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Crim. 2 octobre 2018 n° 18-84.395

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

--M. Jean-Luc Z...,M. Armand A...,

contre l'arrêt n° 411/18 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 2 juillet 2018, qui, dans l'information suivie contre eux des chefs d'association de malfaiteurs et infractions à la législation sur les armes, a prononcé sur leur demande d'annulation de pièces de la procédure ;


Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 9 août 2018, prescrivant leur examen immédiat ;
Sur le pourvoi formé par M. A... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
Sur le pourvoi formé par M. Z... :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5, § 3, et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 175, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation du réquisitoire définitif ;
"aux motifs qu'à la date de l'ordonnance de soit-communiqué du 21 novembre 2017 prise en application du premier alinéa de l'article 175 du code de procédure pénale la chambre de l'instruction était saisie d'un appel du ministère public, formé quatre jours auparavant, d'une ordonnance par laquelle le juge d'instruction avait déclaré irrecevables des réquisitions supplétives du 11 août 2017 aux fins notamment de nouvelles mises en examen ; qu'il a été statué sur cet appel par un arrêt du 21 décembre suivant ; qu'en suite de cet arrêt, le 8 janvier 2018, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille a demandé l'exécution des actes visés dans son réquisitoire supplétif du 11 août 2017 ; que le juge d'instruction a rendu le 10 janvier 2018 une ordonnance portant refus d'exécuter ces actes ; qu'appel en a été interjeté le 16 janvier 2018 par le ministère public ; que par un arrêt du 28 mars 2018 la chambre de l'instruction a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction du 10 janvier précédent ; que le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille a pris dès le 20 avril 2018 ses réquisitions définitives dans ce dossier, prenant acte en cette occasion de l'absence de mise en examen – et donc de l'impossibilité pour lui de requérir le renvoi devant la juridiction de jugement – de deux personnes contre lesquelles il avait demandé à plusieurs reprises que soient exercées des poursuites ; que dans ces conditions, en l'état de cette succession de décisions et de recours dont l'ensemble des parties ont eu connaissance, il n'apparaît aucunement que la procédure aurait subi sur la période considérée de retard portant atteinte au droit de tout justiciable à la tenue d'un procès dans un délai raisonnable ; qu'en tout état de cause, il n'apparaît pas que l'éventuelle inobservation par le ministère public du délai prévu par le second alinéa de l'article 175 du code de procédure pénale soit sanctionné par l'annulation de ses réquisitions, dont il y a au demeurant lieu de constater qu'elles sont signées par un magistrat compétent, qu'elles contiennent une articulation motivée des faits et que les renvois requis sont assortis de l'indication des qualifications juridiques et des textes applicables ;
"1°) alors que, lorsqu'une personne est détenue, les délais prévus à l'article 175 alinéa 2 sont prescrits à peine de nullité ; qu'en cas de privation de liberté en effet, l'article 5, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme combiné à son article 6 impose une célérité toute particulière dans la poursuite de la procédure et la fixation de délais dont le dépassement est sanctionné et qui ne sont donc pas purement indicatifs ; qu'en omettant de tenir compte de la circonstance que le prévenu était détenu pour statuer sur la régularité du dépassement par le parquet du délai prévu à l'article 175 alinéa 2, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision et elle a méconnu l'ensemble des textes susvisés ;
" 2°) alors que, ne constitue pas un délai raisonnable eu égard aux exigences des articles 5, § 3, et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme le délai de cinq mois écoulé entre l'avis de fin d'information et le réquisitoire définitif du parquet, délai durant lequel le mis en examen est resté détenu ; qu'en considérant au contraire que la procédure était régulière, la chambre de l'instruction a méconnu les articles susvisés ;
"3°) alors que la chambre de l'instruction, pour expliquer le retard de quatre mois pris par le parquet pour produire son réquisitoire définitif, se réfère à une procédure initiée par ce dernier afin d'obtenir des mises en examen supplémentaires ; que cette procédure, qui ne concernait pas M. Jean-Luc Z..., à l'égard duquel le juge d'instruction avait considéré que suffisamment d'éléments étaient réunis pour procéder au règlement de l'information, ne pouvait ce faisant justifier le retard pris à son encontre ; qu'en se reposant néanmoins sur cette procédure concernant des tiers sans chercher à justifier le retard pris par le parquet à prendre ses réquisitions concernant M. Z..., la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision ;
"4°) alors que l'article 187 du code de procédure pénale prévoit que le juge d'instruction poursuit son information, y compris jusqu'au règlement, lorsqu'il est interjeté appel d'une ordonnance autre que l'ordonnance de règlement ou que la chambre de l'instruction est saisie directement d'une demande d'acte ou d'une requête en nullité, sauf décision contraire du président de la chambre de l'instruction ; qu'en admettant que le parquet pouvait de lui-même interrompre ses diligences et empêcher le règlement de la procédure dans l'attente qu'il soit statué sur ses demandes, l'arrêt attaqué a violé l'article 187 du code de procédure pénale susvisé et ensemble le principe d'égalité des armes qui découle des articles préliminaire du code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. Z... ayant été mis en examen du chef d'association de malfaiteurs et infractions à la législation sur les armes et placé sous mandat de dépôt, le juge d'instruction a rendu le 21 novembre 2017 un avis de fin d'information en application de l'article 175 du code de procédure pénale ; que le procureur de la République a communiqué ses réquisitions le 20 avril 2018 ; que M. Z... a déposé une requête en nullité le 17 mai 2018, au motif qu'un délai déraisonnable au regard des dispositions des articles 5, § 3, et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme a résulté de la tardiveté desdites réquisitions ;
Attendu que pour rejeter ladite requête, la chambre de l'instruction prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, par des motifs dont il résulte qu'elle a apprécié le caractère raisonnable du délai de la procédure, et dès lors que, d'une part, la tardiveté du dépôt des réquisitions du ministère public, qui n'a résulté que de l'exercice par ledit ministère de prérogatives qui lui appartiennent, a pour seule sanction la possibilité pour le juge d'instruction de régler la procédure sans réquisitoire définitif, d'autre part, le mis en examen dispose du droit de saisir à tout moment la juridiction d'instruction compétente pour voir statuer sur la durée raisonnable de sa détention provisoire, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Sur le pourvoi de M. A... :
CONSTATE la déchéance du pourvoi ;
Sur le pourvoi de M. Z... :
Le REJETTE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. X..., conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Darcheux ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Civ.1 26 septembre 2018 n° 17-16.089 B

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'association Fonds régional d'art contemporain de Lorraine (le FRAC) a organisé, dans ses locaux, une exposition intitulée "You are my mirror 1 ; L'infamille", à l'occasion de laquelle a été présentée une oeuvre de M. Y..., constituée de plusieurs lettres rédigées en ces termes :
"Les enfants, nous allons vous enfermer, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard Papa et Maman.Les enfants, nous allons faire de vous nos esclaves, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous faire bouffer votre merde, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous sodomiser, et vous crucifier, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous arracher les yeux, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous couper la tête, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous vous observons, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous tuer par surprise, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous empoisonner, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, vous crèverez d'étouffement, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons égorger vos chiens, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous découper et vous bouffer, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons faire de vous nos putes, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous violer, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous arracher les dents, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous défoncer le crâne à coups de marteau, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous coudre le sexe, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous pisser sur la gueule, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Les enfants, nous allons vous enterrer vivants, vous êtes notre chair et notre sang, à plus tard, Papa et Maman.Nous allons baiser vos enfants et les exterminer, nous introduire chez vous, vous séquestrer, vous arracher la langue, vous chier dans la bouche, vous dépouiller, vous brûler vos maisons, tuer toute votre famille, vous égorger, filmer notre mort." ;
que, soutenant que la représentation de cette oeuvre, accessible à tous, était constitutive de l'infraction prévue et réprimée par l'article 227-24 du code pénal, l'Association générale contre le racisme et pour le respect de l'identité française et chrétienne (l'AGRIF) a signalé ces faits au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Metz, qui a décidé d'un classement sans suite ; qu'invoquant l'atteinte portée à la dignité de la personne humaine, garantie par l'article 16 du code civil, elle a assigné le FRAC, sur le fondement de l'article 1382, devenu 1240 du même code, pour obtenir réparation du préjudice résultant de l'atteinte portée aux intérêts collectifs qu'elle a pour objet de défendre ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches, et sur le second moyen, pris en sa première branche, ci-après annexés :
Attendu que ces griefs ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur la deuxième branche du second moyen :
Vu l'article 16 du code civil , ensemble l'article 12, alinéa 1er, du code de procédure civile ;
Attendu que, pour rejeter la demande indemnitaire de l'AGRIF, après avoir relevé que ladite association soutient qu'indépendamment de toute incrimination pénale, l'organisation de l'exposition au cours de laquelle a été présentée l'oeuvre litigieuse, qui porte atteinte à la dignité de la femme et au respect de l'enfant, est constitutive d'une faute civile, l'arrêt retient que l'argumentation présentée par l'AGRIF ne fait référence utile à aucun texte de loi qu'aurait pu enfreindre le FRAC en exposant les écrits litigieux, dès lors que l'article 16 du code civil n'a pas valeur normative et ne fait que renvoyer au législateur l'application des principes qu'il énonce ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le principe du respect de la dignité de la personne humaine édicté par l'article 16 du code civil est un principe à valeur constitutionnelle dont il incombe au juge de faire application pour trancher le litige qui lui est soumis, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;




Crim. 19 septembre 2018 n° 18-84.253

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-Mme Samia Z...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de DOUAI, en date du 7 juin 2018, qui, dans l'information suivie contre elle des chefs d'arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire de mineurs de 15 ans, non représentation d'enfant et rétention hors de France, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 137, 143-1, 144, 144-1, 145-2, 148-2, 148-4 du code de procédure pénale, 6, § 1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance entreprise ayant rejeté la demande de mise en liberté de Mme Z... ;
"aux motifs propres que l'appel, régulier en la forme et interjeté dans le délai de l'article 186 du code de procédure pénale, est recevable ; qu'il résulte des éléments de l'information rappelés ci-dessus des indices graves ou concordants à l'encontre de Mme Z... rendant vraisemblable sa participation aux faits qui lui ont été notifiés au titre de sa mise en examen et pour lesquels elle encourt une peine de réclusion criminelle ; que, contrairement à ce qui est soutenu par son conseil, Mme Z... n'est détenue au sens de l'article 145-2 du code de procédure pénale que depuis neuf mois ; qu'en effet, le délai prévu par cet article pour le maintien de la détention provisoire ou sa prolongation court à compter seulement de l'écrou sur le territoire national ; que la détention provisoire de Mme Z... n'excède dès lors pas la durée légale de détention prévue à l'article précité ; que tant la mobilité de Mme Z... avant les faits, dénoncée par les services éducatifs qui soulignaient les multiples déménagements de celle-ci tant en France qu'à l'étranger destinés à faire échec au suivi éducatif de ses enfants, que les faits qui lui sont reprochés qui révèlent qu'elle a pu traverser l'Europe durant un mois en compagnie de deux jeunes enfants, alors même qu'elle était recherchée, attestent que la mise en examen est en mesure d'organiser une fuite pérenne à l'étranger ; que celle-ci a été condamnée à plusieurs reprises par décisions contradictoires à signifier et a déjà fait usage du nom d'un tiers ; qu'il est à craindre que compte tenu de la gravité de la peine criminelle encourue, elle ne tente de se soustraire à la justice ; que les garanties proposées, consistant en un hébergement chez sa soeur Malika, qui, bien qu'informée par la mise en examen de l'enlèvement des enfants n'a pas signalé celui-ci aux services sociaux ou à la police et en un contrat de travail non signé, sont manifestement insuffisantes à assurer la représentation en justice de la mise en examen qui ne peut être garantie que par sa détention provisoire ; que l'absence de toute adhésion de la mère au suivi éducatif de ses enfants et notamment à leur placement auprès de leurs grands-parents maternels, son déni de ses difficultés de prise en charge de ceux-ci et d'une façon plus générale le non-respect par la mise en examen des décisions judiciaires - Mme Z... ayant été à deux reprises sanctionnée en raison d'une inexécution d'un travail d'intérêt général - sont de nature à faire craindre, dans l'attente du retour des expertises psychologique ou psychiatrique permettant d'éclairer sa personnalité, un renouvellement de l'infraction ; que la proposition de domiciliation de Mme Z... à Valenciennes, soit à proximité immédiate de ses enfants, et sans qu'il soit même justifié de l'existence d'un suivi psychologique en maison d'arrêt, ne peut que majorer ce risque de renouvellement de l'infraction que seule la détention provisoire permet de prévenir ; qu'enfin les faits criminels reprochés à la mise en examen, s'agissant de l'enlèvement par leur mère de deux mineurs de moins de quinze ans, durant un mois, dans un état étranger dont ils ne maîtrisaient pas la langue, sans respect de leur scolarisation et au mépris des liens affectifs qui unissaient ces derniers à leurs grands-parents maternels qui en avaient la garde, ont causé, par leur gravité et les circonstances précitées, un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public que seule la détention provisoire permet d'apaiser ; qu'au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, la détention provisoire de Mme Z... constitue donc l'unique moyen de parvenir aux objectifs ainsi définis qui ne sauraient être atteints suffisamment par un placement sous contrôle judiciaire, ou une mesure d'assignation à résidence avec surveillance électronique compte tenu des risques susvisés, quelles que soient les obligations imposées ; qu'enfin s'il est fait état "d'importants problèmes de santé" présentés par Mme Z..., dont il n'est d'ailleurs pas justifié, il n'est pas allégué que ceux-ci seraient incompatibles avec son maintien en détention ; que l'ordonnance frappée d'appel sera en conséquence confirmée ;
"et aux motifs, à les supposer adoptés, que le casier judiciaire de Mme Z... fait état de treize condamnations dont sept l'ont été par décisions contradictoires à signifier et une par défaut ; que parmi ces condamnation, trois peuvent être mises en perspective dans le cadre de la présente procédure : celle prononcée par le tribunal correctionnel de Valenciennes le 20 octobre 2000 pour des faits d'atteinte à l'autorité judiciaire par discrédit jeté sur une décision de justice, celle prononcée par le tribunal correctionnel de Valenciennes le 7 mars 2002 pour des faits de prise du nom d'un tiers pouvant déterminer des poursuites pénales contre lui, et celle prononcée le 1er avril 2005 par le tribunal correctionnel de Montauban, pour des faits de menace envers un magistrat, un juré ou une personne siégeant dans une juridiction pour l'influencer ; que par ailleurs, à la lecture des informations communiquées par le tribunal pour enfants, il apparaissait que Mme Z... a assez systématiquement mis en échec l'accompagnement éducatif dont elle bénéficiait au profit de ses enfants, notamment par ses déménagements intempestifs ; qu'au regard de ces éléments de contexte et d'antécédents judiciaire, il n'apparaît pas que l'objectif de maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice puisse être assuré par une autre mesure que la détention provisoire, eu égard à la facilité et à la détermination avec laquelle Mme Z... aurait quitté le territoire français pour durablement fuir à l'étranger, et à l'absence de garanties alternatives présentées par l'intéressée, qui a toujours été géographiquement très mobile ; que pour les mêmes raisons, il n'apparaît pas qu'une mesure de contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence sous surveillance électronique soit de nature à assurer tout risque de réitération des faits compte tenu de la détermination et du peu de prise de conscience de l'intéressée pour les faits pour lesquels elle a été mise en examen, laquelle s'est globalement estimée dans son bon droit, alors même que le juge des enfants lui avait clairement signifié les motifs de l'éloignement décidé pour Abdelkader et Youssef et sans que cela ne préjuge de sa culpabilité dans le cadre de la présente procédure ; que la poursuite de l'information judiciaire est rendue nécessaire par l'attente du retour des expertises psychologique et psychiatrique de la personne mise en examen, outre celui d'une commission rogatoire destinée à rechercher d'éventuelles complicités et de réintégrer les membres de la famille ;
"1°) alors que le cumul de la détention provisoire subie dans un état européen et celle effectuée en France ne peut avoir pour effet, lorsqu'elles portent sur des faits identiques, de faire exécuter à la personne détenue une détention d'une durée totale supérieure au maximum prévu par l'article 145-2 du code de procédure pénale ; qu'en l'espèce, Mme Z... a été détenu pendant un an en Norvège ; qu'en jugeant que le délai prévu par l'article 145-2 pour le maintien de la détention provisoire ou sa prolongation court à compter seulement de l'écrou sur le territoire national, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;
"2°) alors que il résulte de l'article 144 du code de procédure pénale que la détention provisoire ne peut être ordonnée ou maintenue que s'il est démontré qu'elle est, notamment, l'unique moyen de mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public ; qu'en se bornant à affirmer que les faits d'enlèvement par leur mère de deux mineurs de moins de quinze ans, durant un mois, dans un état étranger ont causé un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public que seule la détention provisoire permet d'apaiser, sans expliquer suffisamment, par des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, en quoi, plus de deux ans après les faits reprochés, l'ordre public serait troublé de manière exceptionnelle et persistante, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés ;

