Crim. 28 novembre 2017 n° 16-86.402
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Mikaël X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANÇON, chambre correctionnelle, en date du 7 juin 2016 qui, pour recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé, l'a condamné à 15 000 euros d'amende et cinq ans d'interdiction de gérer ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 17 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Parlos, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller PARLOS, les observations de la société civile professionnelle LE BRET-DESACHÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire CABY ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 49 et 54 du TFUE, des articles L. 8224-1, L. 8224-3 du code du travail, 111-3, 111-4, 131-27 du code pénal, 513, 591, 593 du code de procédure ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré M. Mickaël X...coupable de recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé, et l'a condamné pénalement à 15 000 euros d'amende et à la peine complémentaire d'interdiction de gérer ou d'administrer durant cinq ans ;
" aux motifs qu'il résulte de ce qui précède que la société Natalia Megatrans, dont le siège en Pologne est de toute évidence fictif, et qui n'avait à l'égard de la société Ital France aucune indépendance économique ni juridique, exerçait une activité permanente et régulière en France sans requérir son immatriculation au registre national des transports et sans procéder aux déclarations fiscales et sociales obligatoires, en sorte que M. Gregorz Y... qui en était le dirigeant, doit être déclaré coupable de ces faits, ainsi que du délit de travail dissimulé ; que c'est dès lors en toute connaissance de cause que M. X...a eu recours à la société Natalia Magatrans et qu'il doit lui aussi être déclaré coupable du délit qui lui est reproché ; que les prévenus seront condamnés l'un et l'autre à une amende de 15 000 euros et, compte tenu des circonstances de la commission des faits, à la peine complémentaire d'interdiction de gérer durant cinq ans ;
" 1°) alors que, toute décision de condamnation doit être motivée à peine de nullité ; que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que le principe de la légalité des délits et le principe de la liberté d'établissement au sein de l'Union Européenne, s'imposent à la juridiction pénale ; qu'en énonçant pour déclarer M. X...coupable de recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé, que la société transports Natalia Megatrans à laquelle il avait eu recours, immatriculée en Pologne, et ayant son siège social dans ce pays, était « de toute évidence fictive et n'avait à l'égard de la société Ital France aucune indépendance économique ni juridique, exerçant une activité permanente et régulière en France... », l'arrêt infirmatif attaqué a méconnu les principes susvisés et statué par des motifs contradictoires, et privé sa décision de base légale ;
" 2°) alors que l'article L. 8224-3-1° du code pénal, prévoit le prononcé des peines complémentaires suivantes : « 1° l'interdiction, suivant les modalités prévues par l'article 131-27 du code pénal, soit d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, soit d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, d'administrer, de gérer ou de contrôler à un titre quelconque, directement ou indirectement, pour son propre compte ou pour le compte d'autrui, une entreprise commerciale ou industrielle ou une société commerciale... » ; qu'en prononçant à l'encontre de M. X...« l'interdiction de gérer ou d'administrer » pendant une durée de cinq ans, sans préciser le type de société ou d'entreprise visée et le mode de gestion, direct ou indirect, à titre personnel ou pour le compte d'autrui, la cour d'appel a privé sa décision des motifs propres à la justifier " ;
Attendu qu'Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure, qu'à la suite d'un contrôle de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de l'entreprise de transport Ital France, qui a eu recours aux services d'une société de droit polonais Natalia Megatrans, en qualité de sous-traitant, leurs dirigeants respectifs ont été poursuivis, pour la période comprise entre le 1er août 2010 et 29 janvier 2014, le premier, M. X..., du chef susénoncé et, le second, des chefs d'exercice de l'activité de transporteur routier de marchandises sans inscription au registre correspondant à cette activité ; que le tribunal correctionnel les ayant renvoyés des fins de la poursuite, le ministère public a relevé appel de cette décision ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche ;
Attendu que pour retenir M. X...dans les liens de la prévention, après avoir relevé que l'activité de la société Natalia Megatrans, ayant son siège social en Pologne et à laquelle la société Ital France a eu régulièrement recours, était essentiellement située en France, la société Ital France mettant à sa disposition des cartes de paiement pour le péage des autoroutes et des tunnels ainsi que pour le carburant et un ancien salarié de la société dirigée par M. X..., installé en Côte-d'Or, la gérant depuis le territoire national, l'arrêt énonce que cette société de droit polonais a exercé une activité permanente et régulière en France sans requérir son immatriculation ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, dont il résulte que la société Ital France a eu recours aux services d'une société dont l'activité, relevant des règles applicables au droit d'établissement, a été exercée sans inscription au registre correspondant, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le grief n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche ;
Vu l'article 111-3 du code pénal ;
Attendu que, selon ce texte, nul ne peut être puni d'une peine qui n'est pas prévue par la loi ;
Attendu qu'après avoir déclaré coupable M. X...du délit susénoncé, la cour d'appel l'a condamné à cinq ans d'interdiction de gérer ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, sans préciser l'objet exact de cette interdiction, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe précédemment rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle sera limitée aux peines prononcées contre M. X..., dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure ;
Qu'en application de l'article 612-1 du code de procédure pénale, et dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, la cassation aura effet à l'égard de M. Grzegorz Y..., condamné aux mêmes peines, qui ne s'est pas pourvu ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Besançon, en date du 7 juin 2016, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées contre MM. X...et Y..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Dijon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Besançon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-huit novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 28 novembre 2017 n° 16-85.637
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Louis X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 30 juin 2016, qui, pour injure publique envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur orientation sexuelle, l'a condamné à 2 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 17 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Talabardon, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire TALABARDON, les observations de la société civile professionnelle LE BRET-DESACHÉ, de Me BOUTHORS, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire CABY ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de la procédure que, le 26 février 2015, lors d'une séance du conseil municipal de la ville du Mans, au cours de laquelle était discuté le projet de relance du " centre LGBT ", M. Louis X..., conseiller appartenant au Front national, a déclaré : " maintenant, ce n'est plus LGBT, vous avez ajouté donc lesbiennes, gays, bisexuels, transsexuels, intersexuels, queers and friendly. I don't understand you. Vous avez oublié certainement la zoophilie. Vous avez oublié la zoophilie, c'est ça qui me gêne " ; que l'intéressé ayant été poursuivi pour ces propos devant le tribunal correctionnel, du chef d'injure publique envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur orientation sexuelle, les juges du premier degré l'ont retenu dans les liens de la prévention et ont reçu l'association Homogène en sa constitution de partie civile ; que le prévenu, à titre principal, le ministère public et la partie civile, à titre incident, ont relevé appel de la décision ;
En cet état ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 29 et 33, alinéa 4, de la loi du 29 juillet 1881, 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale ;
" en ce que la cour d'appel a confirmé le jugement entrepris ayant condamné le prévenu pour « injure publique envers un particulier en raison de son orientation sexuelle » et, en répression l'a condamné à la peine de 2 000 euros d'amende ;
" aux motifs que sur la culpabilité, dans ses conclusions et dans les compléments de celle-ci développés oralement à l'audience de la cour, M. X... conteste avoir assimilé homosexualité et zoophilie ; mais que dans la phrase incriminée, en rappelant différents ajouts qui auraient été faits par ses interlocuteurs au cadre de la défense de certaines personnes, et en signalant que ces interlocuteurs avaient « oublié certainement la zoophilie », M. X... a placé sur le même plan l'homosexualité, la transsexualité et la zoophilie, en un amalgame qu'il ne peut rejeter sur les auditeurs de ses propos ; que ce disant, il n'a pas imputé aux personnes homosexuelles des pratiques zoophiles ; que ses propos ne peuvent donc pas, contrairement à ce qu'il prétend, constituer une diffamation ; que M. X... soutient encore que ses propos ne constitueraient pas un outrage ; que la zoophilie est, dès lors qu'elle constitue un mauvais traitement envers l'animal ; que rapprocher l'homosexualité ou la transsexualité de la zoophilie est donc bien l'expression d'un mépris et constitue bien un outrage, une injure ; que le prévenu considère par ailleurs que la communauté homosexuelle n'aurait pas été elle-même mise en cause ; mais qu'en mettant sur le même plan les personnes pratiquant la zoophilie et les lesbiennes, gays, bisexuels, transsexuels, intersexuels, queers and friendly, sans viser aucune de ces personnes en particulier, M. X... a bien mis en cause tous ces groupes de personnes, dont plusieurs constituent ce qu'il est communément convenu d'appeler la communauté homosexuelle ; que M. X... invoque enfin les dispositions de l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'il apparaît nécessaire de rappeler que si, en son premier alinéa, cet article dispose que « Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière », il pose en son second alinéa des limites à cette liberté en disposant que « L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui » ; et que c'est bien la protection de la réputation et des droits d'autrui que vise l'article 33 de la loi du 29 juillet 1881, plus particulièrement en l'espèce son quatrième alinéa ; que sanctionner une injure proférée à l'encontre de personnes ne peut donc être contraire à l'article 10 ; qu'au vu de ce qui précède, c'est donc à bon droit que les premiers juges ont retenu la culpabilité de M. X..., et la cour confirmera cette déclaration de culpabilité ; que sur la peine, la peine prononcée est parfaitement adaptée à la nature et au degré de gravité des faits commis, ainsi qu'à la personnalité du prévenu, dont le casier judiciaire ne porte mention d'aucune condamnation, et à ses facultés contributives ; que le jugement dont appel sera donc confirmé également sur ce point ; que, sur l'action civile (…), l'association Homogene, appelante incidemment, demande que l'indemnisation de son préjudice soit portée à la somme de 2 000 euros, et que soit ordonnée la publication du présent arrêt dans cinq publications, aux frais de M. X..., limités à 3 500 euros par publication ; que le tribunal correctionnel a justement apprécié l'importance du préjudice moral subi par l'association Homogene et le montant de son indemnisation, point qui n'est par ailleurs pas expressément critiqué par le prévenu ; et que les premiers juges ont opportunément retenu que la publication n'était pas nécessaire, l'information sur cette affaire et les décisions de justice rendues ayant été et devant être suffisante à travers les voies de communication ordinaires ; qu'en conséquence, la cour confirmera les dispositions civiles du jugement dans leur intégralité ;
" 1°) alors que la liberté d'expression « vaut non seulement pour les « informations » ou « idées » accueillies avec faveur ou considérées comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l'État ou une fraction quelconque de la population, notamment dès lors que les propos incriminés trouvent leur place dans un débat d'intérêt général, l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme exigeant alors un niveau élevé de protection de la liberté d'expression ; qu'en l'espèce, les propos incriminés ont été tenus lors de la réunion d'un conseil municipal statuant sur des subventions à accorder à certaines communautés ; que les propos devaient ainsi être analysés en fonction de leur contexte, le conseil municipal constituant, selon la Cour européenne des droits de l'homme, « une tribune indispensable au débat politique » durant lequel « les limites de la liberté d'expression sont plus larges » ; que, pour qu'une ingérence dans la liberté d'expression soit justifiée, il faut établir, outre sa légalité et le but légitime poursuivi, qu'elle répond à un besoin social impérieux ; qu'en l'espèce, si la cour a considéré que l'atteinte à la liberté d'expression du prévenu poursuivait un but légitime, elle n'a pas retenu que le cadre dans lequel les propos litigieux ont été tenus relevait de l'intérêt général, alors qu'il s'agissait d'une discussion au cours d'une séance publique d'un conseil municipal consacrée aux subventions communautaires, dont la liste ne fait que s'allonger, ce qu'entendait contester le demandeur ; qu'en statuant ainsi, la cour a violé les textes visés au moyen ;
" 2°) alors qu'en vertu du principe de l'interprétation stricte des restrictions à la liberté d'expression, il appartient à la Cour de cassation d'exercer son contrôle sur le sens et la portée des propos incriminés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que le prévenu avait amalgamé l'homosexualité et la zoophilie, sans rechercher le sens et la portée des propos qu'il a tenus, et qui ne relevaient pas de l'outrage, mais de la réprobation de subventions électoralistes et des communautaires sous entendant de façon ironique que les zoophiles sont aussi des électeurs ; que, si les propos proférés sont d'une ironie maladroite et qu'ils ont pu heurter la communauté homosexuelle qui n'était cependant pas visée, ils ne constituent pas une injure au sens de la loi sur la liberté de la presse ; qu'en considérant que les propos tenus par le prévenu constituaient une injure publique envers la communauté homosexuelle, la cour d'appel a violé les articles 29 et 33, alinéa 4, de la loi du 29 juillet 1881, et 10 de la Convention européenne des droits de l'homme " ;
Attendu que, pour confirmer le jugement sur la déclaration de culpabilité, l'arrêt, par les motifs propres rappelés au moyen et ceux réputés adoptés des premiers juges, retient que, par les propos incriminés, le prévenu a sciemment mis sur le même plan l'homosexualité, qui est une orientation sexuelle, et la zoophilie, qui constitue pour la psychiatrie un trouble de l'objet sexuel, par ailleurs susceptible de caractériser le délit de sévices sexuels envers un animal, et qu'un tel rapprochement contenait l'expression d'un mépris envers les personnes homosexuelles, constitutive d'un outrage et, comme telle, injurieuse ; que les juges ajoutent que le prévenu ne peut se prévaloir de la liberté d'expression garantie par l'article 10, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, dès lors qu'une telle injure en raison de l'orientation sexuelle relève de la restriction apportée à cette liberté par le second paragraphe du même article, en vue de la protection de la réputation et des droits d'autrui ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, exemptes d'insuffisance comme de contradiction et répondant aux conclusions dont les juges étaient saisis, et dès lors que la circonstance que les propos incriminés ont été tenus à l'occasion d'un débat d'intérêt public au cours d'une séance d'un conseil municipal n'était pas de nature à leur retirer leur caractère injurieux à l'égard des personnes visées, la cour d'appel, qui a exactement apprécié le sens et la portée de ces propos, n'a méconnu aucun des textes invoqués au moyen, lequel, dès lors, ne saurait être accueilli ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 48-4 de la loi du 29 juillet 1881 ;
" en ce que la cour d'appel a déclaré recevable la constitution de partie civile de l'association Homogene ;
" aux motifs que sur l'action civile, M. X... a soulevé devant la cour, avant toute défense au fond, l'irrecevabilité de la constitution de partie civile de l'association Homogene, au motif qu'elle ne répondrait pas aux exigences de l'article 48-4 de la loi du 29 juillet 1881 ; que ce moyen, bien que présenté pour la première fois en cause d'appel, est recevable en ce qu'il porte sur les conditions de fond de la recevabilité de la constitution de partie civile ; que l'article 48-4 de la loi du 29 juillet 1881 dispose en son premier alinéa que « Toute association, régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant, par ses statuts, de combattre les violences ou les discriminations fondées sur l'orientation ou identité sexuelle ou d'assister les victimes de ces discriminations peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les délits prévus par le huitième alinéa de l'article 24, lorsque la provocation concerne des crimes ou délits commis avec la circonstance aggravante prévue par l'article 132-77 du code pénal » ; que les statuts de l'association Homogene ont été déposés en 1996 ; qu'ils prévoient, en leur article 2, que les buts de l'association sont : • l'accueil et l'information de toute personne désirant mieux comprendre l'homosexualité dans sa diversité, • la prévention, tant pour lutter contre les M. S. T. que pour éviter les suicides d'homosexuel (le) s ne percevant leur état que dans la négativité, • la lutte contre l'homophobie et toute atteinte aux droits de l'homme, • (…) ; que l'homophobie est définie, par plusieurs dictionnaires, comme le rejet de l'homosexualité, l'hostilité systématique, voire la haine, à l'égard des homosexuels ; qu'il s'agit donc bien d'une discrimination, dans le traitement et la considération des personnes, fondée sur l'orientation ou l'identité sexuelle ; que l'un des buts, au moins, de l'association Homogene répond donc bien à l'exigence posée par l'article 48-4 de la loi du 29 juillet 1881, et la recevabilité de la constitution de partie civile de cette association doit être confirmée ;
" alors que seules les associations se proposant, par leurs statuts, de combattre les violences ou les discriminations fondées sur l'orientation ou l'identité sexuelle peuvent exercer l'action civile en matière d'injures ; que l'association Homogene a pour objet « la lutte contre l'homophobie » ; que l'homophobie s'entend du rejet de l'homosexualité, alors que la discrimination consiste en un traitement violant l'égalité lorsqu'il repose sur des critères visés par la loi et dans un domaine qu'elle fixe ; que la lutte contre l'homophobie, qui n'est pas, en soi, un délit mais une opinion, voire une idéologie, aussi critiquable soit-elle, ne peut donc se confondre avec la lutte contre la discrimination en raison de l'orientation ou de l'identité sexuelle ; qu'en considérant que l'homophobie était une discrimination pour déclarer recevable la constitution de partie civile de l'association Homogene, la cour d'appel a violé l'article 48-4 de la loi du 29 juillet 1881 " ;
Attendu que, pour écarter le moyen tiré de l'irrecevabilité de la constitution de partie civile de l'association Homogène, motif pris de ce que les buts que cette association poursuit n'entrent pas dans les prévisions de l'article 48-4 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors qu'en se donnant pour objet social, notamment, " la lutte contre l'homophobie et toute atteinte aux droits de l'homme ", ladite association se propose, par ses statuts, de combattre les violences fondées sur l'orientation sexuelle, au sens dudit article 48-4, dans lesquelles sont comprises les violences, comme en l'espèce, verbales, la cour d'appel a fait l'exacte application de ce texte ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 000 euros la somme que M. X... devra payer à l'association Homogène en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-huit novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 28 novembre 2017 n° 16-85.414
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- La société Conflans distribution (enseigne E. Leclerc),
- M. Arnaud X...,- M. Lionel Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 15 mars 2016, qui les a condamnés, chacun, à 27 amendes contraventionnelles de 200 euros pour dépassement de la durée légale hebdomadaire de travail effectif, à 131 amendes contraventionnelles de 200 euros pour dépassement de la durée maximale quotidienne de travail effectif, à 120 amendes contraventionnelles de 400 euros pour dépassement d'au moins une heure et trente minutes de la durée de conduite ininterrompue de 4 heures et 30 minutes, à 49 amendes contraventionnelles de 400 euros pour dépassement de moins de 1 heure et 30 minutes de la durée de conduite ininterrompue de 4 heures et 30 minutes et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 17 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Larmanjat, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller LARMANJAT, les observations de la société civile professionnelle ROCHETEAU et UZAN-SARANO, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire CABY ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 3121-10, L. 3121-34, L. 3121-52, R. 3124-3, D. 3121-15, D. 3121-16, D. 3121-17 du code du travail, 3 du décret n° 86-1130 du 17 octobre 1986, L. 3311-1, L. 3315-6 du code du transport, 7, 4 D) du règle CE du 15 mars 2006, ensemble l'article 121-3 du code pénal, l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et les articles préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société Conflans distribution, MM. X...et Y...coupables de dépassement de la durée légale hebdomadaire du travail effectif, dépassement de la durée maximale quotidienne de travail effectif, dépassement d'au-moins 1 heure et 30 minutes de la durée de conduit ininterrompue de 4 heures et 30 minutes, dépassement de moins d'1 heure et 30 minutes de la durée de conduit ininterrompue de 4 heures et 30 minutes, les a condamnés à payer chacun les amendes suivantes :-131 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale quotidienne de 10 heures,-27 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale hebdomadaire de 48 heures,-120 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 30 de conduite continue de plus de 1 heure 30,-49 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 3 0 de conduite continue de moins de 1 heure 30, et les a condamnés à verser au syndicat CGT Conf-Dist la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
" aux motifs propres que l'employeur pour être exonéré de sa responsabilité pénale, ne peut se prévaloir d'une délégation de pouvoirs qu'à la condition de faire la preuve qu'il s'est assuré que la délégation était exercée conformément à la réglementation ou qu'il prouve qu'il a mis en demeure le délégataire de respecter les termes de la délégation ; qu'il résulte de la délégation de pouvoir, en date du 24 août 2009, que Mme Brigitte Z... avait notamment pour fonction d'appliquer les lois et règlements dans son service en matière sociale s'agissant notamment des règles relatives au temps de travail ; que tant M. Y...que M. X...signaient les feuilles d'heures supplémentaires tous les mois de sorte qu'ils savaient les conditions dans lesquelles travaillaient les chauffeurs de l'entreprise, ou à tout le moins il leur appartenait de s'interroger sur la compatibilité entre le nombre d'heures travaillées et le respect de la réglementation du travail et en matière de coordination des transports ; que, à ce sujet, le procès-verbal établi le 29 juillet 2011 mentionne que l'absence de contrôle régulier des données enregistrées par l'employeur est manifeste pour le motif suivant : l'examen du volume d'heures rémunérées par l'employeur à l'ensemble des chauffeurs chaque mois à travers les bulletins de paie de janvier 2011, de février 2011 et de mars 2011, révèle que l'employeur rémunère sciemment des volumes d'heures qui ne peuvent être réalisées en respectant les plafonds des durées de travail quotidienne (10 heures) et hebdomadaire absolue (40 heures) prévues par le code du travail ; que ce procès-verbal fait également état de ce que le service n'était pas pourvu de logiciel de lecture des cartes de conduite et en conclut qu'en ne mettant pas de logiciel de traitement des données de conduite à la disposition de Mme Z..., l'employeur ne lui a pas assuré l'effectivité de la délégation de pouvoirs dont elle faisait l'objet ; que c'est dans ces conditions à bon droit que le premier juge a considéré qu'en ne portant aucune attention à la gestion du service fuel alors qu'ils auraient dû être alertés de ses dysfonctionnements, MM. Y...et X...ont commis une faute excluant qu'ils puissent se prévaloir de la délégation de pouvoir pour être exonérés de leur responsabilité pénale ; qu'il convient en outre de préciser que le sort des procédures prud'homales engagées contre leurs salariés sont sans effet sur leur responsabilité pénale, de même que sur la responsabilité pénale de la personne morale la société Conflans distribution, exerçant sous l'enseigne E Leclerc ; que le jugement entrepris sera dans ces conditions confirmé en ce qu'il a retenu dans les liens de la prévention la société Conflans distribution, exerçant sous l'enseigne E Leclerc, MM. Y...et X...; qu'il le sera également quant aux peines d'amende prononcées, parfaitement adaptées aux contraventions dont les prévenus ont été déclarés coupables ;
" aux motifs adoptés que c'est à l'employeur de s'assurer que la législation sur le temps de travail des conducteurs est respecté ; qu'en effet, en matière de transport routier, la responsabilité du dirigeant d'entreprise doit être retenue en raison d'une présomption de « faute positive personnelle », dès lors que ses instructions entraînent la commission de l'infraction, par exemple en raison d'objectifs qui ne tiendraient pas compte des temps de repos ou en raison d'une faute d'abstention qui découlerait d'une négligence de sa part ; qu'en outre, sa responsabilité doit être retenue lorsqu'il n'a pas pris les dispositions nécessaires en vue d'assurer le respect de la réglementation, comme le lui commandent l'article 15 du règlement n° 3820/ 85 CEE du 20 décembre 1985 et l'article 3 bis de l'ordonnance n° 58-1310 du 23 décembre 1958 sauf à prouver, pour s'exonérer de sa responsabilité pénale, qu'il a informé les salariés du contenu de la réglementation et leur a donné instruction de la respecter par les moyens de communication usuels en matière de droit du travail (affichage, remise du règlement communautaire, article du contrat de travail, émargement de notes de service) ; qu'il doit par ailleurs et simultanément prouver qu'il a organisé le travail en conséquence et qu'il s'est assuré du respect effectif de la réglementation ; qu'en l'espèce, le contrôle des disques chrono tachygraphes de M. A...Jacques, de M. B...Guillaume, de M. C...Jacques, de M. D...Xavier et de M. E...Pascal a permis de constater les contraventions visées dans la prévention ; qu'il ressort des auditions de M. B...et de M. C...que les salariés n'appliquaient pas la réglementation du travail et du transport et faisaient délibérément une mauvaise utilisation des disques chrono tachygraphes dans la mesure où toutes les heures supplémentaires leur étaient payées et que cela leur permettait d'avoir de bons salaires ; que M. A...Jacques précise que lorsqu'il travaillait au centre Leclerc, il mettait sa carte chrono tachygraphe dans le lecteur tous les matins pour ne la retirer que le soir sans arrêt si bien que les temps de repos ou de coupure n'apparaissaient pas ; que M. D...confirme les déclarations de ses collègues tout en précisant que les chauffeurs avaient tous une formation de base-mais aucune formation spécifique à l'utilisation des chrono tachygraphe ; qu'il reconnaît avoir fait sciemment une mauvaise utilisation des disques puisqu'il se mettait en coupure lorsqu'il travaillait tout en précisant que MM. X...et Y...connaissaient parfaitement bien leurs conditions de travail ; qu'il ajoute qu'il connaissait les règles applicables en matière de réglementation de la durée du temps de conduite mais que les contraintes imposées par Mme Z..., chef du service Fuel l'obligeait à y déroger ; qu'il résulte de l'ensemble de ces auditions que les chauffeurs connaissaient la réglementation et y dérogeaient de manière délibérée ; que ces infractions ont été constatées par la production des disques chronotachygraphes ; que bien qu'il apparaisse clairement que les salariés qui avaient eu une formation spécifique conformément aux attestation de formations produites par les prévenus, il n'en demeure pas moins que les infractions ont été commises, peu importe que le dépassement du temps de travail n'ait pas été employé au travail effectif ou à la conduite effective ; que pour se voir exonérer de leurs responsabilités pénale à titre personnel, MM. Y...et X..., arguent du fait que Mme Z... était chef du service fioul, qu'elle bénéficiait d'une délégation de pouvoir en bonne et due forme et qu'à ce titre elle est seule responsable des infractions constatées ; que cependant, il est de jurisprudence constante que l'employeur, pour être exonérer de sa responsabilité pénale, ne peut se prévaloir d'une délégation de pouvoir qu'à la condition que celui-ci fasse la preuve qu'il s'est assuré que la délégation était exercée conformément à la réglementation ou qu'il prouve qu'il a mis en demeure le délégataire de respecter les termes de la délégation ; qu'en l'espèce, il ressort de la délégation signée à Mme Z... le 24 août 2009 par M. X...Christian qu'elle avait notamment comme fonction d'appliquer et de faire appliquer les lois et règlements dans son service en matière social s'agissant notamment des règles relatives au temps de travail ; que MM. X...et Y...signaient les feuilles d'heures supplémentaires tous les mois, si bien qu'ils savaient les conditions dans lesquels travaillaient les chauffeurs de l'entreprise ; qu'à tout le moins, compte-tenu du nombre important d'heures supplémentaires et des sommes importantes versées au titre des salaires puisque toutes les heures supplémentaires étaient payées, ils auraient dû s'interroger sur la compatibilité entre le nombre d'heures travaillées et le respect de la réglementation du travail et en matière de coordination des transports ; que s'ils avaient exercé un réel contrôle sur l'activité du service fuel, ils auraient pu se convaincre de laxisme de la part de leur délégataire quant à l'application de la loi et des règlements et intervenir pour faire cesser la commission d'infractions ; qu'en outre, il ressort clairement de la procédure que suite à un contrôle de la part de l'inspection du travail que le service n'était pas pourvu de logiciel de lecture des cartes de conduite, empêchant, dès lors, Mme Z... de procéder à un contrôle strict des heures de conduites des chauffeurs ; qu'en conséquence, en ne portant aucune attention à la gestion du service fuel alors qu'ils auraient dû être alertés de ses dysfonctionnements, MM. Y...et X...ont commis une faute excluant qu'ils puissent aujourd'hui se prévaloir de la délégation de pouvoir pour être exonérés de leur responsabilité pénale ; qu'il y a donc lieu de déclarer la société Conflans distribution, exerçant sous l'enseigne E. Leclerc ainsi que MM. Y...et X...coupables des faits reprochés et de les condamner à payer chacun les amendes suivantes :-131 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale quotidienne de 10 heures,-27 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale hebdomadaire de 48 heures,-120 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 30 de conduite continue de plus de 1 heure 30,-49 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heuros 30 de conduite continue de moins de 1 heure 30, conformément au procès-verbal dressé par l'inspecteur du travail le 29 juillet 2011 ;
" alors que les contraventions de dépassement de la durée légale hebdomadaire du travail effectif, de dépassement de la durée maximal quotidienne de travail effectif et de dépassement de la durée de conduite ininterrompue de 4 heures 30, supposent établie une durée de travail effectif supérieure aux durées de travail autorisées ; qu'en l'espèce, pour retenir ces différentes infractions, la cour d'appel s'est exclusivement fondée sur les termes d'un procès-verbal du 29 juillet 2011 établi par l'inspection du travail en considération des disques chronotachygraphes utilisés par les chauffeurs de la société Conflans distribution ; que la cour d'appel a par ailleurs constaté que ces mêmes chauffeurs avaient reconnu, au cours de l'enquête, avoir sciemment mal utilisé leurs disques chronotachygraphes afin d'obtenir le paiement d'heures supplémentaires indues au détriment de la société Conflans distribution ; qu'en déclarant constituées les infractions à la législation sur le temps de travail reprochées à la société Conflans distribution et à ses dirigeants, quand il s'évinçait de ses propres constatations que les disques chronotachygraphes avaient été frauduleusement manipulés de sorte que la preuve des dépassements de temps de travail poursuivis n'était plus rapportée, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1 du code pénal, L. 3121-10, L. 3121-34, L. 3121-52, R. 3124-3, D. 3121-15, D. 3121-16, D. 3121-17 du code du travail, 3 du décret n° 86-1130 du 17 octobre 1986, L. 3311-1, L. 3315-6 du code du transport, 7, 4 D) du règle CE du 15 mars 2006, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré MM. X...et Y...coupables de dépassement de la durée légale hebdomadaire du travail effectif, dépassement de la durée maximale quotidienne de travail effectif, dépassement d'au-moins 1 heure et 30 minutes de la durée de conduit ininterrompue de 4 heures et 30 minutes, dépassement de moins d'1 heure et 30 minutes de la durée de conduit ininterrompue de 4 heures et 30 minutes, les a condamnés à payer chacun les amendes suivantes :-131 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale quotidienne de 10 heures,-27 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale hebdomadaire de 48 heures,-120 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 30 de conduite continue de plus de 1 heure 30,-49 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 30 de conduite continue de moins de 1 heure 30, et les a condamnés à verser au syndicat CGT Conf-Dist la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
" aux motifs propres que l'employeur pour être exonéré de sa responsabilité pénale, ne peut se prévaloir d'une délégation de pouvoirs qu'à la condition de faire la preuve qu'il s'est assuré que la délégation était exercée conformément à la réglementation ou qu'il prouve qu'il a mis en demeure le délégataire de respecter les termes de la délégation ; qu'il résulte de la délégation de pouvoir en date du 24 août 2009 que Mme Z... avait notamment pour fonction d'appliquer les lois et règlements dans son service en matière sociale s'agissant notamment des règles relatives au temps de travail ; que tant M. Y...que M. X...signaient les feuilles d'heures supplémentaires tous les mois de sorte qu'ils savaient les conditions dans lesquelles travaillaient les chauffeurs de l'entreprise, ou à tout le moins il leur appartenait de s'interroger sur la compatibilité entre le nombre d'heures travaillées et le respect de la réglementation du travail et en matière de coordination des transports ; que, à ce sujet, le procès-verbal établi le 29 juillet 2011 mentionne que l'absence de contrôle régulier des données enregistrées par l'employeur est manifeste pour le motif suivant : l'examen du volume d'heures rémunérées par l'employeur à l'ensemble des chauffeurs chaque mois à travers les bulletins de paie de janvier 2011, de février 2011 et de mars 2011, révèle que l'employeur rémunère sciemment des volumes d'heures qui ne peuvent être réalisées en respectant les plafonds des durées de travail quotidienne (10 heures) et hebdomadaire absolue (40 heures) prévues par le code du travail ; que ce procès-verbal fait également état de ce que le service n'était pas pourvu de logiciel de lecture des cartes de conduite et en conclut qu'en ne mettant pas de logiciel de traitement des données de conduite à la disposition de Mme Z..., l'employeur ne lui a pas assuré l'effectivité de la délégation de pouvoirs dont elle faisait l'objet ; que c'est dans ces conditions à bon droit que le premier juge a considéré qu'en ne portant aucune attention à la gestion du service fuel alors qu'ils auraient dû être alertés de ses dysfonctionnements, MM. Y...et X...ont commis une faute excluant qu'ils puissent se prévaloir de la délégation de pouvoir pour être exonérés de leur responsabilité pénale ; qu'il convient en outre de préciser que le sort des procédures prud'homales engagées contre leurs salariés sont sans effet sur leur responsabilité pénale, de même que sur la responsabilité pénale de la personne morale la société Conflans distribution, exerçant sous l'enseigne E Leclerc ; que le jugement entrepris sera dans ces conditions confirmé en ce qu'il a retenu dans les liens de la prévention la société Conflans distribution, exerçant sous l'enseigne E Leclerc, MM. Y...et X...; qu'il le sera également quant aux peines d'amende prononcées, parfaitement adaptées aux contraventions dont les prévenus ont été déclarés coupables ;
" aux motifs adoptés que c'est à l'employeur de s'assurer que la législation sur le temps de travail des conducteurs est respecté ; qu'en effet, en matière de transport routier, la responsabilité du dirigeant d'entreprise doit être retenue en raison d'une présomption de « faute positive personnelle », dès lors que ses instructions entraînent la commission de l'infraction, par exemple en raison d'objectifs qui ne tiendraient pas compte des temps de repos ou en raison d'une faute d'abstention qui découlerait d'une négligence de sa part ; qu'en outre, sa responsabilité doit être retenue lorsqu'il n'a pas pris les dispositions nécessaires en vue d'assurer le respect de la réglementation, comme le lui commandent l'article 15 du règlement n° 3820/ 85 CEE du 20 décembre 1985 et l'article 3 bis de l'ordonnance n° 58-1310 du 23 décembre 1958 sauf à prouver, pour s'exonérer de sa responsabilité pénale, qu'il a informé les salariés du contenu de la réglementation et leur a donné Instruction de la respecter par les moyens de communication usuels en matière de droit du travail (affichage, remise du règlement communautaire, article du contrat de travail, émargement de notes de service) ; qu'il doit par ailleurs et simultanément prouver qu'il a organisé le travail en conséquence et qu'il s'est assuré du respect effectif de la réglementation ; qu'en l'espèce, le contrôle des disques chrono tachygraphes de M. A...Jacques, de M. B...Guillaume, de M. C...Jacques, de M. D...Xavier et de M. E...Pascal a permis de constater les contraventions visées dans la prévention ; qu'il ressort des auditions de M. B...et de M. C...que les salariés n'appliquaient pas la réglementation du travail et du transport et faisaient délibérément une mauvaise utilisation des disques chrono tachygraphes dans la mesure où toutes les heures supplémentaires leur étaient payées et que cela leur permettait d'avoir de bons salaires ; Que M. A...Jacques précise que lorsqu'il travaillait au centre Leclerc, il mettait sa carte chrono tachygraphe dans le lecteur tous les matins pour ne la retirer que le soir sans arrêt si bien que les temps de repos ou de coupure n'apparaissaient pas ; que M. D...confirme les déclarations de ses collègues tout en précisant que les chauffeurs avaient tous une formation de base-mais aucune formation spécifique à l'utilisation des chrono tachygraphe ; qu'il reconnaît avoir fait sciemment une mauvaise utilisation des disques puisqu'il se mettait en coupure lorsqu'il travaillait tout en précisant que MM. X...et Y...connaissaient parfaitement bien leurs conditions de travail ; qu'il ajoute qu'il connaissait les règles applicables en matière de réglementation de la durée du temps de conduite mais que les contraintes imposées par Mme Z..., chef du service Fuel l'obligeaient à y déroger ; qu'il résulte de l'ensemble de ces auditions que les chauffeurs connaissaient la réglementation et y dérogeaient de manière délibérée ; que ces infractions ont été constatées par la production des disques chronotachygraphes ; que bien qu'il apparaissent clairement que les salariés qui avaient eu une formation spécifique conformément aux attestation de formations produites par les prévenus, il n'en demeure pas moins que les infractions ont été commises, peu importe que le dépassement du temps de travail n'ai pas été employé au travail effectif ou à la conduite effective ; que pour se voir exonérer de leurs responsabilités pénale à titre personnel, MM. Y...et X..., arguent du fait que Mme Z... était chef du service fioul, qu'elle bénéficiait d'une délégation de pouvoir en bonne et due forme et qu'à ce titre elle est seule responsable des infractions constatées ; que cependant, il est de jurisprudence constante que l'employeur, pour être exonéré de sa responsabilité pénale, ne peut se prévaloir d'une délégation de pouvoir qu'à la condition que celui-ci fasse la preuve qu'il s'est assuré que la délégation était exercée conformément à la réglementation ou qu'il prouve qu'il a mis en demeure le délégataire de respecter les termes de la délégation ; qu'en l'espèce, il ressort de la délégation signée à Mme Z... le 24 août 2009 par M. X...Christian qu'elle avait notamment comme fonction d'appliquer et de faire appliquer les lois et règlements dans son service en matière social s'agissant notamment des règles relatives au temps de travail ; que MM. X...et Y...signaient les feuilles d'heures supplémentaires tous les mois, si bien qu'ils savaient les conditions dans lesquels travaillaient les chauffeurs de l'entreprise ; qu'à tout le moins, compte-tenu du nombre important d'heures supplémentaires et des sommes importantes versées au titre des salaires puisque toutes les heures supplémentaires étaient payées, ils auraient dû s'interroger sur la compatibilité entre le nombre d'heures travaillées et le respect de la réglementation du travail et en matière de coordination des transports ; que s'ils avaient exercé un réel contrôle sur l'activité du service fuel, ils auraient pu se convaincre de laxisme de la part de leur délégataire quant à l'application de la loi et des règlements et intervenir pour faire cesser la commission d'infractions ; qu'en outre, il ressort clairement de la procédure que suite à un contrôle de la part de l'inspection du travail que le service n'était pas pourvu de logiciel de lecture des cartes de conduite, empêchant dès lors Mme Z... de procéder à un contrôle strict des heures de conduites des chauffeurs ; qu'en conséquence, en ne portant aucune attention à la gestion du service fuel alors qu'ils auraient dû être alerter de ses dysfonctionnements, MM. Y...et X...ont commis une faute excluant qu'ils puissent aujourd'hui se prévaloir de la délégation de pouvoir pour être exonérés de leur responsabilité pénale ; qu'il y a donc lieu de déclarer la société Conflans distribution, exerçant sous l'enseigne E. Leclerc ainsi que MM. Y...et X...coupables des faits reprochés et de les condamner à payer chacun les amendes suivantes :-131 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale quotidienne de 10 heures,-27 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale hebdomadaire de 48 heures,-120 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 30 de conduite continue de plus de 1 heure 30,-49 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 30 de conduite continue de moins de 1 heure 30, conformément au procès-verbal dressé par l'inspecteur du travail le 29 juillet 2011 ;
" 1°) alors qu'une délégation de pouvoirs n'est effective qu'en l'absence d'immixtion du chef d'entreprise dans les missions confiées au délégataire ; qu'en reprochant aux prévenus de n'avoir pas exigé des explications sur les feuilles d'heures supplémentaires qu'ils signaient en faisant une entière confiance à Mme Z..., dans l'entreprise depuis 17 ans, à laquelle ils avaient délégué leurs pouvoirs, sans rechercher si, au contraire, ils n'étaient pas tenus de respecter son indépendance afin de garantir l'effectivité de la délégation en cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" 2°) alors que la délégation de pouvoirs ne produit d'effet translatif de responsabilité pénale que si elle s'accompagne d'un transfert effectif de l'autorité, de la compétence et des moyens nécessaires pour remplir correctement la mission confiée ; qu'en l'espèce, les prévenus contestaient formellement qu'un logiciel ait été nécessaire pour lire les cartes de conduite des différents chauffeurs et permettre à Mme Z..., délégataire de pouvoirs, de contrôler effectivement les temps de conduite ; qu'en l'état de cette contestation, en se contentant de rappeler les observations du procès-verbal d'infraction établi par l'Inspection du travail, sans vérifier par elle-même l'effectivité des pouvoirs transmis à Mme Z..., la cour d'appel a privé de plus bel sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" 3°) alors que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en l'espèce, les prévenus soutenaient que les dépassements fictifs des durées de temps de travail des chauffeurs étaient orchestrés par Mme Z... elle-même dont le mari était l'un des bénéficiaires ; qu'en privant de toute efficacité la délégation de pouvoirs invoquée au motif inopérant qu'aucun logiciel n'avait été fourni à Mme Z... pour faciliter la lecture des disques chronotachygraphes, sans répondre à ce moyen péremptoire des conclusions dont elle était formellement saisie, la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation des textes susvisés " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-2 du code pénal, L. 3121-10, L. 3121-34, L. 3121-52, R. 3124-3, D. 3121-15, D. 3121-16, D. 3121-17 du code du travail, 3 du décret n° 86-1130 du 17 octobre 1986, L. 3311-1, L. 3315-6 du code du transport, 7, 4 D) du règle CE du 15 mars 2006, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société Conflans distribution coupable de dépassement de la durée légale hebdomadaire du travail effectif, dépassement de la durée maximale quotidienne de travail effectif, dépassement d'au-moins 1 heure et 30 minutes de la durée de conduit ininterrompue de 4 heures et 30 minutes, dépassement de moins d'1 heure et 30 minutes de la durée de conduit ininterrompue de 4 heures et 30 minutes, l'a condamnée à payer les amendes suivantes :-131 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale quotidienne de 10 heures,-27 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale hebdomadaire de 48 heures,-120 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 30 de conduite continue de plus de 1 heure 30,-49 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 30 de conduite continue de moins de 1 heure 30, et l'a condamnée à verser au syndicat CGT Conf-Dist la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts ;
" aux motifs propres que l'employeur pour être exonéré de sa responsabilité pénale, ne peut se prévaloir d'une délégation de pouvoirs qu'à la condition de faire la preuve qu'il s'est assuré que la délégation était exercée conformément à la règlementation ou qu'il prouve qu'il a mis en demeure le délégataire de respecter les termes de la délégation ; qu'il résulte de la délégation de pouvoir en date du 24 août 2009 que Mme Z... avait notamment pour fonction d'appliquer les lois et règlements dans son service en matière sociale s'agissant notamment des règles relatives au temps de travail ; que tant M. Y...que M. X...signaient les feuilles d'heures supplémentaires tous les mois de sorte qu'ils savaient les conditions dans lesquelles travaillaient les chauffeurs de l'entreprise, ou à tout le moins il leur appartenait de s'interroger sur la compatibilité entre le nombre d'heures travaillées et le respect de la réglementation du travail et en matière de coordination des transports ; que, à ce sujet, le procès-verbal établi le 29 juillet 2011 mentionne que l'absence de contrôle régulier des données enregistrées par l'employeur est manifeste pour le motif suivant : l'examen du volume d'heures rémunérées par l'employeur à l'ensemble des chauffeurs chaque mois à travers les bulletins de paie de janvier 2011, de février 2011 et de mars 2011, révèle que l'employeur rémunère sciemment des volumes d'heures qui ne peuvent être réalisées en respectant les plafonds des durées de travail quotidienne (10 heures) et hebdomadaire absolue (40 heures) prévues par le code du travail ; que ce procès-verbal fait également état de ce que le service n'était pas pourvu de logiciel de lecture des cartes de conduite et en conclut qu'en ne mettant pas de logiciel de traitement des données de conduite à la disposition de Mme Z..., l'employeur ne lui a pas assuré l'effectivité de la délégation de pouvoirs dont elle faisait l'objet ; que c'est dans ces conditions à bon droit que le premier juge a considéré qu'en ne portant aucune attention à la gestion du service fuel alors qu'ils auraient dû être alertés de ses dysfonctionnements, MM. Y...et X...ont commis une faute excluant qu'ils puissent se prévaloir de la délégation de pouvoir pour être exonérés de leur responsabilité pénale ; qu'il convient en outre de préciser que le sort des procédures prudhommales engagées contre leurs salariés sont sans effet sur leur responsabilité pénale, de même que sur la responsabilité pénale de la personne morale la société Conflans distribution, exerçant sous l'enseigne E Leclerc ; que le jugement entrepris sera dans ces conditions confirmé en ce qu'il a retenu dans les liens de la prévention la société Conflans distribution, exerçant sous l'enseigne E Leclerc, MM. Y...et X...; qu'il le sera également quant aux peines d'amende prononcées, parfaitement adaptées aux contraventions dont les prévenus ont été déclarés coupables ;
" aux motifs adoptés que c'est à l'employeur de s'assurer que la législation sur le temps de travail des conducteurs est respecté ; qu'en effet, en matière de transport routier, la responsabilité du dirigeant d'entreprise doit être retenue en raison d'une présomption de « faute positive personnelle », dès lors que ses instructions entraînent la commission de l'infraction, par exemple en raison d'objectifs qui ne tiendraient pas compte des temps de repos ou en raison d'une faute d'abstention qui découlerait d'une négligence de sa part ; qu'en outre, sa responsabilité doit être retenue lorsqu'il n'a pas pris les dispositions nécessaires en vue d'assurer le respect de la réglementation, comme le lui commandent l'article 15 du règlement n° 3820/ 85 CEE du 20 décembre 1985 et l'article 3 bis de l'ordonnance n° 58-1310 du 23 décembre 1958 sauf à prouver, pour s'exonérer de sa responsabilité pénale, qu'il a informé les salariés du contenu de la réglementation et leur a donné instruction de la respecter par les moyens de communication usuels en matière de droit du travail (affichage, remise du règlement communautaire, article du contrat de travail, émargement de notes de service) ; qu'il doit par ailleurs et simultanément prouver qu'il a organisé le travail en conséquence et qu'il s'est assuré du respect effectif de la réglementation ; qu'en l'espèce, le contrôle des disques chrono tachygraphes de M. A...Jacques, de M. B...Guillaume, de M. C...Jacques, de M. D...Xavier et de M. E...Pascal a permis de constater les contraventions visées dans la prévention ; qu'il ressort des auditions de M. B...et de M. C...que les salariés n'appliquaient pas la réglementation du travail et du transport et faisaient délibérément une mauvaise utilisation des disques chrono tachygraphes dans la mesure où toutes les heures supplémentaires leur étaient payées et que cela leur permettait d'avoir de bons salaires ; que M. A...Jacques précise que lorsqu'il travaillait au centre Leclerc, il mettait sa carte chrono tachygraphe dans le lecteur tous les matins pour ne la retirer que le soir sans arrêt si bien que les temps de repos ou de coupure n'apparaissait pas ; que M. D...confirme les déclarations de ses collègues tout en précisant que les chauffeurs avaient tous une formation de base-mais aucune formation spécifique à l'utilisation des chrono tachygraphe ; qu'il reconnaît avoir fait sciemment une mauvaise utilisation des disques puisqu'il se mettait en coupure lorsqu'il travaillait tout en précisant que MM. X...et Y...connaissaient parfaitement bien leurs conditions de travail ; qu'il ajoute qu'il connaissait les règles applicables en matière de réglementation de la durée du temps de conduite mais que les contraintes imposées par Mme Z..., chef du service Fuel l'obligeaient à y déroger ; qu'il résulte de l'ensemble de ces auditions que les chauffeurs connaissaient la réglementation et y dérogeaient de manière délibérée ; que ces infractions ont été constatées par la production des disques chronotachygraphes ; que bien qu'il apparaissent clairement que les salariés qui avaient eu une formation spécifique conformément aux attestation de formations produites par les prévenus, il n'en demeure pas moins que les infractions ont été commises, peu importe que le dépassement du temps de travail n'ai pas été employé au travail effectif ou à la conduite effective ; que pour se voir exonérer de leurs responsabilités pénale à titre personnel, MM. Y...et X..., arguent du fait que Mme Z... était chef du service fioul, qu'elle bénéficiait d'une délégation de pouvoir en bonne et due forme et qu'à ce titre elle est seule responsable des infractions constatées ; que cependant, il est de jurisprudence constante que l'employeur, pour être exonéré de sa responsabilité pénale, ne peut se prévaloir d'une délégation de pouvoir qu'à la condition que celui-ci fasse la preuve qu'il s'est assuré que la délégation était exercée conformément à la réglementation ou qu'il prouve qu'il a mis en demeure le délégataire de respecter les termes de la délégation ; qu'en l'espèce, il ressort de la délégation signée à Mme Z... le 24 août 2009 par M. X...Christian qu'elle avait notamment comme fonction d'appliquer et de faire appliquer les lois et règlements dans son service en matière social s'agissant notamment des règles relatives au temps de travail ; que MM. X...et Y...signaient les feuilles d'heures supplémentaires tous les mois, si bien qu'ils savaient les conditions dans lesquels travaillaient les chauffeurs de l'entreprise ; qu'à tout le moins, compte-tenu du nombre important d'heures supplémentaires et des sommes importantes versées au titre des salaires puisque toutes les heures supplémentaires étaient payées, ils auraient dû s'interroger sur la compatibilité entre le nombre d'heures travaillées et le respect de la réglementation du travail et en matière de coordination des transports ; que s'ils avaient exercé un réel contrôle sur l'activité du service fuel, ils auraient pu se convaincre de laxisme de la part de leur délégataire quant à l'application de la loi et des règlements et intervenir pour faire cesser la commission d'infractions ; qu'en outre, il ressort clairement de la procédure que suite à un contrôle de la part de l'inspection du travail que le service n'était pas pourvu de logiciel de lecture des cartes de conduite, empêchant dès lors Mme Z... de procéder à un contrôle strict des heures de conduites des chauffeurs ; qu'en conséquence, en ne portant aucune attention à la gestion du service fuel alors qu'ils auraient dû être alerter de ses dysfonctionnements, MM. Y...et X...ont commis une faute excluant qu'ils puissent aujourd'hui se prévaloir de la délégation de pouvoir pour être exonérés de leur responsabilité pénale ; qu'il y a donc lieu de déclarer la société Conflans distribution, exerçant sous l'enseigne E. Leclerc ainsi que MM. Y...et X...coupables des faits reprochés et de les condamner à payer chacun les amendes suivantes :-131 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale quotidienne de 10 heures,-27 x 200 euros au titre du dépassement de la durée maximale hebdomadaire de 48 heures,-120 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 30 de conduite continue de plus de 1 heure 30,-49 x 400 euros au titre du dépassement de la limite de 4 heures 30 de conduite continue de moins de 1 heure 30, conformément au procès-verbal dressé par l'inspecteur du travail le 29 juillet 2011 ;
" alors que la responsabilité pénale d'une personne morale n'est engagée qu'à partir du moment où il est établi que l'infraction reprochée a été commise pour son compte par un organe ou un représentant ; qu'en l'espèce, il ne résulte d'aucun motif de l'arrêt ou du jugement que les prétendus dépassements de la durée du travail effectués par les chauffeurs de la société Conflans distribution auraient été commis pour son compte par l'un de ses organes ou représentants ; qu'au contraire les premiers et seconds juges ont constaté que ces dépassements découlant d'un mauvais usage des disques chronotachygraphes permettaient aux chauffeurs d'obtenir le paiement indus d'heures supplémentaires à l'insu de la société Conflans distribution ; qu'en engageant la responsabilité pénale de cette personne morale sans démontrer que les infractions avaient été commises pour son compte par un organe ou un représentant, la cour d'appel a privé son arrêt de toute base légale au regard des textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que la société Conflans-Distribution, exerçant sous l'enseigne E Leclerc, M. X...et M. Y..., respectivement président directeur général et directeur général de celle-ci, ont été poursuivis des chefs de dépassements de la durée légale de travail effectif et de la durée légale de conduite à la suite des constatations effectuées par les fonctionnaires de l'inspection du travail lors de l'examen des disques chronotachygraphes de six des chauffeurs de l'entreprise et des éléments résultant de l'enquête préliminaire qui s'en est suivie ; que les juges du premier degré ont déclaré les prévenus coupables des faits visés dans la prévention ; que les prévenus ont relevé appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer le jugement en toutes ses dispositions, après avoir relevé que les chauffeurs, dont les disques chronotachygraphes ont été vérifiés, ont admis, en premier lieu, ne pas respecter sciemment la réglementation, afin d'augmenter le nombre d'heures supplémentaires et, ainsi, accroître leurs salaires, en second lieu, ont assuré que MM. X...et Y..., leurs employeurs, connaissaient parfaitement leurs conditions de travail, l'arrêt retient que les prévenus ne pouvaient se prévaloir de la délégation de pouvoirs, invoquée pour tenter de s'exonérer de leur responsabilité pénale, accordée à la salariée, responsable du service fuel, chargée, notamment, d'appliquer les règles relatives au temps de travail, alors que celle-ci, ne disposait pas du logiciel de lecture des cartes de conduite et n'était pas en capacité d'assurer l'effectivité de ladite délégation ; qu'enfin, la cour d'appel relève que MM. X...et Y...signaient, tous les mois, les feuilles d'heures supplémentaires de chaque chauffeur, de sorte qu'il leur appartenait de s'interroger sur la compatibilité entre le nombre d'heures supplémentaires et le respect de la réglementation du travail et en matière de coordination des transports, d'autant qu'il ressort des mentions du procès-verbal de l'inspection du travail que le volume d'heures rémunérées à chaque chauffeur révélait, de la part de l'employeur, l'absence manifeste de contrôle, celui-ci rémunérant sciemment des volumes d'heures ne pouvant être réalisées en respectant les plafonds des durées de travail quotidienne et hebdomadaire ;
Attendu qu'en prononçant par ces motifs dont il résulte que, d'une part, les prévenus, qui avaient la qualité d'organe ou de représentant de la société Conflans Distribution, s'abstenaient, sciemment, de contrôler les heures de conduite des chauffeurs de l'entreprise, dont les pratiques leur étaient connues, et ne permettaient pas à la salariée, responsable du secteur d'activité, d'y procéder, faute de l'avoir dotée des moyens nécessaires à l'accomplissement de la délégation de pouvoirs qu'elle avait reçue, d'autre part, agissaient, ainsi, pour le compte de la personne morale, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent qu'être écartés ; Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-huit novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 22 novembre 2017 n° 17-80.167
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Bruno X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, en date du 8 décembre 2016, qui, pour abus de biens sociaux, présentation de comptes annuels inexacts, travail dissimulé et recours aux services de travailleurs dissimulés, l'a condamné à 15 000 euros d'amende et cinq ans d'interdiction de gérer ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Germain, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller GERMAIN, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général SALOMON ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 460, 485, 512, 513, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande de renvoi à une audience ultérieure ;
