire dans les enregistrements litigieux ni dans leurs retranscriptions ; qu'en effet, les intéressés avaient déjà fait paraître un livre polémique sur le roi du Maroc, qualifié de « Roi prédateur » ; qu'ils travaillaient à la rédaction d'un nouvel essai critique sur la famille royale chérifienne et son entourage ; que l'un d'eux a pris l'initiative de contacter le secrétaire particulier du monarque et qu'il a rencontré à deux reprises l'avocat du roi ; que, lors du dernier rendez-vous, ils se sont fait remettre chacun à titre d'acompte 40 000 euros en liquide contre l'engagement de renoncer à la publication de leur nouvel ouvrage moyennant le versement d'une somme de 2 millions d'euros ; que les enquêteurs avaient donc une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner que M. X... et Mme Y... venaient de commettre ou avaient tenté de commettre les délits de chantage et d'extorsion leur permettant de les placer en garde à vue en application de l'article 63-2 du code de procédure pénale ; qu'au demeurant, ces mêmes éléments constituent, en eux-mêmes, des indices graves ou concordants, au sens de l'article 80 du code de procédure pénale, rendant vraisemblable que M. X... et Mme Y... ont pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont le juge d'instruction est saisi ; que leurs mises en examen des chefs de chantage et d'extorsion sont justifiées ;
" 1°) alors que la recherche de la preuve de la commission d'une infraction doit se faire dans le respect des règles de la procédure et des droits de la défense ; que la mise en place d'un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, la captation, la fixation, la transmission et l'enregistrement de paroles prononcées à titre privé ou confidentiel, dans des lieux privés ou publics, n'est autorisée que lorsque l'information porte sur un crime ou un délit entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 du code de procédure pénale ; qu'ayant constaté que tel n'était pas le cas en l'espèce, ce qui interdisait tout enregistrement des conversations, la chambre de l'instruction ne pouvait pas en déduire que les enregistrements clandestins avaient été cependant régulièrement effectués parce qu'ils avaient été réalisés par Maître A..., avocat, tout en constatant que celui-ci avait agi en concertation avec les enquêteurs dans le cadre d'une mise en place d'un dispositif de surveillance et d'interpellation ; qu'en l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision ;
" 2°) alors que le droit au procès équitable et le principe de loyauté des preuves imposent aux autorités publiques de ne pas participer, directement ou indirectement, dans la confection irrégulière de preuves ; que porte atteinte à ce principe, l'enregistrement effectué de manière clandestine par des enquêteurs par le truchement d'un tiers qui n'est pas soumis à la même obligation de loyauté qu'eux, et ayant pour but d'obtenir des indices de commission d'une infraction ; que pour estimer les enregistrements valables, la chambre de l'instruction a énoncé que les enregistrements avaient été effectués par Maître A..., avocat, tandis que cet avocat, auxiliaire de justice, a agi en concertation étroite avec les enquêteurs, les rendez-vous enregistrés étant planifiés avec la mise en place « d'un dispositif de surveillance et d'interpellation » ; que ces énonciations constatant des enregistrements planifiés à l'avance avec les enquêteurs en vue d'une interpellation des journalistes, établissent la participation des enquêteurs dans la confection de ces preuves ; qu'en estimant cependant valide la procédure, la chambre de l'instruction a méconnu les principes susvisés ;
" 3°) alors que les articles 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, 100-5, alinéa 4, du code de procédure pénale et 2 de la loi du 29 juillet 1881 prévoient le secret des sources des journalistes ; qu'au regard de ces dispositions, sont constitutifs d'une atteinte au droit à la liberté d'expression les mesures pouvant amener à l'identification des sources d'un journaliste ou de toute personne publiant des informations, quand bien même ces mesures seraient demeurées sans résultat ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que le rendez-vous entre M. A..., M. X... et Mme Y... avait « pour objet de lui communiquer les documents sources des faits allégués » et destinés à être publiés pour informer le public ; que, dès lors, la chambre de l'instruction ne pouvait considérer l'absence d'atteinte aux sources sans méconnaître les dispositions susvisées ;
" 4°) alors que l'irrégularité d'un acte entraîne la nullité des actes subséquents qui en constituent le support nécessaire ; que la chambre de l'instruction a écarté la nullité des interpellations, gardes à vue et mises en examen aux motifs que constituent le support de ces mesures la publication précédente d'un livre par les journalistes et le fait qu'ils se sont fait remettre une somme d'argent ; qu'en se prononçant par ces motifs inopérants à justifier des interpellations, gardes à vue et mises en examen, et tandis qu'il résulte au contraire des énonciations de l'arrêt que ce sont les rendez-vous enregistrés qui ont déterminé ces mesures, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision " ;
Vu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et préliminaire du code de procédure pénale ;
Attendu que porte atteinte aux principes du procès équitable et de la loyauté des preuves la participation de l'autorité publique à l'administration d'une preuve obtenue de façon illicite ou déloyale par une partie privée ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 20 août 2015, Maître Boussier, avocat, agissant au nom du Royaume du Maroc, a dénoncé au procureur de la République des faits de chantage et d'extorsion de fonds en joignant à sa plainte l'enregistrement d'une conversation qui s'était déroulée le 11 août précédent entre le représentant de cet Etat, Maître A..., et M. X..., auteur, avec Mme Y..., d'un livre paru en 2012 sous le titre " Le Roi prédateur ", conversation au cours de laquelle M. X... aurait sollicité le paiement d'une somme d'argent contre la promesse de ne pas publier un nouvel ouvrage consacré au souverain marocain ; qu'au cours de l'enquête préliminaire ouverte sur ces faits, Maître A...a produit le 21 août l'enregistrement d'une nouvelle conversation qu'il venait d'avoir avec M. X..., en un lieu placé sous la surveillance des enquêteurs, qui en ont par ailleurs retranscrit la teneur sur procès-verbal ; qu'après ouverture, le 26 août, d'une information judiciaire, Maître A...a informé les enquêteurs qu'un nouveau rendez-vous avait été pris avec M. X... et Mme Y... le 27 août, lequel s'est déroulé en un lieu également placé sous surveillance policière ; qu'à l'issue de la conversation entre les trois protagonistes, enregistrée par Maître A..., des sommes d'argent ont été remises par ce dernier aux deux journalistes, qui ont alors été interpellés, les enquêteurs retranscrivant l'enregistrement sur procès-verbal ;
Attendu que, mis en examen des chefs de chantage et d'extorsion de fonds les 28 et 29 août 2015, M. X... et Mme Y... ont saisi, le 7 septembre suivant, la chambre de l'instruction de deux requêtes en nullité des enregistrements des 21 et 27 août 2015, des procès-verbaux de retranscription et des actes subséquents ;
Attendu que, pour rejeter les requêtes, et dire n'y avoir lieu à annulation, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle avait relevé la présence constante des enquêteurs sur les lieux des rencontres des 21 et 27 août 2015, la remise aux policiers par le représentant du plaignant des enregistrements litigieux dès la fin de ces rencontres, suivie, le lendemain ou le surlendemain, de leur retranscription par les enquêteurs, et les contacts réguliers entre ces derniers et le représentant du plaignant, d'une part, et l'autorité judiciaire, d'autre part, pendant ces rencontres ayant conduit à l'interpellation des mis en cause à l'issue de la seconde d'entre elles, ce dont il se déduisait que l'autorité publique avait participé indirectement à l'obtention des enregistrements, par un particulier, sans le consentement des intéressés, de propos tenus par eux à titre privé, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 26 janvier 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Reims, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt septembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 20 septembre 2016 n° 15-83.224
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Mme Lysie X...,
contre l'arrêt n° 164 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de SAINT-DENIS de la RÉUNION, en date du 28 avril 2015, qui, dans l'information suivie contre elle du chef de travail dissimulé, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction de remise de biens meubles, en vue de leur aliénation, à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 21 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Barbier, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire BARBIER, les observations de la société civile professionnelle MONOD, COLIN et STOCLET, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-3 et L. 8224-3 du code de travail, 111-3, 111-4 du code pénal, 99-2, 591 et 593 du code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, l'article 1er du premier Protocole additionnel à cette Convention ainsi que des articles 2, 9 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction du 5 janvier 2015, qui avait ordonné la remise, notamment, d'un véhicule BMW série 1 immatriculé ..., d'un véhicule volkswagen amarok immatriculée ..., d'un véhicule Nissan Navarra immatriculée ..., à l'agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués en vue de leur aliénation ;
" aux motifs propres que, en application des dispositions des articles L. 8224-3 3° du code du travail et 131-21 du code pénal, les personnes poursuivies pour travail clandestin encourent la peine de confiscation des biens ayant servi à commettre l'infraction et de ceux qui en ont été le produit direct ou indirect ; qu'en application des dispositions de l'article 99-2 du code procédure pénale, « le juge d'instruction peut également ordonner de remettre à l'AGRASC en vue de leur aliénation des biens meubles placés sous main de justice appartenant aux personnes poursuivies, dont la conservation n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité et dont la confiscation est prévue par la loi, lorsque le maintien de la saisie serait de nature à diminuer la valeur du bien » ; que l'activité illicite issue de l'infraction de travail clandestin a permis au cours des années 2011, à compter du 30 mai, 2012, 2013 et 2014 de dégager un bénéfice de l'ordre 550 000 euros, que ce montant, qui résulte d'une évaluation objective réalisée à partir de la quantité de matériaux extraite et de sa valeur marchande, ne fait l'objet d'aucune contestation sérieuse et argumentée au terme d'une démonstration chiffrée et étayée par les pièces comptables, ; que Mme X... évalue elle-même le montant de son chiffre d'affaires à 10 000 euros mensuel ce qui représenterait 360 000 euros sur une période de trois années ; qu'au regard du montant des seuls revenus légaux du couple, revenus locatifs de Mme X..., il ne peut être sérieusement contesté en l'état que seul le profit conséquent de cette activité occulte et illicite a pu permettre à celle-ci d'acquérir les véhicules litigieux dont les valeurs d'acquisition cumulées dépassent largement les 100 000 euros ; qu'il importe peu que l'infraction soit ou non reconnue par l'interessée (elle n'est d'ailleurs pas réellement contestée), dès lors qu'il existe dans la procédure suffisamment d'indices graves ou concordants ayant permis sa mise en examen, non contestée à ce jour ; que la confiscation porte sur des biens qui sont l'objet ou le produit direct ou indirect de l'infraction ; que la disproportion entre la gravité de l'infraction et l'importance des saisies opérées résulte d'une analyse non argumentée et subjective de la défense, étant observé que le profit illicite dégagé par cette activité délictueuse a pu être chiffré à 550 000 euros et que le seul préjudice des organismes sociaux serait de l'ordre de 200 000 euros ; qu'il est incontestable, s'agissant de véhicules automobiles, que le maintien de leur saisie alors que l'information judiciaire ne fait que commencer, serait de nature à en diminuer leur valeur ;
" et aux motifs éventuellement adoptés que la saisie de plusieurs véhicules a été réalisée le 16 décembre 2014 ; qu'il résulte de la procédure que M. Z...époux de Mme Marie-Lysis X... exploite sans autorisation une carrière située dans le lit de la rivière Saint Etienne commune de Saint Louis ; que les surveillances effectuées par les enquêteurs ont confirmé les constatations réalisées par la Brigade Nature Océan Indien matérialisant cette activité illégale et quantifier un volume d'extraction évalué à une centaine de godets par semaine ; que l'enquête patrimoniale permet de déterminer que l'activité d'extraction menée par M. Z...est totalement dissimulée tant sur l'absence de déclaration au registre du commerce que sur l'absence de déclaration aux services fiscaux ; que les chèques des clients de la carrière sont déposés sur le compte bancaire personnel de Mme X... ; qu'une comptabilité occulte de l'activité de carrière tenue par Mme X... confirme l'emploi de deux salariés toute l'année, évalue le chiffre d'affaires de cette exploitation à environ 550 000 euros sur les exercices 2011 à 2014 pour un bénéfice de 250 000 euros environ ; que les perquisitions réalisées dans le cadre de la présente commission rogatoire permettent la découverte de 47 370 euros en numéraires et confirment la dissimulation de l'activité d'extraction ; que Mme X... participe pleinement à cette activité et en tire un profit personnel ; que les différentes gardes à vues menées dans le cadre de cette procédure confirment l'ensemble des faits reprochés à M. Z...; que les services du régime social des indépendants et de l'Urssaf évaluent un préjudice total de 200 000 euros ; que l'ensemble des biens saisis peut être considéré comme le produit direct ou indirect et/ ou l'instrument de l'infraction ; que la confiscation des biens est susceptible d'être ordonnée en vertu de l'article 131-21, alinéa 3, du code pénal ; que la conservation de ces biens n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité ;
" 1°) alors que les dispositions de l'article 99-2 du code de procédure pénale méconnaissent le principe du contradictoire, résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ainsi que la propriété privée, garantie par les articles 2 et 17 de la même Déclaration ; que l'inconstitutionnalité de l'article 99-2 du code de procédure pénale, qui viendra à être déclarée par le Conseil constitutionnel saisi par la voie de la question prioritaire de constitutionnalité posée à l'occasion du présent pourvoi, privera de fondement juridique l'arrêt attaqué ;
" 2°) alors qu'en tout état de cause, nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique ; que, pour justifier une privation de propriété, le rapport de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé doit être raisonnable ; que l'article 99-2 du code de procédure pénale, qui autorise la vente des biens saisis d'une personne poursuivie pénalement, mais non condamnée, porte une atteinte excessive au droit au respect de la propriété de la personne poursuivie protégé par l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ; que la chambre de l'instruction devait dès lors écarter l'application de l'article 99-2 du code de procédure pénale, au besoin d'office ;
" 3°) alors que la remise de biens à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis prévue par l'alinéa 2 de l'article 99-2 du code de procédure pénale, en vue de leur aliénation, n'est possible que si la confiscation desdits bien est prévue par la loi ; que le travail clandestin par dissimulation d'activité est caractérisé par l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce ; qu'en l'espèce, il était reproché à Mme X... d'avoir prélevé du sable et des cailloux du bras de la rivière Saint Étienne ; que la chambre de l'instruction ne pouvait considérer que Mme X... encourait la peine complémentaire de confiscation de ses biens en application de l'article L. 8224-3 du code du travail, et en déduire que les biens saisis pouvaient être remis à l'AGRASC, tandis que l'extraction de sable d'une rivière ne peut être qualifiée de travail clandestin par dissimulation d'activité ;
" 4°) alors que la remise d'un bien saisi à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, en vue de son aliénation, suppose que ce bien ait été le produit, direct ou indirect de l'infraction poursuivie ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que l'information a été ouverte au mois de novembre 2014 en considération de la surveillance réalisée par la BNOI à compter du 10 février 2014 et jusqu'au 21 mars 2014 ; que Mme X... faisait valoir dans ses conclusions qu'aucun élément de l'enquête ne permettait de retenir l'existence d'une activité d'extraction avant cette date, de sorte que les biens saisis, qui avaient tous été acquis avant cette date, comme cela résultait des certificats d'immatriculations également saisis et en possession de la justice, ne pouvaient être le produit de l'infraction reprochée ; que la chambre de l'instruction ne pouvait se borner à considérer que Mme X... ne justifiait pas des dates d'acquisition des différents véhicules sans rechercher si ces dates résultait des certificats d'immatriculation, également saisis ;
" 5°) alors qu'en toute hypothèse, la remise d'un bien meuble à l'AGRASC en vue de sa vente n'est autorisée qu'autant que le maintien de la saisie sur le bien peut diminuer la valeur de celui-ci ; que la chambre de l'instruction ne pouvait se contenter d'affirmer péremptoirement que les objets saisis appartenant à Mme X... se dépréciaient, tandis qu'ils n'avaient fait l'objet de la saisie que depuis trois semaines lorsque le juge d'instruction a statué et depuis quelques mois lorsque la chambre d'instruction s'est prononcée, sans expliquer en quoi le maintien de la saisie était de nature à diminuer la valeur de véhicules qui n'étaient pas neufs " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'à la suite de réquisitoires introductif et supplétif en dates des 27 novembre et 17 décembre 2014, Mme X... a été mise en examen du chef de travail dissimulé par dissimulation d'activité pour avoir procédé à l'extraction du sable d'une rivière sur l'Ile de la Réunion ; que le juge d'instruction a ordonné la remise à l'Agrasc en vue de leur aliénation de trois véhicules automobiles ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que la Cour de cassation, a, par arrêt du 9 février 2016, dit n'y avoir lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité posée par la demanderesse à l'occasion du présent pourvoi ; qu'il s'ensuit que le grief est devenu sans objet ;
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu que les dispositions de l'article 99-2 du code de procédure pénale ne sauraient être regardées comme contraires à l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ;
Que, d'une part, les dispositions critiquées sont justifiées par l'objectif d'une bonne administration de la justice, consistant à éviter que le bien maintenu sous main de justice ne perde de sa valeur, soit, plus précisément, la nécessité d'éviter le dépérissement et la perte de valeur de scellés longuement immobilisés, en sorte que l'atteinte qui en résulte à la protection du droit de propriété apparaît proportionnée à l'objectif poursuivi ;
Que, d'autre part, ces dispositions ne sauraient être regardées comme privant le propriétaire de son droit de propriété, dès lors que l'article 99-2 du code de procédure pénale prévoit la consignation pendant dix ans du produit de la vente, et sa remise au propriétaire des objets s'il en fait la demande, en cas de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement, ou lorsque la confiscation n'est pas prononcée ;
Qu'enfin, la remise à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués d'un bien saisi en vue de son aliénation ne porte pas atteinte au principe du contradictoire, le texte invoqué prévoyant la notification de l'ordonnance du juge d'instruction ainsi qu'un recours contre cette ordonnance, de sorte que le propriétaire du bien est mis effectivement en mesure de faire valoir les motifs d'ordre juridique, économique ou personnel susceptibles de rendre disproportionnée au regard de ses droits la remise envisagée ;
D'où il suit que le grief ne saurait être admis ;
Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu qu'il est constant que Mme X... a été mis en examen du chef de travail dissimulé par dissimulation d'activité ; qu'en cet état, il encourt la confiscation qui autorise la saisie pratiquée ;
D'où il suit que le grief ne saurait être accueilli ;
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche :
Attendu que l'arrêt relève que le parquet a ouvert une information judiciaire contre personne non dénommée des chefs d'exécution d'un travail dissimulé, d'exercice sans autorisation d'une activité nuisible au débit des eaux ou aux milieux aquatiques, d'exploitation d'une carrière non autorisée et d'exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement sans autorisation et qu'il a pris le soin de préciser que la saisine couvrait les faits commis à compter du 30 mai 2011 ;
Attendu que par ces motifs, qui font ressortir qu'elle a souverainement analysé l'objet exact et l'étendue de la saisine du juge d'instruction, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le grief ne saurait être admis ;
Sur le moyen, pris en sa cinquième branche :
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance, l'arrêt énonce que la conservation des véhicules saisis, qui sont l'objet ou le produit direct ou indirect de l'infraction, serait de nature à diminuer leur valeur alors que l'information judiciaire ne fait que commencer ; que les juges ajoutent que le profit illicite dégagé par l'activité délictueuse a pu être chiffré à 550 000 euros et que le seul préjudice des organismes sociaux serait de l'ordre de 200 000 euros ; qu'enfin, la disproportion entre la gravité de l'infraction et l'importance des saisies opérées résulte d'une analyse non argumentée et subjective de la défense ;
Attendu que par ces motifs, procédant de son appréciation souveraine, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application de l'article 99-2, alinéa 2, du code de procédure pénale, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt septembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 20 septembre 2016 n° 15-83.223
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Joseph X...,
contre l'arrêt n° 163 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de SAINT-DENIS de la RÉUNION, en date du 28 avril 2015, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de travail dissimulé et infractions au code de l'environnement, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction de remise de biens meubles, en vue de leur aliénation, à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 21 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Barbier, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire BARBIER, les observations de la société civile professionnelle MONOD, COLIN et STOCLET, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-3 et L. 8224-3 du code de travail, 111-3, 111-4 du code pénal, 99-2, 591 et 593 du code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, l'article 1er du premier Protocole additionnel à cette Convention ainsi que des articles 2, 9 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise d'un vélo de route de marque Scott, d'un véhicule BMW M3 immatriculé ..., d'un véhicule Honda S 2000 immatriculé ..., d'une motocyclette Triumph immatriculée ..., d'une tablette tactile de marque Asus, d'un appareil photo canon de type 300 D, d'un véhicule Renault immatriculé ..., d'une pelleteuse CASE POCLAIN et d'un tracto de marque CAT, à l'agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués en vue de leur aliénation ;
" aux motifs propres que par décision distincte, il a été statué sur la requête en nullité et les moyens invoqués ont été déclaré sans fondement ; qu'en application des dispositions des articles L. 8224-3 3° du code du travail et 131-21 du code pénal, les personnes poursuivies pour travail clandestin encourent la peine de confiscation des biens ayant servi à commettre l'infraction et de ceux qui en ont été le produit direct ou indirect ; qu'en application des dispositions de l'article 99-2 du code procédure pénale, « le juge d'instruction peut également ordonner de remettre à l'AGRASC en vue de leur aliénation des biens meubles placés sous main de justice appartenant aux personnes poursuivies, dont la conservation n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité et dont la confiscation est prévue par la loi, lorsque le maintien de la saisie serait de nature à diminuer la valeur du bien » ; que l'activité illicite issue de l'infraction de travail clandestin a permis au cours des années 2011, à compter du 30 mai 2012, 2013 et 2014 de dégager un bénéfice de l'ordre 550 000 euros ; que ce montant, qui résulte d'une évaluation objective réalisée à partir de la quantité de matériaux extraite et de sa valeur marchande, ne fait l'objet d'aucune contestation sérieuse et argumentée au terme d'une démonstration chiffrée et étayée par les pièces comptables ; que la perquisition effectuée au domicile de M. X... a permis de découvrir 47 370 euros ce qui confirme la dissimulation de l'activité d'extraction, les explications données pour justifier l'origine de ces sommes étant fantaisistes ; qu'au regard du montant des seuls revenus légaux du couple, revenus locatifs de Mme Lysie Z..., il ne peut être sérieusement contesté en l'état que seul le profit conséquent de cette activité occulte et illicite a pu permettre à celle-ci d'acquérir les véhicules litigieux dont les valeurs d'acquisition cumulées dépassent largement les 100 000 euros ; que sur les dates d'acquisition des différents véhicules, M. X... ne produit aucun justificatif, malgré le renvoi de l'affaire, ni même pour le prétendu gage du véhicule VW amarok qui, par ailleurs, comme le véhicule Niassan, appartient à Mme Marie Lysie Z...et n'est donc pas concerné par l'ordonnance critiquée ; que pas davantage il n'est établi que la tablette tactile appartient à une association ; que de même la seule attestation rédigée sur papier libre par une certaine Mme A...Mélanie qui serait la trésorière de ladite association, ne saurait suffire à démontrer que l'appareil photo est la propriété de cette dernière ; que la conservation de ces biens n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité et que le maintien de la saisie serait de nature à diminuer leur valeur ; qu'il est incontestable, s'agissant notamment des véhicules automobiles, mais également de la tablette tactile et de l'appareil photo (produit dont les modèles sont sans cesse renouvelés par leurs constructeurs) ; que le maintien de leur saisie alors que l'information judiciaire ne fait que commencer, serait de nature à déprécier leur valeur, à l'exception de la montre saisie qui ne se déprécie pas aussi rapidement que des véhicules ou des tablette et appareil photo ;
" et aux motifs éventuellement adoptés qu'il résulte de la procédure que M. X... exploite sans autorisation une carrière située dans le lit de la rivière Saint Étienne commune de Saint Louis ; que les surveillances effectuées par le groupe pelotons d'intervention de la réunion permettent de confirmer cette activité illégale et quantifier un volume d'extraction évalué à une centaine de godets par semaine ; que ces constatations ont confirmé celles réalisées par la brigade Nature Océan Indien ; que l'enquête patrimoniale permet de déterminer que l'activité d'extraction menée par M. X... est totalement dissimulée tant sur l'absence de déclaration au registre du commerce que sur l'absence de déclaration aux services fiscaux ; que le chiffre d'affaires de cette exploitation est évalué à minima à 550 000 euros sur les exercices 2011 à 2014 ; que les perquisitions réalisées dans le cadre de la présente commission rogatoire permettent la découverte de 47 370 euros en numéraires et confirment la dissimulation de l'activité d'extraction ; que ces perquisitions permettent de découvrir une comptabilité occulte de cette activité et permettent d'évaluer un bénéfice de 250 000 euros sur la période 2011 à 2014 ; que les différentes gardes à vues menées dans le cadre de cette procédure confirment l'ensemble des faits reprochés à M. X... ; que les services du régime social des indépendants et de l'Urssaf évaluent un préjudice total de 200 000 euros ; que l'ensemble des biens saisis peut être considéré comme le produit direct ou indirect et/ ou l'instrument de l'infraction ; que la conservation de ces biens n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité ;
" 1°) alors que les dispositions de l'article 99-2 du code de procédure pénale méconnaissent le principe du contradictoire, résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ainsi que la propriété privée, garantie par les articles 2 et 17 de la même Déclaration ; que l'inconstitutionnalité de l'article 99-2 du code de procédure pénale, qui viendra à être déclarée par le Conseil constitutionnel saisi par la voie de la question prioritaire de constitutionnalité posée à l'occasion du présent pourvoi, privera de fondement juridique l'arrêt attaqué ;
" 2°) alors qu'en tout état de cause, nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique ; que, pour justifier une privation de propriété, le rapport de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé doit être raisonnable ; que l'article 99-2 du code de procédure pénale, qui autorise la vente des biens saisis d'une personne poursuivie pénalement, mais non condamnée, porte une atteinte excessive au droit au respect de la propriété de la personne poursuivie protégé par l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ; que la chambre de l'instruction devait dès lors écarter l'application de l'article 99-2 du code de procédure pénale, au besoin d'office ;
" 3°) alors que la remise de biens à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis prévue par l'alinéa 2 de l'article 99-2 du code de procédure pénale, en vue de leur aliénation, n'est possible que si la confiscation desdits bien est prévue par la loi ; que le travail clandestin par dissimulation d'activité est caractérisé par l'exercice à but lucratif d'une activité de production, de transformation, de réparation ou de prestation de services ou l'accomplissement d'actes de commerce ; qu'en l'espèce, il était reproché à M. X... d'avoir prélevé du sable et des cailloux du bras de la rivière Saint Étienne ; que la chambre de l'instruction ne pouvait considérer que M. X... encourait la peine complémentaire de confiscation de ses biens en application de l'article L. 8224-3 du code du travail, et en déduire que les biens saisis pouvaient être remis à l'AGRASC, tandis que l'extraction de sable d'une rivière ne peut être qualifiée de travail clandestin par dissimulation d'activité ;
" 4°) alors que la remise d'un bien saisi à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués, en vue de son aliénation, suppose que ce bien ait été le produit, direct ou indirect de l'infraction poursuivie ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que l'information a été ouverte au mois de novembre 2014 en considération de la surveillance réalisée par la BNOI à compter du 10 février 2014 et jusqu'au 21 mars 2014 ; que M. X... faisait valoir dans ses conclusions qu'aucun élément de l'enquête ne permettait de retenir l'existence d'une activité d'extraction avant cette date, de sorte que les biens saisis, qui avaient tous été acquis avant cette date, comme cela résultait des certificats d'immatriculations également saisis et en possession de la justice, ne pouvaient être le produit de l'infraction reprochée ; que la cour d'appel ne pouvait se borner à considérer que M. X... ne justifiait pas des dates d'acquisition des différents véhicules sans rechercher si ces dates résultaient des certificats d'immatriculation, également saisis ;
" 5°) alors qu'en toute hypothèse, la remise d'un bien meuble à l'AGRASC en vue de sa vente n'est autorisée qu'autant que le maintien de la saisie sur le bien peut diminuer la valeur de celui-ci ; que la chambre de l'instruction ne pouvait se contenter d'affirmer péremptoirement que les objets saisis appartenant à M. X... se dépréciaient, tandis qu'ils n'avaient fait l'objet de la saisie que depuis trois semaines lorsque le juge d'instruction a statué et depuis quelques mois lorsque la chambre d'instruction s'est prononcée, sans expliquer en quoi le maintien de la saisie était de nature à diminuer la valeur de véhicules qui n'étaient pas neufs " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'à la suite de réquisitoires introductif et supplétif en dates des 27 novembre et 17 décembre 2014, M. Joseph X... a été mis en examen du chef de travail dissimulé par dissimulation d'activité pour avoir procédé à l'extraction du sable d'une rivière sur l'Ile de la Réunion ; que le juge d'instruction a ordonné la remise à l'Agrasc en vue de leur aliénation de divers biens meubles saisis lors d'une perquisition consistant essentiellement en véhicules automobiles ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que la Cour de cassation, a, par arrêt du 9 février 2016, dit n'y avoir lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité posée par le demandeur à l'occasion du présent pourvoi ; qu'il s'ensuit que le grief est devenu sans objet ;
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu que les dispositions de l'article 99-2 du code de procédure pénale ne sauraient être regardées comme contraires à l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme ; Que, d'une part, les dispositions critiquées sont justifiées par l'objectif d'une bonne administration de la justice, consistant à éviter que le bien maintenu sous main de justice ne perde de sa valeur, soit, plus précisément, la nécessité d'éviter le dépérissement et la perte de valeur de scellés longuement immobilisés, en sorte que l'atteinte qui en résulte à la protection du droit de propriété apparaît proportionnée à l'objectif poursuivi ;
Que, d'autre part, ces dispositions ne sauraient être regardées comme privant le propriétaire de son droit de propriété, dès lors que l'article 99-2 du code de procédure pénale prévoit la consignation pendant dix ans du produit de la vente, et sa remise au propriétaire des objets s'il en fait la demande, en cas de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement, ou lorsque la confiscation n'est pas prononcée ;
Qu'enfin, la remise à l'Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués d'un bien saisi en vue de son aliénation ne porte pas atteinte au principe du contradictoire, le texte invoqué prévoyant la notification de l'ordonnance du juge d'instruction ainsi qu'un recours contre cette ordonnance, de sorte que le propriétaire du bien est mis effectivement en mesure de faire valoir les motifs d'ordre juridique, économique ou personnel susceptibles de rendre disproportionnée au regard de ses droits la remise envisagée ;
D'où il suit que le grief ne saurait être admis ;
Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu qu'il est constant que M. X... a été mis en examen du chef de travail dissimulé par dissimulation d'activité ; qu'en cet état, il encourt la confiscation qui autorise la saisie pratiquée ;
D'où il suit que le grief ne saurait être accueilli ;
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche :
Attendu que l'arrêt relève que le parquet a ouvert une information judiciaire contre personne non dénommée des chefs d'exécution d'un travail dissimulé, d'exercice sans autorisation d'une activité nuisible au débit des eaux ou aux milieux aquatiques, d'exploitation d'une carrière non autorisée et d'exploitation d'une installation classée pour la protection de l'environnement sans autorisation et qu'il a pris le soin de préciser que la saisine couvrait les faits commis à compter du 30 mai 2011 ;
Attendu que par ces motifs, qui font ressortir qu'elle a souverainement analysé l'objet exact et l'étendue de la saisine du juge d'instruction, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le grief ne saurait être admis ;
Sur le moyen, pris en sa cinquième branche :
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance, à l'exception de la saisie d'une montre de marque Breitling, l'arrêt énonce que la conservation de ces biens n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité, et que le maintien de la saisie serait de nature à diminuer leur valeur ; que les juges ajoutent qu'il est incontestable, s'agissant notamment des véhicules automobiles, mais également de la tablette tactile et de l'appareil photo-produits dont les modèles sont sans cesse renouvelés par leurs constructeurs-que le maintien de leur saisie alors que l'information judiciaire ne fait que commencer, serait de nature à déprécier leur valeur, à l'exception de la montre saisie qui ne se déprécie pas aussi rapidement que des véhicules ou des tablettes et appareils photo ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de son appréciation souveraine, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application de l'article 99-2, alinéa 2, du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt septembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 13 septembre 2016 n° 16-84.058
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Mehdi X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 9 juin 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'acquisition et détention d'armes sans autorisation en bande organisée et en récidive, infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive, associations de malfaiteurs en récidive, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Medhi X... a été mis en examen des chefs d'infractions susvisés et placé en détention provisoire par ordonnance du juge des libertés et de la détention en date du 24 mai 2016, dont il a interjeté appel le 26 mai ; qu'il a demandé à comparaître en personne à l'audience fixée pour statuer sur son recours, en application de l'article 199, alinéa 4, du code de procédure pénale ; que l'audience s'est tenue le 8 juin 2016 par visioconférence ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 591, 593 et 706-71 du code de procédure pénale, 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" en ce que la chambre de l'instruction a rejeté la demande de comparution personnelle de la personne mise en examen ;
" aux motifs que M. X... a demandé à comparaître personnellement à l'audience ; qu'il est classé par l'administration pénitentiaire dans la catégorie « escorte 3 » au titre de la sécurisation des transfèrements ; que les renseignements recueillis à son sujet sont de nature à faire craindre un projet d'évasion ; que les services de police ont eu à connaître de procédures de règlement de comptes ou tentatives concernant certains de ses proches ou des rivaux ; que, lors d'une précédente détention, un dispositif de sécurité a été mis en place, à sa demande, à l'occasion de son élargissement, en raison des craintes d'action violente sur sa personne ; qu'une extraction fait craindre pour sa sécurité et celle de l'escorte qui devrait le conduire jusqu'au palais de justice ; que la personnalité de l'intéressé (déjà lourdement condamné pour participation à association de malfaiteurs est récemment sorti de détention) et le contexte de l'affaire (qui paraît relever d'une lutte entre bandes marseillaises rivales et de la préparation d'un commando lourdement armé) risquent gravement de troubler l'ordre public à l'audience ; qu'en raison de ce qui précède, son transport doit être évité et l'audience doit se dérouler par télécommunication audiovisuelle, par application des dispositions de l'article 706-71, alinéa 3, in fine du code de procédure pénale ;
" 1°) alors qu'il résulte de ce dernier texte que lorsqu'il s'agit d'une audience au cours de laquelle il doit être statué sur le placement en détention provisoire, la personne détenue peut refuser l'utilisation d'un moyen de télécommunication audiovisuelle, sauf si son transport paraît devoir être évité en raison des risques graves de trouble à l'ordre public ou d'évasion ; que le classement par l'administration pénitentiaire dans une catégorie déterminée au titre de la sécurisation des transfèrements, d'une part, implique que le transfèrement est possible, et d'autre part, n'implique pas par elle-même un risque grave de trouble à l'ordre public ou d'évasion ;