"3°) alors que la détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s'il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un ou plusieurs des objectifs définis par l'article susvisé et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique ; qu'en jugeant que les garanties proposées, consistant en un hébergement chez la soeur de Mme Z... (Malika) étaient insuffisantes à assurer la représentation en justice de la mise en examen qui ne peut être garantie que par sa détention provisoire, au motif que sa soeur n'avait pas signalé le prétendu enlèvement des enfants aux services sociaux ou à la police, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés" ;
Sur le moyen pris, en ses première et troisième branches ;
Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;
Attendu que les griefs ne sont pas de nature à être admis ;
Sur la deuxième branche du moyen ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'à la suite de l'enlèvement des enfants Abdelkader et Youssef Z... par leur mère, Mme Samia Z..., alors qu'ils étaient confiés à leurs grands-parents maternels, celle-ci a fait l'objet d'un mandat d'arrêt délivré le 31 août 2016 par le juge d'instruction, suivi de la diffusion d'un mandat d'arrêt européen, que Mme Z... a été interpellée le 12 septembre 2016 en Norvège, en compagnie des enfants mineurs, qu'elle a été remise aux autorités françaises le 16 octobre 2017 et mise en examen le lendemain des chefs d'arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire de mineurs de 15 ans, non représentation d'enfant et rétention hors de France, qu'elle a été placée en détention provisoire ; qu'elle a présenté une demande de mise en liberté qui a été rejeté le 23 mai 2018 par le juge des libertés et de la détention; qu'elle a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance entreprise, l'arrêt relève que, tant la mobilité de Mme Z... avant les faits, dénoncée par les services éducatifs qui soulignaient ses multiples déménagements tant en France qu'à l'étranger, destinés à faire échec au suivi éducatif de ses enfants, que les faits qui lui sont reprochés qui révèlent qu'elle a pu traverser l'Europe durant un mois en compagnie de deux jeunes enfants, alors même qu'elle était recherchée, attestent que la mise en examen est en mesure d'organiser une fuite pérenne à l'étranger, que celle-ci a été condamnée à plusieurs reprises par des décisions contradictoires à signifier et a déjà fait usage du nom d'un tiers, qu'il est à craindre que compte tenu de la gravité de la peine criminelle encourue, elle ne tente de se soustraire à la justice ; que les garanties proposées, consistant en un hébergement chez sa soeur Malika, qui, bien qu'informée par la mise en examen de l'enlèvement des enfants n'a pas signalé celui-ci aux services sociaux ou à la police et en un contrat de travail non signé, sont manifestement insuffisantes à assurer la représentation en justice de la mise en examen ; que la chambre de l'instruction ajoute que l'absence de toute adhésion de la mère au suivi éducatif de ses enfants et notamment à leur placement auprès de leurs grands-parents maternels, son déni de ses difficultés de prise en charge de ceux-ci et d'une façon plus générale le non respect par la mise en examen des décisions judiciaires sont de nature à faire craindre, dans l'attente du retour des expertises psychologique ou psychiatrique permettant d'éclairer sa personnalité, un renouvellement de l'infraction ; que la proposition de domiciliation de Mme Z... à Valenciennes, soit à proximité immédiate de ses enfants, et sans qu'il soit même justifié de l'existence d'un suivi psychologique en maison d'arrêt, ne peut que majorer ce risque de renouvellement de l'infraction ; que la chambre de li'nstruction ajoute enfin que les faits criminels reprochés à la mise en examen, s'agissant de l'enlèvement par leur mère de deux mineurs de moins de quinze ans, durant un mois, dans un Etat étranger dont ils ne maîtrisaient pas la langue, sans respect de leur scolarisation et au mépris des liens affectifs qui unissaient ces derniers à leurs grands parents maternels qui en avaient la garde, ont causé, par leur gravité et les circonstances précitées, un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public que seule la détention provisoire permet d'apaiser ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;REJETTE le pourvoi ;Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. X..., conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre ;
Avocat général : M. Y... ;




En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 18 septembre 2018 n° 15-81.316 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

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--le procureur général près la cour d'appel de Paris,etl'URSSAF Ile de France, venant aux droits de l'URSSAF de Paris-Région parisienne,la Caisse de retraite du personnel navigant de l'aéronautique civile,l'Union des navigants de l'aviation civile,la SCP Becheret - Thierry - Sénéchal - Gorrias,ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Trans hélicoptère services,le Syndicat national du personnel navigant commercial,le Syndicat national des pilotes de ligne, parties civiles,




contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 6-1, en date du 13 janvier 2015 qui, dans la procédure suivie contre la société Netjets Management Limited, des chefs de travail dissimulé, prêt illicite de main d'oeuvre, marchandage, entrave à la libre désignation des délégués du personnel, et contre la société Netjets Transportes Aeroes, des chefs de prêt illicite de main d'oeuvre et marchandage, les a renvoyées des fins de la poursuite et a débouté les parties civiles de leurs demandes ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 19 juin 2018 où étaient présents : M. Soulard, président, M.Barbier, conseiller rapporteur, M. Straehli, Mme Durin-Karsenty, MM. Cathala, Ricard, Parlos, Bonnal, Mme Ménotti, conseillers de la chambre, M. Talabardon, Mme de-Lamarzelle, conseillers référendaires ;
Avocat général : Mme Caby ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Barbier, les observations de Me BERTRAND, de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, de la société civile professionnelle GATINEAU et FATTACCINI, de la société civile professionnelle BORÉ, SALVE DE BRUNETON et MÉGRET, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire Caby , Me FATTACCINI, Me LYON-CAEN et Me BORÉ ayant eu la parole en dernier ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
I. Sur le pourvoi formé par le Syndicat national du personnel navigant commercial :
Attendu qu'aucune constitution d'avocat en demande n'est intervenue pour le Syndicat national du personnel navigant commercial (SNPNC) dans le délai d'un mois après la date du pourvoi, formé le 16 janvier 2015, et qu'aucune dérogation n'a été accordée par le président de la chambre criminelle ;
Qu'il s'ensuit que les mémoires déposés dans l'intérêt de cette partie par la C... ne sont pas recevables en ce qu'ils seraient des mémoires en demande et ne saisissent pas la Cour de cassation des moyens qu'ils pourraient contenir ;