"aux motifs qu'à l'audience publique du 27 octobre 2016, le président a constaté l'absence du prévenu et n'a pu l'informer de ses droits ; que Me Y..., avocat, de M. Bruno X... sollicite le renvoi de l'affaire suite aux différents courriers de son client qu'elle a fourni à la cour ; que le ministère public s'oppose à la demande de renvoi ; que la cour, après en avoir délibéré, rejette la demande de renvoi et retient l'affaire ; que Me Y... informe la cour que dans ces conditions, elle n'intervient plus pour M. X... ;
"1°) alors que le prévenu ou son avocat doivent toujours avoir la parole en dernier ; que cette règle s'applique à tout incident, notamment aux demandes de renvoi, dès lors qu'il n'est pas joint au fond ; que la cour d'appel qui n'a pas joint l'incident au fond et a rejeté la demande de renvoi de l'avocat de M. X... immédiatement après avoir entendu le ministère public s'opposant à cette demande, sans donner sur ce point la parole en dernier au conseil du prévenu, a méconnu le principe et les textes susvisés ;
"2°) alors que toute décision doit être motivée ; que les juges qui rejettent une demande de renvoi sont tenus de motiver leur décision ; qu'en se bornant à rejeter la demande de renvoi sans motiver sa décision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;
Vu l'article 513, alinéa 4, du code de procédure pénale, ensemble l'article 593 du même code ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, le prévenu ou son avocat auront toujours la parole les derniers ; que cette règle s'applique aussi à tout incident dès lors qu'il n'est pas joint au fond ;
Attendu que, selon le second de ces textes, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X..., condamné par le tribunal correctionnel des chefs de poursuites susvisés, a, ainsi que le ministère public, interjeté appel de cette décision ; qu'il n'a pas comparu devant la cour d'appel, que son avocat s'est présenté à l'audience et a sollicité le renvoi ; qu'il a été statué, au cours des débats, sur cette demande, sans que l'avocat du prévenu ait eu la parole le dernier et sans que les juges aient motivé leur décision de refus de renvoi de l'affaire ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés ;
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Agen, en date du 8 décembre 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Pau, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Agen et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-deux novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Civ.1 22 novembre 2017 n° 16-24.719
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Joint les pourvois n° E 16-23. 804 et Z 16-24. 719, qui sont connexes ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Michel X..., à qui a été prescrit du Mediator entre 2003 et 2009, a présenté, cette année-là, une insuffisance mitrale et subi, en 2011, une intervention consistant en un remplacement valvulaire mitral par une prothèse mécanique, à la suite d'une aggravation de sa symptomatologie ; qu'après avoir sollicité une expertise judiciaire, M. Michel X..., ainsi que Mme Françoise Y..., son épouse, et ses enfants, Laurent, Patricia, Christèle et Jérémy (les consorts X...), ont assigné la société Les Laboratoires Servier, producteur du Mediator (la société), en réparation du préjudice subi et mis en cause la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne (la caisse) qui a demandé le remboursement de ses débours ;
Sur le premier moyen du pourvoi n° E 16-23. 804 :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de sursis à statuer, alors, selon le moyen :
1°/ que, si l'action civile en réparation du dommage causé par une infraction pénale peut être exercée devant une juridiction civile, il doit toutefois être sursis au jugement de cette action tant qu'il n'a pas été prononcé définitivement sur l'action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement ; qu'il doit, notamment, en aller ainsi lorsque le fait générateur de responsabilité civile repose sur les mêmes éléments matériels que ceux de nature à constituer l'infraction pénale faisant l'objet des poursuites ; qu'en l'espèce, la société est poursuivie devant les juridictions pénales des chefs de tromperie, homicides et blessures involontaires, parce qu'elle aurait trompé les patients sur les qualités substantielles et les risques inhérents à l'utilisation du Mediator en n'informant pas ces derniers, ainsi que les médecins, de tous les effets indésirables susceptibles d'être liés à la consommation du médicament ; que l'action en responsabilité civile engagée par M. Michel X..., qui est partie civile à l'une des instances pénales, repose à la fois sur la démonstration par ce dernier d'un prétendu défaut du produit, tenant à une absence d'information sur les effets indésirables induits par sa consommation, et sur le fait que la société ne puisse de son côté s'exonérer en invoquant le risque de développement, c'est-à-dire le fait que l'état des connaissances scientifiques au moment du traitement du patient ne permettaient pas de déceler l'existence du défaut ; que ces différents éléments étant les mêmes que ceux qui font l'objet de la procédure pénale dans laquelle M. Michel X... s'est porté partie civile, il s'en déduit que l'action en responsabilité civile engagée par ce dernier est bien une action en réparation du dommage qui lui aurait été causé par les infractions pénales reprochées à la société, ce qui imposait donc aux juges du fond de surseoir à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure pénale ;
2°/ que le droit à un procès équitable implique que le respect des droits de la défense de chacun des plaideurs soit effectivement assuré ; que tel n'est pas le cas lorsque l'une des parties, poursuivie devant les juridictions pénales pour certaines infractions, est attraite devant les juridictions civiles sur le fondement des mêmes faits et se retrouve dans l'impossibilité d'invoquer au soutien de sa défense les éléments rassemblés dans le cadre de l'information judiciaire, indispensables pour apprécier la matérialité des faits qui lui sont reprochés, mais couverts par le secret de l'instruction ; qu'en l'espèce, la société faisait expressément valoir qu'elle était dans l'impossibilité de communiquer en vue de sa défense les pièces du dossier pénal couvertes par le secret de l'instruction, dont une expertise pharmacologique ordonnée dans le cadre de l'instruction pénale et d'autres pièces nécessaires à l'appréciation tant du caractère défectueux du Mediator que de l'état des connaissances scientifiques et techniques durant la période pendant laquelle ce médicament a été prescrit à M. Michel X... ; qu'en énonçant, en l'espèce, pour décider que la société n'aurait pas été privée du droit à un procès équitable, qu'il ne serait pas précisé en quoi les pièces du dossier pénal seraient pertinentes dans le cadre du débat civil et que « le débat portant sur les effets néfastes du Mediator apparaît largement dépassé », cependant que la communication des pièces litigieuses couvertes par le secret de l'instruction était indispensable pour apprécier tant le caractère défectueux du médicament que l'existence d'un risque de développement exonératoire de la responsabilité du fabricant, tous éléments qui, loin d'appartenir à un « débat dépassé », étaient au contraire au coeur du litige dont les juges du fond étaient saisis, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et violé l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que l'article 4 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007, n'impose à la juridiction civile de surseoir à statuer, en cas de mise en mouvement de l'action publique, que lorsqu'elle est saisie de l'action civile en réparation du dommage causé par l'infraction ; que, dans les autres cas, quelle que soit la nature de l'action civile engagée, et même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d'exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil, elle apprécie, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, s'il y a lieu de prononcer un sursis à statuer ;
Et attendu qu'après avoir constaté que l'action introduite devant la juridiction civile par les consorts X... n'était pas fondée sur les infractions pour lesquelles une information était ouverte contre la société des chefs de tromperie, homicides et blessures involontaires, mais sur la responsabilité sans faute de celle-ci au titre de la défectuosité du Mediator, la cour d'appel en a exactement déduit que l'action dont elle était saisie était indépendante de l'action publique ; que c'est sans méconnaître les exigences d'un procès équitable et en l'absence de démarche de la société aux fins que soient versées à la procédure civile les pièces du dossier pénal qu'elle considérait comme nécessaires aux besoins de sa défense, que la cour d'appel a décidé, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, et abstraction faite du motif surabondant critiqué par la seconde branche relatif au débat sur les effets néfastes du Mediator, qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir au pénal ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen du même pourvoi :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'écarter l'exonération de responsabilité qu'elle a invoquée sur le fondement du 4° de l'article 1386-11, devenu l'article 1245-10 du code civil et de la condamner au paiement de différentes sommes aux consorts X... et à la caisse, alors, selon le moyen :
1°/ que le producteur peut s'exonérer de sa responsabilité s'il établit que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut ; que l'état des connaissances scientifiques et techniques devant être pris en compte pour apprécier cette cause d'exonération doit être directement relatif au produit incriminé et ne peut être exclusivement celui concernant un produit voisin, quand bien même il y aurait une parenté chimique entre eux ; qu'en effet, l'état des connaissances scientifiques et techniques doit nécessairement intégrer la connaissances des effets secondaires réellement constatés du médicament en cause, et non seulement ceux de médicaments voisins ; qu'en l'espèce, les juges du fond se sont bornés à relever que les connaissances scientifiques et techniques existant en 1997 permettaient d'établir la cardiotoxicité des fenfluramines et de leur métabolite, la norfenfluramine ; qu'ils n'ont pas, en revanche, constaté que l'état des connaissances scientifiques et techniques relatif au benfluorex lui-même permettait à l'époque de parvenir à une conclusion similaire, ce qui leur était impossible puisque la pharmacovigilance du benfluroex étant différente de celle des fenfluramines, elle n'avait conduit à aucun signal comparable de toxicité, jusqu'en 2009 ; qu'en se prononçant ainsi, au regard du seul état des connaissances relatif à des substances ayant certes une parenté chimique et un métabolite commun avec le benfluorex (Mediator) mais restant pourtant bien distinctes de celui-ci, pour en déduire de façon péremptoire qu'« au plus tard en 1997 existaient des données scientifiques concordantes sur les effets nocifs du Mediator » en raison de « l'extrême similitude des propriétés du Mediator avec d'autres médicaments jugés dangereux dès 1997 », la cour d'appel a violé l'article 1386-11 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ que la société faisait valoir que le compte rendu de la réunion du CTPV du 17 décembre 1998, constituant la cote D221/ 72 du dossier pénal, pièce couverte par le secret de l'instruction qui ne pouvait être produite, soulignait que si la fenfluramine et le benfluorex avait tous deux pour métabolite la norfenfluramine, celle-ci ne représentait qu'un taux circulant de 5 % pour le benfluorex contre 30 % pour la fenfluramine, se traduisant par 7 % de norfenfluramine dans les urines pour la fenfluramine contre 2 % pour le benfluorex, ce qui conduisait à la conclusion qu'il était improbable que le benfluorex induise les mêmes effets que la fenfluramine ; qu'en relevant que, selon une étude italienne réalisée en 1999, trois comprimés de Mediator conduisent à produire autant de norfenfluramine que deux comprimés d'Isoméride (fenfluramine), sans répondre aux conclusions de la société qui montraient qu'en tout état de cause, le taux circulant de norfenfluramine était sans commune mesure pour les deux médicaments, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la société faisait valoir que l'étude IPPHS (International Primitive Pulmonary Hypertension Study) datant de 1995 et concernant exclusivement la classe des médicaments anorexigènes (Isoméride et Pondéral), à l'exclusion du benfluorex, était en outre sans aucune pertinence dans le cas de M. X..., puisque concernant uniquement l'hypertension artérielle pulmonaire et non les valvulopathies ; qu'en se fondant, pour déterminer l'état des connaissances scientifiques et techniques relatif au benfluorex au moment du traitement de M. X..., sur la « démonstration, en 1995, lors de la publication du rapport de l'IGAS, d'une augmentation du risque d'HTAP » liés à la prescription de médicaments anorexigènes, sans répondre aux conclusions de la société qui démontraient que cette étude de 1995, concernant exclusivement les HTAP, était totalement hors de propos s'agissant des valvulopathies, et a fortiori des valvulopathies sous benfluorex, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que la société faisait valoir que l'ensemble des données relatives à la pharmacovigilance propre au benfluorex ne permettait pas de conclure à une possible neurotoxicité de celui-ci avant 2009, dès lors qu'à l'occasion du Comité technique de pharmacovigilance du 22 juin 1999, le rapport italien concluait que « les données disponibles ne permettent pas de conclure sur une possible neurotoxicité ou cardiotoxicité du benfluorex », que le premier cas de valvulopathie, qualifié de douteux, rapporté en pharmacovigilance datait de 1999, que seuls deux cas confirmés avaient été relevés en 2006 et 2008 et que les compte-rendus de la Commission nationale de pharmacovigilance des 29 novembre 2005 et 27 mars 2007, comme les publications de l'AFSSAPS du 26 novembre 2009, mentionnaient de façon unanime l'absence de signal significatif de toxicité du Mediator avant la fin de l'année 2009 ; qu'en retenant qu'il était établi « qu'au plus tard en 1997 existaient des données scientifiques concordantes sur les effets nocifs du Mediator », sans répondre à ce moyen déterminant des conclusions de la société, la cour d'appel a derechef violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que le producteur est responsable de plein droit du dommage causé par le défaut de son produit à moins qu'il ne prouve, selon le 4° de l'article 1386-11, devenu 1245-10 du code civil, que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n'a pas permis de déceler l'existence du défaut ; que la date de mise en circulation du produit qui a causé le dommage s'entend, dans le cas de produits fabriqués en série, de la date de commercialisation du lot dont il faisait partie ;
Et attendu qu'après avoir retenu le caractère défectueux du Mediator, l'arrêt décrit, par motifs propres et adoptés, les conditions dans lesquelles ont été révélés les effets nocifs de ce produit en raison, notamment, de sa similitude avec d'autres médicaments qui, ayant une parenté chimique et un métabolite commun, ont été, dès 1997, jugés dangereux, ce qui aurait dû conduire la société à procéder à des investigations sur la réalité du risque signalé, et, à tout le moins, à en informer les médecins et les patients ; qu'il ajoute que la possible implication du Mediator dans le développement de valvulopathies cardiaques, confirmée par le signalement de cas d'hypertensions artérielles pulmonaires et de valvulopathies associées à l'usage du benfluorex, a été mise en évidence par des études internationales et a conduit au retrait du médicament en Suisse en 1998, puis à sa mise sous surveillance dans d'autre pays européens et à son retrait en 2003 en Espagne, puis en Italie ; que, de ces énonciations, desquelles il résulte que l'état des connaissances scientifiques et techniques, au moment de la mise en circulation des produits administrés à M. X... entre 2003 et 2009, permettait de déceler l'existence du défaut du Mediator, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, en a exactement déduit que la société n'était pas fondée à invoquer une exonération de responsabilité au titre du dommage subi par M. X... ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal n° Z 16-24. 719 pris en ses première et deuxième branches :
Vu l'article 1386-1, devenu l'article 1245 du code civil, et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ;
Attendu que le droit de la victime à obtenir l'indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d'une prédisposition pathologique lorsque l'affection qui en est issue n'a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable ;
Attendu que, pour limiter la réparation des préjudices des consorts X... à hauteur de 50 %, l'arrêt relève, en se fondant sur les constatations des experts, que l'insuffisance mitrale a été découverte en janvier 2009, alors que M. X... ne souffrait auparavant d'aucune pathologie cardiaque, que les troubles présentés par ce dernier sont pour moitié d'origine médicamenteuse toxique et pour moitié imputables à la pré-existence d'une valvulopathie rhumatismale asymptomatique, et que l'absence de dilatation de l'oreillette gauche suggère une aggravation rapide liée au Mediator plutôt qu'à l'évolution naturelle d'une valvulopathie mitrale rhumatismale ; qu'il en déduit que les experts ont objectivé l'existence de lésions plus anciennes d'origine rhumatismale auxquelles ils attribuent pour moitié la survenance de la pathologie mitrale qui n'est pas exclusivement imputable au Mediator ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans constater que les effets néfastes de la valvulopathie mitrale s'étaient révélés avant l'exposition au Mediator ou se seraient manifestés de manière certaine indépendamment de la prise de Mediator, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident n° Z 16-24. 719 :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation encourue du chef des dispositions de l'arrêt limitant à 50 % l'indemnisation mise à la charge de la société au profit des consorts X... entraîne l'annulation par voie de conséquence du chef de dispositif concernant la condamnation prononcée au profit de la caisse au titre de ses débours ;
Crim. 21 novembre 2017 n° 17-80.003
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- - M. Daniel X..., La société Speed rabbit pizza,
contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 9e chambre, en date du 2 décembre 2016, qui, pour pratique commerciale trompeuse, a condamné, le premier, à 5 000 euros d'amende, la seconde à 10 000 euros d'amende ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Ingall-Montagnier, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de Mme le conseiller INGALL-MONTAGNIER et les conclusions de M. l'avocat général DESPORTES ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire personnel produit, commun aux demandeurs ; Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 593 du code de procédure pénale, de l'article 4 du décret n°93-1074 du 13 septembre 1993 pris pour l'application de la loi du 1er aout 2015 et de l'article 604 du code de procédure civile ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article L.121-1 du code de la consommation ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L.121-1 et L.121-5 du code de la consommation ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure qu'à la suite d'une enquête de la direction départementale de la protection des populations des Hauts-de-Seine la société Speed rabbit pizza et M. Daniel X..., son président directeur général, ont été poursuivis pour pratique commerciale trompeuse sur les caractéristiques des ingrédients des denrées alimentaires employés par la société ; que les juges du premier degré les ont déclarés coupables des faits reprochés et condamnés à des amendes ; que la société, M. Daniel X... et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer le jugement déclarant les prévenus coupables de pratique commerciale trompeuse, l'arrêt relève que la mention publicitaire, figurant sur un dépliant et sur le site internet de la société, "le choix d'un maximum d'ingrédients naturels" était immédiatement illustrée par l'information "des ingrédients sans OGM. Notre pâte à pizza est au levain. Notre boeuf est garanti 100% pur boeuf" ; que les juges ont retenu, par motifs propres et adoptés, que le consommateur normalement avisé et attentif perçoit, à la lecture de ces mentions, les produits élaborés par ces professionnels comme composés d'un maximum d'ingrédients naturels alors, d'une part, que la préparation carnée ne comprend que 75% de boeuf et 25% de stabilisants, de colorant, d'exhausteur de goût, de fibre alimentaire et de chapelure et, d'autre part, que le levain, dévitalisé et déshydraté, utilisé pour l'élaboration de la pâte à pizzas ne permet pas de retenir le qualificatif d'ingrédient naturel ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations la cour d'appel a, sans insuffisance, ni contradiction, répondant aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle, caractérisé, en tous ses éléments, tant matériel qu'intentionnel, le délit de pratique commerciale trompeuse dont elle a déclaré les prévenus coupables ;
D'où il suit que les moyens, qui reviennent à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 21 novembre 2017 n° 16-86.745
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
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M. Yves X...,
M. Serge Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 7e chambre, en date du 26 octobre 2016, qui, pour obstacle au droit de visite et exécution irrégulière de travaux soumis à déclaration préalable, les a condamnés chacun à 25 000 euros d'amende ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Ingall-Montagnier, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de Mme le conseiller INGALL-MONTAGNIER, les observations de la société civile professionnelle FOUSSARD et FROGER, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DESPORTES ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que MM. Yves X... et Serge Y..., actionnaires de la société civile immobilière (la société) YS Immobilier, propriétaire de la majorité des lots de copropriété d'un immeuble, sis 53 rue Montesquieu à Lyon dans un site inscrit dans le périmètre d'un monument historique, ont effectué des travaux d'aménagement dans les combles ; que, poursuivis devant le tribunal correctionnel, ils ont été relaxés des faits reprochés d'obstacle au droit de visite et déclarés coupables d'exécution irrégulière de travaux soumis à déclaration préalable ; qu'ils ont interjeté appel ainsi que le ministère public ;
En cet état ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, §2, de la Convention européenne des droits de l'homme ; L. 421-1, L. 480-1, L. 480-4, L. 480-5, L. 480-6, L. 480-7, R. 421-4, R. 421-9, R. 421-17, R. 462-1 du code de l'urbanisme, préliminaire, 8, 427, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré MM. Yves X... et Serge Y... coupables d'exécution irrégulière de travaux soumis à déclaration préalable et les a condamnés à une amende de 25 000 euros chacun ;
"aux motifs propres qu'il l'a précédemment été rappelé, les prévenus ont reconnu tant à la barre de la cour que dans leur écriture qu'ils ont exécuté les travaux conformément, non pas à la déclaration préalable de travaux déposée le 16 octobre 2009 et la décision de non opposition obtenue le 26 novembre 2009, mais conformément à la déclaration de travaux, déposée le 11 mai 2009 laquelle avait fait l'objet d'un refus de la part du maire le 6 août 2016 ; que, dès lors, la question de la validité du procès-verbal du 9 février 2012 comme des constatations effectuées à cette occasion est indifférente à l'établissement des faits, le moyen tiré de la nullité du procès-verbal de constatation est dénué de pertinence et doit être rejeté sans plus ample examen ; que pour contester les poursuites diligentées à leur encontre, ils invoquent l'exception de prescription de l'action publique soutenant en effet que les travaux, dont ils ne discutent pas la matérialité, sont achevés depuis 2004 ; qu'ils produisent au soutien de ce moyen le permis de construire accordé en 2005, des devis de travaux, en date de 2005 et 2006, une attestation de paiement de ces devis établie par la BNP Paribas agence de Marseille le 2 mai 2006 et une attestation d'une agence immobilière, en date du 12 septembre 2016 ; que s'il est incontestable que des travaux ont été entrepris dans l'immeuble situé au n° 53 de la rue Montesquieu dans le cadre d'un permis de construire dûment déposé en 2005 puis de déclarations préalables de travaux, il ne ressort d'aucune pièce au dossier de la cour qu'une déclaration d'achèvement des travaux ait été faite de telle sorte que pas plus la SCI YS immobilier que les prévenus ne peuvent se prévaloir des conséquences inhérentes à cette formalité ; que, par ailleurs, il s'infère des déclarations préalables de travaux déposées par M. X... en 2009 que la totalité des travaux envisagés lors de l'achat de cet immeuble (Cf le PV de l'assemblée de copropriétaire du 10 février 2005 ou le permis de construire), notamment s'agissant des combles, n'étaient pas achevés en 2009, tous les lots propriété de la SCI YS Immobilier n'étaient pas encore affectés à leur usage final à savoir des lots d'habitation et notamment pas les combles ; qu'en outre, s'agissant des devis de travaux et de l'attestation de paiement établie par la banque, il n'est pas possible d'en déduire l'achèvement de la totalité des travaux début 2006 faute de corrélation exacte entre les devis produits et les noms et les sommes figurant à l'attestation de paiement de la banque, pour la même raison, l'absence de corrélation possible entre les références des numéros des lots loués mentionnés par l'agence et ceux objet de cette instance, l'attestation de l'agence immobilière indiquant louer les lots litigieux depuis septembre 2004 s'avère elle aussi insuffisante en l'absence de tout autre pièce l'étayant ; qu'aucune prescription extinctive de l'action publique ne peut donc valablement être invoquée par les prévenus ; qu'il est constant que M. X... a fait déposer en mairie de Lyon une déclaration préalable de travaux le 11 mai 2009 visant à la création de deux logements dans les combles et à la réalisation de cinq velux ; qu'il a reçu le 6 août 2009 un refus de la part des services de l'urbanisme de la mairie motivé par les manquements aux règles de sécurité et au PLU ; qu'il est tout aussi constant qu'il a déposé le 16 octobre 2009 une nouvelle déclaration préalable de travaux conforme cette fois aux exigences du code de l'urbanisme en matière de sécurité et aux règles du PLU ; qu'il a d'ailleurs reçu un avis favorable le 26 novembre 2009, mais MM. X... et Y... ont délibérément méconnu les limites de leur propre déclaration de travaux déposée en octobre 2009 et tout aussi délibérément réalisé ceux figurant à leur déclaration préalable du 11 mai 2009 et qui leur avaient été refusé en août 2009 ; que la chronologie des faits, les explications et les arguments des prévenus attestent amplement de leur volonté délibérée de ne pas se conformer aux dispositions du code de l'urbanisme en matière de sécurité et au plan local d'urbanisme que le maire leur a rappelé à l'occasion de ses décisions de rejet puis de non opposition aux déclarations préalables de travaux déposées par eux ; que la matérialité des faits comme l'intention délictuelle sont amplement établies par les développements qui précèdent ; qu'il convient de confirmer le jugement sur la culpabilité ;
"et aux motifs éventuellement adoptés que quand bien même la SCI YS Immobilier a été la propriétaire des combles, lieux des travaux contestés, en leur qualité d'associés de cette société, MM. X... et Y... peuvent être poursuivis des infractions au code de l'urbanisme en leur nom personnel, en qualité de bénéficiaires des travaux comme prévu par l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme ; que s'ils ont invoqué avoir mandaté M. Z... pour déposer les déclarations préalables, ils ne justifient aucunement de l'existence et du contenu de ce mandat, contesté par l'intéressé ; qu'il sera rappelé que le dossier de déclaration préalable déposé le 11 mai 2009 l'a été au nom de M. X... en indiquant une adresse au ... et que dès lors celui-ci ne peut ensuite contester l'envoi des courriers de la mairie à son nom et à son adresse telle qu'indiquée ; que si en leur défense les prévenus ont invoqué la tardiveté de la décision de rejet du 6 août 2009 intervenue alors que les travaux avaient été réalisés et par ailleurs non motivée ; qu'ils n'ont cependant interjeté aucun recours et une deuxième déclaration préalable sera déposée indiquant mensongèrement la création d'un duplex ; que selon le procès-verbal de la ville de Lyon du 9 février 2012, le propriétaire de l'appartement du troisième étage avait précisé dans un courrier ne pas être informé de ce projet ; que, de plus, selon les prévenus, les travaux de création de deux appartements dans les combles étaient déjà réalisés au jour de la deuxième déclaration n'ayant de préalable que le nom, qu'au vu des statuts de la SCI YS Immobilier, celle-ci avait été créée pour l'acquisition, la transformation, la gestion par voie de location ou autrement du 53 rue Montesquieu ; que MM. X... et Y... qui ont fait le choix de créer une SCI pour acheter l'immeuble et le réaménager même si quelques lots auraient été préemptés, n'ont pas pu ignorer les règles d'urbanisme relatives aux travaux envisagés ; que d'ailleurs, la première déclaration préalable prévoyait une surface hors-d'oeuvre nette maximale envisagée de 46,63 n-12 donc relevant d'une autorisation de construire et non d'une déclaration et le document explicatif joint précisait l'objectif de ce permis de construire ; que les requérants ont été d'une particulière mauvaise foi puisque faisant croire à la réalisation d'un duplex conforme aux règles d'urbanisme à partir d'un appartement dont ils n'étaient pas propriétaires et alors que les deux studios au quatrième étage avait déjà été réalisés ; qu'ils ont fait fi des règles de sécurité et ont sciemment commis le délit de travaux sans permis de construire ;
"1°) alors que s'agissant des délits, l'action publique se prescrit par trois ans à compter de l'accomplissement des faits ; qu'en cas de travaux, la prescription commence à courir à compter de l'achèvement de ceux-ci ; que les travaux sont achevés, dès lors que l'immeuble est affecté à l'usage auquel il est destiné ; que MM. X... et Y... ont établi que les travaux avaient été achevés en 2004 en produisant notamment l'attestation de l'agence selon laquelle les locaux ont été loués à partir de 2004 ; qu'en écartant néanmoins l'exception de prescription des travaux aux motifs inopérants qu'aucune déclaration d'achèvement des travaux n'avait été produite pas les prévenus, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;
"2°) alors que et en tout cas, la déclaration d'achèvement a été créée par décret du 5 janvier 2007 avec entrée en vigueur le 1er octobre 2007 ; que celle-ci n'était donc exigible que pour les travaux achevés depuis le 1er octobre 2007 ; qu'en exigeant une déclaration d'achèvement des travaux quand celle-ci n'était pas prévue légalement au moment des travaux achevés en 2004, la cour d'appel a de nouveau violé les textes susvisés ;
"3°) alors que la prescription de l'action publique en matière de délit est péremptoire et d'ordre public ; qu'il appartient au ministère public de déterminer que cette action n'est pas éteinte ; qu'en relevant que les documents produits par les prévenus ne suffisaient pas à établir la prescription « en l'absence de toute autre pièce l'étayant » de sorte qu'elle faisait peser la charge de la preuve sur MM. X... et Y..., les juges du fond ont violé les textes susvisés, notamment les articles 8 et 427 du code de procédure pénale ;
"4°) alors que, dès lors, qu'ils écartent la prescription, les juges doivent s'assurer du moment où le délit a été consommé et fixer le point de départ de la prescription ; qu'en se bornant à rejeter les éléments produits par MM. X... et Y... sans pour autant déterminer une date d'achèvement des travaux fixant le point de départ de la prescription, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu que, pour écarter l'exception de prescription du délit d'exécution irrégulière de travaux soumis à déclaration préalable, l'arrêt énonce que MM. X... et Y..., qui soutiennent avoir achevé en 2004 lesdits travaux, produisent des devis de travaux de 2005 et 2006, qu'ils ont reconnu les avoir effectués conformément à la seconde déclaration préalable déposée le 11 mai 2009, que les juges ajoutent qu'il s'infère des deux déclarations préalables déposées en 2009 par M. X... que la totalité des travaux envisagés lors de l'achat de l'immeuble, notamment ceux des combles, n'étaient pas achevés en 2009 et que les combles n'étaient pas encore affectés à leur usage final de lots d'habitation ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Mais sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 461-1 et L. 480-12 du code de l'urbanisme, L. 151-1, L. 152-4, alinéa 5, et L. 152-10 du code de la construction, 121-3 du code pénal, préliminaires, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a, infirmant le jugement, déclaré M. Yves X... coupable des faits d'obstacle au droit de visite et l'a condamné en répression à une amende de 25 000 euros chacun ;
"aux motifs qu'en ce qui concerne l'obstacle au droit de visite, il doit être rappelé qu'aux termes des dispositions des articles L. 480-12 et L. 461-1 du code de l'urbanisme visés à la prévention, est coupable d'obstacle à l'exercice du droit de visite par les autorités toute personne n'ayant pas déféré à la convocation des services municipaux sur place ; que M. X... a régulièrement été convoqué pour le 9 février 2011 à 14 heures 30 par lettre recommandée en date du 12 janvier 2012 avec accusé de réception à l'adresse mentionnée dans la déclaration préalable de travaux déposée le 16 octobre 2009 ; que cette lettre l'informait non seulement du lieu, du jour, de l'heure de la visite mais aussi de son objet : "le contrôle de la conformité des travaux" ; que M. X... était absent le jour du rendez-vous ne permettant pas au fonctionnaire municipal missionné de contrôler la conformité des travaux ; que les éléments matériels et intentionnels de l'infraction sont donc établis à l'égard de M. X... mais aussi de M. Y... ; que le jugement doit sur ce point être infirmé ;
"1°) alors que le délit prévu par l'article L. 480-12 du code de l'urbanisme n'est caractérisé que si le prévenu a mis obstacle à l'exercice du droit de visite prévu à l'article L. 461-1 du même code ; qu'il suppose un acte positif du prévenu ayant pour conséquence d'empêcher ou d'interdire l'exercice de ce droit ; que le simple fait d'être absent le jour de la visite ne peut constituer un tel acte ; qu'en entrant en voie de condamnation du chef d'obstacle au droit de visite, quand l'élément matériel de l'infraction n'était pas établi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
"2°) alors que le délit prévu par l'article L. 480-12 du code de l'urbanisme est un délit intentionnel ; qu'en se bornant, pour retenir la culpabilité de M. X... du chef d'obstacle au droit de visite, à relever que M. X... était absent le jour de la visite sans dire en quoi l'élément intentionnel de l'infraction était établi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
"3°) alors que dans ses conclusions d'appel, M. X... faisait état de ce que, de toute façon, les travaux ayant été réalisés en 2004 et terminés en 2005, l'article L. 461-1 du code de l'urbanisme ne pouvait s'appliquer, dès lors que les visites sont réalisées au cours des travaux ou dans les trois ans qui suivent, que cet article ne pouvait donc s'appliquer puisque les visites ont eu lieu en 2012 soit 7 ans après la fin des travaux, qu'en ne répondant pas à cette argumentation essentielle quant à l'issue des débats, les juges du fond ont entaché leur décision d'un défaut de réponse à conclusions" ;
Et sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 461-1 et L. 480-12 du code de l'urbanisme, L. 151-1, L. 152-4, alinéa 5, et L. 152-10 du code de la construction, 121-3 du code pénal, préliminaires, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a, infirmant le jugement, déclaré M. Serge Y... coupable des faits d'obstacle au droit de visite et l'a condamné à une amende de 25 000 € chacun ;
"aux motifs qu'en ce qui concerne l'obstacle au droit de visite, il doit être rappelé qu'aux tenues des dispositions des articles L. 480-12 et L. 461-1 du code de l'urbanisme visés à la prévention, est coupable d'obstacle à l'exercice du droit de visite par les autorités toute personne n'ayant pas déféré à la convocation des services municipaux sur place ; que M. X... a régulièrement été convoqué pour le 9 février 2011 à 14 heures 30 par lettre recommandée en date du 12 janvier 2012 avec accusé de réception à l'adresse mentionnée dans la déclaration préalable de travaux déposée le 16 octobre 2009 ; que cette lettre l'informait non seulement du lieu, du jour, de l'heure de la visite mais aussi de son objet : "le contrôle de la conformité des travaux" ; que M. X... était absent le jour du rendez-vous ne permettant pas au fonctionnaire municipal missionné de contrôler la conformité des travaux ; que les éléments matériels et intentionnels de l'infraction sont donc établis à l'égard de M. X... mais aussi de M. Y... ; que le jugement doit sur ce point être infirmé ;
"1°) alors que le délit prévu par l'article L. 480-12 du code de l'urbanisme n'est caractérisé que si le prévenu a mis obstacle à l'exercice du droit de visite prévu à l'article L. 461-1 du même code ; qu'il suppose un acte positif du prévenu ayant pour conséquence d'empêcher ou d'interdire l'exercice de ce droit ; qu'en l'espèce, en l'absence de convocation adressée à M. Y..., ce dernier ne pouvait faire obstacle au droit de visite ; qu'en entrant en voie de condamnation du chef d'obstacle au droit de visite, quand l'élément matériel de l'infraction n'était pas établi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
"2°) alors que le délit prévu par l'article L. 480-12 du code de l'urbanisme est un délit intentionnel ; qu'en se bornant, pour retenir la culpabilité de M. Y... du chef d'obstacle au droit de visite, à relever que « les éléments matériels et intentionnels de l'infraction sont donc établis à l'égard de M. X... mais aussi de M. Y... » sans dire en quoi pour ce dernier l'élément intentionnel de l'infraction était établi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
"3°) alors que dans ses conclusions d'appel, M. Y... faisait état de ce que, de toute façon, les travaux ayant été réalisés en 2004 et terminés en 2005, l'article L. 461-1 du code de l'urbanisme ne pouvait s'appliquer, dès lors que les visites sont réalisées au cours des travaux ou dans les trois ans qui suivent, que cet article ne pouvait donc s'appliquer puisque les visites ont eu lieu en 2012 soit 7 ans après la fin des travaux, qu'en ne répondant pas à cette argumentation essentielle quant à l'issue des débats, les juges du fond ont entaché leur décision d'un défaut de réponse à conclusions" ;
Les moyens étant réunis ;
Vu les articles L. 480-12 et L. 461-1 du code de l'urbanisme et 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que, d'une part, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, d'autre part, le délit d'obstacle à l'exercice, par les autorités habilitées, du droit de visite des constructions en cours suppose établie une volonté de se soustraire à leur contrôle ;
Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables d'obstacle au droit de visite, l'arrêt énonce qu'une convocation préalable à la visite de contrôle des travaux a été adressée à M. X..., par lettre recommandée, à l'adresse mentionnée dans la déclaration préalable de travaux, l'informant du lieu, du jour, de l'heure de la visite et de l'objet du contrôle, que cependant M. X... était absent le jour du rendez-vous ne permettant pas au fonctionnaire missionné de contrôler la conformité des travaux ; que les éléments matériels et intentionnels de l'infraction sont établis à son égard mais aussi à celui de M. Y... ;
Mais attendu qu'en statuant par ces seuls motifs qui ne suffisent pas à caractériser la volonté des deux prévenus de faire obstacle au droit de visite prévu à l'article L. 461-1 précité, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; que n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond, elle aura lieu sans renvoi, ainsi que le permet l'article L.411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon, en date du 26 octobre 2016, en ces seules dispositions ayant condamné M. X... et de M. Y... pour obstacle à l'exercice du droit de visite, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 21 novembre 2017 n° 16-86.072
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Mamadou X...,- M. Belaïd Y..., partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 2-8, en date du 14 septembre 2016, qui, pour blessures involontaires, a condamné le premier à 500 euros d'amende, ordonné la suspension de son permis de conduire et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 10 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Dreifuss-Netter, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de Mme le conseiller DREIFUSS-NETTER, les observations de la société civile professionnelle BORÉ, SALVE DE BRUNETON et MÉGRET et de la société civile professionnelle ROCHETEAU et UZAN-SARANO, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DESPORTES ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires, en demande, en défense et additionnel produits ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. X...;
Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;
Attendu que le moyen n'est pas de nature à être admis ;
Sur le second moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 1er et 4 de la loi du 5 juillet 1985, 121-1, 121-3, 222-19-1, 222-20-1 du code pénal, R. 413-3, R. 413-17 du code de la route, 2, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit que M. Y... a participé à la réalisation de son dommage dans la proportion de 50 %, opéré un partage entre le prévenu M. X...et la partie civile M. Y... à hauteur de 50 % chacun et condamné M. X...à verser à la partie civile une provision de 15 000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice corporel ;
" aux motifs que, sur l'action civile, en vertu de l'article 2 du code de procédure pénale, l'action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ; que la victime ainsi définie est fondée à réclamer et à obtenir la réparation intégrale de son préjudice ; que le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties ; qu'en l'espèce, M. X...a commis une faute d'imprudence pour avoir, alors qu'il conduisait un véhicule et s'approchait d'une intersection de routes, omis de vérifier que la chaussée qu'il allait croiser était libre, circuler à allure d'autant plus modérée que les conditions de visibilité et de circulation pouvaient être moins bonnes, éventuellement en annonçant son approche, cette faute étant en rapport de causalité avec l'accident au cours duquel M. Y... a été blessé ; qu'à la suivre dans ses explication, la partie civile, M. Y..., déclare qu'après avoir franchi le carrefour au feu vert, il se serait d'abord arrêté au milieu du carrefour, à raison de la présence d'un véhicule de moyenne taille de couleur grise ou blanche qui circulait sur l'avenue Gallieni en provenance de Gentilly, sur la voie la plus à gauche dans son sens de circulation, précisant que le véhicule était soit à l'arrêt, soit à très faible allure, comme s'il avait « calé » et comme si le véhicule n'avançait pas, que constatant alors que ce véhicule n'avançait pas vers lui, elle aurait redémarré après son bref arrêt au centre du carrefour pour s'engager en direction de la rue J. Destrée pour prendre le boulevard périphérique, qu'elle aurait donc démarré du centre du carrefour en regardant devant elle et n'aurait vu qu'au dernier moment un véhicule (celui conduit par le prévenu) arriver de sa droite, de l'avenue Gallieni à Gentilly, en direction de la rue de la Poterne des Peupliers ; que si tel est le cas, M. Y... admet implicitement qu'il a repris sa progression sans vérifier qu'un autre véhicule, bénéficiaire du feu vert et venant de [l'avenue] Gallieni, ne s'engageait à son tour dans le carrefour ; qu'ainsi, M. Y... devait la priorité à M. X...qui circulait sur la voie de gauche, avenue Gallieni, en sens inverse, pour se rendre rue de la Poterne des Peupliers, que le non-respect par la partie civile de cette règle important du code de la route, prévue à l'article R. 415-4 dudit code commis par celui-ci a été à l'origine de l'accident dont il a été victime le 7 novembre 2011 ; que lorsque plusieurs fautes ont concouru au dommage, la responsabilité de leurs auteurs se trouve engagée dans la mesure qu'il appartient aux juges du fond de déterminer ; que quelle que soit la nature des infractions commises, les juridictions pénales qui constatent l'existence d'une faute de la victime ayant concouru au dommage doivent en tirer les conséquences sur l'évaluation du montant de l'indemnité due à cette dernière par le prévenu ; qu'en l'espèce, il convient de relever à l'actif de la victime M. Y... l'existence d'une faute ayant concouru au développement de l'infraction et à ses conséquences financières, et par suite de tenir compte de cette faute pour évaluer la réparation du dommage mise à la charge du prévenu ; qu'il y a lieu de considérer que M. Y... a contribué et ce à 50 % à la survenance des blessures dont il a été lui-même victime ; que la cour ne dispose pas des éléments d'information nécessaires pour liquider le préjudice de la partie civile ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a ordonné une mesure d'expertise médicale ; que c'est dont par une juste et exacte appréciation des données de la cause que le tribunal a ordonné une expertise médico-légale de la partie civile M. Y..., confiée au docteur Annie Z..., en fixant à la somme de 800 euros le montant de la provision à valoir sur les frais d'expertise devant être consigné par M. Y..., condamné Soumare Samba à payer à la partie civile la somme de 15 000 euros à titre de provision et renvoyer l'examen de l'affaire sur les intérêts civils ;
" 1°) alors que la faute du conducteur victime a pour effet d'exclure tout droit à indemnisation lorsqu'elle revêt un caractère exclusif c'est-à-dire lorsqu'elle est seule à l'origine de son dommage ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. Y... a démarré brusquement du centre de l'intersection où il se trouvait alors qu'il était masqué par une voiture et ne pouvait voir le véhicule de M. X...qui arrivait à sa hauteur sur une route prioritaire et bénéficiait du feu vert ; qu'elle a retenu que c'est cette violation par M. X...d'une règle essentielle du code de la route, prévue à l'article R. 415-4 dudit code, qui « a été à l'origine de l'accident dont il a été victime » ; qu'en affirmant qu'il y avait lieu d'opérer un partage de responsabilité entre le prévenu et la partie civile à hauteur de 50 % chacun, quand il résultait de ses propres constatations que la faute de la partie civile était seule à l'origine de l'accident et de ses conséquences préjudiciables, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
" 2°) alors, que lorsque le conducteur d'un véhicule impliqué dans un accident de la circulation a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice, le juge du fond est tenu d'apprécier si cette faute a pour effet de limiter ou d'exclure son indemnisation en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur dont le véhicule est également impliqué dans l'accident ; qu'en jugeant que M. X...est responsable du préjudice subi par M. Y... à hauteur de 50 % compte tenu de sa « faute d'imprudence pour avoir, alors qu'il conduisait un véhicule et s'approchait d'une intersection de routes, omis de vérifier que la chaussée qu'il allait croiser était libre, circuler à allure d'autant plus modérée que les conditions de visibilité et de circulation pouvaient être moins bonnes, éventuellement en annonçant son approche », la cour d'appel, qui s'est fondée sur le comportement de M. X...pour se prononcer sur la limitation du droit à indemnisation de M. Y..., a méconnu les textes susvisés " ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 1 et 4 de la loi du 5 juillet 1985, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a dit que M. Y... avait participé à la réalisation de son dommage dans la proportion de 50 %, et en ce qu'il a, en conséquence, opéré un partage de responsabilité entre le prévenu M. X...et la partie civile, M. Y... à hauteur de 50 % chacun ;
" aux motifs que M. X...a commis une faute d'imprudence pour avoir, alors qu'il conduisait un véhicule et s'approchait d'une intersection de routes, omis de vérifier que la chaussée qu'il allait croiser était libre, circuler à allure d'autant plus modérée que les conditions de visibilité et de circulation pouvaient être moins bonnes, éventuellement en annonçant son approche, cette faute étant en rapport de causalité avec l'accident au cours duquel M. Y... a été blessé ; qu'à la suivre en ses explication, la partie civile, M. Y... déclare qu'après avoir franchi le carrefour au feu vert, il se serait d'abord arrêté au milieu du carrefour, à raison de la présence d'un véhicule de moyenne taille de couleur grise ou blanche qui circulait dans l'avenue Gallieni en provenance de Gentilly, sur la voie la plus à gauche dans son sens de circulation, précisant que le véhicule était soit à l'arrêt soit à très faible allure, comme s'il avait « callé » et comme si le véhicule n'avançait pas, que constatant alors que le véhicule n'avançait pas vers lui, elle aurait redémarré après son bref arrêt au centre du carrefour pour s'engager en direction de la rue J. Destrée pour prendre le boulevard périphérique, qu'elle aurait donc démarré du centre du carrefour en regardant devant elle et n'aurait vu qu'au dernier moment un véhicule (celui conduit par le prévenu) arriver de sa droite, de l'avenue de Gallieni à Gentilly, en direction de la rue de la Poterne des Peupliers ; que si tel est le cas, M. Y... admet implicitement qu'il a repris sa progression sans vérifier qu'un autre véhicule, bénéficiaire du feu vert et venant de la rue Gallieni ne s'engageait pas à son tour dans le carrefour ; que M. Y... devait la priorité à M. X...qui circulait sur la voie de gauche, avenue Galliéni, en sens inverse, pour se rendre rue de la Poterne des Peupliers, [et] le non-respect par la partie civile de cette règle importante du code de la route, prévue à l'article R. 415-4 dudit code commis par celui-ci a été à l'origine de l'accident dont il a été victime le 7 novembre 2011 ; que lorsque plusieurs fautes ont concouru au dommage la responsabilité de leurs auteurs se trouve engagée dans une mesure qu'il appartient aux juges du fond de déterminer ; que quelle que soit la nature des infractions commises, les juridictions pénales qui constatent l'existence d'une faute de la victime ayant concouru au dommage doivent en tirer les conséquences sur l'évaluation du montant de l'indemnité due à cette dernière par le prévenu ; qu'en l'espèce, il convient de relever à l'actif de la victime M. Y... l'existence d'une faute, ayant concouru au développement de l'infraction et à ses conséquences financières et par suite de tenir compte de ces fautes pour évaluer la réparation du dommage mise à la charge du prévenu ; qu'il y a lieu par suite de considérer que M. Y... a contribué et ce 50 %, à la survenance des blessures dont il a été lui-même victime ;
" alors que lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; qu'il appartient au juge d'apprécier si cette faute a pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure, en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur, au regard de la gravité de sa faute et non de son caractère causal dans la survenance de l'accident ; qu'en jugeant, pour limiter de moitié le droit à réparation du demandeur, qu'il avait « contribué et ce 50 %, à la survenance des blessures dont il a été lui-même victime », et en se fondant ainsi sur le lien causal entre la faute de la victime et l'accident et non pas sur sa gravité, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen " ;
Les moyens étant réunis ;
Sur le second moyen proposé pour M. X..., pris en sa première branche :
Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;
Attendu que le grief n'est pas de nature à être admis ;
Mais sur le second moyen proposé pour M. X..., pris en sa seconde branche et sur le moyen proposé pour M. Y... :
Vu les articles 1er et 4 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 ;
Attendu que, lorsque plusieurs véhicules sont impliqués dans un accident de la circulation, chaque conducteur a droit à l'indemnisation des dommages qu'il a subis, sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice ; qu'il appartient alors au juge d'apprécier souverainement si cette faute a pour effet de limiter l'indemnisation ou de l'exclure en faisant abstraction du comportement de l'autre conducteur ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les pièces de procédure, que, le 7 novembre 2011, à Paris, une collision s'est produite entre le véhicule automobile conduit par M. Mamadou X..., qui circulait sur la voie de gauche et était en train de franchir le carrefour au feu vert, et le scooter piloté par M. Belaid Y..., arrivant en sens inverse et s'étant engagé dans le carrefour pour tourner à gauche, ce dernier étant atteint d'une incapacité totale de travail supérieure à trois mois ; que M. X...a été cité devant le tribunal correctionnel qui l'a déclaré coupable de blessures involontaires et l'a déclaré entièrement responsable des conséquences de l'accident ; que M. X...a interjeté appel ainsi que le procureur de la République ;
Attendu que, pour opérer un partage de responsabilité entre le prévenu et la partie civile à hauteur de 50 % chacun, l'arrêt retient, notamment, que, lorsque plusieurs fautes ont concouru au dommage, la responsabilité de leurs auteurs se trouve engagée dans une mesure qu'il appartient aux juges du fond de déterminer, et que, quelle que soit la nature des infractions commises, les juridictions pénales qui constatent l'existence d'une faute de la victime ayant concouru au dommage doivent en tirer les conséquences sur l'évaluation du montant de l'indemnité due à cette dernière par le prévenu ; que les juges ajoutent qu'en l'espèce, il convient de relever à l'actif de la victime, M. Y..., l'existence d'une faute, ayant concouru au développement de l'infraction et à ses conséquences financières, et par suite de tenir compte de cette faute pour évaluer la réparation du dommage mise à la charge du prévenu ; que la cour d'appel en déduit que M. Y... à contribué à hauteur de 50 % à la survenance des blessures dont il a été victime ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, en opérant un partage de responsabilité entre les deux conducteurs fautifs en proportion de leur contribution respective à la survenance de l'accident, alors qu'il lui appartenait, en faisant abstraction du comportement du conducteur impliqué dans l'accident, de rechercher si la victime avait commis une faute de nature à exclure ou à limiter son droit à indemnisation, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 14 septembre 2016, mais en ses seules dispositions ayant opéré un partage de responsabilités entre le prévenu M. Mamadou X...et la partie civile M. Belaïd Y..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt et un novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 15 novembre 2017 n° 17-80.014
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Patrice X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 23 novembre 2016, qui, pour agression sexuelle aggravée, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, cinq ans d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 4 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Guéry, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller GUÉRY, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Yonas Y..., né le 9 novembre 1985, a déposé une plainte le 11 mai 2007 contre M. Patrice X...; qu'il a exposé que l'intéressé avait été son professeur de judo entre 1997 et novembre 2000 et qu'il lui avait également été confié, par décision du juge des enfants, entre le 9 septembre 1999 et le 5 janvier 2000 ; que pendant cette période M. X...avait pratiqué sur lui des attouchements sexuels, lors d'entraînements de judo ou à son domicile ; que le mis en cause a contesté ces faits ; que le tribunal correctionnel a déclaré M. X...coupable d'agressions sexuelles aggravées, l'a condamné à la peine d'un an d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur l'action civile ; que le prévenu, le ministère public et la partie civile ont interjeté appel ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles préliminaire, 406, 512, 591 du code de procédure pénale, 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, des droits de la défense, défaut de motifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X...coupable d'agression sexuelle sur mineur et l'a condamné à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, a prononcé l'interdiction durant cinq années d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, a constaté son inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes et l'a condamné à payer des dommages-intérêts à M. Y...;
" alors que devant la chambre des appels correctionnels, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu de son droit de se taire ; que la méconnaissance de cette obligation lui fait nécessairement grief ; qu'en l'espèce, il ne résulte pas expressément de l'arrêt attaqué que M. X...qui a comparu à l'audience de la cour d'appel en sa qualité de prévenu, ait été informé du droit de se taire au cours des débats, la référence générale aux droits issus de l'article 406 n'étant pas suffisante pour permettre à la Cour de cassation de s'assurer que cette obligation a été respectée ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les articles et le principe susvisé " ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le conseiller rapporteur a donné connaissance au prévenu de ses droits conformément aux dispositions de l'article 406 du code de procédure pénale ; qu'il s'ensuit qu'aucune méconnaissance des dites dispositions, de nature à porter atteinte aux droits de la défense, n'a été commise ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1, et 6, § 2, de la Convention européenne des droits de l'homme, 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, du principe de présomption d'innocence et du droit à un procès équitable, des articles 121-3, 222-22 et 222-27 du code pénal, de l'article préliminaire et des articles 485, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale, défaut de motifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X...coupable d'agression sexuelle sur mineur et l'a condamné à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, a prononcé l'interdiction durant cinq années d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, a constaté son inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes et l'a condamné à payer des dommages-intérêts à M. Y...;
