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Civ.2 28 novembre 2019 n° 18-24.071

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 7 septembre 2018), que la veuve de Q... J... (la victime), ancien salarié de la société Wendel Sidelor, aux droits de laquelle vient la société Arcelormittal France (l'employeur), décédé le [...] , a souscrit, le 27 juin 2011, une déclaration de maladie professionnelle pour une pathologie prise en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de Meurthe-et-Moselle ; que les ayants droit de la victime ont saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de constater que le désistement de son appel n'est pas parfait et n'a pas produit d'effet, et de confirmer le jugement reconnaissant sa faute inexcusable, alors, selon le moyen :
1°/ que le désistement de l'appel n'a besoin d'être accepté que s'il contient des réserves ou si la partie à l'égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente ; que seule la partie à l'encontre de laquelle les réserves ont été formulées peut accepter, ou refuser, le désistement ; qu'en revanche, le désistement est parfait à l'égard des intimés qui ne sont pas concernés par les réserves formulées, en l'absence d'appel incident ou de demande incidente ; que ne constituent pas des demandes ou appel incidents la demande de confirmation du jugement de première instance et la formulation d'une demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'au cas présent, il est constant que les réserves formulées par l'employeur, à savoir la renonciation, par les consorts J..., aux demandes formées contre elle et tendant à la reconnaissance de sa faute inexcusable, n'étaient dirigées que contre les consorts J..., qui ont accepté ce désistement ; que la cour d'appel a constaté que ces réserves ne concernaient pas la CPAM, de sorte qu'en l'absence d'appel incident ou d'une demande incidente formulée par la caisse préalablement au désistement, la CPAM ne pouvait s'opposer à ce dernier ; qu'il est constant que la caisse n'a pas formulé de demandes ou d'appel incident puisqu'elle s'est contentée, avant le désistement, de s'en remettre à l'appréciation de la cour sur la question de la faute inexcusable, de solliciter la confirmation du jugement sur la question de l'opposabilité de la décision de prise en charge et de formuler une demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en jugeant pourtant que la CPAM s'étant opposée au désistement, ce dernier n'était pas parfait et n'avait pas produit son effet d'extinction de l'instance, tandis que les réserves formulées par l'employeur n'étaient pas dirigées contre la CPAM qui, dès lors, ne pouvait pas s'opposer au désistement de l'appel et à la renonciation, par les consorts J..., au bénéfice du jugement en ce qu'il avait retenu la faute inexcusable de l'employeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant l'article 401 du code de procédure civile ;
2°/ que seuls la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ou ses ayants droit, peuvent agir devant le tribunal des affaires de sécurité sociale pour voir reconnaître l'existence d'une faute inexcusable et statuer sur les conséquences de cette faute ; qu'en cas de pluralité d'employeurs pouvant avoir commis une faute inexcusable, seuls la victime ou ses ayants droits déterminent contre qui ils dirigent leur action en reconnaissance de la faute inexcusable ; que la victime, ou ses ayants droits, peuvent renoncer à leur droit de poursuivre un des employeurs pour faute inexcusable ; que dès lors, ils peuvent se désister partiellement de leurs demandes à l'encontre d'un employeur et peuvent renoncer au bénéfice partiel d'un jugement favorable en acceptant le désistement d'appel de l'employeur ; que la caisse primaire d'assurance maladie ne dispose à l'encontre de l'employeur que d'une action récursoire, et non subrogatoire, lorsque la faute inexcusable de l'employeur a été reconnue par une décision de justice passée en force de chose jugée ; que la caisse primaire d'assurance maladie, qui n'est que partie intervenante à titre accessoire dans le litige portant sur la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, ne peut accepter ou refuser le désistement d'appel d'une partie intervenante à titre principal et ne peut agir seule en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ; qu'au cas présent, l'employeur s'est désistée de son appel sous réserve de la renonciation par les consorts J... aux demandes formées contre elle et tendant à la reconnaissance de sa faute inexcusable ; que l'employeur faisait valoir que seuls les ayants droit de M. J... pouvaient accepter, ou refuser, le désistement d'appel de l'employeur relatif au litige recherchant sa faute inexcusable ; que la caisse, qui était partie intervenante à titre accessoire, ne pouvait s'opposer au désistement de l'employeur et à la renonciation, par les consorts J..., au bénéfice du jugement en ce qu'il avait retenu la faute inexcusable de l'employeur ; qu'en jugeant pourtant que le désistement n'était pas parfait en raison de l'opposition de la CPAM, qui était intimée, la cour d'appel a violé les articles 401, 330, et 31 du code de procédure civile ainsi que les articles L. 452-1 L. 452-3, L. 452-3-1 et L. 452-4 du code de la sécurité sociale ;
3°/ qu'en tout état de cause, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que dans une procédure orale, lorsque la cour fait expressément référence aux conclusions des parties, reprises oralement à l'audience, il convient de s'y référer pour déterminer l'objet du litige ; qu'au cas présent, à supposer que la CPAM ait pu s'opposer au désistement d'appel de l'employeur, les consorts J... faisaient valoir à titre principal qu'ils acceptaient de renoncer à toute demande formée contre l'employeur tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de cette dernière et que la demande de la caisse de reconnaître la faute inexcusable de l'employeur était irrecevable ; que l'employeur faisait quant à lui valoir qu'il acceptait le désistement d'instance des consorts J... et leur renonciation au bénéfice du jugement uniquement en ce qu'il avait constaté la faute inexcusable de l'employeur ; que la CPAM ne pouvait s'y opposer ; que la CPAM n'étant pas titulaire du droit d'agir en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la renonciation, par les consorts J..., de faire reconnaître la faute inexcusable de l'employeur et leur renonciation au bénéfice du jugement sur ce point empêchait la cour d'appel de se prononcer sur l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur, et des conséquences pécuniaires d'une telle faute ; qu'en confirmant cependant le jugement en ce qu'il avait retenu l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur et en ce que la CPAM pouvait exercer son action récursoire notamment à l'encontre de l'employeur, tandis que les consorts J..., seuls titulaires du droit d'agir en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, avaient renoncé à rechercher la faute inexcusable de l'employeur et renoncé au bénéfice du jugement sur ce point, la cour d'appel a modifié l'objet du litige, violant l'article 4 du code de procédure civile ;
Mais attendu que selon l'article 401 du code de procédure civile, le désistement d'appel n'a besoin d'être accepté que s'il contient des réserves ou si la partie à l'égard de laquelle il est fait a préalablement formé un appel incident ou une demande incidente ;
Et attendu qu'ayant constaté que la caisse s'opposait au désistement d'appel de l'employeur, fait sous réserve de la renonciation par les ayants droit à leur demande de reconnaissance de sa faute inexcusable, la cour d'appel en a exactement déduit, sans modifier les termes du litige, que ce désistement d'appel n'était pas parfait et que l'instance en reconnaissance de la faute inexcusable n'était pas éteinte ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt reconnaître sa faute inexcusable et de lui déclarer opposable la décision de prise en charge de la maladie de la victime, alors, selon le moyen, que l'article R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale dispose que lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 461-1, le tribunal est tenu de recueillir préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du cinquième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté que la CPAM avait pris en charge l'affection de M. J... après avoir recueilli l'avis du CRRMP de la région Nord-Est ; que l'employeur contestait l'origine professionnelle de la maladie prise en charge en faisant valoir notamment qu'aucun élément dans le dossier ne permettait de vérifier si les conditions du tableau n°30 bis étaient remplies de sorte qu'un CRRMP aurait dû être saisi ; que pour débouter l'employeur de sa demande d'inopposabilité de la décision de prise en charge et retenir le caractère professionnel de la maladie, la cour d'appel a énoncé que contrairement à ce que soutenait l'employeur, la CPAM de Meurthe-et-Moselle justifiait avoir régulièrement instruit le dossier et avoir accordé le bénéfice de la législation professionnelle après avis du CRRMP de la région nord-est, l'employeur ayant pu discuter contradictoirement du caractère professionnel de la maladie et n'apportant aucun élément de nature à mettre en doute que les activités de la victime correspondaient à plusieurs des travaux limitativement énumérés au tableau n° 30 bis des maladies professionnelles ; qu'en statuant ainsi, sans demander l'avis d'un second CRRMP, cependant qu'il lui appartenait de réclamer d'office un second avis, dès lors que la caisse avait admis que la condition relative aux travaux limitativement énumérés par le tableau n° 30 bis n'était pas remplie et avait pris en charge la maladie après avis d'un CRRMP, et que le différend entre l'employeur, les consorts J... et la CPAM de Meurthe-et-Moselle portait sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie au titre des alinéas 3 et 4 de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a violé les articles R. 142-24-2 et L. 461-1du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des productions que l'employeur avait contesté le caractère professionnel de la maladie en défense à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable, de sorte que la cour d'appel n'avait pas à recueillir au préalable l'avis d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;