II. Sur les autres pourvois :
Sur les moyens présentés par le procureur général près la cour d'appel de Paris :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, de l'article 14 2) a) ii du règlement CEE n°1408/71, du décret n° 2006-1425 du 21 novembre 2006 relatif aux bases d'exploitation des entreprises de transport aérien ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (article 49 à 55), de l'article L. 1262-3 du code du travail ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 593 du code de procédure pénale ;
Sur les moyens proposés pour la Caisse de retraite du personnel navigant de l'aéronautique civile, l'Union des navigants de l'aviation civile et le Syndicat national des pilotes de ligne :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de la Convention de Rome du 19 juin 1980, de Particle 14 2)a) du règlement CEE n°1408/71, du décret n°2006-1425 du 21 novembre 2006 relatif aux bases d°exploitation des entreprises de transport aérien, des articles L. 1262-3 et L. 8221-3 du code du travail, 121-2 du code pénal, 459, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement déclarant la société Netjets Management non coupable, l'a relaxée des fins de la poursuite du chef de travail dissimulé par dissimulation d'activité et a débouté la CRPNPAC, l'UNAC et la SNPL, parties civiles, de leurs demandes d'indemnisation ;
"aux motifs qu'il est résulté de ces investigations que le Groupe Netjets, qui ne propose pas des vols sur des lignes régulières, met des avions à la disposition de ses clients pour leur permettre une « totale liberté de déplacement ››, leur offrant un «programme de propriété partagée d 'avions ›› ; que « cette compagnie d 'aviation d'affaires s'est implantée en Europe en 1996 en concluant un partenariat avec une compagnie détenant une licence de vol portugaise nécessaire au transport de passagers, à compter de 2007 en créant la société Nta chargée de la gestion opérationnelle des vols en Europe, à laquelle une licence d 'exploitation de vol avait été attribuée pour des aéronefs immatriculés au Portugal ›› ; que « ce concept a permis aux entreprises ainsi qu'à leurs dirigeants d'avoir accès à une flotte d'avions utilisables selon leurs besoins ›› ; que «la société a assuré à ce titre des vols, non réguliers, mais à la demande du client, à partir de n'importe quel aéroport où un avion peut décoller et vers n'importe quel aéroport où il peut atterrir ›› ; que le groupe Netjets Europe, dont M. Alec D... est le directeur juridique et l'un des membres du conseil de gérance, comprend plusieurs sociétés :- la société Netjets Management Limited (ci-après Netjets Management) de droit anglais, qui prend en charge les aspects commerciaux de la société Netjet Inc-marketing, ventes, finances, événementiel et autres activités non opérationnelles et gère en particulier l'activité commerciale en Europe,- la société Netjets France, société française, filiale de Netjets Management, située 151 boulevard Haussmann à Paris, avec une équipe de cinq salariés ayant pour responsable Mme Marine E... et comprenant des commerciaux, sans lien de droit ou hiérarchique avec les équipages, qui prend en charge notamment le démarchage, la publicité, la représentation commerciale et la recherche de clientèle,- la société Netjets Transportes Aeroes (ci-après NTA), société portugaise, qui est une plate-forme opérationnelle,- la société Netjets Europe Ltd, centre administratif de droit suisse, avec un associé unique, la société Netjets Management Ltd à qui elle a fait un apport en numéraire d'un euro lors de sa constitution ›› ; que « Netjets Europe est également le nom commercial du groupe en Europe, lequel comprend des bases d 'affectations en France telles que les aéroports de Paris-Le-Bourget, Lyon, Nice-Canne-Mandelieu, Marseille, Toulouse et Bordeaux ›› ; qu'«il n 'est pas contesté que la société Netjets Management et la société Nta, dont les sièges sont respectivement à Londres et à Lisbonne, n'ont pas été immatriculées au registre du commerce et des sociétés ›› ; qu' « il ressort de l'enquête que la société Netjets Management emploie depuis 2007 des équipages de toutes nationalités, y compris française, pour desservir l'Europe ›› ; qu'« elle ne dispose d'aucun personnel au sol en France, ces agents étant exclusivement employés par Nta à Lisbonne, ne possède aucun avion et ne détient aucune licence de transport» ; qu' « elle recrute en revanche les salariés navigants qu'elle met à la disposition de la société Nta, gère leur contrat de travail et leurs fiches de paie et leur verse leur rémunération ›› ; que «de son côté, la société Nta, en charge de l'activité de transporteur aérien, est propriétaire des cent cinquante aéronefs qui sont immatriculés au Portugal et gère la totalité des opérations de vols du groupe Netjets en Europe, qu 'il s'agisse des plannings, de la maintenance ou de l'approvisionnement ›› ; que, «bénéficiant d 'une délégation de Netjets Management pour signer les contrats de travail avec une clause prévoyant que «L'adresse du bureau dont le membre de l'équipage de vol dépendra et auquel il adressera toutes demandes concernant son emploi est [...] , Londres, W8 5 E », c'est cette société basée au Portugal qui procède au recrutement et au licenciement du personnel navigant sous sa dépendance hiérarchique, assure sa formation et son encadrement, plus généralement assume la fonction de gestion sociale ›› ; que « s 'il a été admis par le directeur juridique du groupe que, sur les quelques mille personnels navigants mis par la société Netjets Management à disposition de la société Nta, cent quatre-vingt-seize, Français ou étrangers, résident en France, les enquêteurs n'ont pu entendre que quinze d'entre eux afin de déterminer s 'ils avaient été embauchés en violation des lois françaises, quand même n'auraient-ils émis aucune plainte ›› ; que «les personnels navigants ont déclaré aux enquêteurs qu 'ils avaient été embauchés, pour certains en France et pour d'autres à l'étranger, que la plupart a passé son entretien d'embauche en langue anglaise dans les locaux de la société Flight Safety situé à l'aéroport du Bourget, puis reçu une formation dispensée par la Société Nta au Portugal» ; que «leurs contrats de travail, tel celui de M. F... en date du 1er décembre 2007, rédigés en langue anglaise et signés le plus souvent au Portugal, soumis au droit anglais et à la compétence des tribunaux anglais, prévoyaient le rattachement de chaque salarié, dont la résidence relevé de leur libre choix sous réserve d'être à proximité de l'un des quarante-quatre aéroports mentionnés sur une liste remise par l'employeur, avec possibilité d'en changer plus ou moins régulièrement, à un aéroport de passage (« gateway ») à partir duquel ils était pris en dix charge pour être acheminé vers l'avion à bord duquel il devait travailler, une clause stipulant que l'aéroport de passage n'était pas considéré comme un lieu d 'exercice de l'activité professionnelle ›› ; que « le choix de l'« aéroport de passage ›› qui n'était pas mentionné dans le contrat de travail devait cependant être validé par la Société Netjets Management aux termes d'une clause stipulant en termes généraux que le « membre de l'équipage de vol doit choisir un aéroport duquel, à condition que cet aéroport soit accepté par la société, il sera transporté vers son appareil pour le début de ses fonctions ; que selon cet accord, l'aéroport de passage, n 'est pas et ne sera pas considéré comme le lieu de travail du membre de l'équipage de vol ou sa base ; qu'il est reconnu par les présentes par les deux parties que le lieu où le membre de l'équipage de vol exerce la totalité de ses fonctions dépend entièrement de l'endroit où se trouve l'appareil et le vol qui est effectué ›› ; que, « tel Cédric G..., les salariés navigants français avaient choisi un aéroport de passage en France, à proximité de leur aéroport de passage, et payaient leur taxe d 'habitation en France ›› ; qu'« aucun des salariés entendus n 'avait choisi Cannes ou Le Bourget comme aéroport de passage » ; qu'«il ressort de ces auditions que la gestion opérationnelle des membres de l'équipage dans tous ses aspects était prise en charge par les équipes de la Société Nta à Lisbonne ›› ; qu '« en effet, les salariés recevaient leurs instructions de vol directement de la Société Nta et, plus particulièrement de leur « chef de flotte » portugais basé à Lisbonne, leurs prévisions de vol leur étaient envoyées par mail de la Société Nta sur leur blackberry de service remis par la Société Netjets Management, leurs périodes de mission étaient planifiées par la Société Nta, leur uniforme leur étaient remis au Portugal, leur carte professionnelle portait le logo de l 'INAC, autorité de tutelle portugaise, les billets destinés aux vils de positionnement étaient acheté au Portugal » ; que, «s'agissant de la couverture sociale, tou en disposant d'une carte vitale, ils recevaient des formulaires E101 ou E106, régulièrement délivrés par l'organisme de sécurité sociale anglais (HRMC) en application du règlement CEE 1408/71 relatif à l'application des régimes de sécurités sociales au travailleurs salariés et acceptés en France par la CLEIS, autorisant une personne employée par une compagnie de transport aériens de passagers à être soumise aux lois de l'Etat-membre ou la compagnie a son siège, les cotisations sociales étant, sur ce fondement, payées en Angleterre ›› ,' qu '« ils bénéficiaient également d 'une assurance privée, l 'assurance BUPA Internationale, mutuelle financée par l'employeur, d 'un fond de pension au sein de la Société Netjets, à un plan a épargne retraite anglais ›› ; qu'« ils ont indiqué ne jamais avoir passé de visite médicale en France, à l'exclusion de visites d 'aptitude » ; qu'« ils payaient leurs impôts au Portugal, par prélèvement à la source ›› ; qu' «il s'établit de l'enquête que les quinze membres du personnel navigant entendus par les enquêteurs n'ont pas été soumis au droit social français et à la convention collective applicable à la main d'oeœuvre employée en France, la société Netjets Management qui ne disposait d'aucune infrastructure sur le territoire français, ni à aucun personnel au sol en France et n'avait conclu aucun contrat de sous-traitance, ne s 'étant pas acquittée des charges sociales et n'ayant pas procédé aux obligations déclaratives de l'employeur ››, - Que, - s'agissant du personnel au sol recruté par Nta pour ses activités d'accueil des clients, de coordination de la maintenance, de réalisation de la documentation et des formalités administratives, qu'il est établi qu'entre 2006 et 2008, trois à neuf personnes ont été employées dans les aéroports du Bourget et de Nice Cannes-Mandelieu ›› ; qu' «il n'est pas contesté que l'ensemble des contrats de ce personnel au sol était en règle au regard du droit du travail et de la sécurité sociale français ›› ; que « la société Nta, représentée en France par la société d 'Etudes et de Développement International (SEDI France), avait signé avec ces salariés sans lien organisationnel avec les équipages employés par la société Netjets Management relevant de la direction basée au Portugal un contrat de travail français, soumis au droit français du travail et de la sécurité sociale ›› ; qu'« à la date de la signature du mandat, le 3 janvier 2006, la société Nta déclarait s'occuper de transmettre les déclarations salariales et de payer les charges en France pour son personnel au sol du Bourget et de Cannes ›› ; que «les enquêteurs ont constaté que la société Nta avait une autorisation d'activité à l'aéroport du Bourget, dans la zone d'aviation d'affaires où elle disposait de deux bureaux composés de quatre postes de travail, qu'elle bénéficiait d'un contrat de sous-location conclu entre l'Aeroport de Paris en qualité de bailleur, la société Signature Flight Support Paris, en qualité de locataire, et elle-même en qualité de sous-locataire portant sur 112,22 m2 dont 5 7, 68 m2 de bureaux et 54,54 m2 de hangar ›› que « la société a en outre un comptoir de 6 m2 dans l 'aérogare de Cannes ou elle dispose d 'une simple autorisation d'occupation temporaire du domaine public aéronautique passée entre la chambre de commerce et d 'industrie de Nice-Côte-d 'Azur et la SA Netjets De Paco D'Arcos au Portugal ›› ; qu' « un contrat d'assistance lie Netjets et Swissport pour l'accueil des personnes au sol, des facilités de certaines modalités douanières ou la préparation des documents météo ›› ; qu' « un contrat d'assistance commerciale a, par ailleurs, été conclu entre Elite Cleaning et Netjets, en complément de la mission de la Société Swissport» ; qu'« une salariée de Nta, Mme K... , est installée dans un bureau de la Société Swissport ›› ; que, «si environ 16163 mouvements ont été enregistrés entre le 1er janvier 2005 et le 4 août 2008 sur les aéroports français ayant fait l 'objet de l'enquête, il s 'agit pour l'essentiel de vols internationaux, M. Alec D... ayant même pu affirmer au vu des statistiques de vols des membres d'équipage visés par la prévention que moins de 20% du personnel navigant résidant en France effectuaient un vol aller ou retour à partir ou vers des aéroports français et que seulement 5,6% des vols réalisés par ces pilotes étaient des vols domestiques » ; que, « s'agissant de l'existence de six badges d'accès à l'aéroport du Bourget et de dix-sept badges d'accès aux aéroports de la Côte d'Azur au personnel Netjets, il a été indiqué par les prévenus qu 'il s'agissait de badges temporaires ›› ; que «les sociétés Netjet Management et Nta sont finalement prévenues d'avoir dissimulé une activité, exercée dans un but lucratif de transporteur aérien de passagers en omettant, intentionnellement, de déclarer aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale des salariés embauchés dans le seul but de travailler sur le territoire français et à partir de bases d'exploitation situées en France, qu'elles ont irrégulièrement considérés comme des travailleurs détachés, et dissimulé leur emploi en ne procédant pas à la déclaration préalable à l'embauche de 156 personnels navigants, la première recrutant ces premiers sous contrat de droit britannique dans le but de les mettre à dispositions de la seconde en éludant le droit du travail national et sans s 'acquitter du paiement des charges sociales ›› ; qu'" il y a lieu de rechercher la réunion des éléments constitutifs des infractions de travail dissimulé en la personne de chacune des personnes morales, quoique Nta ait été poursuivie des chefs de marchandage et de prêt de main d'oeœuvre à but lucratif qualification abandonnée par le parquet pour une requalification en délits de travail dissimulé commis par les deux prévenues en qualité de coauteurs ›› ; qu'« en droit, il résulte de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable au contrat de travail ne peut avoir pour effet de priver un travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable à défaut de choix et que, dans cette hypothèse, la loi applicable au contrat est celle du pays ou le travailleur, en exécution de son contrat, accomplit son travail, même s'il est détaché à titre temporaire dans un autre pays » ; qu'« à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi applicable est celle de l'Etat où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur ›› ; qu'« une clause d'exception permet enfin de faire régir le contrat par une autre loi que celle désignée dans les deux cas ci-dessus lorsqu'il apparaît que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays ›› ; que « l'article 7 rappelle la primauté des lois de police du pays avec lequel le salarié présente un lien étroit» ;que « la cour de justice de l'union européenne juge (aff C-29/10, 15 mars 2011, Z.) que, compte tenu de l 'objectif poursuivi par l'article 6 de la Convention de Rome, le critère du pays ou le travailleur « accomplit habituellement son travail ››, édicté au paragraphe 2, sous a), doit être interprété de façon large, alors que le critère du siège de « l'établissement qui a embauché le travailleur ››, prévu au paragraphe 2, sous b), ne devrait s'appliquer que lorsque le juge saisi n 'est pas en mesure de déterminer le pays d 'accomplissement habituel du travail, et qu'il découle de ce qui précède que le contenu à l'article 6, paragraphe 2, sous a), de la Convention de Rome a vocation à s'appliquer également dans une hypothèse où le travailleur exerce ses activités dans plus d'un Etat contractant, lorsqu'il est possible, pour la juridiction saisie, de déterminer l'Etat avec lequel le travail présente un rattachement significatif» ; que « le décret n°2006-1425 du 21 novembre 2006 relatif aux bases d'exploitation des entreprises de transport aérien a inséré au code de l'aviation civile un article R. 330-2-1 disposant que l'article L. 342-4 (devenu L.1262~3) du code du travail est applicable à compter du 18 janvier 2007 aux entreprises de transport aérien au titre de leurs bases d'exploitation situées sur le territoire français lorsqu'elles y ont leurs locaux ou infrastructures à partir desquelles elles exercent de façon stable, habituelle et continue une activité de transport aérien, avec des salariés qui y ont le centre effectif de leur activité professionnelle ›› ; qu'« au sens de ces dispositions, le centre d'activité professionnelle d'un salarié est le lieu où, de façon habituelle, il travaille ou celui où il prend son service et retourne après l'accomplissement de sa mission ›› que « l'article L. 342-4 du code du travail dispose qu'un employeur ne peut se prévaloir des dispositions applicables au détachement de salariés lorsque son activité est entièrement orientée vers le territoire français ou lorsqu'elle est réalisée dans des locaux ou avec des infrastructures à partir desquels elle est exercée de façon habituelle, stable et continue, notamment en recherchant et prospectant une clientèle ou en recrutant des salariés sur ce territoire que l'employeur est, dans cette situation, assujetti aux dispositions du code du travail applicables aux entreprises établies sur le territoire français ›› ; que, « s'agissant de la détermination du droit applicable en matière de sécurité sociale, en vertu de l 'article 13, § 2a,) du règlement CEE du conseil n° 1408/71, le personnel au sol qui exerce une activité salariée de manière habituelle sur le territoire d'un Etat membre (la France) est soumis à la législation de ce pays dès lors qu 'il ne remplit pas les conditions du détachement » ; que « le personnel navigant, soumis aux règles de l'article 14, § 2 a, relève de la loi, non du pays du siège de l'entreprise mais de celui où il est occupé par une succursale ou une représentation permanente ou au lieu d 'occupation prépondérante du salarié sur le territoire duquel il réside ›› ; que « la notion de succursale, d 'agence ou de tout autre établissement, qui implique pour la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE) un « centre d'opérations qui se manifeste à une façon durable vers l'extérieur comme le prolongement d'une maison mère ››, matériellement équipe pour pouvoir négocier directement des affaires avec des tiers de telle façon que ceux-ci soient dispensés de s'adresser au siège, correspondant à celle de « base d'exploitation ›› de l'article R. 330-2-1 du code de l'aviation civile » ; qu'« en réponse à une question du conseil de la société Netjets Management, la Commission européenne a indiqué en 2005 à cette dernière qu'à défaut de jurisprudence ou de position administrative ad hoc, le terme « occupation prépondérante ›› devait être entendu comme signifiant «plus de la moitié du temps de travail ›› ; qu'« en l'état de ces éléments de droit, et eu égard aux constatations de fait susvisées dont il ressort»,- que « la société Netjets Management qui n'est pas immatriculée en France est le seul employeur des personnels navigants cités par la prévention, mis à la disposition de la société Nta pour voler dans toute l'Europe sous l'autorité opérationnelle d 'un chef de flotte portugais », - qu'« elle ne s'est prévalue ni du régime du détachement de ses salariés prévu par l'article 14, § 1, du règlement CEE n° 1408/71, ni même de leur affectation à des missions temporaires », - qu' « elle n'est titulaire d'aucune licence de transport et n'est propriétaire ou locataire d'aucun avion, ne dispose d'aucune véritable emprise sur un aéroport français, n'y emploie aucun personnel au sol et n'a conclu aucune sous-traitance », - que «si le lieu de résidence du plus grand nombre des pilotes n'a pas été déterminé, aucun de ceux qui ont été interrogés n'avait cité Cannes ou Le Bourget comme aéroport de passage ››, - que « l'équipage de la filiale parisienne de la société prévenue, chargée de l'accueil de la clientèle, de la prise en charge de la maintenance, de la documentation et de l'approvisionnement du bord sous la responsabilité de Mme Marine E..., directrice commerciale expressément dépourvue, selon son contrat de travail, de tout pouvoir de représentation, était sans lien hiérarchique avec les équipages, succursale, ni de représentation permanente en France, en sorte qu'aucun des pilotes qu'elle emploie ne pouvait y être « occupé ››, - qu'« elle n 'exerce pas son activité de manière prépondérante sur le territoire national ou il n'est pas démontré que les pilotes soient « résidents ›› ››, qu'« il y a lieu de retenir que cette prévenue ne disposait pas d'une présence stable, continue et habituelle en France et que le personnel navigant visé par la prévention relevait, conformément à l'article 14, § 2a,) du règlement CEE n° 1408/71, du régime d 'affiliation du Royaume-Uni, pays du siège social de la société Netjets Management » ; que, « s'agissant des obligations fiscales, aucun élément de l'enquête ne démontre que la société Netjets management, qui le conteste fermement, se serait soustraire à des obligations fiscales ; qu'à défaut d'exercer aucune activité en France, il n 'y avait pas lieu à quelque déclaration que ce soit » ; que - faute d'être l'employeur des pilotes visés par la prévention, les délits de travail dissimulé ne peuvent être utilement recherchés en la personne de la société Nta ›› ;
"1°) alors que, l'insuffisance de motifs équivaut au défaut de motifs ; qu'il appartient au juge répressif de restituer aux situations juridiques dont il est saisi leur véritable qualification et de répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; qu'en présence d'un groupe de sociétés ayant conçu un montage juridique complexe, la cour d'appel doit procéder par une analyse globale afin de déterminer quelle est la nature juridique de l'activité réalisée par les sociétés appartenant à ce groupe lorsque ce montage est susceptible d'être frauduleux ; qu'en déniant la qualité de société de transport aérien à Netjets Management au motif qu'« elle n'est titulaire d'aucune licence de transport et n'est propriétaire ou locataire d'aucun avion, ne dispose d'aucune véritable emprise sur un aéroport français, n'y emploie aucun personnel au sol et n'a conclu aucune sous-traitance ›› et qu'elle « ne disposait pas d'une présence stable, continue et habituelle en France ››, sans rechercher comme l'y invitaient les parties civiles dans leurs conclusions, si la société Netjets Management n'exerçait pas l'activité de transporteur aérien en collaboration avec les sociétés Nta et Netjets France et pouvait dès lors se voir reprocher une dissimulation d'activité sur le territoire français compte tenu de sa présence stable, habituelle et continue en France, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
"2°) alors que, la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que la cour d'appel ne pouvait sans se contredire ou mieux s'en expliquer la société Netjets Management n'exerçait pas d'activité de transporteur aérien et dans le même temps faire application aux personnels visés par la prévention et employés par cette société, de l'article 2a) du règlement CEE n°1408/7 1 qui concerne le personnel navigant d'une entreprise effectuant pour son propre compte ou pour le compte d'autrui des transports internationaux de passagers par voie aérienne ; qu'en se prononçant ainsi par des motifs contradictoires, la cour d'appel a privé sa décision de motifs " ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de la Convention de Rome du 19 juin 1980, de l'artic1e 14 2)a) du règlement CEE n°1408/71 du 14 juin 1971, du décret n°2006-1425 du 21 novembre 2006 relatif aux bases d'exploitation des entreprises de transport aérien, des articles L. 8221-5 du code du travail, 121-2 du code pénal, 459, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement déclarant la société Netjets Management non coupable,l'a relaxée des fins de la poursuite du chef de travail dissimulé par dissimulation d'emploi et a débouté la CRPNPAC, l'UNAC et la SNPL, parties civiles, de leurs demandes d'indemnisation ;
"aux motifs reproduits au premier moyen ;
"1°) alors que tout arrêt doit comporter les motifs propres à justifier sa décision, la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que ne justifie pas sa décision une cour d'appel qui se prononce par un motif inopérant ; que pour écarter le territoire français comme lieu de résidence des 156 membres du personnel navigant cités dans la prévention, la cour d'appel a retenu que si le lieu de résidence du plus grand nombre de pilotes n'a pas été déterminé, aucun de ceux qui ont été interrogés n'avait cité Cannes ou Le Bourget comme aéroport de passage ; qu'en statuant ainsi tout en relevant que les sociétés prévenues avaient reconnu que 196 salariés résidaient en France, la circonstance qu'ils n'aient pas tous été auditionnés étant indifférente, la cour d'appel s'est contredite et a privé sa décision de motifs ;