" 2°) alors qu'en se bornant à indiquer que les renseignements recueillis au sujet du mis en examen sont de nature à faire craindre un projet d'évasion, la cour a statué par simple affirmation, entachant ainsi son arrêt d'un défaut de motifs ;
" 3°) alors qu'en indiquant qu'une extraction fait craindre pour sa sécurité et celle de l'escorte qui devrait le conduire jusqu'au palais de justice, la cour a déduit un motif inopérant dans la mesure où l'escorte a précisément pour rôle de protéger le mis en examen lors de son extraction et de se protéger elle-même ;
" 4°) alors que l'article 706-71, alinéa 3, in fine du code de procédure pénale ne vise que le « transport » de la personne détenue et non sa présence à l'audience ; qu'en retenant que la personnalité de l'intéressé et le contexte de l'affaire risquaient gravement de troubler l'ordre public « à l'audience », la cour a fait une fausse application de ce texte et l'a violé " ;
Attendu que, pour passer outre le refus de M. X... d'être entendu par visioconférence sur son appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention l'ayant placé en détention provisoire, la chambre de l'instruction statue par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, par des motifs précis et circonstanciés de nature à caractériser des risques graves de trouble à l'ordre public ou d'évasion, la chambre de l'instruction, qui a fait l'exacte application de l'article 706-71, alinéa 3, du code de procédure pénale, ces risques n'étant pas limités au seul trajet, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 137, 144 et 145 du code de procédure pénale, 591 et 593 dudit code, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a ordonné le placement en détention provisoire du demandeur ;
" alors que le droit de tout accusé à être effectivement défendu par un avocat figure parmi les éléments fondamentaux du procès équitable ; qu'en statuant hors la présence de la personne détenue et hors la présence de son avocat, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés " ;
Attendu que le demandeur n'est pas fondé à soutenir que les droits de la défense ont été méconnus dès lors qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des éléments de la procédure que le conseil de M. X... a été régulièrement convoqué pour l'audience du 8 juin 2016 en étant informé que la comparution de son client aurait lieu par visioconférence, qu'il a été mis en mesure de préparer en temps utile la défense de son client, qu'il n'a pas fait connaître les raisons de son absence et n'a pas déposé de conclusions en défense, et que M. X..., dont la demande de comparution physique à l'audience a été rejetée en raison des risques graves de trouble à l'ordre public ou d'évasion liés à ce mode de comparution, a refusé l'utilisation d'un moyen de télécommunication audiovisuelle ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 137, 144 et 145 du code de procédure pénale, 591 et 593 dudit code, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a ordonné le placement en détention provisoire du demandeur ;
" aux motifs propres que les présomptions qui pèsent sur M. X... sont lourdes et résultent des éléments de l'enquête, des constatations policières, des perquisitions opérées et des objets découverts, notamment du véritable arsenal découvert chez son oncle et des résidus de tir sur son propre visage ; qu'il existe un risque élevé de concertation frauduleuse du mis en examen avec ses co-auteurs ou complices, dans la mesure où leurs déclarations divergent et apparaissent totalement fantaisistes pour certaines ; qu'il ne doit pas interférer dans le cours des investigations qui n'en sont qu'à leur commencement sur commission rogatoire ; que des interrogatoires au fond devront intervenir et que des confrontations seront probablement organisées le moment venu ; que le risque de pression sur les témoins est d'ores et déjà avéré, compte tenu des réticences des riverains à déposer, manifestement par peur de représailles de la part des membres de ce qui a été décrit comme un commando armé en train de préparer un règlement de compte, ce que les saisies opérées tendent à confirmer ; que le risque de renouvellement de l'infraction est majeur, dans la mesure où M. X..., très récemment sorti de prison, en février 2016, a été condamné à neuf reprises dont une peine de sept ans d'emprisonnement prononcée en 2011 ; que les faits, très fortement évocateurs de la préparation d'une expédition armée sur fond de trafic de stupéfiants sont révélateurs de la dangerosité extrême de leurs auteurs ; qu'il n'est donc pas sérieusement envisageable, surtout dans le contexte marseillais de règlement de comptes à répétition, de remettre M. X... en situation de réitérer les faits qui lui sont reprochés ; que sa représentation en justice est très aléatoire, l'intéressé pouvant être tenté d'échapper aux actes futurs de la procédure, eu égard au quantum de peine encourue, à son degré apparent d'implication, à ses dénégations et à sa situation personnelle non contraignante, en ce qu'il s'est déclaré sans ressources et sans profession ; qu'en outre, la cour constate qu'il a été condamné par défaut en 2004 (LRAR non réclamée) et par jugement contradictoire à signifier (LRAR non réclamée) en 2006, ce qui fait craindre qu'il ne réponde pas aux convocations en justice à venir ; que, sans contredire le principe de la présomption d'innocence, la détention provisoire doit se poursuivre, étant démontré au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, ci-dessus exposés, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à plusieurs des objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique : – conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ; – empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leurs familles ; – empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices ; – garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ; – mettre fin à l'infraction ou prévenir son renouvellement ;
" alors que la détention provisoire ne peut être ordonnée que par une motivation spéciale démontrant, au regard des éléments précis et circonstanciés de la procédure, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un ou plusieurs des objectifs définis par l'article 144 du code de procédure pénale, et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique ; que cette motivation spéciale doit envisager séparément le cas du contrôle judiciaire et celui de l'assignation à résidence avec surveillance électronique ; qu'en statuant par les mêmes motifs sur l'inefficacité du contrôle judiciaire et de l'assignation à résidence, sans rechercher concrètement et séparément en quoi ces deux mesures, dont le degré de contrainte diffère, n'étaient pas adaptées à la situation de M. X... à la date à laquelle elle a statué, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction s'est déterminée par des considérations de droit et de fait répondant aux exigences des articles 143-1 et suivants du code de procédure pénale et s'est expliquée sur le caractère insuffisant des obligations du contrôle judiciaire comme de l'assignation à résidence avec surveillance électronique ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Farrenq-Nési, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 13 septembre 2016 n° 15-85.133
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- La société d'assurances AIG Europe Limited, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 4e chambre, en date du 26 juin 2015, qui, dans la procédure suivie contre M. Bilalle X... du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Fossier, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller FOSSIER, les observations de la société civile professionnelle CÉLICE, BLANCPAIN, SOLTNER et TEXIDOR, de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE DE BRUNETON, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CUNY ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 4 de la loi n° 85-667 du 5 juillet 1985, R. 413-3 et R. 413-14 du code de la route et 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, défaut de base légale, défaut de réponse à conclusions ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement déféré en ce qu'il a déclaré M. X... seul responsable de l'accident et de ses conséquences, notamment, à l'égard de Mme Z..., reçu la constitution de partie civile de Mme Z..., ordonné une expertise médicale et condamné M. X... à lui payer la somme de 5 000 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel ;
" aux motifs propres que sur le droit indemnisation de Mme Z..., l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation dispose que : « la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis » ; que la faute du conducteur victime doit être appréciée en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur ; qu'en l'espèce, la compagnie AIG venant au droit de la compagnie Chartys Europe, partie intervenante, en qualité d'assureur du véhicule conduit par M. X..., soutient à l'appui de son appel que Mme Z...a commis des fautes de nature à réduire son droit indemnisation à hauteur de 50 % en ce qu'au moment des faits générateurs de ces préjudices, elle a conduit son véhicule à une vitesse excessive, elle n'a pas été en mesure de le maîtriser et elle se trouvait en état alcoolique ; qu'il ressort des pièces de la procédure les éléments suivants ; que s'il est constant que l'accident s'est produit en agglomération ou la vitesse maximale est limitée à 50 km/ h et que la vitesse du véhicule conduit par Mme Z...s'établissait à 80 km/ h, il convient de relever que le choc a eu lieu alors que Mme Z...avait franchi 20 mètres auparavant le panneau prescrivant de réduire la vitesse de 90 à 50 km/ h et qu'elle se trouvait en situation de réduire sa vitesse ainsi que cela ressort du rapport de M. A..., expert, requis par les gendarmes, qui relève qu'avant l'accident, une action sur les freins était déjà enregistrée sur le véhicule de Mme Z..., de sorte que la vitesse de son véhicule ainsi caractérisée n'a pas participé à la survenance de ces préjudices subis du fait de l'accident ; qu'aucun élément objectif ne permet d'établir la réalité d'un défaut de maîtrise imputable à Mme Z...à l'origine de l'accident et des blessures subies par elle, étant précisé, d'une part, que la circonstance que celle-ci aurait dû user des éclairages de son véhicule pour prévenir le véhicule conduit par M. X... d'un danger imminent est totalement irrecevable en l'état de la quasi instantanéité de l'accident, et que, d'autre part, le rapport de M. B...concluant à l'impossibilité pour le véhicule de M. X... de se trouver sur la voie de circulation de Mme Z...ne présente aucun caractère contradictoire et n'a pas été retenu par le tribunal qui a déclaré définitivement M. X... coupable des infractions qui lui étaient reprochées ; que l'alcoolisation de Mme Z...au moment des faits n'est nullement établie, étant relevé, d'une part, que le procès-verbal de transport établi par la gendarmerie indique que le test de dépistage de l'alcoolémie réalisé au moyen de l'éthylotest sur sa personne s'était révélé négatif, et, d'autre part, que la circonstance que Mme Z...a déclaré aux enquêteurs avoir consommé deux verres d'alcool au cours de la soirée précédant l'accident qui s'est produit à l'aube est impropre à caractériser l'alcoolisation alléguée ; qu'il s'ensuit que Mme Z...n'a commis aucune faute de nature à limiter son droit indemnisation au sens des principes précités ; qu'en conséquence, les premiers juges ont à bon droit déclaré M. X... seul responsable de l'accident et de ses conséquences, notamment, à l'égard de Mme Z..., reçu la constitution de partie civile de Mme Z..., ordonné une expertise médicale et condamné M. X... à lui payer la somme de 5 000 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel ; que la cour confirmera donc le jugement déféré de ce chef ;
" et aux motifs éventuellement adoptés que la cause essentielle de l'accident est la vitesse particulièrement excessive du conducteur qui va traverser une agglomération à plus de 100 km/ h dans un virage à plat sur sa droite alors qu'on est toujours en agglomération et au moment où il manipule son autoradio, ce qui amène l'écart qui sera fatal ; que lui-même et sa passagère avant ont bien parlé de manipuler l'autoradio et non, comme il le dit à l'audience, de le commander avec les touches du volant car ce sont des CD qui sont retrouvés en vrac dans la Clio, qui étaient en cours d'écoute, ce qui implique qu'il n'y a pas de changeur automatique ; (…) que l'excès de vitesse reproché à la conductrice, pour certain qu'il soit entre 76 et 80 km/ h pour 50 n'a nullement la même signification, dès lors qu'à une vingtaine de mètres près, soit la distance séparant le panneau d'entrée de l'agglomération de Lissieu du lieu de l'accident, il n'était pas constitué puisque la vitesse autorisée était jusqu'au panneau de 90 km/ h ; que l'action de freinage avait été entreprise et que la configuration de la route est différente, le pont de l'autoroute se situant, pour Mme Z..., au bas d'une longue descente rectiligne ; que de surcroît elle connaît très bien les lieux pour habiter à Anse et, contrairement à M. X..., aucun état alcoolique ne sera constaté sur elle, qui n'a, dès lors, aucune raison de quitter sa voie de circulation en braquant à gauche si cette manoeuvre désespérée ne lui apparaît pas comme la seule façon d'éviter la voiture adverse ; qu'il sera encore relevé que sa réaction aurait parfaitement pu être la même si elle s'était présentée au même endroit à 50 km/ h, dès lors que la Clio adverse aurait toujours surgi à 126 km/ h dans son champs de vision ; que, par suite, le tribunal estime que l'excès de vitesse de Mme Z...n'a pas joué de rôle causal dans la survenance de l'accident ;
" 1°) alors que, lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, le droit à indemnisation du conducteur victime ou de ses ayants-droit est exclu ou limité si celui-ci a commis une faute ayant contribué à la réalisation ou à l'aggravation de son dommage ; que constitue une faute le fait, pour un automobiliste, de circuler à une vitesse de 80 km/ h dans une agglomération où la vitesse est limitée à 50 km/ h ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que " … l'accident s'est produit en agglomération ou la vitesse maximale est limitée à 50 km/ h et que la vitesse du véhicule conduit par Mme Z...s'établissait à 80 km/ h " ; qu'en retenant cependant, pour exclure toute réduction de son indemnisation, que " … Mme Z...n'a commis aucune faute de nature à limiter son droit indemnisation … " la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 4 de la loi du 5 juillet 1985, ensemble les articles R. 413-3 et R. 413-14 du code de la route ;
" 2°) alors que, lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, le droit à indemnisation du conducteur victime ou de ses ayants-droit est exclu ou limité si celui-ci a commis une faute ayant contribué à la réalisation ou à l'aggravation de son dommage ; que constitue une telle faute le fait, pour un automobiliste, de circuler à une vitesse de 80 km/ h dans une agglomération où la vitesse est limitée à 50 km/ h ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que " … l'accident s'est produit en agglomération ou la vitesse maximale est limitée à 50 km/ h et que la vitesse du véhicule conduit par Mme Z...s'établissait à 80 km/ h " ; qu'en l'espèce la cour d'appel, pour considérer que Mme Z...n'avait pas commis de faute ayant " participé à la survenance de [ses] préjudices subis du fait de l'accident ", a retenu que selon le rapport expertal, " … le choc a eu lieu alors que Mme Z...avait franchi 20 mètres auparavant le panneau prescrivant de réduire la vitesse de 90 à 50 km/ h et qu'elle se trouvait en situation de réduire sa vitesse … qu'avant l'accident, une action sur les freins était déjà enregistrée sur le véhicule de Mme Z..." ; qu'en se déterminant aux termes de tels motifs inopérants, quand il était établi qu'au moment de l'accident, la vitesse du véhicule de la victime était de 80 km/ h, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
" 3°) alors que, lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, le droit à indemnisation du conducteur victime ou de ses ayants-droit est exclu ou limité si celui-ci a commis une faute ayant contribué à la réalisation ou à l'aggravation de son dommage ; que la compagnie AIG faisait valoir que la vitesse excessive du véhicule de Mme Z..., supérieure de 30 km/ h à la vitesse autorisée, avait participé à la survenance et à la gravité de son dommage, dès lors que si Mme Z...avait respecté la limite de vitesse, la violence du choc aurait été moindre ; que pour dire n'y avoir lieu à partage de responsabilité entre le prévenu et la conductrice victime, l'arrêt a retenu que la faute de Mme Z...n'avait pas participé à la survenance de ses préjudices, sans se prononcer sur l'aggravation de ces préjudices due à cette faute ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen opérant, la cour a entaché sa décision de défaut de réponse à conclusions en violation de l'article 593 du code de procédure pénale ;
" 4°) alors que, lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; que la faute de la victime ayant contribué à la réalisation de son préjudice doit être appréciée en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur du véhicule impliqué dans l'accident ; qu'au cas d'espèce, en retenant, par motifs adoptés, que la vitesse excessive de Mme Z...n'avait pas joué de rôle causal dans la survenance de l'accident, dès lors qu'elle n'avait pas la même signification que celle de M. X... car Mme Z...se trouvait à moins de 20 mètres de l'entrée de l'agglomération, qu'elle connaissait bien les lieux, que la configuration de la route était différente de celle de M. X..., et que « contrairement à M. X..., aucun état alcoolique ne sera constaté sur elle », et que son comportement, si elle avait roulé à 50 km/ h, aurait pu être exactement le même « dès lors que la Clio adverse aurait toujours surgi à 126 km/ h dans son champ de vision » et que « la cause essentielle de l'accident est la vitesse particulièrement excessive du conducteur », les juges du fond ont apprécié la faute de Mme Z...en fonction du comportement de M. X... ; que, ce faisant, ils ont violé les textes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que le 25 mars 2012, vers 5 heures du matin, en agglomération lyonnaise, le véhicule conduit par M. X..., qui circulait en état alcoolique et à 125 km/ h, s'est déporté de sa voie de circulation et a heurté frontalement le véhicule conduit en sens inverse par Mme Z...à une vitesse de 75 km/ h et, selon expertise, en cours de décélération ; que Mme Z...ainsi qu'un passager de M. X... ont été blessés ;
Attendu que, pour exclure tout rôle causal de l'excès de vitesse de la victime dans l'accident et dans les blessures que cette dernière et le tiers passager ont subies, la cour d'appel énonce, par motifs adoptés, que la réaction de Mme Z...aurait parfaitement pu être la même si elle s'était présentée au même endroit à 50 km/ h, dès lors que le véhicule de M. X... aurait toujours surgi à 125 km/ h dans son champ de vision, et par motifs propres, que le choc a eu lieu alors que Mme Z...avait franchi 20 mètres auparavant le panneau prescrivant de réduire la vitesse de 90 à 50 km/ h et qu'elle se trouvait en situation de réduire sa vitesse ainsi que cela ressort du rapport de M. A..., expert, requis par les gendarmes, qui relève qu'avant l'accident, une action sur les freins était déjà enregistrée sur le véhicule de Mme Z..., de sorte que la vitesse de son véhicule ainsi caractérisée n'a pas participé à la survenance de ces préjudices subis du fait de l'accident ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant selon lequel Mme Z...décélérait lorsqu'est survenu l'accident, a répondu aux articulations essentielles des conclusions dont elle était saisie, et a ainsi justifié sa décision, relativement à la cause de l'accident et à celle des préjudices subis par les victimes ;
D'où il suit que le moyen, qui ne tend pour le surplus qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond sur les circonstances de l'accident, doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 3 000 euros la somme globale que la société AIG Europe Limited devra payer à Mme Céline Z...et la compagnie MMA IARD assurances mutuelles au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale, au profit de la société AIG Europe Limited ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le treize septembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 7 septembre 2016 n° 16-84.122
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Mickaël X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 19 mai 2016, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants, importation en contrebande de stupéfiants, association de malfaiteurs, transfert de capitaux sans déclaration, blanchiment, contrebande de marchandises dangereuses pour la santé, a confirmé le jugement ordonnant son maintien en détention ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5, § 1, de Ia Convention européenne des droits de l'homme, 7 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 2 et 66 de la Constitution, des articles préliminaire, 148-1, 148-2 et 148-6 du code de procédure pénale, 111-4 du code pénal ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation de l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel des chefs ci-dessus énoncés par ordonnance du juge d'instruction, en date du 22 février 2016 ; que, comparaissant détenu le 18 mai 2016, il a, avant toute défense au fond, sollicité le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure ; que par jugement du même jour, le tribunal, ayant fait droit à cette demande, a ordonné la prolongation de sa détention jusqu'à l'audience de renvoi fixée au 9 juin 2016 ; que M. X... a interjeté appel de cette décision et sollicité sa mise en liberté d'office en soutenant, d'une part, qu'ayant formé devant le tribunal une demande de mise en liberté, la cour d'appel, saisie d'une décision de rejet de cette demande, aurait dû statuer dans le délai de vingt jours prévu par l'article 148-2, alinéa 4, du code de procédure pénale, d'autre part, que l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'homme imposait à la cour d'appel de statuer à bref délai ;
Attendu que, pour dire n'y avoir lieu d'ordonner la mise en liberté du prévenu, l'arrêt attaqué retient notamment que la déclaration par laquelle M. X... a sollicité sa mise en liberté a été faite à l'audience en réponse aux réquisitions du ministère public aux fins de prolongation de sa détention, sur lesquelles il a été invité à s'exprimer ; que les juges ajoutent que le délai d'examen de l'appel, trente jours après celui-ci, n'est pas en lui-même excessif ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, après avoir exactement énoncé que les observations du prévenu ne constituaient pas une demande de mise en liberté, et qu'à défaut d'une telle demande, les dispositions de l'article 148-2 du code de procédure pénale n'étaient pas applicables à l'appel formé contre le jugement du tribunal correctionnel qui, après renvoi de l'affaire, ordonne, en application de l'article 179 dudit code, la prolongation de la détention du prévenu, la cour d'appel a justifié sa décision, sans méconnaître la disposition conventionnelle invoquée ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Béghin, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 7 septembre 2016 n° 15-81.679 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Georges X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de PARIS, en date du 26 février 2015, qui a prononcé sur sa demande de libération conditionnelle ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 8 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Laurent, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire LAURENT, les observations de la société civile professionnelle GADIOU et CHEVALLIER, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BONNET ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 729-2 et D. 535 du code de procédure pénale, 591 et 593 du même code, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, excès de pouvoir ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement du tribunal de l'application des peines ayant déclaré irrecevable la demande de libération conditionnelle de M. X... sur le fondement des articles 729-2 et D. 535 du code de procédure pénale et ayant rejeté la demande de libération conditionnelle formée à titre subsidiaire sur le fondement de l'article 729 du code de procédure pénale ;
" aux motifs propres, que sur le fondement des articles 729-2 et D. 535 du code de procédure pénale, l'article 729-2 du code de procédure pénale prévoit que lorsqu'un étranger condamné à une peine privative de liberté est l'objet d'une mesure d'interdiction du territoire français, d'interdiction administrative du territoire français, d'obligation de quitter le territoire français, d'interdiction de retour sur le territoire français, de reconduite à la frontière, d'expulsion, d'extradition ou de remise sur le fondement d'un mandat d'arrêt européen, sa libération conditionnelle est subordonnée à la condition que cette mesure soit exécutée ; que M. X... ne fait l'objet d'aucune des mesures prévues à l'article 729-2 du code de procédure pénale et, notamment, d'aucune mesure d'éloignement du territoire français ; qu'en conséquence, aucune libération conditionnelle sur le fondement de l'article 729-2 du code de procédure pénale ne peut être octroyée au condamné ; qu'aux termes de l'article D. 535, 4°, du code de procédure pénale, la décision accordant à un condamné le bénéfice de la libération conditionnelle peut subordonner l'octroi de cette mesure à la condition, s'il s'agit d'un étranger, être expulsé du territoire national, reconduit à la frontière ou extradé, ou quitter le territoire national et n'y plus paraître ; qu'aucune mesure de ce type n'a davantage été prise à l'encontre de M. X... ; que l'article D. 535, 4°, du code de procédure pénale ne crée pas d'autre cas de libération conditionnelle ; qu'ainsi, aucune libération conditionnelle ne peut être octroyée au condamné sur ce fondement ; qu'il n'appartient pas à la chambre de l'application des peines, ainsi que la défense le sollicite, de constater une atteinte au principe de séparation des pouvoirs ; que, sur le fondement de l'article 729 du code de procédure pénale, la cour rappelle que la libération conditionnelle tend à la réinsertion des condamnés et à la prévention de la récidive ; que les condamnés ayant à subir une peine privative de liberté peuvent bénéficier d'une libération conditionnelle s'ils manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale et lorsqu'ils justifient :-1°) soit de l'exercice d'une activité professionnelle, d'un stage ou d'un emploi temporaire ou de leur assiduité à un enseignement ou à une formation professionnelle ;-2°) soit de leur participation essentielle à la vie de leur famille ;-3°) soit de la nécessité de suivre un traitement médical ;-4°) soit de leurs efforts en vue d'indemniser leurs victimes ;-5°) soit de leur implication dans tout autre projet sérieux d'insertion ou de réinsertion ; qu'il ressort de l'article 730-2 du code de procédure pénale qu'en cas de condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, comme c'est le cas en l'espèce, les juridictions de l'application des peines ne peuvent accorder de libération conditionnelle tant que le condamné n'a pas été placé sous un régime de semi-liberté ou de surveillance électronique pendant une période d'au moins un an ou encore de placement extérieur depuis la loi du 15 août 2014 ; que la chambre de l'application des peines ne peut que rappeler que M. X..., condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, ne peut se voir accorder une libération conditionnelle sans avoir été obligatoirement préalablement soumis, à titre probatoire, à une mesure de semi-liberté, de placement sous surveillance électronique ou de placement extérieur pendant une période d'un an au moins, ainsi que l'exige l'article 730-2 du code de procédure pénale ; que lors du débat contradictoire, M. X... a dit ne pas vouloir de projet d'aménagement de peine sur le territoire français même à titre probatoire, sauf à ce que cet aménagement de peine se déroule dans une enceinte pénitentiaire étant donné qu'il craint les « criminels israéliens et américains » ; que sur interpellation, il a ajouté être d'accord avec une mesure de placement extérieur qui se déroulerait dans des conditions garantissant sa sécurité ; que cependant, à l'audience de la cour, une mesure de placement extérieur probatoire n'a plus été évoquée par Me Chalanset, avocat de M. X... ; qu'il ne sera donc pas statué à ce stade de la procédure sur cette forme d'aménagement de peine, d'autant que les modalités pratiques de cette mesure n'ont aucunement été définies ; qu'en conséquence, la demande de libération conditionnelle sur le fondement de l'article 729 du code de procédure pénale est irrecevable ; que, de surcroît, il résulte des éléments du dossier que le positionnement de M. X... par rapport aux faits pour lesquels il a été condamné reste inchangé ; que la cour constate qu'il n'exprime toujours aucun regret ; qu'il a rappelé avoir dû faire face à l'occupation de son pays, insistant sur le fait que cette résistance était légitime et reconnue par les instances internationales ; qu'il se considère comme un militant ayant donné sa vie pour son pays, expliquant que le Liban est désormais libre et que toutes les forces politiques du pays ont compris son combat ; que la précision apportée par le condamné indiquant qu'une récidive de sa part n'était envisageable qu'en cas d'agression ou d'occupation nouvelle de son pays interroge ; qu'il a, d'ailleurs, précisé qu'il était une des personnes les plus connues du Liban et faisait tout pour que le lien entre le militant politique qu'il est et son pays ne se distende pas ; qu'il développe toujours le projet de donner des cours dans un institut d'enseignement au Liban dont un de ses frères, qui est apparu dans la procédure correctionnelle a la charge ; que le jugement dont appel fait état du rapport du directeur du CNE, à l'issue des avis de l'équipe pluridisciplinaire, qui indique que M. X... « reconnaît ses responsabilités politiques et morales, que les faits sont revendiqués comme des actes de guerre, des opérations militaires, visant des ennemis », que s'agissant des parties civiles, le condamné s'est toujours refusé à effectuer des versements volontaires car les « victimes sont considérées comme des ennemis, tombés à l'occasion d'actes de guerre » ; que concernant son projet de sortie, il expose que M. X... travaillerait comme enseignant, son poste étant axé sur la découverte et le partage de son engagement, relevant, par ailleurs, que M. X... souhaite « poursuivre son combat pacifiquement, défendre ses valeurs et accéder peut-être à un poste de député » ; que la cour retient aussi que M. X... n'a procédé à aucun versement volontaire, indiquant s'en remettre aux autorités libanaises et être disposé à régler les dommages-intérêts dus aux victimes dès lors que le gouvernement libanais le lui imposera, son pays restant pour lui la seule entité qui pourra l'y forcer ; que l'exigence d'effort d'indemnisation posée dans tout parcours d'exécution de peine qui participe d'une même démarche de prise de conscience de la gravité des faits qui ont été commis et du tort causé aux victimes et leurs familles fait donc défaut ; que la cour ne peut que constater l'absence de projet de sortie élaboré et construit dans les limites possibles de la loi, d'autant que M. X... refuse depuis 2007 toute rencontre avec le service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP), arguant que l'indemnisation des victimes est un sujet dont le SPIP n'est pas censé débattre ; qu'enfin, aucun effort sérieux de réadaptation sociale, au sens de l'article 729 du code de procédure pénale, que pourrait manifester M. X... ne peut être relevé par la chambre de l'application des peines ; qu'ainsi, le tribunal de l'application des peines a fait une lecture très exacte des éléments du dossier et la décision entreprise, parfaitement motivée, doit en conséquence être confirmée dans son ensemble ;
" et aux motifs adoptés que, sur la demande de libération conditionnelle formée à titre subsidiaire sur le fondement de l'article 729 du code de procédure pénale, cette demande ne peut qu'être rejetée ;
" 1°) alors qu'aux termes de l'article 729-2 du code de procédure pénale « lorsqu'un étranger condamné à une peine privative de liberté est l'objet d'une mesure d'interdiction du territoire français, d'interdiction administrative du territoire français, d'obligation de quitter le territoire français, d'interdiction de retour sur le territoire français, de reconduite à la frontière, d'expulsion, d'extradition ou de remise sur le fondement d'un mandat d'arrêt européen, sa libération conditionnelle est subordonnée à la condition que cette mesure soit exécutée. Elle peut être décidée sans son consentement » et qu'aux termes de l'article D. 535 du même code « la décision accordant à un condamné le bénéfice de la libération conditionnelle peut subordonner l'octroi de cette mesure à l'une des conditions suivantes : (…) ; 4°, s'il s'agit d'un étranger, être expulsé du territoire national, reconduit à la frontière ou être extradé, ou quitter le territoire national et n'y plus paraître » de sorte que l'étranger peut obtenir le bénéfice de la libération conditionnelle s'il quitte le territoire national et n'y parait plus ; qu'au cas présent, M. X... avait fait valoir dans ses conclusions d'appel qu'il s'engageait à quitter le territoire français pour ne plus y revenir et avait justifié que les autorités consulaires du Liban, par lettre du 14 mars 2014, s'étaient engagées à « le prendre en charge immédiatement dès sa sortie du centre de détention jusqu'à son arrivé au Liban et à lui délivrer un laisser-passer permettant son retour au Liban » ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans considérer l'engagement de M. X... de quitter le territoire français pour ne plus y paraître et sans déterminer les conséquences sur la demande de libération conditionnelle, la chambre de l'application des peines a refusé d'exercer ses pouvoirs et a violé les textes précités ;
" 2°) alors que la chambre de l'application des peines qui a déclaré la demande de libération conditionnelle, sur le fondement de l'article 729 du code de procédure pénale, irrecevable et a confirmé le jugement ayant rejeté la demande de libération conditionnelle formée à titre subsidiaire sur le fondement de ce texte s'est dès lors contredite puisque cette demande rejetée par les premiers juges a été déclarée irrecevable par les juges d'appel de sorte que ces derniers ne pouvaient confirmer le jugement sur ce chef de dispositif " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., de nationalité libanaise, a été condamné, d'une part, le 10 juillet 1986, par le tribunal correctionnel de Lyon, à quatre ans d'emprisonnement et à cinq ans d'interdiction de séjour pour association de malfaiteurs, usage de documents administratifs falsifiés, infractions à la législation sur les armes, d'autre part, le 28 février 1987, par la cour d'assises de Paris, spécialement composée, à la réclusion criminelle à perpétuité pour complicité d'assassinats et de tentative d'assassinat ; que le 21 mars 2014, il a sollicité sa libération conditionnelle, dans le but affirmé de quitter définitivement le territoire français et regagner le Liban ;
Attendu que, par jugement du 5 novembre 2014, le tribunal de l'application de peines de Paris, compétent en matière de terrorisme, a déclaré irrecevable la demande présentée, à titre principal, sur le fondement des articles 729-2 et D. 535 du code de procédure pénale, et a rejeté celle présentée, à titre subsidiaire, sur le fondement de l'article 729 du même code ; que M. X... a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer le jugement, tout en déclarant, dans ses motifs, la demande subsidiaire du condamné irrecevable, l'arrêt prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'abstraction faite d'une terminologie impropre mais exempte de contradiction, dès lors que le dispositif d'un arrêt doit être interprété par les motifs auxquels il s'unit et dont il est la conséquence, la chambre de l'application des peines, en déclarant irrecevables les demandes de libération conditionnelle, tant principale que subsidiaire, dont elle était saisie, a fait l'exacte application de la loi ;
Qu'en effet, d'une part, selon l'article 729-2 du code de procédure pénale, qui institue un régime de libération conditionnelle dérogatoire au droit commun, auquel ne s'appliquent pas les dispositions réglementaires de l'article D. 535 du même code, lorsqu'un étranger condamné à une peine privative de liberté est l'objet d'une mesure d'interdiction du territoire français, d'interdiction administrative du territoire français, d'obligation de quitter le territoire français, d'interdiction de retour sur le territoire français, de reconduite à la frontière, d'expulsion, d'extradition ou de remise sur le fondement d'un mandat d'arrêt européen, sa libération conditionnelle est subordonnée à la condition que cette mesure soit exécutée ; qu'il en résulte que la libération conditionnelle d'un étranger condamné, qui n'est pas l'objet d'une telle mesure d'éloignement du territoire, doit répondre aux conditions de forme et de fond de droit commun, applicables à tout condamné, quelle que soit sa nationalité ;
Que, d'autre part, il se déduit de l'article 730-2 du code de procédure pénale qu'en cas de condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, les juridictions de l'application des peines ne peuvent accorder la libération conditionnelle tant que le condamné n'a pas été placé sous le régime de la semi-liberté, du placement à l'extérieur ou du placement sous surveillance électronique pendant une période d'au moins un an ; que cette disposition est applicable à un étranger condamné qui n'est pas l'objet de l'une des mesures d'éloignement du territoire français prévues à l'article 729-2 du même code ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept septembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 6 septembre 2016 n° 16-85.014
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Marcin X...,
contre l'arrêt n° 200 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de REIMS, en date du 1er août 2016, qui, a autorisé sa remise différée aux autorités judiciaires polonaises, en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., qui exécutait une peine au centre de détention de Villenauxe-la-Grande (Aube), a fait l'objet d'un mandat d'arrêt européen émis le 16 mai 2011 par les autorités judiciaires polonaises pour l'exécution de la partie restant à purger d'une peine de dix-huit mois d'emprisonnement prononcée par le tribunal régional de Varsovie-Mokotow le 7 février 1996 pour des faits de vol aggravé commis le 23 juin 1995 ; que, comparant devant la chambre de l'instruction, la personne recherchée n'a pas consenti à sa remise ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire et 197 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise de M. X... aux autorités polonaises ;