Civ.2 28 novembre 2019 n° 18-14.920

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens uniques de cassation des pourvois principal et incident annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne MM. S... et V... T... et Mme K... T... à payer à la caisse mutualité sociale agricole Corse la somme globale de 2 000 euros ; rejette les autres demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit novembre deux mille dix-neuf.MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour MM. S... et V... T... et Mme K... T....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que l'accident mortel dont a été victime M. O... le 23 septembre 2005 revêt un caractère professionnel, constitue un accident du travail et est dû à la faute inexcusable de son employeur, M. E... T... ; d'avoir ordonné la majoration de la rente ou du capital d'ayant droit versé par l'organisme social en application de l'article L 452-2 du code de la sécurité sociale ; d'avoir fixé le préjudice moral de D... I... O... à 18 000 €, de P... O... à 18 000 €, de R... O... à 18 000 €, de F... O... à 12 000 €, de G... O... à 12 000 €, de U... O... à 12 000 € et de Y... O... à 12 000 € ; d'avoir dit qu'en application de l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale, ces sommes seront versées par l'organisme social qui en récupérera le montant auprès des ayants droit de feu J... E... T... ; d'avoir fixé le préjudice moral d'X... O... à la somme de 12 000 € ; d'avoir dit que le versement des sommes présentement accordées aux ayants droit de B... O... , soit 114 000 €, sera réalisé directement par la Caisse primaire d'assurance-maladie de Corse du Sud qui en récupérera le montant auprès de S..., K... et V... T... en leur qualité d'ayants droit de feu leur père, J... E... T... décédé le 27 octobre 2008 et employeur de la victime ;
aux motifs propres que les appelants dénient le caractère professionnel de l'accident dont ils considèrent qu'il s'est déroulé sans témoin et dans des circonstances qui n'ont pas été établies et entendent se fonder sur trois avis médicaux selon lesquels il convient de retenir l'alternative de l'infarctus comme cause unique du décès, voire l'état d'invalidité de la victime, de dire que la cause du décès est indéterminée et subsidiairement, de voir ordonner une expertise médicale pour déterminer la cause du décès ; que selon l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale « est considéré comme accident du travail quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne travaillant à quelque titre que ce soit pour un employeur » ; que la loi dispose une présomption d'imputabilité au travail de l'accident subi par la victime pendant le temps et sur le lieu du travail, dont l'employeur ne peut s'exonérer que par la preuve de l'existence d'une cause totalement étrangère au travail ; qu'il résulte de l'enquête que le jour de l'accident, M. O... conduisait sur la commune de N... une tractopelle mise à sa disposition par son employeur pour procéder à des travaux de réfection d'une piste forestière de la propriété privée appartenant à M. T..., qui l'employait hors toute déclaration dans le cadre d'un contrat de travail dissimulé ; que les gendarmes avaient été prévenus par M. T... de la survenance de l'accident et avaient retrouvé M. O... inanimé allongé face contre terre, le sommet du crâne coincé contre le sol et la roue avant-gauche de l'engin bloquée dans la végétation en contrebas de la piste, une souche de bois appuyée sur le dos ; que contrairement aux prétentions des appelants afférentes aux conditions indéterminées de survenance de l'accident, les circonstances objectives de découverte du corps démontrent que M. O... était bien en situation de travail, puisqu'il conduisait l'engin mis à sa disposition par son employeur, dès lors qu'il s'est retrouvé coincé mort sous celui-ci ; que l'autopsie du corps établissait une fracture du dernier arc costal droit et la présence de différentes traces au niveau de la région thoraco abdominale et dorsolombaire pouvant évoquer un phénomène d'écrasement et de compression avec probablement trouble respiratoire dans le cadre d'une asphyxie réactionnelle ; que l'examen anatomopathologique des organes mettait en évidence à la fois que le cerveau montrait des signes de souffrance diffuse d'origine anoxique probable que venait confirmer l'oedème pulmonaire massif, oedème pulmonaire qui pouvait être d'origine cardiaque quoique le technicien n'ait pu examiner que la pointe du coeur, soit être dû à une compression entraînant des phénomènes asphyxiques quoique les lésions paraissent peu importantes et ne semblent pas avoir entraîné d'hémorragie interne ; qu'au soutien de leur appel les consorts T... font état d'avis médicaux et notamment celui du docteur Q..., selon lesquels si la victime a présenté effectivement un traumatisme thoracique, rien ne permet d'affirmer que ces lésions ont pu entraîner la mort et on ne peut exclure la possibilité d'un malaise survenu antérieurement au traumatisme, que l'oedème pulmonaire massif médicalement constaté peut être la conséquence d'un arrêt cardio-circulatoire primitif et non sa cause et qu'il ne faut pas oublier que l'état d'invalidité deuxième catégorie « suppose tout de même des pathologies lourdes et qu'il présentait une importante surcharge pondérale malgré sa grande tailleil est impossible de dire s'il présentait ou pas des facteurs de risque important sur le plan cardiovasculaire. On rappellera qu'il a été constaté une importante stéatose hépatique (infiltration graisseuse du foie), ce qui peut s'observer chez les sujets obèses ou présentant des troubles métaboliques des lipides (facteurs de risques coronariens), une consommation régulière d'alcool, un diabète, etc. » pour conclure qu'une cause médicale première peut rester tout à fait envisageable ; que toutefois ces conclusions si elles font état de doutes et d'interrogations médicales, ne sont aucunement propres à établir que l'accident mortel du travail dont a été victime M. O... trouve son origine dans une cause totalement étrangère au travail, alors même que les ayants droit du défunt justifient aux débats par le certificat du Docteur C... que M. O... ne présentait pas de son vivant une quelconque cardiopathie ; qu'il convient enfin de se reporter aux constatations réalisées par les gendarmes de la compagnie de Sartène dont il résulte que « la victime est coincée au niveau du sommet du crâne entre la roue avant gauche de l'engin et le solla tête est de couleur violetteau niveau des lombaires une souche d'arbre comprime le flanc gauche. Une grosse racine couvre le corps au niveau de la ceinture du pantalon. La souche plaque et maintient la personne face contre sol », constatations matérielles et physiques dont il se déduit que l'asphyxie de la victime (cyanose cérébrale) est la conséquence directe des circonstances de l'accident et de la compression de son flanc gauche ; que cette preuve qui incombe aux appelants étant insuffisamment rapportée par eux, il n'y a pas lieu de faire droit à leur demande d'expertise complémentaire en application de l'alinéa 2 de l'article 146 du code de procédure civile ; que c'est à bon droit que le tribunal a considéré que les ayants droit de M. T... ne rapportaient pas à suffisance la preuve d'une cause étrangère totalement étrangère au travail et dit que l'accident mortel de M. O... présentait le caractère d'un accident du travail ; que le jugement sera confirmé de ce chef ; que, sur la faute inexcusable de l'employeur, le tribunal correctionnel d'Ajaccio par jugement prononcé le 19 septembre 2008, à ce jour définitif, a condamné M. T... du chef d'homicide involontaire sur la personne de M. O... et infraction de travail dissimulé à une peine de un an d'emprisonnement avec sursis, en relevant que M. O... n'avait reçu aucune formation à la conduite de l'engin dont il se servait d'une part et que celui-ci d'autre part était affecté de graves dysfonctionnements en raison de son défaut d'entretien, de sa vétusté et de ce que les systèmes de freinage étaient totalement inexistants, et que M. O... était en relation de subordination à l'égard de M. T... qui l'employait de manière intermittente sans le déclarer ; que les manquements fautifs de l'employeur sont dès lors parfaitement établis ; que pour exonérer leur auteur de toute commission de faute inexcusable les consorts T... se prévalent du comportement fautif de la victime qui travaillait en fraude de ses droits et avait refusé les chèques emploi-service ; qu'il n'existe toutefois pas de relation de causalité entre l'inobservation par la victime des contraintes liées à son état d'invalidité et une quelconque volonté non affichée de sa part de s'affranchir délibérément des règles de sécurité dont son employeur était débiteur à son endroit ; que les éventuels manquements fautifs de la victime n'ont en rien contribué à la survenance de l'accident ; que c'est à bon droit que le tribunal a écarté toute faute intentionnelle de la victime et a retenu la faute inexcusable de l'employeur ; que confirmation sur ce point sera ordonnée ; que, sur les conséquences de la faute inexcusable de l'employeur, c'est à bon droit qu'en conséquence de la faute inexcusable qu'il reconnaissait à la charge de l'employeur que le tribunal a ordonné la majoration à son montant maximum de la rente ou du capital servis par l'organisme social aux ayants droit de la victime ; que sur les demandes en réparation du préjudice moral subi par les ayants droit de M. O... , c'est à bon droit et en tenant compte à la fois de la douleur morale ressentie à raison de la mort brutalement intervenue de leur auteur et de la plus ou moins grande proximité géographique que certains de ses enfants pouvaient entretenir avec la victime en raison de leur âge excédant ou non la majorité civile que le tribunal des affaires de sécurité sociale a fixé à 18 000 € à chacune la réparation du préjudice moral de sa veuve et de chacune de ses deux filles P... et R... O... encore mineures et à 12 000 € chacun l'indemnisation du préjudice moral de R... O... , G... O... , U... O... , Y... O... et R... O... ; que le tribunal ayant toutefois omis d'indemniser le préjudice moral d'X... O... , fille du défunt qui comparaissait devant lui, il sera également accordé à celle-ci la somme de 12 000 € en réparation de ce préjudice ; et aux motifs réputés adoptés que, sur le caractère professionnel de l'accident, il résulte de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale qu'une lésion se produit par le fait ou à l'occasion du travail doit être considérée, sauf preuve contraire, comme résultant de cet accident ; qu'il n'est pas contesté que M. O... , au moment de l'accident, travaillait pour le compte de M. T... à la réfection d'un chemin d'accès à la propriété de ce dernier ; que pour faire échec à la présomption d'imputabilité au travail dont M. O... bénéficie, il faut non seulement établir que l'accident a une cause totalement étrangère au travail, mais également que les lésions sont indépendantes du travail ; qu'en l'espèce, la présomption d'imputabilité ne peut donc être écartée dans la mesure où les ayants droit de l'employeur M. T... ne démontrent pas que les circonstances du travail n'ont absolument pas joué un rôle dans le processus mortel ; qu'ils soulignent uniquement que la cause de l'accident est, selon eux, « indéterminée » ; qu'il convient donc de dire que l'accident mortel de M. O... a le caractère d'un accident du travail ; que, sur l'existence de la faute inexcusable de l'employeur, en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, en ce qui concerne notamment les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir connaissance du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures pour l'en préserver ; que c'est à la victime d'apporter la preuve du caractère inexcusable de la faute commise par l'employeur, c'est-à-dire de démontrer que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger et qu'il n'a pas pris les mesures de protection nécessaires ; qu'il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu au salarié ; qu'il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage ; qu'enfin, la faute de la victime n'a pas pour effet d'exonérer l'employeur de la responsabilité qu'il encourt en raison de sa faute inexcusable, seule une faute inexcusable de la victime pouvant permettre de réduire la majoration de la rente ; qu'il ressort de l'ordonnance de renvoi rendue par le juge d'instruction d'Ajaccio du 17 décembre 2007, du rapport du contrôleur du travail du 9 août 2007, et du jugement du tribunal correctionnel d'Ajaccio en date du 19 septembre 2008 que M. O... était employé environ une semaine par mois par M. T... pour remettre en état la voie d'accès à sa propriété (déclarations de M. T... et de Mme O... ) ; que M. O... utilisait dans le cadre des travaux une tractopelle qui avait été mise à disposition par M. T... lequel l'avait empruntée à son fils M. S... T... ; que ce dernier expliquait, dans le cadre de l'enquête, avoir précisé à son père que l'engin avait des problèmes au niveau de la boîte de vitesse ; que M. G... O... , qui avait également travaillé pour le compte de M. T..., soulignait que la tractopelle qu'il avait utilisée présentait de gros dysfonctionnements au niveau des freins et de la boîte de vitesse, s'arrêtant et repartant toute seule ; qu'à leur arrivée, les gendarmes découvraient le corps inanimé de M. O... allongé face contre terre, le sommet du crâne coincé entre le sol et la roue avant-gauche de l'engin bloqué dans la végétation en contrebas de la piste forestière, une souche de bois appuyée sur le dos ; que M. T... déclarait, quant à lui, avoir trouvé la victime, le corps parallèle à la tractopelle avec laquelle il n'était pas en contact, avoir coupé le contact du moteur encore en marche puis avoir aussitôt prévenu les pompiers ; que par ordonnance de renvoi rendue par le juge d'instruction d'Ajaccio du 17 décembre 2007, M. T... a notamment été renvoyé devant le tribunal correctionnel d'Ajaccio pour homicide involontaire pour avoir violé de manière délibérée une obligation de sécurité dans le cadre d'une relation de travail en l'espèce en ne fournissant pas à la victime les équipements de sécurité adaptés et en mettant à sa disposition pour les travaux un engin en mauvais état, non entretenu régulièrement et doté de dispositifs de freinage inefficaces ; qu'il est précisé qu'en dépit des dénégations de M. T..., l'information judiciaire a permis d'établir que M. O... a subi l'écrasement de l'engin, et que cet écrasement a été à l'origine d'un oedème pulmonaire ayant entraîné son décès et que l'autopsie présente cette hypothèse comme étant la plus probable et que celle-ci s'avère compatible avec le rapport d'expertise de la tractopelle ; qu'il ressort en effet du rapport d'expertise de la tractopelle l'existence d'un défaut de sécurité dû principalement à l'inefficacité du système de freinage de l'engin (tant le frein de parc que le frein à pied) ; que selon l'expert, le non-fonctionnement du frein de parc peut expliquer que la tractopelle ait reculé alors que la victime était descendue de la machine ; que par jugement du 19 septembre 2011, le tribunal correctionnel d'Ajaccio a condamné M. T... pour homicide involontaire ; que M. T... a interjeté appel de cette décision ; qu'il est décédé le 28 octobre 2008 avant que l'affaire ne soit évoquée par la cour d'appel de Bastia ; qu'en tout état de cause, il est établi, au regard des éléments rappelés ci-dessus, différents manquements aux règles de sécurité à l'encontre de l'employeur ; qu'en omettant volontairement de prendre les mesures de sécurité et de prévention des risques qui s'imposaient, l'employeur a commis, alors qu'il devait avoir conscience du danger, une faute inexcusable au sens de l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale ; que, sur la faute de la victime, la faute inexcusable de la victime s'entend comme la faute volontaire du salarié, d'une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience ; que constitue ensuite une faute intentionnelle de la victime au sens de l'article L 453-1, alinéa 1, du code de la sécurité sociale la faute résultant d'un acte volontaire accompli avec l'intention de causer des lésions corporelles, ce qui implique l'intention de créer le dommage et non seulement le risque ; que les consorts T... invoquent la faute inexcusable de la victime qui a travaillé pour le compte de M. T... alors qu'elle était bénéficiaire d'une pension d'invalidité catégorie 2, versée par la caisse de mutualité sociale agricole de la Corse et qu'elle n'avait plus le droit d'exercer une activité professionnelle ; qu'il n'est pas contesté que M. O... avait été reconnu par un médecin du travail invalide de 2e catégorie, soit « absolument incapable d'exercer une activité professionnelle quelconque » et qu'il percevait une pension d'invalidité depuis le 4 février 2002 d'un montant de 691,27 € ; que s'il apparaît que M. O... était en fraude, travaillait une semaine par mois au risque notamment de perdre le bénéfice de sa pension d'invalidité et devoir la rembourser à la caisse de mutualité sociale agricole de la Corse, cette situation ne constitue cependant pas une « faute volontaire du salarié, d'une exceptionnelle gravité, exposant sans raison valable son auteur à un danger dont il aurait dû avoir conscience » ; que des circonstances de l'accident, il ne ressort pas ensuite que la victime ait eu l'intention volontaire de s'affranchir des règles de sécurité pour créer un dommage contre elle-même ou autrui ; que dès lors, il y a lieu d'écarter la faute intentionnelle ou inexcusable de la victime au sens de l'article L 453-1 du code de la sécurité sociale ;
1) alors que les arrêts qui ne sont pas motivés sont déclarés nuls, et que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en négligeant de répondre aux moyens de défense des ayants droit de l'employeur faisant valoir que les circonstances de l'accident étaient indéterminées, que l'état de santé de la victime (en invalidité, diabète, hypertension, prise de Mediator) empêchait de retenir une faute inexcusable de l'employeur, que les fautes de la victime, en invalidité lui interdisant toute activité, ce qu'elle avait caché à l'employeur, qui n'avait pour cette raison pas déclaré la victime qui avait refusé de l'être par le biais de chèques emploiservice puisqu'il percevait une pension d'invalidité, avaient la nature de fautes exonératoires de la responsabilité de l'employeur, ou pour le moins compensatoires, la cour d'appel n'a pas motivé sa décision, et a violé en conséquence l'article 455 du code de procédure civile ;
2) alors au demeurant qu'en relevant que la victime n'était pas déclarée, qu'elle n'avait reçu aucune formation à la conduite de l'engin dont elle se servait, que celui-ci était affecté de graves dysfonctionnements en raison de son défaut d'entretien, de sa vétusté et du fait que son système de freinage était totalement inexistant, ce qui pouvait expliquer l'accident, sans constater de lien de causalité entre ces fautes et l'accident dont il n'existait aucun témoin, la cour d'appel a violé l'article L 452-1 du code de la sécurité sociale ;
3) alors en particulier qu'en relevant que le non-fonctionnement du frein de parc peut expliquer que la tractopelle ait reculé alors que la victime était descendue de la machine, la cour d'appel, qui s'est prononcée par motifs hypothétiques, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4) alors enfin que la victime ne peut prétendre au régime d'indemnisation des accidents du travail si elle a commis une faute volontaire d'une exceptionnelle gravité l'exposant sans raison valable à un danger dont elle aurait dû avoir conscience ; qu'ayant constaté que la victime était invalide 2e catégorie, soit absolument incapable d'exercer une profession quelconque, et qu'elle avait en connaissance de cause effectué des travaux agricoles particulièrement pénibles et dangereux, en jugeant péremptoirement que ces éventuels manquements fautifs n'avaient en rien contribué à la survenance de l'accident, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 453-1 du code de la sécurité sociale.Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mmes D..., R..., P..., R..., R..., Y... O... et MM. A..., E... et U... O... .
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir limité le préjudice moral subi par Y... O... à la somme de 12 000 € ;
Aux motifs que c'est à bon droit et en tenant compte à la fois de la douleur morale ressentie à raison de la mort brutale de leur auteur et de la plus ou moins grande proximité géographique que certains de ses enfants pouvaient entretenir avec la victime en raison de leur âge excédant ou non la majorité civile, que le tribunal des affaires de sécurité sociale a fixé à 18 000 € à chacune la réparation du préjudice moral de sa veuve et de chacune de ses deux filles P... et R... encore mineures et à 12 000 € chacun l'indemnisation du préjudice moral de R..., G..., U..., Y... et R... ;
Alors que le principe de la réparation intégrale du préjudice impose de rétablir aussi exactement que possible l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu, sans qu'il n'en résulte aucune perte ni profit pour elle ; qu'en l'espèce, après avoir évalué le préjudice des enfants mineurs de la victime à la somme de 18 000 € et celui des enfants majeurs à celle de 12 000 €, la cour d'appel, qui n'a alloué que la somme de 12 000 € à Y..., née le [...], mineure âgée de 16 ans au moment du décès de son père survenu le 23 septembre 2005, a violé le principe de la réparation intégrale du préjudice.