"2°) alors qu'en vertu de l'article 14 2) a) ii du règlement CEE n°1408/71, la personne qui fait partie du personnel navigant d'une entreprise de transport aérien est soumise à la législation sociale de l'Etat où elle réside lorsqu'elle est occupée de manière prépondérante sur le territoire de cet État, même si l'entreprise qui l'occupe n'a ni siège, ni succursale, ni représentation permanente sur ce territoire ; que pour considérer le droit social français inapplicable, la cour d'appel a retenu que Netjets Management n'exerce pas son activité de manière prépondérante sur le territoire national où il n'est pas démontré que les pilotes soient résidents, les pilotes étant mis à disposition de la société Nta pour voler dans toute l'Europe et aucun des pilotes interrogés n'ayant cité Cannes ou le Bourget comme aéroport de passage ; qu'en fondant ainsi son analyse sur l'activité de la société Netjets Management alors qu'il lui incombait de se prononcer au regard de l'activité des personnels navigants concernés afin de déterminer s'ils excerçaient leur activité d'une manière prépondérante en France, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"3°) alors que la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que la cour d'appel a retenu la correspondance entre les notions de succursale, d'agence ou de tout autre établissement et le concept de base d'exploitation, prévu par l'article R. 330-2-1 du code de l'aviation civile, sans procéder à la même conclusion s'agissant de l'aéroport de passage qui recouvre pourtant une réalité identique et compte tenu duquel la société Netjets Management était tenu de procéder à la déclaration préalable à l'embauche et aux déclarations relatives aux cotisations sociales concernant les personnels dont l'aéroport de passage était situé en France ; qu'en se prononçant ainsi, la cour d'appel a statué par des motifs contradictoires ;
"4°) alors que la délivrance de certificats E 101 sur la base de déclarations unilatérales faites par un employeur auprès d'une institution de sécurité sociale d'un autre Etat membre ne saurait interdire au juge pénal français de constater la violation intentionnelle des dispositions légales applicables en France lorsque ces certificats ont été obtenus de façon abusive ; que pour relaxer Netjets Management des fins de la poursuite pour travail dissimulé, la cour d'appel a jugé que sur demande de cette société, les formulaires E 101 avaient été régulièrement délivrés au personnel navigant par l'organisme de sécurité sociale anglais en application du règlement CEE 1408/71, dans la mesure où étant dépourvue de «direction et d'équipement, lui permettant de négocier des affaires avec des tiers sans s'adresser à la maison mère ››, cette société ne dispose «ni de succursale, ni de représentation permanente en France, en sorte qu'aucun des pilotes qu'elle emploie ne pouvait y être «occupé ›› ; qu'en statuant par de tels motifs qui, en violation du règlement précité, empêchaient toute sanction pénale de Netjets pour travail dissimulé en dépit du caractère frauduleux de la stratégie mise en place par les organes ou dirigeants du groupe et consistant en l'emploi de personnels navigants par deux structures successives dont le seul objectif était de créer un processus d'optimisation sociale et fiscale permettant d'éluder la loi nationale pour des activités stables et permanentes, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation de la Convention de Rome du 19 juin 1980, de l'article 14 2)a) du règlement CEE n°1408/71, du décret n°2006-1425 du 21 novembre 2006 relatif aux bases d'exploitation des entreprises de transport aérien, des articles L. 1262-3 et L. 8221-3 du code du travail, 121-2 et 121-4 du code pénal, 459, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement déclarant la société Nta non coupable, l'a relaxée des fins de la poursuite du chef de travail dissimulé par dissimulation d'emploi et a débouté la CRPNPAC, l'UNAC et la SNPL, parties civiles, de leurs demandes d'indemnisation ;
"aux motifs reproduits au premier moyen ;
"alors que, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier sa décision et que la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; que pour relaxer la société Nta des poursuites de travail dissimulé, la cour d'appel a retenu qu'elle n'était pas l'employeur des pilotes visés par la prévention ; qu'en se prononçant ainsi alors qu'il ressortait de ses propres constatations l'existence d'un pouvoir de direction exercé conjointement par la société Netjets Management et la société Nta pernettant de retenir à l'encontre de Nta la qualité de coauteur des délits de travail dissimulé, la cour d'appel s'est contredite et a privé sa décision de motifs" ;
Sur les moyens proposés pour l'URSSAF Ile de France, venant aux droits de l'URSSAF de Paris-Région parisienne :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 1262-3 (ex L342-4), L. 8221-3 (ex L 324-10), L. 8224-5 (ex L362-6) du code du travail, 52 à 66 du Traité de Rome du 25 mars 1957, de la Convention de Rome du 19 juin 1980, R. 330-2-1 du code de l'aviation civile, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé la société Netjets Management Limited du chef de travail dissimulé par dissimulation d'activité et débouté la demanderesse de ses demandes après l'avoir déclarée recevable en sa constitution de partie civile ;
"aux motifs qu' il n'est pas contesté que la société Netjets Management et la société Nta, dont les sièges sont respectivement à Londres et à Lisbonne, n'ont pas été immatriculées au registre du commerce et des sociétés ; qu'il ressort de l'enquête que la société Netjets Management emploie depuis 2007 des équipages de toutes nationalités, y compris française, pour desservir l'Europe ; qu'elle ne dispose d'aucun personnel au sol en France, ces agents étant exclusivement employés par Nta à Lisbonne, ne possède aucun avion et ne détient aucune licence de transport ; qu'elle recrute en revanche les salariés navigants qu'elle met à la disposition de la société Nta, gère leur contrat de travail et leurs fiches de paie et leur verse leur rémunération ; que de son côté, la société NTA, en charge de l'activité de transporteur aérien, est propriétaire des cent cinquante aéronefs qui sont immatriculés au Portugal et gère la totalité des opérations de vols du groupe Netjets en Europe, qu'il s'agisse des plannings, de la maintenance, de l'approvisionnement ; que, bénéficiant d'une délégation de Netjets Management pour signer les contrats de travail avec une clause prévoyant que « l'adresse du bureau dont le membre de l'équipage de vol dépendra et auquel il adressera toutes demandes concernant son emploi est 5 Young Street, Kensington, Londres, W 8 5 E », c'est cette société basée au Portugal, qui procède au recrutement et au licenciement du personnel navigant sous sa dépendance hiérarchique, assure sa formation et son encadrement, plus généralement assume la fonction de gestion sociale ; que s'il a été admis par le directeur juridique du groupe que, sur les quelques mille personnels navigants, mis par la société Netjets Management à disposition de la société Nta, cent quatre vingt seize, français ou étrangers, résident en France, les enquêteurs n'ont pu entendre que quinze d'entre eux afin de déterminer s'ils avaient été embauchés en violation des lois françaises, quand même n'auraient-ils émis aucune plainte ; que les personnels navigants ont déclaré aux enquêteurs qu'ils avaient été embauchés, pour certains en France et pour d'autres à l'étranger, que la plupart a passé son entretien d'embauche en langue anglaise dans les locaux de la société Flight Safety situé à l'aéroport du Bourget, puis reçu une formation dispensée par la société Nta au Portugal ; que leurs contrats de travail, tel celui de M. F... en date du 1er décembre 2007, rédigés en langue anglaise et signés le plus souvent au Portugal, soumis au droit anglais et à la compétence des tribunaux anglais, prévoyaient le rattachement de chaque salarié, dont la résidence relevait de son libre choix sous réserve d'être à proximité de l'un des quarante quatre aéroports mentionnés sur une liste remise par l'employeur, avec possibilité d'en changer plus ou moins régulièrement, à un aéroport de passage (« gateway »), à partir duquel il était pris en charge pour être acheminé vers l'avion à bord duquel il devait travailler, une clause stipulant que l'aéroport de passage n'était pas considéré comme un lieu d'exercice de l'activité professionnelle ; que le choix de « l'aéroport de passage » qui n'était pas mentionné dans le contrat de travail devait cependant être validé par la société Netjets Management aux termes d'une clause du contrat stipulant en termes généraux que « le membre de l'équipage de vol doit choisir un aéroport duquel, à condition que cet aéroport soit accepté par la société, il sera transporté vers son appareil pour le début de ses fonctions ; que selon cet accord, [], l'aéroport de passage, n'est pas et ne sera pas considéré comme le lieu de travail du membre de l'équipage de vol ou sa base ; qu'il est reconnu par les présentes par les deux parties que le lieu où le membre de l'équipage de vol exerce la totalité de ses fonctions dépend entièrement de l'endroit où se trouve l'appareil et le vol qui est effectué » ; que, tel M. Cédric G..., les salariés navigants français avaient choisi un aéroport de passage en France, résidaient tous en France, à proximité de leur aéroport de passage, et payaient leur taxe d'habitation en France ; qu'aucun des salariés entendus n'avait choisi Cannes ou Le Bourget comme aéroport de passage ; qu'il ressort des auditions que la gestion opérationnelle des membres d'équipage dans tous ses aspects était prise en charge par les équipes de la société Nta à Lisbonne ; qu'en effet, les salariés recevaient leurs instructions de vol directement de la société Nta, et plus particulièrement de leur « chef de flotte » portugais basé à Lisbonne, leurs prévisions de vol leur étaient envoyées par mail de la société Nta sur leur blackberry de service remis par la société Netjets Management, leurs périodes de missions étaient planifiées par la société Nta, leur uniforme leur étaient remis au Portugal, leur carte professionnelle portait le logo de l'INAC, autorité de tutelle portugaise, les billets destinés aux vols de positionnement étaient achetés au Portugal ; que s'agissant de la couverture sociale, tout en disposant d'une carte vitale, ils recevaient des formulaires E 101 ou E 106, régulièrement délivrés par l'organisme de sécurité sociale anglais (HRMC), en application du règlement CEE 1408/71 relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés et acceptés en France par le CLEISS, autorisant une personne employée par une compagnie de transports aériens de passagers à être soumise aux lois de l'Etat membre où la compagnie a son siège, les cotisations sociales étant, sur ce fondement, payées en Angleterre ; qu'ils bénéficiaient également d'une assurance privée, l'assurance Bupa Internationale, mutuelle financée par l'employeur, d'un fonds de pension au sein de la société Netjets, d'un plan d'épargne retraite anglais ; qu'ils ont indiqué ne jamais avoir passé de visite médicale en France, à l'exclusion des visites d'aptitude ; qu'ils payaient leurs impôts au Portugal, par prélèvement à la source ; qu'il s'établit de l'enquête que les quinze membres du personnel navigants entendus par les enquêteurs n'ont pas été soumis au droit social français et à la convention collective applicable à la main d'oeuvre employée en France, la société Netjets Management qui ne disposait d'aucune infrastructure sur le territoire français, ni d'aucun personnel au sol en France et n'avait conclu aucun contrat de sous traitance, ne s'étant pas acquittée des charges sociales, et n'ayant pas procédé aux obligations déclaratives de l'employeur ; que s'agissant du personnel au sol recruté par Nta pour ses activités d'accueil des clients, de coordination de la maintenance, de réalisation de la documentation et des formalités administratives, il est établi qu'entre 2006 et 2008, trois à neuf personnes ont été employées dans les aéroports du Bourget et de Nice-Cannes-Mandelieu ; qu'il n'est pas contesté que l'ensemble des contrats de ce personnel au sol était en règle au regard du droit du travail et de la sécurité sociale français ; que la société Nta, représentée en France par la société d'Etudes et de Développement International (SEDI France), avait signé avec ces salariés sans lien organisationnel avec les équipages employés par la société Netjets Management relevant de la direction basée au Portugal un contrat de travail français, soumis au droit français du travail, et de la sécurité sociale ; qu'à la date de la signature du mandat, le 3 janvier 2006, la société Nta déclarait s'occuper de transmettre les déclarations salariales et de payer les charges en France pour son personnel au sol du Bourget et de Cannes ; que les enquêteurs ont constaté que la société Nta avait une autorisation d'activité à l'aéroport du Bourget, dans la zone d'aviation d'affaires où elle disposait de deux bureaux composés de quatre postes de travail, qu'elle bénéficiait d'un contrat de sous-traitance conclu entre l'aéroport de Paris, en qualité de bailleur, la société Signature Flight Support Paris, en qualité de locataire, et elle-même, en qualité de sous-locataire portant sur 112,22m², dont 57,68m² de bureaux et 54,54 m² de hangar ; que la société a en outre un comptoir de 6 m² à l'aérogare de Cannes où elle dispose d'une simple autorisation d'occupation temporaire du domaine public aéronautique passée entre la chambre de commerce et d'industrie de Nice-Côte d'Azur et la SA Netjets de Paco d'Arcos au Portugal ; qu'un contrat d'assistance lie Netjets et Swissport pour l'accueil des personnes au sol, des facilités de certaines modalités douanières ou la préparation des documents météo ; qu'un contrat d'assistance commerciale a, par ailleurs été conclu entre Elite Cleaning et Netjets, en complément de la mission de la société Swissport ; qu'une salariée de Nta, Mme K... , est installée dans un bureau de la société Swissport ; que si environ 16 163 mouvements ont été enregistrés entre le 1er janvier 2005 et le 4 août 2008 sur les aéroports français ayant fait l'objet de l'enquête, il s'agit, pour l'essentiel de vols internationaux, M. Alex D... ayant même pu affirmer au vu des statistiques des vols des membres d'équipage visés par la prévention, que moins de 20% du personnel navigant résidant en France effectuait un vol aller ou retour à partir ou vers des aéroports français et que seulement 5,6 % des vols réalisés par ces pilotes étaient des vols domestiques ; que, s'agissant de l'existence de badges d'accès à l'aéroport du Bourget et de 17 badges d'accès aux aéroports de la Côte d'Azur au personnel Netjets, il a été indiqué par les prévenus qu'il s'agissait de badges temporaires ; que les sociétés Netjets Management et Nta sont finalement prévenues d'avoir dissimulé une activité, exercée dans un but lucratif, de transporteur aérien de passagers en omettant intentionnellement, de déclarer aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale des salariés embauchés dans le seul but de travailler sur le territoire français et à partir de bases d'exploitation situées en France, qu'elles ont irrégulièrement considérés comme des travailleurs détachés, et dissimulé leur emploi en ne procédant pas à la déclaration préalable à l'embauche de 156 personnels navigants, la première recrutant ces derniers sous contrats de droit britannique dans le seul but de les mettre à disposition de la seconde en éludant le droit du travail national, et sans s'acquitter du paiement des charges sociales ; qu'il y a lieu de rechercher la réunion des éléments constitutifs des infractions de travail dissimulé en la personne de chacune des personnes morales, quoique Nta ait été poursuivie des chefs de marchandage et de prêt illicite de main d'oeuvre à but lucratif, qualification abandonnée par le Parquet, pour une requalification en délits de travail dissimulé commis par les deux prévenues en qualité de coauteurs ; qu'en droit, il résulte de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable au contrat de travail ne peut avoir pour effet de priver un travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable à défaut de choix (article 3) et que, dans cette hypothèse, la loi applicable au contrat est celle du pays où le travailleur, en exécution de son contrat, accomplit son travail, même s'il est détaché à titre temporaire dans un autre pays (article 6) ; qu'à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi applicable est celle de l'Etat où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur ; qu'une clause d'exception permet enfin de faire régir le contrat par une autre loi que celle désignée dans les deux cas ci-dessus lorsqu'il apparaît que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays ; que l'article 7 rappelle la primauté des lois de police du pays avec lequel le salarié présente un lien étroit ; que la Cour de justice de l'Union européenne (aff. C-29/10, 15 mars 2011, Z) juge que, compte tenu de l'objectif poursuivi par l'article de la convention de Rome, le critère du pays où le travailleur « accomplit habituellement son travail », édicté au paragraphe 2, sous a), doit être interprété de façon large, alors que le critère du siège de « l'établissement qui a embauché le travailleur », prévu au paragraphe 2, sous b), ne devrait s'appliquer que lorsque le juge saisi n'est pas en mesure de déterminer le lieu d'accomplissement habituel du travail, et qu'il découle de ce qui précède que le critère contenu à l'article 6, paragraphe 2, sous a), de la Convention de Rome, a vocation à s'appliquer également dans une hypothèse où le travailleur exerce ses activités dans plus d'un Etat contractant, lorsqu'il est possible, pour la juridiction saisie, de déterminer l'Etat avec lequel le travail présente un rattachement significatif ; que le décret n°2006-1425 du 21 novembre 2006 relatif aux bases d'exploitation des entreprises de transport aérien a inséré au code de l'aviation civile un article R. 330-2-1 disposant que l'article L. 342-4 (devenu L. 1262-3) du code du travail est applicable à compter du 1er janvier 2007 aux entreprises de transport aérien au titre de leurs bases d'exploitation situées sur le territoire français lorsqu'elles y ont leurs locaux ou infrastructures à partir desquels elles exercent de façon stable, habituelle et continue une activité de transport aérien, avec des salariés qui y ont le centre effectif de leur activité professionnelle ; qu'au sens de ces dispositions, le centre de l'activité professionnelle d'un salarié est le lieu où, de façon habituelle, il travaille ou celui où il prend son service et retourne après l'accomplissement de sa mission ; que l'article L. 342-4 du code du travail dispose qu'un employeur ne peut se prévaloir des dispositions applicables au détachement de salariés lorsque son activité est entièrement orientée vers le territoire français ou lorsqu'elle est réalisée dans des locaux ou avec infrastructures à partir desquels elle est exercée de façon habituelle, stable et continue, notamment en recherchant et prospectant une clientèle ou en recrutant des salariés sur ce territoire que l'employeur est, dans cette situation, assujetti aux dispositions du code du travail applicables aux entreprises établies sur le territoire français ; que s'agissant de la détermination du droit applicable en matière de sécurité sociale, en vertu de l'article 13, § 2 a), du règlement CEE du conseil n°1408/71, le personnel au sol qui exerce une activité salariée de manière habituelle sur le territoire d'un Etat membre (la France) est soumis à la législation de ce pays dès lors qu'il ne remplit pas les conditions du détachement ; que le personnel navigant, soumis aux règles de l'article 14,§ 2 a), relève de la loi, non du pays du siège de l'entreprise, mais de celui où il est occupé par une succursale ou une représentation permanente ou au lieu d'occupation prépondérante du salarié sur le territoire duquel il réside ; que la notion de succursale, d'agence ou de tout autre établissement, qui implique que pour la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) un « centre d'opérations qui se manifeste d'une façon durable vers l'extérieur comme le prolongement d'une maison mère », matériellement équipé pour pouvoir négocier directement des affaires avec des tiers de telle façon que ceux-ci soient dispensés de s'adresser au siège, correspond à celle de « base d'exploitation » de l'article R. 330-2-1 du code de l'aviation civile ; qu'en réponse à une question du conseil de la société Netjets Management, la Commission européenne a indiqué en 2005 à cette dernière qu'à défaut de jurisprudence ou de position administrative ad hoc, le terme « occupation prépondérante » devait être entendu comme signifiant, « plus de la moitié du temps de travail » ; qu'en l'état de ces éléments de droit, et eu égard aux constatations de fait susvisées dont il ressort –que la société Netjets Management qui n'est pas immatriculée en France, est le seul employeur de personnels navigants cités par la prévention, mis à la disposition de la société Nta pour voler dans toute l'Europe, sous l'autorité opérationnelle d'un chef de flotte portugais ;-qu'elle ne s'est prévalue, ni du régime du détachement de ses salariés, prévu par l'article 14, § 1, du règlement CEE n°1408/71, ni même de leur affectation à des missions temporaires ;-qu'elle n'est titulaire d'aucune licence de transport et n'est propriétaire ou locataire d'aucun avion, ne dispose d'aucune véritable emprise sur un aéroport français, n'y emploie aucun personnel au sol et n'a conclu aucun contrat de sous-traitance ;-que si le lieu de résidence du plus grand nombre des pilotes n'a pas été déterminé, aucun de ceux qui ont été interrogés n'avait cité Cannes ou Le Bourget comme aéroport de passage ;-que l'équipe de la filiale parisienne de la société prévenue, chargée de l'accueil de la clientèle, de la prise en charge de la maintenance, de la documentation et de l'approvisionnement à bord sous la responsabilité de Mme Marine E..., directrice commerciale expressément dépourvue, selon son contrat de travail, de tout pouvoir de représentation, était sans lien hiérarchique avec les équipages, succursale, ni de représentation permanente en France en sorte qu'aucun des pilotes qu'elle emploie ne pouvait y être « occupé » ;-qu'elle n'exerce pas son activité de manière prépondérante sur le territoire national où il n'est pas démontré que les pilotes soient « résidents », il y a lieu de retenir que cette prévenue ne disposait pas d'une présence stable, continue et habituelle en France et que le personnel navigant visé par la prévention relevait conformément à l'article 14, § 2 a), du règlement CEE n°1408/71, du régime d'affiliation du Royaume-Uni, pays du siège social de la société Netjets Management ; que s'agissant des obligations fiscales, aucun élément de l'enquête ne démontre que la société Netjets Management, qui le conteste fermement, se serait soustraite à des obligations fiscales ; qu'à défaut d'exercer aucune activité en France, il n'y avait pas lieu à quelque déclaration que ce soit ; que dès lors, c'est à bon droit que le tribunal a prononcé la relaxe de la société Netjets Management du chef de travail dissimulé ; que faute d'être l'employeur des pilotes visés par la prévention, les délits de travail dissimulé ne peuvent être utilement recherchés en la personne de la société Nta ; que la relaxe des sociétés prévenues des chefs de prêt de main d'oeuvre doit être confirmée dès lors que ni le caractère exclusif du prêt, ni le but lucratif de l'opération n'est démontré ; qu'il en est de même de la relaxe des faits de marchandage, le préjudice des salariés n'étant pas établi ;
"1°) alors qu'il résulte des dispositions des articles 52 et 59 du traité instituant la Communauté économique européenne, devenus respectivement les articles 43 et 49 du traité instituant la Communauté européenne, telles qu'interprétées de manière constante par la CJUE, qu'une entreprise d'un Etat membre qui maintient, dans un autre Etat membre, une présence permanente, y compris par le moyen d'un simple bureau géré par son personnel ou d'une personne indépendante mandatée par elle pour agir en permanence pour son compte comme le ferait une agence, relève des règles relatives au droit d'établissement et que la liberté de prestation de services garantie par le traité ne fait pas obstacle à ce qu'un Etat membre prenne les dispositions permettant d'éviter qu'un prestataire de services utilise cette liberté en vue de réaliser une activité entièrement et principalement tournée vers son territoire, de manière à se soustraire aux règles professionnelles qui lui seraient applicables s'il y était établi, une telle situation relevant au contraire des règles relatives au droit d'établissement ; qu'il ressort en l'espèce des propres constatations de l'arrêt attaqué que le groupe Netjets Europe comprenait « des bases d'affectation en France telles que les aéroports de Paris-Le Bourget, Lyon, Nice-Cannes-Mandelieu, Marseille, Toulouse et Bordeaux » ; que Netjets Management Limited employait et recrutait des personnels navigants résidant en France ayant choisi un aéroport de passage en France, le personnel au sol en France, recruté pour ses activités d'accueil des clients, de coordination de la maintenance, de réalisation de la documentation et des formalités administratives, étant quant à lui employé par Netjets Transportes Aéreos laquelle était propriétaire de 150 aéronefs immatriculés au Portugal ; que par ailleurs, la société Netjets Transportes Aereos disposait de deux bureaux en France composés de quatre postes de travail et bénéficiait d'un contrat de sous-location, outre un comptoir de 6 m² dans l'aérogare de Cannes ; qu'en outre, la société Netjets France, société française, filiale de Netjets Management Limited, disposait d'une équipe de cinq salariés ayant pour responsable Marine E..., directrice commerciale, laquelle était également vice-président de Netjets Management Limited, et comprenant des commerciaux, qui prenaient en charge le démarchage, la publicité, la représentation commerciale et la recherche de la clientèle ; qu'en relaxant la prévenue après avoir affirmé qu'elle n'exerçait aucune activité en France sans prendre en considération l'organisation interne entre les différentes sociétés du Groupe Netjets telle qu'elle résultait de ses propres constatations, laquelle mettait au contraire en évidence le développement d'une activité de transport aérien en France, visant spécialement la clientèle française, la cour d'appel a méconnu les textes visés au moyen et privé sa décision de toute base légale ;