" aux motifs que le mandat a été délivré pour l'exécution d'un jugement rendu par le tribunal régional de Varsovie Mokotov le 7 février 1996 qui a pris la force de la chose jugée le 15 février 1996 qui a condamné M. X... à la peine de dix-huit mois de réclusion criminelle pour le cambriolage commis le 23 juin 1995 à Varsovie à l'aide d'un outil de bricolage au cours duquel il a dérobé un véhicule Ford Transit, peine sur laquelle demeure à exécuter une période de onze mois et dix jours après déduction de la période d'arrestation provisoire ; que les faits ont été commis en Pologne et sont qualifiables en France de vol aggravé par deux circonstances ; que le mandat vise expressément le caractère définitif de la décision ; qu'il résulte des prescriptions de l'article 695-22-4 que l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ne peut être refusée, lorsque la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la loi française, à la seule condition que les juridictions françaises aient été compétentes en application de l'article 689 du code de procédure pénale, ce qui n'est manifestement pas le cas en l'espèce, faute de critère de compétence ; que, de plus, il n'appartient pas aux juridictions françaises de se prononcer sur la date de prescription au regard de la loi polonaise, les mentions de l'état requérant faisant foi ; qu'en l'espèce, ledit mandat précise expressément que l'exécution de la peine a été suspendue et différée au 11 février 2021 tout en développant de manière exhaustive les éléments permettant une meilleure compréhension du dossier et de la procédure permettant à l'état requérant de se prévaloir de l'absence de prescription ; que les motifs allégués par M. X... concernant sa situation personnelle et familiale ne sont étayées par aucune pièce justificative ; que, de plus, incarcéré depuis six années, il déclare lui-même que sa compagne ne lui rend pas visite, qu'il n'a pas davantage vu son enfant, à supposer établi qu'il soit effectivement le père d'un enfant ; qu'en ce qui concerne son état de santé, tel que résultant du certificat médical produit, ni l'urgence ni l'importance des actes médicaux à prévoir ne constituent un motif sérieux permettant de refuser la remise aux autorités requérantes, qui répond aux conditions prévues par les dispositions des articles 695-22 et suivants du code de procédure pénale ; que la remise de l'intéressé aux autorités polonaises doit donc être ordonnée mais en application des dispositions de l'article 695-39 du code de procédure pénale différée jusqu'au jour de la fin de la peine qu'il exécute actuellement en France, étant précisé que la fiche d'écrou émise le 21 juillet 2016 porte la date du 15 août 2016 ;
" alors que la notification aux parties et à leur avocat, de la date de l'audience à laquelle sera appelée la cause soumise à la chambre de l'instruction est essentielle à la préservation des droits de la défense ; qu'il ne résulte pas des pièces de la procédure que M. X... ait été avisé de la date de l'audience du 1er août 2016 ; que les pièces ne font état que d'une notification aux autorités de la maison d'arrêt, sans preuve de la remise de la date d'audience à l'intéressé ; que, dès lors, la cour d'appel a méconnu les dispositions susvisées " ;
Attendu que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer, par l'examen des pièces de la procédure soumises à son contrôle, que la personne mise en examen a signé, le 29 juillet 2016, au sein de l'établissement pénitentiaire, l'avis du 28 juillet lui notifiant la date de l'audience de la chambre de l'instruction fixée au 1er août suivant ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait, ne saurait être admis ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 113-6 du code pénal, préliminaire, 197, 695-22, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise de M. X... aux autorités polonaises ;
" aux motifs que le mandat a été délivré pour l'exécution d'un jugement rendu par le tribunal régional de Varsovie Mokotov le 7 février 1996 qui a pris la force de la chose jugée le 15 février 1996 qui a condamné M. X... à la peine de dix-huit mois de réclusion criminelle pour le cambriolage commis le 23 juin 1995 à Varsovie à l'aide d'un outil de bricolage au cours duquel il a dérobé un véhicule Ford Transit, peine sur laquelle demeure à exécuter une période de onze mois et dix jours après déduction de la période d'arrestation provisoire ; que les faits ont été commis en Pologne et sont qualifiables en France de vol aggravé par deux circonstances ; que le mandat vise expressément le caractère définitif de la décision ; qu'il résulte des prescriptions de l'article 695-22-4 que l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ne peut être refusée, lorsque la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la loi française, à la seule condition que les juridictions françaises aient été compétentes en application de l'article 689 du code de procédure pénale, ce qui n'est manifestement pas le cas en l'espèce, faute de critère de compétence ; que, de plus, il n'appartient pas aux juridictions françaises de se prononcer sur la date de prescription au regard de la loi polonaise, les mentions de l'état requérant faisant foi ; qu'en l'espèce, ledit mandat précise expressément que l'exécution de la peine a été suspendue et différée au 11 février 2021 tout en développant de manière exhaustive les éléments permettant une meilleure compréhension du dossier et de la procédure permettant à l'état requérant de se prévaloir de l'absence de prescription ; que les motifs allégués par M. X... concernant sa situation personnelle et familiale ne sont étayées par aucune pièce justificative ; que, de plus, incarcéré depuis six années, il déclare lui-même que sa compagne ne lui rend pas visite, qu'il n'a pas davantage vu son enfant, à supposer établi qu'il soit effectivement le père d'un enfant ; qu'en ce qui concerne son état de santé, tel que résultant du certificat médical produit, ni l'urgence ni l'importance des actes médicaux à prévoir ne constituent un motif sérieux permettant de refuser la remise aux autorités requérantes, qui répond aux conditions prévues par les dispositions des articles 695-22 et suivants du code de procédure pénale ; que la remise de l'intéressé aux autorités polonaises doit donc être ordonnée mais en application des dispositions de l'article 695-39 du code de procédure pénale différée jusqu'au jour de la fin de la peine qu'il exécute actuellement en France, étant précisé que la fiche d'écrou émise le 21 juillet 2016 porte la date du 15 août 2016 ;
" alors que l'exécution d'un mandat d'arrêt européen est refusée si les faits pour lesquels il a été émis relèvent de la compétence des juridictions françaises et si la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la législation française ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que les autorités judiciaires polonaises ont sollicité la remise de M. X..., pour l'exécution du mandat d'arrêt européen, délivré en 2011, pris sur le fondement d'une décision du 7 février 1996, du tribunal d'arrondissement de Varsovie Mokotov l'ayant condamné du chef de vol aggravé et le condamnant à une peine de un an et six mois d'emprisonnement pour des faits commis le 23 juin 1995 à Varsovie ; que la cour d'appel a relevé que M. X... était de nationalité française ; que, pour ordonner sa remise aux autorités polonaises, les juges énoncent que l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ne peut être refusée lorsque la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la loi française à la seule condition que les juridictions françaises aient été compétentes en application de l'article 689 du code de procédure pénale, ce qui n'est manifestement pas le cas en l'espèce et qu'il n'appartient pas aux juridictions françaises de se prononcer sur la prescription de la peine au regard des règles polonaises, les mentions due l'Etat requérant faisant foi ; qu'en statuant ainsi, sans s'être assurée, pour un délit auquel la loi française est applicable sur le fondement de l'article 113-6, alinéa 2, du code pénal, que la prescription de l'action publique n'était pas acquise, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé " ;
Attendu que, pour écarter le moyen tiré de l'acquisition de la prescription, l'arrêt énonce que l'article 695-22, 4°, du code de procédure pénale ne peut trouver à s'appliquer, les juridictions françaises n'étant manifestement pas compétentes pour juger les faits pour lesquels le mandat a été émis ; que les juges ajoutent que lesdites juridictions ne peuvent davantage se prononcer sur la date de l'acquisition de la prescription au regard de la loi polonaise, les mentions données par l'Etat requérant faisant foi à cet égard ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen, dès lors que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer, au vu des pièces produites, que la mention, dans l'en-tête de l'arrêt, de la nationalité française de M. X... relève d'une erreur matérielle ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 197, 591 et 593, du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise de M. X... aux autorités polonaises ;
" aux motifs que le mandat a été délivré pour l'exécution d'un jugement rendu par le tribunal régional de Varsovie Mokotov le 7 février 1996 qui a pris la force de la chose jugée le 15 février 1996 qui a condamné M. X... à la peine de dix-huit mois de réclusion criminelle pour le cambriolage commis le 23 juin 1995 à Varsovie à l'aide d'un outil de bricolage au cours duquel il a dérobé un véhicule Ford Transit, peine sur laquelle demeure à exécuter une période de onze mois et dix jours après déduction de la période d'arrestation provisoire ; que les faits ont été commis en Pologne et sont qualifiables en France de vol aggravé par deux circonstances ; que le mandat vise expressément le caractère définitif de la décision ; qu'il résulte des prescriptions de l'article 695-22-4 que l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ne peut être refusée, lorsque la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la loi française, à la seule condition que les juridictions françaises aient été compétentes en application de l'article 689 du code de procédure pénale, ce qui n'est manifestement pas le cas en l'espèce, faute de critère de compétence ; que, de plus, il n'appartient pas aux juridictions françaises de se prononcer sur la date de prescription au regard de la loi polonaise, les mentions de l'état requérant faisant foi ; qu'en l'espèce, ledit mandat précise expressément que l'exécution de la peine a été suspendue et différée au 11 février 2021 tout en développant de manière exhaustive les éléments permettant une meilleure compréhension du dossier et de la procédure permettant à l'état requérant de se prévaloir de l'absence de prescription ; que les motifs allégués par M. X... concernant sa situation personnelle et familiale ne sont étayées par aucune pièce justificative ; que, de plus, incarcéré depuis six années, il déclare lui-même que sa compagne ne lui rend pas visite, qu'il n'a pas davantage vu son enfant, à supposer établi qu'il soit effectivement le père d'un enfant ; qu'en ce qui concerne son état de santé, tel que résultant du certificat médical produit, ni l'urgence ni l'importance des actes médicaux à prévoir ne constituent un motif sérieux permettant de refuser la remise aux autorités requérantes, qui répond aux conditions prévues par les dispositions des articles 695-22 et suivants du code de procédure pénale ; que la remise de l'intéressé aux autorités polonaises doit donc être ordonnée mais en application des dispositions de l'article 695-39 du code de procédure pénale différée jusqu'au jour de la fin de la peine qu'il exécute actuellement en France, étant précisé que la fiche d'écrou émise le 21 juillet 2016 porte la date du 15 août 2016 ;
" 1°) alors qu'est disproportionnée au regard de l'exigence de protection de la vie privée et familiale, la remise à une autorité étrangère d'une personne de nationalité française, installée en France depuis plusieurs années, qui y a installé sa vie privée et familiale (compagne et enfant), en vue de l'exécution d'une peine prononcée près de vingt ans auparavant par les juridictions polonaises, dont il n'a été justifié par aucun acte qu'elle aurait fait préalablement l'objet de la moindre tentative d'exécution par l'autorité polonaise, et dont l'intéressé soulignait qu'en France, faute de tout acte interruptif de prescription, cette peine était prescrite ; qu'en ordonnant la remise de M. X... aux autorités polonaises, la chambre de l'instruction a méconnu l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" 2°) alors que les dispositions de l'article 695-37 ne font pas obstacle à ce que la chambre de l'instruction, après avoir statué sur l'exécution du mandat européen, puisse surseoir temporairement à la remise pour des raisons humanitaires sérieuses, en particulier si la remise est de nature à avoir pour elle des conséquences graves en raison de son état de santé ; que devant la chambre de l'instruction, M. X... faisait état de problèmes de santé ; qu'en se bornant à énoncer que l'état de santé de M. X... ne constituait pas un motif sérieux permettant de refuser la remise aux autorités requérantes, sans vérifier s'il n'y avait pas lieu de surseoir à cette remise qu'elle avait prononcée, en raison de l'état de santé de M. X..., la chambre de l'instruction a méconnu les dispositions susvisées " ;
Attendu que, pour autoriser la remise de M. X... aux autorités polonaises, l'arrêt retient que les motifs tirés de la situation personnelle et familiale de l'intéressé, qui déclare lui-même que sa compagne ne lui rend pas visite et qu'il ne voit pas son enfant, ne sont étayés par aucune pièce justificative ; que les juges ajoutent que ni l'urgence ni l'importance des actes médicaux à prévoir, tels qu'ils résultent du certificat médical produit, ne constituent un motif sérieux de refuser la remise ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction, qui n'était pas saisie d'une demande de sursis temporaire fondée sur les dispositions de l'article 695-38 du code de procédure pénale, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Bonnal, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 6 septembre 2016 n° 16-85.011
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Marcin X...,
contre l'arrêt n° 201 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de REIMS, en date du 1er août 2016, qui, a autorisé sa remise différée aux autorités judiciaires polonaises, en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., qui exécutait une peine au centre de détention de Villenauxe-la-Grande (Aube), a fait l'objet d'un mandat d'arrêt européen émis le 16 juin 2015 par les autorités judiciaires polonaises pour l'exécution de deux décisions ordonnant son arrestation provisoire pour une durée de trois mois, prononcées par le tribunal régional de Varsovie-Mokotow, la première, le 21 novembre 2000, pour des faits de vols aggravés commis le 28 mars et le 13 mai 1997, et la seconde, le 25 janvier 2002, pour des faits de vol aggravé commis dans la nuit du 27 au 28 mars 1996 ; que, comparant devant la chambre de l'instruction, la personne recherchée n'a pas consenti à sa remise ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention des droits de l'homme, préliminaire et 197 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise de M. X... aux autorités polonaises ;
" alors que la notification aux parties et à leur avocat, de la date de l'audience à laquelle sera appelée la cause soumise à la chambre de l'instruction est essentielle à la préservation des droits de la défense ; qu'il ne résulte pas des pièces de la procédure que M. X... ait été avisé de la date de l'audience du 1er août 2016 ; que les pièces ne font état que d'une notification aux autorités de la maison d'arrêt et à ses avocats, sans preuve de la remise de la date d'audience à l'intéressé ; que, dès lors, la cour d'appel a méconnu les dispositions susvisées " ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de l'absence de notification de la date de l'audience de la chambre de l'instruction, dès lors que, régulièrement avisé qu'à cette même audience, il serait statué sur un autre mandat d'arrêt européen également délivré par les autorités judiciaires polonaises, il a comparu, assisté de son avocat, et a présenté des observations pour s'opposer, dans chacune des deux procédures, à sa remise, sans s'être prévalu d'aucune nullité de la procédure, de sorte que la méconnaissance des dispositions de l'article 197, alinéa 1 et 2, du code de procédure pénale n'a pas eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 113-6 du code pénal, préliminaire, 197, 695-11, 695-12, 695-22, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise de M. X... aux autorités polonaises ;
" aux motifs que le mandat a été délivré pour l'exécution de deux décisions d'arrestation provisoire du tribunal régional de Varsovie Mokotov ; qu'une décision, en date du 21 novembre 2000, qui a ordonné son arrestation provisoire pour une période de trois mois à partir de sa date de détention dans deux affaires pour laquelle il est accusé d'avoir le 28 mars 1997 à Varsovie, agissant de concert avec M. Adam Y..., commis un vol d'alcool et d'avoir le 13 mai 1997 à Varsovie, commis un vol d'une veste au détriment de M. Rafal Z..., en lui portant des coups pour conserver le bien dérobé, une décision rendue par le tribunal régional de Varsovie Mokotov le 25 janvier 2002, qui a ordonné son arrestation provisoire pour une période de trois mois à partir de sa date de détention dans une affaire pour laquelle il est accusé d'avoir, dans la nuit du 27 au 28 mars 1996, agissant de concert avec d'autres personnes après avoir cambriolé avec un outil de cambriolage, commis le vol d'un véhicule Opel Omega immatriculé ...; que les faits ont été commis en Pologne et sont qualifiables en France de vol aggravé par deux circonstances ; que le mandat vise expressément le caractère définitif de la décision ; qu'il résulte des prescriptions de l'article 695-22-4 que l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ne peut être refusée, lorsque la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la loi française, à la seule condition que les juridictions françaises aient été compétentes en application de l'article 689 du code de procédure pénale, ce qui n'est manifestement pas le cas en l'espèce, faute de critère de compétence ; que, de plus, il n'appartient pas aux juridictions françaises de se prononcer sur la date de prescription au regard de la loi polonaise, les mentions de l'état requérant faisant foi ; qu'en l'espèce, ledit mandat précise expressément que l'exécution de la peine a été suspendue et différée au 11 février 2021, tout en développant de manière exhaustive les éléments permettant une meilleure compréhension du dossier et de la procédure permettant à l'état requérant de se prévaloir de l'absence de prescription ; que les motifs allégués par M. X... concernant sa situation personnelle et familiale ne sont étayées par aucune pièce justificative ; que, de plus, incarcéré depuis six années, il déclare lui-même que sa compagne ne lui rend pas visite, qu'il n'a pas davantage vu son enfant, à supposer établi qu'il soit effectivement le père d'un enfant ; qu'en ce qui concerne son état de santé, tel que résultant du certificat médical produit, ni l'urgence ni l'importance des actes médicaux à prévoir ne constituent un motif sérieux permettant de refuser la remise aux autorités requérantes, qui répond aux conditions prévues par les dispositions des articles 695-22 du code de procédure pénale ; que la remise de l'intéressé aux autorités polonaises doit donc être ordonnée mais en application de l'article 695-39 du code de procédure pénale différée jusqu'au jour de la fin de la peine qu'il exécute actuellement en France, étant précisé que la fiche d'écrou émise le 21 juillet 2016, porte la date du 15 août 2016 ;
" 1°) alors qu'un mandat européen est une décision judiciaire émise par un Etat membre de l'Union européenne, en vue de l'arrestation et de la remise par un autre Etat membre, d'une personne recherchée pour l'exercice de poursuites pénales ou pour l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté privative de liberté ; qu'il ne saurait permettre l'exécution d'une mesure « d'arrestation provisoire » ; que la chambre de l'instruction a relevé que les autorités judiciaires polonaises ont sollicité la remise de M. X... pour l'exécution du mandat d'arrêt européen, délivré en 2015, pris sur le fondement de deux décisions du 21 novembre 2000 et 25 janvier 2002, ordonnant son « arrestation provisoire » de plusieurs mois pour des faits commis, le 28 mars 1997, le 13 mai 1997, et les 27 et 28 mars 1996 ; qu'en ordonnant toutefois la remise de M. X... aux autorités polonaises, la chambre de l'instruction a méconnu les dispositions susvisées ;
" 2°) alors que, lorsque les faits sur lesquels est fondé un mandat d'arrêt européen ont fait l'objet d'une condamnation dans l'Etat émetteur, cette condamnation doit être égale ou supérieure à quatre mois d'emprisonnement ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les décisions de condamnation sur lesquelles est fondé le mandat d'arrêt européen de 2015 avaient prononcé des peines « d'arrestation provisoire » de trois mois chacune ; qu'en ordonnant toutefois la remise de M. X... aux autorités polonaises, la chambre de l'instruction a méconnu les dispositions susvisées ;
" 3°) alors que l'exécution d'un mandat d'arrêt européen est refusée si les faits pour lesquels il a été émis relèvent de la compétence des juridictions françaises et si la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la législation française ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que les autorités judiciaires polonaises ont sollicité la remise de M. X... pour l'exécution du mandat d'arrêt européen, délivré en 2015, pris sur le fondement de deux décisions du 21 novembre 2000 et 25 janvier 2002, ordonnant son arrestation provisoire pour des faits commis le 28 mars 1997, le 13 mai 1997, et les 27 et 28 mars 1996 ; que la cour d'appel a relevé que M. X... était de nationalité française et que les faits en cause étaient qualifiables en France de vol aggravé ; que, pour ordonner sa remise aux autorités polonaises, les juges énoncent que l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ne peut être refusée lorsque la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la loi française à la seule condition que les juridictions françaises aient été compétentes en application de l'article 689 du code de procédure pénale, ce qui n'est manifestement pas le cas en l'espèce, faute de critère de rattachement, et qu'il n'appartient pas aux juridictions françaises de se prononcer sur la prescription de la peine au regard des règles polonaises, les mentions de l'Etat requérant faisant foi ; qu'en statuant ainsi, sans s'être assurée, pour un délit de vol aggravé commis par une personne dont elle a relevé qu'elle était de nationalité française, à laquelle la loi française était ainsi susceptible d'être applicable sur le fondement de l'article 113-6, alinéa 2, du code pénal, que la prescription de l'action publique ou de la peine n'était pas acquise, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé " ;
Attendu que, pour ordonner la remise de la personne recherchée, l'arrêt, après avoir rappelé les faits donnant lieu à l'émission du mandat et les décisions prononçant des mesures d'arrestation provisoire visées par celui-ci, énonce que ces faits ont été commis en Pologne, peuvent être qualifiés en France de vols aggravés par deux circonstances, et que ces décisions sont exécutoires ; que les juges ajoutent que l'article 695-22, 4°, du code de procédure pénale n'est pas applicable, les juridictions françaises n'étant manifestement pas compétentes pour juger les faits, et que lesdites juridictions ne peuvent davantage se prononcer sur la date de l'acquisition de la prescription au regard de la loi polonaise, les mentions données par l'Etat requérant faisant foi à cet égard ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen, dès lors que, d'une part, il résulte du mandat d'arrêt que les faits pour lesquels il a été émis sont punis d'une peine de dix ans d'emprisonnement et, d'autre part, la Cour de cassation est en mesure de s'assurer, au vu des pièces produites, que la mention, dans l'en-tête de l'arrêt, de la nationalité française de M. X... relève d'une erreur matérielle ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention des droits de l'homme, préliminaire, 197, 591, 593, du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise de M. X... aux autorités polonaises ;
" aux motifs que le mandat a été délivré pour l'exécution de deux décisions d'arrestation provisoire du tribunal régional de Varsovie Mokotov ; qu'une décision, en date du 21 novembre 2000, qui a ordonné son arrestation provisoire pour une période de trois mois à partir de sa date de détention dans deux affaires pour laquelle il est accusé d'avoir le 28 mars 1997 à Varsovie, agissant de concert avec M. Y..., commis un vol d'alcool et d'avoir le 13 mai 1997 à Varsovie, commis un vol d'une veste au détriment de M. Z..., en lui portant des coups pour conserver le bien dérobé, une décision rendue par le tribunal régional de Varsovie Mokotov le 25 janvier 2002, qui a ordonné son arrestation provisoire pour une période de trois mois à partir de sa date de détention dans une affaire pour laquelle il est accusé d'avoir dans la nuit du 27 au 28 mars 1996, agissant de concert avec d'autres personnes après avoir cambriolé avec un outil de cambriolage, commis le vol d'un véhicule Opel Omega immatriculé ...; que les faits ont été commis en Pologne et sont qualifiables en France de vol aggravé par deux circonstances ; que le mandat vise expressément le caractère définitif de la décision ; qu'il résulte des prescriptions de l'article 695-22-4 que l'exécution d'un mandat d'arrêt européen ne peut être refusée, lorsque la prescription de l'action publique ou de la peine se trouve acquise au regard de la loi française, à la seule condition que les juridictions françaises aient été compétentes en application de l'article 689 du code de procédure pénale, ce qui n'est manifestement pas le cas en l'espèce, faute de critère de compétence ; que, de plus, il n'appartient pas aux juridictions françaises de se prononcer sur la date de prescription au regard de la loi polonaise, les mentions de l'état requérant faisant foi. En l'espèce, ledit mandat précise expressément que l'exécution de la peine a été suspendue et différée au 11 février 2021 tout en développant de manière exhaustive les éléments permettant une meilleure compréhension du dossier et de la procédure permettant à l'état requérant de se prévaloir de l'absence de prescription ; que les motifs allégués par M. X... concernant sa situation personnelle et familiale ne sont étayées par aucune pièce justificative ; que, de plus, incarcéré depuis six années, il déclare lui-même que sa compagne ne lui rend pas visite, qu'il n'a pas davantage vu son enfant, à supposer établi qu'il soit effectivement le père d'un enfant ; qu'en ce qui concerne son état de santé, tel que résultant du certificat médical produit, ni l'urgence ni l'importance des actes médicaux à prévoir ne constituent un motif sérieux permettant de refuser la remise aux autorités requérantes, qui répond aux conditions prévues par les dispositions des articles 695-22 du code de procédure pénale ; que la remise de l'intéressé aux autorités polonaises doit donc être ordonnée mais en application de l'article 695-39 du code de procédure pénale différée jusqu'au jour de la fin de la peine qu'il exécute actuellement en France, étant précisé que la fiche d'écrou émise le 21 juillet 2016 porte la date du 15 août 2016 ;
" 1°) alors qu'est disproportionnée au regard de l'exigence de protection de la vie privée et familiale, la remise à une autorité étrangère d'une personne installée en France depuis plusieurs années, qui y a installé sa vie privée et familiale (compagne et enfant), en vue de l'exécution d'une peine prononcée près de vingt ans auparavant par les juridictions polonaises, dont il n'a été justifié par aucun acte qu'elle aurait fait préalablement l'objet de la moindre tentative d'exécution par l'autorité polonaise, et dont l'intéressé soulignait que cette peine était prescrite ; qu'en ordonnant la remise de M. X... aux autorités polonaises, la chambre de l'instruction a méconnu l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et du citoyen ;
" 2°) alors que les dispositions de l'article 695-37 ne font pas obstacle à ce que la chambre de l'instruction, après avoir statué sur l'exécution du mandat européen, puisse surseoir temporairement à la remise pour des raisons humanitaires sérieuses, en particulier si la remise est de nature à avoir pour elle des conséquences graves en raison de son état de santé ; que devant la chambre de l'instruction, M. X... faisait état de problèmes de santé ; qu'en se bornant à énoncer que l'état de santé de M. X... ne constituait pas un motif sérieux permettant de refuser la remise aux autorités requérantes, sans vérifier s'il n'y avait pas lieu de surseoir à cette remise qu'elle avait prononcée, en raison de l'état de santé de M. X..., la chambre de l'instruction a méconnu les dispositions susvisées " ;
Attendu que, pour autoriser la remise de M. X... aux autorités polonaises, l'arrêt retient que les motifs tirés de la situation personnelle et familiale de l'intéressé, qui déclare lui-même que sa compagne ne lui rend pas visite et qu'il ne voit pas son enfant, ne sont étayés par aucune pièce justificative ; que les juges ajoutent que ni l'urgence ni l'importance des actes médicaux à prévoir, tels qu'ils résultent du certificat médical produit, ne constituent un motif sérieux de refuser la remise ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction, qui n'était pas saisie d'une demande de sursis temporaire fondée sur les dispositions de l'article 695-38 du code de procédure pénale, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Bonnal, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 6 septembre 2016 n° 14-86.606
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Antoine X...,- La société Nacelles services,
contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9e chambre, en date du 17 septembre 2014, qui, pour homicide involontaire, a condamné, le premier, à six mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 euros d'amende, dont 5 000 euros avec sursis, la seconde, à 30 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 7 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Talabardon, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire TALABARDON, les observations de la société civile professionnelle GATINEAU et FATTACCINI, de la société civile professionnelle BORÉ et SALVEDE BRUNETON, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire commun aux demandeurs, le mémoire en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 4121-3, R. 4121-1 et R. 4323-63 du code du travail, 121-3, alinéa 4, et 221-6 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... et la société Nacelles services coupables d'avoir involontairement causé la mort de Philippe Y... par la violation manifestement délibérée de l'obligation d'évaluer le risque de chute de hauteur dans le document unique d'évaluation des risques et condamné M. X... à la peine d'emprisonnement de six mois assortis du sursis ainsi qu'à la peine d'amende de 10 000 euros dont 5 000 euros assortis du sursis et la société Nacelles services à la peine d'amende de 30 000 euros ainsi qu'à verser à Mme Z... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475 du code de procédure pénale ;
" aux motifs que les constatations de la présence de l'élévateur JLG Toucan par les contrôleurs du travail le lendemain de l'accident ainsi que la production de la facture d'achat et de mise en service en avril 2008 de cet élévateur portant le numéro de série 30002491 établissent la preuve que l'entreprise disposait du matériel adéquat pour exécuter l'opération de travail en hauteur à laquelle s'étaient livrés M. A... et Philippe Y... dans les conditions de sécurité conformes aux dispositions du code du travail applicables, de sorte qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a relaxé les prévenus de ce chef de poursuite (…) qu'ainsi que l'ont conclu les prévenus, il se déduit des clichés photographiques que les policiers ont pris dans l'atelier le jour où ils se sont rendus dans l'atelier la preuve que, si l'arrière de la nacelle était encombré, les espaces sur le côté où était positionné l'escabeau et devant la nacelle étaient libres dans une mesure qui permettait d'acheminer l'élévateur Toucan utile à l'intervention, et tandis qu'il n'est pas démontré, ni même allégué que les situations de l'atelier et des matériels ont été changés avant cette prise de phot au jour de l'accident, il convient là encore de confirmer le jugement en ce qu'il a relaxé les prévenus de ce chef de poursuite ; (…) que les prévenus affirment que la nacelle élévatrice était régulièrement utilisée par les salariés de l'atelier pour les opérations de montage ou de réparation, que les escabeaux n'étaient pas, à la date de l'accident, utilisés comme poste de travail, mais comme moyen d'accès au plateau des camions-nacelles ; que, de par sa qualification et son ancienneté de service, onze ans, M. A... ne pouvait ignorer que l'opération de remplacement des câbles de la nacelle nécessitait le recours à la nacelle Toucan, ainsi qu'il l'a reconnu après coup en déclarant ne pas avoir songé à l'utiliser ; qu'il avait la capacité d'effectuer seul cette réparation ainsi qu'il l'avait déjà fait par le passé comme l'a attesté M. B..., salarié de l'entreprise, et comme les prévenus l'ont établi après l'accident en présence d'un huissier ; que d'après le témoignage d'un salarié, M. C..., il a été indiqué que le temps de transfert de ce matériel de l'atelier de montage dans l'atelier de réparation était d'environ 10 minutes ; qu'enfin, M. A... et Philippe Y... avaient satisfait à toutes les épreuves théoriques et pratiques lors de la délivrance du CACES dont le programme comprend le référentiel de la CNAM relatif aux dangers du travail en hauteur ; qu'aucun de ces moyens n'est de nature à suppléer outre ou contre les carences du document unique d'évaluation des risques de l'entreprise dont il est établi qu'il ne mentionnait aucune identification sur la prévention des chutes des salariés, ni par conséquent aucune préconisation de sécurité à destination des salariés, singulièrement sur l'interdiction d'utiliser les échelles et les escabeaux pour les travaux en hauteur ; que loin d'être formelle, cette carence est d'autant plus grave qu'il résulte des témoignages des salariés mais encore de l'aveu même de du directeur technique de l'entreprise et de M. X..., que les salariés avaient pour habitude d'intervenir en hauteur avec des échelles et des escabeaux à la place de la nacelle Toucan difficile d'accès en raison de l'encombrement fréquent de l'atelier ; qu'il convient, en conséquence, d'infirmer le jugement de relaxe de ce chef et de déclarer les prévenus coupable de cette infraction visée à l'article R. 4121-1 du code du travail ; que quant à la cause involontaire de la mort du salarié par la violation manifestement délibérée de l'obligation particulière de sécurité, considérant qu'à la suite des motifs adoptés ci-dessus, et particulièrement de l'absence d'interdiction, ni même d'information des salariés de nature à empêcher l'habitude qu'ils avaient pris d'utiliser les échelles à la place de la nacelle dédiée aux interventions, il peut être déduit la preuve que M. X... n'a pas pris de mesure permettant d'éviter l'accident de Philippe Y... de sorte que la preuve du lien de causalité entre les circonstances du décès du salarié et les carences du document unique d'évaluation des risques est acquise aux poursuites et qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement de ce chef et de retenir la responsabilité pénale de M. X... dans l'accident ainsi que celle de la société Nacelles services sur le fondement des dispositions de l'article 121-2 du code pénal ; que, sur la peine, considérant que si la société disposait du matériel utile à l'intervention technique de la victime, le manquement de l'employeur à l'obligation de l'évaluation du risque des chutes en hauteur tel qu'il est retenu ci-dessus revêt une particulière gravité en raison de la connaissance des risque [s] de chutes en hauteur que toutes les professionnels dont le métier est exposé par nature à ce risque, comme c'est particulièrement le cas d'une entreprise d'entretien et de location de nacelles (sic), étant rappelé que l'interdiction de principe du recours aux échelles et leur restriction appartient au bloc de prévention légale en matière de sécurité depuis 1965 ; qu'en répression, il convient de condamner, d'une part, M. X... à la peine d'emprisonnement de six mois assortis du sursis et à la peine d'amende de 10 000 euros dont 5 000 euros assortis du sursis, et d'autre part, la société Nacelles services à la peine d'amende de 30 000 euros ; que, sur l'action civile, considérant que Mme Z... était bien fondée à être assistée devant la cour en sa qualité de partie civile, en sorte qu'il convient de condamner la société Nacelles services à lui verser la somme de 1 500 euros qu'elle a réclamée sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
" 1°) alors que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime ; que pour déclarer les prévenus coupables d'avoir involontairement causé la mort de la victime par la violation manifestement délibérée de l'obligation d'évaluer le risque de chute de hauteur dans le document unique d'évaluation des risques, l'arrêt attaqué s'est fondé sur l'absence d'interdiction et d'information des salariés de l'entreprise de nature à empêcher l'habitude qu'ils avaient prise d'utiliser les échelles à la place de la nacelle dédiée aux interventions et, s'agissant de la peine, sur la circonstance que les professionnels dont le métier est exposé par nature aux risques de chute ne peuvent ignorer ces derniers ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la violation de cette obligation particulière de sécurité présentait un caractère manifestement délibéré, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
" 2°) alors que l'article 221-6 du code pénal exige, pour recevoir application, que soit constatée l'existence certaine d'un lien de causalité entre la faute du prévenu et la mort de la victime ; que pour entrer en voie de condamnation, l'arrêt attaqué a retenu que le document unique d'évaluation des risques aurait dû informer voire interdire aux salariés de prendre l'habitude d'utiliser des échelles ou des escabeaux pour effectuer des réparations à la place de la nacelle dédiée aux interventions ; qu'en statuant ainsi, quand l'utilisation d'échelles ou d'escabeaux comme poste de travail n'est pas interdite en toutes circonstances, en sorte que l'existence d'un lien de causalité entre la carence imputée à ce document et le décès de la victime n'était pas certaine, et en refusant par suite de vérifier, comme elle y était invitée, si l'initiative du chef d'équipe de la victime de ne pas recourir à la nacelle dédiée aux interventions qui était pourtant disponible le jour de l'accident n'avait pas été la cause de l'accident, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés " ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles R. 4121-1 et R. 4321-4 du code du travail, 111-4, 121-3, alinéa 4, et 221-6 du code pénal, 591 du code de procédure pénale, violation de la loi ; " en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... et la société Nacelles services coupables d'avoir involontairement causé la mort de Philippe Y... par la violation manifestement délibérée de l'obligation d'évaluer le risque de chute de hauteur dans le document unique d'évaluation des risques et condamné M. X... à la peine d'emprisonnement de six mois assortis du sursis ainsi qu'à la peine d'amende de 10 000 euros dont 5 000 euros assortis du sursis et la société Nacelles services à la peine d'amende de 30 000 euros ainsi qu'à verser à Mme Z... la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475 du code de procédure pénale ;