" aux motifs que M. Y...a dénoncé des agissements constitutifs d'agressions sexuelles constitués de massages, d'étreintes, de caresses sur les fesses et sur le sexe et de baisers au coin des lèvres, dans ces circonstances de temps et de lieu différentes, au détour des combats au sol de judo, de moment d'intimité lors de trajet en voiture, ou dans le cadre de l'organisation rendue nécessaire par des stages ou compétitions de judo, ou encore lors des accueils au domicile de M. X...; que le plaignant est resté constant dans des déclarations sauf à se montrer plus précis en fonction des questions qui lui étaient posées par les enquêteurs ou le juge d'instruction ; que ces déclarations sont cohérentes au regard de son mode de vie de l'époque partagé entre sa famille, le collège, le judo et les prises en charge importante de M. X...à son profit dans ce cadre initialement sportif, ayant pris à un moment donné également une tournure éducative au regard des difficultés d'évolution de M. Y...en famille ; que si la cour déplore l'absence de confrontation dans le cadre de l'instruction, il n'en demeure pas moins que M. Y...était présent devant le tribunal correctionnel et a maintenu dans les mêmes teintes ses accusations ; que ces mêmes déclarations de M. Y...si elles sont constantes, sont aussi mesurées et aucune vindicte à l'encontre de M. X..., n'en ressort, tout au plus du dépit d'avoir eu l'impression d'être manipulé par quelqu'un qui dans le même temps l'aidait et avait profité ainsi de sa fragilité ; que M. Y...n'omet dans aucune de ses déclarations de rappeler également l'aide qu'a pu lui apporter par ailleurs le prévenu, l'attention soutenue qu'il lui portait et dont il avait besoin à un moment difficile de son adolescence ; que cette mesure dans ces propos apportent du crédit à ses accusations, lesquelles sont encore renforcées par :- les déclarations de M. Nicolas Z...faisant état d'accusations de même nature à son encontre, elles-mêmes confortées par celles de MM. Franck A...et David B... faisant état des confidences reçues par eux de la part de M. Z...sur ces faits,- les déclarations de M. Eric C...mentionnant une proximité physique et affective déplacée de M. X...à l'égard de certains élèves (Nicolas Z...puis Axel D...), faite de prise sur les genoux et de bisous répétés, ou encore de bisous sur les joues lors de combats au sol ou de frottement de joues subis par lui-même, tous gestes choquant les personnes présentes bien que personne n'ait jamais rien osé dire, comportement qui a minima démontre que M. X...n'avait pas dans ces relations aux jeunes garçons qu'il encadrait la distance nécessaire d'un professeur à l'égard de ses élèves, pas plus que celle nécessaire d'un homme avec de jeunes garçons,- les déclarations mêmes de M. X...ayant fini par reconnaître qu'il avait pu demander à M. Y...de venir le rejoindre dans son lit pour le réveiller le matin à plusieurs reprises, après avoir commencé par déclarer que c'était M. Y...qui lui en avait fait la demande, tout en étant encore revenu sur ce point devant le juge d'instruction pour le contester cette fois, circonstances montrant là encore, a minima, l'absence de distance nécessaire entre un homme et un jeune adolescent à tout le moins, étant précisé que M. Y...argue de la survenue dans ces circonstances d'attouchements sur son sexe et ses fesses, faits contestés par M. X...qui ne les décrit que dans un contexte d'une relation affective avec M. Y...qu'il ne nie pas ; qu'aucun élément sérieux ne permet de remettre en cause la matérialité des faits dénoncés, s'agissant de faits dont la brièveté décrite par M. Y...est tout à fait conciliable avec les circonstances relatées d'un combat de judo au sol, d'un trajet en voiture, d'un massage sur un canapé ou d'un lever matinal ; qu'en agissant de la sorte sur un mineur âgé entre 12 ans et 15 ans, et 15 ans et quelques jours, M. X...a usé de la surprise et de la contrainte morale prévu par la loi, en ayant abusé d'abord du jeune âge de la victime pour commettre sur lui des attouchements, ou des gestes à connotation sexuelle auxquels il ne pouvait s'attendre (attouchements sexuels lors de combat de judo ou lors de trajet et encore baisers au bord des lèvres) puis de la détresse morale et de la quête affective dans laquelle M. Y...se trouvait à l'époque pour lui faire subir des attouchements sans susciter chez ce dernier un arrêt brutal de toute relation et une dénonciation des faits alors que, à l'époque des faits, il est constant que M. Y...était reconnaissant à M. X...de s'occuper de lui et de partager des activités qu'il ne pratiquait pas avec ses parents (attouchements sur le sexe et les fesses lors de massages et d'étreintes) ; que l'élément intentionnel ressort de la nature même des actes commis ;
" 1°) alors que le principe d'égalité des armes qui résulte du droit à un procès équitable implique le droit pour un prévenu d'être confronté à l'auteur de la dénonciation, seule base de sa condamnation, et d'obtenir l'expertise psychiatrique de cette personne, lorsqu'il résulte du dossier qu'elle présente des troubles psychiatriques ; qu'en l'espèce, il résulte des éléments du dossier, que M. Y...qui, dans un climat de rumeur calomnieuse à l'égard de M. X..., a accusé celui-ci avec lequel il entretenait des liens quasi-filiaux, d'avoir eu des gestes déplacés à son égard hors la présence de témoins, était psychiatriquement instable ; qu'en décidant d'entrer en voie de condamnation, sur la base des seules accusations de la partie civile, sans qu'il n'ait été fait droit aux demandes formulées par le prévenu de confrontation et d'expertise psychiatrique de M. Y..., la cour d'appel a privé M. X...du droit à un procès équitable ;
" 2°) alors que le droit à un procès équitable et le principe de présomption d'innocence impliquent l'obligation pour la juridiction de se livrer à un examen effectif des moyens, arguments et offres de preuve des parties, sauf à en apprécier la pertinence ; qu'en s'abstenant totalement d'analyser les nombreux témoignages à décharge, favorables à M. X..., et à tout le moins d'en faire mention, la cour d'appel n'a pas offert à celui-ci une possibilité raisonnable de présenter sa cause et ses preuves, en méconnaissance des principes et textes susvisés " ;
Attendu que, pour confirmer la déclaration de culpabilité, l'arrêt relève la constance, la cohérence et le caractère non vindicatif des déclarations du plaignant, étayées par celles de M. Z..., celles-ci étant couvertes par la prescription de l'action publique ainsi que par celles d'un témoin ayant mentionné une proximité physique et affective déplacée de M. X...à l'égard de certains élèves ; que les juges ajoutent que le prévenu s'est contredit dans certaines de ses déclarations et que M. Y..., présent devant le tribunal correctionnel a maintenu dans les mêmes termes ses accusations ; qu'ils en déduisent que M. X...a usé de la surprise et de contrainte morale en ayant abusé d'abord du jeune âge du mineur pour commettre sur lui des attouchements, ou des gestes à connotation sexuelle auxquels il ne pouvait s'attendre, puis de la détresse morale et de la quête affective dans laquelle il se trouvait à l'époque, et ce alors qu'il est établi que le prévenu avait autorité de droit ou de fait sur la victime ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'envisager une confrontation et une expertise qui ne lui étaient pas formellement demandées ni d'entrer dans le détail des attestations à décharge produites par le prévenu a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle, et a ainsi justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 8 de la Déclaration de 1789, 6, 7 et 17 de la Convention européenne des droits de l'homme, 485, 512, 591 à 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 130-1, 132-1 et 222-45 du code pénal, défaut de base légale, défaut de motifs ;
" en ce que l'arrêt attaqué, pour des faits qui auraient été commis entre 1997 et jusqu'au 8 novembre 2000, a condamné M. X...à la peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis, a prononcé l'interdiction durant cinq années d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, a constaté son inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes et l'a condamné à payer des dommages et intérêts à M. Y...;
" aux motifs qu'à la date des faits, M. X...n'avait jamais été condamné ; qu'âgé de 61 ans, il est directeur technique et entraîneur d'un club de judo pour un salaire de 4 000 euros mensuels outre des revenus immobiliers non chiffrés ; qu'il est célibataire et sans enfant ; que compte tenu de la nature des faits, de la situation personnelle du prévenu, de son déni complet des faits, de son absence totale de remise en question de son comportement à l'égard des jeunes gens qu'il est amené à côtoyer dans le cadre de son activité professionnelle sportive dans laquelle il se voit confier en toute confiance par leurs parents des mineurs, la peine prononcée doit être suffisamment importante pour être dissuasive et faire prendre conscience à ce dernier de la gravité des faits et le dissuader de réitérer de tels actes ; que dans ces circonstances une peine de dix-huit mois d'emprisonnement intégralement assortie d'un sursis sera prononcée ; que le jugement sera donc infirmé en ce sens ; qu'en outre la cour estime devoir prononcer l'interdiction durant cinq années d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs en application des dispositions de l'article 222-45 du code pénal ; qu'il convient également de constater l'inscription de M. X...au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes en application des dispositions de l'article 706-54-4 du code procédure pénale ;
" 1°) alors qu'en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a motivé sa décision de prononcer une peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis à l'encontre de M. X..., jusqu'alors inconnu des service de police, par sa volonté de la rendre dissuasive, sans même rechercher si les faits reprochés qui se seraient produits plus de seize années auparavant, se seraient reproduits depuis ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a omis de vérifier la proportionnalité de la peine à l'infraction commise, en violation des textes susvisés ;
" 2°) alors qu'en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle ; qu'en décidant de prononcer une peine d'interdiction d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs à l'encontre de M. X..., qui n'avait aucun antécédent avant les faits poursuivis et qui, depuis la date de leur commission entre 1997 et 2000, était resté en contact avec des mineurs sans aucun incident signalé, sans aucune motivation, et sans s'expliquer sur ces circonstances le privant ainsi, à quelques années de la retraite, de son emploi pour des faits isolés vieux de plus de seize ans, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu que, pour condamner M. X...à dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et à une interdiction, pendant cinq ans, d'exercer une activité professionnelle ou bénévole impliquant un contact habituel avec des mineurs, l'arrêt énonce qu'à la date des faits, M. X..., célibataire et sans enfant, n'avait jamais été condamné, qu'âgé de 61 ans, il était directeur technique et entraîneur d'un club de judo pour un salaire de 4 000 euros mensuels et que compte tenu de la nature des faits, de la situation personnelle du prévenu, de son déni complet des faits, de son absence totale de remise en question de son comportement à l'égard des jeunes gens qu'il est amené à côtoyer dans le cadre de son activité professionnelle sportive dans laquelle il se voit confier en toute confiance par leurs parents des mineurs, la peine prononcée doit être suffisamment importante pour être dissuasive et faire prendre conscience au prévenu de la gravité des faits et le dissuader de réitérer de tels actes ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui répondent à l'exigence résultant des articles 132-1 du code pénal et 485 du code de procédure pénale, selon laquelle, en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 15 novembre 2017 n° 15-80.799
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- La société P Sisi Immo, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 4e section, en date du 19 décembre 2014, qui, dans l'information suivie contre MM. Ramiz X..., Renato X..., Mmes Sevala Z..., épouse X..., Armina Y..., épouse X..., M. Mustafa X..., Mmes A...Mujic, Renata X...et M. Zarif X..., des chefs d'extorsion en bande organisée et association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction ayant ordonné une saisie pénale immobilière ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 4 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Laurent, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire LAURENT, les observations de la société civile professionnelle YVES et BLAISE CAPRON, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;
Vu le mémoire produit ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date de ce jour, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, 131-21, 132-71, 312-1, 312-6, 312-13, 450-1 et 450-5 du code pénal, 41-4, 99, 177, 479, 543, 591, 593, 706-141 et 706-150 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la saisie du terrain, ayant pour référence au cadastre section CK n° 240, situé ...;
" aux motifs que, par ordonnance du 6 novembre 2013, le juge d'instruction du tribunal de grande instance de Bobigny a ordonné la saisie du terrain figurant au cadastre de la façon suivante : commune : Aulnay-sous-Bois (93600), section CK n° 240, dont est propriétaire la Société civile immobilière P Sissi immo./ […] considérant que M. Ramiz X...ne dispose pas de parts dans la société civile immobilière P Sisi immo ; que la mention de son nom au titre d'associé constitue l'une des manoeuvres ayant permis l'extorsion de l'immeuble au préjudice de M. Pédrag B...; que l'immeuble encourt la saisie comme produit direct ou indirect de l'infraction au sens de l'article 131-21, alinéa 3, du code pénal ; que la saisie a été notifiée à M. Pédrag B..., gérant de la société civile immobilière P Sisi immo ; que les réquisitions du ministère public préalables à l'ordonnance de saisie ne sont pas nécessaires, dès lors que cette saisie, fondée sur l'alinéa 3 de l'article 131-21 du code pénal n'entre pas dans le cadre d'une saisie patrimoniale ; qu'il convient de confirmer l'ordonnance entreprise ;
" 1°) alors qu'en énonçant que le terrain, ayant pour référence au cadastre section CK n° 240, situé à ..., encourait la saisie comme produit direct ou indirect des infractions d'extorsion en bande organisée et d'association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime, des chefs desquels les consorts X...ont été mis en examen, au sens de l'article 131-21, alinéa 3, du code pénal, quand elle relevait que la société civile immobilière P Sisi immo était la propriétaire de ce même immeuble, la chambre de l'instruction de la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, en violation des stipulations et dispositions susvisées ;
" 2°) alors que, et en tout état de cause, en énonçant que le terrain, ayant pour référence au cadastre section CK n° 240, situé à ..., encourait la saisie comme produit direct ou indirect des infractions d'extorsion en bande organisée et d'association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime, des chefs desquels les consorts X...ont été mis en examen, au sens de l'article 131-21, alinéa 3, du code pénal, sans rechercher, ainsi qu'elle y avait été invitée par la société civile immobilière P Sisi immo, si la société civile immobilière P Sisi immo n'était pas toujours demeurée, depuis qu'elle en avait fait l'acquisition en 2004, la propriétaire de ce même immeuble, la chambre de l'instruction de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des stipulations et dispositions susvisées ;
" 3°) alors qu'il résulte des dispositions de l'article 706-150 du code de procédure pénale que le juge d'instruction ne peut saisir les immeubles qui sont l'objet ou le produit, direct ou indirect, de l'infraction que sous réserve des droits des propriétaires de bonne foi ; qu'en se bornant à énoncer, dès lors, pour ordonner la saisie du terrain, ayant pour référence au cadastre section CK n° 240, situé ..., que ce terrain encourait la saisie comme produit direct ou indirect des infractions d'extorsion en bande organisée et d'association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime, des chefs desquels les consorts X...ont été mis en examen, au sens de l'article 131-21, alinéa 3, du code pénal, sans constater que la société civile immobilière P Sisi immo, partie civile dans le cadre de l'information judiciaire en cause, n'était pas un propriétaire de bonne foi de ce même terrain, la chambre de l'instruction de la cour d'appel a violé les stipulations et dispositions susvisées ;
" 4°) alors qu'il résulte des dispositions de l'article 706-150 du code de procédure pénale que le juge d'instruction ne peut saisir que les immeubles dont la confiscation est prévue par les dispositions de l'article 131-21 du code pénal ; qu'en conséquence, la chambre de l'instruction de la cour d'appel, saisie de l'appel interjeté par la victime de l'infraction à l'encontre d'une ordonnance de saisie pénale immobilière rendue par le juge d'instruction, ne peut confirmer une telle ordonnance, sans constater que l'immeuble saisi n'était pas susceptible de restitution à l'appelante ; qu'en se bornant à énoncer, dès lors, pour ordonner la saisie du terrain, ayant pour référence au cadastre section CK n° 240, situé ..., que ce terrain encourait la saisie comme produit direct ou indirect des infractions d'extorsion en bande organisée et d'association de malfaiteurs en vue de la commission d'un crime, des chefs desquels les consorts X...ont été mis en examen, au sens de l'article 131-21, alinéa 3, du code pénal, sans constater que ce terrain n'était pas susceptible de restitution à la société civile immobilière P Sisi immo, la chambre de l'instruction de la cour d'appel a violé les stipulations et dispositions susvisées ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le juge d'instruction a, par ordonnance en date du 6 novembre 2013, ordonné la saisie d'un immeuble sis à Aulnay-sous-Bois, appartenant à la société civile immobilière P Sisi Immo, au motif que cet immeuble était susceptible d'être confisqué, comme constituant le produit de l'extorsion reprochée à M. Ramiz X...et Mme Sevala Z..., épouse X..., lesquels, sous couvert d'une cession de parts sociales antidatée, imposée à M. Pedrag B...et Mme Sanela B..., sa soeur, auraient usurpé la possession de ce bien et en auraient indûment perçu les fruits, qu'ils auraient affectés au remboursement d'un prêt immobilier souscrit par une autre société ayant pour associés leurs enfants ; que la société civile immobilière P Sisi Immo, partie civile, a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance, l'arrêt retient que l'immeuble saisi est susceptible d'être confisqué, en tant que produit direct ou indirect de l'infraction reprochée aux consorts X...;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, et dès lors que la discussion concernant l'éventuelle restitution de l'immeuble saisi à son propriétaire de bonne foi, victime de l'infraction, ne concerne que la phase de jugement et non celle de l'information judiciaire, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 15 novembre 2017 n° 16-85.946
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Moussa X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 9 septembre 2016, qui a prononcé sur sa requête en confusion de peines ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 4 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Carbonaro, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire CARBONARO, les observations de la société civile professionnelle FRANÇOIS-HENRI BRIARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
Sur la recevabilité du pourvoi formé le 26 septembre 2016 :
Attendu que le demandeur, ayant épuisé par l'exercice qu'il en a fait par l'entremise de son avocat le 19 septembre 2016, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, est irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision ; que seul est recevable le pourvoi formé par le demandeur le 19 septembre 2016 ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 132-2, 132-4, 311-8, 224-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, insuffisance de motivation, autorité de chose jugée ;
"en ce que l'arrêt entrepris a déclaré irrecevable la requête en confusion des peines 1°) (peine de trois ans d'emprisonnement prononcée le 3 septembre 2010 par le tribunal correctionnel de Pontoise pour vol aggravé par deux circonstances, faits commis le 19 août 2010, en état de récidive légale, peine en cours d'exécution) et 2°) (peine de six ans d'emprisonnement prononcée le [12] septembre 2011 par le tribunal correctionnel du Havre pour participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime, recel en bande organisée, faits commis entre le 1er octobre et le 4 décembre 2009 et transport prohibé par au moins deux personnes d'armes de catégorie 6, faits commis le 4 décembre 2009, peine non exécutée) et, au fond, rejeté la requête en confusion des peines 3°) (peine de cinq ans d'emprisonnement prononcée le 15 [septembre] 2011 par le tribunal correctionnel de Versailles pour vol, vol avec destruction ou dégradation, vols aggravés par deux circonstances, pour des faits commis entre le 1er juillet 2008 et le 12 août 2010, en état de récidive légale, peine non exécutée) et 4°) (peine de huit ans d'emprisonnement, prononcée le 17 décembre 2012 par la cour d'assises des Yvelines, pour vol avec arme et arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire, fait commis le 2 décembre 2009, peine non exécutée) ainsi que des peines 2°) et 4°) ;
"aux motifs que les peines dont la confusion est sollicitée sont des peines de même nature, à savoir des peines d'emprisonnement ; que la confusion est donc possible ; qu'elle n'est cependant pas de droit, le maximum légal n'étant pas dépassé ; que, par un jugement du 12 septembre 2011, le tribunal correctionnel du Havre a rejeté la confusion de la peine prononcée par ce même jugement, avec celle prononcée par le tribunal correctionnel de Pontoise le 3 septembre 2010 ; que la décision ayant autorité de chose jugée, depuis un pourvoi en cassation formé le 13 juin 2007, la demande concernant les peines 1°) et 2°) est irrecevable ; que les peines 3°) et 4°) portent sur des faits commis entre 2008 et 2010, soit avant l'intervention de la première condamnation définitive pour ces infractions le 15 septembre 2011 ; que les conditions de recevabilité sont donc réunies ; que les peines 2°) et 4°) portent sur des faits établis sur la même période de temps avant l'intervention de la condamnation définitive du 12 septembre 2011 ; que les conditions de recevabilité sont donc réunies ; qu'il apparaît néanmoins que le nombre important de condamnations figurant au casier judiciaire du requérant traduisent un ancrage de celui-ci dans la délinquance ; qu'en outre, la condamnation du 17 décembre 2012 porte sur des faits de nature criminelle, ce qui démontre une escalade dans la gravité des infractions commises par l'intéressé ; que son parcours carcéral, au cours duquel des évasions et autres faits d'une particulière gravité ont été commis et sanctionnés, ne permet pas de justifier d'efforts de réinsertion suffisants, quand bien même une attestation d'emploi en tant qu'opérateur depuis le mois d'août 2013 est fournie à l'appui de la demande ; qu'il convient en conséquence de ne pas faire droit à la demande de confusion des peines susvisées ;
"1°) alors que la confusion des peines est de droit lorsque les peines prononcées dépassent le maximum légal le plus élevé ; que le maximum légal encouru est de 20 ans tant pour des faits de vol avec arme (article 311-8 du code pénal) que pour des faits d'enlèvement, séquestration ou détention arbitraire (article 224-1 du code pénal) ; qu'en affirmant que la confusion des peines sollicitée n'était pas de droit, le maximum légal n'étant pas dépassé, alors que le total des peines prononcées s'élevait à 22 ans, soit davantage que le maximum légal encouru pour les faits reprochés au prévenu, la chambre de l'instruction a violé les articles 132-2, 132-4, 311-8 et 224-1 du code pénal ;
"2°) alors que l'impossibilité de réitérer une demande de confusion de peines, après un premier rejet, n'est que la conséquence de l'autorité de chose jugée qui s'attache, par principe, aux décisions de justice devenues définitives ; que le jugement correctionnel du 12 septembre 2011 qui refusait de confondre les peines 1°) et 2°) est revêtu de l'autorité de chose jugée non en raison de l'existence d'un pourvoi en cassation, mais en conséquence son propre caractère définitif ; qu'en jugeant néanmoins que le jugement du 12 septembre 2011 avait autorité de chose jugée « depuis un pourvoi en cassation formé le 13 juin 2007 », la chambre de l'instruction a méconnu la portée de l'autorité de chose jugée qui s'attache à la décision de rejet du 12 septembre 2011 ;
"3°) alors que le pouvoir souverain reconnu aux juridictions du fond pour apprécier l'opportunité d'une confusion de peines, lorsqu'elle est facultative, ne les dispense pas de motiver leur décision, une telle motivation ne pouvant être fondée sur une affirmation de fait ou de droit inexacte ; que pour juger irrecevable la demande de confusion des peines 1°) et 2°), la chambre de l'instruction relève que le jugement du 12 septembre 2011 par lequel le tribunal correctionnel du Havre a refusé de confondre ces deux peines est revêtu de l'autorité de la chose jugée depuis un pourvoi en cassation formé le 13 juin 2007 ; qu'en statuant ainsi, alors que cette date est manifestement erronée en raison de son antériorité par rapport aux jugements en cause comme aux faits poursuivis, la chambre de l'instruction n'a pas légalement motivé sa décision" ;
Vu l'article 132-4 du code pénal, ensemble l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il se déduit du premier de ces textes que, si l'autorité de chose jugée s'attache à la décision par laquelle les juges prononcent sur une demande de confusion de peines, cette décision ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de la règle de réduction au maximum légal le plus élevé ;
Attendu qu'en application du second, tout jugement, arrêt ou ordonnance doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X... a sollicité le 19 décembre 2013 la confusion de quatre peines d'emprisonnement prononcées pour des infractions en concours, à savoir une peine de trois ans prononcée par le tribunal correctionnel de Pontoise le 3 septembre 2010, une peine de six ans prononcée par le tribunal correctionnel du Havre le 12 septembre 2011, une peine de cinq ans prononcée par le tribunal correctionnel de Versailles le 15 décembre 2011, et une peine de huit ans prononcée par la cour d'assises des Yvelines le 17 décembre 2012 ; que le demandeur a fait valoir au surplus que le cumul de ces peines, soit 22 ans d'emprisonnement, excédait le maximum légal le plus élevé, soit 20 ans de réclusion criminelle, maximum encouru dans le cadre des poursuites pour vol avec usage ou menace d'une arme exercées devant la cour d'assises des Yvelines ;
Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient, d'une part, que la requête en confusion n'est que partiellement recevable dés lors que par jugement ayant autorité de chose jugée du 12 septembre 2011, le tribunal correctionnel du Havre a déjà rejeté une précédente demande de confusion des peines de 3 ans et de 6 ans, d'autre part, que le maximum légal le plus élevé n'est pas atteint, enfin, que la situation de M. X..., notamment son passé judiciaire, ne justifie pas de mesure de confusion ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, par des motifs partiellement erronés, alors que le cumul des quatre peines d'emprisonnement excédait le maximum légal le plus élevé, le rejet de la requête en confusion des deux premières ne pouvant faire obstacle à ce que celles-ci soient prises en compte pour l'application de la règle de réduction au maximum légal le plus élevé, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
I- Sur le pourvoi formé le 26 septembre 2016 :
Le DÉCLARE IRRECEVABLE ;
II- Sur le pourvoi formé le 19 septembre 2016 :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 9 septembre 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 15 novembre 2017 n° 17-82.401
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Najib Y...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de COLMAR, en date du 30 mars 2017, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'association de malfaiteurs et infraction à la législation sur les armes, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 18 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Guéry, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller GUÉRY, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général QUINTARD ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 23 juin 2017, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 3 novembre 2016, une femme de chambre de l'hôtel B & B d'Ostwald (67) a découvert dans la chambre n° 15 un sac contenant une arme de poing et des produits pouvant être des stupéfiants, que les policiers, informés que le locataire, M. Z...était absent, ont procédé à une perquisition, amenant la saisie d'un pistolet automatique de calibre 9 mm et d'une quantité avoisinant les 500 grammes de cocaïne, qu'ayant appris que M. Z...avait été vu en discussion avec les occupants des chambres n° 10 et n° 11, ils ont procédé à la perquisition des dites chambres, qu'ils ont découvert dans la chambre n° 10 deux pistolets automatiques et de nombreux téléphones portables, et dans la chambre n° 11 des téléphones portables, que MM. Y...et A...ont été interpellés alors qu'il s'apprêtaient à pénétrer dans la chambre n° 11, que le visionnage de la vidéo-surveillance des couloirs de l'hôtel a conforté l'existence de relations entre MM. Z..., B..., interpellé dans la chambre n° 10, MM. Y...et A...; qu'une information judiciaire ayant été ouverte, M. Y...a été mis en examen des chefs d'association de malfaiteurs et détention d'arme de catégorie B ; que le 29 janvier 2016, il a saisi la chambre de l'instruction d'une requête en nullité d'actes de la procédure ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, §, 1 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 53, 54, 56, 75, 76, 171, 174, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler les opérations de perquisition effectuées dans la chambre n° 15 et la procédure subséquente ;
" aux motifs que l'avocat de M. Y...soutient que les services de police agissant dans le cadre de l'article 75 du code de procédure pénale, sur la foi d'un renseignement ne pouvaient opérer de perquisition dans la chambre 15 louée par M. Z...sans avoir recueilli son assentiment ou sans y être autorisés par le juge des libertés et de la détention saisi par le procureur de la République ; que le procès-verbal de saisine est rédigé ainsi (D 13 et D 204) : " disons que le service a été contacté par le personnel de l'hôtel B & B, sis 11 rue Ferdinand Braun 67540 Ostwald " ; que des premières indications communiquées téléphoniquement il appert qu'un personnel d'entretien aurait découvert à l'occasion du ménage d'une chambre une arme de poing ainsi que des produits susceptibles d'être des stupéfiants ; que la chambre est louée par un dénommé " Z..." qui n'est pas présent pour le moment mais qui dispose de sa chambre au travers d'un code valable ce jour jusqu'à midi ; qu'assisté des brigadiers chef C...et D..., des brigadiers E..., F..., G..., H..., des gardiens de la paix I..., J...et N...; que disons nous transporter en tenue bourgeoise aux abords de l'hôtel ; qu'arrivés à proximité non immédiate de l'hôtel, sommes rejoint par un équipage des effectifs de la brigade anti criminalité ; qu'accompagné du brigadier-chef C...et du gardien de la paix J...; que disons nous rendre à l'hôtel B & B ; qu'à 10 heures 40, prenons contact avec le gérant M. K...qui est accompagné de Mme L...réceptionniste ; que ces personnes nous accompagnent dans une chambre située au rez-de-chaussée gauche en partant du hall et nous dirige vers la chambre 15 ; que constatons qu'il s'agit d'une chambre comprenant immédiatement à droite en entrant une salle d'eau avec toilettes, composée d'un lit double, d'une penderie au fond à droite et dans le fond gauche de la chambre une tablette ; que sur la tablette se trouve un sachet en papier devant contenir les éléments à l'origine de la présente dénonciation ; que dans le sachet, constatons effectivement la présence d'une arme de poing, de cartouches cal 9 mm et de deux " boudins " dont le conditionnement peut correspondre à des produits stupéfiants à 10 heures 45 qu'agissant dès lors en flagrant délit ; que vu les articles 53 et suivants code de procédure pénale ; que disons que la chambre est perquisitionnée en présence des deux témoins, opération qui fera l'objet d'un procès-verbal distinct " ; que dans le procès-verbal de perquisition (D207) les enquêteurs ont constaté que le ménage avait été fait ; qu'ils ont constaté la présence d'un sac papier supportant la marque " par respect de la nature " posé sur le bureau ; qu'ils précisent que Mme L...les informe que ce sachet se trouvait à l'origine posé au sol à côté du lit face à la porte et que c'était ce sac que la femme de ménage, Mme M...avait découvert ce matin avec les objets suspects à l'intérieur ; qu'ils précisent que Mmes M...et L...auraient touché le contenu de ce sachet ; qu'ils poursuivent ainsi : " que sans désemparer, en s'assurant de préserver les traces et indices, ouvrons ce sachet et constatons la présence des objets suivants : qu'une arme de poing de marque Taurus- PT908, numéro de série TNC 515115, 9 mm parabellum ; que disons avoir mis cette arme en sécurité et avoir constaté qu'aucune cartouche n'était chambrée et que le chargeur engagé était vide ; que vu ces éléments, vu les articles 53 et suivants du code de procédure pénale ; que poursuivons l'enquête dans le cadre du flagrant délit, poursuivons la fouille dudit sac " ; que dans le sac ils ont découvert notamment 2 sachets contenant de la poudre blanche, une boîte de munitions supportant 30 cartouches, une balance de précision ; que les enquêteurs ont ainsi reçu un renseignement précis et circonstancié sur l'existence d'un sac contenant une arme de poing et des produits s'apparentant à des stupéfiants, sur sa localisation dans la chambre louée par M. Z..., lequel est absent ; que le requérant est parfaitement identifié en la personne de M. K...gérant de l'hôtel et maître de maison et les témoins ayant vu le sac suspect sont au nombre de deux, la femme de ménage et la réceptionniste ; que cette dernière est présente aux côtés de Mme K...pour accueillir les enquêteurs, leur fournir des renseignements complémentaires, les conduire à la chambre 15 et assister à la perquisition en qualité de témoins ; que ces éléments constituent dès lors les indices apparents de commission d'une infraction flagrante de détention d'arme et d'infraction à la législation sur les stupéfiants à l'intérieur de la chambre n° 15 ; que si les enquêteurs n'ont indiqué dans leur procès-verbaux de saisine et de perquisition la mention de la flagrance que postérieurement à la découverte de l'arme, il convient de relever qu'antérieurement à cette découverte, les indices objectifs apparents susvisés, rendant probable la commission d'une infraction, permettaient de modifier le cadre juridique des investigations et d'agir dans un cadre du flagrant délit dès leur arrivée sur place, munis de ces informations et notamment de procéder à la perquisition de la chambre 15 sans autorisation expresse ; que la demande d'annulation de la perquisition de la chambre n° 15 apparaît dès lors infondée ;
" 1°) alors que pour pouvoir agir en enquête de flagrance, les officiers de police judiciaire doivent avoir connaissance et constater, au préalable, les indices apparents d'un comportement révélant l'existence d'une infraction en train de se commettre ou qui vient d'être commise ; que les juges ne peuvent cependant substituer leurs propres déductions aux constatations initiales des officiers de police judiciaire ; qu'en l'espèce, il résulte du procès-verbal de saisine du 3 novembre 2016 à 10 heures 15 et du procès-verbal de perquisition de la chambre n° 15 à 10 heures 50 que les officiers de police judiciaire agissaient en enquête préliminaire lorsqu'ils ont pénétré dans la chambre n° 15, fermée par un code, et procédé à sa fouille minutieuse, et que ce n'est que lorsqu'ils ont découvert la présence d'une arme de poing et de produits stupéfiants en ouvrant un sac en papier, qu'ils ont estimé agir en flagrant délit (« agissant dès lors en flagrant délit … ») ; qu'en décidant que nonobstant la mention de la flagrance postérieurement à la découverte de l'arme de poing, il résultait de certaines constatations des policiers les indices apparents d'un comportement délictueux leur permettant d'opérer en flagrance à la perquisition de la chambre n° 15 sans l'assentiment exprès de l'intéressé ou sans autorisation du juge des libertés et de la détention, la chambre de l'instruction qui a substitué ses propres déductions à celles des officiers de police judiciaire, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
" 2°) alors qu'en l'absence de constatation préalable d'un indice apparent d'un comportement délictueux, excèdent leurs pouvoirs, les policiers qui, après s'être introduits dans une chambre d'hôtel, procèdent à une opération assimilable à une perquisition à l'intérieur d'un domicile, dans des conditions applicables à la seule flagrance ; qu'il résulte du procès-verbal de saisine et de perquisition que les enquêteurs ont procédé à une perquisition de la chambre n° 15 au visa de l'article 75 du code de procédure pénale, en l'absence de son occupant et alors que la porte était fermée par un code et que le flagrant délit n'a été caractérisé qu'à la suite de la découverte, faite illégalement, d'une arme de poing et de produits stupéfiants dissimulés dans un sac ; qu'en déclarant cependant régulière cette perquisition et la procédure subséquente, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision " ; Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que l'arrêt a rejeté sa demande dès lors que, n'étant titulaire d'aucun droit sur la chambre concernée, il ne saurait se prévaloir d'une prétendue atteinte au droit au respect du domicile ou de la vie privée que les dispositions légales et conventionnelles invoquées au moyen ont pour but de protéger ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 53, 54, 56, 57, 171, 174, 186, 802 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que la chambre de l'instruction a refusé d'annuler les opérations de perquisition effectuées dans les chambres n° 10 et 11 ainsi que la procédure subséquente ;
" aux motifs cités au premier moyen et aux motifs que, sur la perquisition de la chambre n° 10 : qu'il est soutenu que M. Y...est recevable à invoquer l'irrégularité de la perquisition de la chambre n° 10, dont l'occupant était M. B..., dans la mesure où cette perquisition a orienté la procédure vers la chambre d'hôtel qu'il occupait et l'enquête sur sa personne ; que bien qu'il se dise étranger à la chambre 10, les liens opérés rapidement entre cette chambre et la sienne réservée et payée par la même carte bancaire, dont la location a été renouvelée par la même personne, permettent de considérer que l'irrégularité éventuellement accomplie porte atteinte à ses intérêts et de considérer qu'il est recevable à exciper de l'irrégularité du procès-verbal de perquisition ; qu'il est ensuite soutenu que les enquêteurs ont décidé de visiter la chambre n° 10 au seul motif que M. Z...aurait été vu en train de discuter avec les occupants des chambres n° 10 et 11, que ce simple renseignement imprécis ne peut en aucun cas fonder à lui seul la perquisition opérée dans la chambre n° 10, et qu'il n'existait à cet instant aucun indice matériel et objectif permettant de soupçonner que M. B...était impliqué dans l'enquête qui venait de débuter pour des faits de détention d'arme et de produits stupéfiants ; que l'avocat de M. Y...précise en outre qu'il ressort du procès-verbal d'exploitation de la vidéo surveillance et du système des entrées/ sorties de l'hôtel B & B que M. Z...a quitté la chambre n° 15, le 2 novembre à 22 heures 37, qu'aucune ouverture par code de la chambre n° 15 n'a été enregistrée jusqu'au 3 novembre 2016 à 10heures 09, et ce au moyen du code réservé aux employés (D74) ; que la suite du procès-verbal de saisine, évoqué ci-dessus, est rédigée ainsi (D13 et D204) : « ou (...) dans l'attente, disons que le gardien de la paix M. J...procède avec l'aide de M. K...à l'examen partiel et rapide de la vidéo surveillance de l'hôtel ; que des éléments complémentaires nous sont apportés ; que le locataire de la chambre 15 se nomme " Z..." il a présenté une carte d'identité française dont le numéro est 100867803219 ; qu'il a également loué à son nom la chambre 2 qui a été occupée par un couple dont la vidéo surveillance laisse apparaître qu'il ont quitté l'hôtel le 2 novembre 2016 avant midi ; que l'examen de la vidéo surveillance montre que le couple quitte l'hôtel à bord d'un véhicule pouvant être de marque " Mercedes " de type SLK de couleur sombre ; que l'orientation des caméras ne permet d'obtenir qu'une immatriculation suisse partielle dont le début est VD5303 ; que l'identité des occupants de la chambre 2 est ignoré des personnels de l'hôtel ; que les chambres 2 et 15 ont été payées en espèce ; les personnels de l'hôtel nous informe que le locataire de la chambre 15 nommé Z...a été vu discutant des chambres 10 et 11 ; qu'à notre demande, les personnels de l'hôtel nous informent que les occupants des chambre 10 et 11 sont présents depuis le 1er novembre qu'ils ont encore prolongé leur séjour jusqu'au 4 novembre ; que la réservation provient de personnes de la région parisienne ; que le mode de règlement est au moins pour la réservation par carte bancaire ; que l'identité de réservation n'est pas la même ; que (...) disons que l'examen partiel de la vidéo surveillance effectué et notamment l'examen de la caméra visionnant l'accès principal ainsi que la caméra visionnant la sortie de secours du couloir dans lequel se situe la chambre 15 entre le 3 novembre 2016 00 heure 00 et 10 heures 40, heure de notre arrivée sur place, ne permet pas de constater que le nommé Z...a quitté l'hôtel ; qu'avant de quitter les lieux, interrogeons les personnels de l'établissement pour savoir si l'intéressé est susceptible de se dissimuler dans l'hôtel, sommes informés que l'ensemble des chambres de l'établissement ont été nettoyées et que personne ne se dissimule à l'exception des chambres 10 et 11 du rez-de-chaussée, dont l'une est contiguë à la chambre 15 ; qu'il s'agit des chambres occupées par des personnes déjà évoquées précédemment qui ont été vue s'entretenir avec l'occupant de la chambre 15 ; que recherchant une personne susceptible d'être armée qui aurait pu se dissimuler ; que mettons en place un dispositif aux fins de vérifier que le mis en cause n'est pas présent dans les deux seules chambres non vérifiées ; qu'à 13 heures 35, les effectifs présents sont répartis aux abords des deux chambres muni du code d'accès permettant d'en déverrouiller les portes ; qu'en pénétrant simultanément dans les lieux ; que constatons que la chambre 11 est vide de tout occupant mais que les effets personnel des personnes sont présentes ; que sommes informés de la découverte incidente dans la chambre 10 de deux armes de poing avec chargeurs garnis, de la présence d'un individu X, pouvant être M. B...et de vêtements sombres dissimulant, l'individu est interpellé ; que vu les dispositions de l'article 803 du code de procédure pénale, il est menotté ; que cette découverte fera l'objet d'une procédure incidente pour des faits d'association de malfaiteurs et détention d'arme de catégorie B en flagrant délit à laquelle copie du présent procès-verbal sera joint ; qu'à 14 heures 20, quittons les lieux en laissant sur place un dispositif d'interpellation des autres occupants des chambres 10 et 11 sous la responsabilité du capitaine O..., chef de la brigade anti criminalité » ; que par ailleurs, le procès-verbal de synthèse établi en D. 630 et suivants par les enquêteurs expose la chronologie des opérations de la manière suivante : « (...) agissant en flagrance pour des faits de trafic de produits stupéfiants et détention d'armes de catégorie B (procédure 2016/ 029759), les enquêteurs de la DDSP 67 identifiaient le réservataire de la chambre n° 15 à Z..., né le 24 octobre 1991 à Strasbourg, qui aurait élu domicile à Payerne (Suisse) ; que les investigations menées auprès des personnels de l'établissement hôtelier permettaient de recueillir le témoignage de la réceptionniste selon lequel l'occupant de la chambre n° 15 avait été vu discutant avec les occupants des chambres n° 10 et 11, lesquels étaient toujours présents dans l'enceinte hôtelière ; que n'ayant aucune certitude quant au fait que l'occupant de la chambre n° 15 ait quitté les lieux, et au vu du témoignage le reliant possiblement aux occupants des chambres n° 10 et 11, laquelle est contiguë à la 15, il était procédé à une opération de recherche de cet individu dans les chambres n° 10 et 11 ; que dans la chambre n° 10, il était découvert de façon incidente deux pistolets automatiques approvisionnés de calibre 22LR et 9mm, des vêtements sombres et de nombreux téléphones portables ; qu'il était également procédé à l'interpellation et au placement en garde à vue à compter de 13 heures 35 du nommé B..., né le 4 mars 1992 à Bondy (93), demeurant ...(93) dans le cadre d'une procédure incidente d'association de malfaiteurs et détention d'armes de catégorie B (procédure 2016/ 029760) ; que la perquisition de la chambre n° 11, vide de tout occupant, effectuée en la présence de M. B...permettait la découverte de téléphones cellulaires, d'une carte bancaire prépayée Pcs Infinity, d'une facture B & B concernant la chambre n° 10 ainsi que de vêtements sombres ; qu'un dispositif de surveillance mis en place aux alentours immédiats de l'hôtel B & B permettait d'observer l'arrivée d'un véhicule Opel Corsa immatriculé DM-3 1 O-WH ; que les deux occupants pénétraient dans l'hôtel ; qu'ayant frappé à la porte de la chambre n° 10 et s'apprêtant à pénétrer dans la n° 11, il était procédé à leur interpellation à 16 heures 55 ; que les nommés Y..., né le 20 juillet 1981 à Villeneuve-La-Garenne (92), demeurant 4, square Paul Claudel à Villeneuve-La-Garenne (92) et Oudane, né le 26 avril 1973 à Alger (Algérie), SDF, étaient aussitôt placés sous le régime de la garde à vue (…) » ; qu'il convient de se replacer dans la journée du 3 novembre 2016 à 13 heures 45 et d'apprécier la régularité des opérations de perquisition et d'interpellation au regard des informations en la possession des enquêteurs ; que ces dernières s'affineront au fur et à mesure du déroulement de l'enquête ; qu'ainsi c'est le lendemain et non au moment de la perquisition litigieuse de la chambre n° 10, que les enquêteurs apprendront par l'exploitation détaillée de la vidéo surveillance de l'hôtel et du système d'entrée et de sortie que l'occupant de la chambre 15 avait quitté celle-ci le 2 novembre 2016 à 22 heures 37 pour ne plus y reparaitre (D74) ; qu'en revanche les déclarations de Mme L..., réceptionniste, présente à l'hôtel le 3 novembre 2016 et entendue dans le cours de l'après-midi permettaient aux enquêteurs restés sur place, d'une part de faire le lien entre l'occupant de la chambre n° 15 et ceux des chambres n° 10 et 11, d'apprendre que les chambres n° 10 et 11 étaient occupées par deux hommes chacune et d'autre part de savoir que la location des deux chambres avaient été prolongée d'abord le 2 et le 3 novembre 2016 par l'un des occupants de la chambre 10 sous l'identité de M. P...; qu'il en résulte que la décision de procéder à la perquisition de la chambre n° 10 était justifiée, dans le cadre de la flagrance, par la recherche de l'occupant de la chambre n° 15, suspecté de détenir l'arme, les munitions et les produits stupéfiants, qui ne semblait pas avoir quitté l'hôtel, et de vérifier la nature des liens entretenus avec les occupants des chambres n° 10 et 11 avec lesquels il avait été vu en discussion, étant précisé qu'il s'agissait des deux seules chambres où le ménage n'avait pas été fait ; que la présence dans cette chambre dans un sachet en plastique blanc de deux pistolets automatiques noirs conduisait automatiquement à l'interpellation du seul occupant trouvé dans cette chambre, à savoir M. B...; que ce moyen de nullité sera en conséquence rejeté ; que sur les perquisitions successives de la chambre n° 11, l'avocat de M. Y...relève que les enquêteurs ont procédé à une première perquisition de la chambre n° 11, occupée par MM. Y...et A..., en l'absence de ces derniers, mais en présence de M. B..., occupant de la chambre n° 10, le 3 novembre 2016 à 14 heures 05 ; qu'il soulève également le fait que les enquêteurs ont procédé, le 4 novembre 2016 à 13 heures 05, à une deuxième perquisition de la chambre n° 11 en présence de deux témoins, alors que ses occupants, MM. Y...et A..., étaient placés en garde-à-vue, sans que ces derniers aient été à même de désigner une personne de leur choix ; qu'il résulte du procès-verbal de la première perquisition de la chambre n° 11 les mentions suivantes : D 18- D 19 « notre perquisition débutée à 13 heures 45 se termine à 14 heures 00 ; refermons l'huis, que nous transportons dans la chambre 11, la chambre est identique à la chambre n° 10, à 14 heures 05, en la présence effective et constante de M. B..., débutons une minutieuse perquisition de la chambre 11 ; (…) la poursuite de nos investigations n'apporte aucun élément supplémentaire pouvant intéresser l'enquête en cours, notre perquisition débuté à 14heures 05 se termine à 14h20 ; » qu'il résulte du procès-verbal de la deuxième perquisition de la chambre n° 11 les mentions suivantes : (D 113-114) « qu'en la présence constante et effective des deux témoins mentionnés ci-dessus, procédons à une perquisition de la chambre numéro 11 de l'hôtel, chargeons le fonctionnaire du Srij d'effectuer un album photographique de nos opérations, qui sera annexé ultérieurement à la procédure, procédons à l'ouverture de la porte de la chambre, à l'aide du code fourni par les gérants, et pénétrons dans la chambre ; sur notre gauche, se trouve une salle de bains avec douche, lavabo et WC ; face à nous se trouve un lit double ; (…) nos opérations ne permettant pas de découvrir d'autre élément susceptible d'intéresser l'enquête, y mettons fin et quittons les lieux (…) » ; qu'il est constant qu'aux termes des dispositions de l'article 57 du code de procédure pénale, les opérations de perquisition sont faites en présence de la personne au domicile de laquelle la perquisition a lieu, qu'en cas d'impossibilité, celle-ci est invitée à désigner un représentant de son choix et qu'à défaut, deux témoins sont requis par le juge d'instruction ou son délégataire pris en dehors des personnes placées sous leur autorité ; que s'agissant de la perquisition du 3 novembre 2016 (D 17), il convient de rappeler que sur les 4 personnes se partageant les chambres n° 10 et 11 seul M. B...était effectivement présent dans la chambre N° 10 et interpellé au vu de la découverte incidente de 2 nouvelles armes de poing opérée par les enquêteurs ; qu'à ce stade les enquêteurs ignorent tout de l'identité des occupants de la chambre 11, puisqu'un seul nom est mentionné au titre de la location des deux chambres, à savoir M. Yahya P..., et que la réceptionniste a précisé que les 2 et 3 novembre l'un des occupants de la chambre 10 avait procédé au paiement et à la réservation des 2 chambres, jusqu'au 4 novembre à 12 heures ; que dès lors la décision de procéder à la première perquisition de la chambre n° 11 était toujours justifiée, dans le cadre de la flagrance, par la recherche de l'occupant de la chambre n° 15, suspecté de détenir l'arme, les munitions et les produits stupéfiants, qui ne semblait pas avoir quitté l'hôtel, et de vérifier la nature des liens entretenus avec les occupants de chambres N° 10 et 11 avec lesquels il avait été vu en discussion, étant précisé qu'il s'agissait des deux seules chambres où le ménage n'avait pas été fait ; qu'elle l'était encore a fortiori par la découverte incidente des deux armes dans la chambre 10 et la recherche du 2ème occupant de la chambre 10 ; que de surcroît il existait au moment de cette première perquisition une réelle incertitude sur la répartition et l'identité des occupants de ces chambres, dans la mesure où il apparaissait que l'un des occupants de la chambre 10 avait réglé deux jours d'affilée les locations des deux chambres ; qu'ainsi M. B...apparaît-il comme un occupant potentiel de la chambre ; qu'il et la découverte d'une facture afférente à la chambre n° 10 dans la chambre n° 11 accrédite encore d'avantage ce lien et justifie de la seule présence de ce dernier lors de la perquisition réalisée à partir de 14 heures 05 dans la chambre 11, dont on apprendra seulement par la suite, après leur interpellation à 16 heures 55, qu'elle était vraisemblablement occupée par MM. Y...et A...; que s'agissant de la seconde perquisition opérée le 4 novembre 2016 à 13 heures 05, la chambre n° 11 se trouvait libre de tout occupant à compter de 12 heures, heure de fin de sa location au nom de M. P..., de sorte que les enquêteurs ont à juste titre requis deux témoins, à savoir M. K...et Mme Q..., gérants de l'établissement, pour opérer une nouvelle perquisition à l'intérieur de la chambre n° 11 ; que ce moyen de nullité sera en conséquence également rejeté ;
" 1°) alors que lorsqu'une irrégularité constitue une cause de nullité de la procédure, doivent être annulés les actes affectés par cette nullité et dont ils sont le support nécessaire ; que lorsqu'une perquisition est effectuée irrégulièrement, au domicile d'une personne, l'interpellation de cette personne à son domicile à la suite de cette perquisition doit être annulée, de même que la garde à vue et les actes qui lui font suite ; qu'en décidant le contraire au seul motif qu'avant la perquisition les enquêteurs disposaient d'un renseignement laissant croire que M. Y...avait pu discuter avec l'occupant de la chambre n° 15 dans le couloir, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;
" 2°) alors que tout jugement ou arrêt doit contenir des motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que la cour d'appel ne pouvait sans se contredire déclarer d'une part que M. Z...« lequel est absent » a quitté l'hôtel le 2 novembre au soir vers 23heures 00 sans être vu revenant à sa chambre et constater d'autre part que les perquisitions des chambres n° 10 et 11 étaient justifiées « par la recherche de l'occupant de la chambre n° 15 (…) qui ne semblait pas avoir quitté l'hôtel » ; qu'en invoquant ce prétexte et en tentant de justifier a posteriori les perquisitions irrégulières des chambres n° 10 et 11, la chambre de l'instruction s'est prononcée par des motifs contradictoires et a privé sa décision de base légale ;
" 3°) alors que dans le cadre de l'enquête de flagrance, une perquisition ne peut avoir lieu en présence de deux témoins qu'à la condition que soient constatées et établies l'impossibilité d'y procéder en présence de l'occupant du local perquisitionné ainsi que l'impossibilité pour celui-ci de désigner un représentant de son choix ; qu'en l'espèce, MM. Y...et A..., placés en garde à vue, étaient concernés par la perquisition pratiquée dans la chambre n° 11 le 4 novembre 2016 en présence de deux témoins ; qu'en se bornant à rejeter la requête en nullité présentée par M. Y..., sans constater que celui-ci, alors en garde à vue, avait été dans l'impossibilité d'assister à la visite effectuée à son domicile, ni invité à désigner une personne de son choix pour le représenter, la chambre de l'instruction a méconnu l'article 57 du code de procédure pénale ;
" 4°) alors que toute perquisition implique la recherche à l'intérieur d'un lieu normalement clos, notamment au domicile d'un particulier, d'indices permettant d'établir l'existence d'une infraction et d'en déterminer les auteurs ; que le mot domicile ne signifie pas seulement le lieu où une personne a son principal établissement, mais encore le lieu où, qu'elle y habite ou non, elle a le droit de se dire chez elle, quels que soient le titre juridique de son occupation et l'affectation donnée aux locaux ; qu'en déclarant régulière la perquisition de la chambre n° 11 opérée le 4 novembre 2016 à 13 heures 05, au motif que la chambre « se trouvait libre de tout occupant à compter de 12 heures, heure de fin de sa location », la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Sur le moyen, pris en ses deux premières branches ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que l'arrêt a rejeté sa demande dès lors que, n'étant titulaire d'aucun droit sur la chambre concernée, il ne saurait se prévaloir d'une prétendue atteinte au droit au respect du domicile ou de la vie privée que les dispositions légales et conventionnelles invoquées au moyen ont pour but de protéger ;
D'où il suit que le grief doit être écarté ;
Mais sur le moyen, pris en ses deux dernières branches ;
Vu les articles 56, 57, et 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon les deux premiers de ces textes, la personne, autre que celle mise en examen, chez laquelle une perquisition est opérée doit être invitée à y assister ou, en cas d'impossibilité, à désigner un représentant de son choix ;
Attendu que, selon le dernier, tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; Attendu que pour écarter l'argumentation de la défense tendant à voir déclarée nulle la perquisition réalisée dans la chambre n° 11, le 4 novembre 2016, à 13 h 05, l'arrêt énonce que cette chambre était libre de tout occupant à compter de 12 heures, de sorte que les enquêteurs ont à juste titre requis deux témoins ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi tout en constatant qu'au moment de son placement en garde à vue, la veille, M. Y...avait le droit de se dire chez lui dans la chambre concernée, alors au surplus que ses effets s'y trouvaient encore, la chambre n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; Qu'en application de l'article 612-1 du code de procédure pénale, et dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, la cassation aura effet à l'égard de M. Lyes A...qui ne s'est pas pourvu ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions relatives à la perquisition réalisée le 4 novembre 2016 dans la chambre n° 11, toutes autres dispositions étant expressément maintenues, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Colmar, en date du 30 mars 2017, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Colmar et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 15 novembre 2017 n° 17-85.074
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Andriamamonjisoa X...,
- M. Guy Y...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PAPEETE, en date du 25 juillet 2017, qui, infirmant, sur le seul appel de la partie civile, l'ordonnance de non-lieu partiel rendue par le juge d'instruction, les a renvoyés devant le tribunal correctionnel sous la prévention d'homicide involontaire ;
LA COUR, statuant après débats en l'audience publique du 2 novembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Béghin, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. Le conseiller référendaire BEGHIN, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, de la société civile professionnelle GASCHIGNARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAILLARDOT ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires, en demande et en défense, et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-3, 221-6, 221-8 et 221-10 du code pénal, dans leur rédaction en vigueur au 9 août 2007, de l'article préliminaire et des articles 81, 184, 213, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a ordonné le renvoi de M. X...devant le tribunal correctionnel pour homicide involontaire ;