Civ.2 28 novembre 2019 n° 18-23.987

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 12 octobre 2018), que W... U..., salarié en qualité de chef d'équipe régulateur de la société Loomis France (l'employeur), s'est suicidé à son domicile, le [...], quelques heures après avoir pris connaissance de la lettre de notification de son licenciement pour faute grave ; que la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (la caisse) ayant reconnu, après enquête, le caractère professionnel du décès, l'employeur a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ; que Mme O..., veuve de W... U..., et Mme U..., fille de la victime, ont saisi une juridiction de sécurité sociale aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ; que les deux instances ont été jointes à hauteur d'appel ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le décès de W... U... a un caractère professionnel ayant pour cause la faute inexcusable de l'employeur, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque le décès dont il est demandé la prise en charge résulte d'un comportement intentionnel de la victime et est d'origine multifactorielle, le lien de causalité avec les conditions de travail doit avoir un caractère déterminant pour emporter qualification en accident du travail ; qu'au cas présent, il résulte des propres constatations des juges du fond et des pièces versées aux débats que M. U... avait été hospitalisé deux mois pour dépression et suivait des traitements médicamenteux très lourds pour soigner son alcoolisme ; qu'en reconnaissant néanmoins le caractère professionnel du suicide du salarié, survenu à son domicile, sans rechercher si le travail était la cause principale et déterminante de l'acte intentionnel de la victime et si le suicide n'était pas, en réalité, la résultante de l'état pathologique antérieur (dépression et alcoolisme) de la victime, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que lorsque le décès dont il est demandé la prise en charge résulte d'un comportement intentionnel de la victime qui était sous l'emprise de l'alcool au moment de son décès, le lien de causalité avec les conditions de travail doit avoir un caractère déterminant pour emporter qualification en accident du travail ; qu'au cas présent, l'employeur faisait valoir qu'il résultait des éléments versés aux débats, et notamment de l'audition de M. G..., que M. U... était sous l'emprise d'un état alcoolique lorsqu'il s'était suicidé ; que le geste de M. U... avait notamment été provoqué par cet état d'ivresse tandis que le salarié, qui suivait un lourd traitement pour soigner son addiction à l'alcool, ne buvait plus depuis plusieurs années ; qu'il appartenait aux juges du fond de rechercher, comme il leur était demandé, si nonobstant l'absence d'analyses toxicologiques versées aux débats, il résultait des pièces produites que M. U... était sous l'emprise de l'alcool lorsqu'il s'était suicidé, cet élément étant de nature à démontrer que le suicide du salarié avait une cause étrangère à son travail ; qu'en se bornant à énoncer sur ce point qu' « il ne peut être considéré qu'il est établi, comme l'affirme l'employeur, que plusieurs heures se seraient écoulées entre la connaissance du licenciement et le suicide de M. U... au cours desquelles il aurait consommé de l'alcool, même si le médecin légiste a noté dans son rapport une odeur d'alcool lors de la dissection, les expertises des prélèvements réalisés (en particulier l'expertise toxicologique) n'étant pas jointes à la transmission reçues par la caisse », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ;
3°/ que le juge ne peut refuser de statuer, en se fondant sur l'insuffisance des preuves qui lui sont fournies par les parties ; qu'il lui appartient d'ordonner, le cas échéant, une expertise ou la production de pièces supplémentaires ; qu'au cas présent, l'employeur faisait valoir que M. U... était sous l'emprise d'un état alcoolique lorsqu'il s'était suicidé à son domicile, en se fondant notamment sur le rapport d'autopsie et sur le témoignage de M. G... ; que la cour d'appel a refusé de statuer sur la question de l'imprégnation alcoolique de M. U..., en énonçant que ce fait ne pouvait être considéré comme établi, en l'absence des résultats de l'expertise toxicologique, sans pour autant estimer que M. U... était sobre lors de son suicide ; qu'en refusant de se prononcer sur l'état alcoolique de M. U... au moment de son suicide, tandis qu'il lui appartenait d'ordonner la production de l'expertise toxicologique si elle estimait cette pièce nécessaire pour démontrer ce fait – expertise dont ne disposait pas l'employeur – la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt constate que W... U... a pris connaissance de son licenciement par un appel téléphonique de son épouse vers 11 heures, le [...] ; qu'il a, alors, contacté la responsable des ressources humaines, rédactrice de la lettre de licenciement, en faisant état de ce qu'il n'avait pas reçu de convocation à l'entretien préalable ; qu'il a également contacté plusieurs personnes, entre 14 heures 30 et 15 heures 57, exprimant le choc ressenti à l'annonce de cette nouvelle et évoquant auprès de l'un d'eux son intention de mettre fin à ses jours ; que le corps sans vie de W... U... a été découvert à son domicile à 18 heures 42, le médecin légiste ne se prononçant pas sur l'heure exacte du décès ; que, si le rapport médico-légal fait état d'une odeur d'alcool lors de la dissection, les expertises des prélèvements, en particulier l'expertise toxicologique, n'ont pas été communiquées, de sorte qu'il ne peut être considéré comme établi que W... U... se serait alcoolisé durant les heures écoulées entre la connaissance du licenciement et le suicide ; que la lettre retrouvée à côté de son corps corrobore le lien entre le suicide et la connaissance du licenciement puisqu'elle désigne le responsable de l'agence, comme un « harceleur malin et courtois » ajoutant « voilà, (...) vous avez gagné. Ma famille a perdu » ; qu'il résulte de ces éléments convergents que l'élément déclencheur du suicide de W... U... a été l'annonce de son licenciement, de sorte que son décès présente un lien étroit avec son travail justifiant la reconnaissance de son caractère professionnel ;
Qu'en l'état de ces constatations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, dont elle a fait ressortir que le suicide est intervenu par le fait du travail, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérantes, ni d'ordonner d'office la communication du rapport d'expertise toxicologique, a légalement justifié sa décision ;
Et sur le second moyen :
Attendu que l'employeur fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ qu'aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance ; que l'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable ; que la convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, la lettre indiquant l'objet de la convocation ; que l'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation ; que l'employeur a pour seule obligation de convoquer régulièrement le salarié pour un entretien préalable, peu important l'absence d'accusé de réception de la lettre de convocation, lorsqu'elle est envoyée en recommandé ; que l'envoi de la lettre de convocation du salarié à un entretien préalable au licenciement en dehors du temps de travail, par exemple durant les congés du salarié, ne constitue pas une irrégularité de procédure ; que le salarié n'est pas tenu de se rendre à l'entretien préalable, de sorte que n'est pas irrégulier, ni déloyal, le licenciement d'un salarié qui ne s'est pas rendu à ce entretien ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté que M. U... était en congés du 10 au 17 septembre ; que l'employeur l'a convoqué par lettre recommandée avec avis de réception le 10 septembre 2012, pour un entretien fixé au 19 septembre 2012 ; que M. U... est retourné au travail le 18 septembre 2012 et qu'il ne s'est pas présenté à l'entretien préalable du 19 septembre ; que par lettre du 26 septembre, réceptionnée le 27 septembre, l'employeur a licencié M. U... pour des faits datés des 2, 3, 18 août et 4 septembre 2012 ; que le 28 septembre, soit postérieurement au licenciement, la lettre de convocation à l'entretien préalable est retournée à l'employeur avec la mention « non réclamée » ; qu'il se déduisait de ces constatations que l'employeur, qui était seulement tenu de convoquer le salarié à un entretien préalable au moins cinq jours ouvrables avant l'entretien et dans le délai de deux mois à compter du jour où il avait eu connaissance des faits fautifs, n'a commis aucune faute dans le déroulement de la procédure de licenciement ; que le fait que la lettre de convocation à l'entretien préalable ait été envoyée pendant les congés du salarié, que l'employeur ne se soit pas assuré que M. U... avait bien reçu la lettre, et que les faits reprochés datent des 2, 3, 18 août et 4 septembre, ne peuvent constituer des fautes ou une « gestion déloyale » de la procédure de licenciement ; qu'en jugeant pourtant que « s'il est tout à fait exact que le salarié peut librement choisir de se rendre ou pas à un entretien préalable, pour autant le respect loyal de la procédure impose à l'employeur de s'assurer que son salarié, qui était en congés lors de l'envoi de la convocation et qui ne s'est pas présenté à cet entretien, alors qu'il était sur son lieu de travail ce jour-là, a bien eu connaissance de celle-ci, d'autant qu'il avait précédemment relevé de sa part des comportements « inappropriés » attribués à la prise de médicaments » et que « la gestion déloyale de la procédure de licenciement caractérisant la faute inexcusable est réelle, compte tenu d'une part de l'envoi (le 10 septembre 2012)pendant les congés du salarié de la convocation à un entretien préalable fixé 2 jours après la fin des congés (19 septembre) alors que les fautes reprochées sont datées par la lettre de licenciement des 2 et 18 août 2012 (outre deux absences « inopinées » des 3 et 4 septembre) et que le salarié est licencié, sans que l'employeur se soit assuré qu'il avait bien eu connaissance de sa convocation à l'entretien préalable », pour retenir la faute inexcusable de l'employeur, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser l'existence d'une faute commise par l'employeur, violant les articles L. 452-1 du code de la sécurité sociale et les articles L. 1232-2 et L. 1332-4 du code du travail ;
2°/ que ne met pas en oeuvre de manière tardive et déloyale la procédure de licenciement l'employeur qui envoie à son salarié une lettre de convocation à un entretien préalable six jours après le dernier fait fautif reproché ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté que les faits fautifs reprochés dataient des 2, 3, 18 août et 4 septembre 2012 ; que M. U... a été convoqué à un entretien préalable par lettre du 10 septembre 2012, pour un entretien prévu le 19 septembre 2012 ; qu'il ressortait de ces constatations que la mise en oeuvre de la procédure de licenciement par l'employeur, le 10 septembre 2012, n'était pas tardive au regard du dernier fait fautif reproché ; qu'en jugeant pourtant que l'employeur avait géré manière déloyale la procédure de licenciement, caractérisant une faute inexcusable, au motif notamment de l'envoi par l'employeur, le 10 septembre 2012, de la lettre de convocation « alors que les fautes reprochées sont datées par la lettre de licenciement des 2 et 18 août 2012 (outre deux absences « inopinées » des 3 août et 4 septembre) », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant les articles L. 452-1 du code de la sécurité sociale et l'article L. 1332-4 du code du travail ;
3°/ que ne met pas en oeuvre de manière déloyale la procédure de licenciement l'employeur qui envoie à son salarié, durant ses congés, une lettre de convocation à un entretien préalable dont la date est fixée sur le temps de travail du salarié ; qu'en jugeant pourtant que l'employeur avait géré de manière déloyale la procédure de licenciement, caractérisant une faute inexcusable, au motif notamment de l'envoi par l'employeur, le 10 septembre 2012, de la lettre de convocation à l'entretien préalable durant les congés du salarié, tandis qu'un tel fait ne pouvait caractériser une faute de l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L.452-1 du code de la sécurité sociale et L. 1232-2 du code du travail ;
4°/ qu'il résultait des pièces versées aux débats que Mme U... avait réceptionné l'avis de passage de la lettre convoquant le salarié à l'entretien préalable, mais avais omis d'aller chercher le document au bureau de poste ; que l'absence de réception, par M. U..., de sa convocation à l'entretien préalable, n'était pas imputable à l'employeur, nonobstant le fait que la lettre ait été envoyée durant les congés du salarié ; qu'en jugeant néanmoins que l'employeur avait géré de manière déloyale la procédure de licenciement, caractérisant une faute inexcusable, au motif notamment de l'envoi par l'employeur, le 10 septembre 2012, de la lettre de convocation à l'entretien préalable durant les congés du salarié, et du fait quel'employeur ne s'était pas assurée que M. U... avait bien reçu la convocation, la cour d'appel a violé les articles L. 452-1 du code de la sécurité sociale et L. 1232-2 du code du travail ;
5°/ que, lorsque le décès d'un salarié dont il est demandé la prise en charge, est d'origine multifactorielle et résulte d'un comportement intentionnel de la victime, la faute reprochée à l'employeur doit avoir un caractère déterminant dans le geste du salarié pour que la faute inexcusable de ce dernier soit reconnue ; qu'au cas présent, à supposer qu'une faute puisse être reprochée à l'employeur dans la gestion de la procédure de licenciement, le caractère causal et déterminant de ladite faute dans le geste de M. U... devait être caractérisé ; qu'en se bornant à énoncer que le décès de M. U... avait pour cause la faute inexcusable de l'employeur, sans caractériser en quoi le simple fait d'avoir omis de vérifier que le salarié avait bien reçu la convocation à l'entretien préalable au licenciement, aurait été déterminant dans le suicide de M. U..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
6°/ que, subsidiairement, l'existence d'une faute inexcusable nécessite que soit caractérisé un danger normalement prévisible dont l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience et à l'égard duquel il n'a pas pris de mesure de prévention ; que la simple connaissance, par l'employeur, d'une « fragilité psychologique » d'un salarié, en l'absence de toute tentative de suicide précédente et tandis que le médecin du travail l'a déclaré apte sans restriction, à chaque visite de reprise, ne peut suffire à caractériser le fait que l'employeur avait, ou aurait dû avoir conscience du risque de suicide du salarié si ce dernier venait à être licencié, même brutalement ; que ne commet pas une faute inexcusable l'employeur qui ne s'est pas assuré que le salarié, absent lors de l'entretien préalable, avait bien reçu la lettre de convocation ; qu'au cas présent, la cour d'appel a constaté qu'à l'issue des deux visites de reprise, les 4 et 11 juin 2012, le médecin du travail avait déclaré M. U... apte sans restriction et que le salarié avait fait l'objet de cinq examens par le médecin entre le 2 janvier et le 25 juillet 2012 ; que la cour d'appel a cependant retenu la faute inexcusable de la société Loomis, en énonçant que cette dernière avait connaissance de la fragilité psychique du salarié et « par conséquent ne pouvait pas ignorer le risque auquel il l'exposait en rompant le contrat de travail sans s'assurer que son absence à l'entretien préalable ne résultait pas de l'ignorance de la convocation » ; qu'en statuant ainsi, tandis que la simple connaissance, par l'employeur, d'une fragilité psychologique de son salarié, ne peut suffire à caractériser le fait que l'employeur avait, ou aurait dû avoir conscience, du risque de suicide du salarié, pourtant déclaré apte à chaque visite par la médecine du travail, la cour d'appel a violé l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que l'arrêt constate d'abord, que le chef d'agence, se questionnant sur l'aptitude de W... U..., a écrit à plusieurs reprises à la médecine du travail pour faire état du comportement curieux de celui-ci, de ses absences régulières, d'une chute alors qu'il se trouvait dans le fourgon blindé, et de propos imputés à un lourd traitement médicamenteux, de sorte que l'employeur connaissait la fragilité psychologique de son salarié ; qu'il relève ensuite, que le licenciement présentait un caractère brutal pour un salarié ayant plus de 23 ans d'ancienneté et n'ayant pas fait l'objet de sanctions disciplinaires antérieurement ; qu'il retient enfin que la procédure de licenciement était déloyale en raison, d'une part, de l'envoi, pendant les congés du salarié, de la convocation à un entretien préalable fixé deux jours après la fin desdits congés alors que les fautes reprochées sont datées des 2 et 18 août, outre deux absences « inopinées » des 3 août et 4 septembre 2012, d'autre part, du fait que le salarié a été licencié, sans que l'employeur se soit assuré qu'il avait bien eu connaissance de sa convocation à l'entretien préalable, de sorte que son absence à l'entretien ne résultait pas de l'ignorance de la convocation ;
Que de ces énonciations et constatations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait et de preuve débattus devant elle, la cour d'appel, qui n'avait pas à rechercher si la faute inexcusable de l'employeur avait eu un caractère déterminant dans la survenance de l'accident, a pu déduire que l'employeur avait ou aurait du avoir conscience des risques psychologiques encourus par W... U... et qu'il n'avait pas mis en oeuvre les mesures nécessaires pour l'en préserver ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;