" aux motifs que les constatations de la présence de l'élévateur JLG Toucan par les contrôleurs du travail le lendemain de l'accident ainsi que la production de la facture d'achat et de mise en service en avril 2008 de cet élévateur portant le numéro de série 30002491 établissent la preuve que l'entreprise disposait du matériel adéquat pour exécuter l'opération de travail en hauteur à laquelle s'étaient livrés M. A... et Philippe Y... dans les conditions de sécurité conformes aux dispositions du code du travail applicables, de sorte qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a relaxé les prévenus de ce chef de poursuite (…) qu'ainsi que l'ont conclu les prévenus, il se déduit des clichés photographiques que les policiers ont pris dans l'atelier le jour où ils se sont rendus dans l'atelier la preuve que, si l'arrière de la nacelle était encombré, les espaces sur le côté où était positionné l'escabeau et devant la nacelle étaient libres dans une mesure qui permettait d'acheminer l'élévateur Toucan utile à l'intervention, et tandis qu'il n'est pas démontré, ni même allégué que les situations de l'atelier et des matériels ont été changés avant cette prise de phot au jour de l'accident, il convient là encore de confirmer le jugement en ce qu'il a relaxé les prévenus de ce chef de poursuite ; (…) que les prévenus affirment que la nacelle élévatrice était régulièrement utilisée par les salariés de l'atelier pour les opérations de montage ou de réparation, que les escabeaux n'étaient pas, à la date de l'accident, utilisés comme poste de travail, mais comme moyen d'accès au plateau des camions-nacelles ; que, de par sa qualification et son ancienneté de service, onze ans, M. A... ne pouvait ignorer que l'opération de remplacement des câbles de la nacelle nécessitait le recours à la nacelle Toucan, ainsi qu'il l'a reconnu après coup en déclarant ne pas avoir songé à l'utiliser ; qu'il avait la capacité d'effectuer seul cette réparation ainsi qu'il l'avait déjà fait par le passé comme l'a attesté M. B..., salarié de l'entreprise, et comme les prévenus l'ont établi après l'accident en présence d'un huissier ; que d'après le témoignage d'un salarié, M. C..., il a été indiqué que le temps de transfert de ce matériel de l'atelier de montage dans l'atelier de réparation était d'environ 10 minutes ; qu'enfin, M. A... et Philippe Y... avaient satisfait à toutes les épreuves théoriques et pratiques lors de la délivrance du CACES dont le programme comprend le référentiel de la CNAM relatif aux dangers du travail en hauteur ; qu'aucun de ces moyens n'est de nature à suppléer outre ou contre les carences du document unique d'évaluation des risques de l'entreprise dont il est établi qu'il ne mentionnait aucune identification sur la prévention des chutes des salariés, ni par conséquent aucune préconisation de sécurité à destination des salariés, singulièrement sur l'interdiction d'utiliser les échelles et les escabeaux pour les travaux en hauteur ; que loin d'être formelle, cette carence est d'autant plus grave qu'il résulte des témoignages des salariés mais encore de l'aveu même de du directeur technique de l'entreprise et de M. X..., que les salariés avaient pour habitude d'intervenir en hauteur avec des échelles et des escabeaux à la place de la nacelle Toucan difficile d'accès en raison de l'encombrement fréquent de l'atelier : qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement de relaxe de ce chef et de déclarer les prévenus coupable de cette infraction visée à l'article R. 4121-1 du code du travail ; que quant à la cause involontaire de la mort du salarié par la violation manifestement délibérée de l'obligation particulière de sécurité, considérant qu'à la suite des motifs adoptés ci-dessus, et particulièrement de l'absence d'interdiction, ni même d'information des salariés de nature à empêcher l'habitude qu'ils avaient pris d'utiliser les échelles à la place de la nacelle dédiée aux interventions, il peut être déduit la preuve que M. X... n'a pas pris de mesure permettant d'éviter l'accident de Philippe Y... de sorte que la preuve du lien de causalité entre les circonstances du décès du salarié et les carences du document unique d'évaluation des risques est acquise aux poursuites et qu'il convient en conséquence d'infirmer le jugement de ce chef et de retenir la responsabilité pénale de M. X... dans l'accident ainsi que celle de la société Nacelles services sur le fondement des dispositions de l'article 121-2 du code pénal ; que, sur la peine, considérant que si la société disposait du matériel utile à l'intervention technique de la victime, le manquement de l'employeur à l'obligation de l'évaluation du risque des chutes en hauteur tel qu'il est retenu ci-dessus revêt une particulière gravité en raison de la connaissance des risque [s] de chutes en hauteur que toutes les professionnels dont le métier est exposé par nature à ce risque, comme c'est particulièrement le cas d'une entreprise d'entretien et de location de nacelles (sic), étant rappelé que l'interdiction de principe du recours aux échelles et leur restriction appartient au bloc de prévention légale en matière de sécurité depuis 1965 ; qu'en répression, il convient de condamner, d'une part, M. X... à la peine d'emprisonnement de six mois assortis du sursis et à la peine d'amende de 10 000 euros dont 5 000 euros assortis du sursis, et d'autre part, la société Nacelles Services à la peine d'amende de 30 000 euros ; que, sur l'action civile, considérant que Mme Z... était bien fondée à être assistée devant la cour en sa qualité de partie civile, en sorte qu'il convient de condamner la société Nacelles services à lui verser la somme de 1 500 euros qu'elle a réclamée sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
" 1°) alors qu'aux termes de l'article R. 4121-1 du code du travail, le document unique d'évaluation des risques a pour seul objet d'indiquer les résultats de l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs à laquelle procède l'employeur, sans que ce document doive contenir des préconisations ou des interdictions faites aux salariés de l'entreprise ; qu'en se fondant au contraire sur la circonstance que ledit document ne contenait aucune interdiction ni préconisation à destination des salariés concernant l'utilisation des échelles et escabeaux pour effectuer des travaux en hauteur, pour en déduire que la mort du salarié avait été causée par la violation manifestement délibérée d'une obligation de sécurité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2°) alors que la faute du salarié victime, lorsqu'elle est la cause exclusive de l'accident, est exonératoire pour l'employeur ; que tel est le cas lorsque comme en l'espèce, la victime, malgré la formation qu'elle avait suivie quant aux dangers du travail en hauteur, a pris l'initiative d'effectuer la réparation d'une camionnacelle en se positionnant sur celle-ci au lieu d'utiliser la nacelle dédiée aux interventions en hauteur disponible ; qu'en refusant néanmoins de tenir compte de la faute du salarié victime invoquée par les prévenus, après avoir pourtant relevé que tout professionnel dont le métier est exposé par nature au risque de chutes devait connaître celui-ci, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 10 mars 2011, Philippe Y..., salarié de la société Nacelles services en qualité de monteur-manutentionnaire, a fait une chute mortelle alors qu'ayant pris position à plus de deux mètres de hauteur sur le bras élévateur d'une nacelle, en vue d'y effectuer une réparation, il a perdu l'équilibre ; que la société Nacelles services et son président-directeur général, M. X..., ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel du chef d'homicide involontaire, pour avoir, notamment, omis de réaliser une évaluation du risque de chute de hauteur consignée dans le document unique d'évaluation des risques, malgré la fréquence des travaux en hauteur effectués par les salariés sur des élévateurs ou camions-nacelles ; que les juges du premier degré ont relaxé les prévenus et débouté les parties civiles de leurs demandes ; que le ministère public et Mme Z..., épouse D..., compagne de la victime, ont relevé appel de la décision ;
Attendu que, pour infirmer le jugement entrepris et déclarer les prévenus coupables d'homicide involontaire par la violation manifestement délibérée de l'obligation d'évaluer les risques de chute de hauteur dans le document unique d'évaluation des risques, l'arrêt retient en substance que ce document ne comportait aucune identification du risque de chute des salariés effectuant des travaux en hauteur, alors que M. X... connaissait l'habitude que ceux-ci avaient prise d'utiliser les échelles et escabeaux pour de telles interventions, au lieu de l'élévateur spécialement dédié à cet usage, et que, nonobstant, il n'a pris aucune mesure permettant de prévenir ce type de comportements, dont il n'ignorait pas la dangerosité ; que les juges déduisent de la carence du prévenu à prendre les mesures d'information et de prévention qui eussent été de nature à éviter l'accident dont Philippe Y... a été victime, l'existence d'un lien de causalité avec le décès de ce dernier ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que la personne physique prévenue, qui n'a pas pris les mesures permettant d'éviter la réalisation du dommage, a commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elle ne pouvait ignorer, et, par là-même, une faute de négligence pour le compte de la personne morale qu'elle représentait, et abstraction faite du motif erroné mais surabondant, pris de ce que le document unique d'évaluation des risques aurait dû, au-delà de l'identification des risques de chute de hauteur, comporter des préconisations de sécurité à destination des salariés, singulièrement sur l'interdiction d'utiliser les échelles et escabeaux pour les travaux en hauteur, la cour d'appel, qui a implicitement mais nécessairement écarté l'argumentation prise de la faute d'un tiers, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens, le second pris en sa seconde branche étant nouveau et mélangé de fait, et comme tel irrecevable, doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale au profit des demandeurs aux pourvois ;
FIXE à 3 000 euros la somme globale que M. X... et la société Nacelles services devront payer à Mme Z..., épouse D..., en application du même texte ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le six septembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 6 septembre 2016 n° 16-83.903
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Xavier X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de FORT-DE-FRANCE, en date du 13 mai 2016, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur la recevabilité du pourvoi formé le 20 mai 2016 par M. X... :
Attendu que le demandeur, ayant épuisé, par l'exercie qu'il en avait fait le 17 mai 2016, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision ; que seul est recevable le pourvoi formé le 17 mai 2016 ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 114, 145, 145-2, 706-71, 593 du code de procédure pénale, 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, violation des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a constaté la régularité de la convocation de Me Ohayon à un débat contradictoire de prolongation de détention provisoire délivrée par télécopie le 14 avril 2016, et confirmé l'ordonnance attaquée du 22 avril 2016 ayant prolongé la détention provisoire de M. X... d'une durée de six mois à compter du 4 mai 2016 0 heure 00 ;
" aux motifs que ni l'article 114, alinéa 2, du code de procédure pénale (par renvoi de l'article 145-2 du même code) fixant notamment les modalités de convocations des avocats devant le juge des libertés et de la détention, ni l'article 706-71 du code de procédure pénale organisant le recours à la visioconférence n'oblige à ce que la convocation à l'avocat mentionne que le débat aura lieu par visioconférence ; que les seules obligations tenant à l'organisation du débat contradictoire en visioconférence sont de solliciter l'accord du mis en examen et de tenir copie du dossier à disposition de l'avocat dans les locaux de détention ; que l'article 706-71, § 5, du code de procédure pénale stipule que l'avocat peut assister son client tant auprès du magistrat qu'auprès de son client en détention ; que M. X... a donné son accord à sa comparution en visioconférence ; que Maître Ohayon a sollicité et obtenu du juge d'instruction le 6 janvier 2016 un permis de visite provisoire lui permettant d'accéder à son client détenu au centre pénitentiaire de Fleury-Mérogis ; que rien en procédure ne permettait de supposer que M. X... avait été depuis cette date transféré en Martinique ; que la convocation adressée à Maître Ohayon l'informant de la date et de l'heure du débat mentionnait, outre l'heure Martinique, celle de métropole en lettres majuscules, ce qui permettait de déduire que le débat aurait lieu en visioconférence ; qu'il appartenait à M. X... et à son avocat d'organiser leur défense, notamment, le cas échéant, en sollicitant un renvoi, fût-ce la veille ou au jour de l'audience ; que les dispositions des articles 114, § 2, et 706-71 du code de procédure pénale ont été respectées en ce que l'avocat de M. X... a été avisé dans les délais légaux de la tenue du débat contradictoire et en ce que M. X... a donné son accord à sa comparution en visioconférence a ce débat contradictoire ;
" alors qu'est irrégulière et donc nulle la convocation à un débat contradictoire en vue de la prolongation de la détention provisoire, qui convoque l'avocat au siège du juge des libertés et de la détention, soit en l'occurrence Fort-de-France, sans l'avertir que le débat aura lieu par visioconférence avec le mis en examen incarcéré en métropole, ni lui dire que ce dernier aurait donné son accord à ce mode de débat (accord indispensable dans l'hypothèse d'une prolongation de détention) ; que faute de contenir ces éléments indispensables à l'organisation de la défense – l'avocat n'étant tenu ni de chercher lui-même si le mode de visioconférence avait été proposé par le juge et accepté par son client, ni de lire entre les lignes d'une convocation à Fort-de-France pour deviner qu'il pouvait assister son client à Fleury-Mérogis, ni de pallier une irrégularité d'une convocation en demandant un renvoi – la convocation au débat contradictoire était nulle ; que la Cour de cassation constatera cette nullité et celle de l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire, et prononcera une cassation sans renvoi avec mise en liberté immédiate de M. X... " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., mis en examen du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants par un juge d'instruction du tribunal de Fort-de-France, a été placé en détention provisoire le 4 novembre 2013 ; qu'en vue de la prolongation de cette détention, son avocat, inscrit au barreau de Paris, a été convoqué le 14 avril 2016, par télécopie, pour un débat contradictoire devant le juge des libertés et de la détention de cette juridiction fixé au 22 avril 2016 ; que cet avocat, qui, par courrier adressé la veille au juge des libertés et de la détention, en avait informé ce magistrat, ne s'est pas présenté à son cabinet lors de ce débat, réalisé par visio-conférence, et n'a pas assisté son client incarcéré au centre pénitentiaire de Fleury-Mérogis ; qu'à l'issue de ce débat, la détention provisoire de M. X... a été prolongée pour un délai de quatre mois par ordonnance du juge des libertés et de la détention ;
Attendu qu'ayant relevé appel de cette décision, le mis en examen a fait valoir devant la chambre de l'instruction que cette ordonnance était nulle, motif pris de ce que son avocat n'avait pas été avisé, dans la convocation qui lui avait été adressée, de ce que le débat contradictoire aurait lieu par visio-conférence, le privant de la possibilité d'être assisté de son avocat ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation de l'ordonnance entreprise et confirmer la prolongation de la détention provisoire du demandeur résultant de cette ordonnance, l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu que, si c'est à tort que, pour rejeter la demande de nullité de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant la détention provisoire de M. X..., l'arrêt se borne à relever que ni l'article 114, alinéa 2, du code de procédure pénale, auquel renvoie l'article 145-2 du même code, ni l'article 706-71 dudit code, n'exigent que la convocation délivrée au conseil aux fins d'assister au débat contradictoire fixé devant le juge des libertés et de la détention pour qu'il soit statué sur l'éventuelle prolongation de la détention provisoire du mis en examen, mentionne que ce débat aura lieu par visio-conférence, alors qu'il se déduit de l'article 706-71, alinéa 5, de ce code que l'avocat du mis en examen doit nécessairement être informé du recours à ce moyen de télécommunication audiovisuelle afin de choisir de se trouver auprès de ce magistrat ou auprès de l'intéressé, l'arrêt n'encourt pas pour autant la censure ;
Que l'avocat du mis en examen, informé de l'incarcération continue de ce dernier au centre pénitentiaire de Fleury-Mérogis et destinataire d'une convocation en vue de ce débat précisant, outre l'horaire de celui-ci en Martinique, celui de la métropole, n'a pu se méprendre sur le fait que M. X... ne serait pas transféré à Fort-de-France pour le débat contradictoire, ce dont il se déduisait nécessairement que la comparution de son client à ce débat aurait lieu par visio-conférence, dans les conditions prévues par la loi, soit dans l'établissement pénitentiaire où il savait qu'il était détenu ;
Qu'il s'en déduit que le défaut de respect des dispositions de l'article 706-71 du code de procédure pénale relatives à l'information de l'avocat sur le recours à la visio-conférence n'a pas eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense de M. X... lors de la tenue de ce débat ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs :
I-Sur le pourvoi formé le 20 mai 2016 :
Le DECLARE irrecevable ;
II-Sur le pourvoi formé le 17 mai 2016 :
Le REJETTE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Ricard, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 6 septembre 2016 n° 15-84.186
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- La Société industrielle des diverses applications du caoutchouc,- M. Bernard X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 26 mai 2015, qui a condamné la première, pour blessures involontaires, à 8 000 euros d'amende, le second, pour blessures involontaires et infraction à la réglementation sur la sécurité des travailleurs, à 2 000 euros d'amende, et 1 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 7 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Ricard, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller RICARD, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1 et § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 4741-1, L. 4741-2, L. 4741-5, R. 4323-1, R. 4323-19, R. 4323-22 ; R. 4323-23, R. 4323-28 du code du travail, préliminaire, 470, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable du délit de mise à disposition de salarié d'un équipement de travail sans vérification de sa conformité, et est entré en voie de condamnation de ce chef ;
" aux motifs qu'il est constant que compte tenu de sa date de fabrication, les règles techniques applicables à cet équipement sont définies par l'article 7 du décret n° 93-40 du 11 janvier 1993, qui renvoie aux dispositions réglementaires prévues par ce même décret, ensuite codifiées aux articles R. 233-4 à R. 233-31 du code du travail et plus spécialement aux articles R. 233-15, R. 233-16 et R. 233-28 devenus les article R. 4324-1, R. 4324-2 et R. 4324-15 du même code qui prévoient ; que les éléments mobiles de transmission d'énergie ou de mouvements des équipements de travail présentant des risques de contact mécanique pouvant entraîner des accidents sont équipés de protecteurs ou de dispositifs appropriés empêchant l'accès aux zones dangereuses ou arrêtant, dans la mesure où cela est techniquement possible, les mouvements d'éléments dangereux avant que les travailleurs puissent les atteindre ; et que chaque machine est munie d'un ou de plusieurs dispositifs d'arrêt d'urgence clairement identifiables, accessibles et en nombre suffisant, permettant d'éviter des situations dangereuses risquant ou en train de se produire ; que ces dispositions seront mises expressément dans les débats pour respecter pleinement le principe de la contradiction ; que c'est pour tenir compte de ces éléments et du fait que le retour en arrière en cas d'arrêt d'urgence constitue un élément de sécurité à condition qu'il soit limité, que la recommandation R 392 adoptée le 8 novembre 2001 par le comité technique national des industries de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie a prévu que lorsqu'un dispositif d'arrêt d'urgence a été actionné et entraîne automatiquement l'inversion des cylindres l'angle rentrant inférieur sera protégé par l'un des moyens suivants ; un protecteur fixe ; un protecteur mobile avec dispositif de verrouillage interdisant d'atteindre la zone entre les cylindres avant la fin de la marche arrière automatique ; une cellule photoélectrique interdisant la marche arrière automatique ; qu'il résulte, en outre, du rapport établi par le Bureau Veritas que le mélangeur concerné n'avait pas été mis aux normes et qu'il est constant que ce rapport, s'il a été déposé après l'accident, a été établi à la suite d'une visite de l'entreprise antérieure à cet accident, effectuée en présence de responsables de l'entreprise qui avaient immédiatement été avisés des anomalies constatées ; qu'ainsi, depuis 1997, le dirigeant de l'entreprise SIDIAC était informé de la nécessité d'apporter remède au dispositif du retour en arrière en cas d'arrêt d'urgence ; que son information, qui découlait des recommandations de l'APAVE, a été confortée par la recommandation du comité technique national des Industries de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie et enfin par les conclusions orales du Bureau Veritas que M. X... avait missionné avant l'accident et qui a pu de la sorte, par le truchement du contrôleur technique de cet organisme, effectuer une visite de l'entreprise en présence de ses responsables immédiatement avisés des anomalies constatées ; qu'à cet égard, le contrôleur technique du Bureau Veritas, M. Y..., indique qu'il est effectivement intervenu personnellement au sein de la SIDIAC du 25 au 27 avril, puis du 2 au 4 mai 2007, et prend soin de préciser qu'il a toujours été assisté dans ses visites d'inspection des responsables techniques de la SIDIAC qui ont été aussitôt informés verbalement des anomalies constatées et qui ne pouvaient donc ignorer les défaillances des machines et spécialement du mélangeur ouvert à cylindres de type 700 ; que ce professionnel insiste sur le fait que tous les mélangeurs à cylindres sont des machines dangereuses et que le rapport écrit, déposé postérieurement à l'accident, attire spécialement l'attention sur le danger créé par la rotation arrière des cylindres en cas d'arrêt d'urgence ;
" 1°) alors que M. X... était poursuivi du chef de fourniture à un salarié d'un équipement de travail sans vérification de sa conformité, fait prévu et réprimé par les articles L. 4321-1, L. 4741-1, R. 4323-22, R. 4323-23 et R. 4323-24 du code du travail ; qu'est, ainsi incriminé le fait de ne pas procéder à des vérifications périodiques des équipements désignés par arrêté ; que M. X... n'était pas poursuivi pour défaut de conformité ; qu'en lui imputant des anomalies ou des défaillances des machines, ou le défaut d'améliorer les dispositifs de freinage sur les dispositifs d'arrêt, faits non compris dans la saisine, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs ;
" 2°) alors qu'il résulte de l'arrêt attaqué lui-même que l'élément matériel de l'infraction d'absence de vérification de conformité faisait totalement défaut en l'espèce, dès lors qu'il est constaté qu'en janvier 1997, l'entreprise avait fait demander à un organisme spécialisé, l'APAVE, de procéder à un bilan complet du parc machines, et qu'elle avait, avant l'accident en avril et mai 2007, missionné le Bureau Veritas pour procéder à un tel examen ; qu'ainsi, avant l'accident de juillet 2007, la vérification de conformité avait eu lieu au moins une fois au cours de l'année 2007 ; qu'en déclarant établie l'infraction visée à la prévention, dont ses propres constatations excluaient l'élément matériel lui-même, la cour d'appel a violé les textes précités ;
" 3°) alors qu'aucune des constatations de l'arrêt attaqué ne caractérise un défaut de conformité de la machine à des exigences légales ou réglementaires impératives ; que la constatation de recommandations portant sur la nécessité d'améliorer les dispositifs de freinage sur les dispositifs d'arrêt (eux-mêmes obligatoires pour éviter des accidents sur le haut de la machine), de façon à limiter le retour en arrière, lui-même indispensable, et du caractère dangereux en soi de la machine, ne caractérise pas à elle seule l'absence de conformité de la machine à une règle impérative, alors qu'elle disposait du système d'arrêt d'urgence et d'inversion du sens des cylindres prévu par les textes ; que la cour d'appel a encore violé les textes précités " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 222-19 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... et la SIDIAC coupables du délit de blessures involontaires avec incapacité supérieure à trois mois, et est entré en voie de condamnation à leur égard ;
" aux motifs dejà cités au premier moyen et aux motifs que conformément aux dispositions de l'article 121-3 du code pénal, la responsabilité de M. X..., qui est poursuivi pour un délit non intentionnel, suppose la démonstration d'une faute en lien causal avec le dommage ; que cette faute doit être une faute qualifiée, c'est-à-dire soit une faute délibérée, soit une faute caractérisée ; que la faute délibérée s'entend de la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement ; que l'une ou l'autre de ces fautes doit être établie ; qu'à cet égard, l'information démontre que M. X... dirige l'entreprise depuis septembre 1985 ; que l'article L. 233-5-1 du code du travail, dans sa numérotation ancienne et qui est devenu les articles L. 4321-1, L. 4321-2 et L. 4321-4, énonce que les équipements de travail et les moyens de protection mis en service ou utilisés dans les établissements destinés à recevoir des travailleurs sont équipés, installés, utilisés, réglés et maintenus de manière à préserver la santé et la sécurité des travailleurs, y compris en cas de modification de ces équipements de travail et de ces moyens de protection ; qu'ainsi, qu'il a été indiqué plus haut, point, qui a été spécialement mis dans le débat pour assurer le principe de la contradiction, le décret n° 93-40 du 11 janvier 1993 est venu réglementer les prescriptions techniques applicables à l'utilisation d'équipements de travail ; que ces règles techniques ont été codifiées aux articles R. 233-14 à R. 233-30 du code du travail suivant l'ancienne numérotation ; que le code du travail, entré en vigueur le 1er mai 2008, ayant été élaboré à droit constant, les articles R. 4324-1, R. 4324-2 et R. 4324-15 ont repris les dispositions de ces anciens articles en vigueur au temps des faits ; que ce décret enjoignait aux chefs d'établissement de transmettre avant le 30 juin 1995 à l'inspection du travail un plan de mise en conformité des équipements de travail ; que, dès le 31 octobre 1994, l'inspection du travail a adressé à l'entreprise concernée un courrier relatif à l'obligation de mise en conformité des équipements de travail, conformément au décret susvisé ; que faute de réponse, un rappel a été fait le 2 février 1995 ; que l'entrepreneur a donné, le 29 juin 1995, à l'inspection du travail la liste des machines des unités de production sans évoquer la moindre non-conformité et sans intégrer le mélangeur ouvert 700 en cause dans l'accident du 6 juillet 2007, ce mélangeur étant installé dans un autre atelier ; que le 17 décembre 1996, une nouvelle lettre de l'inspecteur du travail a rappelé la nécessité d'établir un plan de mise en conformité ; que le 8 janvier 1997, l'entreprise a répondu qu'elle avait demandé à un organisme spécialisé, l'APAVE, de procéder à un bilan complet du parc machines et de prévoir un calendrier de réalisation des travaux de mise en conformité ; qu'après un nouvel échange de correspondances, l'inspection du travail a reçu le rapport de l'APAVE en date du 8 janvier 1997 faisant état de non-conformité sur un mélangeur ouvert 1800, machine de dimension plus importante que celle en cause dans l'accident de M. Z...mais au fonctionnement similaire ; qu'à cet égard, l'APAVE recommandait la nécessité d'améliorer les dispositifs de freinage sur les dispositifs d'arrêt, de façon à obtenir le freinage dès l'action sur les dispositifs de sécurité et à limiter le retour en arrière ; qu'il s'ensuit que, dès 1997, l'entreprise a eu connaissance du risque de retour en arrière des cylindres sur ce type de machine et connaissait la manière dont il convenait de pallier ce risque ; que le 8 novembre 2000, le comité technique national des industries de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie a adopté une recommandation R 392 relative à la protection de l'angle rentrant inférieur lorsqu'un dispositif d'arrêt d'urgence a été actionné et qu'il entraîne automatiquement l'inversion du sens de rotation des cylindres ; que, par suite, dès novembre 2000, l'entrepreneur X... s'est vu rappeler la nécessité d'améliorer le dispositif d'arrêt d'urgence puisqu'à l'évidence, l'inversion du sens de rotation en cas d'arrêt impose de protéger cet angle rentrant inférieur ; que c'est là le point faible du dispositif d'arrêt d'urgence et c'est précisément dans ces conditions que M. Stéphane Z...a eu la main prise entre les deux cylindres ; que c'est pour tenir compte de ces éléments et du fait que le retour en arrière en cas d'arrêt d'urgence constitue un élément de sécurité à condition qu'il soit limité, que la recommandation R 392, adoptée le 8 novembre 2001 par le comité technique national des industries de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie, a prévu que lorsqu'un dispositif d'arrêt d'urgence a été actionné et entraîne automatiquement l'inversion des cylindres, l'angle rentrant inférieur sera protégé par l'un des moyens suivants ; un protecteur fixe ; un protecteur mobile avec dispositif de verrouillage interdisant d'atteindre la zone entre les cylindres avant la fin de la marche arrière automatique ; une cellule photoélectrique interdisant la marche arrière automatique ; qu'il est acquis que la mise en place d'un de ces trois dispositifs aurait permis d'éviter l'accident, puisque soit l'accès à l'angle rentrant inférieur par Stéphane Z...n'aurait pas été possible, soit il n'y aurait pas eu inversion automatique du sens de rotation des cylindres ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. X..., qui a contribué à créer la situation de la réalisation du dommage et n'a pas pris les mesures permettant de l'éviter, a commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer au sens de l'article 121-3 § 4 du code pénal ;
" 1°) alors que la cour d'appel a dénaturé le rapport de l'APAVE de 1997 qui était relatif aux exigences de sécurité propres à l'accès à la machine par le haut, et non par le bas comme c'était le cas lors de l'accident, le retour en arrière des cylindres étant identifié seulement comme un risque résiduel difficile à traiter sans compromettre l'exploitation, justifiant que l'utilisation de la machine soit confiée exclusivement à des opérateurs qualifiés ; qu'en affirmant que M. X... aurait été informé dès 1997 de la nécessité d'apporter remède au dispositif du retour en arrière en cas d'arrêt d'urgence, la cour d'appel a dénaturé ledit rapport et privé sa décision de tout fondement légal ;
" 2°) alors que la recommandation du comité technique national des industries de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie du 8 novembre 2001 préconise que, après l'arrêt des cylindres par action sur la barre sensible et en cas d'inversion automatique du sens de rotation des cylindres, l'angle inférieur rentrant soit protégé par l'un des trois moyens suivants : protecteur fixe, protecteur mobile avec dispositif de verrouillage, cellule photoélectrique interdisant la marche arrière automatique ; que l'accident ne s'est pas produit dans l'hypothèse de l'arrêt de la machine avant accès à l'angle inférieur rentrant, mais dans une hypothèse inverse, l'ouvrier ayant accédé au dessous de la machine sans arrêter les cylindres, cet arrêt n'étant intervenu que contre sa volonté, parce qu'il a activé la plaque d'arrêt d'urgence au sol par inadvertance, inversant ainsi le sens de rotation des cylindres ; que l'installation d'un des dispositifs préconisés, destinés à temporiser l'accès sous la machine après l'arrêt, n'aurait en rien empêché l'accident, survenu, alors que l'ouvrier avait déjà gagné le dessous de la machine sans l'arrêter ; qu'en affirmant qu'il y aurait eu un lien de causalité au moins indirect entre le défaut de respect de la recommandation précitée et l'accident, la cour d'appel a violé les textes précités " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure, qu'à la suite des blessures accidentelles occasionnées le 6 juillet 2007 à M. Stéphane Z..., salarié de la Société industrielle des diverses applications du caoutchouc (SIDIAC), dont trois doigts ont été écrasés alors qu'il travaillait sur une machine de type mélangeur 700 ouvert Repiquet destinée à obtenir des feuilles de caoutchouc par étirement de boules de pâte caoutchouteuse, la société représentée par son président, M. X..., a été poursuivie, en qualité de personne morale, du chef de blessures involontaires avec incapacité supérieure à trois mois ; que M. X... a été poursuivi du même chef, ainsi que pour mise à disposition de travailleur d'équipement de travail sans vérification de sa conformité ; que le tribunal correctionnel ayant retenu les prévenus dans les liens de la prévention, ces derniers, ainsi que le ministère public, ont relevé appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer le jugement et retenir la culpabilité de M. X... de mise à disposition de travailleur d'un équipement de travail sans vérification de sa conformité et de blessures involontaires et celle de la SIDIAC de ce dernier chef, l'arrêt énonce que, à la date des faits, M. X... n'avait pas vérifié la conformité de la machine en cause installée dans les locaux de l'entreprise dont il avait la direction ; que les juges ajoutent que, d'une part, ce défaut de vérification a eu lieu malgré le rapport de l'APAVE du 8 janvier 1997, la recommandation du comité technique national des industries de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie du 8 novembre 2001 et l'intervention d'un représentant du Bureau Véritas, en avril et mai 2007, d'autre part l'absence de modifications apportées à cette machine, dont la nécessité avait pourtant été portée à la connaissance de M. X..., a causé les blessures dont M. Z...a été victime ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, par des motifs exempts d'insuffisance et de contradiction, la cour d'appel, qui n'a pas excédé les limites de sa saisine, a caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnels les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 111-4 et 121-2 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué a reconnu la SIDIAC coupable du délit de blessures involontaires avec incapacité supérieure à trois mois ;
" aux motifs que, pour ce qui concerne la responsabilité pénale de la personne morale SIDIAC, la causalité indirecte ne trouve pas à s'appliquer et une faute simple de son dirigeant social suffirait à engager sa responsabilité, mais il va de soi que si ce dirigeant, comme c'est le cas ici, a commis une faute plus grave en lien causal avec le dommage, sa responsabilité est a fortiori engagée ;
" alors que les personnes morales ne sont pénalement responsables que des infractions commises pour leur compte par leurs organes ou représentants ; qu'en s'abstenant de caractériser en quoi la faute éventuelle du dirigeant social de la SIDIAC aurait été commise pour le compte de celle-ci, la cour d'appel a violé les textes visés, l'article 121-2 du code pénal dispose que les personnes morales sont responsables pénalement des infractions commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants. Ces conditions ne sont pas alternatives mais cumulatives. Le défaut de l'une d'entre elles entraîne nécessairement la relaxe ; que la Cour de cassation a récemment eu l'occasion de rappeler le caractère impératif de chacun de ces éléments ; que, par arrêt du 11 octobre 2011, publié au Bulletin, la haute cour censurait l'arrêt de la cour d'appel, condamnant la société EDF pour homicide involontaire aux motifs que l'infraction n'a pu être commise que par ses organes ou représentants ; que, pour la haute cour, les juges du fond n'ont pas justifié leur décision et ne pouvaient entrer en voie de condamnation sans mieux s'expliquer sur l'existence effective d'une délégation de pouvoirs ni sur le statut et les attributions des agents mis en cause propres à en faire des représentants de la personne morale, au sens de l'article 121-2 du code pénal ; la cour d'appel n'a pas justifié sa décision (Crim., 11 octobre 2011, n° 10-87. 212) ; que, par arrêt du 11 avril 2012, également publié au Bulletin, les juges de cassation ont rappelé qu'il en allait de même en ce qui concerne la démonstration de la réalisation de l'infraction pour le compte de la personne morale. Dans cette affaire où le salarié d'une entreprise avait été victime d'un accident du travail sur un chantier, les juges d'appel avaient retenu la responsabilité pénale de cette dernière, en estimant qu'elle avait participé à la création de la situation ayant permis la réalisation du dommage en ne dispensant pas la formation de sécurité appropriée. La censure ne souffre d'aucune ambiguïté ; mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans mieux rechercher si les manquements relevés résultaient de l'abstention d'un des organes ou représentants de la société Gauthey, et s'ils avaient été commis pour le compte de cette société, au sens de l'article 121-2 du code pénal, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision (Crim., 11 avril 2012, n° 10-86. 974) ; que, ces rappels à la lettre du texte et à sa stricte interprétation sont aussi évidents qu'ils sont nécessaires tant la jurisprudence de la Cour de cassation a semblé, l'espace de quelques années, tolérer une forme de présomption d'imputabilité de l'infraction à la personne morale et dont les arrêts d'appel censurés se faisaient le fidèle reflet (voir par exemple : Crim, 2 juin 2006, n° 05-85. 255) ; qu'un tel courant jurisprudentiel violait de manière manifeste non seulement le principe d'interprétation stricte la loi pénale, mais aussi la présomption d'innocence dont bénéficie une personne morale au même titre que tout autre prévenu ; qu'or, tant ces principes que la jurisprudence mentionnée sont battus en brèche par la décision attaquée ; qu'en l'espèce, en effet, les juges d'appel se sont contentés, pour retenir la responsabilité pénale de la SIDIAC, de retenir celle de M. X.... La violation de l'article 121-2 du code pénal est manifeste. Retenant la faute caractérisée du dirigeant, la cour d'appel en déduit que la responsabilité de la SIDIAC est, a fortiori engagée, sans jamais expliquer en quoi, l'infraction aurait été réalisée pour le compte de la société poursuivie ; que la cassation est à ce titre encourue " ;
Attendu que, pour confirmer le jugement, et retenir la culpabilité de la SIDIAC, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel, qui a caractérisé à la charge de la société poursuivie, une faute d'imprudence et de négligence, en lien causal avec le dommage subi par la victime, et commise, pour son compte, par M. X..., dirigeant de l'entreprise, auquel il appartenait de veiller personnellement à la stricte et constante application des dispositions légales et réglementaires en matière d'hygiène et de sécurité, a justifié sa décision au regard des dispositions de l'article 121-2 du code pénal ;
Que, dès lors, le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le six septembre deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 24 août 2016 n° 16-83.720
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Hansly X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de CAYENNE, en date du 26 avril 2016, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises de la Guyane sous l'accusation de meurtre ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 114 et 115 du code de procédure pénale, et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu que M. X... a interjeté appel de l'ordonnance du juge d'instruction le renvoyant devant une cour d'assises du chef de meurtre ; que, devant la chambre de l'instruction, il a invoqué une atteinte aux droits de la défense résultant de la délivrance tardive de la copie des pièces du dossier à son avocat, quelques jours seulement avant l'ordonnance de mise en accusation ;
Attendu que, pour écarter cette argumentation, l'arrêt retient que l'avocat de M.