" aux motifs que l'identification des causes de l'accident est la condition préalable à l'examen des responsabilités de MM. Guy Y...et Andriamanonjisoa X...; que l'ordonnance déférée, dans ses dispositions désormais définitives tendant au renvoi de MM, Freddy Z..., Jacques A..., Jean-Pierre B..., Stéphane C..., Didier D...et la société Air Moorea prise en la personne de son représentant légal M. Manate E...devant le tribunal correctionnel, a retenu l'hypothèse que la rupture du câble à cabrer avait provoqué l'accident de l'avion ; que même si l'ordonnance, examinant toutes les hypothèses de défaillance humaine ou technique, a mis en lumière certains constats demeurés inexpliqués, ceux-ci ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions de l'information judiciaire ; qu'il en est ainsi notamment :- du fragment brûlé de la carlingue de l'avion découvert sur le rivage de l'île de Moorea, dès lors que les analyses conduites en laboratoire ont permis d'écarter une combustion en vol ; que l'importance de la carbonisation nécessitait une exposition à un brasier durant plusieurs dizaines de minutes, délai incompatible avec la durée du vol (le délai entre la mise en route des moteurs et la fin de l'enregistrement sonore est de 4 mn 44 s), et un dégagement de fumée ne correspondant pas aux observations visuelles des témoins, selon les constatations expertales (D 477) ;- d'une erreur de pilotage résultant de la coupure accidentelle du moteur droit par l'interruption de l'arrivée de carburant (manette retrouvée en position OFF lors de la remontée du panneau de commande des moteurs) puisque l'exploitation de l'enregistreur de vol ne démontre pas l'arrêt d'un moteur, mais seulement une divergence dans la vitesse de rotation des hélices (cf. tableau d'analyse spectrale, D 743, p. 22), et notamment une augmentation de la vitesse de rotation incompatible avec l'absence de carburant ; qu'au demeurant, les constatations sur les moteurs et les hélices démontrent, selon les experts du BEA, que les moteurs étaient en rotation au moment de l'accident (D 743, p. 39-40) ; qu'enfin, les experts judiciaires ont relevé que « l'absence de déformation et la mobilité conservée des leviers de puissance, de régime et de carburant, n'ont pas permis de déterminer leur position lors de l'accident » (D 869, p, 18), ce qui induit une possible modification, postérieure à l'accident, de la position de la manette d'arrivée du carburant du moteur droit retrouvée en position OFF ; qu'enfin, la position fermée du capot de protection des deux manettes est incompatible avec une erreur de manipulation ;- d'un malaise du pilote, notamment par hypoglycémie, puisque l'analyse sanguine a conclu à « un équilibre glycémique satisfaisant » (D22) et que le pilote a poussé un juron (« ah putain ») au moment de la panne, ainsi que le révèle l'enregistreur de bord ; qu'aucune lésion ante mortem n'a, par ailleurs, été identifiée par les expertises médico-légales ;- des dysfonctionnements, par ailleurs avérés, du pilote automatique de l'avion puisque aucun incident n'avait été signalé depuis le remplacement du « yaw rate sensor », le 23 mai 2007 (D 723, p, 10) ; que si plusieurs pilotes, dont M. Michel F..., avaient la réputation de faire usage du pilote automatique sur les vols Moorea-Tahiti, il n'est établi par aucune pièce de l'information qu'il était en fonctionnement au cours de ce vol ; que son seuil minimum d'utilisation est de 1000 pieds, selon les recommandations du constructeur, ou de 500 pieds selon le manuel d'exploitation, alors que l'incident s'est déclenché à 400 pieds ; qu'en revanche, les observations répétées des pilotes relatives à ces dysfonctionnements auraient dû conduire la compagnie et les autorités de sureté à s'interroger sur leurs causes et leurs effets, notamment sur les câbles de gouverne ; que la rupture du câble de gouverne de profondeur à cabrer est clairement identifiée par l'ensemble des experts comme la cause directe de l'accident, soit avec certitude, soit avec probabilité ; que si plusieurs câbles ont été retrouvés rompus, les experts s'accordent pour considérer que les ruptures franches résultent de l'impact sur la surface de l'eau tandis qu'une seconde rupture, spécifiquement observée sur le câble de la commande à cabrer, s'est produite dans une zone ou tous les fils (torons) périphériques du câble étaient largement usés par leur frottement sur le guide-câble ; que cette cassure se distingue par le « non-détoronnement » (D 605 p. 29) du câble ;- experts judiciaires MM. G...et H...: « la chute de l'avion est due à la rupture du câble à cabrer de la gouverne de profondeur. Les câbles de commande de vol sont en acier inoxydable, le câble rompu a été usé prématurément à l'endroit d'un guide-câble (station 436 à l'arrière du fuselage). 72 des 133 fils composant le câble sont trouvés usés à plus de 90 %. Les caractéristiques du matériau du câble et sa fabrication sont correctes » (D869, p. 73) ;- experts du BEA : « l'accident est dû à la perte de contrôle en tangage de l'avion consécutive à la rupture à faible hauteur du câble à cabrer de la commande de profondeur au moment de la rentrée des volets. Cette rupture est due à l'enchaînement des phénomènes suivants : usure importante du câble au droit d'un guide-câble ; phénomène extérieur, vraisemblablement du jet blast, provoquant la rupture de plusieurs torons ; rupture du ou des derniers torons sous l'effet des efforts en vol sur la commande de profondeur » (D 843, p. 71) ;- expert I...(DGA) : chargé plus précisément d'examiner la commande de profondeur, il conclut : « en dernier point, on retiendra que sur tous les composants de la commande de profondeur, seul le câble de la commande â cabrer, trouvé rompu, a généré des marquages et des signatures particulières, démontrant bien son état différent des trois autres câbles voisins et présents dans le même environnement. Les particularités observées peuvent seulement suggérer que le câble était probablement rompu avant l'impact avec la surface de l'eau » (D 605, p. 32) ; qu'il faut relever que la mission de M. I..., expert, au contraire des autres experts, n'était pas générale mais particulière ; qu'il ne lui appartenait donc pas de mettre en relation la rupture du câble et l'accident, mais d'identifier les causes et le moment de la rupture (commission d'expert du 13 septembre 2007) ; que dès lors que la rupture du câble à cabrer est identifiée comme la cause de l'incident au décollage, il ressort des différents essais en vol effectués par M. J..., expert, que plusieurs conditions doivent être réunies pour que le pilote « récupère » l'avion après une perte d'altitude inférieure à 400 pieds : avion en palier, réaction inférieure ou égale à trois secondes, action sur le compensateur de profondeur ou sur les manettes de puissance ; qu'encore dans tous ces cas, la perte d'altitude est-elle de 300 pieds (D 721, p, 3) ; qu'il est évident que la situation d'un pilote d'essai, simulant la panne en altitude, est sans rapport avec celle d'un pilote se trouvant à 400 pieds, qui doit réagir à une panne dont il ignore les causes, et alors qu'un peu plus de 10 secondes se sont écoulées entre la survenance de la panne et l'impact sur l'eau ; que ce constat exclut une erreur de pilotage, d'autant que les experts judiciaires ont constaté que le manuel d'exploitation (Manex) d'Air Moorea, partie 3 (procédures anormales et d'urgence), chapitre 3. 2, 8 relatif aux avaries de la profondeur, n'aborde que l'avarie survenant à l'approche et non la perte de commande de profondeur en montée à faible hauteur (D 630, p, 29 ; D 869, p. 20) ; que c'est donc à bon droit que l'ordonnance a recherché la chaîne des responsabilités sur le fondement d'un accident cause par la rupture du câble à cabrer de la gouverne de profondeur ; que sur les causes de la rupture du câble de gouverne de profondeur à cabrer, la recherche des causes de cette rupture est aussi la recherche du lien de causalité entre une faute éventuelle de MM, Y...et X...de l'accident ; qu'il est établi que le câble à cabrer, constitué de 7 torons de 19 fils chacun, était usé à 54 %, c'est-à-dire que les 72 fils (sur 133) constituant l'enveloppe extérieure de 6 torons (le septième étant le toron central) étaient usés à plus de 90 % et ne participaient plus à l'effort de traction (D 869, p. 13) ; que cette usure n'était pas nécessairement décelable à un examen visuel et pouvait nécessiter un instrument grossissant ou un examen au toucher (D 875, p. 7 et 8) ; que cette usure, selon le rapport de M. I..., expert, se situe à l'arrière de l'appareil, à l'endroit d'un guide-câble en polyamide ; que selon les éléments rassemblés par l'information, plusieurs causes peuvent avoir contribué à cette usure :- La composition du câble : En acier inox, ce câble ne nécessitait pas d'entretien mais il était à la fois plus sensible à l'usure qu'un câble en acier carbone équipant les autres appareils Twin Otter de la flotte, et moins sensible à la corrosion en milieu marin ; qu'aucune trace de corrosion n'a en effet été observée sur ce câble (D743, p. 38) ; que les essais d'usure réalisés à la demande des experts ont démontré qu'une plage d'usure apparaissait sur le câble en acier inoxydable à l'occasion de cycles de frottement sur une bague en polyamide identique à celle de l'avion, alors qu'aucune mesure n'était décelable sur le câble en acier en carbone (D 743, p, 44) ; que cependant, les experts n'ont pu déterminer une « loi d'usure » qui leur aurait permis de calculer la vitesse d'usure au regard des tractions exercées ; qu'il est établi que ce câble a été posé neuf, le 11 mars 2005, par la société américaine Fayard Entreprise ; qu'il a été déposé, mais qu'il n'est pas démontré qu'il ait été changé, au cours des opérations de rénovation conduites au Texas et au Canada ; que l'appareil a donc été importé en Polynésie muni de ce câble, dont la composition était connue de plusieurs responsables de la compagnie Air Moorea (MM. A..., M. C..., selon leurs propres déclarations rappelées dans l'ordonnance, p, 128 et 136) ; que cependant, les techniciens chargés de l'entretien graissaient ces câbles comme des câbles en acier carbone, pour les préserver de la corrosion, alors que, selon les experts judiciaires, la graisse collectait la poussière et favorisait l'usure du câble (D 869, p. 60) ; que dès lors, la périodicité et la nature des opérations de maintenance du câble revêtaient une importance primordiale pour identifier l'usure et y remédier ; que les instructions du constructeur prescrivent un changement des câbles de gouverne tous les cinq ans en atmosphère continentale et tous les ans en atmosphère saline (Réf, SP1- E5, D 723 p. 19) ; qu'elles ne font pas de distinction selon la composition du câble ; que si les câbles en acier carbone, plus sensibles à la corrosion, sont principalement concernés, il ne s'en déduit pas que les câbles en acier inox n'auraient pas dû faire l'objet d'une attention identique quant à leurs conditions d'entretien et de changement en Polynésie, au regard de leur faible résistance à l'usure, qui ne pouvait être ignorée d'aucun professionnel de la sûreté aérienne, et en l'absence d'instructions particulières à ce type de câble de la part du constructeur ; que quand bien même les autorités de contrôle auraient ignoré la nature du câble de gouverne de profondeur équipant le Twin Otter F-OIQl, elles auraient alors dû appliquer les prescriptions relatives à un changement tous les douze mois ; que l'avion avait été transféré à Tahiti le 23 octobre 2006, mais les autorités de sûreté aérienne ne pouvaient ignorer qu'il s'agissait d'un appareil d'occasion, puisque le GSAC avait procédé à sa visite d'habilitation ; que la seule référence à la date de pose du câble (11 mars 2005) aurait dû les conduire, à tout le moins, à procéder à un calcul prorata temporis comme il est d'usage selon les experts judiciaires (D 723, p. 20), en considération des 19, 5 mois antérieurs à l'arrivée de l'avion, conduisant ainsi à un remplacement des câbles au 23 juin 2007, soit avant l'accident ; que le fait que l'avion ait été immobilisé durant une partie de ces 19, 5 mois, en Amérique du Nord, n'est pas de nature à modifier ce calcul puisque le constructeur n'a pas subordonné la périodicité de ce changement au nombre d'heures de vol mais seulement à une durée fixe d'un an, étant observé qu'antérieurement à sa mise en service en Polynésie, il avait au moins volé durant 383 heures pour 1233 cycles de vol (D 743, p. 13 : 29 652 heures et 48 674 cycles au 11 mars 2005 ; D 869, p. 27 : 30 035 heures pour 49 907 cycles au 17 novembre 2006) ; que cette défaillance se double d'une erreur dans le manuel de suivi des pièces à durée de vie limitée d'Air Moorea (kardex, section III) puisqu'il est indiqué que le câble de la gouverne de profondeur a été remplacé le 2 octobre 2006, c'est-à-dire durant le chantier réalisé par la société Rocky Mountain, alors que seuls les câbles d'aileron avaient été changés à cette date, selon les experts judiciaires (D 723, p. 19-20) ; que sur la tension initiale du câble, selon les experts judiciaires, « la surtension des câbles de la gouverne de profondeur augmente la fréquence de vibration du câble qui s'use sur le guide câble de la station 434, le tendeur de câble situé à proximité agit comme une masselotte et amplifie l'usure. Le constructeur précise qu'une usure prématurée d'un câble peut-être la conséquence d'une surtension » (D 869, p. 74) ; que la preuve de la surtension du câble résulte du constat de l'usure fortement marquée de la gorge du cadran ; qu'en revanche, il n'a pas été possible de déterminer avec certitude si la tension avait été réglée en considération d'une exploitation au Canada (à 77 pounds) ou en Polynésie française (à 97 pounds) (D 990), où la dilatation de la carlingue en aluminium de l'avion sous l'effet de la chaleur provoque une surtension des câbles ; que les experts judiciaires et ceux du BEA ont recueilli des informations contradictoires sur ce point au Canada (D 875) ; que cependant, même si le degré de surtension n'a pu être établi, il n'existe aucune autre explication à l'usure accentuée de la gorge du cadran que celle d'une surtension, puisqu'aucun défaut de conception n'a été identifié à l'endroit de l'usure ou de la rupture du câble ; que cette question doit être mise en relation avec le programme de changement des câbles résultant des instructions du constructeur, puisqu'une dépose antérieure à l'accident aurait permis de mettre en tension le nouveau câble dans des conditions conformes à l'exploitation de l'avion ; que sur les conditions d'exploitation de l'avion, le constructeur définit un programme d'entretien pour des vols moyens d'une durée de 50 minutes ; qu'il qualifie de « sévères » les conditions d'exploitation en usage intensif en dessous de 2 000 pieds, zone propice aux turbulences, et il demande aux compagnies de le contacter pour adapter les inspections à ces situations (D 723, p. 16) ; qu'il n'est pas démontré que des informations particulières aient été sollicitées par la compagnie ; qu'affecté à des vols navettes très courts qui sollicitaient davantage la gouverne de profondeur, soumis aux turbulences propres aux vols à faible altitude et à des températures ambiantes élevées, notamment lors des séjours sur le tarmac, le Twin Otter était exploité dans les conditions « sévères » qui justifiaient des inspections personnalisées arrêtées avec le constructeur, à tout le moins, l'avion devait être soumis à un programme d'entretien qui ne tienne pas seulement compte des heures de vol mais des conditions réelles d'exploitation, puisque la durée moyenne de ses vols est évaluée par les experts à neuf minutes vingt secondes (D 723, p. 16) ; que les instructions du constructeur sont formelles sur ce point (Réf. ; SPI- E4, D 723, p. 19) ; que l'inspection des câbles en acier inox (que le constructeur ne prohibe pas) induit une inspection toutes les quatre cents heures de vol ou tous les trois mois, à la première échéance atteinte ; qu'or, en section IV du programme d'entretien d'Air Moorea, il est mentionné : « 4-5, Opération en atmosphère saline ou très polluée. Instructions prises en compte directement en section 3 et 6, suivant périodicité. Note : l'inspection des câbles de direction et profondeur à quatre cents heures ou trois mois a été intégrée en section VI avec une périodicité de quatre cents heures simple. Le rythme de vol des aéronefs implique une inspection tous les cinq mois environ » ; que les experts judiciaires relèvent que :- cette inspection n'a pas sa place en section IV puisque la personnalisation du programme d'entretien, comme le demande la réglementation, justifiait sa place en section III ;- or, la périodicité dequatre cents heures n'a été trouvée ni en section VI ni en section III ; elle n'a pas davantage été trouvée dans le kardex de suivi des échéances et paraît n'avoir jamais été appliquée ;- la suppression de la périodicité de trois mois n'est justifiée par aucun motif ; que cette lacune est fondamentale dans la recherche des responsabilités : d'une part, elle est à l'origine directe de l'absence de détection d'usure du câble puisque la tâche SP1- E4 intègre la recherche de l'usure et de la corrosion sur le câble de profondeur et, d'autre part, elle est décelable à la seule lecture du programme d'entretien, sans nécessiter de rapprochements avec une autre documentation ou un examen sur le terrain, puisque les conditions d'exploitation du Twin Otter, nécessairement connues de toutes les autorités de sécurité, ne pouvaient en aucun cas impliquer un espacement ou une suppression des contrôles, mais au contraire leur intensification et, à tout le moins, le respect des spécifications du constructeur ; que si la tâche SP1- E4 avait été correctement prévue au programme d'entretien, elle aurait été appliquée au moins trois fois sur l'avion entre son arrivée en Polynésie et l'accident ; que sur les conditions de maintenance de l'avion, la compagnie Air Moorea n'extériorisait aucune des tâches de gestion de navigabilité ou d'entretien des avions ; qu'elle disposait de son propre organisme d'entretien, agréé Partie 145 (norme européenne), qui était surveillé par le GSAC et agréé par la DGAC (D 869, p. 29) ; que deux incidents doivent être soulignés ; qu'ils sont révélateurs des défaillances de la maintenance et ils sont de nature à avoir fragilisé les câbles de gouverne, étant observé que le câble à piquer était lui-même usé à 36 %, selon les analyses réalisées au cours de l'information ;- que les dysfonctionnements répétés du pilote automatique, qui ont donné lieu à six comptes rendus d'incident technique en vol (CRM) entre le 19 novembre 2006 et le 23 mai 2007 et n'ont pas entraîné de réparations satisfaisantes jusqu'au remplacement du « yaw rate sensor », le 23 mai 2007 ; qu'il ressort des auditions de huit pilotes que le pilote automatique agissait sur le « trim de profondeur » et que, selon M. Claude K... : « cela entraîne une tension sur le câble de profondeur qui à terme pourrait éventuellement générer une usure prématurée » (D 723, p. 13) ;- qu'une très forte turbulence survenue le 2 juillet 2007 qui avait nécessité la remise en place du capitonnage de la cabine ; que le technicien avait seulement noté sur le CRM, à 18 heures 15 : « vérification générale de l'avion RAS » ; qu'un programme d'entretien prescrit une inspection spéciale après un vol en conditions de turbulences sévères, par deux personnes successivement, comprenant notamment la vérification de toutes les commandes de vol « pour liberté de mouvement » et, si des conditions de prise en main inhabituelles ont été rencontrées, une vérification des commandes de vol « pour des tensions de câbles correctes et bon fonctionnement » (D 723, p, 9 et 10) ; que le BEA fait observer que le pilote n'avait pas signalé « des conditions de prise en main inhabituelles » (D 743, p. 16) ; que cependant, la rédaction du paragraphe (D 869, p. 40) est ambiguë et peut renvoyer les conditions de prise en main à la vérification des commandes de vol pour liberté de mouvements faite par le technicien, et non par le pilote ; qu'en revanche, l'hypothèse d'un « jet blast » évoquée par le BEA, c'est-à-dire le souffle de réacteurs puissants passant à proximité de l'avion et induisant sur le câble de commande à cabrer en position verrouillée (parking) un niveau d'effort supérieur aux conditions de rupture d'un câble usé, n'est pas prouvée, même s'il est relevé que le F- 01Q1 était stationné la nuit à proximité d'avions gros porteurs de type A340 ; qu'elle est avancée par le BEA pour expliquer la rupture du câble alors que son degré d'usure aurait dû, selon ce bureau, lui permettre de résister aux efforts rencontrés en vol (D 743, p. 63-65) ; que sur ce point, les essais de résistance du câble pratiqués en laboratoire sont peu pertinents, puisqu'ils ne pouvaient prendre en compte les turbulences susceptibles de s'être produites au moment de la rupture ; que le caractère aléatoire de la répartition des charges sur un câble fragilisé est en outre démontré par l'essai réalisé sur un tronçon du câble à cabrer prélevé sur l'épave, au cours duquel une traction de 110 kg a entraîné la rupture complète du toron central alors qu'une traction de 190 kg n'avait rompu que 5 fils (D 869, p. 103) ; que sur la gestion du maintien de la navigabilité, le constructeur de l'avion avait édité une documentation relative à l'entretien préventif à appliquer pour garantir sa navigabilité continue ; que le document PSM 1-6-7, qui définissait les principales missions d'entretien, faisait l'objet de mises à jour régulières ; que sa dernière révision datait du 12 mars 2007 ; que celle-ci se compose, sur un cycle de 6000 heures de vol, de 48 visites (EMMA) réparties en :- inspections de base toutes les 125 heures de vol ;- inspections spéciales compte-tenu des circonstances environnementales telles que l'atmosphère saline sur la base d'une durée moyenne des vols de 50 minutes, inspections détaillées comprenant notamment les câbles de commande de vol et de gouverne de profondeur toutes les 1000 heures de vol en cas de conditions « sévères » d'exploitation en appliquant la carte EMMA 18, tâche 22 (tableau de synthèse des visites en D 869, p. 129) ; que le passage au système EMMA avait été demandé par le GSAC à la compagnie Air Moorea, et il avait donné lieu à l'édition 4 du programme d'entretien du Twin Otter modèle DJ1C6-300, datée du 7 août 2006, qui avait été approuvée par le GSAC et par le SEACPF ; qu'en application du règlement (CE) 2042/ 2003 partie M § M. A. 302, ce programme devait « détailler l'ensemble des opérations d'entretien à effectuer, y compris leur fréquence ainsi que toute tâche particulière relative au type et à la spécificité des opérations » ; qu'il devait être conforme « aux instructions établies par l'autorité compétente » et « aux instructions de maintien de la navigabilité délivrée par les détenteurs du certificat type », et qu'il devait être approuvé, ainsi que ses modifications ultérieures, par « l'autorité compétente » (D 869, p. 46) ; que le Twin Otter F-OIQI avait subi six visites de base (EMMA) entre sa mise en service sur la ligne Tahiti-Moorea et son accident ; que si leur périodicité (toutes les 125 heures de vol) correspond aux prévisions de principe du constructeur, il apparaît que les techniciens MM. Eric L...et Viria Christian M..., qui ont émargé aux tâches relatives aux câbles, n'étaient pas qualifiés pour les modèles DHC6, en violation de la réglementation (D 869, p. 60-61) ; que surtout, le constructeur ayant défini le programme d'entretien pour des vols d'une durée moyenne de cinquante minutes, et le Twin Otter F-OIQI réalisant des vols d'une durée moyenne inférieure à dix minutes, le programme d'entretien de l'avion devait nécessairement prendre en compte ces conditions d'exploitation particulières puisque les câbles de gouverne de profondeur, pour s'en tenir au matériel mis en cause dans l'accident, étaient particulièrement sollicités à l'occasion des décollages et des atterrissages ; que la périodicité de l'entretien des pièces particulièrement sollicitées dans ces conditions d'exploitation aurait ainsi dû être divisée au minimum par 5, voire par 10 selon les experts judiciaires qui retiennent des vols navettes enregistrés sur l'enregistreur de bord pour une durée « très proche de cinq minutes » (D869, p. 47) ; qu'entre le 17 novembre 2006, date de l'arrivée de l'avion sur le territoire, et le 8 août 2007, veille de l'accident, l'appareil avait effectué 799 heures de vol pour un cycle de 5137 vols ; que le cumul des conditions environnementales et des conditions opérationnelles aurait dû conduire à une compression des visites, tant dans leur périodicité que dans la nature des tâches d'entretien, qui n'a pas été calculée par les experts mais qui est sans rapport avec le programme d'entretien défini par le constructeur ; que le tableau de synthèse de la vie du câble figurant au rapport d'expertise judiciaire illustre le changement fondamental des paramètres de vieillissement à partir de son exploitation en Polynésie (D 869, p. 135) ; que dans sa section 1, le programme d'entretien Air Moorea n'intégrait pas le critère de la brièveté des vols, et n'était donc pas personnalisé au type d'exploitation, ainsi que l'exige le règlement ; que cette anomalie a eu « une conséquence directe sur l'accident », selon les experts judiciaires (D 869, p. 47) ; que cette anomalie aurait dû être détectée non seulement par le GSAC mais aussi par le service d'Etat de l'aviation civile puisqu'elle était contenue dans l'édition 4 du programme d'entretien qui contenait une « évolution radicale des principes d'entretien », selon les experts judiciaires (D 869, p. 46), par l'introduction du système EMMA, et que cette innovation majeure impliquait l'approbation de l'Etat, selon l'arrêté du 20 décembre 2005 ; que la carte EMMA 18 devait être appliquée d'abord après 250 heures de vol, puis toutes les 1000 heures, selon le tableau des visites d'entretien ; qu'elle n'avait donc été appliquée qu'à une reprise avant l'accident, à l'occasion de la visite des 250 heures, le 22 février 2007 ; que les experts judiciaires ont mis « très fortement » en doute la vérification de la valeur de tension des câbles (tâche 22) à l'occasion de cette visite, malgré l'affirmation du technicien M. Eric L..., non qualifié pour l'entretien des DHC6 : que d'une part, la sortie et le retour du tensiomètre au magasin d'outillage n'ont pas été enregistrés sur le cahier prévu à cet effet et que, d'autre part, les inscriptions réglementaires permettant d'assurer la traçabilité des différents paramètres liés aux réglages de tension des câbles (température du jour, valeurs des tensions avant et après réglage, émargements du technicien et du contrôleur) sont absents (D 869, p. 60) ; qu'en réalité, le technicien n'avait aucune raison d'appliquer la tâche 22 puisque celle-ci avait été supprimée de la carte EMMA 18 par le programme d'entretien approuvé par les autorités de sécurité ; que la section VI-4 de ce programme, relative aux câbles de commande de direction, de profondeur et d'aileron, ne comporte plus de référence 18-22 (tension) ; que la vérification de la tension est renvoyée à la section III, en faisant référence à la tâche SP1- E5 qui correspond au remplacement du câble ; que la section III se contente de fixer à douze mois le délai de remplacement des câbles de gouverne et notamment du câble de profondeur (D 869, p. 51) ; qu'ainsi, la vérification de la tension du câble de gouverne de profondeur avait été purement et simplement supprimée du programme d'entretien puisqu'elle ne s'effectuait qu'à l'occasion du remplacement des câbles ; que cette erreur intrinsèque au programme d'entretien n'a été détectée ni par le GSAC, ni par le SEACPF ; qu'elle a entraîné l'absence de tout contrôle de la tension des câbles depuis la sortie du chantier au Canada ; que l'information judiciaire a rassemblé des indices suffisants pour considérer que la rupture du câble de commande de gouverne de profondeur est le résultat d'une usure anormale qui trouve sa cause dans le frottement sur un des guides d'oscillation de la gouverne de profondeur, alors que les conditions d'exploitation de l'avion entraînait une sollicitation particulière de ce câble ; que la rupture est survenue dans une phase d'effort important sur un câble fragilisé ; que cette usure aurait dû être détectée et donc corrigée, soit à l'occasion du remplacement du câble, soit à l'occasion des contrôles d'entretien, si les contrôles de navigabilité prescrits par le constructeur avaient été respectés ; qu'ils ne l'ont pas été en raison des lacunes du programme d'entretien de ce modèle d'avion rédigé par la compagnie puis contrôlé et approuvé par le GSAC et le SEACPF ; que sur la responsabilité de M. X...: il était le représentant du GSAC en Polynésie française depuis 2003 ; qu'il résulte de l'annexe de l'arrêté du 20 décembre 2005 relatif à l'habilitation du groupement pour la sécurité de l'aviation civile (GSAC) pour l'exercice de contrôles et de vérifications dans le domaine de la sécurité de l'aviation civile que les missions de ce groupement d'intérêt économique étaient, notamment, des « missions permanentes de contrôle et de vérification » (titre I) dans le « domaine de l'entretien et du maintien de navigabilité des aéronefs » (chapitre 2 du titre I) et qu'il effectuait :- « les contrôles et vérifications nécessaires à l'approbation par le ministre chargé de l'aviation civile des programmes d'entretien des aéronefs exploites en transport public » (§ 23, programme d'entretien d'aéronefs exploités en transport aérien public) ;- « les contrôles et les vérifications nécessaires au renouvellement des documents de navigabilité », « les contrôles et vérifications nécessaires en vue d'établir les certificats d'examen de navigabilité » (§ 2-5 validité des documents de navigabilité),- et qu'il pouvait même « procéder à des examens de navigabilité des aéronefs » (même paragraphe) ; que l'instruction ministérielle du 16 novembre 2004 précise en outre que « le GSAC est chargé de l'étude des programmes d'entretien des aéronefs exploités en transport public et de leurs évolutions ; que pour l'édition originale ou un amendement majeur d'un programme d'entretien, le GSAC, après étude, transmet un avis motivé à la DGAC qui est chargée de l'approbation du document ; que pour un amendement mineur dont l'approbation n'est pas déléguée, le GSAC est chargé de l'étude et de l'approbation du document ; que lorsque des approbations d'amendements mineurs sont déléguées, une modification peut entrer en vigueur dès que le GSAC a accusé réception de celle-ci » (§ 9, 2) ; que ces dispositions correspondent aux dispositions du chapitre 2. 1 de l'arrêté du 20 décembre 2005 précité ; que dans ce cadre, il appartenait à M. X..., non seulement de procéder à toutes les vérifications documentaires entrant dans ses missions de sécurité, et bien entendu de contrôler les manuels d'entretien du Twin Otter DHC6, mais aussi de procéder à toutes inspections utiles pour s'assurer de l'application de la réglementation qu'il avait approuvée ou dont il avait recommandé l'approbation au représentant du service d'Etat de l'aviation civile en Polynésie française ; que les fautes qui peuvent lui être reprochées sont les suivantes :- avoir approuvé et proposé à l'approbation du directeur du service d'État de l'aviation civile en Polynésie française un programme d'entretien du Twin Otter DHC6 dont les lacunes suivantes ont entraîné l'absence de tout contrôle de la tension et de l'usure du câble de gouverne de profondeur, ainsi que l'absence de changement de ce câble, entre la mise en service de l'avion et son accident :- section I relative à l'entretien personnalisé n'intégrant pas les conditions « sévères » d'exploitation du F- OIQ1, qui auraient nécessité une division par 5 des délais de maintenance des câbles de gouverne de l'avion, particulièrement sollicités par ces conditions (turbulences, décollages et atterrissages fréquents),- section Vl-4, relative notamment aux câbles de commande de profondeur, ne comportant plus de référence à la tâche 18-22 (contrôle de la tension), au contraire des instructions du constructeur,- section III fixant à douze mois le délai de remplacement des câbles de gouverne (tâche SP1- E5), sans tenir compte de l'usage antérieur de l'avion selon le calcul d'usage au prorata temporis, et de ses conditions « sévères » d'exploitation, selon les critères fixés par le constructeur,- section VI ne mentionnant pas le délai de trois mois pour l'inspection des câbles en acier inox en atmosphère saline (tâche SP2- E4),- note de la section IV 4-5 disposant que l'inspection des câbles de direction et profondeur à 400 heures ou trois mois est intégrée en section VI avec une périodicité de 400 heures et supprimant sans motif le délai de trois mois,- absence de mention de la périodicité de 400 heures pour l'inspection des câbles de direction et de profondeur en section VI, où la note IV 4-5 avait pourtant renvoyée, qui a entraîné le défaut d'exécution de la tâche SPI- E4 en 800 heures de vol ;- avoir omis de procéder aux inspections de nature à détecter et écarter l'emploi de techniciens non qualifiés pour la maintenance des modèles DHC6, à identifier le défaut de traçabilité du contrôle de tension des câbles lors des opérations d'entretien du 22 février 2007, et plus généralement les lacunes du kardex dans le suivi des opérations de maintenance, et à relever sur les comptes rendus d'incident en vol (REM) les observations répétées des pilotes relatives aux dysfonctionnements du pilote automatique, qui agissaient sur le câble de gouverne de profondeur ; que ces fautes sont caractérisées en ce que M. X...disposait de l'assistance de ses services et des compétences suffisantes pour identifier des lacunes majeures pour la sécurité des usagers et des pilotes ; que ces lacunes majeurs étaient intrinsèques au programmes d'entretien et ne nécessitaient qu'une lecture attentive et, éventuellement, un rapprochement avec les instructions du constructeur ; que l'évolution majeure intervenue, dans l'édition 4, dans les missions d'organisation de la maintenance et de la navigabilité de l'avion, nécessitait une lecture attentive et complète ; qu'il existe un lien de causalité certain entre ces fautes et l'accident puisque ces lacunes ont abouti à supprimer purement et simplement tout contrôle de la tension et de l'usure et tout remplacement du câble de gouverne de profondeur durant la période antérieure à l'accident, à l'encontre des recommandations élémentaires du constructeur, et rendaient inéluctable sa rupture, s'agissant d'un câble en acier inox ; que ces fautes caractérisées sont conformes aux termes de la mise en examen ; que l'argument selon lequel M. X...n'avait pas à remettre en cause des lacunes antérieures validées par ses prédécesseurs est sans pertinence au regard des changements majeurs dans le traitement de la sécurité de l'aéronef figurant à l'édition 4 du programme d'entretien avec l'introduction de la procédure EMMA, qui devait le conduire à une analyse intégrale du document, et de la nécessaire personnalisation des programmes d'entretien au regard de l'ancienneté de l'avion et des pièces susceptibles d'affecter sa sécurité, ainsi que de la nature de ses missions ; que la disposition de l'ordonnance qui a dit n'y avoir lieu à suivre à l'encontre de M. X...est infirmée, et celui-ci sera renvoyé devant le tribunal correctionnel ;
" 1°) alors que la contradiction de motifs équivaut à leur absence et prive la décision, en la forme, des conditions essentielles de son existence légale ; que la chambre de l'instruction est tenue de répondre aux articulations essentielles des mémoires régulièrement déposés par les mis en examen ; que M. X...faisait valoir que le GSAC, dont il était le préposé, avait pour seule mission d'approuver les évolutions mineures des programmes d'entretien (article 2-3 du règlement cadre du GSAC adopté par arrêté du 20 décembre 2005) ; que l'arrêt attaqué, tout en relevant que le rôle réglementaire du GSAC portait sur l'approbation d'amendements mineurs, a affirmé l'existence de charges suffisantes que M. X...ait commis une faute caractérisée pour n'avoir pas procédé à une analyse intégrale de l'édition 4 du programme d'entretien, modifié par l'introduction de la procédure EMMA, qui comportait, selon l'arrêt, des changements majeurs dans le traitement de la sécurité de l'aéronef ; qu'en l'état de ces motifs insuffisants et contradictoires, l'arrêt attaqué ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ;
" 2°) alors que la chambre de l'instruction est tenue de répondre aux articulations essentielles des mémoires régulièrement déposés par les mis en examen ; que M. X...faisait valoir que la mission du GSAC portait sur un contrôle essentiellement documentaire, qu'il était seulement le préposé du GSAC et ne pouvait remettre en cause les contrôles validés par ses prédécesseurs, et que les vérifications qu'il avait effectuées étaient réelles et certaines ; qu'en jugeant cependant que M. X...avait commis des fautes caractérisées en omettant de procéder aux inspections de nature à détecter et à écarter l'emploi de techniciens non qualifiés pour la maintenance des aéronefs DHC6, à identifier le défaut de traçabilité du contrôle de tension des câbles lors des opérations d'entretien du 22 février 2007, et plus généralement les lacunes du kardex dans le suivi des opérations de maintenance, et à relever, sur les comptes rendus d'incident en vol (REM), les observations répétées des pilotes relatives aux dysfonctionnements du pilote automatique, qui agissaient sur le câble de gouverne de profondeur, tandis que ces diligences ne relevaient pas du contrôle du GSAC ni des pouvoirs de M. X..., la chambre de l'instruction, qui a ainsi omis de répondre au mémoire dont elle était saisie, a privé son arrêt en la forme des conditions essentielles de son existence légale ;
" 3°) alors que l'insuffisance de motifs équivaut à leur absence et prive la décision, en la forme, des conditions essentielles de son existence légale ; qu'il en est ainsi en l'espèce dès lors que la chambre de l'instruction n'a pas relevé que M. X...ne pouvait ignorer que les fautes retenues à son encontre exposaient autrui à un risque d'une particulière gravité ;
" 4°) alors que la chambre de l'instruction ne pouvait affirmer que les fautes de M. X...étaient caractérisées en ce qu'il « disposait de l'assistance de ses services » pour identifier des lacunes majeures pour la sécurité des usagers et des pilotes, tandis que, comme M. X...le faisait valoir dans son mémoire (p. 19 § 5), il était le seul préposé du GSAC en Polynésie, de sorte qu'il ne disposait d'aucun service pour l'assister dans son travail " ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 6 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-3, 121-4 et 221-6 du code pénal, préliminaire, 184, 186, 574, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a, infirmant l'ordonnance de non-lieu partiel à son égard, ordonné le renvoi de M. Y...devant le tribunal correctionnel pour homicides par imprudence ;
" aux motifs que, sur les causes de la rupture du câble de gouverne de profondeur à cabrer, la recherche des causes de cette rupture est aussi la recherche du lien de causalité entre une faute éventuelle de MM. Y...et X...et l'accident ; qu'il est établi que le câble à cabrer, constitué de 7 torons de 19 fils chacun, était usé à 54 %, c'est-à-dire que les 72 fils (sur 133) constituant l'enveloppe extérieure de 6 torons (le septième étant le toron central) étaient usés à plus de 90 % et ne participaient plus à l'effort de traction (D 869, p. 13) ; que cette usure n'était pas nécessairement décelable à un examen visuel et pouvait nécessiter un instrument grossissant ou un examen au toucher (D 875, p. 7 et 8) ; que cette usure, selon le rapport de M. I..., expert, se situe à l'arrière de l'appareil, à l'endroit d'un guide-câble en polyamide ; que, selon les éléments rassemblés par l'information, plusieurs causes peuvent avoir contribué à cette usure ; 1) La composition du câble : En acier inox, ce câble ne nécessitait pas d'entretien mais il était à la fois plus sensible à l'usure qu'un câble en acier carbone équipant les autres appareils Twin Otter de la flotte, et moins sensible à la corrosion en milieu marin ; qu'aucune trace de corrosion n'a en effet été observée sur ce câble (D 743, p. 38) ; que les essais d'usure réalisés à la demande des experts ont démontré qu'une plage d'usure apparaissait sur le câble en acier inoxydable à l'occasion de cycles de frottement sur une bague en polyamide identique à celle de l'avion, alors qu'aucune mesure n'était décelable sur le câble en acier en carbone (D 743, p. 44) ; que cependant, les experts n'ont pu déterminer une « loi d'usure » qui leur aurait permis de calculer la vitesse d'usure au regard des tractions exercées ; qu'il est établi que ce câble a été posé neuf, le 11 mars 2005, par la société américaine Fayard Entreprise ; qu'il a été déposé, mais qu'il n'est pas démontré qu'il ait été changé, au cours des opérations de rénovation conduites au Texas et au Canada ; que l'appareil a donc été importé en Polynésie muni de ce câble, dont la composition était connue de plusieurs responsables de la compagnie Air Moorea (M. A..., M. C..., selon leurs propres déclarations rappelées dans l'ordonnance, p. 128 et 136) ; que cependant, les techniciens chargés de l'entretien graissaient ces câbles comme des câbles en acier carbone, pour les préserver de la corrosion, alors que, selon les experts judiciaires, la graisse collectait la poussière et favorisait l'usure du câble (D 869, p. 60) ; que dès lors, la périodicité et la nature des opérations de maintenance du câble revêtaient une importance primordiale pour identifier l'usure et y remédier ; que les instructions du constructeur prescrivent un changement des câbles de gouverne tous les cinq ans en atmosphère continentale et tous les ans en atmosphère saline (Réf. : SPIE5, D 723 p. 19) ; qu'elles ne font pas de distinction selon la composition du câble ; que si les câbles en acier carbone, plus sensibles à la corrosion, sont principalement concernés, il ne s'en déduit pas que les câbles en acier inox n'auraient pas dû faire l'objet d'une attention identique quant à leurs conditions d'entretien et de changement en Polynésie, au regard de leur faible résistance à l'usure, qui ne pouvait être ignorée d'aucun professionnel de la sûreté aérienne, et en l'absence d'instructions particulières à ce type de câble de la part du constructeur ; que, quand bien même les autorités de contrôle auraient ignoré la nature du câble de gouverne de profondeur équipant le Twain Oter F-OIQI, elles auraient alors dû appliquer les prescriptions relatives à un changement tous les douze mois ; que l'avion avait été transféré à Tahiti le 23 octobre 2006, mais les autorités de sûreté aérienne ne pouvaient ignorer qu'il s'agissait d'un appareil d'occasion, puisque le GSAC avait procédé à sa visite d'habilitation ; que la seule référence à la date de pose du câble (11 mars 2005) aurait dû les conduire, à tout le moins, à procéder à un calcul prorata temporis comme il est d'usage selon les experts judiciaires (D 723, p. 20), en considération des 19, 5 mois antérieurs à l'arrivée de l'avion, conduisant ainsi à un remplacement des câbles au 23 juin 2007, soit avant l'accident ; que le fait que l'avion ait été immobilisé durant une partie de ces 19, 5 mois, en Amérique du Nord, n'est pas de nature à modifier ce calcul puisque le constructeur n'a pas subordonné la périodicité de ce changement au nombre d'heures de vol mais seulement à une durée fixe d'un an, étant observé qu'antérieurement à sa mise en service en Polynésie, il avait au moins volé durant 383 heures pour 1233 cycles de vol (D 743, p. 13 : 29652 heures et 48674 cycles au Il mars 2005 ; D 869, p. 27 : 30035 heures pour 49907 cycles au 17 novembre 2006) ; que cette défaillance se double d'une erreur dans le manuel de suivi des pièces à durée de vie limitée d'Air Moorea (Kardec, section III) puisqu'il est indiqué que le câble de la gouverne de profondeur a été remplacé le 2 octobre 2006, c'est-à-dire durant le chantier réalisé par la société Rocky Mount ain, alors que seuls les câbles d'aileron avaient été changés à cette date, selon les experts judiciaires (D 723, p. 19-20) ; 2) La tension initiale du câble : Selon les experts judiciaires, « la surtension des câbles de la gouverne de profondeur augmente la fréquence de vibration du câble qui s'use sur le guide câble de la station 434, le tendeur de câble situé à proximité agit comme une masselotte et amplifie l'usure ; que le constructeur précise qu'une usure prématurée d'un câble peut-être la conséquence d'une surtension » (D 869, p. 74) ; que la preuve de la surtension du câble résulte du constat de l'usure fortement marquée de la gorge du cadran ; qu'en revanche, il n'a pas été possible de déterminer avec certitude si la tension avait été réglée en considération d'une exploitation au Canada (à 77 pounds) ou en Polynésie française (à 97 pounds) (D 990), où la dilatation de la carlingue en aluminium de l'avion sous l'effet de la chaleur provoque une surtension des câbles ; que les experts judiciaires et ceux du BEA ont recueilli des informations contradictoires sur ce point au Canada (D 875) ; que cependant, même si le degré de surtension n'a pu être établi, il n'existe aucune autre explication à l'usure accentuée de la gorge du cadran que celle d'une surtension, puisqu'aucun défaut de conception n'a été identifié à l'endroit de l'usure ou de la rupture du câble ; que cette question doit être mise en relation avec le programme de changement des câbles résultant des instructions du constructeur, puisqu'une dépose antérieure à l'accident aurait permis de mettre en tension le nouveau câble dans des conditions conformes à l'exploitation de l'avion ; 3) Les conditions d'exploitation de l'avion : Le constructeur définit un programme d'entretien pour des vols moyens d'une durée de 50 minutes ; qu'il qualifie de « sévères » les conditions d'exploitation en usage intensif en dessous de 2000 pieds, zone propice aux turbulences, et il demande aux compagnies de le contacter pour adapter les inspections à ces situations (D 723, p. 16) ; qu'il n'est pas démontré que des informations particulières aient été sollicitées par la compagnie ; qu'affecté à des vols navettes très courts qui sollicitaient davantage la gouverne de profondeur, soumis aux turbulences propres aux vols à faible altitude et à des températures ambiantes élevées, notamment lors des séjours sur le tarmac, le Twin Oter était exploité dans les conditions « sévères » qui justifiaient des inspections personnalisées arrêtées avec le constructeur ; qu'à tout le moins, l'avion devait être soumis à un programme d'entretien qui ne tienne pas seulement compte des heures de vol mais des conditions réelles d'exploitation, puisque la durée moyenne de ses vols est évaluée par les experts à 9 minutes 20 secondes (D 723, p. 16) ; que les instructions du constructeur sont formelles sur ce point (Réf. : SPI- E4, D 723, p. 19) ; que l'inspection des câbles en acier inox (que le constructeur ne prohibe pas) induit une inspection toutes les 400 heures de vol ou tous les trois mois, à la première échéance atteinte ; qu'or, en section IV du programme d'entretien d'Air Moorea, il est mentionné : « 4-5. Opération en atmosphère saline ou très polluée. Instructions prises en compte directement en section 3 et 6, suivant périodicité. Note : l'inspection des câbles de direction et profondeur à 400 heures ou trois mois a été intégrée en section VI avec une périodicité de 400 heures simple. Le rythme de vol des aéronefs implique une inspection tous les 5 mois environ » ; que les experts judiciaires relèvent que :- cette inspection n'a pas sa place en section IV puisque la personnalisation du programme d'entretien, comme le demande la réglementation, justifiait sa place en section III ;- or, la périodicité de 400 heures n'a été trouvée ni en section VI ni en section III ; elle n'a pas davantage été trouvée dans le Kardec de suivi des échéances et paraît n'avoir jamais été appliquée ;- la suppression de la périodicité de trois mois n'est justifiée par aucun motif ; que cette lacune est fondamentale dans la recherche des responsabilités : d'une part, elle est à l'origine directe de l'absence de détection d'usure du câble puisque la tâche SPI- E4 intègre la recherche de l'usure et de la corrosion sur le câble de profondeur et, d'autre part, elle est décelable à la seule lecture du programme d'entretien, sans nécessiter de rapprochements avec une autre documentation ou un examen sur le terrain, puisque les conditions d'exploitation du Twin Otter, nécessairement connues de toutes les autorités de sécurité, ne pouvaient en aucun cas impliquer un espacement ou une suppression des contrôles, mais au contraire leur intensification et, à tout le moins, le respect des spécifications du constructeur ; que si la tâche SPI- E4 avait été correctement prévue au programme d'entretien, elle aurait été appliquée au moins trois fois sur l'avion entre son arrivée en Polynésie et l'accident ; 4) Les conditions de maintenance de l'avion : La compagnie Air Moorea n'extériorisait aucune des tâches de gestion de navigabilité ou d'entretien des avions ; qu'elle disposait de son propre organisme d'entretien, agréé Partie 145 (norme européenne), qui était surveillé par le GSAC et agréé par la DGAC (D 869, p. 29) ; que deux incidents doivent être soulignés ; qu'ils sont révélateurs des défaillances de la maintenance et ils sont de nature à avoir fragilisé les câbles de gouverne, étant observé que le câble à piquer était lui-même usé à 36 %, selon les analyses réalisées au cours de l'information.- Les dysfonctionnements répétés du pilote automatique, qui ont donné lieu à six comptes rendus d'incident technique en vol (CRM) entre le 19 novembre 2006 et le 23 mai 2007 et n'ont pas entraîné de réparations satisfaisantes jusqu'au remplacement du « yaw rate sensor », le 23 mai 2007 ; qu'il ressort des auditions de huit pilotes que le pilote automatique agissait sur le « trim de profondeur » et que, selon M. Claude K... : « cela entraîne une tension sur le câble de profondeur qui à terme pourrait éventuellement générer une usure prématurée » (D 723, p. 13).- Une très forte turbulence survenue le 2 juillet 2007 qui avait nécessité la remise en place du capitonnage de la cabine ; que le technicien avait seulement noté sur le CRM, à 18 heures 15 : « vérification générale de l'avion R. A. S. » ; que le programme d'entretien prescrit une inspection spéciale après un vol en conditions de turbulences sévères, par deux personnes successivement, comprenant notamment la vérification de toutes les commandes de vol « pour liberté de mouvement » et, si des conditions de prise en main inhabituelles ont été rencontrées, une vérification des commandes de vol « pour des tensions de câbles correctes et bon fonctionnement » (D 723, p. 9 et 10) ; que le BEA fait observer que le pilote n'avait pas signalé « des conditions de prise en main inhabituelles » (D 743, p. 16) ; que cependant, la rédaction du paragraphe (D 869, p. 40) est ambiguë et peut renvoyer les conditions de prise en main à la vérification des commandes de vol pour liberté de mouvements faite par le technicien, et non par le pilote ; qu'en revanche, l'hypothèse d'un « jet blast » évoquée par le BEA, c'est-à-dire le souffle de réacteurs puissants passant à proximité de l'avion et induisant sur le câble de commande à cabrer en position verrouillée (parking) un niveau d'effort supérieur aux conditions de rupture d'un câble usé, n'est pas prouvée, même s'il est relevé que le F-OIQI était stationné la nuit à proximité d'avions gros porteurs de type A340 ; qu'elle est avancée par le BEA pour expliquer la rupture du câble alors que son degré d'usure aurait dû, selon ce bureau, lui permettre de résister aux efforts rencontrés en vol (D 743, p. 63-65) ; que sur ce point, les essais de résistance du câble pratiqués en laboratoire sont peu pertinents, puisqu'ils ne pouvaient prendre en compte les turbulences susceptibles de s'être produites au moment de la rupture ; que le caractère aléatoire de la répartition des charges sur un câble fragilisé est en outre démontré par l'essai réalisé sur un tronçon du câble à cabrer prélevé sur l'épave, au cours duquel une traction de 110 kg a entraîné la rupture complète du toron central alors qu'une traction de 190 kg n'avait rompu que 5 fils (D 869, p. 103) ; 5) La gestion du maintien de la navigabilité : Le constructeur de l'avion avait édité une documentation relative à l'entretien préventif à appliquer pour garantir sa navigabilité continue ; que le document PSM 1-6-7, qui définissait les principales missions d'entretien, faisait l'objet de mises à jour régulières ; que sa dernière révision datait du 12 mars 2007 ; que celle-ci se compose, sur un cycle de 6000 heures de vol, de 48 visites (EMMA) réparties en :- inspections de base toutes les 125 heures de vol,- inspections spéciales compte-tenu des circonstances environnementales telles que l'atmosphère saline sur la base d'une durée moyenne des vols de 50 minutes,- inspections détaillées comprenant notamment les câbles de commande de vol et de gouverne de profondeur toutes les 1000 heures de vol en cas de conditions « sévères » d'exploitation en appliquant la carte EMMA 18, tâche 22 (tableau de synthèse des visites en D 869, p. 129) ; que le passage au système EMMA avait été demandé par le GSAC à la compagnie Air Moorea, et il avait donné lieu à l'édition 4 du programme d'entretien du Twin Otter modèle DHC6-300, datée du 7 août 2006, qui avait été approuvée par le GSAC et par le SEACPF ; qu'en application du règlement (CE) 2042/ 2003 partie M § M. A. 302, ce programme devait « détailler l'ensemble des opérations d'entretien à effectuer, y compris leur fréquence ainsi que toute tâche particulière relative au type et à la spécificité des opérations » ; qu'il devait être conforme « aux instructions établies par l'autorité compétente » et « aux instructions de maintien de la navigabilité délivrée par les détenteurs du certificat type », et il devait être approuvé, ainsi que ses modifications ultérieures, par « l'autorité compétente » (D 869, p. 46) ; que le Twin Otter F-OIQI avait subi six visites de base (EMMA) entre sa mise en service sur la ligne Tahiti'Moorea et son accident ; que si leur périodicité (toutes les 125 heures de vol) correspond aux prévisions de principe du constructeur, il apparaît que les techniciens MM. Eric L...et Viria Christian M..., qui ont émargé aux tâches relatives aux câbles, n'étaient pas qualifiés pour les modèles DHC6, en violation de la réglementation (D 869, p. 60 " 61) ; que surtout, le constructeur ayant défini le programme d'entretien pour des vols d'une durée moyenne de cinquante minutes, et le Twin Otter F-OIQl réalisant des vols d'une durée moyenne inférieure à dix minutes, le programme d'entretien de l'avion devait nécessairement prendre en compte ces conditions d'exploitation particulières puisque les câbles de gouverne de profondeur, pour s'en tenir au matériel mis en cause dans l'accident, étaient particulièrement sollicités à l'occasion des décollages et des atterrissages ; que la périodicité de l'entretien des pièces particulièrement sollicitées dans ces conditions d'exploitation aurait ainsi dû être divisée au minimum par 5, voire par 10 selon les experts judiciaires qui retiennent des vols navettes enregistrés sur l'enregistreur de bord pour une durée « très proche de cinq minutes » (D 869, p. 47) ; qu'entre le 17 novembre 2006, date de l'arrivée de l'avion sur le territoire, et le 8 août 2007, veille de l'accident, l'appareil avait effectué 799 heures de vol pour un cycle de 5137 vols ; que le cumul des conditions environnementales et des conditions opérationnelles aurait dû conduire à une compression des visites, tant dans leur périodicité que dans la nature des tâches d'entretien, qui n'a pas été calculée par les experts mais qui est sans rapport avec le programme d'entretien défini par le constructeur ; que le tableau de synthèse de la vie du câble figurant au rapport d'expertise judiciaire illustre le changement fondamental des paramètres de vieillissement à partir de son exploitation en Polynésie (D 869, p. 135) ; qu'or, dans sa section l, le programme d'entretien Air Moorea n'intégrait pas le critère de la brièveté des vols, et n'était donc pas personnalisé au type d'exploitation, ainsi que l'exige le règlement ; que cette anomalie a eu « une conséquence directe sur l'accident », selon les experts judiciaires (D 869, p. 47) ; que cette anomalie aurait dû être détectée non seulement par le GSAC mais aussi par le service d'Etat de l'aviation civile puisqu'elle était contenue dans l'édition 4 du programme d'entretien qui contenait une « évolution radicale des principes d'entretien », selon les experts judiciaires (D 869, p. 46), par l'introduction du système EMMA, et que cette innovation majeure impliquait l'approbation de l'Etat, selon l'arrêté du 20 décembre 2005 ; que la carte EMMA devait être appliquée d'abord après 250 heures de vol, puis toutes les 1000 heures, selon le tableau des visites d'entretien ; qu'elle n'avait donc été appliquée qu'à une reprise avant l'accident, à l'occasion de la visite des 250 heures, le 22 février 2007 ; qu'or, les experts judiciaires ont mis « très fortement » en doute la vérification de la valeur de tension des câbles (tâche 22) à l'occasion de cette visite, malgré l'affirmation du technicien M. L..., non qualifié pour l'entretien des DHC6 : d'une part, la sortie et le retour du tensiomètre au magasin d'outillage n'ont pas été enregistrés sur le cahier prévu à cet effet et, d'autre part, les inscriptions réglementaires permettant d'assurer la traçabilité des différents paramètres liés aux réglages de tension des câbles (température du jour, valeurs des tensions avant et après réglage, émargements du technicien et du contrôleur) sont absents (D 869, p. 60) ; qu'en réalité, le technicien n'avait aucune raison d'appliquer la tâche puisque celle-ci avait été supprimée de la carte EMMA par le programme d'entretien approuvé par les autorités de sécurité ; que la section VI-4 de ce programme, relative aux câbles de commande de direction, de profondeur et d'aileron, ne comporte plus de référence 18-22 (tension) ; que la vérification de la tension est renvoyée à la section III, en faisant référence à la tâche SPI- E5 qui correspond au remplacement du câble ; Et la section III se contente de fixer à douze mois le délai de remplacement des câbles de gouverne et notamment du câble de profondeur (D 869, p. 51) ; qu'ainsi, la vérification de la tension du câble de gouverne de profondeur avait été purement et simplement supprimée du programme d'entretien puisqu'elle ne s'effectuait qu'à l'occasion du remplacement des câbles ; que cette erreur intrinsèque au programme d'entretien n'a été détectée ni par le GSAC, ni par le SEACPF ; qu'elle a entraîné l'absence de tout contrôle de la tension des câbles depuis la sortie du chantier au Canada ; que l'information judiciaire a rassemblé des indices suffisants pour considérer que la rupture du câble de commande de gouverne de profondeur est le résultat d'une usure anormale qui trouve sa cause dans le frottement sur un des guides d'oscillation de la gouverne de profondeur, alors que les conditions d'exploitation de l'avion entraînait une sollicitation particulière de ce câble ; que la rupture est survenue dans une phase d'effort important sur un câble fragilisé ; que cette usure aurait dû être détectée et donc corrigée, soit à l'occasion du remplacement du câble, soit à l'occasion des contrôles d'entretien, si les contrôles de navigabilité prescrits par le constructeur avaient été respectés ; qu'ils ne l'ont pas été en raison des lacunes du programme d'entretien de ce modèle d'avion rédigé par la compagnie puis contrôlé et approuvé par le GSAC et le SEACPF ; qu'ingénieur en aéronautique, et diplômé de l'école nationale d'aviation civile, [le mis en examen] a été nommé directeur du service d'Etat de l'aviation civile en Polynésie française par arrêté du 26 juillet 1979 ; qu'il a reçu délégation de signature du haut commissaire de la République par arrêté du 10 octobre 2006 pour, notamment, signer « 5° en matière de sécurité des aéronefs et de leurs équipages, tous actes, décisions et pièces administratives relatifs aux examens et titres aéronautiques, à l'utilisation des aéronefs, à la formation des personnels navigants et aux entreprises de transport aérien » ; que ses compétences étaient réglées par l'arrêté n° 1123 AC/ DIR du 13 août 2003 portant organisation du service d'Etat de l'aviation civile en Polynésie française, qui disposait notamment que :- « Le directeur du service d'Etat de l'aviation civile en Polynésie française exerce ses différentes missions dans le cadre des délégations consenties par le haut commissaire de la République en Polynésie française » (article 2) ;- il assure « une action de direction générale du service d'Etat de l'aviation civile en Polynésie française et une action de coordination sur l'ensemble des services concourant au fonctionnement, à la sécurité et à la sûreté de l'aviation civile en Polynésie française et dans la région d'information de vol de Tahiti » (article le) ;- il dispose à ce titre de la division du contrôle technique et de la formation aéronautique qui assure notamment « le contrôle de l'exploitation technique du matériel volant par les entreprises de transport et de travail aérien et par les exploitants d'aéronefs basés en Polynésie française » et « le suivi de la surveillance de la navigabilité et de l'entretien des aéronefs assurée localement par le groupement pour la sécurité de l'aviation civile (G. S. A. C.) » ; qu'à ce titre, il avait approuvé le programme d'entretien du Twin Otter F-OIQI en l'absence d'avis réservé ou défavorable du GSAC ; que cette approbation constitue une faute caractérisée dès lors que :- le document qui lui était transmis par le GSAC était, par définition, une édition originale ou un amendement majeur du programme d'entretien puisqu'à défaut, l'approbation aurait été réalisée par le GSAC lui-même ; qu'il s'agissait en effet de l'édition 4 du programme d'entretien datée du 7 août 2006, qui intégrait le programme EMMA ;- il disposait des moyens techniques de déceler les erreurs contenues au programme puisqu'il avait autorité sur la division du contrôle technique et de la formation aéronautique qui disposait des compétences lui permettant de déceler les lacunes du programme d'entretien ; que la faute est caractérisée par le constat que le caractère erroné de certaines dispositions du programme d'entretien résultait de sa simple lecture, ou d'un simple rapprochement avec les instructions du constructeur, et que ces erreurs portaient sur des dispositions fondamentales pour la sécurité de l'aéronef telles que :- section 1 relative à l'entretien personnalisé n'intégrant pas les conditions « sévères » d'exploitation du F-OIQI, qui auraient nécessité une division par 5 des délais de maintenance des câbles de gouverne de l'avion, particulièrement sollicités par ces conditions (turbulences, décollages et atterrissages fréquents),- section VI-4, relative notamment aux câbles de commande de profondeur, ne comportant plus de référence à la tâche 18-22 (contrôle de la tension), au contraire des instructions du constructeur,- section III fixant à douze mois le délai de remplacement des câbles de gouverne (tâche SPl " E5), sans tenir compte de l'usage antérieur de l'avion selon le calcul d'usage au prorata temporis, et de ses conditions « sévères » d'exploitation, selon les critères fixés par le constructeur,- section VI ne mentionnant pas le délai de trois mois pour l'inspection des câbles en acier inox en atmosphère saline (tâche SPI- E4),- note de la section IV 4-5 disposant que l'inspection des câbles de direction et profondeur à 400 heures ou trois mois est intégrée en section VI avec une périodicité de 400 heures et supprimant sans motif le délai de trois mois,- absence de mention de la périodicité de 400 heures pour l'inspection des câbles de direction et de profondeur en section VI, où la note IV 4-5 l'avait pourtant renvoyée, qui a entraîné le défaut d'exécution de la tâche SPI- E4 en 800 heures de vol ; qu'il existe un lien de causalité certain entre ces fautes et l'accident puisque ces lacunes ont abouti à supprimer purement et simplement tout contrôle de la tension et de l'usure et tout remplacement du câble de gouverne de profondeur, à l'encontre des recommandations élémentaires du constructeur, et rendaient inéluctable sa rupture, s'agissant d'un câble en acier inox ; que ces fautes caractérisées sont conformes aux termes de la mise en examen ; que M. Y...ne peut soutenir avec pertinence le défaut de compétence, à la fois juridique et technique, du service qu'il dirigeait, dès lors qu'une mission de direction et de coordination de l'ensemble des services concourant à la sécurité de l'aviation civile en Polynésie française lui était attribuée par l'arrêté du 13 août 2003 précité, qu'il avait reçu les délégations de signature du haut-commissaire en matière de sécurité des aéronefs, et qu'il disposait, pour assurer cette mission, de la compétence de la division du contrôle technique et de la formation aéronautique, sur laquelle il avait autorité, et qui était chargée du suivi de la surveillance de la navigabilité et de l'entretien des aéronefs en Polynésie française ; que la disposition de l'ordonnance qui a dit n'y avoir lieu à suivre à l'encontre de M. Y...est infirmée, et celui-ci sera renvoyé devant le tribunal correctionnel ; que les dispositions des articles 221-6 et 221-8 visées à l'arrêt de renvoi sont celles en vigueur au 9 août 2007 ; qu'elles ne visent pas les dispositions plus sévères résultant des lois 2008-776 du 4 août 2008 et 2011-525 du 17 mai 2011 ;