Civ.2 28 novembre 2019 n° 18-24.169

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 14 septembre 2018), queM. H... (la victime), ancien salarié de la société Kymmène Papeterie, devenue la société UPM France (l'employeur), a souscrit, le 22 juin 2015, une déclaration de maladie professionnelle pour une pathologie que la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges a prise en charge au titre du tableau n° 30 des maladies professionnelles ; que le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, subrogé dans les droits de la victime, a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de fixer à une certaine somme le préjudice d'agrément, alors, selon le moyen, que le préjudice d'agrément est celui lié à l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs ; qu'il en résulte que la victime d'une maladie professionnelle imputable à la faute inexcusable de l'employeur ne peut obtenir une indemnisation complémentaire au titre d'un préjudice d'agrément qu'à condition d'établir la pratique régulière d'une activité spécifique dont l'interruption consécutive au sinistre lui cause un préjudice distinct du déficit fonctionnel consécutif aux séquelles de la maladie ; que pour estimer que l'indemnisation du préjudice d'agrément était justifiée, la cour d'appel s'est contentée de relever que, selon des attestations, la victime « était une personne particulièrement active, qui pratiquait de nombreuses activités sportives et de loisir (marche, jardinage) qui ont cessé avec la maladie » ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à caractériser la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir antérieure à la maladie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 434-1, L. 434-2, L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que le préjudice d'agrément réparable en application de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale est constitué par l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs ;
Et attendu que l'arrêt relève qu'il résulte des témoignages produits aux débats que la victime était une personne particulièrement active, qui pratiquait de nombreuses activités sportives et de loisirs (marche, jardinage) qui ont cessé avec la maladie ;
Qu'ayant apprécié souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;




Civ.2 28 novembre 2019 n° 18-22.190

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Donne acte à la société Renault Retail Group de son désistement en ce qu'il est dirigé contre M. B... et contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 461-1, R. 411-1 et D. 461-29 du code de la sécurité sociale, le deuxième dans sa rédaction antérieure au décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009 ;
Attendu qu'il résulte des premier et troisième de ces textes qu'en cas de saisine d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dont l'avis s'impose à la caisse, l'information du salarié, de ses ayants droit et de l'employeur sur la procédure d'instruction et sur les points susceptibles de leur faire grief s'effectue avant la transmission du dossier audit comité régional ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la caisse primaire d'assurance maladie du Var (la caisse) a pris en charge au titre de la législation professionnelle, après avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, une maladie non désignée dans un tableau des maladies professionnelles, déclarée le 3 novembre 2009 par un salarié de la société Renault Retail Group (l'employeur) ; que contestant l'opposabilité de cette décision à son égard, cette dernière a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour rejeter ce dernier, l'arrêt retient qu'il convient de rappeler que l'article D. 461-30 édicte une formalité substantielle en ce qu'il fait obligation à la caisse d'aviser tant la victime que l'employeur de ce qu'elle saisit le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; que force est d'observer en l'état que la caisse primaire d'assurance maladie du Var démontre avoir satisfait à cette obligation dès lors qu'elle produit au titre de cette information, la copie du courrier qu'elle a adressé à l'assuré le 8 avril 2010, l'informant qu'elle saisissait le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, auquel elle a annexé l'accusé de réception du courrier identique adressé cette fois à l'employeur le même jour, lequel a été régulièrement signé par celui-ci le 15 avril 2010 ; qu'il se déduit nécessairement de cet accusé de réception, signé le 15 avril 2010 par l'employeur, qu'elle a bien été informée par la caisse de la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles en conformité avec les dispositions de l'article D. 461-3 du code de la sécurité sociale ; qu'il s'établit en outre qu'à l'issue de l'enquête à laquelle la caisse s'est livrée et de la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, elle a régulièrement avisé l'employeur de la possibilité pour lui de consulter le dossier de son salarié le 31 mars 2011 (accusé de réception signé de l'employeur le 4 avril 2011) pour une décision à intervenir le 21 avril 2011, faculté dont l'employeur a au demeurant fait usage ; qu'il s'en déduit que la procédure de la caisse a été conduite régulièrement au contradictoire de l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que la caisse n'avait pas mis l'employeur en mesure de présenter ses observations avant la transmission du dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, de sorte que la décision de prise en charge de la maladie au titre de la législation professionnelle était inopposable à l'employeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, l'annulation du chef de dispositif par lequel la cour d'appel a déclaré opposable à l'employeur la décision de prise en charge de la maladie professionnelle entraîne, par voie de conséquence, celle du chef de dispositif par lequel la cour d'appel a condamné l'employeur à rembourser à la caisse les sommes dont celle-ci serait amenée à faire l'avance en application des dispositions de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;




Civ.2 7 novembre 2019 n° 18-21.885

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en sa première branche, du pourvoi principal et le moyen unique, pris en sa première branche, du pourvoi incident, qui sont similaires :
Vu l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, docker intermittent sur le port de Marseille entre 1977 et 1987, puis à compter de 1993, M. W... a déclaré, le 5 juin 2013, un cancer broncho-pulmonaire pris en charge par la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, au titre du tableau n° 30 des maladies professionnelles ; que l'intéressé a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de ses employeurs, les sociétés Somotrans, Intramar, Socoma, Marseille manutention, UPA, ainsi que l'association Gemest ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. W..., l'arrêt retient en substance que l'intéressé est tenu de démontrer l'existence de la faute inexcusable qu'il reproche aux sociétés ; que le caractère généraliste des attestations produites par la victime ne permet pas de mettre en exergue la commission par les sociétés intimées, non précisément répertoriées, d'une faute inexcusable ; que M. W... ne justifie que de vacations très éparses et de courte durée sur les périodes de temps considérées, qui ne permettaient pas de retenir qu'il y avait eu continuité de l'éventuelle exposition au risque ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à écarter à la charge de chacun des employeurs successifs de la victime l'existence d'une faute inexcusable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;




Civ.2 7 novembre 2019 n° 18-21.330

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique du pourvoi principal, qui est recevable :
Vu l'article R. 441-14 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction modifiée par le décret n° 2009-938 du 29 juillet 2009, applicable au litige, ensemble l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu que le premier de ces textes régit exclusivement la procédure applicable à la prise en charge d'un accident du travail, d'une maladie professionnelle ou d'une rechute au titre de la législation professionnelle ; qu'il en résulte que si l'employeur peut soutenir, en défense à l'action en reconnaissance de la faute inexcusable introduite par la victime ou ses ayants droit, que l'accident, la maladie ou la rechute n'a pas d'origine professionnelle, il n'est pas recevable à contester la décision de prise en charge de l'accident, de la maladie ou de la rechute par la caisse primaire au titre de la législation sur les risques professionnels ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Lidl (l'employeur) a déclaré le 25 novembre 2011, à la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines (la caisse), un accident survenu à l'une de ses salariées en indiquant que « le 23 novembre 2011 à 15 heures 30, Mme Y..., lors de la mise en rayons, a ressenti une douleur dans l'épaule gauche » ; que la caisse ayant, par une décision du 20 février 2012, notifiée à l'employeur, pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle, Mme Y... a saisi une juridiction de sécurité sociale pour faire reconnaître une faute inexcusable de son employeur ; que celui-ci, qui n'avait pas exercé un recours contentieux contre la prise en charge de l'accident par la caisse, a demandé que la décision de prise en charge ne lui soit pas opposable ;
Attendu que l'arrêt dit la décision de la caisse primaire d'assurance maladie des Yvelines de prendre en charge l'accident déclaré par Mme Y... le 25 novembre 2011 inopposable à l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle était saisie d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, la cour d'appel, qui a modifié les termes du litige, a violé les textes susvisés ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen unique du pourvoi incident annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;




Civ.2 7 novembre 2019 n° 18-22.102

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 461-1, et R. 142-24-2, alinéa 1, devenu R. 142-17-2, alinéa 1, du code de la sécurité sociale, le premier dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017, ensemble l'article L. 452-1 du même code ;
Attendu qu'aux termes du deuxième de ces textes, lorsqu'un différend porte sur l'origine professionnelle d'une maladie reconnue dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas du premier, le tribunal recueille préalablement l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme U..., salariée de la société Tiflex (l'employeur) entre 1972 et 2010, a déclaré une maladie, prise en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Ain (la caisse), après avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles (le comité régional) ; qu'elle a saisi une juridiction de sécurité sociale aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que l'employeur n'apporte aucun élément sérieux démontrant qu'entre 1972 et 1986, il n'utilisait pas de benzène ou de produit dérivé du benzène entrant dans la composition des encres auxquelles Mme U... était exposée et permettant donc de contredire le caractère professionnel de la maladie tel que résultant de l'enquête administrative et de l'avis du comité régional ;
Qu'en statuant ainsi, sans recueillir au préalable l'avis d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, alors que le caractère professionnel de la maladie était contesté par l'employeur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;




Soc. 6 novembre 2019 n° 18-20.837

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 8 février 2018), que M. C..., engagé le 19 avril 2004 en qualité de conducteur d'engins polyvalents par la société Entreprise Hervé & Cie (la société), a été victime d'un accident du travail survenu le 12 avril 2010 ; qu'à la date de consolidation du 28 mars 2011, la caisse primaire d'assurance maladie n'a pas retenu de séquelle indemnisable ; que le 14 septembre 2011, le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement ; que par décision du 14 janvier 2015, la juridiction de sécurité sociale a dit que l'accident du travail était dû à la faute inexcusable de l'employeur et s'est déclarée incompétente pour statuer sur la demande en paiement de dommages-intérêts au titre de la perte d'emploi consécutive au licenciement pour inaptitude ; que le salarié a ensuite saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de dommages-intérêts au titre de la perte d'emploi due à la faute inexcusable de la société, de la perte des droits à la retraite et du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de déclarer ces demandes irrecevables alors, selon le moyen, que dans les rapports entre salarié et employeur, la compétence du conseil de prud'hommes n'est exclue que lorsque la loi attribue à une autre juridiction une compétence particulière, telle la compétence de principe des juridictions de sécurité sociale en matière d'accidents du travail prévue par le code de la sécurité sociale ; que lorsque le salarié victime d'un accident du travail souffre d'une incapacité permanente, il peut bénéficier d'une rente qui répare notamment les pertes de gains professionnels et la perte des droits à la retraite ; qu'en cas de faute inexcusable de l'employeur, le salarié peut obtenir devant les juridictions de sécurité sociale la majoration de cette rente, ainsi d'ailleurs que la réparation des préjudices complémentaires de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale non couverts par la rente ; qu'en revanche, lorsqu'aucune incapacité n'est reconnue au salarié et qu'aucune rente ne lui est donc servie, la juridiction prud'homale retrouve sa compétence de principe pour statuer sur sa demande de réparation de sa perte d'emploi ainsi que de ses droits à la retraite ; qu'en l'espèce, considéré comme n'ayant pas de séquelle indemnisable au sens du droit de la sécurité sociale, M. C... n'a bénéficié d'aucune rente et a fortiori d'aucune majoration de rente malgré la faute inexcusable de son employeur ; qu'il ne pouvait donc obtenir que de la juridiction prud'homale la réparation de sa perte d'emploi ainsi que de ses droits à la retraite ; qu'en jugeant pourtant que seule la juridiction de sécurité sociale était compétente, peu important que le salarié n'ait pas bénéficié d'une rente, la cour d'appel a violé l'article L. 1411-1 du code du travail et les articles L. 451-1, L. 452-1, L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que, si la juridiction prud'homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail, relève, en revanche, de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale l'indemnisation des dommages résultant d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, qu'ils soient ou non la conséquence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ;
Et attendu qu'ayant constaté que sans contester le bien-fondé du licenciement, le salarié demandait en réalité la réparation de préjudices nés de l'accident du travail dont il avait été victime, la cour d'appel en a exactement déduit que, peu important que le taux d'incapacité du salarié lui permette ou non de bénéficier d'une rente, de telles demandes ne pouvaient être formées devant la juridiction prud'homale ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;




Civ.2 10 octobre 2019 n° 18-17.602

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en ses quatre dernières branches :
Vu l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant signé, le 18 avril 2014, une convention de stage avec la Fondation Edith Seltzer (la Fondation), gestionnaire du centre de rééducation professionnelle Chantoiseau (le CRP) pour la période du 26 mars au 22 août 2014, M. T..., reconnu travailleur handicapé, a effectué un stage auprès de l'hôtel d'Anjou, entreprise d'accueil ; qu'il a été victime, le 8 juillet 2014, d'un accident pris en charge, au titre de la législation professionnelle, par la caisse primaire d'assurance maladie de Maine-et-Loire ; que M. T... a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de la Fondation ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt relève que le certificat médical initial du 9 juillet 2014 mentionne une « lombalgie droite irradiation sciatique réapparue après effort port de charge » ; que l'accident est apparu alors que M. T... exécutait un travail manuel de « room service » ; qu'afin d'apprécier s'il y a bien faute inexcusable de l'employeur, il convient de rechercher, ainsi que le soutient M. T..., si celui-ci avait une quelconque contre-indication à la réalisation de travaux de « room service » et si la Fondation en avait connaissance ou aurait dû en avoir connaissance ; que M. T... exerçait le stage dans le cadre d'une décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées au regard de son statut de travailleur handicapé ; qu'il résulte des articles L. 5213-1 et suivants du code du travail que les centres d'éducation, de rééducation et de formation professionnelle sont notamment chargés d'accompagner les travailleurs handicapés dans le retour à l'emploi en concertation avec la CDAPH ; que ces centres de formation ont nécessairement connaissance de la situation de santé des stagiaires pour pouvoir envisager une formation compatible avec leur état de santé ; que c'est ainsi que le CRP, dans un courrier du 13 février 2014, a indiqué à M. T... qu'« afin de nous permettre de vous convoquer en qualité de travailleur handicapé, la MDPH devra nous faire parvenir les pièces suivantes : () Dossier médical détaillé et complet » ; que le livret d'accueil prévoit que le stagiaire fait l'objet d'un suivi médical assuré par de nombreux professionnels ; que ce suivi commence dès le début de la formation par un rendez-vous du stagiaire avec le médecin et l'infirmière ; que le CRP, qui s'était engagé à procéder à ce rendez-vous, ne donne aucune information sur son déroulement et les conclusions sur l'aptitude de M. T... ; qu'il résulte de ces éléments que, si M. T... ne démontre pas que la Fondation avait bien connaissance de son état de santé, cette preuve est toutefois difficile à apporter dès lors que c'était au CRP de demander son dossier médical à la CDAPH, et non au stagiaire de le transmettre ; que par ailleurs, seul le CRP en possession du dossier peut apporter cette preuve, mais qu'il ne produit, dans le cadre de la présente instance, que le livret d'accueil ; qu'en tout état de cause, au vu de ses missions, il appartenait au CRP de ne débuter l'accueil du stagiaire qu'en étant en possession de l'ensemble des éléments médicaux ayant conduit à la reconnaissance de travailleur handicapé, éléments indispensables au suivi effectif du stagiaire, notamment dans la partie pratique de la formation ; que M. T... justifie de sa situation par les conclusions médicales établies dans le cadre de sa première formation ; que le médecin qui l'a examiné à cette occasion conclut le 2 septembre 2013 que la déficience est la conséquence d'un « accident du travail le 6/10/2006 sur un port de charge : lombosciatique droite aiguë sans indication opératoire » ; que le médecin précise au titre des capacités/incapacités : « contre-indication au port de charges, à l'antéflexion, la station assis ou debout prolongée. Il conduit sur de petites distances » ; que ces éléments médicaux sont confirmés par les éléments produits sur son précédent accident du travail pour des problèmes de dos pour lequel une rente lui était attribuée en 2008, témoignant de la persistance de séquelles et par le fait que l'avis favorable de la CDAPH visait une formation d'agent d'accueil c'est-à-dire un poste sans manutention ; que la Fondation, gestionnaire du CRP, ne peut valablement se dédouaner de sa responsabilité en indiquant que M. T... a mentionné sur son livre d'accueil qu'aucun aménagement de poste n'était à prévoir alors même qu'il lui appartenait de se renseigner sur l'état de santé de M. T... ; que par ailleurs, cette mention de M. T... s'entendait dans le cadre d'une formation administrative pour laquelle il pouvait envisager de prendre un poste sans aménagement, mais pas pour des fonctions de « room service » auxquelles il ne pouvait envisager qu'il serait affecté au moment de son inscription à la formation ; que de la même manière, l'acceptation de M. T... à la réalisation des tâches ne saurait autoriser à l'affecter sur des tâches incompatibles avec son état de santé alors même que la mission du CRP, telle que fixée par les textes mais aussi par le contrat de séjour, est de pourvoir à la qualification de personnes handicapées afin de permettre leur insertion et en offrant une prise en charge médico-psycho-sociale du handicap ; qu'en conséquence, il est établi que la Fondation, soit n'a pas mis en oeuvre les mesures nécessaires pour respecter les restrictions d'aptitude de M. T..., soit n'a pas mis en oeuvre la procédure indispensable pour établir et vérifier si l'état de santé de M. T... était compatible aux tâches confiées ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser la conscience que la Fondation, qui avait la qualité d'employeur au sens du texte susvisé, avait ou aurait dû avoir du danger auquel elle exposait son stagiaire avant l'accident, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;