"2°) alors qu'il résulte des dispositions des articles L. 1262-3 du code du travail et R. 330-2-1 du code de l'aviation civile que l'employeur doit être assujetti à la législation et à la réglementation françaises, notamment en ce qui concerne les déclarations à faire auprès des organismes sociaux, lorsqu'il dispose en France d'un ensemble de locaux ou d'infrastructures à partir desquels son entreprise exerce de façon stable, habituelle et continue une activité de transport aérien, avec des salariés y ayant le centre effectif de leur activité professionnelle ainsi que lorsque son activité comporte la recherche et la prospection d'une clientèle ou le recrutement de salariés sur ce territoire ; que pour relaxer la société Netjets Management Limited et écarter l'application de ces dispositions, l'arrêt attaqué se borne à relever qu'elle n'était titulaire d'aucune licence de transport, n'était propriétaire ou locataire d'aucun avion, et ne disposait d'aucune véritable emprise sur un aéroport français, n'y employant aucun personnel au sol et n'ayant conclu aucun contrat de sous-traitance ; qu'en statuant ainsi, sans prendre en considération l'organisation interne du groupe Netjets et les rapports entre les différentes sociétés du groupe de nature à établir l'existence d'une activité de transport aérien stable, habituelle et continue en France par le recrutement en France, de personnels navigants résidant en France à proximité d'un aéroport de passage situé en France par la société Netjets Management Limited, par la prospection d'une clientèle française du fait de sa filiale française Netjets France, par l'implantation d'une légère infrastructure en France, adaptée à ce type particulier de transport de luxe par le biais de la société Netjets Transportes Aéreos, par la conclusion de contrats d'assistance et de sous-traitance avec des entreprises françaises, et par l'activité en France de l'équipe de la filiale parisienne de la prévenue, chargée de l'accueil de la clientèle, de la prise en charge de la maintenance, de la documentation et de l'approvisionnement à bord, la cour d'appel a méconnu les textes précités et privé sa décision de toute base légale" ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-5, L. 8224-5 du code du travail, 14 2) a) ii) du règlement CEE n°1408/71, R. 330-2-1 du code de l'aviation civile, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé la société Netjets Management Limited du chef de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié ;
"aux motifs reproduits au premier moyen ;
"1°) alors que toute contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'il résulte en l'espèce des propres constatations de l'arrêt attaqué d'une part que le directeur juridique du groupe a admis que « sur les quelques mille personnels navigants mis par la société Netjets Management Limited à disposition de la société Netjets Transportes Aereos, 196, français ou étrangers, résident en France », et d'autre part que « les salariés navigants français avaient choisi un aéroport de passage en France, résidaient tous en France, à proximité de leur aéroport de passage, et payaient leur taxe d'habitation en France » ; qu'en affirmant néanmoins, pour relaxer la société Netjets Management Limited du chef de travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, que « le lieu de résidence du plus grand nombre de pilotes n'a pas été déterminé » et qu'il « n'est pas démontré que les pilotes soient « résidents » », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations de nature à établir que 196 personnels navigants résidaient en France, et qu'en tout état de cause, tous les salariés navigants français résidaient en France, privant de ce fait sa décision de relaxe de toute base légale ;
"2°) alors qu'il résulte des dispositions de l'article 14, § 2 a,) ii du règlement n°1408/71 du 14 juin 1971 relatif à la détermination des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés, ainsi qu'aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la communauté, que la personne occupée de manière prépondérante sur le territoire de l'État membre où elle réside est soumise à la législation de cet État, même si l'entreprise qui l'occupe n'a ni siège, ni succursale, ni représentation permanente sur ce territoire ; que pour écarter ces dispositions et affirmer que le personnel navigant relevait du régime d'affiliation du Royaume-Uni conformément à l'article 14, § 2 a), la cour d'appel se borne à relever qu'il n'était pas démontré que les pilotes résidaient en France ; qu'en se fondant sur ces motifs erronés et contredits par ses propres constatations selon lesquelles près de 20% des personnels navigants mis par la société Netjets Management Limited à la disposition de la société Netjets Transportes Aereos résidaient en France, la cour d'appel a méconnu les dispositions précitées et privé sa décision de toute base légale ;
"3°) alors encore que toute contradiction de motifs équivaut à leur absence ; que la cour d'appel ne pouvait justifier la relaxe de la société Netjets Management Limited en affirmant dans le même temps, d'une part qu'elle n'était titulaire d'aucune licence de transport et n'était propriétaire ou locataire d'aucun avion, et d'autre part que son personnel navigant relevait du régime d'affiliation du Royaume-Uni, pays de son siège social, conformément à l'article 14, § 2 a), qui soumet à la législation du pays du lieu du siège social la personne qui fait partie du personnel roulant ou navigant d'une entreprise effectuant, pour le compte d'autrui, ou pour son propre compte, des transports internationaux de passagers par voie aérienne ayant son siège sur le territoire d'un Etat membre, ces affirmations étant nécessairement exclusives l'une de l'autre ;
"4°) alors que la base d'exploitation est définie par l'article R. 330-2-1 du code de l'aviation civile comme « un ensemble de locaux ou d'infrastructures à partir desquels une entreprise exerce de façon stable, habituelle et continue une activité de transport aérien avec des salariés qui y ont le centre effectif de leur activité professionnelle » lequel précise que « le centre de l'activité professionnelle d'un salarié est le lieu où, de façon habituelle, il travaille ou celui où il prend son service et retourne après l'accomplissement de sa mission » ; qu'il ressortait en l'espèce des contrats de travail des personnels navigants de la société Netjets Management Limited tels que rappelés par l'arrêt attaqué que chaque salarié était rattaché à un aéroport de passage à proximité duquel il devait résider et à partir duquel il était pris en charge pour être acheminé vers l'avion à bord duquel il devait travailler, une clause stipulant que l'aéroport de passage n'était pas considéré comme un lieu d'exercice de l'activité professionnelle ; qu'il résultait encore de l'arrêt attaqué que les salariés navigants français avaient choisi un aéroport de passage en France et résidaient tous en France à proximité de cet aéroport ; qu'en refusant de considérer que ces aéroports de passage constituaient des bases d'affectation de la société Netjets Management Limited représentant le centre effectif de leur activité professionnelle dès lors qu'il était établi qu'ils y prenaient leur service et y retournaient après l'accomplissement de leur mission, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et méconnu les dispositions d'ordre public du code du travail et du code de l'aviation civile, imposant leur assujettissement à la loi française, lesquelles ne pouvaient être mises en échec par une clause rédigée dans le seul but de tenter d'éviter l'affiliation du personnel navigant travaillant en France et ayant choisi un aéroport de passage en France à l'affiliation aux régimes sociaux de protection sociale français dont le caractère obligatoire n'avait à l'évidence pas échappé à la prévenue" ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-5, L. 8224-5 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé la société Netjets Transportes Aereos des chefs de travail dissimulé par dissimulation d'activité et dissimulation d'emplois salariés ;
"aux motifs reproduits au premier moyen ;
"1°) alors que toute contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'il résulte en l'espèce des propres constatations de l'arrêt attaqué que la société Netjets Transportes Aereos, en charge de l'activité de transporteur aérien, propriétaire des cent-cinquante aéronefs immatriculés au Portugal, bénéficiait d'une délégation de Netjets Management Limited pour signer les contrats de travail, procédait au recrutement et au licenciement du personnel navigant sous sa dépendance hiérarchique, assurait sa formation et son encadrement, et plus généralement assumait la fonction de gestion sociale ; que l'arrêt attaqué relevait encore qu'il ressort des auditions des salariés navigants français que la gestion opérationnelle des membres d'équipage dans tous ses aspects était prise en charge par les équipes de la société Netjets Transportes Aereos à Lisbonne ; que les salariés recevaient leurs instructions de vol directement de la société Netjets Transportes Aereos, et plus particulièrement de leur chef de flotte portugais basé à Lisbonne, leurs prévisions de vol leur étant envoyées par mail de la société Netjets Transportes Aereos sur leur blackberry de service remis par la société Netjets Management Limited, leurs périodes de mission étant planifiées par la société Netjets Transportes Aereos ; qu'en relevant néanmoins, pour relaxer la société Netjets Transportes Aereos des chefs de travail dissimulé que la société Netjets Management Limited était le seul employeur des personnels navigants cités à la prévention, quand il résultait de l'ensemble de ses constatations que la société Netjets Transportes Aereos avait la qualité d'employeur conjoint de ces personnels, se comportant en véritable employeur et exerçant sur ces derniers son autorité pendant toute la durée des relations contractuelles, la cour d'appel s'est abstenue de tirer de ses propres constatations les conséquences légales qui s'en imposaient, privant de ce fait sa décision de toute base légale ;
"2°) alors que selon la jurisprudence de la Cour de cassation, hors l'existence d'un lien de subordination, une société faisant partie d'un groupe doit être considérée comme co-employeur à l'égard du personnel employé par une autre, s'il existe, entre elles, au-delà de la nécessaire coordination des actions économiques entre les sociétés appartenant à un même groupe et de l'état de domination économique que cette appartenance peut engendrer, une confusion d'intérêts, d'activités, de direction, se manifestant par une immixtion de l'une des sociétés dans la gestion économique et sociale de l'autre ; qu'en relaxant la société Netjets Transportes Aereos des chefs de travail dissimulé « faute d'être l'employeur des pilotes visés à la prévention », sans avoir pris en considération, ni le caractère indissociable des sociétés Netjets Management Limited et Netjets Transportes Aereos, laquelle ne pouvait exercer son activité de transporteur aérien sans le personnel navigant employé par la société Netjets Management Limited, ni l'immixtion directe de la société Netjets Transportes Aereos dans la gestion économique et sociale de la société Netjets Management Limited ayant pour effet de priver cette dernière de ses pouvoirs d'employeur, la cour d'appel a méconnu la jurisprudence précitée et privé sa décision de toute base légale" ;
Sur les moyens proposés pour la SCP Becheret - Thierry - Sénéchal - Gorrias, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Trans hélicoptère services :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 121-2, 131-8 et 131-9 du code pénal, L. 1262-3, L. 8224-5, L. 8224-1, L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-4, L. 8221-5, L. 8234-1, L. 8234-2, L. 8243-2, L. 8243-1 et L. 8241-1 du code du travail, 14 du règlement CEE n° 1408-71 du 14 juin 1971, R. 330-2-1 du code de l'aviation civile, 2, 3, 427, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé la société Netjets Management des chefs d'exécution d'un travail dissimulé par personne morale, fourniture illégale de main-d'oeuvre à but lucratif par personne morale, prêt de main d'oeuvre à but lucratif par personne morale hors du cadre légal du travail temporaire et débouté la SCP Becheret-Thierry-Sénéchal-Gorrias ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Trans Hélicoptère Service de ses demandes ;
"aux motifs que les sociétés Netjets Management et Netjets Transportes Aeroes sont finalement prévenues d'avoir dissimulé une activité, exercée dans un but lucratif, de transporteur aérien de passagers en omettant, intentionnellement, de déclarer aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale des salariés embauchés dans le seul but de travailler sur le territoire français et à partir de bases d'exploitation situées en France, qu'elles ont irrégulièrement considérés comme des travailleurs détachés, et dissimulé leur emploi en ne procédant pas à la déclaration préalable à l'embauche de cent cinquante-six personnels navigants, la première recrutant ces derniers sous contrats de droit britannique dans le seul but de les mettre à disposition de la seconde en éludant le droit du travail national et sans s'acquitter du paiement des charges sociales ; qu'il y a lieu de rechercher la réunion des éléments constitutifs des infractions de travail dissimulé en la personne de chacune des personnes morales, quoique Nta ait été poursuivie des chefs de marchandage et de prêt de main d'oeuvre à but lucratif, qualification abandonnée par le parquet pour une requalification en délits de travail dissimulé commis par les deux prévenues en qualité de coauteurs ; qu'il résulte de la Convention de Rome du 19 juin 1980 que le choix par les parties de la loi applicable au contrat de travail ne peut avoir pour effet de priver un travailleur de la protection que lui assurent les dispositions impératives de la loi qui serait applicable à défaut de choix et que, dans cette hypothèse, la loi applicable au contrat est celle du pays où le travailleur, en exécution de son contrat, accomplit son travail, même s'il est détaché à titre temporaire dans un autre pays ; qu'à titre subsidiaire, dans l'hypothèse où le travailleur n'accomplit pas habituellement son travail dans un même pays, la loi applicable est celle de l'État où se trouve l'établissement qui a embauché le travailleur ; qu'une clause d'exception permet enfin de faire régir le contrat par une autre loi que celle désignée dans les deux cas ci-dessus lorsqu'il apparaît que le contrat présente des liens plus étroits avec un autre pays ; que l'article 7 rappelle la primauté des lois de police du pays avec le salarié présente un lien étroit ; que la Cour de justice de l'union européenne juge (aff. C-29/10, 15 mars 2011, Z.) que, compte tenu de l'objectif poursuivi par l'article 6 de la Convention de Rome, le critère du pays où le travailleur « accomplit habituellement son travail », édicté au paragraphe 2, sous a), doit être interprété de façon large, alors que le critère du siège de « l'établissement qui a embauché le travailleur », prévu au paragraphe 2, sous b), ne devrait s'appliquer que lorsque le juge saisi n'est pas en mesure de déterminer le pays d'accomplissement habituel du travail, et qu'il découle de ce qui précède que le critère contenu à l'article 6, paragraphe 2, sous a), de la Convention de Rome a vocation à s'appliquer également dans une hypothèse où le travailleur exerce ses activités dans plus d'un État contractant, lorsqu'il est possible, pour la juridiction saisie, de déterminer l'État avec lequel le travail présente un rattachement significatif ; que le décret n° 2006-1425 du 21 novembre 2006 relatif aux bases d'exploitation des entreprises de transport aérien a inséré au code de l'aviation civile un article R. 330-2-1 disposant que l'article L. 342-4 (devenu L. 1262-3) du code du travail est applicable à compter du 1er janvier 2007 aux entreprises de transport aérien au titre de leurs bases d'exploitation situées sur le territoire français lorsqu'elles y ont leurs locaux ou infrastructures à partir desquelles elles exercent de façon stable, habituelle et continue, une activité de transport aérien, avec des salariés qui y ont le centre effectif de leur activité professionnelle ; qu'en sens de ces dispositions, le centre de l'activité professionnelle d'un salarié est le lieu où, de façon habituelle, il travaille ou celui où il prend son service et retourne après l'accomplissement de sa mission ; que l'article L. 342-4 du code du travail dispose qu'un employeur ne peut se prévaloir des dispositions applicables au détachement de salariés lorsque son activité est entièrement orientée vers le territoire français ou lorsqu'elle est réalisée dans des locaux ou avec des infrastructures à partir desquels elle est exercée de façon habituelle, stable et continue, notamment en recherchant et prospectant une clientèle ou en recrutant des salariés sur ce territoire que l'employeur est, dans cette situation, assujetti aux dispositions du code du travail applicables aux entreprises établies sur le territoire français ; que, s'agissant de la détermination du droit applicable en matière de sécurité sociale, en vertu de l'article 13, § 2 a,) du règlement CEE du conseil n° 1408/71, le personnel au sol qui exerce une activité salariée de manière habituelle sur le territoire d'un État membre (la France) est soumis à la législation de ce pays dès lors qu'il ne remplit pas les conditions du détachement ; que le personnel navigant, soumis aux règles de l'article 14, § 2 a,), relève de la loi, non du pays du siège de l'entreprise mais de celui où il est occupé par une succursale ou une représentation permanente ou au lieu d'occupation prépondérante du salarié sur le territoire duquel il réside ; que la notion de succursale, d'agence ou de tout autre établissement, qui implique pour la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE) un « centre d'opérations qui se manifeste d'une façon durable vers l'extérieur comme le prolongement d'une maison mère », matériellement équipé pour pouvoir négocier directement les affaires avec des tiers de telle façon que ceux-ci soient dispensés de s'adresser au siège, correspond à celle de « base d'exploitation » de l'article R. 330-2-1 du code de l'aviation civile ; qu'en réponse à une question du conseil de la société Netjets Management, la Commission Européenne a indiqué en 2005 à cette dernière qu'à défaut de jurisprudence ou de position administrative ad hoc, le terme « occupation prépondérante » devait être entendu comme signifiant « plus de la moitié du temps de travail » ; qu'en l'état de ces éléments de droit, et eu égard aux constatations de fait susvisées dont il ressort que la société Netjets Management qui n'est pas immatriculée en France est le seul employeur des personnels navigants cités par la prévention, mis à la disposition de la société Nta pour voler dans toute l'Europe sous l'autorité opérationnelle d'un chef de flotte portugais, qu'elle ne s'est prévalue ni du régime de détachement de ses salariés prévu par l'article 14, § 1, du règlement CEE n° 1408/71, ni même de leur affectation à des missions temporaires, qu'elle n'est titulaire d'aucune licence de transport et n'est propriétaire ou locataire d'aucun avion, ne dispose d'aucune véritable emprise sur un aéroport français, n'y emploie aucun personnel au sol et n'a conclu aucune sous-traitance, que si le lieu de résidence du plus grand nombre des pilotes n'a pas été déterminé, aucun de ceux qui ont été interrogés n'avait cité Cannes ou Le Bourget comme aéroport de passage ; que l'équipe de la filiale parisienne de la société prévenue, chargée de l'accueil de la clientèle, de la prise en charge de la maintenance, de la documentation et de l'approvisionnement à bord sous la responsabilité de Mme Marine E..., directrice commerciale expressément dépourvue, selon son contrat de travail, de tout pouvoir de représentation, était sans lien hiérarchique avec les équipages, succursale, ni de représentation permanente en France, en sorte qu'aucun des pilotes qu'elle emploie ne pouvait y être « occupé » ; qu'elle n'exerce pas son activité de manière prépondérante sur le territoire national où il n'est pas démontré que les pilotes soient « résidents », il y a lieu de retenir que cette prévenue ne disposait pas d'une présence stable, continue et habituelle en France et que le personnel navigant visé par la prévention relevait, conformément à l'article 14, § 2 a,) du règlement CEE n° 1408/71, du régime d'affiliation du Royaume-Uni, pays du siège social de la société Netjets Management ; que, s'agissant des obligations fiscales, aucun élément de l'enquête ne démontre que la société Netjets Management, qui le conteste fermement, se serait soustraite à des obligations fiscales ; qu'à défaut d'exercer aucune activité en France, il n'y avait pas lieu à quelque déclaration que ce soit ; que c'est à bon droit que le tribunal a prononcé la relaxe de la société Netjets Management du chef de travail dissimulé ; que faute d'être l'employeur des pilotes visés par la prévention, les délits de travail dissimulé ne peuvent être utilement recherchés en la personne de la société Nta ; que la relaxe des sociétés prévenues des chefs de prêt de main-d'oeuvre doit être confirmée dès lors que ni le caractère exclusif du prêt, ni le but lucratif de l'opération n'est démontré ; qu'il en est de même de la relaxe des faits de marchandage, le préjudice des salariés n'étant pas établi ; qu'il y a enfin lieu de confirmer la relaxe de la société Netjets Management du chef du délit d'entrave, une entreprise n'étant tenue par l'article L. 2316-1 du code du travail que si elle dispose en France d'un établissement au sens de l'article L. 421-1 du code du travail, c'est-à-dire s'il existe « une collectivité de travail formée sur ledit territoire par plus de dix salariés en présence d'un directeur et ayant des intérêts communs », ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;
"1°) alors que conformément à l'article 14-2 a) ii) du Règlement CEE n° 1408/71 du 14 juin 1971, la personne qui exerce normalement une activité salariée sur le territoire de deux ou plusieurs États membres est soumise à la législation de l'État membre où elle réside, même si l'entreprise qui l'occupe n'a ni siège, ni succursale, ni représentation permanente sur ce territoire, si l'intéressée est occupée de manière prépondérante sur le territoire de cet État ; que pour considérer que la société Netjets Management n'était tenue d'effectuer en France aucune déclaration relative au personnel qu'elle emploie et ne pouvait se voir reprocher le délit de travail dissimulé la cour d'appel a relevé que si, en application du Règlement susvisé, le personnel navigant relevait de la loi de l'Etat du lieu d'occupation prépondérante du salarié, sur le territoire duquel il réside, aucun des pilotes interrogés au cours de l'enquête n'avait cité Cannes ni le Bourget comme aéroports de passage, que la société Netjets Management n'avait pas de représentation en France, de sorte qu'aucun des pilotes qu'elle employait ne pouvait y être « occupé », et qu'elle n'exerçait pas son activité de manière prépondérante sur le territoire national où il n'était pas démontré que les pilotes fussent résidents ; qu'en statuant ainsi sans rechercher si, en l'état des déclarations du directeur juridique du groupe Netjets reproduites dans l'arrêt dans desquelles il admettait que cent quatre-vingt seize pilotes employés par l'entreprise résidaient en France et que 5,6 % des vols réalisés par ces pilotes étaient des vols domestiques effectués sur le seul sol français, certains de ces pilotes, résidant en France, n'étaient pas occupés de manière prépondérante sur le territoire français comme effectuant des vols domestiques, la cour d'appel, qui s'est déterminée par une motivation inopérante, a privé sa décision de toute base légale et violé les textes visés au moyen ;
"2°) alors qu'en application de l'article L. 1262-3 du code du travail, l'employeur dont l'activité est réalisée avec des infrastructures situées sur le territoire national à partir desquelles elle est exercée de façon habituelle, stable et continue, est assujetti aux dispositions du code du travail applicables aux entreprises établies sur le territoire national ; qu'en considérant que l'équipe de la filiale parisienne de la société Netjets Management, chargée de l'accueil de la clientèle, de la prise en charge de la maintenance, de la documentation et de l'approvisionnement à bord sous la responsabilité de Mme E..., directrice commerciale expressément dépourvue, selon son contrat de travail, de tout pouvoir de représentation, était sans lien hiérarchique avec les équipages, sans rechercher si indépendamment d'un tel lien l'existence d'une telle structure ne permettait pas à la société Netjets Management d'exercer son activité sur le territoire français, de façon habituelle, stable et continue au sens du texte susvisé et n'impliquait pas son assujettissement aux dispositions du code du travail, la cour d'appel, qui s'est déterminée par une motivation inopérante, a privé sa décision de toute base légale et violé les textes visés au moyen ;
"3°) alors qu'en retenant que la société Netjets Management ne disposait d'aucune véritable emprise sur un aéroport français et n'y employait aucun personnel au sol, de sorte qu'elle ne disposait pas d'une présence stable, continue et habituelle en France, sans rechercher si, compte tenu des liens étroits existant entre cette société et la société Netjets Transportes Aeroes, laquelle employait du personnel au sol qui, affecté aux aéroports du Bourget et de Nice-Cannes-Mandelieu, était chargé des activités d'accueil des clients, de coordination de la maintenance, de réalisation de la documentation et des formalités administratives, ces installations ne constituaient pas, en France, une emprise dépendant de la société Netjets Management ou à tout le moins nécessaire à l'exploitation de cette entreprise, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des textes visés au moyen" ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-1, 121-2, 131-8 et 131-9 du code pénal, L. 1262-3, L. 8224-5, L. 8224-1, L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8221-4, L. 8221-5, L. 8234-1, L. 8234-2, L. 8243-2, L. 8243-1 et L. 8241-1 du code du travail, 14 du règlement CEE n° 1408-71 du 14 juin 1971, R. 330-2-1 du code de l'aviation civile, 2, 3, 427, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé la société Netjets Transportes Aeroes (NTA) des chefs de fourniture illégale de main d'oeuvre à but lucratif par personne morale, marchandage, prêt de main d'oeuvre à but lucratif par personne morale hors du cadre légal du travail temporaire et débouté la SCP Bécheret-Thierry-Sénéchal-Gorrias ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Trans Hélicoptère de ses demandes ;