" 1°) alors que la contradiction de motifs équivaut au défaut de motifs ; que, dans l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel des responsables de la compagnie aérienne Air Moorea et de non-lieu partiel au profit de M. Y..., de M. X...et du GSAC, le magistrat instructeur a estimé qu'il ne pouvait retenir l'erreur dans la détermination de la date à laquelle le câble à cabrer devait être changé, aux motifs que la règle du prorota temporis, imposant de déterminer ce délai, en fonction des variations dans les conditions d'utilisation du câble, n'était pas écrite ; qu'en estimant que, saisie du seul appel des partie civiles, elle ne pouvait se prononcer sur l'ordonnance en tant qu'elle portait renvoi de certains mis en examen, la chambre de l'instruction ne pouvait sans se contredire renvoyer M. Y...devant le tribunal correctionnel, pour avoir approuvé le programme d'entretien des Twin Otter de la compagnie Air Moorea, qui comportait des lacunes, notamment concernant la date à laquelle le câble à cabrer du Twin Otter qui s'était crashé en mer aurait dû être changé par application de la règle du prorata temporis, bien que ces faits aient entraîné un non-lieu implicite dont les parties civiles n'ont pas interjeté appel, leur appel portant uniquement sur les non-lieux partiels visant trois des mis en examen, dont M. Y...; qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction s'est contredite ;
" 2°) alors que, et en outre, toute personne a droit à un procès équitable, sans discrimination ; qu'en ordonnant le renvoi de M. Y...devant le tribunal correctionnel pour répondre d'une faute concernant les lacunes dans la vérification du programme d'entretien du Twin Otter qui s'était abimé en mer, dont celle portant sur le délai du changement du câble d'un avion d'occasion calculé au prorata temporis de ses conditions d'utilisation, quand les responsables de la compagnie aérienne qui auraient dû appliquer cette règle n'ont pas été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour répondre d'une telle faute, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 6, paragraphe 1, et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" 3°) alors que, nul n'est pénalement responsable que de son propre fait ; que la faute d'imprudence constitutive d'un homicide par imprudence s'établit compte tenu de la nature des missions ou des fonctions, des compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont disposait le mis en examen ; que pour retenir des charges à l'encontre de M. Y..., la chambre de l'instruction a considéré qu'il avait approuvé le programme d'entretien du Twin Otter F-OIQI en l'absence d'avis réservé ou défavorable du GSAC, alors que le contrôle de cet organisme comportait des erreurs, ce qu'il aurait du constater ; qu'il résulte de ses propres constatations que M. Y...était chargé, en vertu de l'arrêté n° 1123 AC/ DIR du 13 août 2003 portant organisation du service d'Etat de l'aviation civile en Polynésie française, de la coordination des services dédiés à la sécurité aérienne et que si, pour exercer ses missions, il disposait de la division du contrôle technique et de la formation aéronautique, cette division était seulement compétente afin d'assurer « le suivi de la surveillance de la navigabilité et de l'entretien des aéronefs assurée localement par le groupement pour la sécurité de l'aviation civile (GSAC) », ce qui excluait qu'elle ait été compétence pour assurer la vérification des programmes d'entretien qui avait été confiée au GSAC, par un arrêté du 20 décembre 2005, sa mission impliquant seulement que le GSAC effectue effectivement ses contrôles ; que dès lors, il résulte des propres constatations de la chambre de l'instruction, que les missions du directeur du SEAC de Polynésie française ne comportaient aucunement une mission de contrôle des vérifications des programmes d'entretien des aéronef faites par le GSAC, ne disposant en outre pas de service dédié à cette fin, la division du contrôle technique et de la formation aéronautique devant seulement s'assurer que le GSAC vérifiait effectivement les programmes d'entretien des aéronefs ;
" 4°) alors que, et en outre, la chambre de l'instruction a par ailleurs relevé que M. Y...avait reçu une délégation de signature du haut commissaire de la République par arrêté du 10 octobre 2006 pour, notamment, signer « 5° en matière de sécurité des aéronefs et de leurs équipages, tous actes, décisions et pièces administratives relatifs aux examens et titres aéronautiques, à l'utilisation des aéronefs, à la formation des personnels navigants et aux entreprises de transport aérien » ; qu'à supposer que le haut commissaire, lui-même délégué par le ministre des transports, ait ainsi délégué les fonctions d'approbation des programmes d'entretien des aéronefs, il résultait de l'arrêté du 20 décembre 2005 relatif à l'habilitation du groupement pour la sécurité de l'aviation civile (GSAC) pour l'exercice de contrôles et de vérifications dans le domaine de la sécurité de l'aviation civile, que le ministre des transports avait confié au GSAC, la mission de vérifier les programmes d'entretien des aéronefs qu'il approuvait ; que si cet arrêté prévoyait que le GSAC pouvait approuver les modifications mineures, l'approbation du ministre des modifications majeures n'était soumise à aucune autre condition que la vérification et l'acceptation du programme par le GSAC ; qu'il n'avait ainsi aucune obligation de faire procéder au contrôle de la vérification du programme par ce groupement avant de l'approuver ; que M. Y...ne pouvant avoir plus d'obligation que le ministre dont les fonctions d'approbation des programmes d'entretien lui auraient été confiées, il en résultait que, dès lors qu'il ne lui est pas reproché de n'avoir pas suivi les conclusions du GSAC, en approuvant le programme d'entretien des Twin Otter de la compagnie Air Moorea, M. Y...n'a commis aucune faute dans l'exercice de ses missions ; qu'en estimant que l'approbation des programmes d'entretien comportait un nouveau contrôle du programme d'entretien par M. Y..., la chambre de l'instruction a méconnu le sens de l'arrêté du 20 décembre 2005, ainsi que celui du 10 octobre 2006 ;
" 5°) alors qu'il doit exister un lien de causalité direct entre la faute et le dommage ; qu'en n'expliquant pas en quoi, aurait-il utilisé la division du contrôle technique et de la formation aéronautique afin de contrôler à nouveau le programme d'entretien de l'aéronef, il était certain que ce service aurait pu constater les différentes lacunes du programme d'entretien relevées à la charge de M. Y..., notamment quant à la date à laquelle le câble aurait dû être changé et en n'expliquant pas en quoi, se serait-il assuré que le programme d'entretien de l'aéronef ne comportait aucune lacune, au regard des préconisations du constructeur ou de la réglementation applicable, il en serait résulté un contrôle effectif du câble de cadrage de la gouverne par le service entretien de la compagnie aérienne, qui aurait abouti au constat par ce dernier de l'usure du câble et de la nécessité de le changer, la chambre de l'instruction n'a pas constaté d'élément permettant de considérer que la faute reprochée au directeur du SEAC était la cause certaine de l'accident " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le 9 août 2007, un avion de la compagnie Air Moorea, qui devait rallier l'aéroport de Tahiti Faa'a, s'est abîmé en mer, peu après son décollage de Moorea, l'accident provoquant la mort des dix-neuf passagers et du pilote ; qu'à l'issue de l'information ouverte sur ces faits, le juge d'instruction a ordonné le renvoi de six personnes devant le tribunal correctionnel du chef d'homicide involontaire, et dit n'y avoir lieu à suivre à l'encontre notamment de MM. X...et Y...; que les parties civiles ont relevé appel de ces non-lieu ;
Attendu que, sous couvert d'insuffisance et de contradiction de motifs, de défaut de réponse à un chef péremptoire de conclusions, d'une violation du droit à un procès équitable et d'un manque de base légale, les moyens reviennent à critiquer les énonciations de l'arrêt relatives aux charges que la chambre de l'instruction a retenues contre les prévenus et à la qualification qu'elle a donnée aux faits poursuivis ; que, ces énonciations ne présentant aucune disposition que le tribunal saisi de la poursuite n'aurait pas le pouvoir de modifier, les moyens sont irrecevables en application de l'article 574 du code de procédure pénale ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 1 500 euros la somme globale que M. X...devra payer aux parties civiles, représentées par la société civile professionnelle Gaschignard, avocat à la Cour, en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
FIXE à 1 500 euros la somme globale que M. Y...devra payer aux parties civiles, représentées par la société civile professionnelle Gaschignard, avocat à la Cour, en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quinze novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 14 novembre 2017 n° 17-81.047
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- L'officier du ministère public près la juridiction de proximité de Saint-Maur-des-Fossés,
contre le jugement de ladite juridiction de proximité, en date du 26 janvier 2017, qui a renvoyé Mme Caroline X... des fins de la poursuite du chef d'infraction à la réglementation sur le stationnement des véhicules ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 3 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Bonnal, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller BONNAL et les conclusions de M. l'avocat général QUINTARD ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 537, A. 37-3 et A. 37-4 du code de procédure pénale ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 530-1, alinéa 1er, du même code ;
Attendu qu'il se déduit de ce dernier texte que, saisis d'une citation directe délivrée à l'initiative du ministère public au vu d'une requête en exonération faite en application de l'article 529-2 du code de procédure pénale, les juges n'ont pas à se prononcer sur la validité de l'avis de contravention et de la carte de paiement qui avaient été antérieurement adressés au contrevenant dans le cadre de la procédure d'amende forfaitaire ;
Attendu qu'il résulte du jugement attaqué et des pièces de procédure que, destinataire d'un avis de contravention du chef susvisé prévoyant le paiement d'une amende forfaitaire, Mme X... a formé une requête en exonération, au vu de laquelle le ministère public l'a fait citer devant la juridiction de proximité ;
Attendu que, pour accueillir l'exception de nullité de l'avis de contravention et renvoyer la prévenue des fins de la poursuite, le jugement retient que l'avis [en fait la carte de paiement] mentionne plusieurs cas d'amende forfaitaire, simple et majorée, dont aucun n'a été coché par l'agent verbalisateur, de sorte que la prévenue ne pouvait connaître le montant des sommes dont elle devait s'acquitter, ce qui lui fait nécessairement grief ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'il lui appartenait de statuer au vu du procès-verbal de contravention, dont la régularité n'était pas contestée, sur les faits dont elle avait été saisie par la citation, la juridiction de proximité a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et du principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement susvisé de la juridiction de proximité de Saint-Maur-des-Fossés, en date du 26 janvier 2017, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal de police de Créteil, à ce désigné par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe du tribunal de police auquel ont été transférées les archives et les minutes de la juridiction de proximité de Saint-Maur-des-Fossés et sa mention en marge ou à la suite du jugement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 14 novembre 2017 n° 17-81.688
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- La société X..., - M. André X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de TOULOUSE, en date du 23 février 2017, qui, dans l'information suivie contre eux des chefs de travail dissimulé, recours à une personne exerçant un travail dissimulé, marchandage et blanchiment, a prononcé sur leur demande d'annulation d'actes de la procédure ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 17 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Parlos, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller PARLOS, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI ET SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAILLARDOT ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 12 juin 2017, joignant les pourvois et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu le mémoire, commun aux demandeurs, et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'après un contrôle au sein de la société X... réalisé le 5 septembre 2012, par la Direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), et des rapports des 25 février 2013 et 2 avril 2014 adressés au ministère public par cette administration sur l'importance prise, dans cette entreprise de transport routier de marchandises, par le recours à la sous-traitance auprès de sociétés de pays d'Europe de l'Est et de l'enquête ayant suivi ce signalement, le président du tribunal de grande instance, saisi par la requête du procureur de la République, a, par ordonnance en date du 13 novembre 2014, adoptant les motifs exposés dans la requête, autorisé, sur le fondement de l'article L. 8271-13 du code du travail, une perquisition, sans avoir à recueillir l'assentiment préalable de la société, au sein de ses locaux professionnels ; qu'après cette perquisition, réalisée le 26 novembre 2014, et l'ouverture d'une information, la société X... et M. X... ont été mis en examen des chefs sus-énoncés le 25 mars 2016, puis ont présenté une requête, le 21 septembre suivant, en annulation des actes de la procédure en invoquant, notamment, les moyens pris de l'irrégularité du contrôle du 5 septembre 2012, des rapports des 25 février 2013 et 2 avril 2014 ainsi que de la perquisition et de l'ordonnance qui l'a autorisée ;
En cet état ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 1451-1, L. 8271-7 à L.8271-12, du code des transports, préliminaire, 28, 591, 593 et 427 du code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre de l'instruction a écarté la nullité des rapports du fonctionnaire de la DREAL des 25 février 2013 et 2 avril 2014 ;"
"aux motifs qu'« un détournement de pouvoirs suppose qu'il soit établi que le fonctionnaire à qui on le reproche a fait usage de pouvoirs qu'il détient dans le cadre d'une procédure spéciale pour les utiliser dans le cadre d'une autre procédure où il n'aurait pas pu accomplir de tels actes ; que la jurisprudence mise en avant dans son mémoire par les requérants en fournit des illustrations ; qu'or en l'espèce il n'existe aucun détournement de procédure, puisque la DREAL a enquêté avec les pouvoirs d'enquête dont elle dispose dans un domaine d'activité (droit du travail) qui est le sien, puisque l'article L.8271-1 du code du travail dispose que "les infractions de travail illégal sont recherchées et constatées par les agents de contrôle mentionnés à l'article L.8271-1-2 du code du travail", et que cet article L 8271-1-2 2 édicte que "les agents de contrôle compétents en application de l'article L 8271-1 sont:….. 7.° les fonctionnaires ou agents de l'état chargés du contrôle des transports terrestres"(dont la DREAL bien entendu) ; que dans ces conditions les agents de la DREAL ont enquêté dans leur domaine de compétence avec les pouvoirs que la loi leur attribue pour l'exercice de leurs missions ( article L.3241-3 du code des transports) ; qu'il n'existe donc aucun détournement de pouvoir : chaque corps de fonctionnaire dispose, pour ce domaine spécifique du droit du travail de ses prérogatives et de ses compétences habituelles ; que la loi a donné, dans ce domaine, des compétences concurrentes à différentes administrations afin que chacune utilise ses pouvoirs propres et que l'on puisse croiser les renseignements ainsi obtenus ; et qu'il ne saurait leur être reproché comme le fait la défense, dans la mesure où ils n'ont pas outrepassé leurs pouvoirs, d'avoir présenté leur contrôle "comme un contrôle classique" destiné à vérifier l'application de la législation sur les transports : qu'en effet l'obligation de loyauté n'inclut pas l'obligation de naïveté, et il ne saurait être reproché à l'administration de ne pas avoir dès le début de son enquête, initialement inquisitoriale par nature, indiqué quelles étaient les infractions réellement recherchées ; qu'en outre, toute ambiguïté serait de toute façon levée par l'article L.8271-6-1 du code du travail qui précise "les agents de contrôle sont habilités à entendre, en quelque lieu que ce soit et avec son consentement, tout employeur ou son représentant ou toute personne rémunérée, ayant été rémunérée ou présumée être ou avoir été rémunérée par l'employeur ou par un travailleur indépendant, afin de connaître la nature des activités de cette personne, ses conditions d'emploi et le montant des rémunérations s'y rapportant, y compris les avantages en nature ; que de même, ils peuvent entendre toute personne susceptible de fournir des informations utiles à l'accomplissement de leur mission de lutte contre le travail illégal " et par l'article L.8271-6-2 du même code qui indique "pour la recherche et la constatation des infractions constitutives de travail illégal, les agents de contrôle peuvent se faire présenter et obtenir copie immédiate des documents justifiant du respect des dispositions du présent livre" ; que c''est dire que le contrôle en entreprise rentre bien dans les pouvoirs des fonctionnaires chargés du contrôle des transports terrestres, même pour la recherche des infractions de travail illégal, et il n'y a donc eu aucun détournement de procédure ; »
"1°) alors que les pouvoirs d'investigation conférés aux officiers et agents de police judiciaire, ou à certains fonctionnaires par des lois spéciales, ne peuvent être exercés que dans les conditions et dans les limites fixées par les textes qui les prévoient, sans qu'il leur soit permis de mettre en oeuvre, par un détournement de procédure, des pouvoirs que la loi ne leur a pas reconnus ; que c'est en l'espèce au prix d'un détournement de pouvoirs prohibé par la loi que les agents de la DREAL ont utilisé les pouvoirs que la loi leur confère en matière d'infractions à la législation sur les transports pour rechercher des infractions en matière de travail illégal ;
"2°) alors que les pouvoirs des autorités publiques doivent être mis en oeuvre dans le respect du principe du principe de loyauté des preuves ; que la lecture du rapport de la DREAL du 25 février 2013, dans lequel les enquêteurs expliquent avoir fait usage d'un « contrôle classique » pour ne pas attirer l'attention sur leur véritable objectif révèle une déloyauté manifeste de la part des enquêteurs ; que la chambre de l'instruction ne pouvait rejeter ce moyen de nullité au motif inopérant selon lequel « l'obligation de loyauté n'inclut pas l'obligation de naïveté, et il ne saurait être reproché à l'administration de ne pas avoir dès le début de son enquête, initialement inquisitoriale par nature, indiqué quelles étaient les infractions réellement recherchées » ;
Attendu que, pour rejeter le moyen pris de l'irrégularité des rapports des 25 février 2013 et 2 avril 2014 transmis, en application de l'article 40 du code de procédure pénale, au procureur de la République, l'arrêt énonce, en substance, qu'il n'y a eu ni détournement de procédure ni déloyauté dans le recueil des preuves, puisque les agents de la DREAL ont enquêté avec les pouvoirs que leur confère l'article L. 8271-1 du code du travail, qui dispose que les infractions de travail illégal sont recherchées et constatées par les agents de contrôle mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du même code, aux termes duquel les agents de contrôle ainsi compétents en application de l'article L 8271-1 de ce code sont, notamment, les fonctionnaires ou agents de l'Etat chargés du contrôle des transports terrestres, dont font partie les agents de la DREAL ;
Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ; Mais sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 3241-2, L.3241-3 et L. 3241-4 du code des transports, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre de l'instruction a écarté la nullité du contrôle en entreprise réalisé le 5 septembre 2012.
"aux motifs qu'« en l'état du droit positif, tant interne qu'européen, le régularité des contrôles en entreprise effectués par les administrations dans le cadre de leurs missions n'est soumise : * ni à la présence d'un avocat, même si des projets de directive européenne préconisent le contraire ; * ni à une autorisation judiciaire, l'article L.3241-4 du code des transports prévoyant seulement un avis préalable à parquet ; que, notamment il n'apparaît pas que la Cour européenne des droits de l'homme exige précisément dans sa jurisprudence une autorisation judiciaire préalable, seule étant requise la possibilité d'un contrôle juridictionnel a posteriori, ce qui est le cas en l'espèce comme le démontre le présent arrêt ; qu'il est évidemment vain d'évoquer à propos d'un tel contrôle des arguments concernant le droit des perquisitions, les agents de contrôle ne disposant pas du droit d'effectuer des perquisitions, mais seulement de celui de se faire présenter et d'obtenir copie des documents qu'ils réclament ; que le droit positif ainsi rappelé semble certes exempt d'angélisme, mais proportionné au but recherché et respectueux des droits de la défense ;»
"1°) alors qu'il résulte de l'article L. 3241-4 du code des transports l'obligation de recueillir l'avis préalable du procureur de la République à l'occasion d'un contrôle en entreprise ; qu'en l'espèce, aucun avis du parquet n'a été délivré ; que l'arrêt de la chambre de l'instruction, qui n'a pas répondu à ce moyen de nullité, encourt la censure ;
"2°) alors que la chambre de l'instruction était saisie d'un moyen tiré de l'inconventionnalité de la procédure de contrôle en entreprise prévue par l'article L. 3241-3 du code des transports, qui prévoit notamment un droit d'accès aux locaux de l'entreprise entre 8 heures et 20 heures, faute d'autorisation et de contrôle par un magistrat judiciaire, et de décision motivée ; que c'est en violation des articles précités que la chambre de l'instruction a considéré d'une part que la seule possibilité d'un contrôle a posteriori était suffisante, et d'autre part que les agents de contrôle ne disposent pas du droit d'effectuer des perquisitions « mais seulement de celui de se faire présenter et obtenir copie des documents qu'ils réclament » ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que pour rejeter le moyen de nullité tiré de l'irrégularité du rapport du contrôle réalisé par les agents de la DREAL, le 5 septembre 2012, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions régulièrement déposées devant elle, qui invoquaient l'irrégularité de ce contrôle faute d'un avis préalable au ministère public, conformément à l'article L 3241-4 du code des transports, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, L.8271-13 ancien du code du travail, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la chambre de l'instruction a rejeté le moyen tiré de la nullité des perquisitions réalisées dans les locaux de la société X... le 26 novembre 2014 en raison du défaut de motivation de l'ordonnance du président du tribunal de grande instance ;
"aux motifs qu'en ce qui concerne le fait que la perquisition a été effectuée conformément à une procédure contraire aux exigences de la Convention européenne des droits de l'homme, le demandeur soulève un grand nombre de reproches à l'égard de la procédure utilisée fondé sur les dispositions de l'article L.8271-13 du code du travail, que le conseil constitutionnel a abrogé par décision du 4 avril 2014 avec date d'effet au 1er janvier 2015 ; qu'il soulève également le moyen tiré de l'inconventionnalité de l'article L.3241-3 du code des transports ; qu'il s'agit ici d'une perquisition en enquête préliminaire sur autorisation judiciaire spéciale en matière de droit du travail (ancien article 8271-13 code du travail, autorisation du président du tribunal de grande instance) ; que le demandeur reproche notamment l'absence de recours contre la décision du président du tribunal de grande instance autorisant la perquisition et la violation des droits de la défense résultant de l'absence d'un avocat lors de la perquisition ; qu'on observera liminairement que le Conseil constitutionnel lui-même, en abrogeant la disposition litigieuse pour le futur, l'a validée pour le passé, sur la base du principe de sécurité juridique auquel il donne force de façon régulière ; qu'il faut donc considérer, pour refuser d'appliquer sa décision, que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme a une force juridique supérieure (position contestée, bien qu'admise par la cour de cassation en assemblée plénière) ; qu'on remarquera surtout que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme exige en l'espèce un recours de pleine juridiction contre les autorisations judiciaires préalables : or, force est de constater, concrètement, que la personne chez laquelle a lieu la perquisition exerce un recours dans le cadre de la présente procédure en soulevant la nullité de la perquisition et qu'il lui est donc difficile de soutenir qu'il n'existe pas de recours ; que dans ce domaine, à l'évidence, on ne peut envisager de recours avant que la perquisition car il n'est pas envisageable de prévenir une personne que l'on va perquisitionner chez elle pour établir les éléments d'une ou plusieurs infractions ; que la Cour européenne des droits de l'homme a jugé à plusieurs reprises, comme le rappelle le requérant, que le fait de ne pouvoir contester la régularité de l'ordonnance que devant la juridiction saisie des poursuites, ne constituait pas une voie de recours suffisante et effective, mais tel n'est pas le cas en l'espèce : la chambre de l'instruction n'est pas saisie de poursuites exercées contre quiconque, les parties mises en cause ont pris l'initiative de la saisir pour qu'elle juge, conformément aux pouvoirs qui sont les siens, si la procédure a été régulière ou si certains actes doivent être annulés ; qu'il s'agit à l'évidence d'un recours effectif, très antérieur aux poursuites et au jugement de l'affaire, et qui a permis à ceux qui l'ont exercé d'avoir accès à un "tribunal" pour obtenir, à l'issue d'une procédure répondant aux exigences de l'article 6 de la Convention, une décision sur leur contestation ; quant à la violation des droits de la défense qui résulterait de l'absence d'avocat lors de la visite en entreprise, on relèvera d'abord, qu'aucune décision de la Cour européenne des droits de l'homme n'exige une telle présence (cf ci-dessus sur les projets de directive contraire), ensuite, que si M. X..., à qui les gendarmes ont demandé de désigner les personnes qui assisteraient en son nom aux opérations de perquisition dans les locaux de son entreprise n'a pas proposé d'avocat, il n'apparaît pas qu'on le lui ait interdit ; qu'il n'apparaît donc pas que la nullité de la procédure soit encourue de ce chef, étant précisé au surplus que le principe de proportionnalité des atteintes à la vie privée semble ici respecté, puisque, s'agissant de soupçons d'infractions de marchandage et de cabotage irrégulier, d'une ampleur toute particulière, mettant en jeu les conditions de travail dans les transports de chauffeurs de nationalité étrangère, il ne peut être nié qu'une visite au siège d'une entreprise pour s'y faire remettre et saisir des documents professionnels afférents à l'activité en cause est nécessaire et adaptée au but poursuivi ; qu'enfin, sur la question de la motivation de l'ordonnance du président du tribunal de grande instance qui s'est borné à renvoyer aux motifs énoncés dans la requête en autorisation, il y a lieu de constater que ce renvoi vaut motivation, puisqu'il adopte des motifs détaillés antérieurement dans le document qui lui est soumis, et la jurisprudence contraire fournie dans le mémoire en réponse du requérant (cass crim 23/11/2016, qui vise d'ailleurs un cas de figure différent, celui de l'article 76 al 4 du code de procédure pénale) constitue un revirement de jurisprudence consacrant un nouvel état du droit après accroissement des pouvoirs du juge des libertés et de la détention qu'il n'y a pas lieu d'étendre aux affaires anciennes telles que la présente affaire ;
"1°) alors qu'il résulte de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme qu'une décision ordonnant une perquisition sans le consentement de la personne chez qui elle a lieu doit être motivée au regard des circonstances concrètes de chaque affaire ; qu'en l'espèce, dans le cadre d'une enquête préliminaire, des perquisitions ont été mises en oeuvre dans les locaux de la société demanderesse, en application des dispositions de l'article L. 8271-13 du code du travail, et au visa d'une ordonnance du président du tribunal de grande instance du 13 novembre 2014 dépourvue de motivation, se bornant à renvoyer aux éléments de fait énoncés dans la requête du parquet ; que la chambre de l'instruction ne pouvait refuser d'en prononcer la nullité en considérant qu'un tel renvoi valait motivation ;
"2°) alors que la Convention européenne des droits de l'homme et la jurisprudence qui l'interprète sont d'applicabilité directe et immédiate ; qu'en jugeant que la jurisprudence de la chambre criminelle du 23 novembre 2016 (n° 15-83.649) par laquelle a été posé en principe l'exigence de motivation adaptée et circonstanciée des perquisitions réalisées en enquête préliminaire sans l'assentiment de la personne chez qui elles ont lieu « constitue un revirement de jurisprudence consacrant un nouvel état du droit après accroissement des pouvoirs du juge des libertés et de la détention qu'il n'y a pas lieu d'étendre aux affaires anciennes telles que la présente affaire », la chambre de l'instruction a méconnu le principe précité" ;
Vu l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Attendu que l'ordonnance du président du tribunal de grande instance décidant, sur le fondement de l'article L. 8271-13 du code du travail, déclaré, depuis lors, contraire à la Constitution par la Décision du Conseil constitutionnel en date du 4 avril 2014, cette décision d'inconstitutionnalité ne prenant effet qu'à compter du 1er janvier 2015, (Décision n° 2014-387 QPC du 4 avril 2014), et sur requête du procureur de la République à l'occasion d'une enquête préliminaire, que les opérations prévues par ce texte seront effectuées sans l'assentiment de la personne chez qui elles ont lieu, doit être motivée au regard des éléments de fait et de droit justifiant de leur nécessité ; que cette exigence d'une motivation adaptée et circonstanciée s'impose au regard des droits protégés par la Convention européenne des droits de l'homme et constitue une garantie essentielle contre le risque d'une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée de la personne concernée, permettant au justiciable de connaître les raisons précises pour lesquelles ces opérations ont été autorisées ;
Attendu qu'il se déduit de l'ensemble de ces éléments que l'ordonnance du président du tribunal de grande instance, qui se borne à se référer à la requête présentée par le procureur de la République aux fins de perquisition, en application de l'article L. 8271-13 du code du travail, n'est pas conforme aux exigences de la stipulation conventionnelle susvisée ;
Attendu que, pour rejeter le moyen de nullité tirée de l'absence de motivation de l'ordonnance du président du tribunal autorisant la perquisition, l'arrêt énonce qu'il y a lieu de constater que le renvoi aux motifs de la requête du ministère public vaut motivation, puisqu'il adopte des motifs détaillés antérieurement dans le document qui lui est soumis ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que l'ordonnance ne contient aucune motivation justifiant de la nécessité de la mesure, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est à nouveau encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse, en date du 23 février 2017, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Toulouse et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 14 novembre 2017 n° 15-81.346
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
M. Frédéric X..., La société X..., La société FCP TRASPORTI VIA XXV APRILE 73,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANÇON, chambre correctionnelle, en date du 29 janvier 2015, qui a notamment condamné :
- le premier, pour travail dissimulé, exercice d'une activité de transporteur routier de marchandise sans inscription au registre, emploi irrégulier d'un dispositif de contrôle des conditions de travail dans le transport routier, exercice d'une activité professionnelle malgré interdiction judiciaire, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement et à trois ans d'interdiction professionnelle et de gérer ;
- la deuxième, pour travail dissimulé, à 10 000 euros d'amende et ordonné une mesure de confiscation ;
- la troisième, pour travail dissimulé, exercice d'une activité de transporteur routier de marchandise sans inscription au registre, à 10 000 euros d'amende et ordonné une mesure de confiscation ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 3 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller DURIN-KARSENTY, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire commun aux demandeurs et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure, qu'à la suite d'une dénonciation en décembre 2011, portant sur les activités des sociétés FCP Trasporti, et X..., une enquête de la DREAL et de la DIRECTTE, suivie d'une enquête pénale ont été diligentées ; que la première des sociétés, dont les actionnaires étaient M. et Mme X..., déclarée en Italie, a été créée en janvier 2010, que la seconde, sise à Balanod, dans le Jura, détenue pour moitié chacun par M. Et Mme X..., assurant l'activité de commissionnaire de transport, a été immatriculée en 2004 ; que Mme Claudine X...était gérante des deux sociétés tandis que M. X..., dirigeant d'une précédente société, l'entreprise X..., radiée par décision préfectorale en 2006, avait été condamné le 2 mars 2011 notamment à une interdiction d'exercer la profession de transporteur routier durant cinq ans ; que ces enquêtes ont conclu que la société FCP Trasporti ayant pour activité le transport d'animaux vivants, n'avait aucun établissement déclaré en France, n'avait pas procédé à son immatriculation en France ni à son inscription au registre des transports, alors qu'elle y exerçait une activité de transport importante, permanente et régulière, avec les moyens de l'entreprise X...; qu'à l'issue des investigations, ces deux sociétés, Mme X...et M. X..., ce dernier en tant que gérant de fait desdites sociétés, ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel des chefs précités ; que le tribunal ayant retenu leur culpabilité, les deux sociétés, M. X...et le procureur de la République ont interjeté appel ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-5, L. 8224-1 du code du travail, L. 3452-6 du code des transports, 121-1, L. 434-40 du code pénal, L. 3315-4 et L3315-6 du code des transports et 593 du code de procédure pénale ;
« en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X...coupable de dissimulation d'activité, de dissimulation de salariés, de non-inscription au registre de transport, d'emploi irrégulier des appareils de contrôle des conditions travail et de violation de l'interdiction d'exercer la profession de transporteur routier et l'a condamné à un emprisonnement délictuel de dix-huit mois et, à titre de peine complémentaire, a prononcé à l'encontre de M. X...l'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de trois ans ;
" aux motifs qu'il ressort des auditions des membres du personnel de la société X... et surtout des déclarations de Mme Claudine X..., faites au cours de sa garde à vue et répétées à l'audience du tribunal, ainsi qu'à celle de la cour malgré les conclusions contraires de son avocat, que son mari était le véritable gérant de la société X...et des autres sociétés fondées par eux, et notamment de la société FCP Trasporti, d'où il s'ensuit qu'il a nécessairement violé l'interdiction d'exercer la profession de transporteur routier qui résultait de la condamnation de la cour d'appel de Reims du 2 mars 2011, et qu'il sera déclaré coupable de ce délit, qui n'est cependant constitué qu'à compter du 31 janvier 2012, date du rejet du pourvoi et date à laquelle la condamnation est donc passée en force de chose jugée » ;
" et aux motifs adoptés qu'il ressort des éléments du dossier qu'il recrutait les chauffeurs auxquels il donnait les instructions par téléphone quand ils étaient en déplacement et qu'il assurait l'exploitation effective de l'activité, participant à la définition de la politique commerciale ; qu'il ne conteste pas indiquant que c'était sa vie et qu'il avait toujours fait cela ; qu'il apparaît en outre qu'il était considéré comme l'employeur par les salariés ainsi que cela ressort de la déclaration de M. Y...; que par suite il a la qualité de gérant de fait de la société FCP Trasporti ;
" 1°) alors que les juges du fond doivent constater les éléments de fait permettant d'établir qu'une personne a exercé les fonctions de gérant de fait d'une société, permettant de lui imputer les infractions commises dans le cadre de cette dernière ; qu'en se contentant de constater que Mme X..., la gérante de droit des sociétés en cause dans la procédure, avait admis que son mari en était le gérant de fait, sans préciser quels actes de direction de la société pouvaient être attribués au prévenu, la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision ;
" 2°) alors qu'à supposer que la cour d'appel se soit appropriée les motifs du jugement, en relevant, pour retenir sa qualité de dirigeant de fait de la société FCP Trasporti que le prévenu assurait l'exploitation effective de l'activité, participant à la définition de la politique commerciale et que les salariés le reconnaissaient comme l'employeur, quand il n'en résulte pas que le prévenu qui assurait effectivement l'affrètement des transports et qui pouvait être consulté sur la politique commerciale, déterminait en toute indépendance la politique commerciale et financière des sociétés en cause, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 3°) alors que et à tout le moins, dès lors qu'il était conclu que le prévenu était gérant de fait de la société FCP Trasporti pour en avoir assuré l'exploitation effective, la cour d'appel n'a pas justifié par motifs adoptés, sa qualité de gérant de fait de la société X...et des autres sociétés en cause » ;
Attendu que, pour retenir que M. X...assurait la gestion de fait des deux sociétés, l'arrêt attaqué énonce, par motifs propres et adoptés, que l'activité de la société FCP Trasporti, dont Mme X...a déclaré, à l'audience, qu'elle avait été créée et établie par M. et Mme X..., à la suite de la cessation administrative de la société X..., assurait en réalité la poursuite de l'activité de cette entreprise ; que les juges retiennent qu'elle ne disposait en Italie d'aucun moyen nécessaire à son activité, lesdits moyens, aussi bien matériels que les personnels, se trouvant au siège de la société X...; qu'ils relèvent que le prévenu avait embauché avec sa femme les chauffeurs, qu'il donnait les ordres de transport et les instructions de travail et que les courriers et règlements de factures étaient adressés à l'adresse de la société X...; qu'ils retiennent que l'intéressé a reconnu que sa femme s'était lancée dans la gestion pour lui permettre de poursuivre son activité, après avoir fait l'objet d'une interdiction professionnelle ; qu'ils ajoutent que Mme X...a elle-même indiqué que son mari était le véritable gérant des sociétés ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, procédant de son appréciation souveraine, la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 49, 54 et 90 du TFUE (article 43, 48, 70 TCE), L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8224-1 du code du travail, des articles 3, 5, 8 du Règlement (CE) n° 1071/ 2009 du Parlement Européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes sur les conditions à respecter pour exercer la profession de transporteur par route, de l'article 121-3 du code pénal, des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
« en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société Trasporti et M. X...coupables du délit de dissimulation d'activité et a condamné la première à payer une amende de 10 000 euros et le second, à un emprisonnement délictuel de dix-huit mois et, à titre de peine complémentaire, a prononcé à l'encontre de M. X...l'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de trois ans ;
« aux motifs qu'il ressort des investigations et des différentes auditions recueillies que la société FCP Trasporti ne possédait aucune véritable infrastructure, que les chauffeurs salariés ne s'y rendaient que rarement, voire jamais pour certains, et que les instructions de travail étaient consultables dans les locaux de X..., où les feuilles de paie leur étaient remises ; que surtout la société FCP Trasporti n'avait pas de véritable activité qui lui fût propre ; qu'en effet la société n'a réalisé que 3 transports intérieurs italiens contre 1600 en France au cours de la période considérée et que 98 % des opérations concernent le territoire français ; que les transports vers le port de Sète, à destination de pays étrangers comme la Turquie, dont les prévenus allèguent qu'ils constituent des transports internationaux, ne sont en réalité que des transports nationaux français, dès lors que le chargement et le déchargement ont lieu en France ; que si l'on devait s'en tenir, de ce point de vue, aux rapports de l'expert honoraire Briyas, l'activité de FCP Trasporti ne serait internationale qu'à 35 %, en sorte qu'il y aurait encore lieu de conclure, comme le relève justement le tribunal, que cette activité était nationale dans une proportion des deux tiers ; que, selon l'aveu même de Mme Z...à l'audience de la cour, elle et son mari avaient choisi, à la suite de la cessation administrative de la société X...et de la condamnation de M. X...à une interdiction d'exercer la profession de transporteur routier, d'échapper à la rigueur de l'administration française, en créant et en établissant la société FCP Trasporti en Italie, où les services administratifs compétents en matière de transports, ignorant tout du passé judiciaire des entreprises X..., exerceraient de toute évidence un contrôle moins strict ; qu'il se déduit de ce qui précède que la société FCP Trasporti n'avait d'existence que juridique et que son activité n'était en définitive que la poursuite, sous une autre forme et dans un autre pays, de celle des entreprises des époux X..., et notamment de la société X...; qu'il s'ensuit qu'en omettant son immatriculation au registre du commerce et des sociétés en France, la société FCP Trasporti, ainsi que Mme Z...qui en était la gérante de droit et Frédéric X...le gérant de fait, se sont bien rendus coupables du délit de dissimulation d'activité, dans les limites des termes de la poursuite, par défaut d'inscription au registre du commerce, étant observé que c'est par une mention exacte mais surabondante que le tribunal relève, dans les motifs de sa décision, que la société n'a pas procédé aux déclarations sociales et fiscales obligatoires ; que les 17 salariés de la société FCP Trasporti, qui ne se rendaient que rarement au siège italien, avaient pour point d'attache professionnel le siège de la société X... à Balanod, où ils prenaient leurs instructions de service, recevaient leurs feuilles de paie et entretenaient leurs camions, en sorte qu'ils étaient en réalité les salariés non de la société FCP Trasporti mais de la société X... ; que la défense soutient que les 17 salariés de la société FCP Trasporti, étant soumis à la loi italienne plutôt qu'à la loi française relativement au régime de sécurité sociale applicable, en vertu du règlement CE n° 1408/ 7 1 du 14 juin 1971, ont été régulièrement déclarés auprès des organismes de protection sociale en Italie, et que le délit de travail dissimulé par dissimulation de salariés n'est pas caractérisé ; que cependant « les articles 13 et 14 du règlement CE no 1408/ 7 1 du 14 juin 1971, qui déterminent le régime de protection sociale applicable aux personnes exerçant une activité salariée sur le territoire de plusieurs Etats membres, est inapplicable au cas de l'espèce dès lors que la société FCP Trasporti, qui n'était que la poursuite de l'activité des X...et qui n'avait d'existence que juridique, était une création fictive des époux X...; que, dans l'hypothèse où il serait établi que la société FCP Trasporti avait une réalité économique en Italie, il conviendrait encore de retenir que les 17 salariés qu'elle employait étaient nécessairement soumis à la législation sociale française, conformément aux dispositions du a) ii) de l'article 14 dudit règlement aux termes duquel la personne occupée de manière prépondérante sur le territoire de 1'Etat membre où elle réside est soumise à la législation de cet Etat, même si l'entreprise qui l'occupe n'a ni siège, ni succursale, ni représentation permanente sur ce territoire ; qu'il découle de ce qui précède que la société X..., qui était le véritable employeur des 17 salariés, ainsi que Mme Z...qui en était la gérante de droit, doivent être déclarées coupables du délit de travail dissimulé par dissimulation de salariés, pour avoir omis de procéder aux déclarations nominatives préalables à l'embauche ;
" 1°) alors que le délit de dissimulation d'activité par absence d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au registre des métiers incriminé par l'article L. 8221-3 du code du travail suppose que soit constaté l'exercice d'une activité en France ; que la cour d'appel a déclaré les prévenus coupables de dissimulation d'activité par absence d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au registre des métiers aux motifs que la société FCP Trasporti, immatriculée en Italie, n'avait qu'une existence juridique, poursuivant seulement l'activité des sociétés des entreprises des époux X...; qu'en cet état, en condamnant la société FCP Trasporti pour dissimulation d'activité, tout en affirmant l'absence d'activité propre de cette société et son existence purement juridique, la cour d'appel a méconnu les articles L. 8221-3 et L. 8224-1 du code du travail ;
" 2°) alors que la contradiction de motifs équivaut à l'absence de motifs ; qu'en considérant que la société FCP Trasporti n'avait qu'une existence juridique, tout en affirmant que cette société avait continué l'activité des sociétés des époux X...et en considérant que les experts des prévenus avaient fait état au plus de transports internationaux de cette société représentant 35 % de son activité totale, la cour d'appel qui s'est prononcée par des motifs contradictoires, n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 3°) alors que les articles 49 et 54 du TFUE prévoient la liberté d'établissement dans les pays de l'Union européenne ; que la notion d'établissement au sens du traité implique la possibilité pour un ressortissant communautaire de participer, de façon stable et continue, à la vie économique d'un État membre autre que son État d'origine ; qu'une société peut disposer d'un établissement dans un Etat de l'Union européenne tout en employant des travailleurs étrangers, dès lors qu'elle participe à la vie économique dans l'Etat où elle a été créée ; qu'en jugeant que la société FCP Trasporti avait seulement une existence juridique en Italie, poursuivant l'activité des sociétés des époux X..., au constat que la société FCP Transporti ne possédait aucune véritable infrastructure, que les chauffeurs salariés ne s'y rendaient que rarement, voire jamais pour certains, et que les instructions de travail étaient consultables dans les locaux de X..., où les feuilles de paie leur étaient remises, motifs en partie contradictoires sur l'existence ou non d'une activité, en admettant que la société FCP Trasporti pouvait réaliser au moins un tiers de son activité dans le transport international, et, et à tout le moins, insuffisants, les motifs de l'arrêt ne prétendant pas que la dite société ne disposait que d'une adresse de domiciliation en Italie et ne s'expliquant pas sur l'infrastructure existante qu'elle estimait insuffisante, pour exclure l'existence d'un établissement stable et continu en Italie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 4°) alors que le Règlement (CE) n° 1071/ 2009 du Parlement Européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes sur les conditions à respecter pour exercer la profession de transporteur par route, et abrogeant la directive 96/ 26/ CE du Conseil, applicable à compter du 4 décembre 2011, prévoit la possibilité pour tout transporteur de s'établir dans un Etat membre de l'Union européenne s'il y dispose d'un établissement stable, qui résulte du fait pour ladite société de disposer des locaux dans lesquels elle conserve ses principaux documents d'entreprise, notamment ses documents comptables, les documents de gestion du personnel, les documents contenant les données relatives au temps de conduite et de repos et tout autre document auquel l'autorité compétente doit pouvoir accéder pour vérifier le respect des conditions prévues par le présent règlement ; qu'en se contentant de constater que la société FCP Trasporti ne disposait d'aucune véritable structure, sans mieux s'en expliquer et sans constater que la société ne disposait pas en Italie d'une structure suffisante pour recevoir les principaux documents relatifs à son activité, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
" 5°) alors que l'article 8 du Règlement (CE) no 1072/ 2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 établissant des règles communes pour l'accès au marché du transport international de marchandises par route, applicable à partir du 14 mai 2010, prévoit que tout transporteur de marchandises par route pour compte d'autrui qui est titulaire d'une licence communautaire et dont le conducteur, s'il est ressortissant d'un pays tiers, est muni d'une attestation de conducteur, est admis à effectuer des transports de cabotage ; que la cour d'appel a estimé que l'essentiel de l'activité de la société FCP Trasporti se déroulait en France, considérant que le nombre de transports à l'international qu'elle réalisait représentait au mieux un tiers seulement des transports effectués par cette société, le reste concernant des transports en France, établissant une activité stable, voire exclusive en France ; qu'en ne constatant pas que les transports réalisés en France n'entraient pas dans la catégorie du cabotage pouvant être pratiqué à l'occasion de transports internationaux effectués par la société FCP Trasporti, comme activité accessoire entrant dans le cadre de son activité rattachable à l'Italie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 6°) alors que la dissimulation de travail par dissimulation d'activité est un délit intentionnel ; qu'en ne constatant pas que les dirigeants de la société FCP Trasporti avaient intentionnellement omis de procéder à l'enregistrement de la société au registre du commerce et des sociétés, en sachant que leur activité de transport en France devait être considérée comme réalisée en France et imposant son immatriculation en France, quand par ailleurs cette société payait régulièrement ses impôts en Italie, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision » ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles des articles L. 3452-6 du code des transports, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X...coupable du délit de défaut d'inscription au registre des transports et l'a condamné à un emprisonnement délictuel de 18 mois et, à titre de peine complémentaire, a prononcé à l'encontre de M. X...l'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de trois ans ;
" aux motifs qu'il est constant que la société FCP Trasporti n'était pas immatriculée au registre des transports ; que Mme Claudine X..., qui a reconnu ce délit, en sera déclarée coupable, ainsi que la société FCP Trasporti elle-même et Frédéric X...qui en était le gérant de fait ;
" 1) alors que la cour d'appel ayant jugé que la société FCP Trasporti, ayant été créée en Italie n'avait pas de réelle activité et n'avait qu'une existence juridique, la cour d'appel ne pouvait condamner le prévenu pour défaut d'immatriculation de cette société au registre des transports ;
" 2) alors que si par ailleurs, la cour d'appel a estimé que la société FCP Trasporti avait continué l'activité des sociétés X...et même admis qu'elle exerçait une activité de transport international, serait-ce dans la limite de 35 % des transports réalisés, en affirmant par ailleurs que cette société n'avait qu'une existence juridique, ce qui impliquait qu'elle n'exerçait aucune activité de transports, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs contradictoires, équivalent à l'absence de motifs " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour retenir la culpabilité de la société FCP Trasporti et de son gérant de fait, M. X..., du chef de travail dissimulé par dissimulation d'activité, l'arrêt énonce en substance que l'activité de cette société n'était en réalité que la poursuite, sous une autre forme et dans un autre pays, de celle de la société X..., qu'elle n'avait pas d'activité qui lui fût propre, 98 % des opérations concernant le territoire français et des transports comprenant des chargements et déchargements en France ; que les juges relèvent qu'en omettant son immatriculation au registre du commerce et des sociétés, la société FCP Trasporti, ainsi que son gérant de fait, M. X..., se sont rendus coupables de dissimulation d'activité ; qu'ils retiennent que, s'agissant d'une entreprise non résidente, exerçant sur le territoire national une telle activité de transport habituelle, réalisée à partir de locaux se trouvant en France, elle devait être inscrite au registre des transports, en application des dispositions des articles L. 3113-1 et L. 3211-1 du code des transports et que M. X..., gérant de fait, doit être déclaré coupable de ce chef ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs résultant de son appréciation souveraine des faits et circonstances contradictoirement débattus, la cour d'appel n'encourt pas les griefs allégués ;
Que, dès lors, les moyens ne peuvent qu'être écartés ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 49, 54, 90 et 288 du TFUE (article 43, 48, 70 et 249 TCE), L. 8221-1, 8221-5, L. 8224-1 du code du travail, article 14 du règlement (CEE) n° 1408/ 71 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la société X...et M. X...coupables de dissimulation de travail par dissimulation de travailleurs salariés et a condamné la première à une amende de 10 000 euros et à la confiscation de sommes saisies et le second, à un emprisonnement délictuel de 18 mois et, à titre de peine complémentaire, a prononcé à l'encontre de M. X...l'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de trois ans ;
" aux motifs qu'il ressort des investigations et des différentes auditions recueillies que la société FCP Trasporti ne possédait aucune véritable infrastructure, que les chauffeurs salariés ne s'y rendaient que rarement, voire jamais pour certains, et que les instructions de travail étaient consultables dans les locaux de X..., où les feuilles de paie leur étaient remises ; que surtout la société FCP Trasporti n'avait pas de véritable activité qui lui fût propre ; qu'en effet la société n'a réalisé que 3 transports intérieurs italiens contre 1600 en France au cours de la période considérée et que 98 % des opérations concernent le territoire français ; que les transports vers le port de Sète, à destination de pays étrangers comme la Turquie, dont les prévenus allèguent qu'ils constituent des transports internationaux, ne sont en réalité que des transports nationaux fiançais, dès lors que le chargement et le déchargement ont lieu en France ; que si l'on devait s'en tenir, de ce point de vue, aux rapports de l'expert honoraire Bruyas, l'activité de FCP Trasporti ne serait internationale qu'à 35 %, en sorte qu'il y aurait encore lieu de conclure, comme le relève justement le tribunal, que cette activité était nationale dans une proportion des deux tiers ; que, selon l'aveu même de Claudine Z...à l'audience de la cour, elle et son mari avaient choisi, à la suite de la cessation administrative de la société X...et de la condamnation de Frédéric X...à une interdiction d'exercer la profession de transporteur routier, d'échapper à la rigueur de l'administration française, en créant et en établissant la société FCP Trasporti en Italie, où les services administratifs compétents en matière de transports, ignorant tout du passé judiciaire des entreprises X..., exerceraient de toute évidence un contrôle moins strict ; qu'il se déduit de ce qui précède que la société FCP Trasporti n'avait d'existence que juridique et que son activité n'était en définitive que la poursuite, sous une autre forme et dans un autre pays, de celle des entreprises des Epoux X..., et notamment de la société X...; qu'il s'ensuit qu'en omettant son immatriculation au registre du commerce et des sociétés en France, la société FCP Trasporti, ainsi que Claudine Z...qui en était la gérante de droit et Frédéric X...le gérant de fait, se sont bien rendus coupables du délit de dissimulation d'activité, dans les limites des termes de la poursuite, par défaut d'inscription au registre du commerce, étant observé que c'est par une mention exacte mais surabondante que le tribunal relève, dans les motifs de sa décision, que la société n'a pas procédé aux déclarations sociales et fiscales obligatoires ; que les 17 salariés de la société FCP Trasporti, qui ne se rendaient que rarement au siège italien, avaient pour point d'attache professionnel le siège de la société X... à Balanod, où ils prenaient leurs instructions de service, recevaient leurs feuilles de paie et entretenaient leurs camions, en sorte qu'ils étaient en réalité les salariés non de la société FCP Trasporti mais de la société X... ; que la défense soutient que les 17 salariés de la société FCP Trasporti, étant soumis à la loi italienne plutôt qu'à la loi française relativement au régime de sécurité sociale applicable, en vertu du règlement CE n° 1408/ 7 1 du 14 juin 1971, ont été régulièrement déclarés auprès des organismes de protection sociale en Italie, et que le délit de travail dissimulé par dissimulation de salariés n'est pas caractérisé ; qu'il découle de ce qui précède que la société X..., qui était le véritable employeur des 17 salariés, ainsi que Mme Z...qui en était la gérante de droit, doivent être déclarées coupables du délit de travail dissimulé par dissimulation de salariés, pour avoir omis de procéder aux déclarations nominatives préalables à l'embauche ;
" 1°) alors que la dissimulation de salariés, par défaut de déclaration à l'embauche, ne peut être imputée qu'à l'entreprise qui emploie effectivement les salariés ; qu'en considérant que la société X...était l'employeur réel des salariés de la société FCP Trasporti, société créée en Italie, et qu'elle aurait du les déclarer, aux motifs que la société italienne n'avait qu'une existence juridique, tout en condamnant la société FCP Trasporti pour dissimulation d'activité, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs contradictoires ;
" 2°) alors que la cour d'appel a estimé que l'activité de transport réalisée sous couvert de la société FCP Trasporti était en réalité entreprise par la société X...qui était le véritable employeur des salariés de la société italienne ; qu'elle a estimé que la société FCP Trasporti n'avait qu'une existence purement juridique ; que la cassation qui interviendra sur le deuxième moyen portant sur la condamnation de la société FCP Trasporti pour dissimulation d'activité, pris en ses cinq premières branches, emportera cassation de l'arrêt en ce qu'il a déclaré les prévenus coupables de dissimulation de travail par dissimulation de salariés ;