Civ.2 10 octobre 2019 n° 18-20.801

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 452-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que, saisi d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, le juge est tenu de recueillir au préalable l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dès lors qu'il constate que la maladie déclarée, prise en charge par la caisse sur le fondement d'un tableau de maladie professionnelle, ne remplit pas les conditions de ce dernier et que sont invoquées devant lui les dispositions des troisième ou quatrième alinéas du second de ces textes ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, salarié de la société Eurovia Aquitaine (la société) entre le 1er juin 2006 et le 1er septembre 2014, M. U... a déclaré, le 21 juin 2010, une maladie prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie du Lot-et-Garonne (la caisse) au titre du tableau n° 16 bis des maladies professionnelles ; que cette décision a été déclarée inopposable à l'employeur ; que M. U... a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de la société ;
Attendu que pour faire droit à cette demande, l'arrêt, après avoir relevé que les conditions tenant à la durée d'exposition au risque prévues par le tableau n° 16 des maladies professionnelles n'étaient pas réunies, retient que M. U..., qui soutenait que sa maladie était directement causée par son travail habituel, rapporte la preuve du caractère professionnel de l'affection déclarée et de la faute inexcusable de la société ;
Qu'en statuant ainsi, sans recueillir l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;




Civ.2 10 octobre 2019 n° 18-11.791

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Constate la déchéance du pourvoi incident de M. Q... en ce qu'il est dirigé à l'encontre de la société Zurich insurance public limited company ;
Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Generali Iard ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Q... a été embauché en 1957 en qualité de mécanicien sur cargos par la société de Navigation des chargeurs réunis, laquelle a fait l'objet d'une restructuration en 1981 en un groupe composé de la société Chargeurs, société holding, et de la société Chargeurs réunis, sa filiale ; que reconnu atteint d'une maladie professionnelle inscrite au tableau n° 30 B des maladies professionnelles, par décision du 20 janvier 2011 de l'Etablissement national des invalides de la marine, M. Q... a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de la société Chargeurs ; que cette dernière ayant cédé son activité au groupe Bolloré, lequel l'ayant, à son tour, cédée au groupe CMA-CGM, la société CMA-CGM ainsi que les sociétés Zurich assurances et Generali Iard, assureurs de celle-ci, ont été appelées dans la cause par M. Q... ; que le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le FIVA), dont l'offre d'indemnisation a été acceptée par M. Q..., est intervenu à l'instance ;
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article L. 412-8, 8° du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013, applicable au litige, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2011-127 QPC du 6 mai 2011 ;
Attendu que pour dire que la maladie dont M. Q... est atteint est due à la faute inexcusable de la société Chargeurs, l'arrêt retient que M. Q... a été embauché en 1957 par la société de Navigation des chargeurs réunis qui a fait l'objet en fin 1981 d'une restructuration en un groupe dont la société Chargeurs SA était la holding et la société Chargeurs réunis sa filiale à 100 % nouvellement créée, reprenant alors le contrat de M. Q... ; que les divisions de l'activité de la société Chargeurs en filiales n'ont ainsi débuté qu'en fin 1981 ; qu'il en résulte que la société Chargeurs SA doit répondre de la faute inexcusable commise à l'encontre de M. Q... en tout état de cause jusqu'en 1981, peu important le contenu des contrats conclus alors entre la société mère et sa filiale ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser la qualité d'employeur de M. Q... de la société Chargeurs, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du FIVA, qui est recevable :
Vu l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Attendu que le préjudice d'agrément est constitué par l'impossibilité pour la victime de continuer à pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs ; que ce poste de préjudice inclut la limitation de la pratique antérieure ;
Attendu que pour rejeter la demande en indemnisation du préjudice d'agrément de M. Q..., l'arrêt retient qu'il résulte des attestations de Mme H... Q... et de Mme P... Q... que les activités de loisir de M. Q..., notamment le jardinage, se trouvent être réduites en raison des conséquences physiques de son affection ; que toutefois, le FIVA n'établit pas une impossibilité pour la victime de pratiquer ces activités, en l'occurrence simplement réduites par l'effet de la maladie ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;
Et sur la première branche du moyen unique du pourvoi incident de M. Q..., qui est recevable :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cour d'appel ayant mis hors de cause la société CMA-CGM au motif que, faisant droit à la demande principale tendant à voir examiner l'action en recherche de la faute inexcusable à l'encontre de la société Chargeurs prise comme ancien employeur de M. Q..., il n'y avait pas lieu d'examiner les demandes subsidiaires dirigées à l'encontre de la société CMA-CGM, la cassation de l'arrêt en ce qu'il statue sur la demande principale dirigée à l'encontre de la société Chargeurs entraîne, par voie de conséquence, la cassation du chef de la demande subsidiaire dirigée à l'encontre de la société CMA-CGM ;




Civ.2 19 septembre 2019 n° 18-15.487

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que salariée en qualité d'employée de restauration par la société Compass Group France (l'employeur) depuis le 1er août 2009, Mme D... a souscrit, le 7 mars 2011, une déclaration de maladie professionnelle, qui a fait l'objet d'une prise en charge au titre du tableau n° 57 des maladies professionnelles par décision du 21 octobre 2011 de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère (la caisse) ; que Mme D... a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur dans la survenance de cette maladie professionnelle, puis, qu'ayant été ultérieurement victime de deux rechutes prises en charge au titre de la législation professionnelle, elle a également demandé en cause d'appel la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur dans la survenance de ces rechutes ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu qu'il n'y pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes tendant à voir juger que les rechutes des 20 juin 2014 et 30 mars 2015 sont dues à la faute inexcusable de l'employeur, l'arrêt retient que la cour n'est saisie que de l'appel du jugement du 17 avril 2014 et donc de la demande de Mme D... tendant à voir reconnaître la faute inexcusable de l'employeur à la suite de la maladie professionnelle du 7 mars 2011 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ressortait de ses énonciations que les parties avaient soutenu oralement à l'audience leurs conclusions et que celles-ci ne comportaient aucun moyen tiré de l'irrecevabilité des demandes litigieuses, la cour d'appel qui a soulevé ce moyen d'office, sans avoir préalablement sollicité les observations des parties, a violé le texte susvisé ;




Civ.2 19 septembre 2019 n° 18-11.703

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme S... (la victime), salariée de la société Solev (l'employeur), a été victime, le 26 juin 2009, d'un accident, puis, les 1er février 2010 et 14 mars 2011, de deux rechutes, pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie du Lot (la caisse) ; qu'à la suite de la seconde rechute, la victime a engagé, le 21 janvier 2014, une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;
Attendu que la victime fait grief à l'arrêt de déclarer son action prescrite, alors, selon le moyen, que la décision prise par la caisse primaire d'assurance maladie étant sans incidence sur l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, l'assurée victime d'un accident du travail peut, en demande d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, contester la qualification d'un nouvel arrêt de travail en rechute d'accident du travail par la caisse de sécurité sociale et obtenir la reconnaissance de l'aggravation de son état de santé après expositions répétées aux risques qui ont entraîné le traumatisme initial ; qu'en l'espèce, pour dire que l'exposante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêt de travail du 14 mars 2011 ne constituait pas une rechute de l'accident du travail du 26 juin 2009, la cour d'appel s'est bornée à juger que la décision de la caisse était définitive, faute pour l'assurée de l'avoir contestée, de sorte qu'elle n'est plus fondée à la contester dans le cadre d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur au regard de l'indivisibilité de cette procédure avec la caractère définitif de la décision de la caisse qui est partie à l'instance ;
Mais attendu que la victime, dont la lésion a été prise en charge par la caisse à titre de rechute, suivant décision devenue définitive à son égard, n'est pas fondée à contester ultérieurement cette qualification à l'appui de son action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Et attendu qu'ayant constaté que la lésion survenue le 14 mars 2011 avait été prise en charge par la caisse à titre de rechute de l'accident initial du 26 juin 2009, par décision devenue définitive à l'égard de la victime, la cour d'appel a exactement déduit que cette dernière n'était pas fondée à soutenir que cette lésion constituait un nouvel accident du travail susceptible de faire courir à nouveau le délai de prescription biennale prévu par l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale ;




Civ.2 19 septembre 2019 n° 18-20.025

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Donne acte à la société Generali IARD du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé à l'encontre de la société Assurances Berger et fils ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. I... a été victime le 26 mai 2009 d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle ; que sollicitant la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur à l'origine de l'accident, il a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale qui a reconnu cette faute et a liquidé ses préjudices ;
Attendu que pour accorder à la victime une somme de 80 000 euros au titre de la réparation de la perte ou diminution de ses possibilités de promotion professionnelle, l'arrêt retient que ce poste de préjudice correspond aux séquelles qui limitent les possibilités professionnelles ou rendent l'activité professionnelle antérieure plus fatigante ou plus pénible ; qu'il a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité, mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme le préjudice subi qui a trait à l'obligation de devoir abandonner la profession qu'elle exerçait avant le dommage ; qu'il permet également d'indemniser le risque de perte d'emploi qui pèse sur une personne atteinte d'un handicap, la perte de chance de bénéficier d'une promotion, les frais nécessaires à un retour de la victime à la vie professionnelle ; qu'en l'espèce, M. I... était âgé de 27 ans au moment de l'accident, était couvreur, et l'expert indique clairement qu'il ne pourra plus exercer ce métier ; que l'expert précise qu'un « reclassement professionnel » sur un poste adapté sédentaire est donc nécessaire avec malheureusement un niveau de formation initiale qui n'ouvre guère de possibilités futures et conclut qu'il existe une incidence professionnelle indéniable avec nécessité de changement d'emploi imputable directement aux séquelles liées à l'accident ; que M. I... établit en outre qu'il avait une promesse d'embauche au 7 septembre 2009 par une entreprise de Charente-Maritime alors qu'il était employé dans le département du Cher au moment de son accident ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le préjudice ainsi réparé correspondait en réalité à celui de l'incidence professionnelle, déjà indemnisé par la rente majorée versée à la victime, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;




Soc. 18 septembre 2019 n° 18-12.910

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu que M. M..., engagé en qualité de magasinier le 28 septembre 1981 par la société Marsat, a vu son contrat de travail transféré à la société Euromaster France en 1997, et occupait en dernier lieu le poste de responsable territoire ; qu'il a été placé en arrêt maladie à compter du 3 juin 2014 régulièrement prolongé jusqu'au 31 mai 2015 et a été licencié le 16 janvier 2015 pour absence prolongée perturbant fortement le fonctionnement et la pérennité du territoire dont il avait la charge et rendant nécessaire son remplacement définitif ; que contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal du salarié :
Vu l'article L. 1226-9 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le licenciement était motivé par la situation objective de l'entreprise qui se trouvait dans la nécessité de pourvoir au remplacement du salarié dont l'absence prolongée perturbait le fonctionnement de l'entreprise, et que le salarié n'avait effectué aucune demande de reconnaissance d'accident du travail ou de maladie professionnelle ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que le salarié soutenait avoir été victime d'un accident du travail, et que l'application de l'article L. 1226-9 du code du travail n'est pas subordonnée à l'accomplissement des formalités de déclaration de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle à la caisse primaire d'assurance maladie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;