"aux motifs reproduits au premier moyen" ;
"1°) alors qu'en relevant que la société Netjets Transportes Aeroes, n'était pas l'employeur des pilotes visés à la prévention, tout en énonçant que cette société procédait au recrutement et au licenciement du personnel navigant, d'où il résultait qu'elle avait à tout le moins la qualité de co-employeur des pilotes, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et violé l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble les textes visés au moyen ;
"2°) alors qu'en relevant que la société Netjets Transportes Aeroes n'était pas l'employeur des pilotes visés à la prévention sans rechercher si, compte tenu des liens étroits existant entre cette société et la société Netjets Management, l'activité concernant l'emploi du personnel au sol chargé, dans les aéroports du Bourget et de Nice-Cannes-Mandelieu, de l'accueil des clients, de la coordination de la maintenance, de la réalisation de la documentation et des formalités administratives n'était pas indispensable à l'activité propre des pilotes, de sorte que la société Netjets Transportes Aeroes avait à tout le moins à leur égard la qualité de coemployeur avec la société Netjets Management, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des textes visés au moyen" ;
Les moyens étant réunis :
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure, que la société Netjets Management Limited (NML), de droit anglais, dont le siège social se trouve à Londres, a pour activité économique de mettre à la disposition de ses clients des avions leur permettant de se déplacer dans toute l'Europe, selon leur demande, par le biais d'un programme de propriété partagée d'avions d'affaire ;
Qu'elle dispose à cette fin, notamment, d'une filiale de droit portugais, la société Netjets Transportes Aereos (NTA), basée à Lisbonne, et d'une filiale, de droit français, la société Netjets France, dont le siège est [...] ;
Que la société NML, qui n'est pas immatriculée au registre du commerce et des sociétés, emploie des personnels navigants de différentes nationalités, notamment française, avec lesquels elle a conclu au cours des années 2006 à 2008, période de la prévention, des contrats de travail de droit anglais, lesdits personnels étant affiliés au régime de sécurité sociale britannique et attributaires de certificats E 101 en application de l'article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement (CEE) du 14 juin 1971, alors en vigueur ;
Que la société NTA, outre qu'elle gère, par délégation de la société NML, les contrats de travail des personnels navigants, assure leur recrutement et leur licenciement, leur formation, leur encadrement et organise leurs missions, détient la propriété de la flotte des aéronefs, lesquels sont immatriculés au Portugal, et assure la totalité des opérations de vol en Europe, en ce compris la maintenance et l'approvisionnement des avions ;
Que la société Netjets France assure une fonction commerciale en France, sans lien hiérarchique avec le personnel navigant, et est dépourvue de tout pouvoir de représentation de la société NML ;
Que les contrats de travail précités des membres d'équipage prévoyaient le rattachement de chaque salarié à un aéroport dit de passage (« gateway »), qu'il devait pouvoir rejoindre en moins d'une heure et à partir duquel il était pris en charge pour être acheminé, par une ligne commerciale régulière et aux frais de l'employeur, vers l'avion à bord duquel il devait travailler ; que ledit aéroport de passage devait être choisi au sein d'une liste de quarante-quatre aéroports situés en Europe tandis qu'il était loisible au salarié de modifier son choix régulièrement ; qu'une clause contractuelle stipulait que l'aéroport de passage n'était pas considéré comme un lieu d'exercice de l'activité professionnelle du personnel navigant ;
Attendu que le procureur de la République, à la suite d'une enquête préliminaire, a fait citer directement devant le tribunal correctionnel la société NML, des chefs de travail dissimulé, prêt illicite de main d'oeuvre, marchandage, entrave à la libre désignation des délégués du personnel, et la société NTA, des chefs de prêt illicite de main d'oeuvre et marchandage, faits commis au Bourget et à Cannes entre 2006 et 2008 ; que les premiers juges ont renvoyé les prévenues des fins de la poursuite ; que les parties civiles et le ministère public ayant interjeté appel de cette décision, ce dernier a soutenu devant les seconds juges que la répartition des compétences entre les sociétés NML et NTA ressortait d'une fraude tendant à permettre au groupe Netjets d'éluder le paiement des charges sociales dues en France, et a sollicité la requalification des faits de travail dissimulé, prêt illicite de main d'oeuvre et marchandage sous le seul chef de travail dissimulé par dissimulation d'activité et d'emplois salariés ;
Attendu que, pour relaxer les prévenues, l'arrêt énonce, notamment, que la société NML ne s'est prévalue ni du régime du détachement de ses salariés prévu par l'article 14, § 1, du règlement CEE n° 1408/71, ni même de leur affectation à des missions temporaires, qu'elle n'est titulaire d'aucune licence de transport et n'est propriétaire ou locataire d'aucun avion, ne dispose d'aucune véritable emprise sur un aéroport français, n'y emploie aucun personnel au sol et n'a pas eu recours à la sous-traitance ; que les juges ajoutent que la société ne dispose, faute d'une direction et d'un équipement lui permettant de négocier des affaires avec des tiers sans s'adresser à la maison mère, ni de succursale, ni de représentation permanente en France, en sorte qu'aucun des pilotes qu'elle emploie ne pouvait y être "occupé", qu'elle n'exerce pas son activité de manière prépondérante sur le territoire national où il n'est pas démontré que les pilotes soient "résidents" ; que la cour d'appel conclut qu'il y a lieu de retenir que cette prévenue ne disposait pas d'une présence stable, continue et habituelle en France et que le personnel navigant visé par la prévention relevait, conformément à l'article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement CEE n° 1408/71 du régime d'affiliation du Royaume Uni, pays du siège social de la société NML ;
Attendu que les requérants ne sauraient se faire un grief de ce que l'arrêt a prononcé par ces motifs, dont il résulte que l'enquête n'avait pas permis de constater les éléments d'une fraude, de sorte que, conformément à la doctrine de la Cour de justice de l'Union européenne, telle qu'elle a été fixée depuis par les arrêts du 27 avril 2017, A- Rosa Flussschiff GmbH, n° C-620/15, et du 6 février 2018, Ömer I..., n° C-359/16, les juges n'avaient pas à opérer de vérification relative aux certificats E 101 qui étaient produits ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale au profit des parties demanderesses au pourvoi représentées par la C... , avocat à la Cour ;
FIXE à 2 000 euros la somme globale que la Caisse de retraite du personnel navigant de l'aéronautique civile, l'Union des navigants de l'aviation civile et le Syndicat national des pilotes de ligne devront payer à la société Netjets Management Limited et à la société Netjets Transportes Aereos SA au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
FIXE à 2 000 euros la somme globale que la SCP Becheret - Thierry - Sénéchal - Gorrias, ès qualité de liquidateur judiciaire de la société Trans hélicoptère services, devra payer à la société Netjets Management Limited et à la société Netjets Transportes Aereos SA au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;