" 3°) alors que l'article 14-2 a) ii) du règlement (CEE) n° 1408/ 71 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et à leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté prévoit que ii) la personne occupée de manière prépondérante sur le territoire de l'État membre où elle réside est soumise à la législation de cet État, même si l'entreprise qui l'occupe n'a ni siège, ni succursale, ni représentation permanente sur ce territoire ; que pour retenir la dissimulation d'activité salariée, la cour d'appel considère que dans l'hypothèse où il serait établi que la société FCP Trasporti avait une réalité économique en Italie, il conviendrait encore de retenir que les 17 salariés qu'elle employait étaient nécessairement soumis à la législation sociale française, conformément aux dispositions du a) ii) de l'article 14 dudit règlement aux termes duquel la personne occupée de manière prépondérante sur le territoire de l'Etat membre où elle réside est soumise à la législation de cet Etat, même si l'entreprise qui l'occupe n'a ni siège, ni succursale, ni représentation permanente sur ce territoire ; qu'en cet état, en admettant n'avoir pas établi si la société FCP Trasporti exerçait effectivement une activité en Italie, n'ayant pas répondu à la demande d'expertise afin de déterminer les conditions d'exercice de l'activité de ladite société en Italie, tout en faisant référence au rapport d'expertise faisant état de l'activité à l'international de la société FCP Trasporti, ce qui ne permettait pas d'établir le volume d'activité en France, la cour d'appel ne pouvait sans se contredire ou mieux s'en expliquer considérer que les salariés exerçaient de manière prépondérante leur activité en France ;
" 4°) alors qu'à tout le moins, les juges sont tenus de se prononcer sur les chefs péremptoires de conclusions ; que, dans les conclusions déposées pour les prévenus, il était soutenu que la société FCP Trasporti avait une réelle activité, et que les transports internationaux représentaient en réalité plus de 50 % de son activité, si bien que cette activité ne pouvait être considérée comme exercée de manière prépondérante en France, et que, pour établir la dissimulation de salarié, encore fallait-il pour chacun d'entre eux établir qu'il exerçait effectivement l'essentiel de son activité en France, au vu de ces transports internationaux ; que faute d'avoir répondu à ce chef péremptoire de conclusions, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale ;
" 5°) alors que selon l'article 288 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, le règlement est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout État membre ; qu'en vertu du règlement n° 1408/ 71 précité, nul ne peut être affilié à plusieurs régimes de protection sociale pour une même activité ; que la cour d'appel a jugé que la société X...n'avait pas déclaré les salariés affectés à une activité qui était exercée sous couvert de la société FCP Trasporti qui n'avait qu'une existence juridique ; qu'il en résulte que dès lors qu'un salarié est déclaré et affilié à un régime de protection sociale dans un Etat membre, son employeur ne peut être condamné pour travail dissimulé pour ne avoir déclaré ce salarié dans un autre Etat membre ; que dans les conclusions déposées pour les sociétés FCP Trasporti et X..., il était soutenu que l'activité de ces salariés n'était pas dissimulée dès lors que les salariés avaient été déclarés en Italie, conformément à la législation italienne, en vertu de laquelle la société FCP Trasporti payait des cotisations sociales, ce qui excluait toute dissimulation d'activité salariée ; que la cour d'appel qui n'a pas répondu à ce chef péremptoire de conclusions, a privé sa décision de base légale ;
" 6°) alors que le travail dissimulé suppose l'intention de se soustraire aux obligations déclaratives ; qu'en l'espèce, la cour d'appel n'a pas constaté que les prévenus avaient cherché à se soustraire abusivement à leurs obligations ; qu'ainsi, elle n'a pas légalement justifié sa décision " ;
Attendu que, pour déclarer la société X...et son gérant de fait, M. X..., coupables de travail dissimulé par dissimulation d'emplois salariés, l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, qu'aucun personnel sédentaire ne se trouvait en Italie pour assurer notamment l'exploitation, la comptabilité, la facturation, les assurances et les paies, que la société X...se comportait comme le véritable employeur des dix sept chauffeurs embauchés par la société FCP Trasporti, que l'exercice du pouvoir de direction incombait à M. X..., déterminant les instructions données aux chauffeurs, distribuant le travail et définissant leur temps de travail, et que le contrôle de leur activité était assuré par la société X...; que les juges en déduisent que les contrats de travail des salariés de la société FCP Trasporti avaient pour effet de créer un lien de subordination exclusif avec la société X...qui était le véritable employeur sans qu'il ait été procédé aux déclarations préalables à l'embauche et aux déclarations sociales obligatoires en France ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a caractérisé en tous ses éléments, tant matériel qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré les prévenus coupables ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être rejeté ;
Mais sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-19 et 132-24 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X...à une peine de 18 mois d'emprisonnement ferme ;
" aux motifs que la cour, relevant que la gravité des infractions rend l'emprisonnement nécessaire et toute autre sanction manifestement inadéquate, confirme le jugement sur la peine de dix-huit mois d'emprisonnement à l'encontre de M. X..., la personnalité du prévenu faisant par ailleurs obstacle à tout aménagement de cette peine, et confirme la peine complémentaire d'interdiction de gérer durant trois ans ;
" 1) alors qu'en vertu de l'article 132-19 du code pénal, en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate, ce dont les juges doivent s'expliquer ; qu'en se contentant de faire référence à la gravité des faits, pour prononcer une peine d'emprisonnement ferme à l'encontre du prévenu, la cour d'appel a méconnu l'article précité ;
" 2) alors que selon l'article 132-19 du code pénal, la peine d'emprisonnement doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement ; que les juges doivent s'expliquer sur les motifs de fait tenant à la personnalité et à la situation du condamné qui empêchent de prononcer un tel aménagement de peine ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a estimé que la personnalité du prévenu ne permettait pas d'envisager l'aménagement de la peine d'emprisonnement qu'elle prononçait ; qu'en cet état, sans expliquer quelles considérations tenant aux faits ou à la personnalité du prévenu justifiaient son refus d'aménagement de peine, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article précité " ;
Vu l'article 132-19 du code pénal ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur et du caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction ;
Attendu que, pour condamner M. X..., comparant, à dix-huit mois d'emprisonnement, l'arrêt prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Mais attendu qu'en prononçant par ces seuls motifs, sans s'expliquer sur les éléments de la personnalité du prévenu qu'elle aurait pris en considération pour fonder sa décision et sur le caractère inadéquat de toute autre sanction, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles des articles 131-21 du code pénal, L. 8224-3 du code du travail, et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné, à titre de peine complémentaire, la confiscation de sommes saisies sur le compte de la société Juliette et de sommes saisies sur le compte de la société BEA ;
" aux motifs qu'il résulte de l'article 131-21 du code pénal que peuvent être confisqués les biens qui sont le produit direct ou indirect de l'infraction ; que s'agissant des sommes d'argent saisies sur les comptes bancaires des prévenus, il convient d'observer que certaines de ces sommes sont le produit du délit de travail dissimulé par lequel les prévenus se sont soustraits aux diverses contributions obligatoires, notamment au préjudice de I'URSSM ; qu'en conséquence, le jugement sera confirmé, selon les motifs que la cour adopte, en ce qui concerne les sommes saisies sur les comptes bancaires de Mme Z..., sur ceux de la société Bea et sur ceux de la société X...; qu'il convient en outre d'ordonner la confiscation des sommes saisies sur les comptes de la société FCP Trasporti, déclarée coupable du délit de travail dissimulé, et de celles saisies sur les comptes de la société Juliette, dont le capital est détenu à 100 % par la société X..., déclarée coupable du même délit ; qu'en revanche, il n'est pas démontré que la somme de 35 000 euros saisie sur le compte bancaire de M. Frédéric X...soit le produit direct ou indirect des infractions dont il est déclaré coupable ; que la décision du tribunal de ne pas ordonner la confiscation de la maison appartenant aux époux X...doit également, par motifs adoptés, être confirmée ; que les sommes dont la confiscation n'est pas ordonnée doivent être restituées ;
" alors qu'en vertu de l'article 131-21 du code pénal, la confiscation porte sur tous les biens qui sont l'objet ou le produit direct ou indirect de l'infraction, à l'exception des biens susceptibles de restitution à la victime et si le produit de l'infraction a été mêlé à des fonds d'origine licite pour l'acquisition d'un ou plusieurs biens, la confiscation peut ne porter sur ces biens qu'à concurrence de la valeur estimée de ce produit ; qu'en ordonnant la confiscation des sommes saisies sur les comptes des sociétés BEA et Juliette, sans dire en quoi ces sommes pouvaient être considérées comme le produit de des infractions dont elle a déclaré les prévenus coupables, le seul constat que la société Juliette était une filiale à 100 % de la société X...étant insuffisant pour considérer que ses fonds provenaient des délits de dissimulation de l'activité de salarié, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale " ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour ordonner, à titre de peine complémentaire, la confiscation des sommes saisies sur le compte de la société Juliette, et non de la société BEA, l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, que l'activité de cette société a cessé en 2011, son capital étant détenu à cent pour cent par la société X..., dont la culpabilité a été retenue ;
Mais attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, insuffisants à établir que les sommes saisies sont le produit direct ou indirect des infractions retenues à l'encontre de la société X..., la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 131-21 du code pénal ;
D'où il suit que la cassation est également encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
I-Sur le pourvoi de la société FCP Trasporti Via XXV Aprile 73 :
Le REJETTE ;
II-Sur le pourvoi de la société X...:
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Besançon, en date du 29 janvier 2015, mais en ses seules dispositions relatives à la confiscation des sommes saisies sur les comptes bancaires de la société Juliette, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
III-Sur le pourvoi de M. X...:
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Besançon, en date du 29 janvier 2015, mais en ses seules dispositions relatives à la peine d'emprisonnement prononcée, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et, pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Dijon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Besançon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 10 novembre 2017 n° 17-82.028
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
1°/ M. Eric Y..., domicilié ...,
2°/ Mme Catherine Z..., domiciliée ...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Reims, en date du 16 février 2017, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 20 septembre 2016, n° 16-80. 820), dans l'information suivie contre eux des chefs de chantage et d'extorsion de fonds, a rejeté leur demande en annulation de pièces de la procédure ;
Par ordonnance du 11 mai 2017, le président de la chambre criminelle a joint les pourvois et prescrit leur examen immédiat ;
La chambre criminelle a, par arrêt du 6 septembre 2017, décidé le renvoi de l'affaire devant l'assemblée plénière ;
Les demandeurs invoquent, devant l'assemblée plénière, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Ces moyens ont été formulés dans un mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Piwnica et Molinié ;
Un mémoire en défense a été déposé au greffe de la Cour de cassation par la SCP Spinosi et Sureau, avocat du Royaume du Maroc ;
Le rapport écrit de Mme Slove, conseiller, et l'avis écrit de M. Wallon, avocat général, ont été mis à la disposition des parties ;
Sur quoi, LA COUR, siégeant en assemblée plénière, en l'audience publique du 27 octobre 2017, où étaient présents : M. Louvel, premier président, Mme Flise, Mme Batut, M. Frouin, Mme Mouillard, MM. Chauvin, Soulard, présidents, Mme Slove, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, MM. Prétot, Pers, Jardel, Huglo, Girardet, Bureau, Mmes Schneider, Orsini, MM. Vigneau, Boiffin, conseillers, M. Wallon, avocat général, Mme Morin, directeur de greffe adjoint ;
Sur le rapport de Mme Slove, conseiller, assisté de M. Mihman, auditeur au service de documentation, des études et du rapport, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, de la SCP Spinosi et Sureau, l'avis de M. Wallon, avocat général, auquel les parties, invitées à le faire, n'ont pas souhaité répliquer, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, le 20 août 2015, M. A..., avocat, agissant au nom du Royaume du Maroc, a dénoncé au procureur de la République des faits de chantage et d'extorsion de fonds en joignant à sa plainte l'enregistrement d'une conversation qui s'était déroulée le 11 août précédent entre le représentant de cet Etat, M. X..., et M. Y..., auteur avec Mme Z...d'un livre paru en 2012 sous le titre " Le Roi prédateur ", conversation au cours de laquelle M. Y...aurait sollicité le paiement d'une somme d'argent contre la promesse de ne pas publier un nouvel ouvrage consacré au souverain marocain ; qu'au cours de l'enquête préliminaire ouverte sur ces faits, M. X...a produit le 21 août l'enregistrement d'une nouvelle conversation qu'il venait d'avoir avec M. Y..., en un lieu placé sous la surveillance des enquêteurs, qui en ont par ailleurs retranscrit la teneur sur procès-verbal ; qu'après ouverture, le 26 août, d'une information judiciaire, M. X...a informé les enquêteurs qu'un nouveau rendez-vous avait été pris avec M. Y...et Mme Z...le 27 août, lequel s'est déroulé en un lieu également placé sous surveillance policière ; qu'à l'issue de la conversation entre les trois protagonistes, enregistrée par M. X..., des sommes d'argent ont été remises par ce dernier aux deux journalistes, qui ont alors été interpellés, les enquêteurs retranscrivant l'enregistrement sur procès-verbal ; que, mis en examen des chefs de chantage et extorsion de fonds les 28 et 29 août 2015, M. Y...et Mme Z...ont saisi la chambre de l'instruction de deux requêtes en nullité notamment des procès-verbaux de retranscription des enregistrements des 21 et 27 août 2015 et des actes subséquents ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y...et Mme Z...font grief à l'arrêt de rejeter le moyen de nullité pris de la participation indirecte des autorités publiques au recueil des preuves produites par un particulier et dire n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure alors, selon le moyen :
1°/ que la mise en place d'un dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, la captation, la fixation, la transmission et l'enregistrement de paroles prononcées à titre privé ou confidentiel, dans des lieux publics ou privés, n'est autorisée que lorsque l'information porte sur un crime ou un délit entrant dans le champ d'application de l'article 706-73 du code de procédure pénale ; que la chambre de l'instruction a relevé que « les enquêteurs ne pouvaient pas juridiquement procéder à la sonorisation de l'endroit où avaient lieu les rencontres » ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que les enquêteurs ont procédé indirectement, par l'intermédiaire du représentant du plaignant, à l'obtention de telles preuves ; qu'en validant les enregistrements tandis que les enquêteurs ont obtenu ces preuves en dehors de tout cadre légal, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision ;
2°/ que le droit au procès équitable et le principe de loyauté des preuves imposent aux autorités publiques de ne pas participer, directement ou indirectement, dans la confection irrégulière de preuves ; que l'autorité publique participe indirectement à l'obtention des enregistrements par un particulier dès lors que sont établis la présence constante des enquêteurs sur les lieux de rencontres, la remise à ceux-ci, par le particulier, des enregistrements suivis de leur retranscription, les contacts réguliers entre les enquêteurs et le particulier et l'autorité judiciaire, éléments conduisant à l'interpellation des mis en cause ; qu'en se fondant précisément sur ces mêmes éléments d'« existence de contacts réguliers entre maître X...et les enquêteurs », de « surveillances policières mises en place par les enquêteurs lors des rencontres des 21 et 27 août 2015 », de « remise des enregistrements dès la fin des rencontres et la transcription des propos par les services enquêteurs » et de « contacts téléphoniques intervenus entre maître X...et les enquêteurs au cours de la rencontre du 27 août 2015 ayant permis l'interpellation d'Eric Y...et de Catherine Z...en possession des 80 000 euros et d'exemplaires de l'engagement de renonciation à publication », pour estimer cependant que cette participation des enquêteurs dans l'administration de ces preuves était valide, la chambre de l'instruction a méconnu les textes et le principe précités ;
3°/ que porte atteinte au procès équitable et au principe de loyauté des preuves l'enregistrement effectué par les autorités publiques par le truchement d'un tiers et ayant pour but d'obtenir des indices de commission d'une infraction ; que les mis en examen invoquaient l'administration des preuves par les autorités publiques par les enregistrements clandestinement réalisés par l'avocat du plaignant sur les instructions constantes des autorités de poursuite, d'enquête et d'instruction ; qu'en estimant les enregistrements valables en ce que la preuve d'une instigation par les services enquêteurs n'était pas rapportée sans répondre aux arguments péremptoires des mis en examen et en mentionnant au contraire que ces derniers ne reprochaient pas une instigation des services de police, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision et a méconnu les textes et le principe susvisés ;
4°/ qu'en déduisant l'absence d'instigation par les services enquêteurs de l'absence de participation des services de police à l'enregistrement du premier entretien du 11 août 2015 tandis que cet enregistrement ne fait pas l'objet de la requête en nullité, ou encore du risque de dépossession des moyens d'action d'une victime, la chambre de l'instruction s'est prononcée par des motifs inopérants à justifier l'absence d'instigation ;
Mais attendu que l'arrêt retient qu'il apparaît légitime, de la part d'une victime ayant déposé plainte pour chantage et extorsion de fonds, d'informer les enquêteurs de l'avancement des démarches de ceux auxquels elle prête des agissements répréhensibles ; que les services de police et les magistrats, saisis d'une telle plainte, se devaient d'intervenir pour organiser les surveillances de nature à confirmer ou infirmer les dires du plaignant et, si nécessaire, interpeller les auteurs ; qu'on ne saurait déduire de l'existence d'une présence policière aux abords de l'hôtel où ont eu lieu les rencontres, un accord préalable et concerté des enquêteurs avec M. X...sur les enregistrements clandestins effectués ; qu'au demeurant, lors de ces surveillances, les policiers se trouvaient à l'extérieur de l'établissement et n'étaient pas à même de constater les manoeuvres de M. X...tendant aux enregistrements clandestins avec son téléphone portable ; que, certes, M. X...a adressé ses enregistrements aux policiers dans un délai très bref après chaque rencontre, mais que ce simple constat est dépourvu de toute portée quant au rôle actif susceptible d'être prêté aux enquêteurs par les mis en examen ; qu'il en va de même de la transcription par les policiers des deux enregistrements puisque cette tâche a été accomplie après les deux rendez-vous litigieux et ne saurait être retenue à faute ; que M. X..., qui, selon la partie civile, a mis à profit les suspensions de négociations intervenues lors de la très longue rencontre du 27 août 2015 pour se faire apporter les sommes d'argent nécessaires, pouvait, de manière tout à fait légitime, en profiter pour informer les enquêteurs de l'avancement des pourparlers ; qu'en conséquence, la preuve n'est pas rapportée de l'existence d'une collusion entre M. X...et les services enquêteurs tendant à faire prendre en charge par le premier les enregistrements litigieux ; que, si les policiers pouvaient raisonnablement se douter de l'enregistrement de la troisième rencontre par M. X...compte tenu de la connaissance qu'ils avaient de son enregistrement clandestin du deuxième rendez-vous, rien ne permet d'affirmer qu'ils avaient connaissance de cette intention dès la deuxième rencontre ; que le concept de " participation ", même indirecte, suppose l'accomplissement, par les enquêteurs d'un acte positif, si modeste soit-il ; que le seul reproche d'un " laisser faire " des policiers, dont le rôle n'a été que passif, ne peut suffire à caractériser un acte constitutif d'une véritable implication ;
Que la chambre de l'instruction a pu en déduire l'absence de participation directe ou indirecte de l'autorité publique à l'obtention des enregistrements litigieux, ce dont il résultait que le principe de la loyauté de la preuve n'avait pas été méconnu ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. Y...et Mme Z...font aussi grief à l'arrêt d'écarter le moyen de nullité pris de l'atteinte au secret des sources et dire n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure alors, selon le moyen, que les articles 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, 100-5 du code de procédure pénale et 2 de la loi du 29 juillet 1881 prévoient le secret des sources des journalistes et organisent leur protection contre les ingérences de l'autorité publique, même si les mesures d'investigations sont demeurées sans résultat ; qu'en énonçant l'absence d'atteinte au secret des sources en l'absence d'identification des sources des journalistes, la chambre de l'instruction a méconnu les dispositions susvisées ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les demandeurs, s'ils invoquaient une violation de l'article 100-5 du code de procédure pénale, n'établissaient pas en quoi la transcription des enregistrements litigieux, dont elle avait constaté qu'ils avaient été réalisés par une personne privée sans intervention de l'autorité publique, avait permis d'identifier leurs sources, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
Sur les troisième et quatrième moyens, réunis :
Attendu que M. Y...et Mme Z...font enfin grief à l'arrêt de rejeter les moyens de nullité pris du défaut d'accès au dossier complet de la procédure avant les interrogatoires de première comparution et de l'absence d'indices graves ou concordants, et de dire n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure alors, selon le moyen :
1°/ que le droit au procès équitable et les droits de la défense imposent le droit d'accès des parties à l'entier dossier de la procédure ; que la plainte de la partie civile sur laquelle repose l'accusation et toute la procédure fait partie du dossier auquel les parties doivent avoir accès ; qu'en l'absence de communication de ladite pièce, le dossier est incomplet dans des conditions qui font nécessairement grief aux intérêts des mis en examen en portant atteinte aux principes de loyauté, de l'égalité des armes et aux droits de la défense ; qu'ayant constaté l'absence de la plainte au dossier de la procédure, la chambre de l'instruction ne pouvait, sans méconnaître les textes et principes susvisés, en déduire l'absence de nullité ;
2°/ que ne peut être mise en examen que la personne à l'encontre de laquelle existent des indices graves ou concordants de participation à la commission d'une infraction ; que le délit d'extorsion réprime l'usage de violences, menaces ou contraintes pour obtenir une remise de fonds de la victime, et le délit de chantage réprime la menace de révéler des propos attentatoires à l'honneur ou à la considération de la personne pour obtenir une remise de fonds ; que le mis en examen invoquait l'absence de toutes violences, menaces ou contraintes ainsi que l'absence de propos attentatoires à l'honneur du Roi du Maroc, ce qui exclut tout indice grave ou concordant de commission de ces délits ; qu'en ne répondant pas à ces arguments péremptoires, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
Mais attendu qu'il résulte des articles 174 et 609-1 du code de procédure pénale que, devant la chambre de l'instruction statuant sur renvoi après cassation, seuls peuvent être invoqués les moyens de nullité qui avaient été soulevés devant la chambre de l'instruction dont l'arrêt a été annulé ; que, dès lors, les demandeurs ne sauraient reprocher à l'arrêt de rejeter leurs demandes de nullité fondées sur des moyens qui n'avaient pas été soulevés devant la chambre de l'instruction initialement saisie ; que le moyen est inopérant ;
Crim. 8 novembre 2017 n° 17-82.544
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Le procureur général près la cour d'appel de Douai,
contre l'arrêt n° 398 de la chambre de l'instruction de ladite cour, en date du 17 mars 2017, qui, dans l'information suivie contre la société Is Prestige du chef de blanchiment en bande organisée, M. Florian X..., Mme Marylène Y..., M. Mohamed Z... et Mme Elodie A... des chefs de blanchiment en bande organisée, abus de biens sociaux et travail dissimulé, a infirmé l'ordonnance du juge d'instruction ayant rejeté la demande en restitution de plusieurs véhicules automobiles et ordonné leur restitution ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Germain, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller GERMAIN et les conclusions de M. l'avocat général SALOMON ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 23 juin 2017, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 131-21 alinéas 1,3 et 6 ; 324-1 du code pénal; 99 alinéa 4, 706-148 alinéa 1 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;
Vu l'article 99 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'en application de ce textes, il n'y a pas lieu à restitution notamment lorsque celle-ci est de nature à faire obstacle à la manifestation de la vérité et que le bien est le produit direct ou indirect de l'infraction ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que la société Is Prestige, mise en examen du chef de blanchiment en bande organisée, a acquis plusieurs automobiles de luxe dont des véhicules de marque BMW, Bentley, Chrysler, Lincoln qui ont été saisis le 14 septembre 2016 et ont fait l'objet d'ordonnances ,frappées d'appel, en date des 4 et 28 novembre 2016, de remise à l'agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) ; que par ordonnance du 22 décembre 2016, le juge d'instruction a rejeté la demande de restitution de ces voitures, que la société Is Prestige a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour infirmer l'ordonnance déférée et ordonner la restitution des véhicules en cause, la chambre de l'instruction, après avoir rappelé que le juge d'instruction saisi d'une requête en restitution de bien saisi est tenu de statuer sur son bien fondé indépendamment de l'existence de l'appel d'une ordonnance de remise du bien à l'AGRASC en vue de l'aliénation, a retenu qu'en l'état de la procédure aucun élément ne vient conforter la provenance illégale des fonds investis par la société associée Redbox et avec lesquels les véhicules ont été acquis, les renseignements fournis par les services du Luxembourg ne faisant état d'aucune suspicion sur ce point ; que les pièces produites apportent, alors que des investigations sont en cours, une réponse possible sur l'origine des fonds investis par la société Redbox dont l'objet social n'interdit aucun type d'investissement ; que les conditions de participation de la société Is Prestige aux faits reprochés reposent sur un indice, soit l'investissement de plus de 800 000 euros de la part d'une société luxembourgeoise, qui n'a pas encore été corroboré par des éléments confirmatifs ; que l'importance des sommes susceptibles d'avoir été blanchies n'a pas fait l'objet d'une évaluation ce qui ne permet pas d'apprécier l'opportunité et la proportionnalité des mesures provisoires prises avec celle de la fraude fiscale dont proviendraient les sommes investies, et qu'à ce stade de la procédure, les mesures de saisies apparaissent disproportionnées en ce qu'elles privent la société Is Prestige de l'usage des véhicules ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi , alors que, d'une part, saisie d'une demande sur le fondement de l'article 99 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction ne peut, à cette occasion, remettre en cause l'existence des indices graves et concordants de commission du délit de blanchiment justifiant la mise en examen des intéressés, d'autre part, il résulte de ses propres constatations que les automobiles saisies sont susceptibles d'être le produit direct ou indirect de l'infraction et que le montant des sommes susceptibles d'être l'objet du blanchiment et investies dans les véhicules saisis évalués à 800 000 euros est supérieur à la valeur totale des biens saisis, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 17 mars 2017 ;
DIT n'y avoir lieu à restitution ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 8 novembre 2017 n° 17-82.525
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Le procureur général près la cour d'appel de Douai,
contre l'arrêt n° 397 de la chambre de l'instruction de ladite cour, en date du 17 mars 2017, qui, dans l'information suivie contre la société Is Prestige du chef de blanchiment en bande organisée, M. Florian X..., Mme Marylène Y..., M. Mohamed Z... et Mme Elodie A... des chefs de blanchiment en bande organisée, abus de biens sociaux et travail dissimulé, a infirmé partiellement l'ordonnance du juge d'instruction ayant rejeté la demande en restitution de plusieurs véhicules automobiles et ordonné leur restitution ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Germain, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller GERMAIN et les conclusions de M. l'avocat général SALOMON ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 23 juin 2017, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 131-21 alinéas 1,3 et 6 ; 324-1 du code pénal; 99 alinéa 4, 706-148 alinéa 1 du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;
Vu l'article 99 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'en application de ce texte, il n'y a pas lieu à restitution notamment lorsque celle-ci est de nature à faire obstacle à la manifestation de la vérité et que le bien saisi est le produit direct ou indirect de l'infraction ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'au cours de l'information suivie contre notamment Mme Elodie A... dirigeante de la société Is Prestige des chefs de blanchiment en bande organisée, travail dissimulé et abus de biens sociaux, la société Is Prestige, mise en examen du chef de blanchiment en bande organisée le 14 octobre 2016, a acquis, avec l'apport financier de Redbox, société luxembourgeoise associée, plusieurs automobiles de luxe dont des véhicules de marque Nissan, Porsche, Audi, Lamborghini, Ford qui ont été saisis et, le 27 juillet 2016 et ont fait l'objet d'ordonnances frappées d'appel, en date du 4 novembre suivant, de remise à l'agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) ; que par ordonnance du 29 août 2016, le juge d'instruction a rejeté les demandes de restitution de ces voitures ainsi que d'un agenda professionnel, des numéraires et de mainlevée du compte bancaire Crédit Mutuel de la société, eux aussi saisis ; que la société Is Prestige a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour infirmer partiellement l'ordonnance déférée et ordonner d'une part la restitution des véhicules en cause, du numéraire et de l'agenda, la chambre de l'instruction, a retenu, qu'en l'état de la procédure aucun élément ne conforte la provenance illégale des fonds investis par la société associée Redbox, avec lesquels les véhicules ont été acquis, les renseignements fournis par les services du Luxembourg ne faisant état d'aucune suspicion sur ce point ; que les pièces produites apportent, alors que des investigations sont en cours, une réponse possible sur l'origine des fonds investis par la société Redbox dont l'objet social n'interdit aucun type d'investissement ; que les conditions de participation de la société Is Prestige aux faits reprochés reposent sur un indice, soit l'investissement de plus de 800 000 euros de la part d'une société luxembourgeoise, qui n'a pas encore été corroboré par des éléments confirmatifs, qu'il est prématuré de priver Is Prestige des véhicules ; qu'en l'absence d'évaluation des sommes susceptibles d'avoir été blanchies, l'opportunité et la proportionnalité des mesures prises à titre provisoire avec l'importance de la fraude fiscale ne peuvent être appréciées, que, pour ordonner le maintien de la saisie du compte bancaire ouvert au Crédit Mutuel, les juges ont relevé l'importance des flux entre les comptes de la société et Mme A... sa dirigeante ; que la société Is Prestige, si elle n'était pas mise en examen au jour de la saisie, ne peut être considérée comme propriétaire de bonne foi du montant du crédit saisi qui apparaît comme le produit direct ou indirect d'agissements frauduleux de Mme A... ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, d'une part, saisie d'une demande sur le fondement de l'article 99 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction ne peut, à cette occasion, remettre en cause l'existence des indices graves et concordants de commission du délit de blanchiment justifiant la mise en examen des intéressés, d'autre part, il résulte de ses propres constatations que les automobiles, les liquidités et le solde du compte bancaire saisis sont susceptibles d'être l'instrument ou le produit direct ou indirect de l'infraction ; que l'agenda professionnel saisi est utile à la manifestation de la vérité et que le montant des sommes susceptibles d'être l'objet du blanchiment et investies dans les véhicules saisis évalué à 800 000 euros est supérieur à la valeur totale des biens saisis, la chambre de l ‘instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 17 mars 2017 ;
DIT n'y avoir lieu à restitution ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 8 novembre 2017 n° 16-84.529
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- La société BBGR,
contre l'ordonnance n° 14/ 19 253 du premier président de la cour d'appel de PARIS, en date du 27 mai 2016, qui a prononcé sur la régularité des opérations de visite et de saisie effectuées par l'Autorité de la concurrence en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles et d'abus de position dominante ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 septembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller WYON, les observations de la société civile professionnelle CÉLICE, SOLTNER, TEXIDOR et PÉRIER, de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;
Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de procédure que, statuant sur une requête de la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence, présentée dans le cadre d'une enquête relative à des pratiques commerciales prohibées susceptibles d'être relevées dans le cadre de la commercialisation des verres optiques, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris a autorisé, par ordonnance du 2 juillet 2014, la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence à faire procéder en application des dispositions de l'article L. 450-4 du code de commerce, à des opérations de visite et de saisie dans les locaux des sociétés BBGR, Essilor International, Novavel Ophtalmique, Carl Zeiss Vision France et Hoya Lens France ; que les opérations de visite et de saisie se sont déroulées les 9 et 10 juillet 2014 ; que la société BBGR a fait appel le 18 juillet 2014 de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Paris, et a demandé l'annulation de cette ordonnance ainsi que de celle du juge des libertés et de la détention de Créteil rendue sur commission rogatoire, l'annulation des opérations de visite et saisie effectuées dans les locaux de la société BBGR, ainsi que la restitution de pièces et scellés ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du code de commerce, 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale ;
" en ce que, à l'exception de certaines pièces et de certains documents, le premier président a rejeté la demande d'annulation des opérations de saisie qui ont été effectuées le 9 juillet 2014 en exécution d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention du 2 juillet précédent ;
" alors que la cassation à intervenir de l'ordonnance n° 14/ 19245 rendue le 27 mai 2016 pour valider l'autorisation de visite domiciliaire (pourvoi n° N 16-84. 531) entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'ordonnance du même jour qui a statué sur le déroulement de ces opérations et privera d'objet le présent pourvoi " ;
Attendu que le pourvoi formé à l'encontre de l'ordonnance du premier président confirmant l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence à effectuer des opérations de visite et saisie ayant été rejeté par arrêt de ce jour, le moyen est devenu sans objet ; Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du code de commerce, 56 et 593 du code de procédure pénale, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté le recours de la société BBGR tendant à l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et de saisies qui se sont déroulées dans ses locaux le 9 juillet 2014 et n'a prononcé qu'une annulation partielle de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 et des documents listés dans la pièce n° 10, à l'exception des documents 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 48, 60, 99 et 101 ;
" aux motifs que (p. 3) les conclusions déposées par la société BBGR le 2 janvier 2015, développées oralement à l'audience du 18 mars 2016, vu les observations de l'autorité de la concurrence déposées le 29 juin 2015, développées oralement à l'audience du 18 mars 2016, vu les conclusions du ministère public déposées le 16 février 2016, développées oralement à l'audience du 18 mars 2016 ; et que (p. 4), sur les griefs relatifs à la saisie irrégulière de documents, le grief d'ingérence disproportionnée ayant abouti à la saisie de documents hors champs en nombre bien supérieur aux pièces potentiellement dans le champ de l'enquête ; que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments entrant dans le champ de l'autorisation judiciaire suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés ou de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; qu'au stade de l'enquête, aucune disposition légale n'impose de dévoiler contradictoirement les motifs de recherche ou mots-clés utilisés pour identifier les documents saisis ; que sur la saisie massive disproportionnée ayant abouti à la saisie de documents hors champ en nombre supérieur aux pièces potentiellement dans le champ de l'enquête, que la société Essilor indique que trois de ses salariés (MM.
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Y...
, et
Z...
) ont fait l'objet d'une saisie intégrale et indifférenciée de la totalité de leurs messagerie et que, après filtrage par mots clés, moins de 15 % peuvent potentiellement entrer dans le champ de l'ordonnance ; qu'elle fonde ces allégations sur sa pièce n° 9 qui est un document rédigé en langue anglaise et non traduit ; mais que l'autorité de la concurrence expose que, sur plus de 2 million de fichiers, les rapporteurs en ont retenu un peu moins de 2000 soit moins de 0, 1 % ; que, de plus, le périmètre des investigations portant sur « le secteur de la commercialisation des verres optiques » le champ est beaucoup plus large que celui résultant des mots clés utilisés par l'appelante pour parvenir à son nombre de documents dits « hors champs » ; que le grief ainsi soulevé doit être écarté ; * le grief relatif aux saisies réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client ; que sur les saisies de fichiers de messageries électroniques réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client bénéficiant à ce titre de la protection prévue par l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, que la présence de tels courriels ne saurait entraîner la nullité de la saisie informatique des messageries dans leur entier mais uniquement des courriels identifiés comme comportant de tels échanges ; que la cour ordonnera l'annulation de la saisie des documents listés dans la pièce n° 10 de l'appelante à l'exception des documents suivants qui ne portent pas sur des échanges entre la société Essilor et ses propres avocats documents n° 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 44, 48, 60, 99 et 101 ; que les deux documents sur support papier, (scellé n° 7, côte n° 57 à 60, ordinateur de M.
A...
) et le scellé n° 3 côte 90 à 95, messagerie de M.
B...
(PV C..., pièce n° 4) ne comportent aucune correspondance avocat-client ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'annulation de leur saisie pas plus que des 4 dossiers intitulés " personal folders, pst " effectuée à partir de l'ordinateur de M.
D...
(scellé n° 1 " PC de M.
D...-Essilor
, PV
C...
, pièce n° 4) ; que le grief relatif aux saisies ont été réalisées en violation du droit fondamental au respect de la vie privée ; que l'article 8 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose, tout en énonçant le droit au respect de sa vie privée et familiale, que " Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi, vise un but légitime et être nécessaire dans une société démocratique (bien être économique du pays) " ; qu'en l'espèce l'article L. 450-4 du code commerce autorise une telle ingérence pour la recherche de la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments entrant dans le champ de l'autorisation judiciaire suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés ou de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que dans la présente espèce l'appelante a listé dans sa pièce n° 14 des messages identifiés dont il se déduit de leur intitulé qu'ils relèvent de la vie privée ; que les salariés concernés sont MM.
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, MM.
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; qu'il convient d'ordonner l'annulation de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 ;
" 1°) alors que le juge est tenu de répondre aux conclusions dont il est régulièrement saisi ; qu'en se contentant de statuer au visa des écritures déposées par la société BBGR le 2 janvier 2015, sans viser ni analyser les conclusions récapitulatives déposées le 29 mai 2015, en réponse aux observations de l'Autorité de la Concurrence en date du 3 mars 2015, le juge délégué a méconnu les termes du litige et, par suite, entaché sa décision d'un défaut de réponse aux conclusions ;
" 2°) alors que lesdites conclusions récapitulatives, accompagnées de pièces nouvelles, avaient pour objet de réfuter les dernières allégations de l'Autorité de la Concurrence qui tentait de ramener à 0, 1 % l'ampleur des pièces saisies par rapport aux pièces consultées ; qu'en retenant ce ratio au motif que l'étude réalisée par le cabinet Alix Partners qui faisait ressortir que ce ratio était de 25 %, aurait été « rédigée en anglais », sans viser ni analyser ladite étude versée aux débats en langue française sous le n° 9 bis, tel qu'elle avait été annexée aux conclusions du 29 mai 2015, le juge a de plus fort méconnu les termes du litige et partant violé le principe du « procès équitable » correspondant à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" 3°) alors qu'en se référant à un « périmètre d'investigations » portant sur l'ensemble du secteur de la commercialisation des verres optiques, le président de la cour d'appel, qui n'examine pas la contestation soulevée par l'exposante dans ses conclusions du 29 mai 2015, lesquelles faisaient valoir que le périmètre ainsi revendiqué par l'Administration procédait d'une interprétation trompeuse de l'ordonnance d'autorisation, laquelle n'avait été rendue qu'au visa de pratiques intéressant exclusivement « la vente en ligne de produits optiques », a, une fois encore, méconnu les termes du litige en violation des textes susvisés ;
" 4°) alors que prive sa décision de motifs la décision attaquée qui laisse dépourvues de toute réponse les conclusions de la société BBGR reprochant aux enquêteurs d'avoir saisi près de 10 % de documents antérieurs à la limite temporelle correspondant au début de l'activité, en 2008, des sites de vente par internet " ;
Attendu que, pour rejeter le recours de la société BBGR tendant à l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et de saisie et ne prononcer qu'une annulation partielle de la saisie de certains documents et pièces au regard de la protection du secret des correspondances entre un client et son avocat et du droit au respect de la vie privée, l'ordonnance attaquée prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, d'où il résulte que le juge, qui a, d'une part, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont il était saisi, d'autre part, examiné les conditions du déroulement des opérations, apprécié les modalités et la portée de la sélection des documents effectuée, et souverainement apprécié que l'Autorité de la concurrence était intervenue de manière sélective et ciblée, l'existence de cette sélection résultant du nombre de fichiers saisis au regard du nombre de fichiers existant et, enfin, établi que la saisie des documents a porté sur les fichiers comportant des éléments entrant dans le champ de l'autorisation accordée par le juge des libertés et de la détention, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du code de commerce, 56 et 593 du code de procédure pénale, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, 4, 5 et 455 du code de procédure civile, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté le recours de la société BBGR tendant à l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et de saisies qui se sont déroulées dans ses locaux le 9 juillet 2014 et n'a prononcé qu'une annulation partielle de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 et des documents listés dans la pièce n° 10, à l'exception des documents 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 48, 60, 99 et 101 ;
" aux motifs que sur le grief relatif aux saisies réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat client ; que sur les saisies de fichiers de messageries électroniques réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client bénéficiant à ce titre de la protection prévue par l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, que la présence de tels courriers ne saurait entraîner la nullité de la saisie informatique des messageries dans leur entier mais uniquement des courriels identifiés comme comportant de tels échanges ; que la cour ordonnera l'annulation de la saisie des documents listés dans la pièce n° 10 de l'appelante à l'exception des documents suivants qui ne portent pas sur des échanges entre la société Essilor et ses propres avocats : documents n° 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 44, 48, 60, 99 et 101 ; que les deux documents sur support papier, (scellé n° 7, côte n° 57 à 60, ordinateur de M.
A...
) et le scellé n° 3 côte 90 à 95, messagerie de M.
B...
(PV C..., pièce n° 4) ne comportent aucune correspondance avocat-client ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'annulation de leur saisie pas plus que des 4 dossiers intitulés « personal folders. pst » effectuée à partir de l'ordinateur de M.
D...
(scellé n° 1 « PC de M.
D...-Essilor
, PV
C...
, pièce n° 4) » ;
" 1°) alors qu'est illicite la saisie de correspondances couvertes par la confidentialité qui entoure les relations entre l'avocat et son client, en ce qu'elle permet à l'administration de prendre connaissance de leur teneur et donne tout loisir à ses agents, indépendamment d'une utilisation directe des supports matériels desdites correspondances, d'orienter les poursuites et d'obvier par avance aux moyens de la défense ; qu'en déclarant que les saisies portant sur ces documents devaient seulement être annulées, et ne justifiaient pas l'annulation de l'ensemble des opérations, le premier président n'a aucunement pris une mesure appropriée à la réparation du préjudice subi par l'exposante et a violé les articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, ainsi que les articles L. 450-4 du code de commerce et 56 du code de procédure pénale ;
" 2°) alors qu'il en est d'autant plus ainsi et que viole de plus fort les textes susvisés, le juge d'appel qui se contente d'affirmer abstraitement que la présence de courriers confidentiels ne saurait entraîner la nullité de la saisie informatique et qui ne répond pas aux conclusions faisant valoir que les correspondances avec les avocats devaient, en application de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, bénéficier d'une « protection renforcée » et qu'en l'espèce, loin d'avoir envisagé des mesures utiles à préserver les droits de la défense, les agents de l'Autorité de la Concurrence, qui disposaient cependant de moyens de sélection appropriés, n'avaient pas « fait preuve de la moindre prudence » et qu'en saisissant plus de cent courriers d'avocats, ils n'avaient pris « aucune précaution », ce dont il résultait qu'une annulation partielle et sélective des pièces saisies ne correspondait pas à une réparation effective du préjudice subi par les victimes de tels comportements ;
" 3°) alors qu'en faisant droit sans réserve à la demande de l'Administration d'exclure de l'annulation l'ensemble des pièces qu'il vise parce qu'elles ne constitueraient pas des « échanges » avec les avocats, le juge délégué, qui n'analyse aucune d'entre elles et qui fait silence sur la production n° 10 où la société demanderesse précisait l'objet de chacun des courriers, interdit à la Cour de cassation d'exercer le moindre contrôle sur la cause des exclusions qui sont prononcées de façon globale et invérifiable et prive ainsi sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" 4°) alors et de toutes façons que la protection renforcée dont doivent bénéficier les correspondances avec les avocats est fonctionnelle et doit, au-delà de la simple détention de leur support matériel, s'étendre également à la reproduction de tels courriers et à la retranscription au sein de l'entreprise, pour permettre leur diffusion, des avis des avocats dans d'autres documents, ces reproductions totales ou partielles étant susceptibles de compromettre les droits de la défense, de sorte qu'en acceptant de distraire du champ de l'annulation qu'il prononce, les pièces n° 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 44, 48, 60, 99 et 101 ainsi que d'autres documents sur support papier aux motifs qu'ils ne constituent pas formellement « des échanges entre la société Essilor et ses propres avocats », le juge délégué a violé ensemble les principes susvisés ainsi que l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1970 " ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du code de commerce, 56 et 593 du code de procédure pénale, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4, 5 et 455 du code de procédure civile, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté en partie le recours de la société BBGR tendant à l'annulation pour atteinte à la vie privée des opérations de visite et de saisies qui se sont déroulées dans ses locaux le 9 juillet 2014 et n'a annulé à ce titre que les pièces visées en annexe n° 14 ;
" aux motifs que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments relevant de la vie privée suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que dans la présente espèce l'appelante a listé dans sa pièce n° 14 des messages identifiés dont il se déduit de leur intitulé qu'ils relèvent de la vie privée ; que les salariés concernés sont MM.
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, Mme
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, MM.
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, et X...; qu'il convient d'ordonner l'annulation de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 ; et que la saisie, dans ce cadre global, de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que la demande d'annulation des fichiers saisis sur les ordinateurs de MM.
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doit être rejetée » ;
" 1°) alors que dans ses conclusions, non visées du 29 mai 2015, la société BBGR demandait au juge d'« annuler les saisies des pièces informatiques relevant de la sphère privée et listée en pièce 14 bis », laquelle était produite en annexe, de sorte qu'en limitant l'annulation de la saisie au seul contenu de la pièce 14 sans prendre en compte la liste exhaustive des courriers litigieux (pièce 14bis), le premier président a méconnu les termes du litige en violation des textes susvisés ;
" 2°) alors qu'en refusant d'annuler l'ensemble des documents figurant dans l'annexe 14 bis, sans s'en expliquer, le juge délégué a entaché sa décision d'un flagrant défaut de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
" 3°) alors qu'en refusant d'annuler la saisie des quatre dossiers intitulés « personal folders. pst » effectuée à partir de l'ordinateur de M.
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au seul motif « qu'ils ne comportent aucune correspondance avocat-client », tandis que la demanderesse sollicitait, en réalité, cette annulation parce que l'intitulé même desdits fichiers et leur contenu révélaient qu'il s'agissait de documents personnels et donc au titre du droit au respect de la vie privée, le juge délégué a, de nouveau, méconnu l'objet du litige en violation des textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour refuser d'annuler l'ensemble des opérations de visite et de saisie, l'ordonnance prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, le premier président, qui, d'une part, par une appréciation qui relève de son pouvoir souverain, exempte d'insuffisance ou de contradiction, a limité l'annulation de la saisie à certains fichiers contenant des données confidentielles couvertes par le secret des correspondances échangées avec un avocat ou de caractère privé sans rapport avec les soupçons d'actes prohibés, la saisie irrégulière de certains documents étant sans effet sur la validité des opérations de visite et des autres saisies et, d'autre part, a pu souverainement admettre la copie intégrale des fichiers de messageries, sans individualisation de chaque message, et leur saisie dans leur globalité, ceux-ci contenant des éléments pour partie utiles à la preuve des agissements présumés, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 et R. 450-2 du code de commerce, 56 et 593 du code de procédure pénale, 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4 et 455 du code de procédure civile ;
" en ce que le juge délégué par le premier président de la cour de Paris a rejeté les demandes d'annulation de la société BBGR consécutives aux irrégularités commises pendant la visite et à la saisie de pièces hors du champ de l'autorisation ;
" aux motifs que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés ou de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; (page 6 alinéa 1) que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments relevant de la vie privée suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; (page 6 alinéa 6) sur la violation du droit à la présence effective et utile d'un conseil extérieur, que si l'appelante ne disconvient pas que les enquêteurs ne lui ont pas refusé la présence de ses avocats, présence qui a été effective, elle reproche aux enquêteurs de ne pas avoir autorisé les avocats à assister à la sélection puis à l'examen des documents figurant sur les ordinateurs portables et d'avoir refusé de communiquer aux représentants de l'entreprise la liste des mots clés pour procéder à leur sélection ; mais que l'article 450-4 du code de commerce autorise l'occupant des lieux ou son représentant à prendre seuls connaissance des pièces et documents « avant leur saisie » ; que les contestations portant sur le déroulement des opérations de saisie elles-mêmes sont inopérantes ; que, par ailleurs, les enquêteurs ne sont aucunement tenus de dévoiler contradictoirement les moteurs de recherche ou mots-clés utilisés pour identifier les documents saisis ; (page 6 alinéa 10) violation du droit à un recours effectif du fait de l'insuffisance des inventaires, que l'article R. 450-2 du code de commerce ne soumet pas les inventaires à aucune forme particulière ; qu'en l'espèce, si la liste des documents papier et si la liste des fichiers informatiques comportent des descriptions ou libellés non suffisamment explicites pour déterminer si les documents qu'ils comportent entrent ou non dans le champ de l'ordonnance, cette circonstance ne conduit pas à annuler l'ensemble des fichiers qui les comportent dès lors qu'ils contiennent au moins pour partie seulement des éléments entrant dans le champ de l'autorisation judiciaire ; que la saisie, dans ce cadre global, de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que la demande d'annulation des fichiers saisis sur les ordinateurs de MM.
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doit être rejetée » ;
" 1°) alors qu'en énonçant tour à tour que l'occupant des lieux est autorisé « à prendre connaissance des pièces et documents avant leur saisie » en vertu de l'article L. 450-4 du code de commerce et cependant que « les contestations portant sur le déroulement des opérations de saisie sont inopérantes », le juge délégué a usé d'une motivation contradictoire et inintelligible en violation des textes visés au moyen ;
" 2°) alors que l'article 450-4 du code de commerce, en autorisant l'occupant des lieux à prendre connaissance des documents avant leur saisie, implique que l'occupant ou son avocat puisse assister à la procédure de sélection des documents que les agents enquêteurs décident de saisir ; qu'en estimant au contraire que la saisie irrégulière de pièces étrangères au champ de l'autorisation ne pourrait donner lieu qu'à une restitution par l'administration à la demande des intéressés et que, par ailleurs, les enquêteurs ne sauraient se voir reprocher d'avoir empêché les avocats d'assister à la sélection des documents au cours de l'opération, le juge délégué réduit, en violation des textes susvisés, les garanties de la partie visitée à un éventuel contrôle en aval de la visite et élimine l'existence du contrôle en amont tel qu'il est exigé par la jurisprudence et tel qu'il est pourtant organisé par les articles L. 450-4 et R. 450-2 du code de commerce et 56 du code de procédure pénale qui prévoient la présence de l'occupant des lieux dès le début de la visite, son éventuelle assistance par les avocats, la possibilité de prendre connaissance des pièces et documents avant leur saisie et la nécessité d'établir un inventaire différent en cas de difficulté ;
" 3°) alors qu'en réduisant le rôle des avocats pendant le déroulement de la visite à une simple assistance passive aux opérations des enquêteurs, le juge délégué prive de toute effectivité l'exercice des droits de la défense en violation des textes susvisés et notamment de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1971 et des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" 4°) alors que le juge délégué ayant, lui-même, constaté que la liste des documents informatiques et papiers composant les inventaires comportait « des descriptions ou libellés non suffisamment explicites pour déterminer si les documents qu'ils comportent entrent ou non dans le champ de l'autorisation », il ne pouvait refuser d'en tirer les conséquences et de prononcer la nullité des saisies correspondant à ces irrégularités ; qu'en se bornant à renvoyer à la partie visitée le soin d'identifier, par elle-même, les documents irrégulièrement saisis à seule fin d'en obtenir une éventuelle restitution, non satisfactoire en elle-même, le juge délégué a méconnu son office et violé l'ensemble des textes susvisés ;
" 5°) alors qu'en affirmant que l'article R. 450-2 du code de commerce ne soumet les inventaires à « aucune forme particulière », tandis que les articles L. 450-4 et 56 du code de procédure pénale imposent, au contraire, si l'identification des documents devant être saisis, sous le contrôle de l'occupant à qui ils appartiennent, ne peut être opérée immédiatement et sur place, le recours à des « scellés provisoires » jusqu'au moment où les difficultés relatives à l'élaboration des inventaires sur place pourront être surmontées, toujours en présence des personnes qui ont assisté à la visite, le juge délégué viole, par la même, lesdits textes ;
" 6°) alors que viole les textes visés au moyen le juge délégué qui laisse dépourvues de toute réponse les conclusions de la demanderesse qui démontrait précisément que, après avoir présenté des inventaires inintelligibles comportant des références telles que « archive. pst », « outlook (2). ost » (ordinateur de M.
D...
), « DMS CMM. ppt », « business. pst », « DMS. pst », « FGX. pst », « growth. pst », « outlook. ost », « service. pst », « services. pst », « Zelements envoyés. pst », (ordinateur de M.
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), « DP001- BBGR. pst », « VF-MG-04-06 » (ordinateur de M.