Civ.2 11 juillet 2019 n° 18-17.176

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


1°/ Sur la déchéance partielle du pourvoi :
Vu l'article 978 du code de procédure civile ;
Attendu que sur le pourvoi formé par Mme Q... contre un arrêt rendu au profit de l'Adapei, la caisse primaire d'assurance maladie d'Indre-et-Loire et le ministre chargé de la sécurité sociale, le mémoire contenant le moyen de droit invoqué contre la décision attaquée n'a pas été signifié au ministre chargé de la sécurité sociale ;
Qu'il s'ensuit que la déchéance partielle du pourvoi est encourue à l'égard du ministre chargé de la sécurité sociale ;
Constate la déchéance partielle du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;
2°/ Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Q... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision.
Moyen produit par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour Mme Q....
- IL EST FAIT GRIEF A l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement déféré et, statuant à nouveau, d'avoir débouté Mme E... Q... de sa demande tendant à voir juger que l'accident du travail dont elle a été victime le 23 octobre 2012 serait imputable à la faute inexcusable de l'association Adapei son employeur.
- AU MOTIF QUE attendu que l'employeur est, en vertu du contrat de travail qui le lie à son salarié, tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, et que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'il appartient au salarié de rapporter la preuve que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures pour l'en préserver ; Attendu qu'il ne fait pas de doute, et il n'est pas discuté par l'association Adapei, qu'au vu des troubles du comportement inhérents aux formes de handicaps et/ou à la personnalité de ses patients, et à l'existence d'antécédents d'agressions dans le service, les aides-soignantes étaient exposées à un risque avéré et identifié d'atteinte à leur intégrité physique et nerveuse en travaillant dans le foyer, en particulier le soir et la nuit ; Mais attendu que contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, il ressort des productions, des explications des parties et des éléments de la cause, que l'employeur avait pris les mesures nécessaires pour préserver Mme Q... du danger auquel elle était exposé ; Attendu que Mme Q... avait reçu une formation adaptée à son poste, y compris au service de nuit, du seul fait qu'elle est titulaire du diplôme d'état d'aide-soignante (cf sa pièce n° 18) ; Qu'il résulte, en effet, de cette qualification, qu'en exécution de l'arrêté du 22 octobre 2005 relatif à la formation conduisant à ce diplôme, elle avait reçu une formation théorique et pratique dans des services de santé mentale ou de psychiatrie ainsi que dans des services de moyen ou long séjour de personnes handicapées, incluant des stages cliniques visant, en collaboration avec un infirmier, notamment à l'acquisition de savoirs en matière de dépendance, déficience et handicap, à l'apprentissage de l'analyse de la situation pour identifier et hiérarchiser les besoins, les ressources et les difficultés de la personne et les risques liés à la situation de la personne, ainsi qu'à la connaissance des différents types de handicap, incluant l'identification des limites du champ d'intervention de l'aide-soignant dans des situations de crise et de violence (cf pièce n° 17 de l'appelante) ; Attendu qu'au vu de cette formation et de la compétence dont témoigne son diplôme d'État, obtenu à l'issue de 1.435 heures d'enseignement théorique et clinique, en institut et en stage (cf article 15 du décret), Mme Q... -qui ne prouve ni ne prétend que son poste de travail était classé à risques- disposait de la compétence requise pour exercer des fonctions de nuit, et elle ne peut utilement arguer avoir manqué de la formation requise pour obtenir la certification professionnelle permettant d'exercer le métier, différent et moins qualifié de surveillant de nuit, veilleur de nuit ou visiteur de nuit ; Attendu que l'information des salariés était assurée, ainsi qu'il en est justifié, par l'établissement et la diffusion de comptes-rendus de réunion du CHSCT, dont les productions démontrent qu'ils étaient fréquents et qu'ils analysaient et commentaient systématiquement les incidents ou accidents survenus dans les foyers tenus par l'association, les agressions du personnel donnant lieu à une enquête spécifique avec réunion dédiée (cf pièces n° 1 à 8 de l'appelante) ; Qu'il est établi par la production de documents antérieurs à l'agression dont Mme Q... a été victime que l'arrivée d'un nouveau résident s'accompagnait de l'établissement par une psychologue d'une fiche signalétique recensant les données psychologiques de la personne accueillie, et que tel avait été le cas pour la personne qui l'a agressée (cf pièce n° 10 de l'appelante) ; Qu'il est produit (cf pièce n° 11 de l'appelante) un bilan intermédiaire du suivi psychologique de ce résident établi le 10 avril 2012 pour la période comprise entre juillet 2011 et mars 2012, ce qui démontre la réalité de son suivi, et le respect, par l'employeur, des précautions requises pour s'assurer que le foyer pouvait continuer à l'accueillir ; Attendu que ce résident s'était déjà certes livré à des agressions verbales et/ou physiques envers le personnel, mais il ressort des productions qu'à chaque fois, son maintien ou son retour dans le foyer avait été validé par l'équipe médicale, dont l'association mettait en oeuvre les prescriptions ; qu'ainsi, après l'agression d'une collègue de travail de Mme Q... survenue au début du mois, le psychiatre suivant ce résident l'avait examiné, avait modifié son traitement et avait exclu la nécessité d'un changement pour une autre structure ; Attendu que Mme Q..., sur laquelle pèse la charge de prouver la faute inexcusable qu'elle allègue, ne démontre ni d'ailleurs ne prétend, que le résident qui l'a agressée n'aurait pas reçu le traitement ou les soins prescrits par le médecin qui avait validé son maintien dans le foyer après le précédent épisode de violence, ni plus généralement que les conditions de son séjour et ses soins, n'auraient pas été conformes aux prescriptions définies par l'équipe médicale ; Attendu qu'au vu de la nature même de l'activité de l'Adapei, qui gère des foyers de vie dont certains, tels celui où travaillait Mme Q..., accueillent des déficients mentaux susceptibles de présenter des épisodes de comportements agressifs, il ne peut être considéré que les mesures propres à prévenir un risque d'agression auraient dû consister à exclure les résidents présentant des antécédents ou des risques de violence, alors que la vocation de l'association, qui répond à une évidente nécessité humaine et sociale, est précisément d'héberger ces personnes ; Attendu que Mme Q... fait pertinemment valoir qu'au vu des risques d'agression, elle ne devait pas être laissée isolée pendant son service de nuit, mais contrairement à ce qu'elle soutient, elle ne l'était pas le soir des faits ; Qu'il ressort des productions, et particulièrement de la relation détaillée des faits contenue dans le rapport d'enquête du CHSCT ainsi que du témoignage de cette collègue, qu'une autre aide-soignante, Mme A... X..., et deux gardiens étaient présents dans cette aile du foyer lorsque Mme Q... a été agressée ; Attendu que Mme Q... ne peut utilement prétendre que le dispositif de PTI n'aurait pas fonctionné le soir de son agression, comme l'établirait selon elle ses pièces n° 5 et 12, ni que l'Adapei résisterait à ses sommations de produire le cahier de liaison pour la période du 15 au 30 septembre 2012 dans le but de dissimuler qu'elle avait réclamé un téléphone portable ; Attendu que l'appelante a produit ce cahier (sa pièce n° 16) ; Qu'il ressort de la propre pièce n° 25 de l'intimée, constituée du procès-verbal d'une réunion lors de laquelle avaient été discutés les types possibles de protection du personnel, que "le PTI est un téléphone" ; Or attendu que contrairement à ce que Mme Q... a fait plaider avec succès en première instance en se référant à sa pièce n° 12 constituée d'un compte-rendu de réunion du CHSCT établi après une précédente agression dont la victime avait déclaré que son PTI n'avait pas fonctionné, et qui ne concerne donc pas du tout l'agression dont elle a elle-même été victime, le 23 octobre disposait bien d'un PTI en état de fonctionnement le jour des faits puisque l'enquête du CHSCT (pièce n° 4 de l'appelante) relate que "Mme Q... réussit malgré tout à faire le 342 pour alerter le veilleur du foyer à côté, qui se déplace rapidement en entendant les cris, de même que le veilleur du A3...", sans que la portée de ces indications, conformes au récit de Mme Q..., soit affectée par le fait qu'elles sont suivies des mots "Le PTI." ; Et attendu que sa collègue de travail A... X..., présente sur place, témoigne que sitôt après avoir réussi à repousser en le griffant le résident qui l'agressait, Mme Q... a pu "prendre le téléphone pour appeler du renfort" (sa pièce n° 5) ; Qu'il ne peut ainsi être tiré argument de ce que dans le passé, le PTI d'une autre personne agressée n'aurait pas fonctionné, pour remettre en cause le constat que le dispositif de PTI de Mme Q... a fonctionné le soir de son agression ; Et attendu que ce dispositif était efficace et a rempli son office, puisque la victime a été rapidement secourue ; Attendu que Mme Q... n'indique pas la mesure qui n'aurait pas été prise et qui aurait pu éviter l'agression, sauf, ainsi qu'il a été dit, à proscrire tout contact avec les déficients mentaux qui constituent précisément la communauté de personnes prises en charge dans ce foyer ; Qu'elle ne rapporte donc pas la preuve, qui lui incombe, que l'Adapei n'aurait pas pris les mesures nécessaires pour la préserver du risque identifié ; Que par infirmation du jugement déféré, elle sera déboutée de sa demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, auquel l'équité justifie de ne pas allouer d'indemnité de procédure ;
1°)- ALORS QUE D'UNE PART l'employeur est tenu à l'égard de son salarié d'une obligation de sécurité de résultat et que le manquement à cette obligation est imputable à une faute inexcusable de l'employeur dès lors qu'il avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé son salarié et qu'il n'a pas pris les mesures requises pour protéger celui-ci de ce danger ; qu'il résulte en l'espèce des énonciations de l'arrêt infirmatif d'une part qu'il n'était pas discuté par l'Adapei qu'au vu des troubles du comportement inhérents aux formes de handicap et/ou à la personnalité de ses patients et à l'existence d'antécédents d'agressions dans le service, que les aides-soignantes étaient exposées à un risque avéré et identifié d'atteinte à leur intégrité physique et nerveuse en travaillant dans le foyer en particulier le soir et la nuit ; que d'autre part le résident qui avait agressé violemment Mme Q... s'était déjà à plusieurs reprises livré à des agressions verbales et/ou physiques envers le personnel et notamment au début du mois d'octobre 2012 et que l'Adapei, qui gère des foyers de vie dont certains tels que celui où travaillait Mme Q... accueillaient des déficients mentaux susceptibles de présenter des épisodes de comportement agressifs ; qu'en retenant néanmoins pour écarter la faute inexcusable de l'employeur, que Mme Q... ne prouvait ni ne prétendait que son poste de travail était classé à risques la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations et ainsi violé les articles L. 452-1 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale ;
2°)- ALORS QUE D'AUTRE PART l'employeur est tenu à l'égard de son salarié, d'une obligation de sécurité de résultat ; que tout manquement à cette obligation constitue une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il exposait son salarié, et qu'il a omis de prendre les mesures nécessaires pour le protéger ; qu'en l'espèce, par des motifs dont Mme Q... demandait la confirmation et était réputée s'être appropriés, le tribunal avait constaté que M. V... avait déjà agressé à 5 reprises une autre salariée Mme K... entre mars et octobre 2012 jusqu'à ce que dans la nuit du 3 au 4 octobre 2012, il l'agresse violemment selon le procès-verbal du CHSCT ; que le rapport produit par l'Adapei, rédigé par le chef de services rappelait que depuis 2012, M. V... était régulièrement l'auteur de violence et ce particulièrement vis-à-vis des surveillantes de nuit relatant des incidents survenus les 20 mars, 2 avril, 23 mai et enfin celui du 3 octobre ; que la dangerosité particulière de M. V... était donc nécessairement connue de l'employeur ; qu'en retenant néanmoins pour écarter la faute inexcusable de l'employeur, que Mme Q..., qui avait suivi une formation théorique et pratique adaptée à son poste y compris au service de nuit, ne prouvait ni ne prétendait que son poste de travail était classé à risques sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, si au regard de dangerosité avérée de M. V..., Mme Q..., dont la mission de surveillance dépassait celle de participer aux soins, avait reçu une formation adaptée, notamment sur la formation spécifique « surveillant de nuit » à l'institut du travail social ainsi que sur la « gestion de la violence et de l'agressivité » formation seulement mise en place après l'agression subie par Mme Q... malgré les nombreuses agressions antérieures commises par M. V..., la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle au regard des articles L. 452-1 et L. 452-2 du code de la sécurité sociale ;
3°)- ALORS QUE DE TROISIEME PART l'employeur est tenu à l'égard de son salarié, d'une obligation de sécurité de résultat ; que tout manquement à cette obligation constitue une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il exposait son salarié, et qu'il a omis de prendre les mesures nécessaires pour le protéger ; que dans ses conclusions d'appel (notamment p. 11), Mme Q... avait rappelé que malgré plusieurs sommations de communiquer l'Adapei n'avait jamais versé aux débats le document unique d'évaluation des risques ni sa mise à jour à la suite des agressions subies par Mme K... de mars à octobre 2012 et plus précisément à la suite de l'agression survenue dans la nuit du 3 au 4 octobre 2012 ; qu'en se bornant à énoncer, par des motifs inopérants, qu'au vu de la nature même de l'activité de l'Adapei, qui accueille des déficients mentaux susceptibles de présenter des épisodes de comportement agressifs, il ne pouvait être considéré que les mesures propres à prévenir un risque d'agression auraient dû consister à exclure les résidents présentant des antécédents ou des risques de violence et que Mme Q... ne rapportait pas la preuve qui lui incombait que l'Adapei n'aurait pas pris les mesures nécessaires pour la préserver du risque identifié, sans répondre aux conclusions de Mme Q... faisant valoir que le refus de l'employeur de communiquer le document unique d'évaluation des risques professionnels et sa mise à jour au mois d'octobre 2012 était particulièrement significatif, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble 6 de la convention européenne des droits de l'homme.
4°)- ALORS QUE DE QUATRIEME PART en affirmant que Madame E... Q... ni ne démontrait, ni ne prétendait que le résident qui l'avait agressée n'aurait pas reçu le traitement ou les soins prescrits par le médecin qui avait validé son maintien dans le foyer après un précédent épisode de violence, ni plus généralement que les conditions de séjour et de soins de l'agresseur n'auraient pas été conformes aux prescriptions définies par l'équipe médicale alors que l'agression violente, qui s'inscrivait dans ce contexte, avait été constatée, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en violation de l'article 1315 ancien du code civil devenu l'article 1353 du code civil ;
5°)- ALORS QUE DE CINQUIEME PART qu'en se bornant à affirmer, pour décider que Mme Q... ne rapportait pas la preuve qui lui incombait que l'Adapei n'aurait pas pris les mesures nécessaires pour la préserver du risque identifié, qu'une autre aide-soignante et deux gardiens étaient présents dans l'aile du foyer où était active Madame E... Q... et où elle fut agressée (cf. p. 5, dernier alinéa) sans répondre aux conclusions de cette dernière (p 13) faisant état de la circonstance qu'elle était seule au moment de l'agression, qu'aucun secours efficace n'avait pu être constaté, Mme X... ayant été la seule à avoir accouru en entendant les cris mais n'ayant pu venir en aide du fait qu'elle n'avait pas les clés pour pénétrer dans le local et personne n'ayant pu lui apporter secours pour empêcher l'accident, ce dont il résultat que ce que l'employeur avait pu prévoir était insuffisant par rapport à une dangerosité certaine de M. V... qui s'était manifestée à de nombreuses reprises, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusion en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;




Civ.2 20 juin 2019 n° 18-19.175

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon ce texte, que l'employeur, en vertu du contrat de travail le liant à son salarié est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel le salarié était exposé et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en protéger ; qu'il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu au salarié, mais qu'il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes auraient concouru au dommage ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. W..., conducteur de poids lourds, a été victime d'un accident de la circulation le 13 mai 2011, après avoir perdu le contrôle de son véhicule, et a été éjecté de l'habitacle par le pare-brise ; que cet accident a été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn ; que M. W... a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;
Attendu que pour rejeter cette dernière, l'arrêt retient que l'absence de ceinture de sécurité dont se prévaut M. W..., laquelle n'avait pas fait l'objet de remarque dans le cadre du contrôle technique du véhicule, n'a joué aucun rôle dans la survenance de l'accident qui résulte de la perte de contrôle du camion par son conducteur ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'intéressé avait été éjecté de son véhicule par le pare-brise, ce dont il résultait que l'absence de ceinture de sécurité avait concouru à la réalisation du dommage, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;