X...
pouvait utilement consulter le dossier de la procédure au cabinet du juge d'instruction, conformément aux dispositions de l'article 114, alinéa 4, du code de procédure pénale, et que, dès lors, aucune atteinte n'a été portée aux droits de la défense ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaitre les principes conventionnels invoqués ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que la procédure est régulière et que les faits, objet principal de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Castel, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Barbier, conseiller rapporteur, M. Buisson, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 24 août 2016 n° 16-83.690
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Mark Sandor X...,
- contre l'arrêt n° 241 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NANCY, en date du 13 avril 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de proxénétisme aggravé, blanchiment en bande organisée et association de malfaiteurs, a prononcé sur la publicité des débats ; - contre l'arrêt n° 242 de ladite chambre de l'instruction, en date du même jour, qui, dans la même information, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire ;
Joignant les pourvois en raison de leur connexité ;
I - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt n° 241 du 13 avril 2016 :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II - Sur le pourvoi formé contre l'arrêt n° 242 du 13 avril 2016 :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 186, 194, 197, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de placement en détention provisoire de M. X..., après avoir rejeté la demande de renvoi de l'affaire à une audience ultérieure ;
"aux motifs qu'aux termes des dispositions de l'article 197 dernier alinéa, pendant le délai de quarante-huit heures prévu à l'alinéa précédent, le dossier est déposé au greffe de chambre de l'instruction et tenu à la disposition des avocats des personnes mises en examen et des parties civiles dont la constitution n'a pas été contestée, ou, en cas de contestation, lorsque celle-ci n'a pas été retenue ; que copie leur en est délivrée sans délai, à leurs frais, sur simple requête écrite ; que ces copies ne peuvent être rendues publiques ; qu'en l'espèce, dans le délai de quarante-huit heures susmentionné, une copie de la procédure a été tenue à la disposition des parties au greffe de la chambre de l'instruction de Nancy qui n'a été destinataire d'aucune demande de consultation ou de copie ; qu'au visa de l'article 81 du code de procédure pénale, il a été fait droit à la demande de copie de l'avocat de M. X... par le greffier du juge d'instruction le 7 avril 2016 ; que l'absence alléguée de réception de cette copie par l'avocat du mis en examen ne peut pas s'analyser en une circonstance imprévisible et insurmontable, le dossier ayant été consultable au greffe de la chambre de l'instruction de Nancy dans le délai imparti par l'article 197 du code de procédure pénale ; qu'enfin, compte tenu des délais d'examen imposés par le code de procédure pénale des appels portant sur une ordonnance de placement en détention provisoire en l'absence de demande de comparution devant la chambre de l'instruction du mis en examen, la demande de renvoi présentée ne peut être que rejetée ;
"1°) alors que la procédure pénale doit être équitable et contradictoire ; qu'en cas d'appel contre une ordonnance de placement en détention provisoire, la personne doit pouvoir organiser la contestation de la légalité de cette décision au vu des éléments du dossier ; que, si l'article 197 du code de procédure pénale organise les conditions de consultation et d'obtention de copies du dossier au greffe de la chambre de l'instruction, aux fins d'assurer le respect du principe d'équité de la procédure, il ne saurait être considéré comme le mode unique d'accès au dossier, l'article 114 du code de procédure pénale prévoyant une communication gratuite des pièces du dossier d'instruction à l'avocat du mis en examen dès son interrogatoire de première comparution ; qu'en considérant que l'absence de réception de la copie gratuite du dossier de l'instruction sollicitée par l'avocat du mis en examen, du barreau de Paris, ne constituait pas un empêchement à l'exercice des droits de la défense dans le cadre de l'appel contre l'ordonnance de placement en détention provisoire, dès lors que le dossier pouvait être consulté au greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy et que des copies de pièces pouvaient être obtenues par l'avocat du mis en examen auprès de ladite chambre, facultés que l'avocat du mis en examen n'avait pas utilisées, en refusant de prendre en compte le fait que l'avocat du mis en examen n'avait pas obtenu la copie qu'il avait sollicitée du magistrat instructeur, autre moyen pour lui de prendre connaissance du dossier, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy a méconnu l'article préliminaire et l'article 197 du code de procédure pénale ;
"2°) alors que la méconnaissance de l'équité dans la procédure est d'autant plus établie que le président de la chambre de l'instruction avait admis, par courrier du 11 avril 2016, que la communication du dossier du cabinet d'instruction était le moyen de permettre à l'avocat du mis en examen le prendre connaissance des pièces du dossier, en répondant à une demande de renvoi formulée par courrier, en relevant que qu'une copie de l'entier dossier avait été transmise par le greffier du juge d'instruction, le 7 avril 2016 ; que la chambre de l'instruction a encore méconnu l'article préliminaire et l'article 197 du code de procédure pénale ;
"3°) alors que, si l'article 194 du code de procédure pénale prévoit que la chambre de l'instruction doit se prononcer dans les dix jours de l'appel contre l'ordonnance de placement en détention, ce délai institué en faveur de la personne privée de liberté ne saurait lui être opposé, sans que soit méconnu le droit de contester efficacement la légalité de cette privation de liberté par l'article 186 du code de procédure pénale ; qu'en outre, en vertu de l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'homme, la personne privée de liberté doit disposer d'un recours effectif pour contester la décision la privant de liberté, laquelle implique un accès effectif au dossier de la procédure et un délai suffisant pour pouvoir utilement soutenir la défense ; qu'en refusant d'ordonner le renvoi de l'affaire sollicité par l'avocat du mis en examen inscrit au barreau de Paris, qui indiquait n'avoir pas reçu la copie du dossier sollicitée auprès du cabinet d'instruction, aux motifs qu'elle était tenue de se prononcer dans le délai de dix jours suivant l'appel contre l'ordonnance de placement en détention provisoire, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 186 du code de procédure pénale et 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"4°) alors que l'article 194 du code de procédure pénale prévoit que la chambre de l'instruction doit se prononcer dans les dix jours de l'appel contre l'ordonnance de placement en détention, sauf circonstances imprévisibles et insurmontables ; que constituent de telles circonstances, le fait pour la défense de n'avoir pas obtenu les pièces du dossier qui lui avaient été adressées plusieurs jours avant l'audience de la chambre de l'instruction par le greffier du magistrat instructeur ; qu'en refusant d'ordonner le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure du fait du défaut d'obtention d'une copie du dossier d'instruction sollicitée par l'avocat du mis en examen que le greffier du cabinet d'instruction lui avait adressée le 7 avril 2015, comme le relevait le président de la chambre de l'instruction dans un courrier du 11 avril 2015, mais qui n'était toujours pas parvenue à l'avocat du mis en examen la veille de l'audience, en considérant que cet avocat établi à Paris pouvait consulter le dossier au greffe de la chambre de l'instruction et obtenir copie des pièces à ses frais et qu'elle devait statuer dans le délai réduit de dix jours suivant l'appel contre l'ordonnance de placement en détention provisoire, la chambre de l'instruction qui a refusé de constater l'existence de circonstances imprévisibles et insurmontables justifiant le renvoi, a violé les articles préliminaire et 194 du code de procédure pénale" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, mis en examen des chefs susvisés, et placé en détention provisoire par ordonnance du juge des libertés et de la détention, en date du 4 avril 2016, M. X... a relevé appel le même jour de cette décision, sans demander sa comparution devant la chambre de l'instruction ; que son avocat avait sollicité, dès le 1er avril, une copie du dossier, et qu'il a écrit à la chambre de l'instruction le 7 avril pour demander le renvoi de l'audience fixée au 12 avril, au motif qu'il n'avait pas reçu cette copie ;
Attendu que, pour rejeter la demande de renvoi, l'arrêt statue par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que, l'entier dossier ayant été tenu à la disposition de l'avocat de la personne mise en examen, pendant le délai et dans les conditions prévus aux alinéas 2 et 3 de l'article 197 du code de procédure pénale, le défaut de délivrance d'une copie du dossier de l'information à cet avocat ne saurait vicier la régularité de la procédure, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucune des dispositions légales et conventionnelles visées au moyen ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa deuxième branche, doit être écarté ;
Et attendu que les arrêts sont réguliers, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Castel, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Bonnal, conseiller rapporteur, M. Buisson, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 24 août 2016 n° 16-83.693
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-quatre août deux mille seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller LARMANJAT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MONDON ;
Sur le pourvoi formé par :
- M. Jean X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de CHAMBÉRY, en date du 20 mai 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de vol aggravé et association de malfaiteurs, a confirmé l‘ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire ;
Vu l'article 606 du code de procédure pénale ;
Attendu que la détention provisoire de M. X..., ordonnée le 4 mai 2016, a pris fin le 12 juillet 2016 par la mise en liberté de l'intéressé ordonnée par le juge d'instruction ;
D'où il suit que le pourvoi est devenu sans objet ;
Par ces motifs :
DIT n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Castel, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Larmanjat, conseiller rapporteur, M. Buisson, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 24 août 2016 n° 16-83.748
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Sébastien X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de RENNES, en date du 20 mai 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, d'infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5, 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, 66 de la Constitution, de l'article préliminaire, des articles 141-3, 148-4, 194, 197, 199, 802 et 803-1 du code de procédure pénale ;
Vu les articles 115 et 197 du code de procédure pénale;
Attendu que, selon le premier de ces textes, si les parties désignent plusieurs avocats, elles doivent faire connaître celui d'entre eux auquel seront adressées les convocations et notifications ; que, lorsque la personne mise en examen est détenue, la désignation de l'avocat peut faire l'objet d'une déclaration auprès du chef de l'établissement pénitentiaire et celle-ci prend effet à compter de la réception du document par le greffier du juge d'instruction ;
Attendu que, selon le second de ces textes, le procureur général notifie par lettre recommandée à chacune des parties et à son avocat la date à laquelle l'affaire sera appelée à l'audience ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M X..., mis en examen le 2 septembre 2015 des chefs susvisés et placé en détention provisoire, a saisi directement, le 2 mai 2016, la chambre de l'instruction d'une demande de mise en liberté ;
Attendu que deux de ses avocats, Me Y... et Me Z..., ont été convoqués à l‘audience, mais ne s'y sont pas présentés et n'ont pas déposé de mémoire ; que, par ordonnance du 10 mai 2016, le président de la chambre de l'instruction a refusé la comparution personnelle de M. X... ;
Attendu que, par l'arrêt attaqué, la chambre de l'instruction a rejeté la demande précitée ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que par déclaration au greffe de l'établissement pénitentiaire du 26 avril 2016, transmise par télécopie au cabinet du juge d'instruction le 27 avril 2016, antérieure à la demande de mise en liberté, le mis en examen avait fait choix d'un avocat supplémentaire, Maître A..., à qui devaient être désormais adressées les convocations et notifications, et que cet avocat n'a pas été convoqué à l'audience, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes en date du 20 mai 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil, laquelle chambre de l'instruction devra statuer dans les plus brefs délais ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Castel, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Larmanjat, conseiller rapporteur, M. Buisson, Mme Zerbib, MM. Stephan, Bonnal, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Talabardon, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Mondon ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 24 août 2016 n° 16-83.749
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Frédéric X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de CAEN, en date du 24 mai 2016, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de viols et viols aggravés, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, 6, § 2, de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137 à 148-4 et 593 du code de procédure pénale, violation de la présomption d'innocence et des droits de la défense, manque de base légale, insuffisance et contradiction de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté de M. X... ;
"aux motifs que M. X..., qui vient d'être condamné à quinze ans de réclusion criminelle, a toujours contesté les faits qui lui sont reprochés ; qu'il ressort du dossier, et en particulier des expertises psychologiques des quatre parties civiles, du contenu du courrier du 29 février 2016 rédigé par la psychologue suivant Mme Chantal Y..., à l'occasion du procès devant la cour d'assises de la Manche, que ces plaignantes sont vulnérables, influençables, impressionnables, vivant dans la peur de leur ancien compagnon ; que la psychologue en charge du suivi de Mme Chantal Y... écrit que cette dernière reste terrorisée à l'idée que ses filles ou elle-même puissent croiser M. X... ; que des ex-compagnes de M. X... ont décrit la violence de ce dernier (Mmes Christine Z..., Bernadette A..., Janick B...) ; que le risque que M. X... exerce de pressions sur les victimes, les témoins ou leur famille est, au vu de ces éléments, particulièrement caractérisé ; que M. X... encourt une peine de vingt ans de réclusion criminelle ; qu'il a été condamné en première instance à quinze ans de réclusion criminelle ; qu'il ne dispose pas d'un logement personnel, n'exerce plus d'activité professionnelle, de telle sorte que ses garanties de représentation en justice sont insuffisantes ; que compte tenu de la réitération des faits, durant une longue période, sur quatre femmes, pour lesquels M. X... est mis en accusation, des déclarations d'autres ex-compagnes qui ont décrit sa violence, du rapport d'expertise psychologique le concernant duquel il ressort qu'il existe un risque de reproduction de violences avec une autre partenaire, du rapport du service pénitentiaire d'insertion et de probation selon lequel si M. X... a formellement respecté l'obligation de soins, il n'a jamais abordé avec le psychiatre qui l'a suivi les faits qui lui sont reprochés, le risque de renouvellement de l'infraction est particulièrement caractérisé, étant observé que la réalité de la relation qu'il entretient avec sa nouvelle compagne, Mme Delphine C..., n'est pas connue puisqu'au cours de la procédure de l'instruction, cette dernière a été entendue le 6 décembre 2011 alors qu'elle venait de faire la connaissance de l'accusé et le 3 mars 2012 alors que ce dernier était détenu ; que le maintien en détention de M. X... est en conséquence le seul moyen d'empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille, de garantir son maintien à la disposition de la justice, et de prévenir le renouvellement de l'infraction, objectifs qui ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique ;
"1°) alors que toute personne est présumée innocente tant que sa culpabilité n'a pas été établie par une décision définitive ; que la détention provisoire ne peut être ordonnée ou maintenue qu'à titre exceptionnel ; que la comparution de l'accusé détenu devant la cour d'assises d'appel, tandis qu'il avait été laissé en liberté sous contrôle judiciaire pendant trois ans et avait comparu libre devant la première cour d'assises, est de nature à porter objectivement atteinte à la présomption d'innocence compte tenu de l'opinion en résultant pour les jurés ; qu'en rejetant, néanmoins, la demande de mise en liberté de M. X..., qui était en liberté sous contrôle judiciaire du 8 janvier 2013 au 31 mars 2016, date de sa condamnation par la cour d'assises de la Manche devant laquelle il a comparu libre, la chambre de l'instruction, qui s'est fondée sur des faits insuffisants pour qu'il soit passé outre à l'effectivité de la présomption d'innocence dont s'évince la liberté de l'accusé en attente de jugement en appel, a violé ce principe ;
"2°) alors qu'en s'abstenant de répondre au mémoire de M. X... qui soulignait que, durant les trois années pendant lesquelles il était en liberté sous contrôle judiciaire, il n'avait pas manqué aux obligations de celui-ci, qui comportait, notamment, interdiction de rencontrer ses quatre anciennes compagnes constituées parties civiles, et n'avait commis aucune pression sur ces dernières, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale ;
"3°) alors qu'en s'abstenant de répondre au mémoire faisant valoir que M. X... disposait d'un hébergement stable chez sa mère, comme durant les trois années de son contrôle judiciaire, et de revenus stables constitués du revenu de solidarité active (RSA) et de l'allocation adulte handicapé (AAH), consécutivement à son licenciement au terme de son arrêt-maladie, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale ;
"4°) alors que M. X... faisait valoir qu'il avait une compagne stable, Mme Delphine C..., avant sa garde à vue du 6 décembre 2011, reprise lors de sa mise en liberté en janvier 2013 et se poursuivant actuellement ; qu'en affirmant que le risque de réitération de l'infraction était caractérisé en l'absence de plus d'éléments sur la réalité de cette relation, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale" ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble les articles 137-3, 143-1 et suivants du même code ;
Attendu que, d'une part, tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, d'autre part, la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s'il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un ou plusieurs des objectifs définis par l'article 144 du code de procédure pénale et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., mis en examen des chefs de viols et viols aggravés et placé en détention provisoire, le 8 décembre 2011, a été remis en liberté et assigné à résidence avec surveillance électronique pour une durée de six mois, par arrêt de la chambre de l'instruction du 8 janvier 2013, puis placé sous contrôle judiciaire, par ordonnance du magistrat instructeur du 5 juillet 2013 ; que, condamné par la cour d'assises, le 31 mars 2016, à quinze ans de réclusion criminelle et cinq ans de suivi socio-judiciaire, il a été incarcéré en application de l'article 367, alinéa 2, du code de procédure pénale ; qu'ayant relevé appel de sa condamnation, il a présenté, le 11 avril suivant, une demande de mise en liberté ; Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans mieux répondre aux articulations essentielles du mémoire faisant valoir, sur le risque de pression sur les victimes et les témoins et de non-représentation en justice, d'une part, que M. X..., placé sous assignation à résidence avec surveillance électronique, puis sous contrôle judiciaire, pendant plus de trois ans, avait respecté toutes les obligations mises à sa charge, en particulier s'était abstenu de rencontrer ses quatre anciennes compagnes et de tenter de les intimider, d'autre part, qu'il disposait d'un hébergement permanent chez sa mère et de revenus stables constitués du revenu de solidarité active et de l'allocation adulte-handicapé, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Caen, en date du 24 mai 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Caen et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Castel, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Talabardon, conseiller rapporteur, M. Buisson, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 10 août 2016 n° 16-83.525
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Francis X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de RIOM, en date du 10 mai 2016, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de vols avec arme en bande organisée, vol et tentative en bande organisée et vol avec violences en bande organisée, en récidive, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu les mémoires, personnel et ampliatif, produits ;
Sur la recevabilité du mémoire personnel :
Attendu que, le 20 mai 2016, le demandeur a transmis au greffe un mémoire personnel qui, n'étant pas signé, ne saisit donc pas la Cour de cassation des moyens qu'il pourrait contenir ;
Sur le moyen unique de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article préliminaire et des articles 137 à 148-4, 199, alinéa 5, et 706-71 du code de procédure pénale, et des droits de la défense ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de mise en liberté de M. X... ;
"aux motifs que M. X... est accusé de faits multiples d'une extrême gravité, relevant de la criminalité organisée et mettant en danger la sécurité des personnes et en particulier des agents présents dans les automates lors de l'usage de voitures-béliers ; que les dénégations des principaux mis en cause ont nécessité des investigations multiples, notamment sur commission rogatoire, ainsi que de nombreuses auditions et confrontations pour parvenir à la manifestation de la vérité ; que compte tenu des divergences existant dans les déclarations des mis en cause, et de l'oralité des débats devant la cour d'assises, il reste nécessaire d'éviter tout risque de concertation entre les coauteurs et complices jusqu'à l'audience de la cour d'assise d'appel ; que cette considération est d'autant plus d'actualité que le constat de l'inefficacité du système de défense de M. X... consistant à nier totalement sa participation aux faits pourrait l'inciter ou inciter ses coaccusés à évoluer dans leurs positions ; qu'il est, en outre, à craindre que le mis en examen cherche à se soustraire à la justice, l'importance de la condamnation prononcée à son encontre lui ayant fait mesurer le risque qu'il encourt ; qu'il existe également un risque certain de réitération des faits ; que M. X... est en effet dépourvu de ressources et de travail, et son casier judiciaire montre qu'il a déjà été condamné pour des faits similaires sans que les condamnations prononcées aient été de nature à le dissuader de persister dans la voie de la délinquance ; qu'il demeure nécessaire de mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité des faits, leur multiplicité et leur caractère spectaculaire et dangereux pour autrui, les malfaiteurs n'hésitant pas à utiliser des voitures-béliers pour s'attaquer aux distributeurs automatiques de billets sans souci pour les risques qu'ils font encourir aux personnels des banques et aux riverains ; que, pour s'amoindrir avec le temps, ces éléments n'en demeurent pas moins particulièrement prégnants et continuent à justifier le maintien de mesures coercitives à l'encontre de l'accusé ; que les obligations du contrôle judiciaire ou de l'assignation à résidence avec surveillance électronique, aussi strictes soient-elles, se révèlent, pour les raisons sus-indiquées, insuffisantes pour atteindre ces objectifs ; que la détention provisoire est nécessaire à titre de sûreté ;
"1°) alors qu'en matière de détention provisoire, la comparution personnelle de la personne concernée est de droit si celle-ci en fait la demande ; que cette requête doit, à peine d'irrecevabilité, être présentée en même temps que la demande de mise en liberté adressée à la chambre de l'instruction ; qu'en l'espèce, le formulaire qui a été présenté à cet effet à M. X... au greffe de la maison d'arrêt indique : « ma comparution personnelle devant la juridiction compétente est de droit sauf refus de comparution décidé par le président de la juridiction » ; qu'aucune mention de ce formulaire n'invite le demandeur à indiquer, en sus, s'il demande sa comparution personnelle, ce dont il résulte qu'en signant le formulaire portant les énonciations ci-dessus rappelées le demandeur requiert nécessairement sa comparution personnelle en même temps qu'il demande sa mise en liberté ; qu'en affirmant néanmoins que M. X... avait présenté une demande de mise en liberté le 22 mars 2016 au greffe du centre pénitentiaire « sans demande de comparution », la chambre de l'instruction a dénaturé sa demande et porté atteinte aux droits de la défense et au droit à un procès équitable ;
"2°) alors qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. X... a été placé en détention provisoire le 13 décembre 2012, de sorte qu'il est ainsi détenu depuis près de quatre ans ; qu'en s'abstenant de rechercher, au besoin d'office, si la durée de la détention provisoire excédait le délai raisonnable, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure, qu'étant en attente de comparaître devant la cour d'assises statuant en appel, M. X... a déposé au greffe de l'établissement pénitentiaire, une demande de mise en liberté ; qu'avisé de ce que l'audience se déroulerait selon la modalité de la visioconférence, il a refusé de comparaître ;
Attendu que M. X... ne saurait se faire un grief de ce que son refus de la visioconférence n'a pas été pris en considération, dès lors qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 706-71 du code de procédure pénale, le détenu n'a la faculté de refuser l'utilisation d'un moyen de télécommunication audiovisuelle que lorsqu'il s'agit d'une audience au cours de laquelle il doit être statué sur le placement en détention provisoire ou sur la prolongation de la détention provisoire ; que tel n'était pas le cas en l'espèce ;
D'où il suit que le moyen, nouveau en ce qu'il invoque pour la première fois devant la Cour de cassation la durée raisonnable de la détention provisoire, et comme tel, irrecevable, doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Straehli, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Fossier, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 10 août 2016 n° 16-83.401
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Paolo X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de RENNES, en date du 22 avril 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de vols qualifiés, actes de torture et de barbarie et destructions du bien d'autrui par un moyen dangereux en bande organisée, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 137-3, 144, 591 et 593 du code de procédure pénale, 5, §§ 1 et 4, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 11 septembre 2014, M. X... a été mis en examen des chefs de vols en bande organisée et avec arme, actes de torture et de barbarie, vol en bande organisée et destructions du bien d'autrui par un moyen dangereux en bande organisée ; que, par ordonnance du 5 avril 2016, le juge des libertés et de la détention a rejeté sa demande de mise en liberté ; que le mis en examen a interjeté appel de cette décision ; qu'il a notamment soulevé, dans un mémoire, l'insuffisance des indices retenus par le juge d'instruction pour le mettre en examen ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, la chambre de l'instruction, après avoir relevé que ledit moyen tendait à contester le bien-fondé de la mise en examen, énonce qu'il résulte de l'information des indices sérieux laissant supposer sa participation à la commission des infractions qui lui sont reprochées ; que les juges retiennent que le mis en examen encourt une lourde peine de réclusion criminelle pour de tels faits et que les circonstances particulières déduites des éléments de l'espèce établissent que la détention provisoire est justifiée au regard des critères énumérés par l'article 144 du code de procédure pénale, sa proposition d'hébergement étant insuffisante pour assurer sa représentation en justice et éviter le renouvellement de l'infraction ; qu'ils ajoutent qu'il perdure en outre un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public en raison de la gravité des infractions, des circonstances de leur commission et de l'importance du préjudice pour les victimes, "s'agissant d'une agression de deux personnes âgées dans des conditions de violence extrême et accompagnée d'actes de barbarie, commise en pleine nuit dans leur habitation, dernier lieu où chacun doit se sentir en sécurité, par trois individus armés et qui se sont introduits dans la maison entièrement détruite par l'incendie qu'ils ont déclenché" ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, dès lors que la personne mise en examen ne saurait présenter, à l'occasion de l'exercice d'une voie de recours portant sur la détention, des demandes étrangères à son unique objet pour contester sa mise en examen, lesquelles demandes relèvent notamment du champ d'application de l'article 80-1-1 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 144-1, 145-3, 591 et 593 du code de procédure pénale, 5 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance prolongeant la détention provisoire de M. X..., l'arrêt relève que la poursuite de l'information est justifiée par l'attente du magistrat instructeur de pièces sollicitées et que le délai prévisible d'achèvement de la procédure est de deux mois, comme indiqué par le juge des libertés et de la détention ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui satisfont aux exigences de l'article 145-3 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées, justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Straehli, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Moreau, conseiller rapporteur, M. Fossier, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 10 août 2016 n° 16-83.318 B
N° U 16-83.318 F-P+B
N° 4156
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix août deux mille seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire ASCENSI, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
REJET du pourvoi formé par M. Mounir X..., contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 3 mai 2016, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de vols qualifiés, dégradation par un moyen dangereux pour les personnes aggravée, tentative de meurtre aggravé, recel et association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., mis en accusation devant la cour d'assises du Rhône, par arrêt en date du 2 juillet 2014, a comparu le 8 avril 2016 devant le juge des libertés et de la détention en exécution d'un mandat d'arrêt délivré par le juge d'instruction en date du 26 février 2013 ; que le juge des libertés et de la détention a ordonné l'incarcération provisoire de l'intéressé pour une durée de quatre jours après que ce dernier a sollicité un délai pour préparer sa défense, en visant les articles 137, 144 et 145 du code de procédure pénale et motifs pris de ce que l'accusé n'avait aucune garantie de représentation ; que, par ordonnance en date du 11 avril 2016, le juge des libertés et de la détention a placé M. X... en détention provisoire ; que ce dernier a relevé appel de la décision ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 1, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 7 de la directive n° 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales, 135-2, 145, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation de l'ordonnance de placement en détention provisoire de M. X..., en date du 11 avril 2016, et a confirmé cette ordonnance ;
"aux motifs que sur le caractère incomplet du dossier ; que lors des débats devant la chambre de l'instruction figuraient, notamment, à la procédure : - la copie certifiée conforme du mandat d'arrêt délivré le 26 février 2013 par le juge d'instruction, - une copie de l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la cour d'assises du Rhône du 23 avril 2014, - la demande d'extradition du 16 mars 2015, - la lettre du garde des sceaux du 19 mars 2015 relative à la demande d'extradition de M. X...