FIXE à 2 000 euros la somme globale que l'URSSAF Ile de France devra payer à la société Netjets Management Limited et à la société Netjets Transportes Aereos SA au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale quant à la demande des parties représentées par la SCP BORÉ, Salve de Bruneton et Mégret, avocat à la Cour, contre le procureur général près la cour d'appel de Paris ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-huit septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Civ.2 13 septembre 2018 n° 17-22.276

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 12 janvier 2016), que le 8 août 2011, M. X... a été victime de deux coups de couteau portés par M. A... ; que par requête enregistrée le 17 février 2012, M. X... a saisi une commission d'indemnisation des victimes d'infractions (CIVI) aux fins de versement d'une provision à valoir sur son indemnisation ; que par arrêt du 13 septembre 2013, la cour d'assises de la Côte d'Or a déclaré M. A... coupable de tentative de meurtre sur la personne de M. X... ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de fixer à la somme de 3 594,88 euros l'indemnisation qui lui est due par le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions en réparation du préjudice corporel occasionné par les violences commises à son encontre, alors, selon le moyen :
1°/ qu'il résulte de l'article 706-3, alinéa 2, du code de procédure pénale que la réparation peut être refusée ou son montant réduit à raison de la faute de la victime ; que le refus de réparation ou la réduction de son montant suppose un lien de causalité directe entre la faute de la victime et le dommage subi par elle ; qu'en considérant qu'il y avait lieu de réduire de moitié le montant de l'indemnisation due par le Fonds de garantie des victimes d'infractions pénales à M. X... aux motifs qu'« il est ainsi suffisamment établi que les faits se sont produits à l'occasion d'une transaction ayant pour objet de permettre le remboursement d'une dette de stupéfiants » et que « l'appelant a donc, par son propre comportement délictuel, concouru à la survenue du différend ayant conduit aux faits dont il a été victime le 8 août 2011 » quand elle avait constaté qu'il résultait des pièces de procédure pénale que « la tentative de meurtre commise à l'encontre de M. X... trouve son origine dans un différend survenu entre celui-ci et M. A... au sujet du véhicule automobile que l'appelant avait confié à ce dernier pour qu'il procède à une réparation » et qu'il ressortait des déclarations de M. A... « qu'à l'occasion d'un déplacement effectué avec la voiture qu'il devait réparer, le moteur de celle-ci avait cassé, et qu'il craignait dès lors la réaction de M. X... lorsqu'il l'apprendrait », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a violé l'article 706-3 du code de procédure civile ;
2°/ qu'il résulte de l'article 706-3, alinéa 2, du code de procédure pénale que la réparation peut être refusée ou son montant réduit à raison de la faute de la victime ; que le refus de réparation ou la réduction de son montant suppose un lien de causalité direct entre la faute de la victime et le dommage subi par elle ; qu'en énonçant qu'« il ressort des déclarations de M. A... qu'il avait contracté envers M. X... une dette suite à l'achat auprès de lui d'une certaine quantité de produits stupéfiants, et qu'il devait en réalité effectuer la réparation du véhicule de M. X... en contrepartie de cette dette » pour en déduire qu'il était suffisamment établi que les faits s'étaient produits à l'occasion d'une transaction ayant pour objet de permettre le remboursement d'une dette de stupéfiants et que M. X... avait donc, par son propre comportement délictuel, concouru à la survenue du différend ayant conduit aux faits dont il a été victime le 8 août 2011, la cour d'appel, qui avait constaté qu' « il résulte des pièces de procédure pénale communiquées au dossier de première instance par le ministère public suite à la demande de la CIVI que la tentative de meurtre commise à l'encontre de M. X... trouve son origine dans un différend survenu entre celui-ci et M. A... au sujet du véhicule automobile que l'appelant avait confié à ce dernier pour qu'il procède à une réparation » et qu' « il ressort en effet des déclarations de M. A... qu'à l'occasion d'un déplacement effectué avec la voiture qu'il devait réparer, le moteur de celle-ci avait cassé, et qu'il craignait dès lors la réaction de M. X... lorsqu'il l'apprendrait », n'a pas caractérisé en quoi la faute de la victime avait concouru à la réalisation du dommage, a violé l'article 706-3 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient que la tentative de meurtre commise à l'encontre de M. X... trouvait son origine dans un différend survenu entre celui-ci et M. A... au sujet du véhicule automobile qu'il avait confié à ce dernier pour qu'il procède à une réparation ; qu'il ressort en effet des déclarations de M. A... qu'à l'occasion d'un déplacement effectué avec la voiture qu'il devait réparer, le moteur de celle-ci avait cassé, et qu'il craignait dès lors la réaction de M. X... lorsqu'il l'apprendrait ; que toutefois, il ressort également des déclarations de M. A... qu'il avait contracté envers M. X... une dette suite à l'achat auprès de lui d'une certaine quantité de produits stupéfiants et qu'il devait en réalité effectuer la réparation du véhicule de M. X... en contrepartie de cette dette ;
Que de ces constatations et énonciations, faisant ressortir que les faits s'étaient produits à l'occasion d'une transaction ayant pour objet le remboursement d'une dette de stupéfiants, la cour d'appel a pu en déduire l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre le comportement fautif de M. X... et l'action criminelle imputée à M. A... et a souverainement estimé que la faute de la victime réduisait son droit à indemnisation de 50 % ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;