Civ.2 20 juin 2019 n° 18-18.595 B

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Pau, 19 avril 2018), qu'en exécution de jugements assortis de l'exécution provisoire, la caisse primaire d'assurance maladie des Landes (la caisse) a versé directement aux victimes de maladies professionnelles la réparation de leurs préjudices et en a récupéré le montant auprès de leur employeur, la société Gascogne papier (la société), dont la faute inexcusable a été reconnue ; que le montant de la réparation ayant été réduit par arrêts partiellement infirmatifs du 31 mars 2016, la société, pour avoir paiement du trop-versé, a fait délivrer un commandement aux fins de saisie-vente à la caisse qui l'a contesté devant un juge de l'exécution ;
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'annulation du commandement, alors, selon le moyen :
1°/ que l'exécution est poursuivie aux risques du créancier qui, si le titre est ultérieurement modifié, doit restituer le débiteur dans ses droits en nature ou par équivalent ; que dès lors que la décision reconnaissant la faute inexcusable de l'employeur fait naître un rapport de créance entre l'assuré et l'employeur, lorsqu'un paiement est intervenu, sur la base d'une décision reconnaissant le droit à indemnisation d'un assuré par l'employeur, à raison d'une faute inexcusable et lorsque le titre constatant la créance de l'assuré est modifié, il appartient à l'employeur de solliciter la restitution des sommes versées auprès de l'assuré et non auprès de la CPAM ; qu'en décidant le contraire, les juges d'appel ont violé l'article L. 111-10, alinéa 2, du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles L. 452-1 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
2°/ que le rapport de créance entre l'assuré et l'employeur, né de la décision reconnaissant la faute inexcusable n'est pas modifié par la circonstance que, s'agissant des modalités de paiement de la dette de l'employeur, l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale a prévu que la CPAM, en qualité de garant, verse à l'assuré une somme qu'elle récupère auprès de l'employeur ; qu'en décidant le contraire, pour dire que l'employeur pouvait solliciter la restitution des sommes versées auprès de la CPAM, les juges d'appel ont violé l'article L. 111-10, alinéa 2, du code des procédures civiles d'exécution, ensemble les articles L. 452-1 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que, selon l'article L. 452-3, alinéa 3, du code de la sécurité sociale, la réparation des préjudices allouée en cas de faute inexcusable à la victime ou à ses ayants droit est versée directement aux bénéficiaires par la caisse primaire qui en récupère le montant auprès de l'employeur ;
Et attendu qu'ayant relevé que les arrêts de la cour d'appel du 31 mars 2016, passés en force de chose jugée, avaient infirmé les dispositions des jugements sur le montant des indemnités, la cour d'appel en a exactement déduit qu'ils ouvraient droit à la restitution des sommes excédentaires versées par la société et constituaient des titres exécutoires permettant à celle-ci d'en poursuivre le recouvrement forcé à l'encontre de la caisse ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;




Civ.2 20 juin 2019 n° 18-16.702

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Donne acte à M B... de ce qu'il se désiste de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le ministre chargé de la sécurité sociale ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 mai 2017), que la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse) ayant décidé, le 23 juin 2013, de prendre en charge, au titre du tableau n° 16 bis des maladies professionnelles, la maladie dont était atteint M. B..., salarié de la société Guigues (l'employeur) de 1976 à 2013, celui-ci a saisi la juridiction de sécurité sociale en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ; que, dans une instance distincte, la décision de la caisse a été déclarée inopposable à l'employeur ;
Attendu que M. B... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ que la procédure de reconnaissance de la faute inexcusable, qui trouve son fondement dans la faute contractuelle préexistante de l'employeur, est indépendante de la procédure ultérieure dereconnaissance de la maladie professionnelle du salarié ; que l'inopposabilité à l'employeur de la décision de la caisse d'admettre le caractère professionnel de la maladie a pour seul effet de dispenser l'employeur de supporter les conséquences financières de la maladie professionnelle mais ne saurait interdire au salarié d'engager une action en reconnaissance de la faute inexcusable ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 452-1, L. 452-2 et L. 452-3 du Code de la sécurité sociale ;
2°/ que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée qu'entre les mêmes parties ; qu'en l'espèce, pour dire que M. B... n'avait pas été exposé à un risque au sein de la société, la cour d'appel a jugé qu'il ressortait du jugement du 15 décembre 2015 devenu définitif que M. B... n'avait jamais travaillé en qualité de vannier au sein de la société Guigues et qu'il ne remplissait donc pas la condition tenant à la réalisation des travaux concernés par la maladie professionnelle 16 bis C mais pouvait uniquement relever du tableau n° 15 ter des maladies professionnelles, de même qu'il n'avait pas été exposé aux hydrocarbures aromatiques polycycliques en espace confiné ; qu'en opposant ainsi à M. B... l'autorité de la chose jugée attachée à une décision rendue dans un litige auquel il n'avait pas été partie, la cour d'appel a violé les articles 1351 (nouvellement 1355) du code civil et 480 du code de procédure civile ;
3°/ que nul ne peut se constituer de preuve à lui-même ; qu'en l'espèce, pour dire que M. B... n'avait pas été exposé aux hydrocarbures aromatiques polycycliques en espace confiné, et notamment aux goudrons de houille et braies de houille, les juges du fond se sont fondés sur le certificat de travail établi par l'employeur et sur sa simple affirmation ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil dans sa rédaction applicable au litige ;
4°/ que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, afin de démontrer avoir été exposé à un risque dont l'employeur aurait dû avoirconscience, le salarié produisait aux débats des recommandations et fiches émises par l'INRS ainsi que des articles de presse mettant en exergue la dangerosité de la manipulation des brais de houille de même que des attestations de salariés de l'entreprise faisant état de l'exposition à ces substances ainsi que de l'absence de précautions prises par l'employeur ; qu'en omettant de viser et d'examiner ces pièces, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que la faute inexcusable est caractérisée lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations des premiers juges dont les motifs ont été expressément adoptés que M. B... était exposé à un risque en tant que poseur entre 1976 et 1985 ; qu'en écartant la faute inexcusable en retenant que l'employeur n'avait pas conscience du danger auquel M. B... était exposé, en l'absence « d'éléments objectifs internes » ou « externes » sans rechercher si l'employeur n'aurait pas dû avoir conscience de ce danger, la cour d'appel a privé sa décision de toutebase légale au regard de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui ne s'est pas fondée sur l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du 15 décembre 2015 auquel M. B... n'était pas partie, mais a examiné l'ensemble des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, et en particulier les pièces médicales produites par la caisse et notamment le colloque médico-administratif, a relevé que l'enquête médicale qui avait été conduite l'avait été en raison d'une possible exposition, contestée par l'employeur, aux hydrocarbures aromatiques polycycliques susceptible d'entraîner une maladie du tableau n° 15 ter des maladies professionnelles, et que la caisse avait décidé de prendre en charge l'affection déclarée au titre du tableau n° 16 C, de sorte que la responsabilité de la société ne saurait être recherchée en reconnaissance d'une faute inexcusable du chef d'une affection cancéreuse provoquée par les goudrons de houille, en conséquence d'une activité de vannier, à laquelle elle n'avait pas exposé son salarié ;
Que par ce seul motif, l'arrêt est légalement justifié ;




Civ.2 20 juin 2019 n° 18-13.968 B

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. G... (la victime), étudiant au sein de l'établissement Lycée forestier de Meymac (le lycée) a effectué un stage auprès de la société Etablissements Sécher (la société), au cours duquel il a été victime le 18 mars 2010 d'un accident du travail, pris en charge au titre de la législation professionnelle ; que sa faute inexcusable ayant été reconnue, le lycée a demandé la garantie des conséquences financières de cette faute à la société ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le lycée fait grief à l'arrêt de le débouter de son action en garantie contre la société, alors, selon le moyen :
1°/ que la loi nouvelle régit immédiatement les effets légaux des situations juridiques ayant pris naissance avant son entrée en vigueur et non définitivement réalisées ; que l'article 8 de la loi n° 2014-788 du 10 juillet 2014, ouvrant à l'établissement d'enseignement un recours contre l'organisme d'accueil pour qu'il soit statué sur la garantie des conséquences financières d'une reconnaissance de sa faute inexcusable à l'égard d'un stagiaire victime d'un accident du travail, est immédiatement applicable à la détermination des conséquences financières d'une faute inexcusable sur lesquelles il n'a pas été définitivement statué ; qu'en retenant, néanmoins, que ce texte ne pouvait s'appliquer qu'aux recours portant sur des accidents du travail survenus postérieurement à l'entrée en vigueur de loi nouvelle, pour juger que le lycée n'était pas fondé à agir sur ce fondement contre la société, la cour d'appel a violé l'article 2 du code civil ;
2°/ que l'obligation de l'organisme d'accueil de garantir l'établissement d'enseignement des conséquences financières de la reconnaissance de sa faute inexcusable, à l'occasion de l'action en responsabilité engagée par le stagiaire, découle légalement de l'accident du travail dont celui-ci a été victime, et non pas de la convention de stage ; qu'en retenant que la loi n° 2014-788 du 10 juillet 2014 ne pouvait s'appliquer au recours exercé par le lycée contre la société dès lors que le cadre contractuel dans lequel l'accident de travail de M. G... était survenu avait pris fin avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle, cependant que le recours que le lycée exerçait était un effet que la loi attache à l'accident du travail, et non un effet du contrat, la cour d'appel a violé l'article 2 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant pour objet d'ouvrir, selon les modalités qu'elles précisent, à l'établissement d'enseignement, dans le cas où un de ses élèves ou étudiants, à la suite d'un accident ou d'une maladie survenu par le fait d'une période de formation en milieu professionnel ou d'un stage, engage une action en reconnaissance de faute inexcusable, une action à l'encontre de l'organisme d'accueil en garantie des conséquences financières de la reconnaissance éventuelle de celle-ci, les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 452-4 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction issue de l'article 8 de la loi n° 2014-788 du 10 juillet 2014, sont applicables aux seuls accidents et maladies survenus postérieurement à l'entrée en vigueur de cette loi ;
Et attendu que l'arrêt constate que l'accident dont a été victime M. G... est survenu le 18 mars 2010 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, annexé, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;




Civ.2 29 mai 2019 n° 18-17.297

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles L. 452-1 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale et 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. C... (la victime), de nationalité turque, qui ne parlait et ne lisait pas le français, salarié temporaire de la société Manpower (l'employeur), mis à la disposition entre le 3 et le 6 septembre 2013, de la société Rhône-Alpes emballages (la société utilisatrice), avait été affecté, en qualité d'extrudeur, à un poste de travail sur des cylindres en rotation équipés de lames de coupe et de cutters, a été victime d'un accident survenu le 4 septembre 2013 ; que l'accident du travail ayant été pris en charge au titre de la législation professionnelle le 6 novembre 2013 par la caisse primaire d'assurance maladie de Haute-Loire (la caisse), la victime a saisi d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que pour rejeter ce recours, l'arrêt relève que le poste occupé par la victime était généralement confié aux intérimaires sans qu'il ait donné lieu à des accidents antérieurs et que, manifestement, l'accident litigieux relevait d'un geste imprévisible et imprudent, de sorte que la société utilisatrice ne pouvait avoir conscience du danger résultant de l'imprudence de son intérimaire d'une part, et que d'autre part, la société utilisatrice avait remis à la victime, lors de sa prise de poste, un livret d'accueil précisant qu'en présence de cylindres en rotation et de lames de coupes et de cutters, il était préconisé de ne pas engager ses mains à proximité des pièces en mouvement et d'arrêter les machines pour toute intervention, et en relevant en outre que la victime avait bénéficié d'une formation dans sa langue sur la machine utilisée dont il n'était pas établi qu'elle ne fût pas conforme et qui ne nécessitait pas de consigne de sécurité spécifique ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs insuffisants à écarter la conscience du danger que l'employeur avait ou aurait dû avoir du danger auquel la victime était exposée, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;




Civ.2 29 mai 2019 n° 18-11.445

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. W..., salarié de la société Adecco France (l'employeur), mis à disposition de la société Eiffage construction Sud-Aquitaine (l'entreprise utilisatrice), a été victime le 20 février 2007 d'un accident pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie de Pau-Pyrénées au titre de la législation professionnelle ; qu'il a contesté avec succès, devant une juridiction du contentieux technique, le taux d'incapacité permanente partielle qui lui avait été attribué après consolidation et a parallèlement saisi une juridiction de sécurité sociale d'un recours aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal :
Attendu que l'entreprise utilisatrice fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à se voir déclarer inopposable le taux d'incapacité permanente partielle reconnu à M. W... par le jugement du tribunal du contentieux de l'incapacité de Bordeaux en date du 6 juillet 2010, alors, selon le moyen, que si la caisse primaire d'assurance maladie est fondée, en application de l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, à récupérer auprès de l'employeur le montant de la majoration de la rente d'accident du travail attribuée à la victime en raison de la faute inexcusable de l'employeur, elle ne peut se prévaloir à l'égard de ce dernier d'une décision, même passée en force de chose jugée, rendue à l'issue d'une instance à laquelle il n'a pas été appelé ; qu'il résultait du jugement du 6 juillet 2010, régulièrement versé aux débats, que l'employeur n'était pas partie à l'instance opposant le salarié et la caisse, et relative à la fixation du taux d'IPP, de sorte que ce jugement lui était donc nécessairement inopposable ; qu'en déboutant pourtant l'employeur et la société utilisatrice de leur demande tendant à leur voir déclarer inopposable le taux d'IPP reconnu à M. W... par le jugement du tribunal du contentieux de l'incapacité de Bordeaux du 6 juillet 2010, qui avait augmenté de 5 % à 15 % le taux d'IPP reconnu au salarié dans ses rapports avec la caisse, motif pris de ce que l'employeur n'avait pas exercé un recours contre cette décision, la cour d'appel a violé les articles L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'en application de l'article L. 1251-1 du code du travail, le seul employeur d'un salarié lié par un contrat de mission à une entreprise de travail temporaire et mis à la disposition d'une entreprise utilisatrice est l'entreprise de travail temporaire ; qu'il en résulte que, si elle peut agir en responsabilité contractuelle contre l'entreprise de travail temporaire devant la juridiction de droit commun, ou contester devant la juridiction du contentieux général de la sécurité sociale l'imputation pour partie du coût de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle prévue par l'article L. 241-5-1 du code de la sécurité sociale, l'entreprise utilisatrice, qui n'est pas l'employeur juridique du salarié mis à sa disposition, n'a pas qualité pour contester devant les juridictions du contentieux de l'incapacité la décision portant fixation du taux d'incapacité permanente du salarié, victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle à l'occasion d'une mission ; qu'il s'en déduit que la société Eiffage construction Sud-Aquitaine, entreprise utilisatrice, n'était pas recevable à solliciter que le taux de l'incapacité permanente partielle reconnu à M. W... par le jugement du tribunal du contentieux de l'incapacité de Bordeaux en date du 6 juillet 2010, lui soit déclaré inopposable ;
Que par ce motif de pur droit, substitué à celui critiqué par le moyen, et après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile, la décision attaquée se trouve légalement justifiée ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :
Vu l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu que si la caisse primaire d'assurance maladie est fondée, en application de l'article L. 452-2 du code de la sécurité sociale, à récupérer auprès de l'employeur le montant de la majoration de la rente d'accident du travail attribuée à la victime en raison de la faute inexcusable de l'employeur, elle ne peut se prévaloir à l'égard de ce dernier d'une décision, même passée en force de chose jugée, rendue à l'issue d'une instance à laquelle il n'était pas partie ;
Attendu que pour débouter l'employeur de sa demande tendant à se voir déclarer inopposable le taux d'incapacité permanente partielle reconnu à M. W... par le jugement du tribunal du contentieux de l'incapacité de Bordeaux en date du 6 juillet 2010, l'arrêt retient essentiellement que l'employeur ne justifie pas avoir exercé un recours contre cette décision devant la Cour nationale de l`incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur n'était pas partie à l'instance à l'issue de laquelle a été rendue la décision majorant le taux d'incapacité permanente reconnu à M. W..., de sorte que ce taux ne pouvait lui être opposé, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;