- la transmission du garde des sceaux du 1er décembre 2015 au procureur général de Lyon faisant état de ce que l'extradition de M. X... avait été accordée par décret du 11 septembre 2015 du premier ministre du Royaume du Maroc, - le décret traduit en langue française, - un laisser passer délivré le 6 avril 2016 par le consulat de France à Rabat concernant M. X..., - un extrait du registre d'écrou du chef du bureau de l'exécution des peines de la délégation pénitentiaire du Royaume du Maroc du 7 avril 2016 concernant M. X... faisant état de son écrou le 13 mars 2015, - des pièces de l'administration française relatives à la remise de M. X..., - des procès-verbaux concernant l'arrivée à Roissy et à la prise en charge de M. X..., - des pièces du juge des libertés et de détention de Bobigny ordonnant que la personne remise soit conduite devant le juge des libertés et de la détention de Lyon, - des pièces officielles du Royaume du Maroc rédigées en langue arabe ; que la défense de M. X... a dit que lors de sa comparution devant le juge des libertés et de la détention de Lyon les 8 et 11 avril 2016 toutes ces pièces ne figuraient pas à la procédure et qu'en particulier ne figurait pas la traduction en langue française du décret du 11 septembre 2015 du premier ministre du Royaume du Maroc ayant accordé son extradition ; qu'il a, par ailleurs, dit que la copie de l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la cour d'assises du Rhône du 23 avril 2014 ne figurait pas au dossier et que la dite copie avait été transmise lors du débat contradictoire du 11 avril 2016 ; qu'il se déduit des dispositions de l'article 135-2 du code de procédure pénale, et en particulier de son alinéa 4, applicables à la procédure d'exécution des mandats d'arrêt postérieurement au règlement de l'information, que lorsque la personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt est découverte après le règlement de l'information, elle est présentée au juge des libertés et de détention qui peut, sur réquisitions du procureur de la République, soit la placer sous contrôle judiciaire, soit ordonner son placement en détention provisoire jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement, par ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 144 du code de procédure pénale, rendue à l'issue d'un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions des quatrième à neuvième alinéas de l'article 145 du code de procédure pénale ; qu'il se déduit de cette dernière disposition que n'ont vocation à trouver application, lors du débat contradictoire organisé devant le juge des libertés et de la détention dans le cadre de la procédure d'exécution d'un mandat d'arrêt postérieurement au règlement de l'information, que les dispositions, des alinéas 4 à 9, de l'article 145 du code de procédure pénale à l'exception, des alinéas 1 à 3, et, notamment, de l'alinéa 2 qui prévoit que le juge des libertés et de la détention saisi par une ordonnance motivée du juge d'instruction tendant au placement en détention de la personne la fait comparaître devant lui et recueille ses observations "au vu des éléments du dossier" ; qu'il se déduit de l'application combinée de ces textes que dans le cadre d'un débat contradictoire en vue de l'exécution d'un mandat d'arrêt ramené à exécution postérieurement au règlement de l'information, que la personne présentée au juge des libertés et de la détention ne dispose pas du droit d'accéder à l'ensemble des pièces de l'information qui est clôturée, ce magistrat n'étant pas saisi par le juge d'instruction dans le cadre d'une information en cours mais dans le cadre d'une procédure sui generis ayant pour objet la seule opportunité de ramener à exécution un mandat d'arrêt antérieurement délivré ; que, par ailleurs, aucune disposition de la loi ne contraint le procureur de la République à mettre à disposition de la personne et de sa défense les pièces de l'information clôturée ; qu'en effet, dans ce cadre procédural, le juge des libertés et de la détention n'est pas saisi par le juge d'instruction en vue du placement en détention provisoire d'une personne mise en examen à l'encontre de laquelle il a dit qu'existaient des indices graves ou concordants d'avoir commis les faits dont il était saisi, mais par le procureur de la République à la suite d'une ordonnance ou d'un arrêt de mise en accusation ayant dit qu'existaient contre la personne des charges suffisantes d'avoir commis les faits ayant donné lieu à son renvoi devant la cour d'assises ; que le moyen tiré de l'absence dans la procédure des pièces de fond de l'instruction, alors que n'y figurait que l'ordonnance de mise en accusation du 23 avril 2014 dont Me Y... avait dit qu'il n'avait pas le temps d'en prendre connaissance, étant précisé que ladite ordonnance avait fait l'objet d'un appel ayant donné lieu à un arrêt de mise en accusation du 2 juillet 2014 lui-même ayant fait l'objet de pourvoi, est ainsi inopérant, étant surabondamment précisé que l'arrêt de mise en accusation du 2 juillet 2014 a confirmé l'ordonnance de mise en accusation du 23 avril 2014 ;
"1°) alors que les dispositions de l'article 135-2 du code de procédure pénale combinées à celles de l'article 145 du même code, telles qu'interprétées par la chambre de l'instruction, prévoient que la personne présentée au juge des libertés et de la détention peut être placée en détention provisoire jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement sans bénéficier d'un débat contradictoire lui permettant ainsi qu'à son avocat d'accéder aux pièces du dossier portent atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, et plus précisément aux droits de la défense et au principe d'égalité devant la justice consacrés par les article 1, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 ; qu'ainsi, la déclaration d'inconstitutionnalité de ces dispositions qui interviendra privera de tout fondement l'arrêt attaqué ;
"2°) alors qu'aux termes de l'article 144 du code de procédure pénale, le juge des libertés et de la détention ne peut ordonner ou prolonger la détention provisoire qu'au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure ; que la chambre de l'instruction a méconnu son office en s'abstenant de répondre au chef du mémoire tiré du caractère incomplet du dossier de la procédure mis à sa disposition aux motifs, inopérants, que le débat contradictoire en vue de l'exécution d'un mandat d'arrêt ramené à exécution postérieurement au règlement de l'information n'exige pas que la personne présentée au juge des libertés et de la détention dispose du droit d'accéder à l'ensemble des pièces de l'information qui est clôturée, "ce magistrat n'étant pas saisi par le juge d'instruction dans le cadre d'une information en cours mais dans le cadre d'une procédure sui generis ayant pour objet la seule opportunité de ramener à exécution un mandat d'arrêt antérieurement délivré" ;
"3°) alors qu'une procédure menée au titre de l'article 5, § 4, de la Convention devant la juridiction saisie d'un recours contre une détention doit être contradictoire et garantir l'"égalité des armes" entre les parties, à savoir le procureur et la personne détenue ; que l'égalité des armes n'est pas assurée si l'avocat se voit refuser l'accès aux pièces du dossier qui revêtent une importance essentielle pour une contestation efficace de la légalité de la détention de son client (CEDH, grande chambre, 9 juillet 2009, Mooren c. Allemagne) ; que la chambre de l'instruction ne pouvait, sans méconnaître ces exigences, rejeter le moyen tiré du caractère incomplet du dossier consulté au greffe du juge des libertés et de la détention aux motifs qu'aucune disposition de la loi ne contraint le procureur de la République à mettre à disposition de la personne et de sa défense les pièces de l'information clôturée ;
"4°) alors qu'aux termes de l'article 7 la directive du 22 mai 2012, lorsqu'une personne est arrêtée et détenue à n'importe quel stade de la procédure pénale, les États membres veillent à ce que les documents relatifs à l'affaire en question détenus par les autorités compétentes qui sont essentiels pour contester de manière effective conformément au droit national la légalité de l'arrestation ou de la détention soient mis à la disposition de la personne arrêtée ou de son avocat ; qu'en refusant d'annuler le débat contradictoire tenu sans que la défense ait pu accéder à l'ensemble des pièces du dossier, la chambre de l'instruction a aussi violé le droit de l'Union européenne" ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que le moyen est devenu sans objet, la Cour de cassation ayant, par arrêt de ce jour, dit n'y avoir lieu à transmission de la question prioritaire de constitutionnalité posée par le demandeur à l'occasion du présent pourvoi ;
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu qu'est irrecevable la prétention du prévenu à vérifier dans quelles conditions le juge prend connaissance des pièces du dossier de la procédure nécessaires pour fonder sa décision ;
Sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches :
Attendu que, pour rejeter le moyen d'annulation de l'ordonnance de placement en détention provisoire, tiré de ce que M. X... et son avocat n'ont pu consulter le dossier de l'information, et confirmer l'ordonnance attaquée, la chambre de l'instruction prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu que, si c'est à tort que la chambre de l'instruction a énoncé que, dans le cadre d'un débat contradictoire en vue de l'exécution d'un mandat d'arrêt ramené à exécution postérieurement au règlement de l'information, la personne présentée à ce magistrat ne dispose pas du droit d'accéder à l'ensemble des pièces de l'information qui est clôturée, l'arrêt n'encourt pas pour autant la censure, dès lors que l'avocat du demandeur était en droit, dans le délai qui avait été accordé pour préparer la défense, de consulter le dossier s'il l'estimait utile pour défendre son client, et qu'il ne justifie pas avoir présenté une telle demande, non plus que s'être vu opposer un refus ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 137 à 144, 145, 591 et 593 du code de procédure pénale :
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation de l'ordonnance de placement en détention provisoire de M. X..., en date du 11 avril 2016, et a confirmé cette ordonnance ;
"aux motifs que, sur l'incompétence du juge des libertés et de la détention de Lyon, il résulte des arguments de la défense de M. X... que l'ordonnance d'incarcération provisoire délivrée le 8 avril 2016 par le juge des libertés et de détention du tribunal de grande instance de Lyon, motivée au visa de son absence de garanties de représentation et au visa de l'article 144 du code de procédure pénale, s'analysait implicitement comme une ordonnance de placement en détention provisoire ; que, toutefois l'ordonnance entreprise a été rendue par le juge des libertés et de détention après que M. X... ait fait connaître dans le cadre du débat contradictoire qu'il demandait un délai pour préparer sa défense ainsi qu'en fait foi le procès-verbal de débat contradictoire du 8 avril 2016 au terme duquel il a été porté à la connaissance de la personne qu'ayant sollicité un délai pour préparer sa défense elle faisait l'objet d'une ordonnance d'incarcération provisoire pour une durée de quatre jours ouvrables et qu'elle comparaîtrait devant le juge des libertés et de la détention le 11 avril 2016 à 11 h 30, le procès-verbal de débat contradictoire du 11 avril 2016 et l'ordonnance de placement en détention provisoire prise par le juge des libertés et de la détention à l'issue du dit débat contradictoire ; que le juge des libertés et de la détention était radicalement incompétent pour organiser un débat contradictoire le 8 avril 2016 et rendre une ordonnance de placement en détention provisoire et se devait de rendre une ordonnance d'incarcération provisoire dont la durée ne pouvait excéder quatre jours ouvrables ; qu'en visant à tort les dispositions de l'article 144 du code de procédure pénale et l'inexistence des garanties de représentation de l'appelant, le juge des libertés et de détention n'a pas pour autant modifié la nature intrinsèque de l'ordonnance d'incarcération provisoire prise légalement à la suite de la demande de la personne de pouvoir bénéficier d'un délai pour préparer sa défense ; que ce magistrat se devait avant l'expiration du délai de quatre jours ouvrables d'organiser le débat contradictoire prévu par la loi, ce qu'il a fait, et qu'il ne peut être affirmé qu'il était dépourvu de compétence pour le faire au motif spécieux que l'ordonnance d'incarcération provisoire n'aurait que l'apparence d'une ordonnance d'incarcération provisoire et constituerait implicitement une ordonnance de placement en détention provisoire ce qui interdirait que ce magistrat statue à nouveau ; que, sur le défaut d'impartialité du juge des libertés et de détention de Lyon, il résulte des arguments de la défense de M. X... que le juge des libertés et de la détention ayant ordonné le 11 avril 2016 son placement en détention provisoire ne pouvait être considéré comme un magistrat ayant présenté des garanties d'impartialité objective et subjective pour avoir le 8 avril 2016 rendu une ordonnance dite d'incarcération provisoire dans laquelle il avait dit que M. X... ne présentait pas de garanties de représentation ce qui constituait la manifestation d'une idée préconçue ; que les éventuelles garanties de représentation s'apprécient différemment en fonction des moments de la procédure ; que s'agissant de l'ordonnance de placement en détention provisoire du 11 avril 2016 ces garanties ont été appréciées par le juge des libertés et de la détention après la tenue d'un débat contradictoire au cours duquel l'accusé et son avocat ont été entendus en leurs observations ; que tel n'a pas été le cas à l'occasion de la procédure ayant donné lieu à l'ordonnance d'incarcération provisoire du 8 avril 2016 ; qu'au terme de l'ordonnance entreprise aucun élément n'avait été produit de nature à considérer que l'accusé disposait de garanties de représentation supérieures à celles dont il disposait le 8 avril 2016 n'ayant produit aucune pièce relative à sa domiciliation actuelle, que le fait que Me Y... ait soulevé lors du débat contradictoire le défaut d'impartialité du juge des libertés et de la détention n'empêchait ce magistrat de statuer alors qu'il devait rendre sa décision avant le 12 avril 2016 à 24 heures 00 temps qui permettait à Me Y... de saisir le premier président de la cour d'appel d'une requête en récusation de ce magistrat sur le fondement des articles 668 et suivants du code de procédure pénale, ce qu'il n'a pas fait, l'article 670 du code de procédure pénale permettant en cas d'urgence qu'il soit sursis à la procédure ; que sur le caractère incomplet du dossier ; que lors des débats devant la chambre de l'instruction figuraient, notamment, à la procédure : - la copie certifiée conforme du mandat d'arrêt délivré le 26 février 2013 par le juge d'instruction, - une copie de l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la cour d'assises du Rhône du 23 avril 2014, - la demande d'extradition du 16 mars 2015, - la lettre du garde des sceaux du 19 mars 2015 relative à la demande d'extradition de M. X..., - la transmission du garde des sceaux du 1er décembre 2015 au procureur général de Lyon faisant état de ce que l'extradition de M. X... avait été accordée par décret du 11 septembre 2015 du premier ministre du Royaume du Maroc, - le décret traduit en langue française, - un laisser passer délivré le 6 avril 2016 par le consulat de France à Rabat concernant M. X..., - un extrait du registre d'écrou du chef du bureau de l'exécution des peines de la délégation pénitentiaire du Royaume du Maroc du 7 avril 2016 concernant M. X... faisant état de son écrou le 13 mars 2015, - des pièces de l'administration française relatives à la remise de M. X..., - des procès-verbaux concernant l'arrivée à Roissy et à la prise en charge de M. X..., - des pièces du juge des libertés et de la détention de Bobigny ordonnant que la personne remise soit conduite devant le juge des libertés et de la détention de Lyon, - des pièces officielles du Royaume du Maroc rédigées en langue arabe ; que la défense de M. X... a dit que lors de sa comparution devant le juge des libertés et de la détention de Lyon les 8 et 11 avril 2016 toutes ces pièces ne figuraient pas à la procédure et qu'en particulier ne figurait pas la traduction en langue française du décret du 11 septembre 2015 du premier ministre du Royaume du Maroc ayant accordé son extradition ; qu'il a, par ailleurs, dit que la copie de l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la cour d'assises du Rhône du 23 avril 2014 ne figurait pas au dossier et que la dite copie avait été transmise lors du débat contradictoire du 11 avril 2016 ; qu'il se déduit des dispositions de l'article 135-2 du code de procédure pénale, et en particulier de son alinéa 4, applicables à la procédure d'exécution des mandats d'arrêt postérieurement au règlement de l'information, que lorsque la personne faisant l'objet d'un mandat d'arrêt est découverte après le règlement de l'information, elle est présentée au juge des libertés et de la détention qui peut, sur réquisitions du procureur de la République, soit la placer sous contrôle judiciaire, soit ordonner son placement en détention provisoire jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement, par ordonnance motivée conformément aux dispositions de l'article 144 du code de procédure pénale, rendue à l'issue d'un débat contradictoire organisé conformément aux dispositions des quatrième à neuvième alinéas de l'article 145 du code de procédure pénale ; qu'il se déduit de cette dernière disposition que n'ont vocation à trouver application, lors du débat contradictoire organisé devant le juge des libertés et de la détention dans le cadre de la procédure d'exécution d'un mandat d'arrêt postérieurement au règlement de l'information, que les dispositions, des alinéas 4 à 9, de l'article 145 du code de procédure pénale à l'exception, des alinéas 1 à 3, et, notamment, de l'alinéa 2, qui prévoit que le juge des libertés et de la détention saisi par une ordonnance motivée du juge d'instruction tendant au placement en détention de la personne la fait comparaître devant lui et recueille ses observations "au vu des éléments du dossier" ; qu'il se déduit de l'application combinée de ces textes que dans le cadre d'un débat contradictoire en vue de l'exécution d'un mandat d'arrêt ramené à exécution postérieurement au règlement de l'information, que la personne présentée au juge des libertés et de la détention ne dispose pas du droit d'accéder à l'ensemble des pièces de l'information qui est clôturée, ce magistrat n'étant pas saisi par le juge d'instruction dans le cadre d'une information en cours mais dans le cadre d'une procédure sui generis ayant pour objet la seule opportunité de ramener à exécution un mandat d'arrêt antérieurement délivré ; que, par ailleurs, aucune disposition de la loi ne contraint le procureur de la République à mettre à disposition de la personne et de sa défense les pièces de l'information clôturée ; qu'en effet, dans ce cadre procédural, le juge des libertés et de la détention n'est pas saisi par le juge d'instruction en vue du placement en détention provisoire d'une personne mise en examen à l'encontre de laquelle il a dit qu'existaient des indices graves ou concordants d'avoir commis les faits dont il était saisi, mais par le procureur de la République à la suite d'une ordonnance ou d'un arrêt de mise en accusation ayant dit qu'existaient contre la personne des charges suffisantes d'avoir commis les faits ayant donné lieu à son renvoi devant la cour d'assises ; que le moyen tiré de l'absence dans la procédure des pièces de fond de l'instruction, alors que n'y figurait que l'ordonnance de mise en accusation du 23 avril 2014 dont Me Y... avait dit qu'il n'avait pas le temps d'en prendre connaissance, étant précisé que ladite ordonnance avait fait l'objet d'un appel ayant donné lieu à un arrêt de mise en accusation du 2 juillet 2014 lui-même ayant fait l'objet de pourvoi, est ainsi inopérant, étant surabondamment précisé que l'arrêt de mise en accusation du 2 juillet 2014 a confirmé l'ordonnance de mise en accusation du 23 avril 2014 ; que s'agissant du moyen tiré de l'absence dans la procédure de la décision d'extradition dont ni l'existence ni le contenu n'avaient pu être contrôlés par le juge des libertés et de la détention, ce magistrat n'ayant pu vérifier le respect de la règle de spécialité tel que figurant dans la Convention d'extradition entre la France et le Maroc du 18 avril 2008, alors, par ailleurs, que le décret d'extradition figurant au dossier, s'il s'agissait bien de cette décision, était rédigé en langue arabe, doit être rappelé que la contestation de la régularité de la procédure d'extradition obtenue par le gouvernement français est de la seule compétence de la chambre de l'instruction saisie par requête motivée de la personne extradée dans les dix jours de la notification à elle faite des dispositions de l'article 696-36 du code de procédure pénale et que ainsi lors de son déferrement devant le juge des libertés et de la détention ce magistrat est incompétent pour statuer sur des éventuelles irrégularités ou absence de pièces qui vicieraient ta procédure d'extradition ; que, par ailleurs, l'extradé ne peut arguer de nullité entachant la procédure suivie sur le territoire de l'Etat requis, les juridictions françaises étant dépourvues de compétence pour apprécier les conditions dans lesquelles sont intervenues à l'étranger l'arrestation et la remise d'une personne par les seules autorités étrangères agissant dans la plénitude de leur souveraineté ; que s'agissant du contrôle du principe de spécialité tel que rappelé par l'article 8 de la Convention franco-marocaine d'extradition, les pièces de la procédure qui figuraient au dossier lors de la présentation de M. X... au juge des libertés et de la détention permettaient à ce magistrat de déterminer que l'intéressé lui était déféré sur le fondement du mandat d'arrêt du 26 février 2013 délivré dans le cadre d'une information suivie contre lui des chefs de vol en bande organisée avec arme, de destruction en bande organisée par moyen dangereux, de tentative de meurtre aggravé, de recel en bande organisée et de participation à une association de malfaiteurs ayant donné lieu à une demande d'extradition pour ces faits ayant été accordée par le gouvernement marocain alors qu'était annexée aux procès-verbaux de notification de placement en rétention judiciaire de M. X... la copie d'une note du 19 mars 2015 du garde des sceaux faisant état de ce que l'intéressé avait été interpellé au Maroc le 10 mars 2015 dans le cadre du mandat d'arrêt du 26 février 2013 délivré par le juge d'instruction dans le cadre de cette affaire et que, par ailleurs, lors de son audition par les services de police à son arrivée à Roissy, l'intéressé a dit que sa remise à la France avait été faite avec son accord ; que s'agissant du moyen tiré de l'absence dans la procédure de tout élément relatif au respect du délai de quarante-cinq jours prévu par les dispositions de l'article 12, § 4, de la Convention d'extradition entre la France et le Maroc ainsi libellé : "En cas d'acceptation, les autorités des parties conviennent de la date et du lieu de la remise de la personne réclamée. La partie requise communique également à la partie requérante la durée de la détention subie par la personne réclamée en vue de son extradition. Si la personne réclamée n'est pas reçue dans un délai de quarante cinq jours à compter de la date fixée pour sa remise, elle doit être mise en liberté et la partie requise peut, par la suite, refuser son extradition pour les mêmes faits", il se déduit de cette disposition conventionnelle que son éventuelle application est de la seule compétence des autorités de la partie requise détenant sous écrou extraditionnel la personne réclamée ; que s'agissant du moyen tiré de la présence dans la procédure d'un mandat d'arrêt du 26 février 2013 certifié conforme à l'original dépourvu de la signature du juge d'instruction, le fait qu'il soit, certifié conforme à l'original atteste de son existence ;
"1°) alors qu'un même juge des libertés et de la détention ne peut pas rendre deux ordonnances de placement en détention provisoire portant sur les mêmes faits et la même personne ; qu'en l'espèce, l'ordonnance, en date du 8 avril 2016, qualifiée "d'incarcération provisoire" visant l'article 144 du code de procédure pénale et se prononçant sur les garanties de représentation du mis en examen constitue une ordonnance de placement en détention provisoire (pourvoi n°T 16-83317) ; qu'ainsi, en rendant une seconde ordonnance de placement en détention provisoire le 11 avril 2016 après une première, improprement qualifiée ordonnance d'incarcération provisoire, le juge des libertés et de la détention a excédé ses pouvoirs et méconnu son office qu'il appartenait à la chambre de l'instruction de constater ;
"2°) alors que l'exigence d'impartialité objective est méconnue, dès lors qu'il existe des raisons légitimes de craindre un défaut d'impartialité ou en considération d'appréhensions du requérant objectivement justifiées ; que, dès lors, la chambre de l'instruction ne pouvait confirmer l'ordonnance de placement en détention lorsque le magistrat qui l'a rendue avait, trois jours plus tôt, d'ores et déjà ordonné le placement en détention par une ordonnance qualifiée à tort d'incarcération provisoire, cette situation constituant une raison légitime de nature à faire craindre un défaut d'impartialité du magistrat" ;
Attendu que, pour rejeter le moyen d'annulation de l'ordonnance de placement en détention provisoire, tiré du défaut d'impartialité du juge des libertés et de la détention et de ce que ce magistrat, en rendant l'ordonnance d'incarcération provisoire, avait épuisé sa saisine, et confirmer l'ordonnance attaquée, l'arrêt relève, notamment, qu'en visant à tort les dispositions de l'article 144 du code de procédure pénale et l'inexistence des garanties de représentation de M. X..., le juge des libertés et de la détention n'a pas pour autant modifié la nature de l'ordonnance d'incarcération provisoire prise légalement à la suite de la demande de l'intéressé de pouvoir bénéficier d'un délai pour préparer sa défense et que ce magistrat se devait, avant l'expiration du délai de quatre jours ouvrables, d'organiser le débat contradictoire prévu par la loi et qu'il ne peut être affirmé qu'il était dépourvu de compétence pour le faire ; que les juges ajoutent que M. X... n'a pas fait usage de la possibilité d'obtenir le respect du devoir d'impartialité du juge des libertés et de la détention en récusant ce magistrat par application de l'article 668 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
Qu'en effet, le défaut d'impartialité du juge des libertés et de la détention ne saurait se déduire du seul fait qu'il a rendu successivement à l'encontre de la personne qui lui est présentée une décision d'incarcération provisoire en vue de lui permettre de préparer sa défense dans le délai qu'elle a sollicité, puis une ordonnance de placement en détention provisoire ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Straehli, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Ascensi, conseiller rapporteur, M. Fossier, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 27 juillet 2016 n° 16-90.013
N° W 16-90. 013 FS-D
N° 4138
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à Paris, le vingt-sept juillet deux mille seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller PARLOS, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ et les conclusions de M. l'avocat général GAILLARDOT ;
Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité transmise par un arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 2e section, en date du 12 mai 2016, dans l'information suivie du chef de non-justification de ressources, blanchiment et recel contre :
- Mme Sylvie X..., épouse Y...,
reçu le 17 mai 2016 à la Cour de cassation ;
Vu les observations produites ;
1. Attendu que la question prioritaire de constitutionnalité transmise est ainsi rédigée :
" La dernière phrase de l'alinéa 3 de l'article 153 du code de procédure pénale porte-t-elle atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution et précisément au droit pour toute personne de ne pas s'auto-incriminer inclus dans le principe de respect des droits de la défense qui constitue l'un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ? " ;
2. Que, toutefois, la question posée par Mme X..., épouse
Y...
, dans son mémoire est ainsi formulée :
" Question prioritaire de constitutionnalité portant sur la conformité de l'article 153 du code de procédure pénale aux droits et libertés que la Constitution garantit, et plus précisément aux droits de la défense qui incluent notamment le droit à un procès équitable, garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, intégrée au préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 " ;
3. Attendu que si le juge peut formuler autrement la question à l'effet de la rendre plus claire ou de lui restituer son exacte qualification, il ne lui appartient pas d'en modifier l'objet et la portée ; qu'il y a donc lieu de considérer que la Cour de cassation est régulièrement saisie et se prononce sur le renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité telle qu'elle a été soulevée dans le mémoire distinct produit devant la juridiction qui la lui a transmise ;
4. Attendu que l'article 153 du code de procédure pénale fait, en son premier alinéa, obligation au témoin cité pour être entendu au cours de l'exécution d'une commission rogatoire, de comparaître, de prêter serment et de déposer, prévoit, en son deuxième alinéa, les modalités pour le contraindre à comparaître par la force publique ainsi que la sanction qu'il encourt s'il ne comparaît pas et, dans son troisième alinéa, exclut du champ d'application de l'obligation de prêter serment les personnes gardées à vue, en précisant que le fait que ces personnes aient été entendues après avoir prêté serment ne constitue toutefois pas une cause de nullité de la procédure ;
5. Attendu que la disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas été déjà déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
6. Attendu que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;
7. Attendu que la disposition critiquée n'autorise en aucun cas une personne gardée à vue au cours de l'exécution d'une commission rogatoire à demander l'annulation de sa déposition au motif qu'elle a été recueillie sous serment de dire la vérité, alors que cette personne a fait l'objet d'une mesure privative de liberté justifiée par une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement, que lui été notifié le droit de faire des déclarations, de répondre aux questions ou de se taire et que sa déposition pourra être utilisée tout au long de la procédure et figurer au nombre des éléments de preuve de sa culpabilité ;
8. Attendu qu'ainsi la question posée présente un caractère sérieux, en ce que la disposition contestée est susceptible de méconnaître les droits de la défense, impliquant le droit à une procédure juste et équitable, et les exigences de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
D'où il suit qu'il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;
Par ces motifs :
RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Pers, conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Parlos, conseiller rapporteur, Mmes Dreifuss-Netter, Planchon, Ingall-Montagnier, M. Ricard, conseillers de la chambre, MM. Laurent, Béghin, Mmes Guého, Pichon, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Gaillardot ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Civ.1 13 juillet 2016 n° 15-22.854 B
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée (Paris, 16 décembre 2014), rendue par un premier président, et les pièces de la procédure, que, le 9 décembre 2014, M. X..., de nationalité tunisienne, en situation irrégulière sur le territoire national, a été invité à suivre les policiers dans les locaux des services de police après un contrôle d'identité, réalisé à 14 heures 30, en exécution de réquisitions écrites du procureur de la République prises au visa de l'article 78-2 du code de procédure pénale, suivi d'un contrôle des titres de séjour effectué sur le fondement de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le même jour, à 17 heures 30, l'intéressé a reçu notification de l'arrêté portant placement en rétention et des droits y afférents ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance de prolonger la mesure de rétention, alors, selon le moyen, qu'en application de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la suite d'un contrôle d'identité effectué en application des articles 78-1, 78-2, 78-2-1 et 78-2-2 du code de procédure pénale, les personnes de nationalité étrangère peuvent être tenues de présenter les pièces et documents ou documents sous le couvert desquels elles sont autorisées à circuler ou à séjourner en France si des éléments objectifs déduits de circonstances extérieures à la personne même de l'intéressé sont de nature à faire apparaître sa qualité d'étranger ; que la mise en oeuvre régulière de cette faculté suppose, en amont, que le contrôle d'identité opéré soit lui-même régulier ; que le contrôle d'identité a été effectué en l'espèce en exécution de réquisitions écrites du procureur de la République de Paris du 8 décembre 2014, prises au visa des articles 78-2 et 78-3 du code de procédure pénale, aux fins de rechercher les personnes susceptibles d'avoir commis une liste d'infractions précises dans laquelle étaient visées celles à la législation sur les étrangers ; que, dans le cadre ainsi défini aux réquisitions, était applicable le droit commun selon lequel le contrôle d'identité ne peut être effectué qu'en présence de présomptions d'infraction ou d'éléments d'extranéité ; qu'en se bornant à vérifier la régularité du contrôle de titre opéré sur le fondement de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à partir des mentions du procès-verbal de contrôle d'identité relatives à l'identité et la nationalité, sans s'assurer de la régularité, en amont, du contrôle d'identité lui-même, le magistrat délégué a violé les articles 78-2 et 78-3 du code de procédure pénale, ensemble l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Mais attendu que si le constat des éléments objectifs, déduits de circonstances extérieures à la personne, de nature à faire apparaître sa qualité d'étranger, doit précéder le contrôle des titres de séjour intervenu sur le fondement de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un tel constat n'a pas à être préalable au contrôle d'identité effectué en application de l'article 78-2 du code de procédure pénale, mais peut résulter de celui-ci ; qu'en énonçant que le procès-verbal de contrôle d'identité détaillait les nom, prénom, date et lieu de naissance, adresse et nationalité, tous éléments régulièrement et logiquement déclinés lors du contrôle d'identité, le premier président s'est assuré de la régularité de ce contrôle d'identité, au regard des moyens présentés en appel ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait le même grief à l'ordonnance, alors, selon le moyen,
1°/ qu'en affirmant que le document intitulé « audition de l'étranger interpellé » ne constitue qu'un « recueil de renseignements administratifs », le magistrat délégué a dénaturé cette pièce de la procédure et violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que pour les nécessités d'une vérification du droit de circulation ou de séjour sur le territoire français, un officier de police judiciaire ne peut placer une personne en retenue dans les locaux de police ou de gendarmerie que dans le cadre et le respect des dispositions de l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que ce n'est que dans la mesure où aucune vérification n'est nécessaire que les services de police ne sont pas tenus de la placer en retenue ; qu'il ne résulte pas des mentions du procès-verbal de police que M. X... aurait reconnu se trouver en situation irrégulière, qu'il a été conduit dans les locaux de police pour l'examen de sa situation administrative et qu'une mesure d'éloignement devait être instruite ; qu'il résulte des pièces de la procédure qu'un procès-verbal d'audition a été dressé ; que le magistrat délégué, qui admet que des vérifications administratives ont été réalisées, a violé l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3°/ que le maintien à disposition de l'étranger jusqu'à son placement en rétention dans le cadre du régime de l'audition libre de l'article 62 du code de procédure pénale n'est régulier qu'en l'absence de contrainte dûment établie ; qu'il appartient au juge de la prolongation de la rétention de le vérifier ; qu'en se bornant à constater que la preuve d'une contrainte n'était pas rapportée lorsqu'il devait vérifier si la preuve de l'absence de contrainte avait été rapportée, le magistrat délégué a violé l'article 62 du code de procédure pénale ;
4°/ qu'il ne résulte d'aucune pièce de la procédure que M. X... ait reçu notification de son droit de quitter les locaux de police ou de gendarmerie, ait déclaré avoir suivi de son plein gré les policiers, n'avoir subi aucune contrainte de leur part ou avoir accepté de rester à leur disposition le temps de son audition ; que le magistrat délégué a violé l'article 62 du code de procédure pénale ;
5°) qu'en toute hypothèse, la rétention sous contrainte de l'étranger en raison de sa situation irrégulière, dans le cadre des dispositions de l'article 62 du code de procédure pénale et dans l'attente de la notification des mesures annoncées d'éloignement et de rétention, suppose que l'intéressé ait immédiatement reçu notification de ses droits de personne retenue ; qu'il résulte des constatations de l'ordonnance attaquée que contrôlé le 9 décembre 2014 à 14 h 30, le placement en rétention administrative et les droits afférents n'ont été notifiés à M. X..., retenu dans les locaux de police, qu'à 17 h 39, de sorte que la procédure n'est pas régulière au regard des dispositions de l'article 62 précité qui a ainsi été violé ;
6°/ que la rétention sous contrainte de l'étranger en raison de sa situation irrégulière, dans le cadre des dispositions de l'article 62 du code de procédure pénale et dans l'attente de la notification des mesures annoncées d'éloignement et de rétention, suppose que l'intéressé ait été mis en mesure d'exercer effectivement ses droits de personne retenue ; que le magistrat délégué, qui n'a pas exercé son contrôle sur ce point, a derechef violé l'article 62 précité ;
Mais attendu que l'ordonnance énonce qu'aucune mesure d'enquête ou de vérification n'était nécessaire, puisque l'irrégularité de la situation de l'intéressé était apparue dès le contrôle des titres de séjour, et qu'aucune privation de liberté n'était intervenue avant le placement en rétention, dès lors que l'étranger avait été invité à suivre les policiers pour recevoir la notification de ses droits, intervenue trois heures après le contrôle initial ; que le premier président n'a pu qu'en déduire, sans dénaturer l'acte portant recueil d'informations sur la situation administrative de l'étranger, et abstraction faite du motif surabondant critiqué par la troisième branche du moyen, que la procédure, qui ne relevait ni des dispositions de l'article 62 du code de procédure pénale ni de celles de l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, était régulière ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Civ.1 13 juillet 2016 n° 15-23.428
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, ci-après annexé :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 19 mai 2015), que, le 6 novembre 2005, à la suite d'un accident de la circulation, survenu la veille, dans lequel il se trouvait impliqué, Freddy X... a été placé en garde à vue dans les locaux d'une brigade territoriale où il avait été convoqué ; que, le lendemain, il a été retrouvé mort dans la chambre de sûreté ; qu'après la clôture d'une instruction pour recherche des causes de la mort, les parents de Freddy X..., Mme Jacqueline Y..., Mme Aurélie X..., M. Eric X... et M. Henri X... (les consorts X...) se sont constitués parties civiles ; que la chambre de l'instruction a annulé une ordonnance de non-lieu et ordonné la poursuite de l'instruction ; que, les consorts X... ayant sollicité diverses mesures d'investigations, le juge d'instruction a prononcé une ordonnance de refus d'informer ; qu'invoquant le fonctionnement défectueux du service public de la justice résultant des insuffisances de l'enquête, les consorts X... ont assigné l'Agent judiciaire de l'Etat, en réparation de leur préjudice matériel et moral, sur le fondement de l'article L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire ;
Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de limiter le montant de l'indemnisation allouée en réparation de leur préjudice ;
Attendu que, sous le couvert d'un grief non fondé de violation des articles 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 141-1 du code de l'organisation judiciaire, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de cassation, les appréciations souveraines des juges du fond qui, ayant estimé que les investigations et expertises médicales avaient permis de déterminer " formellement et sans équivoque possible " la cause, naturelle et non traumatique, du décès de Freddy X..., en ont déduit que l'Etat n'avait pas failli dans les recherches des causes de la mort ; qu'il ne peut être accueilli ;
Civ.1 13 juillet 2016 n° 15-22.855
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée (Paris, 16 décembre 2014), rendue par un premier président, et les pièces de la procédure, que, le 9 décembre 2014, M. X..., de nationalité tunisienne, en situation irrégulière sur le territoire national, a été invité à suivre les policiers dans les locaux des services de police après un contrôle d'identité, réalisé à 14 heures 34, en exécution de réquisitions écrites du procureur de la République prises au visa de l'article 78-2 du code de procédure pénale, suivi d'un contrôle des titres de séjour effectué sur le fondement de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le même jour, à 16 heures 15, l'intéressé a reçu notification de l'arrêté portant placement en rétention et des droits y afférents ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance de prolonger la mesure de rétention, alors, selon le moyen, qu'en application de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la suite d'un contrôle d'identité effectué en application des articles 78-1, 78-2, 78-2-1 et 78-2-2 du code de procédure pénale, les personnes de nationalité étrangère peuvent être tenues de présenter les pièces et documents ou documents sous le couvert desquels elles sont autorisées à circuler ou à séjourner en France si des éléments objectifs déduits de circonstances extérieures à la personne même de l'intéressé sont de nature à faire apparaître sa qualité d'étranger ; que la mise en oeuvre régulière de cette faculté suppose, en amont, que le contrôle d'identité opéré soit lui-même régulier ; que le contrôle d'identité a été effectué en l'espèce en exécution de réquisitions écrites du procureur de la République de Paris du 8 décembre 2014, prises au visa des articles 78-2 et 78-3 du code de procédure pénale, aux fins de rechercher les personnes susceptibles d'avoir commis une liste d'infractions précises dans laquelle étaient visées celles à la législation sur les étrangers ; que, dans le cadre ainsi défini aux réquisitions, était applicable le droit commun selon lequel le contrôle d'identité ne peut être effectué qu'en présence de présomptions d'infraction ou d'éléments d'extranéité ; qu'en se bornant à vérifier la régularité du contrôle de titre opéré sur le fondement de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à partir des mentions du procès verbal de contrôle d'identité relatives à l'identité et la nationalité, sans s'assurer de la régularité, en amont, du contrôle d'identité lui-même, le magistrat délégué a violé les articles 78-2 et 78-3 du code de procédure pénale, ensemble l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Mais attendu que si le constat des éléments objectifs, déduits de circonstances extérieures à la personne, de nature à faire apparaître sa qualité d'étranger, doit précéder le contrôle des titres de séjour intervenu sur le fondement de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un tel constat n'a pas à être préalable au contrôle d'identité effectué en application de l'article 78-2 du code de procédure pénale, mais peut résulter de celui-ci ; qu'en énonçant que le procès verbal de contrôle d'identité détaillait les nom, prénom, date et lieu de naissance, adresse et nationalité, tous éléments régulièrement et logiquement déclinés lors du contrôle d'identité, le premier président s'est assuré de la régularité de ce contrôle d'identité, au regard des moyens présentés en appel ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait le même grief à l'ordonnance alors, selon le moyen :
1°/ qu'en affirmant que le document intitulé « audition de l'étranger interpellé » ne constitue qu'un « recueil de renseignements administratifs », le magistrat délégué a dénaturé cette pièce de la procédure et violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que pour les nécessités d'une vérification du droit de circulation ou de séjour sur le territoire français, un officier de police judiciaire ne peut placer une personne en retenue dans les locaux de police ou de gendarmerie que dans le cadre et le respect des dispositions de l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que ce n'est que dans la mesure où aucune vérification n'est nécessaire que les services de police ne sont pas tenus de la placer en retenue ; qu'il ne résulte pas des mentions du procès verbal de police que M. X... aurait reconnu se trouver en situation irrégulière, qu'il a été conduit dans les locaux de police pour l'examen de sa situation administrative et qu'une mesure d'éloignement devait être instruite ; qu'il résulte des pièces de la procédure qu'un procès verbal d'audition a été dressé ; que le magistrat délégué, qui admet que des vérifications administratives ont été réalisées, a violé l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3°/ que le maintien à disposition de l'étranger jusqu'à son placement en rétention dans le cadre du régime de l'audition libre de l'article 62 du code de procédure pénale n'est régulier qu'en l'absence de contrainte dûment établie ; qu'il appartient au juge de la prolongation de la rétention de le vérifier ; qu'en se bornant à constater que la preuve d'une contrainte n'était pas rapportée lorsqu'il devait vérifier si la preuve de l'absence de contrainte avait été rapportée, le magistrat délégué a violé l'article 62 du code de procédure pénale ;
4°/ qu'il ne résulte d'aucune pièce de la procédure que M. X... ait reçu notification de son droit de quitter les locaux de police ou de gendarmerie, ait déclaré avoir suivi de son plein gré les policiers, n'avoir subi aucune contrainte de leur part ou avoir accepté de rester à leur disposition le temps de son audition ; que le magistrat délégué a violé l'article 62 du code de procédure pénale ;
5°/ qu'en toute hypothèse, la rétention sous contrainte de l'étranger en raison de sa situation irrégulière, dans le cadre des dispositions de l'article 62 du code de procédure pénale et dans l'attente de la notification des mesures annoncées d'éloignement et de rétention, suppose que l'intéressé ait immédiatement reçu notification de ses droits de personne retenue ; qu'il résulte des constatations de l'ordonnance attaquée que contrôlé le 9 décembre 2014 à 14h34, le placement en rétention administrative et les droits afférents n'ont été notifiés à M. X..., retenu dans les locaux de police, qu'à 16h15, de sorte que la procédure n'est pas régulière au regard des dispositions de l'article 62 précité qui a ainsi été violé ;
6°/ que la rétention sous contrainte de l'étranger en raison de sa situation irrégulière, dans le cadre des dispositions de l'article 62 du code de procédure pénale et dans l'attente de la notification des mesures annoncées d'éloignement et de rétention, suppose que l'intéressé ait été mis en mesure d'exercer effectivement ses droits de personne retenue ; que le magistrat délégué, qui n'a pas exercé son contrôle sur ce point, a derechef violé l'article 62 précité ;
Mais attendu que l'ordonnance énonce qu'aucune mesure d'enquête ou de vérification n'était nécessaire, puisque l'irrégularité de la situation de l'intéressé était apparue dès le contrôle des titres de séjour, et qu'aucune privation de liberté n'était intervenue avant le placement en rétention, dès lors que l'étranger avait été invité à suivre les policiers pour recevoir la notification de ses droits, intervenue trois heures après le contrôle initial ; que le premier président n'a pu qu'en déduire, sans dénaturer l'acte portant recueil d'informations sur la situation administrative de l'étranger, et abstraction faite du motif surabondant critiqué par la troisième branche du moyen, que la procédure, qui ne relevait ni des dispositions de l'article 62 du code de procédure pénale ni de celles de l'article L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, était régulière ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Crim. 12 juillet 2016 n° 16-82.676
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Hervé X...,
contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 26 février 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de viols aggravés, agressions sexuelles aggravées, corruption de mineur, a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 28 janvier 2016 ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, et des articles préliminaire , 186, 502 et 503 du code de procédure pénale, 485, 591 et 593 dudit code, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction attaquée a déclaré irrecevable l'appel de sa mise en examen formé par M. X... ;