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), le service d'enquête avait finalement réalisé des inventaires plus explicites, ce dont il résultait une violation délibérée des formes de la saisie au moment où celle-ci avait été opérée " ;
Attendu que pour rejeter les demandes d'annulation fondées sur des irrégularités commises pendant la visite et sur la saisie de pièces se situant hors du champ de l'autorisation, l'ordonnance prononce par les motifs repris au moyen ;
Sur le moyen, pris en ses quatre premières branches et en sa sixième branche :
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'ordonnance, partiellement reprises au moyen, que le premier président, après avoir rappelé que l'article L. 450-4 du code de commerce autorise l'occupant des lieux ou son représentant à prendre seuls connaissance des pièces et documents avant leur saisie, a jugé que les contestations portant sur le déroulement des opérations de saisie elles-mêmes sont inopérantes ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, qui répondent aux chefs péremptoires des conclusions dont il était saisi, le premier président, qui n'a pas méconnu les dispositions conventionnelles et légales invoquées, a justifié sa décision, dès lors que, d'une part, le juge, qui a constaté que la présence des avocats de la société BBGR avait été effective avant la saisie, a pu estimer, sans méconnaître les dispositions de l'article L 450-4 du code de commerce, que ce texte ne les autorisait pas à assister à la sélection des documents devant être saisis ni à se faire communiquer les mots-clés utilisés pour cette sélection, d'autre part, la loi ne soumet les inventaires à aucune forme particulière, et, enfin, la société demanderesse ayant reçu copie des fichiers saisis, a ainsi été mise en mesure, nonobstant l'éventuelle insuffisance du libellé des références dans l'inventaire, d'en connaître le contenu, et d'établir dans le cadre de son recours que certaines pièces saisies ne pouvaient l'être ;
Qu'ainsi, les griefs allégués ne sont pas encourus ;
Sur le moyen, pris en sa cinquième branche :
Attendu que la confection de scellés provisoires, lorsque l'inventaire sur place présente des difficultés, est une faculté laissée à l'appréciation des enquêteurs agissant sous le contrôle du juge ;
D'ou il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 8 novembre 2017 n° 16-84.528
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- La société Essilor International,
contre l'ordonnance n° 14/ 19 284 du premier président de la cour d'appel de PARIS, en date du 27 mai 2016, qui a prononcé sur la régularité des opérations de visite et de saisie effectuées par l'Autorité de la concurrence en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles et d'abus de position dominante ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 septembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller WYON, les observations de la société civile professionnelle CÉLICE, SOLTNER, TEXIDOR et PÉRIER, de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;
Vu les mémoires en demande, en défense, et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de procédure que, statuant sur une requête de la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence, présentée dans le cadre d'une enquête relative à des pratiques commerciales prohibées susceptibles d'être relevées dans le cadre de la commercialisation des verres optiques, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris a autorisé, par ordonnance du 2 juillet 2014, la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence à faire procéder en application des dispositions de l'article L. 450-4 du code de commerce, à des opérations de visite et de saisie dans les locaux des sociétés Essilor International, BBGR, Novavel Ophtalmique, Carl Zeiss Vision France et Hoya Lens France ; que les opérations de visite et de saisie se sont déroulées les 9 et 10 juillet 2014 ; que la société Essilor International a fait appel le 18 juillet 2014 de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention de Paris, et a demandé l'annulation de cette ordonnance ainsi que de celle du juge des libertés et de la détention de Créteil rendue sur commission rogatoire, l'annulation des opérations de visite et saisie effectuées dans les locaux de la société Essilor International, ainsi que la restitution de pièces et scellés ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du code de commerce, 593 du code de procédure pénale, défaut de base légale ;
" en ce que, à l'exception de certaines pièces et de certains documents, le premier président a rejeté la demande d'annulation des opérations de saisie qui ont été effectuées le 9 juillet 2014 en exécution d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention du 2 juillet précédent ;
" alors que la cassation à intervenir de l'ordonnance n° 14/ 19277 rendue le 27 mai 2016 pour valider l'autorisation de visite domiciliaire entraînera par voie de conséquence l'annulation de l'ordonnance du même jour qui a statué sur le déroulement de ces opérations et privera d'objet le présent pourvoi " ;
Attendu que le pourvoi formé à l'encontre de l'ordonnance du premier président confirmant l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant autorisé la rapporteure générale de l'Autorité de la concurrence à effectuer des opérations de visite et saisie ayant été rejeté par arrêt de ce jour, le moyen est devenu sans objet ; Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du code de commerce, 56 et 593 du code de procédure pénale, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté le recours de la société Essilor International tendant à l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et de saisies qui se sont déroulées dans ses locaux le 9 juillet 2014 et n'a prononcé qu'une annulation partielle de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 et des documents listés dans la pièce n° 10, à l'exception des documents 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 48, 60, 99 et 101 ;
" aux motifs que vu les conclusions déposées par la société Essilor International le 2 janvier 2015, développées oralement à l'audience du 18 mars 2016, vu les observations de l'autorité de la concurrence déposées le 29 juin 2015, développées oralement à l'audience du 18 mars 2016, vu les conclusions du ministère public déposées le 16 février 2016, développées oralement à l'audience du 18 mars 2016 ; et que, sur les griefs relatifs à la saisie irrégulière de documents, le grief d'ingérence disproportionnée ayant abouti à la saisie de documents hors champs en nombre bien supérieur aux pièces potentiellement dans le champ de l'enquête ; que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments entrant dans le champ de l'autorisation judiciaire suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés ou de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; qu'au stade de l'enquête, aucune disposition légale n'impose de dévoiler contradictoirement les motifs de recherche ou mots-clés utilisés pour identifier les documents saisis ; que sur la saisie massive disproportionnée ayant abouti à la saisie de documents hors champ en nombre supérieur aux pièces potentiellement dans le champ de l'enquête, que la société Essilor indique que trois de ses salariés (MM. X..., Y..., et Z...) ont fait l'objet d'une saisie intégrale et indifférenciée de la totalité de leurs messagerie et que, après filtrage par mots clés, moins de 15 % peuvent potentiellement entrer dans le champ de l'ordonnance ; qu'elle fonde ces allégations sur sa pièce n° 9 qui est un document rédigé en langue anglaise et non traduit ; mais que l'autorité de la concurrence expose que, sur plus de 2 million de fichiers, les rapporteurs en ont retenu un peu moins de 2000 soit moins de 0, 1 % ; que, de plus, le périmètre des investigations portant sur « le secteur de la commercialisation des verres optiques » le champ est beaucoup plus large que celui résultant des mots clés utilisés par l'appelante pour parvenir à son nombre de documents dits « hors champs » ; que le grief ainsi soulevé doit être écarté ; que le grief relatif aux saisies réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client ; que sur les saisies de fichiers de messageries électroniques réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client bénéficiant à ce titre de la protection prévue par l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, que la présence de tels courriels ne saurait entraîner la nullité de la saisie informatique des messageries dans leur entier mais uniquement des courriels identifiés comme comportant de tels échanges ; que la cour ordonnera l'annulation de la saisie des documents listés dans la pièce n° 10 de l'appelante à l'exception des documents suivants qui ne portent pas sur des échanges entre la société Essilor et ses propres avocats documents n° 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 44, 48, 60, 99 et 101 ; que les deux documents sur support papier, (scellé n° 7, côte n° 57 à 60, ordinateur de M. A...) et le scellé n° 3 côte 90 à 95, messagerie de M. B...(PV D..., pièce n° 4) ne comportent aucune correspondance avocat-client ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'annulation de leur saisie pas plus que des 4 dossiers intitulés " personal folders, pst " effectuée à partir de l'ordinateur de M. C...(scellé n° 1 " PC de M. C...-Essilor, PV D..., pièce n° 4) ; que le grief relatif aux saisies ont été réalisées en violation du droit fondamental au respect de la vie privée ; que l'article 8 § 2 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose, tout en énonçant le droit au respect de sa vie privée et familiale, que " Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi, vise un but légitime et être nécessaire dans une société démocratique (bien être économique du pays) " ; qu'en l'espèce l'article L. 450-4 du code commerce autorise une telle ingérence pour la recherche de la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments entrant dans le champ de l'autorisation judiciaire suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés ou de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que dans la présente espèce l'appelante a listé dans sa pièce n° 14 des messages identifiés dont il se déduit de leur intitulé qu'ils relèvent de la vie privée ; que les salariés concernés sont MM. E..., F..., Mme G..., MM. Y..., A..., C..., Z..., H..., et X... ; qu'il convient d'ordonner l'annulation de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 " ;
" 1°) alors que le juge est tenu de répondre aux conclusions dont il est régulièrement saisi ; qu'en se contentant de statuer au visa des écritures déposées par la société Essilor International le 2 janvier 2015, sans viser ni analyser les conclusions récapitulatives déposées le 29 mai 2015, en réponse aux observations de l'Autorité de la Concurrence en date du 27 février 2015, le juge délégué a méconnu les termes du litige et, par suite, entaché sa décision d'un défaut de réponse aux conclusions ;
" 2°) alors que lesdites conclusions récapitulatives, accompagnées de pièces nouvelles, avaient pour objet de réfuter les dernières allégations de l'Autorité de la concurrence qui tentait de ramener à 0, 1 % l'ampleur des pièces saisies par rapport aux pièces consultées ; qu'en retenant ce ratio au motif que l'étude réalisée par le cabinet Alix Partners qui faisait ressortir que ce ratio était de 25 %, aurait été « rédigée en anglais », sans viser ni analyser ladite étude versée aux débats en langue française sous le n° 9 bis, tel qu'elle avait été annexée aux conclusions du 29 mai 2015, le juge a de plus fort méconnu les termes du litige et partant violé le principe du « procès équitable » correspondant à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" 3°) alors qu'en se référant à un « périmètre d'investigations » portant sur l'ensemble du secteur de la commercialisation des verres optiques, le président de la cour d'appel, qui n'examine pas la contestation soulevée par la demanderesse dans ses conclusions du 29 mai 2015, lesquelles faisaient valoir que le périmètre ainsi revendiqué par l'Administration procédait d'une interprétation trompeuse de l'ordonnance d'autorisation, laquelle n'avait été rendue qu'au visa de pratiques intéressant exclusivement « la vente en ligne de produits optiques », a, une fois encore, méconnu les termes du litige en violation des textes susvisés ;
" 4°) alors de toutes façons que prive sa décision de motifs la décision attaquée qui laisse dépourvues de toute réponse les conclusions de la société Essilor International reprochant aux enquêteurs d'avoir saisi près de 10 % de documents antérieurs à la limite temporelle correspondant au début de l'activité, en 2008, des sites de vente par internet " ;
Attendu que, pour rejeter le recours de la société Essilor International tendant à l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et de saisie et ne prononcer qu'une annulation partielle de la saisie de certains documents et pièces au regard de la protection du secret des correspondances entre un client et son avocat et du droit au respect de la vie privée, l'ordonnance attaquée prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dépourvues d'insuffisance comme de contradiction, d'où il résulte que le juge, qui a, d'une part, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont il était saisi, d'autre part, examiné les conditions du déroulement des opérations, apprécié les modalités et la portée de la sélection des documents effectuée, et souverainement apprécié que l'Autorité de la concurrence était intervenue de manière sélective et ciblée, l'existence de cette sélection résultant du nombre de fichiers saisis au regard du nombre de fichiers existant et, enfin, établi que la saisie des documents a porté sur les fichiers comportant des éléments entrant dans le champ de l'autorisation accordée par le juge des libertés et de la détention, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du code de commerce, 56 et 593 du code de procédure pénale, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, 4, 5 et 455 du code de procédure civile, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté le recours de la société Essilor International tendant à l'annulation de l'ensemble des opérations de visite et de saisies qui se sont déroulées dans ses locaux le 9 juillet 2014 et n'a prononcé qu'une annulation partielle de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 et des documents listés dans la pièce n° 10, à l'exception des documents 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 48, 60, 99 et 101 ;
" aux motifs que sur le grief relatif aux saisies réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client ; que sur les saisies de fichiers de messageries électroniques réalisées en violation du droit fondamental à la confidentialité des correspondances avocat-client bénéficiant à ce titre de la protection prévue par l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, que la présence de tels courriers ne saurait entraîner la nullité de la saisie informatique des messageries dans leur entier mais uniquement des courriels identifiés comme comportant de tels échanges ; que la cour ordonnera l'annulation de la saisie des documents listés dans la pièce n° 10 de l'appelante à l'exception des documents suivants qui ne portent pas sur des échanges entre la société Essilor et ses propres avocats : documents n° 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 44, 48, 60, 99 et 101 ; que les deux documents sur support papier, (scellé n° 7, côte n° 57 à 60, ordinateur de M. A...) et le scellé n° 3 côte 90 à 95, messagerie de M. B...(PV D..., pièce n° 4) ne comportent aucune correspondance avocat-client ; qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'annulation de leur saisie pas plus que des 4 dossiers intitulés « personal folders. pst » effectuée à partir de l'ordinateur de M. C...(scellé n° 1 « PC de M. M. C...-Essilor, PV D..., pièce n° 4) ;
" 1°) alors qu'est illicite la saisie de correspondances couvertes par la confidentialité qui entoure les relations entre l'avocat et son client, en ce qu'elle permet à l'administration de prendre connaissance de leur teneur et donne tout loisir à ses agents, indépendamment d'une utilisation directe des supports matériels desdites correspondances, d'orienter les poursuites et d'obvier par avance aux moyens de la défense ; qu'en déclarant que les saisies portant sur ces documents devaient seulement être annulées, et ne justifiaient pas l'annulation de l'ensemble des opérations, le premier président n'a aucunement pris une mesure appropriée à la réparation du préjudice subi par l'exposante et a violé les articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, ainsi que les articles L. 450-4 du code de commerce et 56 du code de procédure pénale ;
" 2°) alors qu'il en est d'autant plus ainsi et que viole de plus fort les textes susvisés, le juge d'appel qui se contente d'affirmer abstraitement que la présence de courriers confidentiels ne saurait entraîner la nullité de la saisie informatique et qui ne répond pas aux conclusions faisant valoir que les correspondances avec les avocats devaient, en application de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, bénéficier d'une « protection renforcée » et qu'en l'espèce, loin d'avoir envisagé des mesures utiles à préserver les droits de la défense, les agents de l'Autorité de la Concurrence, qui disposaient cependant de moyens de sélection appropriés, n'avaient pas « fait preuve de la moindre prudence » et qu'en saisissant plus de cent courriers d'avocats, ils n'avaient pris « aucune précaution », ce dont il résultait qu'une annulation partielle et sélective des pièces saisies ne correspondait pas à une réparation effective du préjudice subi par les victimes de tels comportements ;
" 3°) alors qu'en faisant droit sans réserve à la demande de l'Administration d'exclure de l'annulation l'ensemble des pièces qu'il vise parce qu'elles ne constitueraient pas des « échanges » avec les avocats, le juge délégué, qui n'analyse aucune d'entre elles et qui fait silence sur la production n° 10 où la société demanderesse précisait l'objet de chacun des courriers, interdit à la Cour de cassation d'exercer le moindre contrôle sur la cause des exclusions qui sont prononcées de façon globale et invérifiable et prive ainsi sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" 4°) alors et de toutes façons que la " protection renforcée " dont doivent bénéficier les correspondances avec les avocats est fonctionnelle et doit, au-delà de la simple détention de leur support matériel, s'étendre également à la reproduction de tels courriers et à la retranscription au sein de l'entreprise, pour permettre leur diffusion, des avis des avocats dans d'autres documents, ces reproductions totales ou partielles étant susceptibles de compromettre les droits de la défense, de sorte qu'en acceptant de distraire du champ de l'annulation qu'il prononce, les pièces n° 3, 9, 33, 34, 36, 37, 41, 42, 43, 44, 48, 60, 99 et 101 ainsi que d'autres documents sur support papier aux motifs qu'ils ne constituent pas formellement « des échanges entre la société Essilor et ses propres avocats », le juge délégué a violé ensemble les principes susvisés ainsi que l'article 66-5 de la loi du 31 décembre 1970 " ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 du code de commerce, 56 et 593 du code de procédure pénale, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4, 5 et 455 du code de procédure civile, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté en partie le recours de la société Essilor International tendant à l'annulation pour atteinte à la vie privée des opérations de visite et de saisies qui se sont déroulées dans ses locaux le 9 juillet 2014 et n'a annulé à ce titre que les pièces visées en annexe n° 14 ;
" aux motifs que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments relevant de la vie privée suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que dans la présente espèce l'appelante a listé dans sa pièce n° 14 des messages identifiés dont il se déduit de leur intitulé qu'ils relèvent de la vie privée ; que les salariés concernés sont MM. E..., F..., Mme G..., MM. Y..., A..., C..., Z..., H..., et X... ; qu'il convient d'ordonner l'annulation de la saisie des pièces visées en annexe n° 14 ; … ; et que (page 6 alinéa 11) la saisie, dans ce cadre global, de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que la demande d'annulation des fichiers saisis sur les ordinateurs de MM. C..., A..., I...et E...doit être rejetée ;
" 1°) alors que dans ses conclusions, non visées du 29 mai 2015, la société Essilor International demandait au juge d'« annuler les saisies des pièces informatiques relevant de la sphère privée et listée en pièce 14 bis », laquelle était produite en annexe, de sorte qu'en limitant l'annulation de la saisie au seul contenu de la pièce 14 sans prendre en compte la liste exhaustive des courriers litigieux (pièce 14bis), le premier président a méconnu les termes du litige en violation des textes susvisés ;
" 2°) alors qu'en refusant d'annuler l'ensemble des documents figurant dans l'annexe 14 bis, sans s'en expliquer, le juge délégué a entaché sa décision d'un flagrant défaut de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
" 3°) alors qu'en refusant d'annuler la saisie des quatre dossiers intitulés « personal folders. pst » effectuée à partir de l'ordinateur de M. C...au seul motif « qu'ils ne comportent aucune correspondance avocat-client », tandis que la demanderesse sollicitait, en réalité, cette annulation parce que l'intitulé même des-dits fichiers et leur contenu révélaient qu'il s'agissait de documents personnels et donc au titre du droit au respect de la vie privée, le juge délégué a, de nouveau, méconnu l'objet du litige en violation des textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour refuser d'annuler l'ensemble des opérations de visite et de saisie, l'ordonnance prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, le premier président, qui, d'une part, par une appréciation qui relève de son pouvoir souverain, exempte d'insuffisance ou de contradiction, a limité l'annulation de la saisie à certains fichiers contenant des données confidentielles couvertes par le secret des correspondances échangées avec un avocat ou de caractère privé sans rapport avec les soupçons d'actes prohibés, la saisie irrégulière de certains documents étant sans effet sur la validité des opérations de visite et des autres saisies et, d'autre part, a pu souverainement admettre la copie intégrale des fichiers de messageries, sans individualisation de chaque message, et leur saisie dans leur globalité, ceux-ci contenant des éléments pour partie utiles à la preuve des agissements présumés, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 450-4 et R. 450-2 du code de commerce, 56 et 593 du code de procédure pénale, 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4 et 455 du code de procédure civile ;
" en ce que le juge délégué par le premier président de la cour de Paris a rejeté les demandes d'annulation de la société Essilor International consécutives aux irrégularités commises pendant la visite et à la saisie de pièces hors du champ de l'autorisation ;
" aux motifs que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés ou de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que le seul fait vérifié ci-dessus par le juge, qu'une messagerie électronique contienne pour partie seulement des éléments relevant de la vie privée suffit à valider la saisie globale opérée ; que la saisie, dans ce cadre global, de certains documents personnels à des salariés n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que sur la violation du droit à la présence effective et utile d'un conseil extérieur, que si l'appelante ne disconvient pas que les enquêteurs ne lui ont pas refusé la présence de ses avocats, présence qui a été effective, elle reproche aux enquêteurs de ne pas avoir autorisé les avocats à assister à la sélection puis à l'examen des documents figurant sur les ordinateurs portables et d'avoir refusé de communiquer aux représentants de l'entreprise la liste des mots clés pour procéder à leur sélection ; mais que l'article 450-4 du code de commerce autorise l'occupant des lieux ou son représentant à prendre seuls connaissance des pièces et documents « avant leur saisie » ; que les contestations portant sur le déroulement des opérations de saisie elles-mêmes sont inopérantes ; que, par ailleurs, les enquêteurs ne sont aucunement tenus de dévoiler contradictoirement les moteurs de recherche ou mots-clés utilisés pour identifier les documents saisis ; que la violation du droit à un recours effectif du fait de l'insuffisance des inventaires, que l'article R. 450-2 du code de commerce ne soumet pas les inventaires à aucune forme particulière ; qu'en l'espèce, si la liste des documents papier et si la liste des fichiers informatiques comportent des descriptions ou libellés non suffisamment explicites pour déterminer si les documents qu'ils comportent entrent ou non dans le champ de l'ordonnance, cette circonstance ne conduit pas à annuler l'ensemble des fichiers qui les comportent dès lors qu'ils contiennent au moins pour partie seulement des éléments entrant dans le champ de l'autorisation judiciaire ; que la saisie, dans ce cadre global, de documents étrangers à l'objet de l'opération autorisée par le juge n'invalide pas la saisie mais doit conduire l'administration à restituer les documents concernés dès lors qu'ils auront été identifiés par les intéressés ; que la demande d'annulation des fichiers saisis sur les ordinateurs de MM. C..., A..., I...et E...doit être rejetée ;
" 1°) alors qu'en énonçant tour à tour que l'occupant des lieux est autorisé « à prendre connaissance des pièces et documents avant leur saisie » en vertu de l'article L. 450-4 du code de commerce et cependant que « les contestations portant sur le déroulement des opérations de saisie sont inopérantes », le juge délégué a usé d'une motivation contradictoire et inintelligible en violation des textes visés au moyen ;
" 2°) alors que l'article 450-4 du code de commerce, en autorisant l'occupant des lieux à prendre connaissance des documents avant leur saisie, implique que l'occupant ou son avocat puisse assister à la procédure de sélection des documents que les agents enquêteurs décident de saisir ; qu'en estimant au contraire que la saisie irrégulière de pièces étrangères au champ de l'autorisation ne pourrait donner lieu qu'à une restitution par l'administration à la demande des intéressés et que, par ailleurs, les enquêteurs ne sauraient se voir reprocher d'avoir empêché les avocats d'assister à la sélection des documents au cours de l'opération, le juge délégué réduit, en violation des textes susvisés, les garanties de la partie visitée à un éventuel contrôle en aval de la visite et élimine l'existence du contrôle en amont tel qu'il est exigé par la jurisprudence et tel qu'il est pourtant organisé par les articles L. 450-4 et R. 450-2 du code de commerce et 56 du code de procédure pénale qui prévoient la présence de l'occupant des lieux dès le début de la visite, son éventuelle assistance par les avocats, la possibilité de prendre connaissance des pièces et documents avant leur saisie et la nécessité d'établir un inventaire différent en cas de difficulté ;
" 3°) alors qu'en réduisant le rôle des avocats pendant le déroulement de la visite à une simple assistance passive aux opérations des enquêteurs, le juge délégué prive de toute effectivité l'exercice des droits de la défense en violation des textes susvisés et notamment de l'article 6 de la loi du 31 décembre 1971 et des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
" 4°) alors que le juge délégué ayant, lui-même, constaté que la liste des documents informatiques et papiers composant les inventaires comportait « des descriptions ou libellés non suffisamment explicites pour déterminer si les documents qu'ils comportent entrent ou non dans le champ de l'autorisation », il ne pouvait refuser d'en tirer les conséquences et de prononcer la nullité des saisies correspondant à ces irrégularités ; qu'en se bornant à renvoyer à la partie visitée le soin d'identifier, par elle-même, les documents irrégulièrement saisis à seule fin d'en obtenir une éventuelle restitution, non satisfactoire en elle-même, le juge délégué a méconnu son office et violé l'ensemble des textes susvisés ;
" 5°) alors qu'en affirmant que l'article R. 450-2 du code de commerce ne soumet les inventaires à « aucune forme particulière », tandis que les articles L. 450-4 et 56 du code de procédure pénale imposent, au contraire, si l'identification des documents devant être saisis, sous le contrôle de l'occupant à qui ils appartiennent, ne peut être opérée immédiatement et sur place, le recours à des « scellés provisoires » jusqu'au moment où les difficultés relatives à l'élaboration des inventaires sur place pourront être surmontées, toujours en présence des personnes qui ont assisté à la visite, le juge délégué viole, par la même, lesdits textes ;
" 6°) alors que viole les textes visés au moyen le juge délégué qui laisse dépourvues de toute réponse les conclusions de la demanderesse qui démontrait précisément que, après avoir présenté des inventaires inintelligibles comportant des références telles que « archive. pst », « outlook (2). ost » (ordinateur de M. C...), « DMS CMM. ppt », « business. pst », « DMS. pst », « FGX. pst », « growth. pst », « outlook. ost », « service. pst », « services. pst », « Zelements envoyés. pst », (ordinateur de M. A...), « DP001- BBGR. pst », « VF-MG-04-06 » (ordinateur de M. E...), le service d'enquête avait finalement réalisé des inventaires plus explicites, ce dont il résultait une violation délibérée des formes de la saisie au moment où celle-ci avait été opérée " ;
Attendu que, pour rejeter les demandes d'annulation fondées sur des irrégularités commises pendant la visite et sur la saisie de pièces se situant hors du champ de l'autorisation, l'ordonnance prononce par les motifs repris au moyen ;
Sur le moyen, pris en ses quatre premières branches et en sa sixième branche :
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'ordonnance, partiellement reprises au moyen, que le premier président, après avoir rappelé que l'article L. 450-4 du code de commerce autorise l'occupant des lieux ou son représentant à prendre seuls connaissance des pièces et documents avant leur saisie, a jugé que les contestations portant sur le déroulement des opérations de saisie elles-mêmes sont inopérantes ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, qui répondent aux chefs péremptoires des conclusions dont il était saisi, le premier président, qui n'a pas méconnu les dispositions conventionnelles et légales invoquées, a justifié sa décision, dès lors que, d'une part, le juge, qui a constaté que la présence des avocats de la société Essilor International avait été effective avant la saisie, a pu estimer, sans méconnaître les dispositions de l'article L. 450-4 du code de commerce, que ce texte ne les autorisait pas à assister à la sélection des documents devant être saisis ni à se faire communiquer les mots-clés utilisés pour cette sélection, d'autre part, la loi ne soumet les inventaires à aucune forme particulière, et, enfin, la société demanderesse ayant reçu copie des fichiers saisis, a ainsi été mise en mesure, nonobstant l'éventuelle insuffisance du libellé des références dans l'inventaire, d'en connaître le contenu, et d'établir dans le cadre de son recours que certaines pièces saisies ne pouvaient l'être ;
Qu'ainsi les griefs allégués ne sont pas encourus ;
Sur le moyen, pris en sa cinquième branche :
Attendu que la confection de scellés provisoires, lorsque l'inventaire sur place présente des difficultés, est une faculté laissée à l'appréciation des enquêteurs agissant sous le contrôle du juge ;
D'ou il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 8 novembre 2017 n° 17-82.537
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Le procureur général près la cour d'appel de Douai,
contre l'arrêt n° 393 de la chambre de l'instruction de ladite cour, en date du 17 mars 2017, qui, dans l'information suivie notamment contre la société Is Prestige du chef de blanchiment en bande organisée, a infirmé l'ordonnance du juge d'instruction prononçant la remise à l'agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués (AGRASC) d'un bien saisi ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 octobre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Germain, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller GERMAIN et les conclusions de M. l'avocat général SALOMON ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 99, alinéas 1, 2, 4 et 5, 99-2, alinéas 2 et 5, du code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;
Vu les articles 99 et 99-2 du code de procédure pénale ;
Attendu que l'exercice d'un recours contre une ordonnance de refus de restitution d'un bien saisi ne prive pas le juge d'instruction de la faculté d'ordonner sa remise, aux fins d'aliénation, à l'AGRASC dans les conditions du deuxième alinéa du second de ces textes ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure, que dans l'information suivie, notamment contre la société Is Prestige, mise en examen du chef de blanchiment en bande organisée, le juge d'instruction, par ordonnance du 4 novembre 2016, frappée d'appel, a ordonné la remise à l'AGRASC de plusieurs automobiles de luxe saisies, dont une de marque Bentley, dont cette société est propriétaire ; que ladite société a présenté, le 22 novembre 2016, une requête en restitution de cette voiture qui a été rejetée par ordonnance, également frappée d'appel, du juge d'instruction en date du 22 décembre suivant ;
Attendu que pour infirmer l'ordonnance de remise, la chambre de l'instruction retient que cette décision est devenue sans objet, l'ordonnance de rejet de la demande en restitution du véhicule étant infirmée et la restitution ordonnée par arrêt du même jour ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que l'ordonnance de remise à l'AGRASC était antérieure à la requête en restitution présentée, la chambre de l'instruction, qui devait se prononcer sur l'appel interjeté à l'encontre de la première de ces ordonnances au regard des dispositions de l'article 99-2, alinéa 2, du code de procédure pénale, sans tenir compte de sa décision statuant sur la restitution, a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 17 mars 2017, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 8 novembre 2017 n° 16-80.978
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Mme Christiane X... épouse Y..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AMIENS, en date du 19 janvier 2016, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre M. Z... du chef de faux en écriture publique et M. A... du chef de complicité et usage, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 septembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Zerbib, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de Mme le conseiller ZERBIB, les observations de la société civile professionnelle POTIER DE LA VARDE, BUK-LAMENT et ROBILLOT, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 441-1, 441-4 du code pénal, 85, 86, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre dans l'information suivie contre MM. Z... et A... ;
" aux motifs que le contentieux civil ayant opposé M. A... et Mme X... a pris fin par l'arrêt de la première chambre de la cour d'appel d'Amiens, en date du 13 septembre 2011, qui a constaté que M. A... ne produisait pas l'original du testament dont il se prévalait, et dit qu'il n'était pas fondé à rapporter la preuve du contenu de ce testament par tous moyens et notamment par photocopies, et l'a débouté de sa demande en délivrance de legs, et le pourvoi formé contre lui a été a été rejeté par la Cour de cassation le 20 mars 2013 ; que cet arrêt n'apporte pas d'éléments particuliers au litige à trancher par la chambre de l'instruction, faute de contenir des éléments factuels se rapportant à la véracité de l'acte reproché au notaire Z... ; que dans le cadre de ce litige, M. A... a produit diverses copies d'un testament olographe en date du 19 juillet 1995 dont il prétendait qu'il l'avait constitué légataire universel de Madeleine B... veuve X... et, dans l'impossibilité de produire l'original, a produit un document titré « acte contenant reconstitution de testament olographe » qu'il avait obtenu de M. Z..., notaire à Corbie ; que dans cet acte en date du 6 février 2006, le notaire Z... indiquait que Madeleine B... veuve X... était décédée en l'état d'un testament olographe en date du 19 juillet 1995 dont il indiquait le contenu, qu'il avait remis l'original de ce testament à M. A..., à sa demande, contre récépissé le 31 décembre 1997, celui-ci souhaitant charger M. C..., notaire à Amiens, du règlement de la succession ; que M. Z... constatait par ailleurs le dépôt en son étude, de 8 pièces ou groupes de pièces émanant de spécialistes ayant à un titre ou un autre connu des difficultés de la succession, qu'il annexait sous les n° 1 à 8 et dont il indiquait qu'ils lui étaient remis par M. A... et, il n'est pas soutenu et il ne résulte de rien que l'une de ces pièces serait susceptible de constituer un faux ; que l'acte se terminait par l'expression par le notaire de ce qu'il résultait de différentes pièces et documents une situation juridique qu'il décrivait ; qu'il ne s'agissait que de l'expression d'un avis technique portant sur ces pièces et il ne peut lui être reproché à ce titre d'avoir faussement indiqué avoir constaté quoi que ce soit ; que les interrogations quant à la valeur d'un tel acte n'ont pas d'intérêt particulier dans la procédure d'instruction, qui a cependant permis de vérifier que sa rédaction n'était pas explicitement prohibée et qu'il n'avait rien d'usuel ; que l'arrêt de la première chambre de la cour d'appel d'Amiens en date du 13 septembre 2011 a exprimé la valeur qu'il lui conférait dans le cadre de la succession ; qu'il n'est pas douteux non plus qu'en s'abstenant de dresser un procès verbal de dépôt puis d'inscrire le testament au fichier des dernières volontés lors de sa connaissance du décès de Madeleine B... veuve X..., M. Z... a commis ce qui constitue au moins une imprudence et qu'il a qualifié lui-même dans une audition d'indélicatesse ; mais que la seule question qui se pose à la juridiction d'instruction est de déterminer s'il existe des charges suffisantes pour renvoyer devant une juridiction de jugement le mis en examen pour avoir commis une altération de la vérité dans un écrit ayant pour objet ou pour effet d'établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques et éventuellement le témoin assisté après mise en examen pour en avoir fait usage et si l'instruction est bien complète et insusceptible de progresser ; qu'il s'agit ainsi de vérifier si en attestant avoir détenu en original le testament de Madeleine B... veuve X... daté du 19 juillet 1995 et l'avoir remis à M. A... à sa demande, contre récépissé le 31 décembre 1997, le notaire a altéré la vérité ; que sont annexées à l'acte critiqué deux copies du testament dont le notaire indique qu'elles lui sont remises par M. A... ; que l'une supporte le cachet de la mairie de Daours, la date du 30 décembre 1997, l'indication de ce qu'il s'agit d'une copie conforme et une signature et l'autre l'indication de ce que le document est remis à M. A... le 31 décembre 1997 ; que, contrairement à ce qui est soutenu par la partie civile, la différence de date n'a pas d'intérêt particulier et il est indifférent pour la constitution de l'infraction que la remise ait eu lieu au cours d'une unique rencontre entre le notaire et M. A... ou au terme de deux ; que toute investigation sur ce point est par ailleurs illusoire alors que tous ceux qui ont pu être au courant de la remise ont déjà été entendus et que l'éloignement dans le temps de la remise ne permet pas de témoignage utile ; que de même, il ne peut être tiré d'indication particulière de ce que la partie civile interprète comme un lapsus figurant sur une des copies sur laquelle M. A... aurait commencé par écrire au-dessus de sa signature que le testament avait été remis à Mme Christiane X... avant de se raviser et d'écrire son nom ; qu'il résulte d'ailleurs de l'expertise pratiquée que l'encre utilisée pour porter cette mention est différente de celle utilisée par le notaire pour en attester le dépôt même s'il n'a pas été possible par l'analyse de dater les mentions ; que plusieurs témoignages tendent à confirmer l'existence du testament, notamment ceux de M. C... qui se souvient l'avoir consulté et de M. D... qui travaillait à l'étude, peu important qu'il s'agisse d'un original ou de copies ; que surtout, le notaire ayant succédé à M. Z... a procuré la copie certifiée conforme du registre tenu dans l'étude sur lequel figure la mention du dépôt du testament et la salariée tenant le registre titré « DDE et Testaments », retraitée et déliée de toute subordination depuis de nombreuses années, a reconnu sur ce registre son écriture, a expliqué le fonctionnement du registre et notamment le fait que les enregistrements n'avaient pas forcément lieu dans l'ordre de la date des actes ; que l'apparition tardive dans l'instruction de ce document s'explique par ailleurs par le fait que M. Z... n'a participé à la procédure civile : qu'en rédigeant l'acte critiqué et que son attention sur la difficulté n'a été attirée que lors de sa comparution devant le juge d'instruction, n'ayant pas été expressément interrogé sur ce point lors de la procédure antérieure et qu'il a, dès qu'il a eu une connaissance précise des faits reprochés, produit les éléments ; que le fait que plusieurs collaborateurs de l'étude, qu'il s'agisse de M. D... ou de Mme E..., aient été amenés comme ils le déclarent à travailler sur l'acte critiqué, correspond peu à ce que peut être la discrétion nécessaire à la constitution d'un faux ; que près de 20 ans après la date de remise à M. A... du testament, telle qu'elle est attestée par M. Z..., les actes d'instruction demandés tels que nouvelles auditions et confrontations de personnes s'étant déjà exprimées, apparaissent illusoires et sans intérêt pour la recherche de la vérité ; qu'il en va de même des autres actes suggérés par la partie civile pour les motifs indiqués dans le précédent arrêt rendu par la chambre de l'instruction le 4 juillet 2014 ;
"1°) alors que tout arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision, la contradiction de motifs équivalant à leur absence ; qu'en retenant que l'arrêt de la 1ère chambre civile de la cour d'appel d'Amiens du 13 septembre 2011, qui a procédé à une analyse circonstanciée et méticuleuse de l'acte authentique du 6 février 2006 et des circonstances de sa rédaction et a notamment conclu à ce qu'il s'agissait d'un acte de complaisance et d'un montage frauduleux, n'apportait pas d'éléments particuliers au litige à trancher par la chambre de l'instruction, faute de contenir des éléments factuels se rapportant à la véracité de l'acte reproché au notaire M. Z..., la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une contradiction de motifs ;
"2°) alors qu'après avoir retenu qu'une des copies du testament du 19 juillet 1995 annexée à l'acte de reconstitution portait l'indication de ce que ce testament avait été remis à M. A... le 31 décembre 1997, ce dont il résultait qu'il ne pouvait pas avoir été en sa possession auparavant, la chambre de l'instruction, a néanmoins jugé qu'était sans intérêt particulier la circonstance qu'une autre copie de ce testament annexée à l'acte litigieux ait supporté la mention, apposée en mairie et datée du 30 décembre 1997, qu'il s'agissait d'une copie conforme à l'original, s'est contredite" ;
"3°) alors que tout arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision, l'insuffisance de motifs équivalant à leur absence ; qu'en se contentant, pour écarter la fausseté des indications du notaire dans l'acte du 6 février 2006, de retenir qu'il résulterait de divers témoignages et de l'existence d'un registre des testaments que le testament du 19 juillet 1995 avait bien existé, sans toutefois relever aucun élément de nature à accréditer l'affirmation dans l'acte de M. Z... d'une remise par ses soins de l'original de ce testament à M. A... le 31 décembre 1997, la chambre de l'instruction qui, comme elle l'avait elle-même relevé, était appelée à vérifier si le notaire avait altéré la vérité en attestant avoir, le 31 décembre 1997, remis à M. A... le testament du 19 juillet 1995, n'a pas légalement justifié sa décision ;
"4°) alors que le juge d'instruction saisi d'une plainte avec constitution de partie civile a le devoir d'examiner les faits dénoncés sous toutes les qualifications possibles ; qu'en retenant que la seule question qui se posait à la juridiction d'instruction était de déterminer s'il existait des charges suffisantes pour renvoyer devant une juridiction de jugement MM. Z... et A... pour avoir confectionné un faux et pour en avoir fait usage et en ayant examiné les faits dénoncés sous ces seules qualifications, la chambre de l'instruction, qui n'a pas examiné les autres qualifications possibles, notamment celle d'escroquerie au jugement, qui s'évinçait pourtant de l'arrêt civil du 13 septembre 2011, a violé les textes susvisés ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction, après avoir analysé l'ensemble des faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire produit par la partie civile appelante, a exposé, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, que l'information était complète et qu'il n'existait pas de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis le délit reproché, ni toute autre infraction ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 8 novembre 2017 n° 16-85.990
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
--- M. Guy X..., Mme Evelyne Y..., épouse X..., la société 3R2,
contre l'arrêt de la cour d'appel de DIJON, chambre correctionnelle, en date du 15 septembre 2016, qui a condamné, le premier, pour organisation frauduleuse d'insolvabilité, à huit mois d'emprisonnement avec sursis, la seconde, pour complicité, à trois mois d'emprisonnement avec sursis et la troisième, pour complicité, à 10 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 septembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Pichon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire PICHON, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, de la société civile professionnelle NICOLAŸ, DE LANOUVELLE et HANNOTIN, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, par un jugement du tribunal correctionnel de Tours du 10 juin 1993, M. X..., déclaré coupable d'abus de biens sociaux, a été définitivement condamné à payer la somme de 1 358 359, 36 francs à la société Hotelière des Bretonnières (SHDB), constituée partie civile, qu'à partir de l'année 2004, la société Sezz, venant aux droits de la SHDB, a fait pratiquer des saisies-attributions contre M. X...et que l'huissier n'a pu recouvrer qu'une somme d'environ 700 euros ; que, le 19 avril 2007, la société Sezz a porté plainte avec constitution de partie civile pour organisation frauduleuse de l'insolvabilité aux motifs notamment que M. X...avait poursuivi, en dépit de ses problèmes de santé, une carrière de restaurateur renommé sous l'enseigne " chez Guy ", exploitée par la société 3R2, et dont la gérante était son épouse, Mme Evelyne Y...; qu'à l'issue d'une information judiciaire, par une ordonnance du 8 octobre 2012, M. X..., son épouse et la société 3R2 ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel pour y être jugés du chef respectivement, pour le premier, d'organisation frauduleuse d'insolvabilité, pour avoir courant 2004, 2005 et 2006, en vue de se soustraire à l'exécution d'une condamnation patrimoniale définitive prononcée le 10 juin 1993 par le tribunal correctionnel de Tours, organisé ou aggravé son insolvabilité, " en l'espèce en renonçant volontairement à un emploi rémunéré au sein du restaurant " Chez Guy ", alors même qu'il y exerçait une activité réelle, et en versant l'intégralité de sa pension d'invalidité sur un compte bancaire de son épouse ", et pour les deux autres, de complicité de ce délit ; que le tribunal correctionnel de Dijon a rejeté le moyen pris de la prescription de l'action publique, déclaré les prévenus coupables des faits reprochés et prononcé sur les intérêts civils ; que les prévenus, le ministère public et la partie civile ont interjeté appel ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 406, 410, 416, 417, 460, 512, 513, 591 et 592 du code de procédure pénale ;
" en ce que, confirmant le jugement de première instance, la cour d'appel a déclaré M. X..., Mme Y..., épouse X..., et la société 3R2 coupables, pour le premier, d'organisation frauduleuse de l'insolvabilité et, pour les deux autres, de complicité de ce délit, les a, respectivement, condamnés à huit mois d'emprisonnement assortis d'un sursis, à trois mois d'emprisonnement assortis d'un sursis et à 10 000 euros d'amende et les a condamnés solidairement à payer 10 000 euros de dommages-intérêts à la société Sezz ;
" alors qu'en indiquant qu'à l'audience, tout d'abord, les trois prévenus n'avaient pas comparu mais, ensuite, que le président de chambre les y avait informés de leur droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui leur étaient posées ou de se taire, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction dans ses énonciations, source d'imprécision qui ne permet pas à la Cour de cassation de s'assurer de la régularité de la procédure " ;
Attendu que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que l'énonciation de l'arrêt attaqué portant mention que l'avis des droits a été donné aux prévenus résulte d'une erreur purement matérielle, dès lors qu'il ressort des autres énonciations de l'arrêt, complétées par les notes d'audience et les mandats donnés aux conseils des prévenus, que ces derniers étaient non comparants et représentés par leurs avocats ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 314-8 du code pénal, 6, 8, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que, rejetant le moyen soulevé de la prescription de l'action publique et confirmant le jugement de première instance, la cour d'appel a déclaré M. X..., Mme Y..., épouse X..., et la société 3R2 coupables, pour le premier, d'organisation frauduleuse de l'insolvabilité et, pour les deux autres, de complicité de ce délit, les a, respectivement, condamnés à huit mois d'emprisonnement assortis d'un sursis, à trois mois d'emprisonnement assortis d'un sursis et à 10 000 euros d'amende et les a condamnés solidairement à payer 10 000 euros de dommages-intérêts à la société Sezz ;
" aux motifs que le troisième alinéa de l'article 314-8 du code pénal dispose que la prescription de l'action publique ne court qu'à compter de la condamnation à l'exécution de laquelle le débiteur a voulu se soustraire ; que, toutefois elle ne court qu'à compter du dernier agissement ayant pour objet d'organiser ou d'aggraver l'insolvabilité du débiteur, lorsque le dernier agissement est postérieur à cette condamnation ; […] en l'espèce que si la condamnation de M. X...à payer à la société hôtelière des Bretonnières les sommes de 1 358 359, 36 Fr., de 85 000 Fr. et de 4 000 Fr. au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale remonte au 10 juin 1993, les actes imputés à celui-ci ainsi qu'à ses complices pour organiser son insolvabilité, à savoir dissimuler sa rémunération ainsi que son patrimoine, alors que son créancier exerçait des actes de poursuites (commandement de payer du 16 juillet 2004, tentative de saisie attribution du 3 août 2004, procès-verbal de commandement du 1er octobre 2004, avis de fin de contrat de travail de M. X...adressé le 22 mars 2005 par le tribunal d'instance de Dijon au mandataire de la partie civile, procès-verbal de saisie attribution du 25 novembre 2005, dénonciation de saisie attribution du 30 novembre 2005 et constat le 3 mars 2006 que le compte bancaire de M. X...est débiteur de 11 euros) aboutissant le 27 juin 2006 au constat par cet huissier poursuivant que ce débiteur a organisé son insolvabilité, sont bien postérieurs ; […] qu'il importe peu que la partie civile ait attendu de nombreuses années (près de 14 ans) avant d'engager à compter de 2004 des actes de poursuites ; que l'affirmation selon laquelle c'est à la date à laquelle la créance devient définitive que l'organisation frauduleuse d'insolvabilité doit s'apprécier n'est pas conforme aux dispositions précitées de l'article 314-8 quand le débiteur commet des agissements frauduleux se poursuivant postérieurement à la condamnation civile ; que s'agissant d'une infraction répétée, à savoir le fait pour M. X...d'avoir renoncé volontairement tous les mois à un emploi rémunéré et d'avoir reversé sa pension d'invalidité sur le compte bancaire de son épouse entre 2004 et 2006, agissements découverts par la partie civile et ses avocats début 2006, la prescription alléguée n'est pas acquise, conformément aux indications fournies par M. Z..., rapporteur de la loi, mentionnées par les avocats des appelants, si bien que le jugement déféré sera confirmé de ce chef ;
" alors que, si la prescription de l'action publique pour le délit d'organisation frauduleuse de l'insolvabilité ne court qu'à compter du dernier agissement ayant pour objet d'organiser ou d'aggraver l'insolvabilité du débiteur lorsque le dernier agissement est postérieur à cette condamnation, pour autant cette fixation d'un point de départ spécifique pour ce délit, infraction instantanée, exclut son report ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait donc considérer que la prescription n'était pas acquise quand pourtant les premiers des agissements d'organisation ou d'aggravation d'insolvabilité qui étaient imputés à M. X...se situaient en 2004, soit à une période postérieure de plus de dix ans au jugement de condamnation en date du 10 juin 1993 " ;
Attendu que, pour écarter l'exception de prescription prise de ce que les agissements frauduleux reprochés à M. X...remontent à 2004, soit plus de trois années après la condamnation sur intérêts civils, la cour d'appel retient que si la condamnation du prévenu à payer à la société SHDB remonte au 10 juin 1993, les actes imputés à celui-ci ainsi qu'à ses complices pour organiser son insolvabilité, à savoir dissimuler sa rémunération ainsi que son patrimoine, alors que son créancier exerçait des actes de poursuites aboutissant le 27 juin 2006 au constat par l'huissier que le débiteur a organisé son insolvabilité, sont bien postérieurs ; qu'elle relève également qu'il importe peu que la partie civile ait attendu de nombreuses années avant d'engager à compter de 2004 des actes de poursuites ; que les juges ajoutent que l'affirmation selon laquelle c'est à la date à laquelle la créance devient définitive que l'organisation frauduleuse d'insolvabilité doit s'apprécier n'est pas conforme aux dispositions de l'article 314-8 du code de procédure pénale quand le débiteur commet des agissements frauduleux se poursuivant postérieurement à la condamnation civile ; qu'ils concluent que, s'agissant d'une infraction répétée, à savoir le fait pour M. X...d'avoir renoncé volontairement tous les mois à un emploi rémunéré et d'avoir reversé sa pension d'invalidité sur le compte bancaire de son épouse entre 2004 et 2006, agissements découverts par la partie civile et ses conseils début 2006, la prescription alléguée n'est pas acquise ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, abstraction faite des motifs inopérants relatifs à la date de découverte des agissements frauduleux par le créancier, et dès lors que, lorsque les agissements ayant pour objet d'organiser ou d'aggraver l'insolvabilité du débiteur ont été commis postérieurement à la condamnation à l'exécution de laquelle celui-ci a voulu se soustraire, le point de départ de la prescription du délit d'organisation frauduleuse d'insolvabilité, spécifiquement fixé par l'article 314-8, alinéa 3, du code de procédure pénale, qui n'est pas modifié par la loi n° 2017-242 du 27 février 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale, est constitué par la date du dernier agissement, et non par la date de la condamnation patrimoniale, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Qu'ainsi, le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-2, 131-37, 131-38, 314-7, 314-8 du code pénal, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que, confirmant le jugement de première instance, la cour d'appel a déclaré M. X..., Mme Y..., épouse X..., et la société 3R2 coupables, pour le premier, d'organisation frauduleuse de l'insolvabilité et, pour les deux autres, de complicité de ce délit, les a, respectivement, condamnés à huit mois d'emprisonnement assortis d'un sursis, à trois mois d'emprisonnement assortis d'un sursis et à 10 000 euros d'amende et les a condamnés solidairement à payer 10 000 euros de dommages-intérêts à la société Sezz ;
" aux motifs que sur l'organisation frauduleuse d'insolvabilité imputée à M. Guy X...: qu'il résulte de l'expertise réalisée par Mme Irène A..., professeur, que si M. Guy X...a souffert de difficultés cardiaques à compter de la fin de l'année 2000, celui-ci a néanmoins pu reprendre en 2003, bien qu'il soit travailleur handicapé, à temps partiel son activité de chef de cuisine dans le restaurant « chez Guy » exploité par la société 3R2 ; qu'en février 2004 M. Guy X..., qui a été mis en invalidité deuxième catégorie par la caisse primaire d'assurance-maladie de Côte-d'Or, a été à nouveau victime de problèmes cardiaques nécessitant son hospitalisation à plusieurs reprises au cours de ladite année ; […] que selon l'expertise précitée l'état de santé de M. Guy X...a été moins alarmant en 2005 et 2006 ; qu'en outre l'information a permis d'établir que celui-ci a conservé une activité certaine, non certes de chef dans cet établissement, mais de gestion et de promotion du restaurant « chez Guy » ; qu'en effet Mme B..., épouse C..., inspecteur à l'URSSAF de Dijon, a rapporté qu'à l'occasion d'un contrôle réalisé en 2006 elle avait rencontré Mme Y..., gérante en titre de l'établissement, mais que suite à une procédure de redressement elle avait reçu à plusieurs reprises des communications téléphoniques de M. Guy X...ainsi qu'un courrier de sa part daté du 30 novembre 2006 ; que M. D..., directeur de l'agence de la lyonnaise de banque à Nuits-Saint-Georges, a expliqué que concernant les comptes de la société 3R2 « l'interlocuteur privilégié et stratégique est M. Guy X.... Je m'explique lors des entretiens sur le restaurant, c'est lui-même qui me présente les tableaux de bord, qui définit la stratégie de l'affaire et qui négocie l'activité commerciale du restaurant. Par exemple je négocie avec lui les autorisations et le taux de découvert autorisé du compte ou également le taux de commission du terminal de paiement électronique » ; que concernant Mme Evelyne Y..., épouse X..., ce témoin a précisé : « je l'ai souvent vu en compagnie de son mari au restaurant et essentiellement pour signer les documents. Je sens bien qu'elle n'a pas de pouvoir de décision. M. Guy X...m'a expliqué que le patrimoine, le restaurant sont au nom de sa femme en raison de son état de santé fragile » ; […] que M. E..., responsable du secteur professionnel du crédit mutuel à Dijon, a indiqué : « c'est Mme Evelyne Y..., qui est gérante du restaurant mais les informations commerciales et financières de l'établissement sont réglées par M. Guy X.... Les négociations de facilité de caisse sont traitées avec M. Guy X...ainsi que les demandes de financement. Actuellement il reste un prêt en cours pour des travaux de réhabilitation négocié par M. X...et signé par madame » ; […] que M. Yves X..., fils du mis en examen, qui est chef de cuisine du restaurant « chez Guy » depuis 2003, a indiqué que cela arrive à son père de réceptionner les clients et de donner des instructions aux serveurs ; que Mme F..., chef de rang dans ce restaurant, a précisé que Guy X...« donne des instructions aux serveurs, il installe les clients, il salue les clients... Oui, c'est le patron, oui », précisant à propos de son embauche : « j'ai eu un entretien avec M. Guy X...... Durant l'entretien je n'ai eu affaire qu'à M. Guy X.... A l'issue de l'entretien M. Guy X...m'a dit qu'il me recontactera dès qu'il aura besoin de quelqu'un. Quelques semaines après, il m'a recontacté pour me demander un nouvel entretien pour qu'on se rencontre. Je me suis entretenu avec M. Guy X...et on a discuté des conditions d'embauche, des heures de travail, du salaire... » ; que Mme G..., second de cuisine, a expliqué que « lors de mon entretien (d'embauche) à l'issue de mon appel téléphonique, c'est M. Guy X...qui m'a embauché. Nous avons parlé des modalités de l'embauche, des salaires, des vacances, des repos... Il s'agit d'un patron, qui me donne des conseils, lorsque les choses ne vont pas... Pour moi, je le vois souvent au bureau. Je pense qu'il gère plus les papiers et l'administratif. Lorsque j'ai un problème avec un fournisseur et que son fils n'est pas là, je vois directement avec monsieur X...pour qu'il appelle le fournisseur ou il me donne les directives pour que j'appelle » ; que M. Yan H..., chef de rang, a précisé à propos de son embauche : « peu de temps après, c'est monsieur Guy X..., qui m'a retéléphoné pour convenir d'un rendez-vous... Lors de notre entrevue monsieur X...m'a dit que je pouvais commencer fin mai et j'ai dû signer le contrat une semaine après avoir commencé... Pour moi il s'occupe du côté administratif et de la paperasse. Le côté service ou cuisine, il ne s'en occupe plus. A l'occasion du service, lorsqu'il est présent et que quelque chose ne va pas, il n'hésite pas à donner des conseils ou des instructions. De même lorsqu'il est présent, il lui arrive d'installer des clients en salle » ; que les gendarmes de la brigade de Gevrey-Chambertin ont effectué entre fin juillet et fin novembre 2007 de nombreuses surveillances du restaurant ainsi que du domicile des époux X...-Y...et ont constaté la présence assez régulière autant de Guy X...que de son épouse au restaurant « chez Guy » ; […] que dans le quotidien régional « le bien public » du samedi 3 novembre 2007 figure un article intitulé « chez Guy : une toque dans le Gault et Millau 2008 », dans lequel M. Guy X...déclare notamment : « c'est la première fois que j'en obtiens une pour cet établissement, que j'ai ouvert en 1999. Ce classement nous permet d'entrer dans un cercle fermé... » ; que dans l'hebdomadaire économique de la Côte-d'Or « Eco plus » du 15 novembre 2007 figure un article sur ce restaurant, dans lequel il est indiqué « s'il a un peu lâché la bride, Guy X...est toujours le chef d'orchestre incontesté de l'affaire, laissant à son fils Yves le piano et la responsabilité de gérer le restaurant... Avec près de 700 appellations en cave, du vin de propriétaire aux millésimes les plus rares, M. Guy X...sélectionne ses nectars et entretient la culture des meilleurs vins » ; […] que le quotidien « le bien public » du 16 novembre 2009 contient un article intitulé « M. Guy X...fait partie des grandes gueules de la cuisine française », dans lequel celui-ci évoque la TVA à 5, 50 % : « le chef s'emballe. Non arrêtez avec ça ! Les gens disent que les prix n'ont pas baissé. Mais c'est faux ! Et puis la TVA a aussi été baissée pour aider la trésorerie des restaurateurs. Grâce à cette directive on a pu embaucher un sommelier et augmenter tous les salaires de 8 % » ; que l'ensemble de ces éléments établit à suffisance que M. Guy X...a continué à exercer une activité professionnelle non négligeable dans le restaurant « chez Guy », alors que la société 3R2 ne le rémunérait pas officiellement ; que le fait pour le débiteur de renoncer volontairement à un salaire, ce qui a pour résultat de diminuer l'actif de son patrimoine, entre dans les prévisions de l'article 314-7 du code pénal ; […] qu'il résulte des diligences réalisées par les enquêteurs sur commission rogatoire que la pension versée mensuellement à M. Guy X...en 2005 et en 2006 sur son compte ouvert au crédit mutuel de Dijon Darcy faisait l'objet d'un virement sur le compte de son épouse, si bien que le compte n° ... de M. Guy X...n'était jamais créditeur de plus d'une dizaine d'euros et que ses créanciers n'ont pu en conséquence exercer des saisies sur ce compte ; […] qu'ainsi la culpabilité de M. Guy X...sera confirmée ainsi que la peine de huit mois d'emprisonnement avec sursis adaptée tant à la personnalité du mis en examen qu'à la gravité des faits ; que sur la complicité reprochée à Mme Y..., épouse X..., et à la société 3R2 […] ainsi qu'en acceptant que M. Guy X...exerce une activité professionnelle non négligeable dans le restaurant « chez Guy » sans que celui-ci soit rémunéré, alors qu'il faisait l'objet de poursuites de la part de la société civile professionnelle Bernard et Hubert Labbé, huissiers associés à Dijon, qui s'est rendu dans les établissements, où travaillait M. Guy X...à Gevrey-Chambertin, la société 3R2, qui l'employait, et Mme Y...épouse X..., sa gérante, ont permis à celui-ci d'organiser son insolvabilité par cette renonciation volontaire à tout revenu et donc à tout patrimoine présent et à venir ; qu'ainsi la complicité d'organisation frauduleuse d'insolvabilité reprochée tant à Mme Y...épouse X...qu'à la société 3R2 est établie ; que les sanctions infligées par les premiers juges correspondent à la gravité des faits ainsi qu'à la personnalité des mis en examen ;
" 1°) alors que le délit d'organisation frauduleuse de l'insolvabilité nécessitant un élément intentionnel, l'infraction n'est caractérisée que si la preuve d'une intention frauduleuse est rapportée ; qu'en l'espèce, en ne recherchant pas si l'absence d'une telle intention ne s'évinçait pas de l'absence de concomitance entre la cessation de toute activité professionnelle par M. X..., imposée par une lourde pathologie, le 9 janvier 2004 et la première tentative de recouvrement de créance intervenue le 16 juillet 2004, soit plus de six mois plus tard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 2°) alors que le délit d'organisation frauduleuse de l'insolvabilité consiste pour une personne à augmenter le passif ou à diminuer l'actif de son patrimoine ; qu'en l'espèce, en fondant sa décision sur la circonstance selon laquelle M. X..., qui, pour raisons de santé, avait été placé en incapacité mais continuait à assurer une certaine présence dans l'entreprise familiale où il exerçait occasionnellement quelques activités d'ordre administratif en bénévolat, aurait pu régulariser un contrat de travail pour rémunérer celles-ci mais y avait renoncé, la cour d'appel, qui s'est ainsi bornée à lui reprocher de s'être abstenu de jouir pleinement d'un système salarial qui aurait, éventuellement, pu être mis en place à son profit, et non pas d'avoir augmenté le passif ou diminué l'actif de son patrimoine, n'a pas caractérisé le délit en ses éléments constitutifs ;
" 3°) alors qu'enfin, pour de graves raisons de santé, M. X..., après avoir eu le statut de travailleur handicapé, avait été placé en invalidité par la caisse de sécurité sociale, circonstances qui, en tant que telles, justifiait qu'il ne travaille pas ; que, dès lors, en fondant sa décision – au demeurant, à partir d'une lecture tronquée du rapport d'expertise médicale – sur le fait qu'il exerçait encore tout de même certaines activités bénévolement au sein de l'entreprise familiale pour en conclure qu'il possédait donc encore certaines dispositions pour travailler, de sorte que c'est fautivement qu'il n'aurait pas régularisé un contrat de travail et perçu un salaire, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'infraction d'organisation frauduleuse de son insolvabilité dans le chef de M. X..." ;
Attendu que, pour confirmer le jugement sur la déclaration de culpabilité du chef d'organisation frauduleuse d'insolvabilité, la cour d'appel retient notamment que la pension versée mensuellement à M. X...en 2005 et en 2006 sur son compte ouvert faisait l'objet d'un virement sur le compte de son épouse, si bien que le compte de M. X...n'était jamais créditeur de plus d'une dizaine d'euros et que ses créanciers n'ont pu en conséquence exercer des saisies sur ce compte ;
Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, qui ne sont pas critiquées par le moyen, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Que, dès lors, le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 2 000 euros la somme globale que M. Guy X..., Mme Evelyne Y...épouse X...et la société 3R2 devront payer à la société Sezz au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 7 novembre 2017 n° 17-80.831 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Daniel X...,
contre l'arrêt n° 763 de la cour d'appel d'ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 13 décembre 2016, qui, pour excès de vitesse, l'a déclaré pécuniairement redevable de dix-huit amendes de 300 euros ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 septembre 2017 où étaient présents : M. Soulard, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, Mme Dreifuss-Netter, M. Fossier, Mmes Schneider, Ingall-Montagnier, Farrenq-Nési, M. Lavielle, conseillers de la chambre, Mmes Harel-Dutirou, Guého, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Lemoine ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller BELLENGER, les observations de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et BOUCARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 121-3 du code de la route, 132-16-7 du code pénal, 460 et 512 du code de procédure pénale, 591 et 593 du même code ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Daniel X...pécuniairement redevable et tenu au paiement d'une amende civile d'un montant de trois cents euros par contravention, par application de l'article R. 413-14, § 1, du code de la route ;