Civ.2 29 mai 2019 n° 18-15.624

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches :
Vu les articles L. 452-1 du code de la sécurité sociale et 455 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, placé en arrêt de travail à la suite d'un malaise survenu le 30 janvier 2013 sur le lieu de travail, U... L..., salarié de la société LA POSTE (l'employeur) depuis le 24 septembre 2001, s'est suicidé à son domicile le [...] ; que le décès ayant été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie du Val de Marne, Mme X... , veuve L..., et Mme N... L..., veuve et fille de la victime (les consorts L...) ont saisi une juridiction de sécurité sociale aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Attendu que, pour rejeter cette demande, l'arrêt retient, en se fondant sur les témoignages de Mme F..., directrice de la communication et supérieure hiérarchique directe de U... L..., et de Mme G..., directrice de l'information du groupe LA POSTE, qu'il est manifeste que l'employeur n'a pas été informé du fait que la victime se serait trouvée confrontée à un profond désarroi face à ses conditions de travail et qu'il aurait tardé à réagir ; qu'il n'existait aucun antécédent chez ce salarié pouvant amener l'employeur à penser que son salarié souffrait d'une fragilité particulière et qu'ainsi rien ne démontre que l'employeur ait eu conscience du danger auquel était exposé U... L... ;
Qu'en statuant ainsi, sans procéder à l'examen, même sommaire, des pièces produites par les consorts L... et, notamment, les attestations de Mme R... et du docteur M..., ainsi que le rapport d'expertise du cabinet Cateis mandaté par le comité d'hygiène et de sécurité du travail de LA POSTE, le rapport de l' Inspection du travail dressé à la suite du suicide de U... L..., et le rapport d'expertise sur documents de Mme K..., expert en psychologie spécialisée en matière de souffrance au travail, la cour d'appel, qui n'a pas satisfait aux exigences du second d'entre eux, a violé les textes susvisés ;




Civ.2 9 mai 2019 n° 18-14.515 B

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches :
Vu les articles L. 452-2, alinéa 6, L. 452-3 et D. 452-1 du code de la sécurité sociale, le premier dans sa rédaction modifiée par la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012, le dernier dans sa rédaction modifiée par le décret n° 2014-13 du 8 janvier 2014, applicables au litige ;
Attendu, selon le premier et le dernier de ces textes, que la majoration de rente allouée à la victime en cas de faute inexcusable de l'employeur est payée par la caisse qui en récupère le capital représentatif auprès de l'employeur dans les mêmes conditions et en même temps que les sommes allouées au titre de la réparation des préjudices mentionnés au deuxième ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. K... (la victime), salarié de la société Mecano technique (l'employeur), a souscrit le 24 janvier 2011 une déclaration de maladie professionnelle, dont la prise en charge a été refusée par la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône ; qu'à la suite d'un recours de la victime, l'affection a été prise en charge le 22 novembre 2012 au titre de la législation professionnelle ; que la victime a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Attendu que pour dire que la caisse pouvait recouvrer auprès de l'employeur dont la faute inexcusable était établie uniquement les sommes correspondant aux préjudices personnels de la victime et non celles correspondant aux prestations de sécurité sociale, dont la majoration de rente, la cour d'appel retient que le recours de la caisse, seule tenue du règlement de la majoration de rente au salarié en cas de reconnaissance de l'existence d'une faute inexcusable, aux fins d'être remboursée de cette majoration par l'employeur, est fondé sur un droit personnel de la caisse à l'encontre de l'employeur aux fins de remboursement de cette prestation complémentaire de sécurité sociale ; qu'il s'agit dès lors d'un recours en garantie et non d'un recours subrogatoire et que l'employeur est fondé à s'opposer au recouvrement à son encontre par la caisse de la majoration de rente servie à l'assuré du fait de la reconnaissance de la faute inexcusable, eu égard à la décision de refus de prise en charge de la maladie professionnelle qui lui est acquise, dans ses rapports avec la caisse ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;




Civ.2 9 mai 2019 n° 18-15.151

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'employé en qualité de maçon par M. Q..., selon contrat à durée déterminée du 19 avril 2011, M. N... a été victime, le 20 avril 2011, d'un accident pris en charge, au titre de la législation professionnelle, par la caisse primaire d'assurance maladie de la Savoie ; que par jugement du 4 juin 2012, M. Q... a été déclaré en liquidation judiciaire ; que cette procédure a été clôturée, le 15 mars 2013, pour insuffisance d'actif ; que M. N... a saisi ultérieurement une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur ;
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu les articles 455, 458 et 954, alinéa 5, du code de procédure civile, ce dernier dans sa rédaction issue du décret n° 2009-1524 du 9 décembre 2009 ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. N..., l'arrêt retient que sur le fondement de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, il appartient à celui qui entend reprocher à son employeur une faute inexcusable comme ayant été à l'origine de son accident du travail de rapporter la preuve de cette faute ; qu'en cause d'appel, M. N..., sans s'expliquer sur les circonstances de l'accident, ne prouve, ni au demeurant n'allègue, que l'échafaudage mis à sa disposition pour assurer la sécurité des travaux accomplis à une hauteur de deux mètres était défaillant et ait ainsi contribué à la réalisation de l'accident ; qu'il n'est donc pas démontré que l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience de l'exposer à un risque pour sa sécurité et sa santé et qu'il n'aurait pris aucune mesure pour l'en préserver ;
Qu'en statuant ainsi, sans réfuter les motifs du jugement selon lesquels l'échafaudage était dépourvu de garde-corps, et dont M. N... demandait la confirmation, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du premier des textes susvisés et a violé le troisième ;




Civ.2 9 mai 2019 n° 18-15.809

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. B... (la victime), salarié intérimaire de l'entreprise de travail intérimaire, la société Traveco (la société de travail intérimaire) mis à disposition sur un chantier de la société BPS Charente (l'entreprise utilisatrice) a été victime d'un accident pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne (la caisse) ; que le taux d'incapacité permanente résultant de cet accident, fixé initialement par la caisse à 10 %, a été porté à 15 % à la suite du recours de la victime devant un tribunal du contentieux de l'incapacité ; que la victime a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu que si la caisse primaire d'assurance maladie est fondée, en application de ce texte, à récupérer auprès de l'employeur le montant de la majoration de rente d'accident du travail attribuée à la victime en raison de la faute inexcusable de l'employeur, son action ne peut s'exercer, dans le cas où la décision prise par la caisse dans les conditions prévues par l'article R. 434-32 du code de la sécurité sociale, sur le taux d'incapacité permanente de la victime, est devenue définitive à l'égard de l'employeur, que dans les limites découlant de l'application de ce dernier, peu important qu'il ait été augmenté, dans les rapports entre la caisse et la victime, par une décision de justice ;
Attendu que pour dire que la caisse récupéra directement et immédiatement auprès de l'entreprise de travail intérimaire le montant alloué au titre de la majoration de rente, l'arrêt retient que le taux de rente a été fixé à 15 % par le jugement du tribunal du contentieux de l'incapacité de Toulouse, lequel est passé en force de chose jugée ; que dès lors, peu important que la société de travail intérimaire n'ait pas été partie à la procédure devant ce tribunal, elle doit rembourser à la caisse la rente majorée sur la base du taux fixé par cette juridiction ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle relevait que la caisse avait initialement fixé le taux de rente de la victime à 10 %, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu les articles L. 241-5-1, alinéa 1er, L. 412-6 et R. 242-6-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que pour tenir compte des risques particuliers encourus par les salariés mis à la disposition d'utilisateurs par les entreprises de travail temporaire, le coût de l'accident ou de la maladie professionnelle est mis, pour partie, à la charge de l'entreprise utilisatrice selon les modalités fixées par le troisième ; que, selon le deuxième, l'entreprise de travail temporaire demeure, pour l'application des articles L. 452-1 à L. 452-4, tenue des obligations incombant à l'employeur, sans préjudice de l'action en remboursement qu'elle peut exercer contre l'auteur de la faute inexcusable ;
Attendu que pour condamner la société utilisatrice à relever et garantir la société de travail temporaire, dans les limites de l'article R. 242-6-1 du code de la sécurité sociale, des conséquences financières résultant de la faute inexcusable, l'arrêt retient qu'il résulte de ces dispositions que le recours subrogatoire de l'entreprise de travail temporaire à l'égard de l'entreprise utilisatrice est cantonné aux seules dépenses visées par l'article R. 242-6-1 précité, même si l'accident est dû à la seule faute inexcusable de cette dernière, et que les conséquences financières de l'accident autres que le capital de la rente allouée à la victime ne peuvent être réparties entre l'entreprise utilisatrice et l'entreprise de travail temporaire ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés, les premier et troisième par fausse application, le deuxième par refus d'application ;




Civ.2 9 mai 2019 n° 18-11.468 B

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Donne acte aux consorts Q... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Apave parisienne ;
Sur le moyen unique, pris en sa sixième branche :
Vu les articles L. 452-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que saisi d'une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, le juge est tenu de recueillir au préalable un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dès lors qu'il constate que la maladie déclarée, prise en charge par la caisse sur le fondement d'un tableau de maladie professionnelle, ne remplit pas les conditions de ce dernier et que sont invoquées devant lui les dispositions des troisième ou quatrième alinéas du second de ces textes ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'affection puis le décès d'U... Q... (la victime), salarié de la société Ferro France (l'employeur) de 1973 à 1987, ont été pris en charge dans le cadre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne (la caisse) s'agissant d'une maladie prévue au tableau n° 30 bis des maladie professionnelles ; que ces décisions ont été déclarées inopposables à l'employeur ; que les consorts Q..., ayants droit de la victime ont saisi une juridiction de sécurité sociale d'une action en reconnaissance de faute inexcusable à l'encontre de l'employeur ;
Attendu que pour débouter les demandeurs de leur action en reconnaissance d'une faute inexcusable de l'employeur, l'arrêt retient que les travaux effectués par cette dernière lorsqu'elle était au service de l'employeur ne correspondaient pas à ceux limitativement énumérés au tableau n° 30 bis des maladies professionnelles et que le lien de causalité entre la maladie de la victime et ses conditions de travail n'était pas établi ;
Qu'en statuant ainsi, sans recueillir l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, alors que les ayants droits de la victime soutenaient que la maladie et le décès avaient été causés par le travail habituel de la victime, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;




Civ.2 9 mai 2019 n° 18-17.847 B

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 avril 2018), que salarié de la société Renault (la société) de 1984 à 2010, V... W... est décédé, le [...] , d'un cancer des poumons ; que Mme W..., sa veuve, a souscrit, le 12 octobre 2010, une déclaration de maladie professionnelle ; que la caisse primaire d'assurance maladie de Paris a, les 12 septembre et 12 octobre 2011, pris en charge l'affection ainsi que le décès au titre du tableau n° 30 bis des maladies professionnelles ; que Mme W... a saisi une juridiction de sécurité sociale d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de la société ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que Mme W... fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors, selon le moyen, que saisi d'une contestation relative au caractère professionnel d'une affection désignée par un tableau, le juge qui constate qu'une ou plusieurs conditions relatives au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, ne peut statuer sur l'existence d'un lien de causalité direct entre la maladie et le travail habituel de la victime sans avoir recueilli préalablement l'avis d'un comité régional de reconnaissance de maladies professionnelles qu'ayant constaté qu'il ne disposait pas d'éléments suffisants pour caractériser l'activité de la victime et sa participation à des travaux listés au tableau 30 bis et qu'il était laissé dans l'ignorance du métier qu'elle exerçait précisément, le juge ne pouvait trancher le différend relatif à une prise en charge prévue par l'article L. 461-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale sans recueillir préalablement l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; qu'en décidant néanmoins que le caractère professionnel de la maladie et, par voie de conséquence, du décès du salarié n'était pas établi sans provoquer au préalable l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, la cour d'appel a violé les articles L. 452-1, L. 461-1 et R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que saisi d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, le juge n'est pas tenu de recueillir l'avis d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, dès lors qu'il constate que la maladie déclarée, prise en charge par la caisse sur le fondement d'un tableau de maladies professionnelles, ne remplit pas les conditions de ce dernier et que ne sont pas invoquées devant lui les dispositions des troisième ou quatrième alinéas de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale ;
Et attendu qu'ayant relevé que les conditions tenant à la liste des travaux énoncés au tableau n° 30 bis n'étaient pas réunies, la cour d'appel, devant laquelle n'était pas demandé le bénéfice de la reconnaissance individuelle du caractère professionnel de la maladie au sens du troisième alinéa de l'article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, a exactement déduit, sans avoir à recueillir l'avis préalable d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, que le caractère professionnel de l'affection de l'intéressé n'était pas établi, de sorte que la demande en reconnaissance de la faute inexcusable devait être rejetée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le même moyen, pris en sa seconde branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;




Civ.2 4 avril 2019 n° 18-14.009

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique, pris en ses quatre premières branches :
Vu les articles L. 4154-2 et L. 4154-3 du code du travail, ensemble l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que salarié temporaire de la société AXE TRAVAIL TEMPORAIRE mis à la disposition de la société Giesper en qualité de coffreur-brancheur, T... I... V... est décédé à la suite d'un accident survenu le [...] , pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne ; que Mme J... N... V..., sa veuve, ainsi que ses enfants C... et O... N... V... , ont saisi une juridiction de sécurité sociale en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ;
Attendu que pour rejeter ce recours, l'arrêt retient que la victime avait reçu, lors de son arrivée sur le chantier, une formation à la sécurité renforcée, comme en atteste la « fiche d'accueil des nouveaux embauchés et des intérimaires » qu'il a signée le 10 avril 2012 ; que sur cette fiche, toutes les cases de la formation à la sécurité pour les éléments suivants ont été cochées, contrôle de l'équipement individuel de sécurité, localisation du matériel de secours de première urgence, n° de téléphone appels en cas d'urgence, présentation des secouristes du chantier, présentation du poste de travail, présentation de l'équipe de travail, matériel divers utilisé « banches, échafaudage, blindage, etc... », techniques employées, aux modes opératoires de l'entreprise et aux risques encourus, utilisation du petit outillage électrique, risques particuliers du chantier « lignes HT, émanation de gaz, etc... », utilisation des protections collectives et individuelles ; que lui ont été présentées, le PPSPS du chantier, les guides de sécurité, le tableau d'affichage sécurité, les notes de sécurité internes, les affiches de sensibilisation ; que par conséquent sur cette seule constatation, la présomption de faute inexcusable instituée à l'article L. 4154-3 du code du travail ne peut être utilement invoquée ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs insuffisants à caractériser l'existence d'une formation renforcée à la sécurité assortie d'une information adaptée aux conditions de travail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;




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