"aux motifs que vu l'appel, formé par M. X... au greffe de l'établissement pénitentiaire le 20 février 2016 et enregistré au greffe du tribunal de grande instance le 22 février 2016, de « l'ordonnance de mise en examen » rendue le 28 janvier 2016, la mise en examen ne fait pas partie des ordonnances et décisions limitativement énumérées aux 186 et 186-1 du code de procédure pénale ;
"alors qu'en statuant ainsi sans même procéder à l'examen de l'ordonnance déférée, lequel lui eût permis de constater qu'il ne s'agissait pas d'une ordonnance de mise en examen mais d'une ordonnance de placement en détention provisoire, la seule ordonnance concernant l'appelant rendue à cette date par le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Versailles, désigné dans la déclaration par son nom patronymique et ses qualités, dont l'appel était par conséquent recevable, le président a méconnu ses propres pouvoirs et commis un excès de pouvoir négatif en violation des textes susvisés" ;
Attendu qu'il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de la procédure que, mis en examen le 28 janvier 2016 pour viols aggravés, agressions sexuelles aggravées et corruption de mineur, M. X... a été placé en détention provisoire par ordonnance du même jour ; que, par déclaration du 20 février 2016, il a relevé appel de "l'ordonnance du juge des libertés et de la détention relative à sa mise en examen rendue le 28 janvier 2016" ;
Attendu qu'à supposer même que cet appel ait été dirigé contre l'ordonnance plaçant le demandeur en détention provisoire et non contre l'ordonnance le mettant en examen, l'ordonnance n'encourrait pas la censure dès lors qu'il résulte des pièces de la procédure qu'il a été formé après l'expiration du délai de dix jours fixé par l'article 186, alinéa 4 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Harel-Dutirou, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 12 juillet 2016 n° 15-83.953
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Didier X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 4 juin 2015, qui, pour violences aggravées et agression sexuelle aggravée, l'a condamné à quatre ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 31 mai 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Pers, conseiller rapporteur, Mme Dreifuss-Netter, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller PERS, les observations de Me COPPER-ROYER, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire CABY ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 112-1, 222-12, 222-11, 222-13, alinéa 1, 6°, 132-80 du code pénal, 132-19 du même code, 131-4-1 du même code, 455 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X... à la peine de quatre années d'emprisonnement dont deux années assorties d'un sursis avec mise à l'épreuve pendant une durée de deux ans ;
"aux motifs que les faits sont graves, s'agissant de violences répétées commises sur une jeune femme isolée et soumise au prévenu en raison de l'ascendant que celui-ci avait sur elle ; que les actes violents et les faits d'attouchements sexuels se sont poursuivis sur près de deux années ; qu'ils ont eu un fort retentissement physique et psychologique sur la victime ; que, par conséquent, il y a lieu de condamner M. X... à la peine de quatre ans d'emprisonnement dont deux années assorties d'un sursis avec mise à l'épreuve pendant deux ans ;
"1°) alors que, selon l'article 132-19 du code pénal, dans sa rédaction issue de la loi du 15 août 2014, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée « qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate » ; qu'il ressort de la motivation de l'arrêt attaqué que la cour d'appel n'a pas recherché « si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur » rendaient la peine d'enfermement ferme « nécessaire » et « si toute autre sanction était manifestement inadéquate » ;
"2°) alors qu'aux termes de l'article 112-1 du code pénal, une loi nouvelle édictant des pénalités moins sévères doit être appliquée aux faits commis antérieurement et ayant donné lieu à des poursuites non encore terminées par une décision définitive au moment où la loi nouvelle est entrée en vigueur ; que, par les articles 19 à 23 de la loi 2014-896 du 15 août 2014, le législateur a créé une nouvelle peine délictuelle, alternative à la peine d'emprisonnement, la contrainte pénale ; que celle-ci constitue une peine moins sévère pouvant n'appliquer aux auteurs de délits commis avant le 1er octobre 2014 ; que l'arrêt attaqué ne pourra qu'être annulé pour permettre un nouvel examen de l'affaire au vu de dispositions plus favorables qui lui sont applicables" ;
Vu l'article 132-19 du code pénal ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard des faits de l'espèce, de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur, de sa situation matérielle, familiale et sociale ainsi que du caractère inadéquat de toute autre sanction ; que, dans le cas ou la peine n'est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, s'il décide de ne pas l'aménager, doit en outre motiver spécialement cette décision, soit en établissant que la personnalité et la situation du condamné ne permettent pas un tel aménagement, soit en constatant une impossibilité matérielle ;
Attendu que, pour condamner M. X... à la peine d'emprisonnement de quatre ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis et mise à l'épreuve, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Mais attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui ne s'est pas expliquée sur le caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction, et qui n'a pas prononcé sur l'aménagement de la peine sans sursis, a méconnu le texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle sera limitée aux peines, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Pau, en date du 4 juin 2015, mais en ses seules dispositions relatives aux peines, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Pau, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Pau et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze juillet deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 12 juillet 2016 n° 16-82.653
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Hocine X...,
contre l'arrêt n° 90 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BESANÇON, en date du 6 avril 2016, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et importation sans déclaration et contrebande de marchandises prohibées, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction le maintenant en détention provisoire après renvoi devant le tribunal correctionnel ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5 de la Convention européenne des droits de l'homme, 213, alinéa 2, 179, alinéas 3 et 4, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction du 11 mars 2016 ayant ordonné le maintien en détention ;
" aux motifs que l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel et l'ordonnance de maintien en détention provisoire sont deux ordonnances distinctes ; que l'appel relevé par le ministère public de l'ordonnance de renvoi non-conforme à ses réquisitions n'emporte pas la caducité de l'ordonnance de maintien en détention provisoire qu'il n'a pas entendu remettre en cause et qui conserve son plein et entier effet ; qu'au surplus, il convient de relever que cet appel a été déclaré irrecevable par arrêt de ce jour ;
" alors qu'il résulte des articles 179 et 213 du code de procédure pénale que lorsque la chambre de l'instruction déclare irrecevable l'appel formé contre l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel et confirme ainsi le renvoi, il lui appartient de décider du maintien en détention du prévenu ; que faute pour la chambre de l'instruction d'avoir ordonné le maintien en détention, le prévenu détenu est immédiatement remis en liberté ; qu'en estimant que, malgré l'appel formé contre l'ordonnance de renvoi et l'arrêt de la chambre de l'instruction prononçant l'irrecevabilité de cet appel, l'ordonnance de maintien en détention rendue par le juge d'instruction avait continué à produire son plein et entier effet et en la confirmant, la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs ; que la cassation interviendra sans renvoi, avec remise en liberté immédiate " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure, que, par ordonnance en date du 11 mars 2016, le juge d'instruction, saisi d'une information ouverte notamment pour infractions à la législation sur les stupéfiants dans laquelle M. Hocine X... avait été mis en examen et placé en détention, l'a renvoyé devant le tribunal correctionnel, des chefs précités ; que le ministère public en a relevé appel ; que cet appel a été déclaré irrecevable ; que M. X... a formé un pourvoi en cassation, lequel a été déclaré non admis par arrêt de la Cour de cassation de ce jour, date à compter de laquelle court le délai prévu à l'article 179 du code de procédure pénale ;
Que, par ordonnance distincte du 11 mars 2016, le juge d'instruction a maintenu M. X... en détention provisoire ; que celui-ci en a interjeté appel par déclaration du 21 mars 2016, en demandant sa comparution ;
Que les débats devant la chambre de l'instruction, appelée a examiner les appels formés contre les deux ordonnances, se sont tenus le 6 avril 2016 ;
Attendu que le demandeur ne saurait soutenir que l'ordonnance de maintien en détention était caduque, faute pour la chambre de l'instruction d'avoir prononcé son maintien en détention à l'occasion de l'examen de l'appel formé par le ministère public de l'ordonnance de règlement ;
Que, d'une part, les juges étaient saisis, non du seul appel de l'ordonnance de règlement, mais des appels portant tant sur l'ordonnance précitée que sur la décision de maintien en détention, qu'ils ont examinés lors de débats tenus à la même date, la chambre de l'instruction statuant le même jour ;
Que, d'autre part, l'arrêt attaqué a prononcé sur le recours formé contre l'ordonnance de maintien en détention provisoire dans le délai prescrit aux articles 194 et 199 du code de procédure pénale ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 12 juillet 2016 n° 16-82.692 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :
- Le procureur général près la cour d'appel de Paris,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, 1re section, en date du 15 avril 2016, qui, dans l'information suivie, notamment, contre MM. Mounir X...et Rodrigue Y..., du chef d'association de malfaiteurs en vue de la préparation d'actes de terrorisme, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction refusant leur mise en examen supplétive ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 21 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Ricard, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller RICARD et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 28 avril 2016, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 421-1, 421-2-1, 421-3, 421-5, 421-6, 422-3, 422-4, 422-6, 422-7 du code pénal, 591, 593 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que MM. X... et Y..., ressortissants français, se sont rendus en Syrie du mois de mai au mois d'août 2013, y agissant au sein d'organisations terroristes, notamment, celle se dénommant " l'Etat islamique ", ce qu'ont confirmé des interceptions téléphoniques, ainsi que des clichés photographiques, issus de supports informatiques leur appartenant, les représentant armés, sous le drapeau de ces organisations, alors que l'un de ces clichés a été pris à proximité de la ville d'Alep et qu'une de ces photographies représente M. Y... tenant une tête décapitée ; que, de retour en France, MM. X... et Y... ont été en contact avec plusieurs personnes désireuses de se rendre en Syrie aux fins de rejoindre ces mêmes organisations et qu'ils ont, eux-mêmes, manifesté leur intention de se rendre à nouveau en Syrie avec un objectif similaire ; que, mis en examen le 19 décembre 2014, du chef du délit d'association de malfaiteurs en vue de la préparation d'actes de terrorisme, MM. Y... et X... ont déclaré avoir séjourné en Syrie à la période visée et y avoir fréquenté ces organisations terroristes, tout en refusant de participer aux opérations menées par ces dernières ; qu'ils ont également contesté avoir eu, une fois de retour en France, l'intention de se rendre à nouveau en Syrie ; que l'avis de fin d'information ayant été notifié aux mis en examen et le dossier ayant été communiqué au procureur de la République, ce dernier, par réquisitoire supplétif du 27 janvier 2016, a demandé au juge d'instruction de mettre en examen MM. Y... et X... du chef de participation à un groupement ou une entente terroriste ayant pour objet la préparation d'un ou plusieurs crimes d'atteintes aux personnes, crime prévu par l'article 421-6 du code pénal ; que le juge d'instruction ayant rendu une ordonnance de refus de mise en examen supplétive, le procureur de la République a interjeté appel ;
Sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 80-1 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que le juge d'instruction peut mettre en examen les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi ;
Attendu qu'au motif de l'absence d'élément nouveau survenu depuis la mise en examen initiale de MM. Y... et X... de nature à justifier une modification de cette qualification, l'arrêt confirme le refus par le juge d'instruction de mettre en examen les intéressés du chef de participation à un groupement ou une entente terroriste ayant pour objet la préparation d'un ou plusieurs crimes d'atteintes aux personnes ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, ajoutant à la loi une condition que celle-ci ne prévoit pas pour prononcer une mise en examen, alors que la circonstance qu'aucun élément nouveau n'a été recueilli entre la date de la mise en examen initiale et celle à laquelle le procureur de la République requiert une mise en examen supplétive, ne saurait impliquer l'absence à l'encontre de la personne concernée d'indice grave ou concordant rendant vraisemblable la participation de celle-ci à la commission de l'infraction visée par le réquisitoire supplétif, la chambre d'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le moyen, pris en son autre branche :
Vu les articles 421-2-1 et 421-6 du code pénal ;
Attendu qu'il résulte de ces dispositions que l'association de malfaiteurs constitue une infraction indépendante, tant des crimes préparés ou commis par certains de ses membres, que des infractions caractérisées par certains des faits qui la concrétisent ;
Attendu que, pour dire n'y avoir lieu à mettre en examen MM. Y... et X... du chef de participation à un groupement ou une entente terroriste ayant pour objet la préparation d'un ou plusieurs crimes d'atteintes aux personnes, l'arrêt retient que les éléments de la procédure n'apportent pas la démonstration et ne constituent pas une charge suffisante de ce que les intéressés auraient préparé des crimes d'atteintes aux personnes à caractère terroriste ou auraient participé, dans les mêmes conditions, à un ou plusieurs crimes d'atteintes aux personnes précisément identifiés ou encore à des destructions par substances explosives ou incendiaires de nature à causer la mort d'une ou plusieurs personnes ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, en exigeant, afin de caractériser l'infraction d'association de malfaiteurs, la démonstration de la participation à la préparation ou à la réalisation de certains crimes, la chambre de l'instruction a méconnu la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est à nouveau encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 15 avril 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze juillet deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 12 juillet 2016 n° 15-83.390
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- Mme Martine X..., épouse Y...,
- M. Eric Y...,
contre les arrêts n° 214 à 249 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de BESANÇON, en date du 3 décembre 2014, qui, dans l'enquête ouverte des chefs de travail dissimulé et blanchiment, ont confirmé les ordonnances du juge des libertés et de la détention ayant autorisé des saisies de biens mobiliers et immobiliers, de créances, et de sommes inscrites au crédit de comptes bancaires ; La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 21 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Ricard, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller RICARD, les observations de la société civile professionnelle BORÉ et SALVE DE BRUNETON, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 6 août 2015, ordonnant la jonction des pourvois ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 1er du 1er Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, 131-21 du code pénal, 591, 593, 706-141 à 706-158 du code de procédure pénale ;
" en ce que les arrêts confirmatifs attaqués ont ordonné la saisie pénale de biens appartenant à M. et Mme Y... ;
" aux motifs qu'il convient de rappeler au préalable que les dispositions relatives aux saisies sont d'application immédiate, tel qu'il en résulte de l'article 112-2, 2° du code pénal ; qu'en outre, il ressort des décisions constantes de la Cour de cassation, qui refusant, de renvoyer des questions prioritaires de constitutionnalité au Conseil constitutionnel s'agissant des articles 131-21 du code pénal et 706-141 et suivants du code de procédure pénale, prononcent que « les saisies spéciales prévues par les textes visés ne peuvent être ordonnées, selon les conditions définies par l'article 132-21 du code pénal, que si elles sont destinées à garantir l'exécution d'une peine de confiscation susceptible d'être prononcée dans les cas limitativement énumérés par ledit code, que, d'autre part, ces saisies sont autorisées ou ordonnées par un juge, également compétent pour statuer sur leur exécution ou sur les actes ayant pour conséquence de transformer, modifier substantiellement le bien en cause ou d'en détruire la valeur, et qu'enfin, elles sont notifiées à la personne concernée, au propriétaire d'un bien ou du droit incorporel en cause ainsi qu'aux tiers intéressés qui peuvent les déférer à la chambre de l'instruction ; qu'en outre, les articles 41-4, 99, 479 et 543 du code de procédure pénale instituent des procédures de restitution des biens placés sous main de justice qui sont assorties de voies de recours, les droits des tiers étant préservés par la mise en oeuvre des articles 41-5 et 99-2 du même code ; qu'au surplus, l'ensemble des dispositions de l'article 131-21 du code pénal instituant la peine complémentaire de confiscation ont été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans les motifs et le dispositif de sa décision n° 2010-66 DC du 26 novembre 2010 » ; qu'ainsi, les dispositions relatives aux saisies pénales ne violent ni les droits de la défense, ni le droit à procès équitable ; que sur la violation des droits de la défense, du droit à un procès équitable au principe d'égalité entre les justiciables ; que l'appelant fait valoir qu'en limitant son accès aux seules pièces de la procédure se rapportant à la saisie contestée, les dispositions légales ne lui permettent pas d'assurer correctement sa défense, à l'inverse de ce qui serait permis à une personne mise en examen qui aurait alors accès à l'intégralité du dossier d'information judiciaire ; qu'en l'espèce, il convient tout d'abord de relever que les pièces relatives aux saisies contestées dans cette affaire ont été communiquées à l'avocat de l'appelant dans le cadre de la procédure pendante devant la chambre de l'instruction ; qu'en outre les dispositions légales permettant les saisies n'ont pour objet que de permettre de garantir toute peine de confiscation qui pourrait être prononcée par une juridiction de jugement sans valoir pour autant pré-jugement ni attenter au principe de la présomption d'innocence ; que l'absence d'accès à l'intégralité des pièces de l'enquête préliminaire ne saurait être considérée comme une violation des droits de la défense, dès lors qu'il est indispensable de concilier ces droits avec la nécessité de préserver le secret de l'enquête dans un souci d'efficacité, de prévention des atteintes à l'ordre public, de recherche des auteurs d'infractions ; qu'aussi bien la Cour de cassation que la Cour européenne des droits de l'homme reconnaissent cette nécessité de préserver le secret de l'enquête, dès lors que le mis en cause a un accès total à la procédure au stade du jugement sur le fond ; que les droits de la défense se trouvent en effet garantis, dès lors, d'une part, qu'il existe des recours contre les décisions des juges des libertés et de la détention avec possibilité de se voir communiquer, dans le cadre de l'exercice de ce recours, les pièces relatives aux saisies contestées, et, d'autre part, que les mesures de saisies pénales ne sont que des mesures conservatoires ; que lorsque le mis en cause sera poursuivi devant la juridiction de jugement, il aura alors accès à l'intégralité de la procédure, et ses droits seront respectés au même titre que s'il avait été mis en examen dans le cadre d'une information judiciaire ; qu'enfin, au cas où l'enquête préliminaire n'aboutit à aucune poursuite, les biens avoirs lui seront restitués ; que sur l'absence d'infraction punie d'au moins cinq ans d'emprisonnement ; que l'appelant fait valoir que l'enquête préliminaire ne portant pas sur une infraction punie d'au moins cinq ans d'emprisonnement, il ne peut être fait application de l'alinéa 5 de l'article 131-21 du code pénal ; qu'il se prévaut à ce titre de la réquisition du procureur de la République à un expert, en date du 2 octobre 2012, et des convocations adressées aux époux Y..., lesquelles pièces ne viseraient pas l'infraction de blanchiment de fraude fiscale ; qu'il y a lieu de constater que les requêtes du procureur de la République faites aux juge des libertés et de la détention aux fins de saisies visent, notamment, des faits de travail dissimulé par dissimulation d'activité et de salarié et de blanchiment de fraude fiscale ; qu'il appartient en effet aux magistrats du ministère public dans le cadre de l'enquête préliminaire ou de flagrance, et ensuite au magistrat du siège, de donner l'exacte qualification aux faits, laquelle n'est pas figée dès le début des investigations ; qu'ainsi, c'est à tort que l'appelant estime qu'il ne peut être fait application de l'alinéa 5 de l'article 131-21 du code pénal ; que sur la justification de l'origine des biens et la preuve de profits directs ou indirects ; que pour contester les saisies autorisées par le juge des libertés et de la détention, l'appelant fait valoir que n'ayant pas été mis en mesure de s'expliquer sur l'origine des biens, ces saisies ne pouvaient être autorisées, et que l'enquête n'apporte pas la preuve de l'existence d'un profit direct ou indirect tiré d'infractions ; qu'il convient de rappeler que ces mesures de saisies ne sont que des mesures conservatoires, et qu'il appartiendra à la seule juridiction de jugement de se prononcer sur l'origine légale ou non des biens qu'elle entend confisquer, et sur l'existence d'un profit direct ou indirect, étant précisé dès à présent que le propre des infractions de travail dissimulé ou de blanchiment est de procurer un profit à leur auteur ; qu'en tout état de cause, aucune disposition légale n'impose que soient établis avec certitude l'origine des biens saisis et le montant du profit généré par les infractions pour faire application des articles 131-21 du code pénal et 706-141 et suivants du code de procédure pénale, l'enquête ayant justement pour objet de rechercher notamment ces éléments ; qu'aucune disposition légale n'impose en outre l'obligation d'interroger les mis en cause avant toute saisie pénale et qu'enfin, les saisies en valeur étant légalement possibles, il importe peu de déterminer, à ce stade de la procédure, quelle est l'origine des biens ou avoirs saisis ; que sur l'insuffisance de motivation des ordonnances attaquées ; que l'appelant soutient que l'enquête préliminaire est insuffisamment identifiée, et qu'en conséquence, les ordonnances attaquées sont insuffisamment motivées tant s'agissant de l'existence des infractions que des nécessités de procéder aux saisies contestées ; qu'il convient de rappeler, à nouveau, qu'il est indispensable de concilier les droits de la défense avec la nécessité de préserver le secret de l'enquête dans un souci d'efficacité, de prévention des atteintes à l'ordre public et de rechercher des auteurs d'infractions ; qu'une lecture attentive des ordonnances dont appel démontre que celles-ci sont suffisamment motivées quant aux circonstances de faits et que ni les textes légaux applicables, ni la jurisprudence n'exige que soit démontré le risque de dissipation du patrimoine justifiant les saisies dont l'objet est de garantir l'exécution de la peine complémentaire de confiscation ; que sur le respect du principe de proportionnalité ; que l'appelant fait valoir que le principe de proportionnalité édicté par l'article préliminaire du code de procédure pénale n'est pas respecté en ce sens que ce sont tous les éléments du patrimoine des époux Y... et de la société Y... transport qui ont fait l'objet d'une ordonnance d'autorisation de saisie ; que s'il n'est pas contestable que ce principe doit s'appliquer aux mesures de saisies conservatoires, il n'en demeure pas moins, qu'en l'espèce, la dissipation de ce véhicule est à craindre, et aurait pour conséquence de priver la juridiction de jugement de toute faculté de confiscation ; qu'il y a lieu, en définitive, de considérer que les conditions légales de la saisie pénale du véhicule de marque Mercedes-Benz immatriculé sous le numéro ... appartenant aux époux Y... sont réunies au regard de l'article 131-21, alinéas 5 et 6, du code pénal, et qu'il convient, par conséquent, de confirmer l'ordonnance déférée ;
" et aux motifs éventuellement adoptés qu'il résulte de la procédure que M. Y... est propriétaire du bien mobilier suivant […] bien acquis le 6 juillet 2010, par M. Y..., né le 23 février 1962 à Cambrai (Nord), de nationalité française, demeurant ..., majeur, marié ; qu'un co-titulaire mentionné au nom de Mme X..., épouse Y... ; que le certificat de situation administrative simple édicté le 21 octobre 2013, ne fait apparaître aucune particularité, absence de gage et d'opposition à ce véhicule ; que l'enquête est, notamment, ouverte du chef de travail dissimulé par dissimulation d'activité, travail dissimulé par dissimulation de salariés et blanchiment de fraude fiscale ; que ces infractions sont de nature à procurer à l'intéressé un profit direct ou indirect ; que l'enquête a permis de mettre en exergue la caractérisation de l'infraction de travail dissimulé et de blanchiment de fraude fiscale qui revêtait plusieurs modes opératoires au sein de la société Y... transport ; que l'URSSAF a évalué dans son rapport le préjudice direct subi à la somme de 809 524 euros ; que la DGFIP a évalué dans son rapport le préjudice direct subi à la somme de 4 003 962 euros ; que la société Y... transport est, en tant que personne morale prise en la personne de son cogérant, M. Y..., pénalement responsable du travail dissimulé et du blanchiment de fraude fiscale estimés à la somme de 4 813 485 euros ; que, par conséquence, le bien mobilier de M. Y... encoure la confiscation en valeur conformément à l'article 131-21, alinéa 9, du code pénal ; qu'en l'absence de saisie pénale, une dissipation de ce bien mobilier aurait pour effet de priver la juridiction de jugement de toute perspective de confiscation ;
" 1°) alors que le mis en cause qui fait appel d'une ordonnance de saisie pénale doit avoir accès aux pièces de la procédure se rapportant à la saisie qu'il conteste et qui sont nécessaires à l'exercice des droits de la défense ; qu'en jugeant que les droits de la défense avaient été respectés motifs pris de ce que les pièces relatives aux saisies avaient été communiquées à l'avocat de l'appelant dans le cadre de la procédure d'appel devant la chambre de l'instruction et que le secret de l'enquête justifiait que ce dernier n'ait pas accès à l'ensemble du dossier, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si l'avocat de M. et Mme Y... ne s'était pas vu refuser l'accès à certaines pièces nécessaires à la contestation de la légalité des saisies ce qui portait une atteinte disproportionnée au droit à être jugé équitablement, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 2°) alors qu'en toute hypothèse, la valeur des biens saisis ne doit pas excéder le montant estimé du produit des infractions ; qu'en jugeant que les saisies pénales litigieuses n'étaient pas disproportionnées sans déterminer le rapport entre la valeur de l'ensemble des biens saisis et le montant estimé du produit de l'infraction, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la proportionnalité des saisies litigieuses et n'a ainsi pas légalement justifié sa décision ;
" 3°) alors qu'en toute hypothèse, une saisie spéciale ne peut être ordonnée que pour garantir l'exécution d'une peine de confiscation encourue par le mis en examen ; qu'en jugeant proportionnées les saisies pénales litigieuses aux motifs que l'URSSAF avait évalué dans son rapport son préjudice à 809 524 euros et que la DGFIP avait évalué son préjudice à 4 000 962 euros quand la saisie pénale ne garantit pas la réparation du préjudice subi mais simplement une peine de confiscation qui doit être proportionnée au produit des infractions poursuivies, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu qu'il résulte des arrêts attaqués et des pièces de la procédure qu'au cours d'une enquête préliminaire sur des faits de travail dissimulé et de blanchiment commis au sein de la société Y... transport, les investigations des enquêteurs les ont conduits à s'intéresser à M. Y... et son épouse, Mme X..., épouse Y..., titulaires de la totalité des parts sociales de cette société, et susceptibles, en recourant aux prestations d'employés d'une société de droit slovaque dont ils détenaient également les parts sociales, d'avoir éludé le versement de cotisations sociales et d'impositions fiscales ;
Attendu que le procureur de la République a, par requêtes des 12, 13, 14, 15 et 19 novembre, 3 et 17 décembre 2013, formées en application des articles 706-150, 706-153 et 706-154 du code de procédure pénale, demandé au juge des libertés et de la détention d'autoriser la saisie de biens mobiliers et immobiliers, propriété de Mme X..., épouse Y..., et de M. Y..., ainsi que de créances et de sommes inscrites au crédit de comptes bancaires dont ils étaient titulaires ; que ce magistrat a fait droit à ces demandes par ordonnances des 13, 14, 19 et 20 novembre, 10 et 18 décembre 2013 dont M. et Mme Y..., ont interjeté appel ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que, par arrêts du 3 décembre 2014, la chambre de l'instruction a confirmé les ordonnances du juge des libertés et de la détention autorisant des saisies pénales immobilières (arrêts n° 214, 217 et 220) ; que, par arrêts du même jour, elle a confirmé les ordonnances du juge des libertés et de la détention autorisant des saisies pénales mobilières (arrêts n° 215 et 216), des saisies de créances (arrêts n° 218, 219, 221, 243, 244, 245, 246 et 247) et des saisies de sommes déposées sur un compte bancaire (arrêts n° 222, 223, 224, 225, 226, 227, 228, 230, 231, 232, 233, 234, 235, 236, 237, 238, 239, 240, 241, 242, 248 et 249) ;
Attendu que les demandeurs ne sauraient se faire un grief de n'avoir eu accès qu'aux pièces de la procédure se rapportant à chacune de ces saisies, conformément aux articles 706-150, alinéa 2, 706-153, alinéa 2, et 706-154, alinéa 2, du code de procédure pénale, dès lors que ces textes, ne méconnaissent aucune des dispositions conventionnelles invoquées en ce qu'il garantissent un juste équilibre entre les droits de la personne concernée par la saisie et la nécessité de protéger le secret de l'enquête et de l'instruction ;
Que, dès lors, le grief ne saurait être admis ;
Sur le moyen, pris en ses autres branches :
Attendu que les demandeurs ne sauraient reprocher à la chambre de l'instruction, qui, statuant par les arrêts attaqués, rendus le même jour, sur les appels formés par eux contre l'ensemble des ordonnances du juge des libertés et de la détention, a fixé souverainement le produit estimé des infractions à un montant de cotisations sociales et de droits éludés égal à la somme totale de 4 813 485 euros et dit que les conditions légales des saisies étaient réunies au regard de l'article 131-21, alinéas 5 et 6, du code pénal, n'ait pas précisé que les sommes, créances et biens saisis n'excédaient pas en valeur ce produit, dès lors qu'il ne résulte ni de ces décisions, ni des articulations essentielles des mémoires déposés par M. et Mme Y... devant cette juridiction, qu'ils aient soumis aux juges des indications chiffrées justifiant que les éléments de leur patrimoine objet de l'ensemble des saisies critiquées avaient une valeur supérieure au produit des délits retenus ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que les arrêts sont réguliers en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze juillet deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 12 juillet 2016 n° 15-80.477
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Léon X...,- M. Augustin Y...,- M. Jean Z...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de FORT-DE-FRANCE, chambre correctionnelle, en date du 2 octobre 2014, qui a condamné le premier, pour corruption passive et atteinte à la liberté d'accès ou à l'égalité des candidats dans les marchés publics, à vingt mois d'emprisonnement dont quatre mois avec sursis, 80 000 euros d'amende et deux ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, le deuxième, pour corruption passive et atteinte à la liberté d'accès ou à l'égalité des candidats dans les marchés publics, à dix-huit mois d'emprisonnement dont quatre mois avec sursis, 40 000 euros d'amende et deux ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, et le troisième, pour complicité de corruption passive et d'atteinte à la liberté d'accès ou à l'égalité des candidats dans les marchés publics, à quatorze mois d'emprisonnement avec sursis et 20 000 euros d'amende ; La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 15 juin 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme de la Lance, conseiller rapporteur, M. Soulard, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller DE LA LANCE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de Me BOUTHORS et de la société civile professionnelle ROCHETEAU et UZAN-SARANO, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAILLARDOT ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires en demande et les observations complémentaires produits ;
Sur le premier moyen de cassation, proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 406, 591 à 593 du code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense ;
" en ce qu'il ressort des mentions de l'arrêt attaqué que : « A l'audience publique qui s'est déroulée du lundi 30 juin au vendredi 4 juillet 2014, le président a constaté l'identité des prévenus. (…) Le mercredi 2 juillet : à la reprise de l'audience, la présidente appelle à la barre, le témoin, Mme Sophie B...qui quitte la salle et est accompagnée dans une salle réservée aux témoins en dehors de la salle d'audience dans l'attente de sa déposition ;- M. Jean C...qui a été informé de son droit de garder le silence en ses interrogatoires et moyens de défense ;- M. Jacky D... qui a été informé de son droit de garder le silence en ses interrogatoires et moyens de défense ;- Mme Sophia B..., née le 12 juillet 1964 à Saint-Joseph (La Réunion) qui prête serment (article 446 du code de procédure pénale) de dire toute la vérité rien que la vérité avant d'être entendu par la cour,- M. X..., qui a été informé de son droit de garder le silence en ses interrogatoires et moyens de défense » ;
" alors qu'en vertu de l'article 406 du code de procédure pénale, dans sa version issue de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, applicable à compter du 2 juin 2014 « le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné (…) informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire » ; qu'en l'absence de toute précision relative à l'auteur de l'avertissement, avertissement de surcroît incomplet, la procédure et l'arrêt attaqué sont entachés de nullité " ;
Sur le quatrième moyen de cassation, proposé pour M. Z..., pris de la violation des articles 406, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Z...coupable de complicité de favoritisme et de corruption passive et, en répression, l'a condamné à la peine de quatorze mois d'emprisonnement et à la peine de 20 000 euros d'amende ;
" aux énonciations qu'« a l'audience publique qui s'est déroulée du 30 juin au vendredi 4 juillet 2014, le président a constaté l'identité des prévenus. Ont été entendus (…) Le mardi 01 juillet : (…) – M. Z...qui a été informé de son droit à garder le silence en ses interrogatoires et moyens de défense (….) Le vendredi 04 juillet : (…) MM. Y..., Richard I..., Jacky D..., Jean-Pierre C..., Guy F..., Jean Z..., et X... qui ont eu la parole en dernier (…) » ;
" 1°) alors que le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, doit informer le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; qu'en l'absence de précision relative à l'auteur de l'avertissement, la procédure et l'arrêt attaqué sont entachés de nullité ;
" 2°) alors que le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, doit informer le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; qu'en l'espèce, M. Z...n'a été informé que de son droit de garder le silence ; que le prévenu ayant été privé du rappel de l'ensemble de ses droits, ce qui lui a nécessairement porté grief, la procédure et l'arrêt attaqué sont entachés de nullité " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué qu'à l'audience, qui s'est déroulée du 30 juin au 4 juillet 2014, le président a constaté l'identité des prévenus et a été entendu en son rapport, que tant M. X... que M. Z..., après avoir été informés de leur " droit à garder le silence ", ont été entendus en leurs interrogatoires et moyens de défense ;
Attendu que ces mentions suffisent à établir que les prévenus ont été informés par le président du droit de se taire au cours des débats, et que la cour d'appel a respecté les dispositions de l'article 406 et 512 du code de procédure pénale ;
Qu'ainsi, les moyens ne peuvent qu'être écartés ;
Sur le deuxième moyen de cassation, proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, 184, alinéa 2, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation du principe d'impartialité ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de M. X... tendant à la nullité de l'ordonnance de renvoi prise à son encontre le 4 décembre 2012 ;
" aux motifs que la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 a mis à la charge du juge d'instruction une obligation de motivation dans le cadre de la rédaction de son ordonnance de règlement ; qu'aux termes de l'article 184 du code de procédure pénale, la « motivation est prise au regard des réquisitions du ministère public et des observations des parties qui ont été adressées au juge d'instruction en application de l'article 175, en précisant les éléments à charge et à décharge concernant chacune des personnes mises en examen ; qu'aucune atteinte au principe du procès équitable ou aux droits de la défense ne saurait résulter du texte dès lors qu'il appartient aux parties, dans le délai qui leur est imparti de prendre l'initiative de présenter au juge d'instruction leurs observations sur l'entier dossier de l'information obligatoirement mis à leur disposition et que leur droit de répliquer aux réquisitions du ministère public part du jour où elles leur sont communiquées, quel qu'en soit le moment ; qu'enfin, c'est seulement à l'expiration de tous les délais prévus par la loi que le magistrat instructeur rend son ordonnance de règlement en précisant les éléments à charge et à décharge concernant les personnes mises en examen, en tenant compte des observations qui lui ont été éventuellement présentées par les parties, nonobstant la carence du ministère public (Cass. crim., 20 juin 2012) ; que l'examen de l'ordonnance de renvoi querellée permet de constater que le juge d'instruction a mentionné les raisons pour lesquelles il existait contre le mis en examen des charges suffisantes, par une motivation prise au regard des réquisitions du ministère public et en précisant les dénégations, les éléments de fait, les fondements juridiques de la poursuite et les éléments à charge et à décharge, en requalifiant certains faits et en prononçant des non lieux ; que le juge d'instruction a donc motivé sa décision à l'égard du mis en examen en mentionnant ses dénégations et après avoir répondu aux objections juridiques soulevées et aux observations et a respecté en conséquence les dispositions de l'article 184 du code de procédure pénale ; que la demande d'annulation n'est pas fondée de ce premier chef ; que, bien que l'article 802 ne précise pas sur qui repose la charge de la preuve de l'existence d'un grief, cette preuve doit être apportée par le demandeur à l'annulation ; que, celle-ci ne peut être obtenue si le demandeur n'allègue pas l'existence d'un grief, et s'il le fait, il faut en outre qu'il établisse cette existence ; qu'en outre, le fait qu'une irrégularité ait été commise n'implique pas de présomption d'atteinte aux intérêts de la partie concernée ; qu'en l'espèce, il n'est pas établi, par l'examen des circonstances concomitantes ou postérieures à l'imprécision invoquée que celle-ci ait eu pour effet de porter atteinte, en la cause, aux intérêts du demandeur ; qu'aussi, dès lors qu'il ne démontre aucune atteinte portée à ses intérêts, le demandeur sera débouté de sa demande d'annulation de ce second chef ;
" 1°) alors qu'il ressort de l'article 184 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 5 mars 2007, entrée en vigueur le 1er juillet 2007, que le juge d'instruction doit motiver son ordonnance de renvoi, non seulement au regard des réquisitions du ministère public, mais aussi en l'état des observations des parties qui lui sont adressées, conformément à l'article 175 du code de procédure pénale en précisant les éléments à charge et à décharge concernant chacune des personnes mises en examen ; qu'en l'espèce, en refusant d'annuler l'ordonnance de renvoi, laquelle reproduit pourtant littéralement le réquisitoire du ministère public, sans répondre aux moyens de la défense et sans énoncer les éléments à décharge concernant le mis en examen, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" 2°) alors que l'exigence d'impartialité implique que le juge soit impartial mais également qu'il présente une apparence d'impartialité ; que cette exigence n'est notamment pas satisfaite lorsque le juge d'instruction reproduit littéralement les réquisitions du ministère public dans son ordonnance de renvoi ; qu'en l'espère, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué et du dossier de la procédure que le magistrat instructeur a repris, dans son ordonnance de renvoi, les motifs du réquisitoire définitif, entachant ainsi sa décision d'une apparence de motivation pouvant faire peser un doute sur son impartialité ; qu'en refusant néanmoins d'annuler cette ordonnance, la cour d'appel a méconnu les textes et principe susvisés " ;
Attendu que, pour écarter l'exception de nullité de l'ordonnance de renvoi prise de ce qu'elle se borne à reprendre les termes du réquisitoire définitif du procureur de la République, d'un défaut de motivation, d'une absence de réponse aux observations des parties et d'une atteinte à l'impartialité du juge, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel dont les juges d'appel ont, comme en l'espèce, sans insuffisance ni contradiction, constaté qu'elle précise les éléments à charge et à décharge concernant la personne mise en examen et répond aux observations soulevées, satisfait aux exigences de l'article 184 du code de procédure pénale, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen de cassation, proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 63 et suivants, 385, 427, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la cour, ayant rejeté l'exception de nullité des procè-verbaux de garde à vue, a retenu le principe de la culpabilité du requérant en se fondant substantiellement sur la teneur desdits procès-verbaux expressément contestés par la défense ;
" aux motifs que par application des articles 179, alinéa 6, et 385, alinéa 4, du code de procédure pénale, dès lors que l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction est devenue définitive, le prévenu n'est plus recevable à faire état de la nullité de ses auditions en garde à vue ; qu'en outre, il résulte de la lecture du jugement querellé que les juges de première instance n'ont fondé leur déclaration de culpabilité ni exclusivement ni même essentiellement sur les déclarations recueillies au cours des gardes à vue, mais aussi sur d'autres éléments de preuve régulièrement obtenu ; qu'en conséquence, ce second moyen de nullité sera également rejeté (…) ; qu'il ressort de l'information que les marchés publics visés dans la prévention ont été attribués en violation des règles élémentaires du code des marchés publics ; que, selon les pièces de procédure, M. Y..., directeur général des services, agissant pour le compte du président de la CCOG, a mis en cause pendant sa garde à vue « le système X... », impliquant non seulement ce dernier comme instigateur du système de favoritisme dans le cadre de l'attribution des marchés publics de façon précise et détaillée « M. X... m'a fait part de la liste des sociétés qui touchaient dans le système de financement occulte … mais aussi I...et F..., Z...et lui-même dans ce qu'il définissait comme le « système X... » ; qu'il donnait ensuite des précisions sur les remises de sommes et leur date et le nom des entreprises concernées (AMG-D...) ; qu'il reconnaissait que les marchés publics visés de la CCOG avaient été d'une façon ou d'une autre attribués de manière illégale et prédéterminée, rappelant que l'AMO (Z...) était souvent le même, ainsi que l'architecte, C...et que ces derniers connaissaient le nom de la société qui allait être retenue et qu'ils orientaient le choix de la commission qui était selon lui, anormalement passive ; qu'il complétait ses déclarations en disant que M. X... donnait pour instruction de favoriser notamment AMG, 3C ; qu'il revenait ensuite sur ses aveux, parlant de pression policière ; que, toutefois, il était mis en cause par les membres de la CAO qui l'ont décrit comme le " chef d'orchestre " par les entrepreneurs ;
" alors qu'en l'état d'une garde à vue ne répondant pas aux exigences conventionnelles liées à l'assistance d'un avocat, la cour a refusé d'annuler les PV correspondants et s'est référée à la teneur, contestée, de ces derniers pour fonder sa décision sur la culpabilité du requérant ; que la garantie liée à la prohibition de l'auto-incrimination serait illusoire s'il était permis au juge du fond de faire produire un effet disproportionné à des déclarations arguées d'inconventionnalité ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait, la cour a violé les textes et principes cités au moyen " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de procédure que M. Y..., directeur général des services de la communauté de communes de l'ouest guyanais (CCOG), a été renvoyé devant le tribunal correctionnel, par une ordonnance d'un juge d'instruction du 4 décembre 2012, des chefs de corruption passive et favoritisme ; qu'il a soulevé une exception de nullité de la garde à vue, subie au cours de l'enquête, et invoqué la violation des dispositions de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme en l'absence de notification du droit au silence et d'assistance effective d'un avocat au cours de la garde à vue ;
Attendu que, pour écarter l'exception de nullité, l'arrêt énonce, à bon droit, que dès que l'ordonnance de renvoi du juge d'instruction est devenue définitive, le prévenu n'est plus recevable à faire état de la nullité de ses auditions en garde à vue ;
Attendu qu'au regard du grief tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, il apparaît que la cour d'appel, pour retenir la culpabilité du prévenu des chefs de favoritisme et corruption passive, énonce, notamment, que M. Y... est mis en cause par les membres de la commission d'appel d'offres qui l'ont décrit comme le " chef d'orchestre " recevant ses instructions de M. X... et représentant ce dernier, maire de Saint Laurent du Maroni et président du CCOG, en participant aux commissions d'appel d'offres et en ne respectant pas les règles de procédure des marchés publics, dont il était présumé avoir pleine connaissance, et par les entrepreneurs qui indiquaient lui avoir remis des sommes pour obtenir des marchés ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, abstraction faite de motifs surabondants rappelant les déclarations effectuées par le prévenu au cours de sa garde à vue sans l'assistance effective d'un avocat, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation, proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 432-11 et 432-14 du code pénal, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale, ensemble violation du principe ne bis in idem ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de corruption passive ainsi que de favoritisme et l'a condamné pénalement ;
" aux motifs qu'il ressort des pièces de procédure que si M. X... n'a pas participé directement aux CAO, puisqu'il avait délégué ses pouvoirs à un vice-président, il n'en demeure pas moins que le système « X...» décrit par M. Y... à savoir attribution prédéterminée des marchés publics visés dans la prévention à certaines entreprises a été confirmé par les différents membres élus de la CAO « d'emblée, le choix de l'entreprise était défini à l'avance » qui se considéraient avec le recul comme une chambre d'enregistrement ; que par M. H...: « M. Y... recevait ses instructions de M. X... … C'est M. X... qui a voulu que le marché du centre de formation de Saint-Laurent soit confié à Nofrayane, tout comme le marché du hangar de Saint-Laurent … C'est M. X... qui a imposé M.