" aux motifs qu'il apparaît que n'ont pu être identifiés :- les conducteurs des véhicules ayant fait l'objet des procès-verbaux n° 3590365386 du 04/ 03/ 2015, n° 3518319415 du 10/ 04/ 2015, n° 3591031405 du 14/ 04/ 2015, n° 3579354485 du 24/ 04/ 2015, n° 3563231815 du 27/ 04/ 2015, n° 3529406815 du 05/ 05/ 2015, n° 3537932825 du 10/ 05/ 2015, n° 3521319635 du 28/ 07/ 2015, n° 3527806395 du 27/ 08/ 2015, n° 3560725775 du 16/ 05/ 2015 dont M. Y...était locataire au moment des faits,- les conducteurs des véhicules ayant fait l'objet des procès-verbaux en date du 08/ 01/ 2015 n° 3527564085 à l'encontre du véhicule immatriculé ..., du 27/ 02/ 2015 n° 3561199346 à l'encontre du véhicule immatriculé ..., du 24/ 04/ 2015 n° 35584300495 à l'encontre du véhicule immatriculé ..., du 28/ 05/ 2015 n° 3534924475 à l'encontre du véhicule immatriculé ..., du 18/ 06/ 2015 n° 3571709035 à l'encontre du véhicule immatriculé ..., du 07/ 07/ 2015 n° 3566728265 à l'encontre du véhicule immatriculé ..., du 10/ 07/ 2015 n° 3541556235 à l'encontre du véhicule immatriculé ..., du 27/ 08/ 2015 n° 3526658395 à l'encontre du véhicule immatriculé ..., ces huit véhicules étant détenus par M. Y...; qu'aux termes des dispositions de l'article 121-3 alinéa 3 du code de la route, " lorsque le certificat d'immatriculation du véhicule est établi au nom d'une personne morale, la responsabilité prévue au premier alinéa incombe, sous les réserves prévues au premier alinéa de l'article 121-2, au représentant légal de cette personne morale " ; que de même, aux termes de l'article 121-3 alinéa 4, " lorsque le véhicule était loué à un tiers, la responsabilité pécuniaire prévue au premier alinéa incombe au locataire sous les réserves prévues au premier alinéa de l'article L. 121-2. ; que M. X...est de façon établie et non contestée, le représentant légal de la SARL Y..., d'une part au nom de laquelle sont immatriculés les huit véhicules précités, d'autre part locataire des six véhicules précités, tous impliqués dans les infractions relevées ; que le prévenu ne présentant aucun élément de preuve de la nature de celles qui sont exigées par l'article 537 du code de procédure pénale et n'établissant pas conformément premier alinéa de l'article L. 121-2 " l'existence d'un événement de force majeure ou qu'il ne fournisse des renseignements permettant d'identifier l'auteur véritable de l'infraction ", il conviendra, en application de l'article L. 121-3 du code de la route de le déclarer redevable pécuniairement de l'amende encourue pour chacune des trois contraventions susvisées ; qu'il conviendra dès lors de confirmer de ce chef le jugement déféré ; que le caractère réitéré des infractions établit un mépris manifeste de la sécurité routière et des règles posées par le code de la route, justement sanctionné par le montant des amendes fixé par le premier juge ; qu'il conviendra dès lors de confirmer de ce chef le jugement déféré ;
" 1°) alors que le prévenu ou son avocat doivent toujours avoir la parole les derniers ; que cette règle, qui domine tout débat pénal, concerne toutes les procédures intéressant la défense et se terminant par un jugement ou un arrêt ; qu'il en est ainsi devant la cour d'appel statuant en matière contraventionnelle ; qu'en l'espèce, il résulte des mentions de l'arrêt que, lors de l'audience du 25 octobre 2016 ayant donné lieu à la décision attaquée, le conseil de M. X...n'a pas eu la parole en dernier ; que, dès lors, il a été statué en violation des articles 460 et 512 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6, § 1, de la convention européenne des droits de l'homme ;
" 2°) alors que conformément l'article L. 121-3 du code de la route, le titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule est redevable pécuniairement de l'amende encourue pour des infractions d'excès de vitesse, mais n'est pas pénalement responsable de ces infractions ; que dès lors, en justifiant le montant des amendes fixé par le tribunal par « le mépris manifeste de la sécurité routière » que « le caractère réitéré des infractions » établirait, la cour d'appel a violé l'article susvisé, ensemble de l'article 132-16-7 du code pénal ;
" 3°) alors que, après avoir constaté que les conducteurs des véhicules ayant fait l'objet des procès-verbaux n'ont pu être identifiés, la cour ne pouvait sans se contredire affirmer que « le caractère réitéré des infractions établit un mépris manifeste de la sécurité routière et des règles posées par le code de la route, justement sanctionné par le montant des amendes fixé par le premier juge » ;
Vu l'article 513, alinéa 4, du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ce texte, le prévenu ou son avocat auront toujours la parole les derniers ; que cette règle s'applique également à la personne redevable pécuniairement d'une amende ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le prévenu n'a pas comparu devant la cour d'appel mais que son avocat a été entendu en sa plaidoirie, sans qu'il ressorte desdites mentions qu'il ait eu la parole le dernier ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Angers, en date du 13 décembre 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rennes à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Angers, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 7 novembre 2017 n° 17-81.220
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Ludovic X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'ANGERS, chambre correctionnelle, en date du 17 janvier 2017, qui, pour conduite en état alcoolique, l'a condamné à 800 euros d'amende, 6 mois de suspension du permis de conduire et a prononcé une mesure de confiscation ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 septembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Fossier, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller FOSSIER et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure, que M. X... a été interpellé et placé en garde à vue par les services de police le 24 mars 2015 à 23 heures 40 ; que les policiers ayant constaté son état d'ébriété, une vérification de son alcoolémie a été effectuée à 0 heure 05 et que M. X... a été placé en cellule de dégrisement ; que ses droits de personne gardée à vue lui ont été notifiés le 25 mars 2015, soit le lendemain, à 7 heures 15 ; que M. X... a été cité devant le tribunal correctionnel d'Angers pour conduite d'un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique ; que par un jugement dudit tribunal, en date du 7 janvier 2016, les exceptions de nullité tirées de la tardiveté de la notification des droits de gardé à vue, et du défaut d'homologation de l'éthylomètre, ont été rejetées et le prévenu a été déclaré coupable des faits qui lui étaient reprochés et condamné ; qu'il a relevé appel, de même que le ministère public ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 234-4, L. 234-5 et R. 234-4 du code de la route, 63-1, 593 et 802 du code de procédure pénale ;
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité tirée de la tardiveté de la notification des droits de gardé à vue et de la tardiveté de la vérification par éthylomètre de l'état alcoolique, la cour d'appel retient que la notification des droits est intervenue à 7 heures 15, heure à laquelle M. X... avait retrouvé sa conscience ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'elle a apprécié, à partir des procès-verbaux, sans insuffisance ni contradiction, l'heure à laquelle a pris fin la circonstance insurmontable ayant retardé la notification des droits, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, nouveau en sa seconde branche et mélangé de fait et comme tel irrecevable, ne saurait être admis ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 234-4, L. 234-5 et R. 234-4 du code de la route, 6-1 et 6-3- a de la Convention européenne des droits de l'homme, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que, pour retenir la culpabilité du prévenu du chef de conduite en état alcoolique mesuré par éthylomètre, la cour d'appel, par motifs adoptés, expose que ledit éthylomètre était en fonctionnement régulier et que les faits sont suffisamment établis par les constatations des procès-verbaux, les constatations matérielles et techniques des enquêteurs, les résultats des investigations techniques et les aveux du prévenu ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas procédé à la requalification alléguée, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être rejeté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6-1 et 6-3- a et-b de la Convention européenne des droits de l'homme, 388, 485, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que le moyen qui ne précise pas les scellés dont il conteste la confiscation ni les droits du demandeur sur ceux-ci ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 7 novembre 2017 n° 16-87.303
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Driss X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 22 novembre 2016, qui, pour infractions au code de l'urbanisme, l'a condamné à 5 000 euros d'amende avec sursis et a ordonné la remise en état des lieux sous astreinte ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 septembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Guého, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GUÉHO, les observations de la société civile professionnelle ROUSSEAU et TAPIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que le 1er mars 2011, M. Driss Y... a acquis une parcelle de terrain sur laquelle était édifiée une maison d'habitation ; que le 27 novembre 2012, un agent assermenté de la direction départementale des territoires et de la mer y a constaté la construction en cours d'une maison individuelle d'une surface d'emprise au sol de 157 m2, d'une terrasse de 27 m² et d'un local en dur de 19 m², et ce sans autorisation ; que M. Y... a été poursuivi notamment pour exécution de travaux non autorisés par un permis de construire ; que le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable, l'a condamné à 5 000 euros d'amende dont 2 500 euros avec sursis et a ordonné la remise en état des lieux par la démolition des constructions irrégulières, sous astreinte ; que le prévenu et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 111-3, L. 160-1, L. 421-4 du code de l'urbanisme, 122-7 du code pénal, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Driss X... coupable d'exécution de travaux non autorisés par un permis de construire, l'a condamné à une amende de 5 000 euros avec sursis et à la remise des lieux en l'état par la démolition des constructions irrégulières ;
" aux motifs que M. X... et son épouse avaient acquis, le 1er mars 2011, une maison construite irrégulièrement ; que l'acte de vente précisait en effet que le vendeur, M. François Z..., avait édifié la maison dans les années 1986-1987 sans permis de construire, mais qu'il n'avait jusqu'à ce jour reçu aucune assignation de la commune de Puget-sur-Argens ordonnant une remise en état ; que le prévenu reconnaissait avoir reconstruit la maison sans permis mais affirmait que la situation était régularisable, ayant un droit acquis à la reconstruction du fait de la régularisation de la précédente construction ; qu'il ressortait de l'acte de vente que M. Z... ne tenait pas la maison de son père mais de M. A..., de sorte qu'il n'était pas établi que le terrain et la construction visés dans l'arrêt du 24 novembre 1994 n'ayant pas ordonné la destruction de la maison construite sans permis étaient les mêmes que ceux acquis par M. X... ; qu'en tout état de cause, le fait que la démolition n'ait pas été ordonnée par l'arrêt rendu en 1994 ne pouvait avoir pour effet de rendre la construction régulière ; que M. X... avait été parfaitement informé lors de l'achat de son bien que la maison vendue se trouvait en zone inondable, qu'elle avait été édifiée sans permis et qu'il ne pouvait ni l'agrandir ni la reconstruire, même si elle était détruite à la suite d'un sinistre ; que par conséquent, M. X... savait que s'il démolissait la maison en vue de la reconstruire, il ne pouvait en aucun cas obtenir de permis de construire ; qu'il s'était néanmoins rapproché des services d'urbanisme de la commune qui lui avaient logiquement confirmé leur refus de lui accorder le permis de construire ; qu'en reconstruisant une nouvelle maison sans aucune autorisation et en édifiant une clôture en aggloméré dans une zone où les clôtures devaient être composées d'une haie vive et d'un grillage, M. X... s'était volontairement rendu coupable d'exécution de travaux non autorisés par un permis de construire, d'exécution irrégulière de travaux soumis à déclaration préalable et d'infraction aux dispositions du plan local d'urbanisme ;
" 1°) alors que la prescription de l'action publique ôte aux faits poursuivis tout caractère délictueux ; qu'en retenant M. X... dans les liens de la prévention quand, en raison de la prescription, le bâtiment édifié en 1986-1987 devait être considéré comme implanté régulièrement, ce qui lui donnait le droit de reconstruire à l'identique le bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire en vertu de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
" 2°) alors que n'est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien ; qu'à défaut d'avoir recherché, comme elle y était invitée, si M. X... ne s'était pas trouvé dans l'obligation, pour reloger sa famille, de procéder aux travaux qui s'imposaient pour rendre à nouveau habitable le logement qu'il occupait avec son épouse et ses enfants, à la suite de la catastrophe naturelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'exécution de travaux non autorisés par un permis de construire et écarter son argumentation selon laquelle il bénéficiait d'un droit acquis à la reconstruction de la maison après le sinistre dont elle avait fait l'objet, l'arrêt attaqué retient notamment que M. Y... s'est rapproché des services de l'urbanisme de la commune qui ont refusé de lui accorder un permis de construire, de sorte qu'en reconstruisant une nouvelle maison sans aucune autorisation, il s'est volontairement rendu coupable d'exécution de travaux non autorisés par un permis de construire ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que, en cas de reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre, dans les conditions prévues par l'article L. 111-3, devenu L. 111-15, du code de l'urbanisme, l'obtention préalable d'un permis de construire est exigée, afin notamment de permettre le contrôle du projet avec les documents administratifs du bâtiment démoli, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, nouveau, mélangé de fait et, comme tel, irrecevable en sa seconde branche, est inopérant ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 480-4, L. 480-5 du code de l'urbanisme, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise en état des lieux par la démolition des constructions irrégulières dans un délai d'un an ;
" aux motifs que la situation de la construction n'était pas régularisable, tant en raison de sa situation illégale antérieure, qu'en application des dispositions du plan d'occupation des sols applicables lors de l'acquisition ou en application des nouvelles dispositions du plan local d'urbanisme adopté par la commune ;
" alors que la prescription de l'action publique ôte aux faits poursuivis tout caractère délictueux ; qu'en considérant que la situation de la construction n'était pas régularisable en raison de sa situation illégale antérieure et en application des nouvelles dispositions du plan local d'urbanisme adopté par la commune quand, en raison de la prescription de l'action publique, le bâtiment édifié en 1986-1987 devait être considéré comme implanté régulièrement, ce qui donnait le droit au prévenu de reconstruire à l'identique le bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire en vertu de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu que, pour ordonner la remise en état des lieux par la démolition des constructions irrégulières, sous astreinte, l'arrêt, après avoir relevé que l'acte notarié précisait que le terrain se trouvait en zone INC a du plan d'occupation des sols et dans le périmètre du plan de prévention des risques d'inondation, ce qui interdisait tout agrandissement et toute reconstruction en cas de destruction par sinistre, retient que l'adoption du nouveau plan local d'urbanisme par la commune n'a pas modifié la situation juridique de la parcelle appartenant à M. Y... qui reste située dans le périmètre du plan de prévention des risques d'inondation et qui est classée dorénavant en zone N (secteur à protéger) ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que l'article L. 111-3 devenu L. 111-15 du code de l'urbanisme autorise, nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, la reconstruction à l'identique d'un bâtiment régulièrement édifié qui est détruit ou démoli depuis moins de dix ans, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen est inopérant ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 7 novembre 2017 n° 16-83.232
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- La société MAAF assurances, partie intervenante
contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBÉRY, chambre correctionnelle, en date du 16 mars 2016, qui, dans la procédure suivie contre la société Cyla et la société Gocdu pour blessures involontaires, les a condamné chacune à 10 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 septembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Lavielle, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller LAVIELLE, les observations de Me LE PRADO, de Me BALAT, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 113-9 du code des assurances, 385-1, 388-3, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a donné acte à la société MAAF assurances de son intervention volontaire ès qualité d'assureur multi professionnelle de la société Gocdu et lui a déclaré sa décision opposable sur les intérêts civils sans qu'il y ait lieu à application de la règle proportionnelle de l'article L. 113-9 du code des assurances ;
"aux motifs qu'il y a de même lieu à confirmation du rejet de l'exception de garantie soulevée par la société MAAF assurances en sa qualité d'assureur de la société Gocdu TMG, alors que le contrat d'assurance multirisques professionnels souscrit par cette dernière comprend une convention spéciale n° 5 la garantissant, dans le cadre de ses activités professionnelles déclarées aux conditions particulières lors d'un sinistre, pour les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qu'elle encourt en raison notamment des réclamations relatives à des dommages corporels subis par un tiers tant pendant l'exercice de ses activités qu'après réception de ses travaux ; que la décision rendue sur intérêts civils lui est dès lors opposable, conformément à l'article 388-3 du code de procédure pénale et il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article L.113-3 du code des assurances s'agissant d'un dommage causé à un tiers sans lien avec le nombre de salariés déclarés ;
"et aux motifs, à les supposer adoptés, que la garantie de la société MAAF assurances, appelée en cause par M. Cédric X... par acte en date du 4 septembre 2014 en application de l'article 388-3 du code de procédure pénale et intervenante volontaire es qualités d'assureur de la société Gocdu est susceptible d'être recherchée, à défaut d'exclusion de garantie manifeste ou de nullité du contrat d'assurance garantissant la responsabilité multi-professionnelle de la société Gocdu ; qu'il convient donc de rejeter l'exception de ce chef ; (…) que, sur la garantie de la société MAAF assurances ; que s'agissant enfin de la garantie de la société MAAF assurances, si l'assureur ne peut être condamné par le juge correctionnel, le jugement peut lui être déclaré opposable, en application de l'article 388-3 du code de procédure pénale, dès lors que sa garantie est acquise en l'absence de toute nullité du contrat d'assurance, de mise hors de cause ou d'exclusion de garantie ; qu'en l'espèce, la garantie de la société maaf assurances ne peut être recherchée en qualité d'assureur de la société civile immobilière Cyla dont elle n'est pas l'assureur, non plus qu'au titre de l'assurance professionnelle de M. X... qui est renvoyé des fins de la poursuite du chef de blessures involontaires ; qu'en revanche, aucune clause du contrat d'assurance multirisques professionnels de la société Gocdu n'exclut la garantie des dommages accidentels causés aux tiers, pas même au titre des exclusions générales de garantie de l'article 15 du contrat, de sorte que la garantie de la société MAAF assurances est acquise aux termes de la convention spéciale n° 5, page 27, des conditions particulières du contrat d'assurance ; qu'enfin, non seulement la règle proportionnelle de l'article L. 113-3 du code des assurances ne peut être opposée à la victime mais elle ne peut trouver application, à l'égard de l'assuré, à un dommage causé aux tiers qui ne dépend aucunement du nombre de salariés déclarés ; qu'il convient donc de rejeter le moyen de limitation de garantie de ce chef et de déclarer le présent jugement opposable à la société MAAF assurances es qualités d'assureur mutlipro de la société Gocdu ;
"1°) alors que l'intervention de l'assureur devant la juridiction pénale a pour seul objet de lui rendre opposable la décision sur les intérêts civils, le juge pénal ne pouvant se prononcer que sur les seules exceptions de nature à exonérer totalement l'assureur de son obligation de garantie à l'égard des tiers ; qu'en décidant toutefois, après avoir déclaré opposable à la société MAAF assurances sa décision sur les intérêts civils, qu'il n'y avait pas lieu à application de la règle proportionnelle de l'article L. 113-9 du code des assurances régissant les conséquences de l'omission ou la déclaration inexacte de l'assuré dont la mauvaise foi n'a pas été établie, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;
"2°) alors et subsidiairement que la réduction proportionnelle de garantie consécutive à une omission ou une déclaration inexacte non intentionnelle de l'assuré est, sauf disposition contraire, opposable au tiers lésé ou ses ayants-droit ; que l'inopposabilité aux victimes de cette réduction proportionnelle d'indemnité ne concerne que le contrat visé par cette règle ; qu'en estimant toutefois que la société MAAF assurances ne pouvait opposer au tiers une réduction proportionnelle de garantie prévue à l'article L. 113-9 du code des assurances quand bien même aucune disposition n'écarte son application en cas de dommage intervenu sur un chantier, la cour d'appel a violé le texte susvisé" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt et des pièces de procédure, qu'à la suite de l'accident survenu le 23 juillet 2011, sur un chantier d'extension d'un atelier de menuiserie ébénisterie et de ses conséquences dommageables pour M. Nurettin Y..., ont été poursuivis pour blessures involontaires, notamment, la société Gocdu Tmg, la société Cyla, la société MAAF, assureur de la société Gocdu Tmg, intervenant volontairement à la procédure ; que, par jugement du 2 mars 2015, le tribunal correctionnel a en particulier condamné la société Cyla et la société Gocdu Tmg pour blessures involontaires par personne morale suivies d'une incapacité supérieure à trois mois et donné acte à la société MAAF assurances de son intervention volontaire ès-qualités d'assureur mutIipro de la société Gocdu Tmg, lui déclarant le jugement opposable sur intérêts civils, en application de l'article 388-3 du code de procédure pénale, sans qu'il y ait lieu à application de la règle proportionnelle de l'article L. 113-9 du code des assurances ; que la société Cyla, la société Gocdu Tmg, le procureur de la République et la société MAAF assurances ont interjeté appel de ce jugement ;
Attendu que pour confirmer le jugement attaqué et écarter l'exception de non garantie de la société Gocdu Tmg et à titre subsidiaire la règle proportionnelle de l'article L.113-9 du code des assurances soutenue par la société MAAF assurances, l'arrêt retient par motifs propres et adoptés, qu'il y à lieu à confirmation du rejet de l'exception de garantie soulevée par MAAF assurances en sa qualité d'assureur de la société Gocdu TMG, alors que le contrat d'assurance multirisques professionnels souscrit par cette dernière comprend une convention spéciale la garantissant, dans le cadre de ses activités professionnelles déclarées aux conditions particulières lors d'un sinistre, pour les conséquences pécuniaires de la responsabilité civile qu'elle encourt en raison notamment des réclamations relatives à des dommages corporels subis par un tiers tant pendant l'exercice de ses activités qu'après réception de ses travaux ; que les juges ajoutent que la décision rendue sur intérêts civils lui est dès lors opposable, conformément à l'article 388-3 du code de procédure pénale et qu'il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article L. 113-9 du code des assurances s'agissant d'un dommage causé à un tiers sans lien avec le nombre de salariés déclarés ;
Attendu que si c'est à tort que la cour d'appel, a dit n'y avoir lieu à application de la règle proportionnelle de l'article L. 113-9 du code des assurances, l'arrêt n'encourt pas pour autant la censure, dès lors qu'aux termes de l'article 385-1 du code de procédure pénale, l'assureur n'est recevable à invoquer devant les juges répressifs, fût-ce à titre subsidiaire, une exception fondée sur une clause du contrat d'assurance et tendant à sa mise hors de cause, que si cette exception est de nature à l'exonérer totalement de son obligation de garantie à l'égard des tiers ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 7 novembre 2017 n° 17-80.233
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par
- M. Eric X..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, section 2, en date du 31 octobre 2016, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée du chef de travaux sur un site inscrit sans déclaration, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction disant n'y avoir lieu à suivre ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 septembre 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Fossier, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller FOSSIER, les observations de la société civile professionnelle MATUCHANSKY, POUPOT et VALDELIÈVRE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 480-4 du code de l'urbanisme, 86, 176, 212 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit mal fondé l'appel de M. X... et a confirmé l'ordonnance de non-lieu ;
"aux motifs propres que, selon leur version applicable à l'époque des faits, l'article L. 341-19 du code de l'environnement dispose qu'est puni d'une amende de 9 000 euros (désormais de 6 mois d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende) le fait de procéder à des travaux sur un monument naturel ou un site inscrit sans en aviser l'administration dans les conditions prévues au dernier alinéa de l'article L. 341-1 alinéa 4 du code de l'environnement ; que les dispositions des articles L. 480-1, L. 480-3 et L. 480-5 à L. 480-9 du code de l'urbanisme sont applicables aux infractions à l'alinéa 4 de l'article L. 341-1 du code de l'environnement ; que l'alinéa 4 de l'article L. 341-1 précité dispose que l'inscription entraîne, sur les terrains compris dans les limites fixées par l'arrêté, l'obligation pour les intéressés de ne pas procéder à des travaux autres que ceux d'exploitation courante en ce qui concerne les fonds ruraux et d'entretien normal en ce qui concerne les constructions sans avoir avisé, quatre mois d'avance, l'administration de leur intention ; que l'article R. 341-9 du même code dispose que la déclaration préalable prévue au quatrième alinéa de l'article L. 341-1 est adressée au préfet de département, qui recueille l'avis de l'architecte des Bâtiments de France sur le projet ; que lorsque l'exécution des travaux est subordonnée, en vertu du code de l'urbanisme, à la délivrance d'un permis de construire ou d'un permis de démolir, la demande de permis tient lieu de la déclaration préalable ; que lorsque l'exécution des travaux est subordonnée à une déclaration ou une autorisation d'utilisation du sol en application des dispositions réglementaires du titre IV du livre IV du code de l'urbanisme, la déclaration ou la demande d'autorisation tient lieu de la déclaration préalable mentionnée au premier alinéa du présent article ; que l'article R. 425-30 du code de l'urbanisme dispose que lorsque le projet est situé dans un site inscrit, la demande de permis ou la déclaration préalable tient lieu de la déclaration exigée par l'article L. 341-1 du code de l'environnement ; que les travaux ne peuvent être entrepris avant l'expiration d'un délai de quatre mois à compter du dépôt de la demande ou de la déclaration ; que la décision prise sur la demande de permis ou sur la déclaration préalable intervient après consultation de l'architecte des Bâtiments de France ; que selon l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme, le délai d'instruction de droit commun est de trois mois pour les demandes de permis de construire, autres que celles portant sur une maison individuelle ou ses annexes ; que l'article R. 423-24 du code de l'urbanisme majore le délai d'instruction de droit commun susvisé d'un mois lorsque le projet est soumis dans les conditions mentionnées au chapitre V, à un régime d'autorisation ou à des prescriptions prévus par d'autres législations ou réglementations que le code de l'urbanisme, lorsque la décision nécessite une dérogation en application des troisième, quatrième et cinquième alinéas de l'article L. 123-5 de ce même code, ou lorsque le projet est situé dans un secteur sauvegardé dont le périmètre a été délimité ; que l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme dispose qu'à défaut d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé, le silence gardé par l'autorité compétente vaut permis de construire ; qu'en l'espèce une demande de permis de construire a été déposée le 28 janvier 2009 par la société Paris Habitat OPH à laquelle était annexé notamment un plan paysage des plantations projetées faisant état de 94 arbres sur le site existant, dont 25 à conserver après travaux, soit un abattage de 69 arbres, comprenant 20 arbres malades à abattre pour raison sanitaire et 49 arbres à abattre pour le chantier ; que cette demande a été complétée le 20 mai 2009 ; que l'abattage d'arbres aux fins de construction d'un immeuble ne peut être assimilé à des travaux d'entretien normal et implique en conséquence une déclaration préalable auprès de l'administration ; que la demande de permis de construire déposée le 28 janvier 2009 vaut déclaration en application de l'article R. 341-9 susvisé ; que l'avis favorable de l'architecte des Bâtiments de France a été rendu le 10 juillet 2009 au visa des articles L. 341-10, R. 341-9 du code de l'environnement et R. 425-30 du code de l'urbanisme susvisés, étant rappelé que les réserves émises par cet avis étaient sans lien avec les arbres et leur abattage ; que c'est donc après avis favorable de l'architecte aux Bâtiments de France qu'a été délivré le permis de construire le 20 novembre 2009 ; que l'abattage des arbres dénoncé par la partie civile comme ayant été constaté par procès-verbal d'huissier du 22 octobre 2009, a été constaté par procès-verbal de la ville de Paris du 24 décembre 2009, soit, dans les deux cas, plus de quatre mois après le dépôt de la demande de permis de construire, mais aussi du dépôt des pièces complémentaires à cette demande et après avis favorable de l'architecte aux Bâtiments de France ; qu'il s'ensuit que l'avis visé par l'article L. 341-19 du code de l'environnement a été donné conformément aux dispositions de l'article L. 341-1 du code précité ; qu'en outre, l'abattage est intervenu postérieurement à l'expiration du délai d'instruction de la demande de permis de construire déposée par la société Paris Habitat OPH ; que les faits dénoncés par la partie civile ne sont dès lors pas constitutifs de l'infraction visée par l'article L. 341-19, et d'aucune autre infraction pénale ;
"et aux motifs éventuellement adoptés qu'il ressort de l'information que le permis de construire a été délivré le 20 novembre 2009 ; qu'en vertu de la jurisprudence administrative, une autorisation d'urbanisme peut légalement être délivrée après le commencement des travaux qu'elle autorise ; que cette autorisation peut régulariser les travaux déjà entrepris, à condition qu'ils soient conformes aux dispositions d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle l'autorisation est accordée, ce qui est le cas en l'espèce ; qu'il ressort de deux lettres de la mairie de Paris, adressées au procureur de la République et à Paris Habitat OPH, que la situation a effectivement été régularisée au plan administratif ; que dès lors, contrairement à la position de la partie civile, soutenue tout au long de l'information et encore dans ses observations, le délit d'exécution de travaux sur un monument naturel ou site inscrit sans information préalable de l'administration n'est donc pas caractérisé ; qu'il ne résulte pas de l'information de charges suffisantes contre quiconque d'avoir commis le délit d'exécution de travaux sur un monument naturel ou site inscrit, sans information préalable de l'administration ;
"1°) alors que la chambre de l'instruction, saisie de l'appel d'une ordonnance de non-lieu, doit examiner les faits sous toutes les qualifications possibles ; que l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme incrimine le fait d'exécuter sans autorisation des travaux devant être précédés de la délivrance d'un permis de construire ; que, si l'article R. 424-1 du code de l'urbanisme pose le principe selon lequel le défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction de la demande vaut permis tacite, les articles R. 424-2 et R. 424-3 dudit code prévoient une série d'exceptions dans lesquelles l'absence de décision expresse notifiée dans le délai d'instruction vaut décision implicite de rejet ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que les abattages d'arbres, matérialisant le commencement des travaux pour lesquels l'OPH avait déposé une demande de permis, étaient antérieurs au permis de construire délivré le 20 novembre 2009 par le maire de Paris ; qu'en se bornant à relever que ces abattages étaient intervenus postérieurement à l'expiration du délai d'instruction de la demande de permis, sans expliquer en quoi l'absence de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction avait, au cas particulier, fait naître un permis tacite et non une décision implicite de rejet, la chambre de l'instruction n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de s'assurer que l'infraction de construction sans permis n'était pas constituée ;
"2°) alors que la chambre de l'instruction, saisie de l'appel d'une ordonnance de non-lieu, doit examiner les faits sous toutes les qualifications possibles ; que l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme incrimine le fait d'exécuter sans autorisation des travaux devant être précédés de la délivrance d'un permis de construire ; que la délivrance d'un permis après le commencement des travaux ne fait pas disparaître l'infraction consommée ; qu'en relevant, par motif éventuellement adopté, que le permis de construire délivré le 20 novembre 2009, postérieurement aux abattages d'arbres matérialisant le commencement des travaux, avait eu pour effet de régulariser la situation au plan administratif, la chambre de l'instruction a statué par motif impropre à exclure l'infraction de construction sans permis et, partant, n'a pas justifié sa décision" ;
Vu l'article R. 424-2 du code de l'urbanisme ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que par exception au (b) de l'article R. 424-1, le défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction vaut décision implicite de rejet lorsque les travaux sont soumis à une autorisation au titre des sites classés ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, désireuse de développer l'habitat dans le périmètre des anciennes fortifications, la ville de Paris a confié à l'OPH Paris Habitat la réalisation d'un ensemble immobilier ; que M. Y..., agissant pour le compte de l'OPH, a déposé une demande de permis de construire le 28 janvier 2009 et une demande de permis de démolir le 30 avril 2009 ; que ces dossiers ont été complétés jusqu'au 10 juillet suivant ; qu'à partir du 22 octobre suivant, le maître d'ouvrage a fait abattre plusieurs dizaines d'arbres à l'emplacement de la future construction ; qu'un permis de construire a finalement été délivré le 20 novembre 2009 ; que sur la plainte avec constitution de partie civile de M. X... et d'autres riverains, en date du 22 février 2012, une information a été ouverte du chef de travaux sur un site inscrit sans déclaration ; que par ordonnance du 23 octobre 2015, le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre ; que la partie civile a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu, l'arrêt attaqué énonce que l'abattage est intervenu postérieurement à l'expiration du délai d'instruction de la demande de permis de construire déposée par la société Paris Habitat OPH ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que le silence gardé par l'administration ne valait pas, s'agissant d'un site classé, délivrance d'une autorisation d'abattre les arbres mais décision implicite de rejet, la chambre de l'instruction a méconnu le texte visé au moyen ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 31 octobre 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
Crim. 7 novembre 2017 n° 16-84.329 B
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Mme Delphine X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de LIMOGES, chambre correctionnelle, en date du 27 mai 2016, qui, pour violences aggravées, l'a condamnée à un an d'emprisonnement avec sursis, cinq ans d'interdiction professionnelle et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 septembre 2017 où étaient présents : M. Soulard, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, Mme Dreifuss-Netter, M. Fossier, Mmes Schneider, Ingall-Montagnier, Farrenq-Nési, M. Lavielle, conseillers de la chambre, Mmes Harel-Dutirou, Guého, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Lemoine ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller BELLENGER, les observations de Me LE PRADO, de Me BALAT, de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIÉ et de la société civile professionnelle SEVAUX et MATHONNET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Mme Delphine X... a été poursuivie devant le tribunal correctionnel, du chef de violences physiques ou morales sur mineurs de quinze ans par personne ayant autorité sur de jeunes enfants de maternelle, âgés de trois à quatre ans, dont elle avait la charge ; que les juges du premier degré l'ont renvoyée des fins de la poursuite ; que les parties civiles et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-3, 111-4, 122-4, 222-13, 222-44, 222-45, 222-47, 222-48 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Mme X... coupable de violences n'ayant entraîné aucune ITT sur...
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L... ;
" aux motifs que Mme X..., qui rejette les accusations portées contre elle, fait valoir qu'à l'exception de Mme Malika M..., aucun parent ne lui a jamais exprimé la moindre doléance sur la façon dont leurs enfants étaient accueillis à l'école ; qu'elle considère que c'est à la suite des problèmes qu'elle a rencontrés avec les ATSEM en fin d'année scolaire 2010-2011, que celles-ci ont installé des rumeurs et de petits incidents anodins ont pris de l'ampleur avec le ressenti des parents ; qu'elle affirme que tous les propos tenus par Mme Anita N... comme ceux des autres personnes venues en témoigner sont faux, ou transformés dans leur réalité ; qu'elle admet seulement avoir fait preuve d'autorité à l'égard d'enfants devant être considérés comme des élèves à part entière et non comme de simples enfants confiés à une garderie, avoir pu tapoter la tête des enfants, avoir mis du scotch sur la bouche de...
O... mais sous forme de jeu, et avoir eu un seul geste malheureux à l'égard de l'enfant... ; qu'elle avance enfin qu'elle n'a pas été en mesure au cours d'une enquête menée exclusivement à charge, de faire valoir des éléments matériels et objectifs pour sa défense et qu'elle produit à cet égard un rapport d'inspection du 12 juin 2014 mentionnant son très bon travail tant en classe qu'à la direction de l'école ; que l'attestation, datée du 21 octobre 2015, de Mme Sylvie P..., ayant enseigné en classe de petite section à l'école maternelle Jacques Prévert de septembre 2011 à juin 2014, faisant état de ses profondes qualités professionnelles et de son attitude adaptée, bienveillante et sécurisante à l'égard des élèves et relatant avoir travaillé ensemble, leurs deux classes réunies, dans la salle de motricité ; que l'attestation, datée du 25 octobre 2015, de Mme Christelle Q... ayant enseigné à l'école maternelle Jacques Prévert de septembre 2007 à juin 2012, et donc une dernière année auprès d'elle en petite et moyenne section, faisant également état des relations bienveillantes et affectueuses qu'elle entretenait avec ses élèves, précisant qu'allant fréquemment dans sa classe à l'improviste, elle avait pu en constater l'ambiance sereine et relation qu'elle avait dû faire face à un climat souvent pesant avec les ATSEM ; que l'attestation de Mme Eliane R..., ATSEM pendant quatre ans dans sa classe à l'école maternelle d'Eymoutiers jusqu'à son départ en juin 2011, faisant état de son comportement adapté face aux enfants et également jusque lorsqu'une sanction s'avérait nécessaire, ce qui, selon ce témoin, est fréquent en classe maternelle ; qu'elle verse également aux débats différents documents relatifs aux outils pédagogiques mis en place en petite section, dont les « Aventures de galipette » entre avril et juin 2013 destiné à établir au moyen d'une peluche un lien de l'école vers la maison, et des dessins d'enfants portant les mentions « maîtresse, je t'aime » ou « merci de m'avoir aidé à grandir » ; qu'elle était bien notée par sa hiérarchie et qu'une inspection de 2014-2015 n'avait soulevé aucune observation négative dans la relation enseignante-enfant ; que, selon les témoignages recueillis, Mme X... est effectivement décrite comme une enseignante très consciencieuse mais ayant un niveau d'exigence très élevé auprès des élèves et demandant tellement aux enfants de la petite section que lorsque ceux-ci n'y arrivaient pas, elle ne le supportait pas ; que c'est alors que certains enfants pouvaient devenir ses cibles, comme...
L... ou...
M..., et que ce comportement, qualifié d'hystérique par Mme Anita N..., s'est surtout accentué en 2014-2015 ; que les attestations qu'elle produit, émanant de collègues ayant travaillé dans le même établissement de l'école maternelle Jacques Prévert mais dans une configuration des locaux telle puisque la classe de petite section de Mme X... est isolée des autres, qu'ils n'ont pu être témoins directs des évènements comme cris ou jets dans le couloir qui s'y sont produits, sont insuffisants à remettre en cause les témoignages parfaitement concordants et circonstanciés recueillis au cours des débats et dont il résulte que Mme X... s'est très souvent emportée en élevant la voix a tenu des propos dévalorisants à l'égard de certains de ses élèves, les a malmenés physiquement en les tirant par les bras ou leurs vêtements, en leur donnant de tapes sur la tête en les « balançant » dans le couloir à titre de punition, les a malmenés moralement en les punissant dans le noir, a été jusqu'à perdre son contrôle en giflant...
M... ; que le délit de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à huit jours commis sur la personne de l'enfant...
M... est parfaitement caractérisé par les témoignages de Mme N... et de la stagiaire Maeva DD..., par le certificat médical du docteur S... du 11 février 2015, et également par la déclaration de la prévenue qui ne tend qu'à ne minimiser la portée de son geste qu'elle reconnaît comme ayant été vif ; qu'elle doit être retenue dans les liens de cette prévention ; s'agissant des faits de violences sans incapacité totale de travail, il est démontré que Mme X... a adopté auprès des très jeunes enfants un comportement inadapté qui s'est manifesté de manière répétée par des cris, qualifiés par les témoins de véritables hurlements, par des brimades physiques, comme la mise brutale au couloir sur la « chaise à grandir », les tapettes derrière la tête ou les tirages par les bras ou les vêtements, et qui, outrepassant les seules manifestations d'autorité qu'un maître est autorisé à avoir à l'égard d'un élève turbulent, ne peuvent trouver d'explication à cet égard ; que de tels faits répétés ont nécessairement généré pour les élèves d'une classe de petite section, tout juste âgés de trois ans, même en l'absence de toute contact physique, de gestes les menaçant directement ou de propos les dévalorisant, un sentiment d'angoisse face à une maitresse dont le rôle était au contraire de se montrer en toutes circonstances sécurisantes lors de l'apprentissage des premiers rudiments de l'école ; qu'il s'en est suivi pour ces élèves un trouble émotionnel et/ ou psychologique qui a été suffisamment intense pour caractériser le délit de violences sans incapacité totale de travail au sens de l'article 222-13 du code pénal ; que Mme X... doit en conséquence être retenue dans les liens de la prévention pour l'ensemble des faits visant les douze enfants qu'elle a accueillis entre septembre 2014 et février 2012, qui, sont comme victimes directes, soit comme témoins de ces faits répétés, ont tous subi à un moment ou à un autre un tel trouble émotionnel et/ ou psychologique ; " 1°) alors que les arrêts de la chambre de l'instruction, ainsi que les arrêts et jugements en dernier ressort, sont déclarés nuls s'ils ne contiennent pas des motifs ou si leurs motifs sont insuffisants et ne permettent pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle et de reconnaître si la loi a été respectée dans le dispositif ; et que les juges du fond doivent constater l'existence de tous les éléments constitutifs de l'infraction qu'ils répriment ; qu'en déclarant Mme X... coupable de violences volontaires n'ayant entraîné aucune ITT sur les enfants...
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L..., sans préciser de quels faits avaient personnellement été victimes chacun de ces enfants, la cour d'appel a privé sa décision de motifs ;
" 2°) alors que l'infraction de violences volontaires n'est constituée, en l'absence de contact matériel avec le corps de la victime, que pour autant que les agissements du prévenu ont causé à celle-ci une atteinte à son intégrité physique ou provoqué chez elle un choc émotif ; qu'en se bornant à relever, pour déclarer Mme X... coupable de violences volontaires n'ayant entraîné aucune ITT sur les enfants...
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L..., que « Mme X... doit en conséquence être retenue dans les liens de la prévention pour l'ensemble des faits visant les douze enfants qu'elle a accueillis entre septembre 2014 et février 2012, qui, soit comme victimes directes, soit comme témoins de ces faits répétés, ont tous subi à un moment ou à un autre un tel trouble émotionnel et/ ou psychologique » sans rechercher si chacun de ces douze enfants avait effectivement et personnellement subi une atteinte de la part de Mme Delphine X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen ;
" 3°) alors que l'infraction de violences volontaires n'est constituée, en l'absence de contact matériel avec le corps de la victime, que pour autant que les agissements du prévenu ont causé à celle-ci une atteinte à son intégrité physique ou provoqué chez elle un choc émotif ; que ne caractérisent pas un préjudice effectif les juges du fond qui se bornent à affirmer que des faits sont « de nature à » générer un choc émotif ou que des faits l'ont « nécessairement » généré ; qu'en se bornant à relever, pour déclarer Mme X... coupable de violences volontaires n'ayant entraîné aucune ITT sur les enfants...
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L..., que de « tels faits répétés ont nécessairement généré pour les élèves d'une classe de petite section, tout juste âgés de trois ans, même en l'absence de toute contact physique, de geste les menaçant directement ou de propos les dévalorisant, un sentiment d'angoisse face à une maitresse dont le rôle était au contraire de se montrer en toutes circonstances sécurisantes lors de l'apprentissage des premiers rudiments de l'école » sans rechercher si chacun de ces douze enfants avait effectivement subi une atteinte personnelle de la part de Mme X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen ;
" 4) alors que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que ne constituent pas des violences volontaires punissables le fait d'élever la voix sur autrui ou de lui tenir des propos dévalorisants ; que pour déclarer Mme X... coupable de violences volontaires, la cour d'appel a énoncé que Mme X... « s'est très souvent emportée en élevant la voix a tenu des propos dévalorisants à l'égard de certains de ses élèves » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" 5°) alors que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que ne constituent pas des violences volontaires les cris, la mise au coin sur une « chaise à grandir » ou la punition dans le noir d'une enseignante à l'égard de ses jeunes élèves ; que pour déclarer Mme X... coupable de violences volontaires, la cour d'appel a énoncé que Mme X... avait poussé des cris « qualifiés par les témoins de véritables hurlements, par des brimades physiques, comme la mise brutale au couloir sur la « chaise à grandir » ; qu'en énonçant que des tels faits étaient constitutifs de violences, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" 6°) alors que selon l'article 122-4 du code pénal, n'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires ; qu'il résulte de ce texte que n'est pas pénalement responsable le prévenu pouvant se prévaloir d'un usage ou d'une coutume ; que peuvent être justifiés par le droit de correction exercé par les parents et les enseignants auprès de jeunes enfants la mise au couloir ou au coin sur la chaise à grandir, l'administration de tapettes derrière la tête, le tirage par le bras ou par le vêtements ; que pour déclarer Mme X... coupable de violences la cour d'appel a énoncé que les tapettes derrière la tête ou les tirages par les bras ou les vêtements, outrepassaient les seules manifestations d'autorité qu'un maître est autorisé à avoir à l'égard d'un élève turbulent ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ; " 7°) alors que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que le témoin de violences subies par d'autres ne peut être considéré comme la victime des violences dont il est témoin ; qu'en énonçant que les enfants avaient été victimes « comme témoins de ces faits répétés », la cour d'appel a méconnu les textes susvisés " ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 122-4, 122-4, 222-13, 222-44, 222-45, 222-47, 222-48 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Mme Delphine X... coupable de violences ayant entraîné une ITT n'excédant pas huit jours sur la personne d'...
M... ;
" aux motifs que Mme X... a été jusqu'à perdre son contrôle en giflant...
M... ; que le délit de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à huit jours commis sur la personne de l'enfant...
M... ; que le délit de violences ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à huit jours commis sur la personne de l'enfant...
M... est parfaitement caractérisé par les témoignages de Mme N... et de la stagiaire Maeva DD..., par le certificat médical du docteur S... du 11 février 2015, et également par la déclaration de la prévenue qui ne tend qu'à minimiser la portée de son geste qu'elle reconnaît comme ayant été vif ; qu'elle doit être retenue dans les liens de cette prévention ;
" alors que, selon l'article 122-4 du code pénal, n'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires ; qu'il résulte de ce texte que n'est pas pénalement responsable le prévenu pouvant se prévaloir d'un usage ou d'une coutume ; que constitue un tel usage le droit de correction exercé par les parents et les enseignants auprès de jeunes enfants ; qu'en déclarant Mme X... coupable de violences pour avoir administré une gifle à...
M... sans rechercher si cette gifle n'était pas justifiée par le droit de correction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-3, 111-4, 122-4, 222-13, 222-44, 222-45, 222-47, 222-48 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Mme X... coupable de violences n'ayant entraîné aucune ITT sur...
O... ;
" aux motifs qu'elle doit être retenue dans les liens de la prévention en ce qui concerne : l'enfant...
O..., scolarisé en 2012-2013, qui a été jeté dans le couloir, qui a été décrit par Mme N... comme ayant été le souffre-douleur de la prévenue, dont la bouche a été fermée par du scotch, qui a relaté auprès de sa mère avoir eu les cheveux tirés et le bras tordu, avoir été puni dans le noir et qui a été hospitalisé en observation en décembre 2012 pour des spasmes du sanglot ;
" 1°) alors que le fait de mettre à la porte de sa classe un élève, de placer un scotch sur sa bouche, ou de le punir dans le noir ne sont pas des violences au sens du code pénal ; que pour déclarer Mme X... coupable de violences à l'encontre de...
O..., la cour d'appel a énoncé que...
O... a été jeté dans le couloir, que sa bouche a été fermée par du scotch et qu'il a été puni dans le noir ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" 2°) alors que selon l'article 122-4 du code pénal, n'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires ; qu'il résulte de ce texte que n'est pas pénalement responsable le prévenu pouvant se prévaloir d'un usage ou d'une coutume ; que constitue un tel usage le droit de correction exercé par les parents et les enseignants auprès de jeunes enfants ; que pour déclarer Mme X... coupable de violences à l'encontre de...
O..., la cour d'appel a énoncé que « l'enfant...
O..., scolarisé en 2012-2013, qui a été jeté dans le couloir, qui a été décrit par Mme N... comme ayant été le souffre-douleur de la prévenue, dont la bouche a été fermée par du scotch, qui a relaté auprès de sa mère avoir eu les cheveux tirés et le bras tordu, avoir été puni dans le noir et qui a été hospitalisé en observation en décembre 2012 pour des spasmes du sanglot » ; qu'en s'abstenant de rechercher si de tels faits ne pouvaient pas être justifiés par le droit de correction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 3°) alors que les violences ne peuvent être retenues que si un lien de causalité est établi entre l'acte violent et le résultat dommageable ; que pour déclarer Mme X... coupable de violences à l'encontre de...
O..., la cour d'appel a énoncé que celui-ci avait été « hospitalisé en observation en décembre 2012 pour des spasmes du sanglot » ; qu'en l'état de ces seules énonciations, qui ne caractérisent par l'existence d'un lien de causalité entre les actes reprochés et l'hospitalisation en observation en décembre 2012 pour spasmes du sanglot, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ; Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-3, 111-4, 122-4, 222-13, 222-44, 222-45, 222-47, 222-48 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Mme X... coupable de violences n'ayant entraîné aucune ITT sur...
T... ;
" aux motifs que l'enfant...
T..., scolarisée en 2012-2013 : la parole recueillie par sa mère le 20 mars 2015 selon laquelle elle a été punie dans le « placard aux sorcières » où elle a eu peur que « des jeux se transforment en sorcière » a été confirmée le 23 mars suivant devant Mme U..., et par son frère jumeau ..., alors scolarisé dans la même classe qu'elle ; que l'explication de la prévenue selon laquelle certains enfants se seraient d'eux-mêmes enfermés dans ce placard identifié comme étant celui où sont entreposés des jouets, ne peut être retenue alors qu'un enfant, même âgé de trois ans, sait parfaitement faire la différence entre un jeu entre camarades et une punition de la maîtresse ;
" 1°) alors que le fait de punir un élève en l'envoyant au coin n'est pas constitutif de violences au sens de l'article 222-13 du code pénal ; que pour déclarer Mme X... coupable de violences, la cour d'appel a énoncé que « la parole recueillie par sa mère le 20 mars 2015 selon laquelle elle a été punie dans le « placard aux sorcières » où elle a eu peur que « des jeux se transforment en sorcière » a été confirmée le 23 mars suivant devant Mme U..., et par son frère jumeau ..., alors scolarisé dans la même classe qu'elle » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" 2°) alors, en toute hypothèse, que selon l'article 122-4 du code pénal, n'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires ; qu'il résulte de ce texte que n'est pas pénalement responsable le prévenu pouvant se prévaloir d'un usage ou d'une coutume ; que constitue un tel usage le droit de correction exercé par les parents et les enseignants auprès de jeunes enfants ; que pour déclarer Mme X... coupable de violences la cour d'appel a énoncé que « la parole recueillie par sa mère le 20 mars 2015 selon laquelle elle a été punie dans le « placard aux sorcières » où elle a eu peur que « des jeux se transforment en sorcière » a été confirmée le 23 mars suivant devant Mme U..., et par son frère jumeau ..., alors scolarisé dans la même classe qu'elle » ; que même à supposer que punir un enfant de cette manière constitue des faits de violences volontaires au sens de l'article 222-13 du code pénal, en statuant ainsi, sans rechercher si la pratique du « placard à sorcières » n'était pas justifiée par le droit de correction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 3°) alors que l'infraction de violences volontaires n'est constituée, en l'absence de contact matériel avec le corps de la victime, que pour autant que les agissements du prévenu ont causé à celle-ci une atteinte à son intégrité physique ou provoqué chez elle un choc émotif ; qu'en s'abstenant de rechercher si...
T... avait subi un tel choc émotif du fait d'avoir été placée dans le placard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen " ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-3, 111-4, 122-4, 222-13, 222-44, 222-45, 222-47, 222-48 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Mme X... coupable de violences n'ayant entraîné aucune ITT sur...
V... ;
" aux motifs que, pour l'enfant...
V..., scolarisé en 2013-2014, alors qu'en mars 2015 l'enfant aurait dit à sa maîtresse, Mme W..., avoir reçu des calottes, il ne l'a pas confirmé auprès de sa mère qui précise n'avoir noté aucun changement dans le comportement de son fils ; que toutefois le seul fait que Mme X... se soit une fois adressée à cet enfant, selon un témoin, d'une voix remplie de rage et d'agressivité et donc de nature à provoquer un choc émotionnel, suffit à asseoir la prévention ;
" 1°) alors que le fait de crier sur autrui n'est pas constitutif de violences au sens de l'article 222-13 du code pénal ; que pour déclarer Mme X... coupable de violences la cour d'appel a énoncé que « toutefois le seul fait que Mme X... se soit une fois adressée à cet enfant, selon un témoin, d'une voix rempli de rage et d'agressivité et donc de nature à provoquer un choc émotionnel, suffit à asseoir la prévention » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" 2°) alors, en toute hypothèse, que selon l'article 122-4 du code pénal, n'est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires ; qu'il résulte de ce texte que n'est pas pénalement responsable le prévenu pouvant se prévaloir d'un usage ou d'une coutume ; que constitue un tel usage le droit de correction exercé par les parents et les enseignants auprès de jeunes enfants ; que pour déclarer Mme X... coupable de violences la cour d'appel a énoncé que « toutefois le seul fait que Mme X... se soit une fois adressée à cet enfant, selon un témoin, d'une voix rempli de rage et d'agressivité et donc de nature à provoquer un choc émotionnel, suffit à asseoir la prévention » ; que même à supposer que des cris puissent constituer des faits de violences volontaires au sens de l'article 222-13 du code pénal, en statuant ainsi, sans rechercher si ces cris n'étaient pas justifiés par le droit de correction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 3°) alors que l'infraction de violences volontaires n'est constituée, en l'absence de contact matériel avec le corps de la victime, que pour autant que les agissements du prévenu ont causé à celle-ci une atteinte à son intégrité physique ou provoqué chez elle un choc émotif ; qu'en se bornant à relever, pour déclarer Mme X... coupable de violences volontaires n'ayant entraîné aucune ITT sur...
V... que celle-ci avait parlé « d'une voix rempli de rage et d'agressivité et donc de nature à provoquer un choc émotionnel », sans rechercher si...
V... avait effectivement subi une atteinte de la part de Mme X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen " ;
Les moyens étant réunis ;
Sur les moyens en ce qu'ils concernent...
Y...,...
Z...,...
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B...- C...,...
D...- E...,...
F...,...
I..., Léa J...- YY...,...
K...,...
L...,...
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T...,...
O... et...
M... :
Attendu que, pour déclarer la prévenue coupable de violences aggravées sur les mineurs précités, l'arrêt prononce par les motifs repris aux moyens ;
Attendu qu'en statuant ainsi, en l'état de ces motifs relevant de son appréciation souveraine des faits, et dès lors que les violences physiques, psychologiques ou verbales, dont elle a déclaré la prévenue coupable, excédaient le pouvoir disciplinaire dont disposent les enseignants, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que les griefs doivent être écartés ;
Mais sur les moyens en ce qu'ils concernent...
H... et...
G... :
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ce texte, tout jugement ou arrêt doit être motivé ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour déclarer la prévenue coupable de violences sur...
H... et...
G..., l'arrêt énonce que le premier n'a pas été frappé et que la seconde n'a eu aucun souci particulier mais qu'ils ont vu la maîtresse frapper leurs camarades et que les enfants, comme témoins de ces faits répétés, ont tous subi à un moment ou à un autre un trouble émotionnel ou psychologique ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que ces deux mineurs n'avaient pas été directement l'objet de violences physiques ou psychologiques, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 911-4 du code de l'éducation, préliminaire, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale défaut de motifs, violation de la loi ;
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Mme X... à verser des dommages-intérêts aux parties civiles ;
" aux motifs qu'il convient au regard des faits commis et dont la prévenue est reconnue coupable et des observations formulées par les parties civiles, de fixer comme suit les indemnités réparatrices des préjudices moraux subis par les enfants et par leurs parents qui, pour ces derniers, ne découlent pas de l'infraction stricto sensu mais s'y rattachent directement, ainsi que celles au titre des frais irrépétibles : 1) pour Mme Malina M... uniquement ès qualités pour son fils...
M... qui a sollicité la somme de 3 000 euros pour l'enfant et celle de 1. 2000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale :- la somme de 3 000 euros pour l'enfant...,- la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; 2) pour Mme Stéphannie EE... et M. Sébastien Y... en leur nom personnel et ès qualités pour leur fils...
Y... qui ont sollicité la somme de 2 000 euros pour l'enfant celle de 1 euros pour chacun et celle de 800 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale :- la somme de 2 500 euros pour l'enfant,- la somme de 1 euro par chacun des père et mère, la somme de 1 000 euro sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; 3) pour Mme Stéphanie XX... épouse Z... en son nom personnel et ès qualités pour son fils...
Z..., qui a sollicité la somme de 2 500 euros pour l'enfant, celle de 1 euro pour elle-même et celle de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; 4) pour Mme Virginie C... et M. Benoît B... en leur nom personnel et ès qualités pour leur fils...
B...- C... qui ont sollicité la somme de 5 000 euros pour l'enfant, celle de 2 000 euros pour chacun et celle de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale :- la somme de 2 000 euros pour l'enfant,- la somme de 500 euros à chacun des père et mère,- la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; 5) pour Mme Nathanaëlle D... en son nom personnel et ès qualités pour fils...
D...- E..., qui a sollicité la somme de 2 500 euros pour l'enfant, celle de 1 euro pour elle-même et celle de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; 6) pour Mme Magali F..., en son nom personnel et ès qualités pour sa fille...
F..., qui a sollicité la somme de 2 500 euros pour l'enfant, celle de 1 euro pour elle-même et celle de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 :- la somme de 1 500 euros pour l'enfant,- la somme de 1 euro pour la mère ;- la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; 7) pour Mme Laure ZZ... uniquement ès qualités pour son fils...
H..., qui a sollicité la somme de 2 500 euros pour l'enfant et celle de 1. 5000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale,- la somme de 2 000 euros pour l'enfant,- la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; 8) pour Mme Amandine J... et M. Michaël YY... en leur nom personnel et ès qualités pour leur fille...
J...- YY..., qui a sollicité la somme de 3 000 euros pour l'enfant, celle de 500 euros chacun et celle de 400 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; la somme de 2. 5000 euros pour l'enfant, la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; 9) pour Mme Emilie AA... uniquement ès qualités pour son fils...
O..., qui a sollicité la somme de 2 500 euros pour l'enfant et celle de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale :- la somme de 2 500 euros pour l'enfant,- la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; 10) pour Mme Laura BB... et M. Damien K... en leur nom personnel et ès qualités pour leur fils...
K..., qui ont sollicité la somme de 5 000 euros pour l'enfant, celle de 1 000 euros pour chacun et celle de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale : la somme de 2 500 euros pour l'enfant,- la somme de 500 euros pour chacun des père et mère,- la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; 11) pour Mme Muriel CC... et M. Abel L... en leur nom personnel et ès qualités pour leur fille...
L..., qui ont sollicité la somme de 5. 000 euros pour l'enfant, celle de 4 000 euros pour chacun et celle de 1 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale :- la somme de 3 000 euros pour l'enfant,- la somme de 500 euros pour chacun des père et mère,- la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
" alors que les règles de compétence des juridictions sont d'ordre public et peuvent être invoquées à tous les stades de la procédure ; que tout juge est tenu, même d'office et en tout état de la procédure, de vérifier sa compétence ; que selon l'article L. 911-4 du code de l'éducation, lorsque la responsabilité d'un membre de l'enseignement public se trouve engagée à la suite d'un fait dommageable commis au détriment des élèves qui lui sont confiés, la responsabilité de l'Etat est substituée à celle de l'enseignant qui ne peut jamais être mise en cause devant les tribunaux civils par la victime ou ses représentants ; qu'en condamnant Mme X..., après l'avoir déclarée coupable de violences volontaires sur des élèves qui lui étaient confiées, à verser des dommages-intérêts aux parties civiles, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés " ;
Vu l'article L. 911-4 du code de l'éducation ;
Attendu que, selon ce texte, lorsque la responsabilité d'un membre de l'enseignement public se trouve engagée à la suite d'un fait dommageable commis au détriment des élèves qui lui sont confiés, la responsabilité de l'Etat est substituée à celle de l'enseignant, qui ne peut jamais être mis en cause devant les tribunaux civils par la victime ou ses représentants ;
Attendu qu'après avoir déclaré la prévenue coupable de violences sur ses élèves, les juges du fond l'ont condamnée à payer des dommages-intérêts aux parties civiles ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est à nouveau encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur le septième moyen :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Limoges, en date du 27 mai 2016, mais en ses seules dispositions relatives à la culpabilité des chefs de violences volontaires sur les enfants...
H... et...
G..., aux peines et aux intérêts civils, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Poitiers, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Limoges et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le sept novembre deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
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