Z...
» ; que, par ailleurs malgré deux courriers de contrôle de légalité adressés directement à M. X... ; que, par courrier du 7 mai 2004, marché de Awala Yalimapo :- pas de date sur l'acte d'engagement transmis-pas de transmission de la copie de la publication de l'avis d'appel d'offre à la concurrence au BOAMP ;- pas de motif quant à la décision d'attribution ; que, par courrier du 16 juillet 2004, marché de Papaïtchon :- pas de hiérarchie quelconque dans les critères de sélection ;- registre des dépôts de candidature erroné ;- pas de preuve de la présence du président de la CCOG ou de son représentant lors de la CAO ;- certificat de capacité de l'entreprise attributaire insuffisant, ce dernier n'en a pas tiré de conséquence immédiate, alors qu'investi d'un mandat électif, il avait la charge exécutive d'un organe intercommunal et était débiteur d'un devoir de probité le devait s'assurer du respect des règles des codes des marchés publics, s'agissant des deniers publics ; que la convergence des dépositions ainsi recueillies suffit en conséquence à démontrer qu'il était l'instigateur de l'infraction de favoritisme (exclusion des appels d'offres des mieux-disant sans motivation, signature d'actes d'engagements des entreprises retenues avant leur désignation par la CAO, recours injustifiés à la notion d'urgence, octroi d'informations privilégiés par l'AMO ou l'architecte choisis hors concurrence, informations limitées des membres de la CAO pour induire leur choix sur une entreprise économiquement non avantageuse, déclaration abusive d'infructuosité, recours abusif au marché négocié fondé sur un prétendu savoir-faire d'une entreprise, …) de par son autorité sur M. Y..., sur M.
Z...
, son « obligé » et de sa proximité liée à un lien familial avec M. I... et de ses relations avec certains entrepreneurs locaux, l'existence d'instructions faisant échec à la translation de responsabilité ; que la déclaration de culpabilité retenue du chef de favoritisme sera confirmée ; que, par ailleurs, peu importe la destination des bénéfices illégalement obtenus (campagne électorale ou besoins personnels) et l'éventuelle interposition de différents intermédiaires pour dissimuler le lien entre la sollicitation et l'acte de la fonction qu'il s'agit d'accomplir soit soi-même soit grâce à des complices ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges l'ont également retenu dans les liens de la prévention de corruption passive ;
" alors que les mêmes faits ne peuvent faire l'objet de plusieurs qualifications lorsqu'une d'elles recouvre exactement des faits déjà inclus dans une autre qualification ; qu'ainsi, à supposer établis les faits reprochés au prévenu, il ne pouvait pas être déclaré coupable à la fois de favoritisme et de corruption passive, pour les mêmes faits ; qu'il s'ensuit que, en procédant pour les mêmes faits à deux déclarations de culpabilité, la cour d'appel a violé les textes et principe susvisés " ;
Attendu que les faits poursuivis, soit le fait d'avoir, en qualité de personne chargée d'une mission de service publique, procuré à autrui un avantage injustifié dans le cadre de l'attribution de marchés et le fait d'avoir sollicité le versement de numéraires de la part d'entreprises en contrepartie de cette attribution de marchés, caractérisant des délits distincts, protégeant des intérêts différents, et une seule peine ayant été prononcée, le moyen, qui invoque la violation du principe ne bis in idem, ne peut qu'être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation, proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-1, 121-6, 121-7, 432-14 du code pénal, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale, excès de pouvoirs ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de favoritisme et l'a condamné pénalement ;
" aux motifs qu'il ressort des pièces de procédure que si M. X... n'a pas participé directement aux CAO, puisqu'il avait délégué ses pouvoirs à un vice-président, il n'en demeure pas moins que le système « X...» décrit par M. Y... à savoir attribution prédéterminée des marchés publics visés dans la prévention à certaines entreprises a été confirmée par les différents membres élus de la CAO « d'emblée, le choix de l'entreprise était défini à l'avance » qui se considéraient avec le recul comme une chambre d'enregistrement ; que, par M. H...: « M. Y... recevait ses instructions de M. X... … C'est M. X... qui a voulu que le marché du centre de formation de Saint-Laurent soit confié à Nofrayane, tout comme le marché du hangar de Saint-Laurent … C'est M. X... qui a imposé Z...» ; que, par ailleurs, malgré deux courriers de contrôle de légalité adressés directement à M. X... ; que, par courrier du 7 mai 2004, marché de Awala Yalimapo :- pas de date sur l'acte d'engagement transmis ;- pas de transmission de la copie de la publication de l'avis d'appel d'offre à la concurrence au BOAMP ;- pas de motif quant à la décision d'attribution ; que, par courrier du 16 juillet 2004, marché de Papaïtchon :- pas de hiérarchie quelconque dans les critères de sélection ;- registre des dépôts de candidature erroné ;- pas de preuve de la présence du président de la CCOG ou de son représentant lors de la CAO ;- certificat de capacité de l'entreprise attributaire insuffisant, ce dernier n'en a pas tiré de conséquence immédiate, alors qu'investi d'un mandat électif, il avait la charge exécutive d'un organe intercommunal et était débiteur d'un devoir de probité et devait s'assurer du respect des règles des codes des marchés publics, s'agissant des deniers publics ; que la convergence des dépositions ainsi recueillies suffit en conséquence à démontrer qu'il était l'instigateur de l'infraction de favoritisme (exclusion des appels d'offres des mieux-disant sans motivation, signature d'actes d'engagements des entreprises retenues avant leur désignation par la CAO, recours injustifiés à la notion d'urgence, octroi d'informations privilégiés par l'AMO ou l'architecte choisis hors concurrence, informations limitées des membres de la CAO pour induire leur choix sur une entreprise économiquement non avantageuse, déclaration abusive d'infructuosité, recours abusif au marché négocié fondé sur un prétendu savoir-faire d'une entreprise, …) de par son autorité sur M. Y..., sur M.
Z...
, son « obligé » et de sa proximité liée à un lien familial avec M. I... et de ses relations avec certains entrepreneurs locaux, l'existence d'instructions faisant échec à la translation de responsabilité ; que la déclaration de culpabilité retenue du chef de favoritisme sera confirmée ;
" 1°) alors que les juridictions correctionnelles ne peuvent ajouter aux faits de la prévention, lesquels doivent rester tels qu'ils ont été retenus dans l'acte de saisine, à moins que le prévenu ait accepté d'être jugé sur des faits nouveaux ; qu'en l'espèce, M. X... a été renvoyé devant la juridiction correctionnelle en qualité d'auteur du délit de favoritisme, pour avoir entre le 1er janvier 2003 et le 31 juillet 2009, en sa qualité de maire de Saint-Laurent du Maroni, de président de la communauté de communes de l'ouest guyanais (CCOG) et président de la société d'économie mixte de l'ouest guyanais (SENOG), par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégation de service public, procuré à autrui un avantage injustifié notamment dans le cadre de l'attribution de plusieurs marchés publics ; que, dès lors, en retenant à sa charge des faits non compris dans la prévention, notamment le fait qu'il aurait été l'instigateur des infractions de favoritisme en raison d'instructions données aux autres prévenus, et à propos desquels il ne résulte pas de l'arrêt que l'intéressé ait accepté d'être jugé, la cour d'appel a violé les textes susvisés et excédé ses pouvoirs ;
" 2°) alors qu'en toute hypothèse, s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été mis en mesure de présenter sa défense sur la nouvelle qualification envisagée dans des conditions respectant l'exercice effectif et concret des droits de la défense ; que, dès lors, en requalifiant les faits poursuivis sous la qualification de favoritisme en complicité de favoritisme, dès lors qu'elle a déclaré M. X... coupable en qualité d'instigateur, sans l'en avoir préalablement averti afin qu'il puisse organiser sa défense, la cour d'appel a violé les textes et le principe susvisés " ;
Attendu que, pour déclarer M. X... coupable de favoritisme, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen et par motifs adoptés et, notamment, retient que l'attribution des marchés publics était prédéterminée sur la base de ses instructions, que la convergence des dépositions recueillies démontre qu'il était l'instigateur de l'infraction de par son autorité sur les différents intervenants et ses relations avec certains entrepreneurs locaux et qu'il signait administrativement des actes liés directement aux marchés ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations constatant l'implication personnelle du prévenu dans la commission des infractions en tant qu'auteur principal, la cour d'appel, qui n'a pas prononcé de requalification et a condamné le prévenu sur la base des mêmes faits que ceux retenus par le tribunal et donc déjà dans le débat, a, sans excéder sa saisine, justifié sa décision ;
Que, dès lors, le moyen n'est pas fondé ;
Sur le cinquième moyen de cassation, proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 432-11 du code pénal, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de corruption passive et l'a condamné pénalement ;
" aux motifs propres que peu importe la destination des bénéfices illégalement obtenus (campagne électorale ou besoins personnels) et l'éventuelle interposition de différents intermédiaires pour dissimuler le lien entre la sollicitation et l'acte de la fonction qu'il s'agit d'accomplir soit soi-même soit grâce à des complices ; que c'est donc à juste titre que les premiers juges l'ont également retenu dans les liens de la prévention de corruption passive ;
" aux motifs a les supposer adoptés que concernant les actes de corruptions, tous les paiements dénoncés par MM. K..., L..., M..., D... avaient pour destinataire final M. X... soit à titre personnel soit pour ses campagnes ; que M. X... répondait qu'il ne s'occupait pas du financement de ses campagnes et que de surcroît ses comptes de campagne étaient irréprochables, comptes qu'il produisait (D551 à D555) ; que, sur ce point, il convient de souligner que le respect des formes des comptes de campagne, n'exclut en rien le favoritisme et la corruption attenante, en parallèle ; enfin M. X... était directement mis en cause dans le cadre de l'activité de la SENOG et l'attribution de marchés par la mairie de Saint-Laurent dont l'assistance à la maîtrise d'ouvrage avait été réalisée par cette entité ; que M. X... était le président de la structure dirigée par M. Guy F...; que cette structure avait octroyé en sous-traitance des intervention à la société AMG de M. K...qui entre 2005 et 2008 avait dû verser en contrepartie du numéraire ; que, de même, M. X... était mis en cause dans le cadre de rétrocessions issues de la société Ouest voyage qui avait le monopole de toutes les prestations de voyage des entités dirigées par lui ; que, si les investigations démontraient que M. X... était bien le destinataire final des versements occultes dénoncés par plusieurs entrepreneurs de l'ouest guyanais, elles révélaient également que ces sommes étaient autant destinées au financement d'actes de campagne qu'au train de vie personne du mis en cause ; qu'au regard de son surendettement, il est évident que M. X... ne pouvait en effet se satisfaire de ses seuls revenus officiels ; que comment expliquer autrement cet endettement, notamment fiscal ? de quoi vivait-il ainsi que sa famille au jour le jour ? ;
" 1°) alors que la corruption passive n'est caractérisée que s'il est établi que la personne poursuivie a, en contrepartie d'un avantage quelconque, accompli ou s'est abstenu d'accomplir un acte de la fonction ou un acte de la fonction ou un acte facilité par sa fonction ; qu'en l'espèce, il était reproché à M. X... d'avoir en contrepartie de l'attribution de marchés publics sollicité le versement de numéraires de la part des entreprises candidates ; qu'en le déclarant coupable pour de tels faits de corruption passive, bien que l'attribution de marchés publics relevât de la seule compétence de la commission d'appel d'offres, la cour d'appel a méconnu l'article 432-11 du code pénal ;
" 2°) alors que M. X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir en contrepartie de l'attribution de marchés publics sollicité le versement de numéraire de la part notamment des entreprises 3 C dirigée par Mme N...et M. Jacky D..., Aliba O...gérée par M. Adam P..., AMG dirigée par M. K..., Bacotech dirigée par M.
Z...
; qu'en le retenant dans les liens de la prévention, sans préciser ni les marchés concernés, ni les conditions dans lesquelles M. X... les aurait attribuées et aurait perçu des sommes en numéraires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Attendu que, pour déclarer M. X... coupable de corruption passive, l'arrêt prononce par les motifs propres et adoptés repris au moyen et énonce, notamment, après avoir retenu sa culpabilité du chef de favoritisme dans le cadre d'un certain nombre de marchés énumérés et décrits par les premiers juges et l'avoir relaxé au regard de l'un d'eux, que les paiements, dénoncés par des entrepreneurs dans le cadre de ces marchés, avaient pour destinataire final M. X... et étaient destinés à financer son train de vie et ses campagnes électorales, qu'il était directement mis en cause dans l'attribution de marchés, les rétrocessions et versements occultes intervenus et que l'éventuelle interposition de différents intermédiaires pour dissimuler le lien entre la sollicitation et l'acte de la fonction qu'il s'agit d'accomplir importe peu ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance comme de contradiction, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 432-11, 432-14 et 432-17 du code pénal, de l'article préliminaire et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a condamné le prévenu du chef de corruption passive et de favoritisme ;
" aux motifs qu'il ressort de l'information que les marchés publics visés dans la prévention ont été attribués en violation des règles élémentaires du code des marchés publics ; que, selon les pièces de procédure, M. Y..., directeur général des services, agissant pour le compte du président de la CCOG, a mis en cause pendant sa garde à vue « le système X... », impliquant non seulement ce dernier comme instigateur du système de favoritisme dans le cadre de l'attribution des marchés publics de façon précise et détaillée « M. X... m'a fait part de la liste des sociétés qui touchaient dans le système de financement occulte … Mais aussi MM. I... et F..., M.
Z...
et lui-même dans ce qu'il définissait comme le « système X... » ; qu'il donnait ensuite des précisions sur les remises de sommes et leur date et le nom des entreprises concernées (AMG-D...) ; qu'il reconnaissait que les marchés publics visés de la CCOG avaient été d'une façon ou d'une autre attribués de manière illégale et prédéterminée, rappelant que l'AMO (Z...) était souvent le même, ainsi que l'architecte, C...et que ces derniers connaissaient le nom de la société qui allait être retenue et qu'ils orientaient le choix de la commission qui était selon lui, anormalement passive ; qu'il complétait ses déclarations en disant que M. X... donnait pour instruction de favoriser notamment AMG, 3C ; qu'il revenait ensuite sur ses aveux, parlant de pression policière ; que, toutefois, il était mis en cause par les membres de la CAO qui l'ont décrit comme le " chef d'orchestre " par les entrepreneurs :- M. L...qui a été condamné définitivement pour corruption active : « j'ai remis à M. Y... 20 000 euros pour obtenir le marché du centre multiservice de Papaïtchon ;- M. D... : « j'ai remis à M. Y... 9 700 euros pour obtenir le marché de Maripasoula et une autre fois 5 000 euros pour le marché d'Awala ;
- par M. K...qui maintenait en confrontation les remises d'argent à M. Y... dont la moitié pour ce dernier en lui disant que c'était pour le patron ;- par M. H..., responsable des services techniques de la CCOG de 2003 à 2006, qui disait, sur le favoritisme « c'est le président (M. X...) qui a dit », ajoutant devant le juge d'instruction : M. Y... recevait ses instructions de M. X... qui annonçait les projets qu'il devait mettre à exécution ;- par M. S..., recruté à la CCOG en 2004 déclarant qu'à la suite d'un audit interne, il avait découvert le système de favoristisme dans lequel notamment M. Y... participait, citant notamment l'attribution du marché du 12 février 2004 (centre multiservice de Papaïtchon) où il était juste noté « offre non conforme au cahier des charges » ; qu'aussi, M. Y..., qui chargé d'une mission de service public et représentant de M. X..., exerçant un mandat électif, et ne respectant pas les règles de procédure des marchés publics en participant aux commissions d'appel d'offres, en recourant de façon systématique à l'urgence et aux déclarations d'appel infructueux, pour recourir à des marchés négociés, en faisant mettre à l'écart un candidat sans motivation, et en ne faisant pas respecter les critères de choix définis par le code des marchés publics, en recourant à des avenants bouleversant l'économie du marché initial, alors qu'il était présumé avoir pleine connaissance des dispositions légales, a, comme l'ont relevé les premiers juges, commis l'infraction de favoritisme ; qu'il en est de même pour l'infraction de corruption passive, puisque par sa fonction, il a soit sollicité, soit accepté des espèces pour lui-même ou pour autrui en vue d'accomplir un acte entrant dans le cadre de sa fonction, peu importe que l'acte ait été accompli avant ou après le don ; que le jugement sera confirmé sur la déclaration de culpabilité ;
" 1°) alors que l'infraction de favoritisme nécessite l'imputation, en connaissance de cause, d'actes contraires aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour but et pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics ; qu'il appartient au juge répressif de circonstancier les dispositions réglementaires méconnues ainsi que les manquements reprochés ; qu'en se déterminant comme elle l'a fait par des motifs généraux sans répondre aux objections circonstanciées de la défense quant à l'absence d'implication du requérant dans les décisions de la commission d'appel d'offres, la cour a privé son arrêt de toute base légale ;
" 2°) alors qu'en affirmant de manière générale que le requérant avait « soit sollicité, soit accepté des espèces pour lui-même ou pour autrui en vue d'accomplir un acte entrant dans le cadre de sa fonction, peu importe que l'acte ait été accompli avant ou après le don », sans autrement s'expliquer ni sur les circonstances des infractions contestées, ni sur la portée des trois déclarations retenues à la charge du requérant mais contestées par sa défense de manière très circonstanciée, la cour a derechef privé son arrêt de toute base légale " ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé, en tous leurs éléments, tant matériel qu'intentionnel, les délits de corruption passive et de favoritisme dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;
Mais sur le premier moyen de cassation, proposé pour M. Z..., pris de la violation des articles 121-7, 432-11 et 432-14 du code pénal, de l'article préliminaire et des articles 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6, § § 1 et 3, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" en ce que la cour d'appel a requalifié les faits de favoritisme et de corruption passive en complicité de favoritisme et de corruption passive et a déclaré M. Z...coupable de ces faits commis du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 ;
" aux motifs qu'il ressort de la procédure que Z...était assistant du maître de l'ouvrage (CCOG) (AMO) ; qu'à ce titre, il n'exerçait aucune fonction de représentation, n'avait pas de mandat pour exercer au nom et pour le compte du maître d'ouvrage, aussi le premier élément constitutif du délit de favoritisme quant à la qualité de l'auteur faisant défaut, la décision de première instance sera infirmée en ce qu'elle ne l'a relaxé que pour certains marchés et pour certaines périodes ; qu'il sera relaxé pour l'ensemble des faits poursuivis pour l'infraction de favoritisme ; que la relaxe pour recel de favoritisme sera également confirmée, les marchés qui lui ont été attribués étant inférieurs au seuil de 90 000 euros ; qu'en revanche, les perquisitions effectuées à son domicile où seront découverts sur son ordinateur des documents de situation au profit de l'entreprise 3C avant l'attribution de marché à cette entreprise (centre multiservice de Mana), la reconnaissance par le prévenu d'une intervention en amont par la fourniture à l'entreprise 3C des éléments de comparaison quant aux prix (boulangerie de Saul), intervention qu'il a lui-même qualifiée de pratique légalement contestable, tout comme les orientations de la CCOG quant aux choix de la société attributaire qui venait de M.
Y... sah (0153) démontrent sa complicité par aide ou assistance en connaissance de cause dans la commission du délit de favoritisme ; qu'en effet toutes les personnes intervenant à un degré ou à un autre dans le circuit du marché public et auxquelles s'imposent les règles de concurrence et d'impartialité se rendent complice, l'exigence de la qualité de l'auteur n'étant pas nécessaire pour qualifier la complicité ; que le jugement sera donc infirmé quant à la déclaration de culpabilité de favoritisme, les faits plus exactement qualifiés en complicité de favoritisme dont il sera déclaré coupable ; qu'il ressort également de la procédure que malgré ses dénégations, M. Z...a été mis en cause par M. Y... comme collecteur de fonds occultes, (D187), par M. D... à qui M. Z...a réclamé une partie des 9 700 euros remis à M. Y... (0482), par M. M...(ECOM) expliquant que M. Z...lui avait réclamé 8 000 euros à remettre à M. I... lors de l'exécution du marché de Maripasoula, et ceci en présence de M. U..., directeur des services techniques de la CCOG depuis 2004 ; qu'aussi M. Z...(décrit d'ailleurs par M. Y... comme " un obligé de M. X... ") par sa participation active et en toute connaissance de cause en tant qu'intermédiaire dans la récolte de fonds occultes a facilité la commission de l'infraction de corruption passive et s'est ainsi rendu complice de celle-ci au sens de l'article 121-7 du code pénal étant rappelé que la qualité de l'article 432-11 du code pénal n'est pas exigée pour le tiers complice ; que le jugement sera donc infirmé sur la déclaration de culpabilité de corruption passive, les faits plus exactement requalifiés en complicité de corruption passive dont il sera déclaré coupable ;
" alors que s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été en mesure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée ; qu'en l'espèce, M. Z...a été poursuivi et condamné en première instance à raison des délits de favoritisme et corruption passive ; qu'en requalifiant ces faits et en déclarant M. Z...coupable de complicité de favoritisme et de corruption passive, sans l'en avoir informé et l'avoir mis en mesure de préparer sa défense sous cette nouvelle qualification, la cour d'appel a porté atteinte aux droits de la défense et violé les textes susvisés " ;
Vu l'article 388 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article préliminaire du code de procédure pénale ;
Attendu que s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été en mesure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Z...a été renvoyé devant le tribunal correctionnel des chefs de favoritisme et corruption passive ; que les juges du premier degré l'ont déclaré coupable des faits visés ainsi qualifiés ;
Attendu que les juges du second degré, retenant que le prévenu, assistant du maître de l'ouvrage, n'exerçait aucune fonction de représentation et n'avait pas de mandat pour agir au nom du maître de l'ouvrage, que le premier élément constitutif des délits quant à la qualité de l'auteur faisait défaut mais que ses interventions en tant qu'intermédiaire démontrent sa complicité par aide ou assistance en connaissance de cause dans la commission des délits reprochés, ont requalifié d'office les faits poursuivis en complicité de favoritisme et de corruption passive, sans avoir invité le prévenu à se défendre sur ces nouvelles qualifications ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et troisième moyens de cassation proposés pour M. Z...;
Et sur le sixième moyen de cassation, proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 131-27, 132-19, 132-24, 432-15, 432-17 du code pénal, 459, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale,
" en ce que l'arrêt attaqué a, dans son dispositif, condamné M. X... à une peine de vingt mois d'emprisonnement dont quatre mois avec sursis, 80 000 euros d'amende et une privation des droits civique, civils et de famille pour une durée de deux ans ;
" aux motifs qu'il convient de rappeler que la prévention ne visant des faits qu'à compter du 1er janvier 2003, une relaxe générale pour tous les faits commis avant cette date sera prononcée en faveur des sept appelants ; que la déclaration de culpabilité pour les faits de favoritisme, de recel de favoritisme, de corruption active, de corruption passive et de complicité sera donc cantonnée aux périodes comprises entre le 1er janvier 2003 et le 31 décembre 2004 ; que certes, la Guyane est un territoire aux spécificités locales, géographiques, économiques et culturelles particulières où il peut être difficile d'exécuter la commande publique ; qu'il n'en demeure pas moins que les élus et les chargés de mission de service public, comptables des deniers publics se doivent de respecter les trois grands principes de valeur constitutionnelle [liberté d'accès à la commande publique-égalité de traitement-transparence des procédures] dans le cadre de l'attribution des marchés publics, tout comme ceux qui y contribuent directement ou indirectement ; (…) que les faits de favoritisme et de corruption passive commis par MM. X... et Y... qui n'ont pas hésité à disposer, malgré leur devoir de probité lié à leur fonction, de fonds publics à des fins contraires à l'intérêt public, conduisent la cour à prononcer à l'encontre de chacun d'eux des peines d'emprisonnement assorties pour partie du sursis simple et plus exactement fixées, au regard de leur absence de passé judiciaire et de leur personnalité à vingt-quatre mois dont quatre mois avec sursis et à une peine d'amende de 80 000 euros à l'égard de M. X... et à dix-huit mois dont quatre mois avec sursis et une peine d'amende de 40 000 euros à l'égard de M. Y..., toute autre peine alternative à l'emprisonnement étant inadéquate ; que c'est à juste titre que les premiers juges ont prononcé la peine complémentaire de privations des droits civils, civiques et de famille à l'égard de MM. X... et Y... ; que, toutefois, au regard des périodes retenues quant à la commission des infractions par eux commises, il sera fait une application plus exacte de la loi pénale en ramenant la durée de la privation à deux ans ;
" 1°) alors que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier sa décision ; qu'une contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait pas, sans contradiction, condamner dans ses motifs M. X... à une peine de vingt-quatre mois dont quatre mois avec sursis, puis dans son dispositif, le condamner à une peine vingt mois dont quatre mois avec sursis ; que cette contradiction prive l'arrêt de toute base légale ;
" 2°) alors qu'en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; qu'en prononçant à l'encontre de M. X... une peine d'emprisonnement ferme, sans préciser en quoi la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendaient cette peine nécessaire en dernier recours, ni en quoi toute autre sanction aurait été manifestement inadéquate, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" 3°) alors que lorsqu'une peine d'emprisonnement sans sursis est prononcée en matière correctionnelle à l'encontre d'un prévenu, cette peine doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues par le code pénal ; que s'il prononce néanmoins une peine ferme, il doit spécialement motiver sa décision, au regard des faits de l'espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu'en prononçant à l'encontre de M. X... une peine d'emprisonnement ferme, sans justifier sa décision au regard de sa situation matérielle, familiale et sociale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
Et sur le troisième moyen de cassation, proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-1, 132-19, 132-24 du code pénal, de la loi n° 2014-896 du 15 août 2014, des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt a condamné le prévenu à une peine pour partie ferme ;
" aux motifs que la prévention ne visant des faits qu'à compter du 1er janvier 2003, une relaxe générale pour tous les faits commis avant cette date sera prononcée en faveur des sept appelants ; que la déclaration de culpabilité pour les faits de favoritisme, de recel de favoritisme, de corruption active, de corruption passive et de complicité sera donc cantonnée aux périodes comprises entre le 1er janvier 2003 et le 31 décembre 2004 ; que certes, la Guyane est un territoire aux spécificités locales, géographiques, économiques et culturelles particulières où il peut être difficile d'exécuter la commande publique ; qu'il n'en demeure pas moins que les élus et les chargés de mission de service public, comptables des deniers publics se doivent de respecter les trois grands principes de valeur constitutionnelles [liberté d'accès à la commande public-égalité de traitement-transparence des procédures] dans le cadre de l'attribution des marchés publics, tout comme ceux qui y contribuent directement ou indirectement (…) ; que les faits de favoritisme et de corruption passive commis par MM. X... et Y... qui n'ont pas hésité à disposer, malgré leur devoir de probité lié à leur fonction, de fonds publics à des fins contraires à l'intérêt public, conduisent la cour à prononcer à l'encontre de chacun d'eux des peines d'emprisonnement assorties pour partie du sursis simple et plus exactement fixées, au regard de leur absence de passé judiciaire et de leur personnalité (…) à dix-huit mois dont quatre mois avec sursis et à une peine d'amende de 40 000 euros à l'égard de M. Y..., toute autre peine alternative à l'emprisonnement étant inadéquate ; que c'est à juste titre que les premiers juges ont prononcé la peine complémentaire de privations des droits civils, civiques et de famille à l'égard de MM. X... et Y... ; que, toutefois, au regard des périodes retenues quant à la commission des infractions par eux commises, il sera fait une application plus exacte de la loi pénale en ramenant la durée de la privation à deux ans ;
" alors qu'en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours, si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; qu'en pareille hypothèse, la peine d'emprisonnement doit faire l'objet des mesures d'aménagement prévues par la loi ; qu'à défaut, le juge doit encore spécialement motiver sa décision au regard des faits de l'espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu'en l'absence d'antécédents judiciaires du requérant et de sa situation familiale justifiée, la cour n'a pas fait ressortir le caractère de nécessité de l'emprisonnement pour partie ferme qu'elle a prononcé à son préjudice et n'a pas davantage envisagé un quelconque aménagement de cette peine, contrevenant ainsi aux règles et principes gouvernant la personnalisation des peines " ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 132-19 du code pénal ;
Attendu qu'il résulte de ce texte, que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard des faits de l'espèce, de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur, de sa situation matérielle, familiale et sociale ainsi que du caractère inadéquat de toute autre sanction ; que, dans le cas où la peine n'est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, s'il décide de ne pas l'aménager, doit, en outre, motiver spécialement cette décision, soit en établissant que la personnalité et la situation du condamné ne permettent pas un tel aménagement, soit en constatant une impossibilité matérielle ;
Attendu que, pour condamner M. X... à la peine de vingt mois d'emprisonnement dont quatre mois avec sursis, 80 000 euros d'amende et deux ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille et M. Y... à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement dont quatre mois avec sursis, 40 000 euros d'amende et deux ans d'interdiction des droits civiques, civils et de famille, l'arrêt attaqué énonce que les prévenus n'ont pas hésité à disposer, malgré leur devoir de probité lié à leurs fonctions, de fonds publics à des fins contraires à l'intérêt public et que leur passé judiciaire et leur personnalité justifient de telles peines, toute autre peine alternative à l'emprisonnement étant inadéquate ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans s'expliquer sur l'aménagement de la peine d'emprisonnement prononcée, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et les principes ci-dessus énoncés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle sera limitée aux peines, dès lors que la déclaration de culpabilité à l'égard de MM. X... et Y... n'encourt pas la censure ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Fort-de-France, en date du 2 octobre 2014, mais en ses seules dispositions concernant M. Z...et en celles relatives aux peines prononcées à l'encontre de MM. X... et Y..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Basse-Terre, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Fort-de-France et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze juillet deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
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