Crim. 12 septembre 2018 n° 17-85.711

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Jean-Pierre X...,- Mme Martine Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de DIJON, chambre correctionnelle, en date du 20 avril 2017, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 29 juin 2016, n° 15-83.523), a condamné le premier du chef d'abus de confiance à deux ans d'emprisonnement, 100 000 euros d'amende et dix ans d'interdiction professionnelle, la seconde des chefs de travail dissimulé et abus de confiance à un an d'emprisonnement, 100 000 euros d'amende, dix ans d'interdiction professionnelle et a prononcé sur les intérêts civils ;



La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Germain, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller Germain, les observations de la société civile professionnelle HÉMERY, THOMAS-RAQUIN et LE GUERER, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 503-1, 555, 558, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense ;
"en ce que l'arrêt attaqué a statué par arrêt contradictoire à signifier à l'égard de Mme Y... et de M. X..., les a déclarés coupables des faits reprochés, les a condamnés à des peines d'emprisonnement fermes, d'amende et d'interdiction et a prononcé sur les intérêts civils ;
"aux motifs que M. X... et Mme Y..., régulièrement cités n'ont pas comparu, ne se sont pas fait représenter et n'ont pas conclu ; que Mme Y... et M. X... n'ont pas comparu à l'audience de la cour, bien qu'ils aient été régulièrement cités à leur adressé déclarée le 23 décembre 2016 ;
"1°) alors que l'huissier qui délivre une citation à la dernière adresse déclarée du prévenu appelant, conformément à l'article 503-1 du code de procédure pénale, est tenu d'effectuer les diligences prévues par l'article 558, alinéas 2 ou 4, dudit code ; qu'en l'absence d'accomplissement de celles-ci, la juridiction n'est pas valablement saisie ; que pour statuer par arrêt contradictoire à signifier à l'égard des prévenus, Mme Y... et M. X..., la cour d'appel a relevé que ceux-ci, bien que régulièrement cités, n'ont pas comparu, ne se sont pas fait représenter et n'ont pas conclu ; qu'en statuant ainsi sans constater que l'huissier de justice avait procédé aux formalités auxquelles il était tenu et prévues par les alinéas 2 et 4 de l'article 558 du code de procédure pénale, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"2°) alors, subsidiairement, que l'huissier qui délivre une citation à la dernière adresse déclarée du prévenu appelant, conformément à l'article 503-1 du code de procédure pénale, est tenu d'effectuer les diligences prévues par l'article 558, alinéas 2 ou 4, dudit code ; que ces dispositions prévoient que si l'huissier ne trouve personne à l'adresse déclarée, il en informe « sans délai » l'intéressé soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, soit par lettre simple, soit par un avis de passage suivi de l'envoi d'une lettre simple ; qu'en l'espèce, les deux citations de Mme Y... et de M. X..., en date du 23 décembre 2016, portent la mention pré imprimée selon laquelle « Adresse déclarée : le destinataire ne demeure plus à cette adresse tel qu'il ressort des diligence exposées ci-après. Une copie de l'acte accompagnée d'un récépissé que le destinataire a été invité à réexpédier par voie postale ou à déposer à l'étude de l'huissier, revêtu de sa signature, a été adressé sans délai (article 558 du CPP) » ; que pour statuer par arrêt contradictoire à signifier à l'égard des prévenus, Mme Y... et M. X..., la cour d'appel a relevé que ceux-ci, bien que régulièrement cités, n'ont pas comparu, ne se sont pas fait représenter et n'ont pas conclu ; qu'en statuant ainsi quand ces seules énonciations de l'arrêt et celles des deux citations de l'huissier du 23 décembre 2016, qui indiquent seulement qu'une copie des actes aurait été adressée aux prévenus sans délai mais sans toutefois préciser la date de ces envois, ne permettent pas de s'assurer du respect par l'huissier de l'exigence de l'envoi sans délai par voie postale des citations, la cour d'appel n'a pas mis en mesure la Cour de cassation de s'assurer qu'ont été respectées les diligences prévues par l'article 558, alinéas 2 et 4, du code de procédure pénale, méconnaissant ainsi les textes susvisés" ;
Vu les articles 558, ensemble 503-1 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes, que l'huissier qui délivre une citation à la dernière adresse déclarée du prévenu appelant, conformément à l'article 503-1 du code de procédure pénale, est tenu d'effectuer les diligences prévues par l'article 558, alinéas 2 ou 4, de ce code, et qu'en l'absence d'accomplissement de celles-ci, la juridiction n'est pas valablement saisie ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite du jugement du 14 novembre 2012 ayant condamné M. X... du chef d'abus de confiance et Mme Y... des chefs d'abus de confiance et travail dissimulé, les prévenus et le ministère public ont interjeté appel ; qu'après cassation d'un premier arrêt, l'affaire a été renvoyée devant la cour d'appel de Dijon, autrement composée, qu'ayant vainement tenté de leur délivrer citation pour l'audience de la cour d'appel du 29 mars 2017, à leur adresse déclarée, l'huissier de justice a constaté que les actes n'avaient pu être remis à leurs destinataires, lesquels n'avaient ni sonnette ni boîte à lettres à leur nom, et avaient été déposés à l'étude après envoi d'une copie de l'acte accompagnée d'un récépissé ;
Attendu que, pour statuer par arrêt contradictoire à signifier, la cour d'appel a constaté que bien que convoqués régulièrement, le 23 décembre 2016,à leur adresse déclarée conformément à l'article 503-1 du code de procédure pénale, M. X... et Mme Y... n'avaient pas comparu ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les mentions des actes ne spécifiaient pas si l'avis de passage de l'huissier avait été donné par lettre simple ou par lettre recommandée et si un récépissé avait été renvoyé, la cour d'appel qui ne pouvait constater que les prévenus avaient eu connaissance de citations régulièrement effectuées, et qualifier sa décision de contradictoire à signifier, a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Dijon, en date du 20 avril 2017, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon,à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Dijon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 18-83.750

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. Philippe X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 5e section, en date du 30 avril 2018, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'infractions à la législation sur les étrangers et blanchiment, a rejeté sa demande de mainlevée de contrôle judiciaire ;




La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 22 août 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Y..., conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Y... et les conclusions de M. l'avocat général Z... ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X... a été mis en examen des chefs susvisés à la suite de l'ouverture d'une information judiciaire par réquisitoire introductif du procureur de la République en date du 1er avril 2016 ; que, placé en détention provisoire par ordonnance du 1er avril 2016, le mis en examen a été mis en liberté et placé sous contrôle judiciaire le 29 juillet 2016 ; que, par déclaration au greffe du juge d'instruction du 6 avril 2018, il a saisi ce magistrat d'une demande de mainlevée du contrôle judiciaire fondée sur l'irrégularité alléguée du réquisitoire introductif ; que le magistrat instructeur n'ayant pas statué sur sa demande dans le délai légal, M. X... a directement saisi la chambre de l'instruction de celle-ci par acte reçu au greffe de cette juridiction le 13 avril 2018 ; que, le 23 avril 2018, le procureur général a notifié à M. X... que l'affaire serait appelée à l'audience du lundi 30 avril 2018 ; que, par acte reçu le vendredi 27 avril 2018, M. X... a sollicité le renvoi de l'affaire en faisant valoir qu'il n'avait pu consulter les réquisitions du procureur général lorsqu'il s'était présenté au greffe de la chambre de l'instruction les 25 et 26 avril 2018, car celles-ci n'avaient pas été versées au dossier ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 427, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motif, manque de base légale ;
Sur le moyen, pris en sa première branche ;
Attendu que, pour rejeter la demande de renvoi, l'arrêt relève que les réquisitions du procureur général sont datées du 26 avril 2018 et, qu'au 27 avril 2018, elles se trouvaient au dossier de la procédure et pouvaient être consultées par M. X... ; que les juges en déduisent qu'il n'y a donc pas lieu de faire droit à la demande de renvoi formulée le 27 avril 2018 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que, d'une part, l'article 197 du code de procédure pénale n'impose pas au procureur général de verser ses réquisitions au dossier déposé au greffe de la chambre de l'instruction pour y être tenues à la disposition des conseils des parties dans le délai prévu par ce texte et il suffit que ces réquisitions aient été jointes au dossier la veille de l'audience, d'autre part, le demandeur ne justifiait aucunement, ni même n'alléguait, à l'appui de sa demande de renvoi, qu'il se serait trouvé dans l'impossibilité de prendre connaissance de ces réquisitions avant la fermeture du greffe, la veille de l'audience, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen ;
D'où il suit que le grief doit être écarté ;
Sur le moyen, pris en sa seconde branche ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de n'avoir pu faire valoir oralement ses observations devant la chambre de l'instruction, dès lors que la décision relative à la comparution personnelle des parties devant la chambre de l'instruction constitue une mesure d'administration judiciaire échappant au contrôle de la Cour de cassation ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa seconde branche, ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 80, 140, 591 et 593 du code de procédure pénale, 111-4 et 441-4 du code pénal, défaut de motif, manque de base légale ;
Attendu que, pour rejeter la demande de mainlevée du contrôle judiciaire fondée sur l'irrégularité alléguée du réquisitoire introductif, l'arrêt relève notamment qu'il n'appartient pas à la chambre de l'instruction, saisie directement d'une demande de mainlevée de contrôle judiciaire, de statuer sur la requête en nullité arguée par le demandeur, en raison de l'unique objet de la saisine de la chambre de l'instruction ;
Attendu qu'en statuant ainsi, dès lors que le mis en examen ne peut, à la suite de la saisine directe de la chambre de l'instruction d'une demande de mainlevée du contrôle judiciaire en application du troisième alinéa de l'article 140 du code de procédure pénale, invoquer ou formuler des demandes étrangères à l'unique objet de la saisine de cette juridiction, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 17-85.875

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. Alain X..., partie civile et mis en examen,

contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, en date du 21 juillet 2017, qui, dans l'information suivie notamment contre lui du chef de recel d'escroquerie en bande organisée, a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance du juge d'instruction prononçant un non lieu partiel et son renvoi devant le tribunal correctionnel ;








La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Steinmann, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller STEINMANN, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 179, 182, 186, 186-1, 186-3, 509, 591, 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que le président de la chambre de l'instruction a déclaré irrecevable l'appel interjeté par M. X... à l'encontre de l'ordonnance du 28 mai 2017 l'ayant renvoyé devant le tribunal correctionnel et ayant prononcé un non-lieu partiel ;
"aux motifs qu'il résulte de l'article 186-3 du code de procédure pénale que la personne mise en examen ne peut interjeter appel de l'ordonnance prévue par le premier alinéa de l'article 179 que dans le cas où elle estime que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime qui aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises ; qu'en l'espèce, que M. X... a été mis en examen dans le cadre d'une procédure correctionnelle du chef de recel d'escroquerie en bande organisée ; qu'il ne résulte d'aucun acte de procédure qu'il ait invoqué les dispositions de l'article 186-3 du code de procédure pénale ; qu'en revanche, lors de son interrogatoire du 6 octobre 2016 et dans la demande d'actes déposée par son conseil le 5 janvier 2017, il soutient n'avoir pas commis les faits qui lui sont reprochés et prétend n'être qu'une victime dans ce dossier ; que par télécopie du 20 juillet 2017, le président soussigné a interrogé l'avocat de M. X... pour savoir si celui-ci revendiquait sa mise en accusation devant la cour d'assises ; que cette missive est restée sans réponse ; qu'il est ainsi établi que l'intéressé n'estime pas que les faits qui lui sont reprochés sont constitutifs d'un crime qui aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises ; qu'en conséquence, que l'appel de M. X... contre l'ordonnance le renvoyant devant le tribunal correctionnel est irrecevable ;
"1°) alors que la partie civile peut interjeter appel des ordonnances de non-lieu partiel faisant grief à ses intérêts civils ; que, dès lors, a excédé ses pouvoirs le président de la chambre de l'instruction qui a déclaré irrecevable l'appel interjeté à l'encontre de l'ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel par M. X..., lequel, par retour de télécopie du 21 juillet 2017, lui rappelait s'être constitué partie civile, avant d'être mis en examen le 15 septembre 2016, par lettres recommandées avec accusé de réception des 20 juillet 2015 et 11 janvier 2016, et lui indiquait expressément avoir formé appel en cette qualité ;
"2°) alors que l'appel contre l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel est recevable lorsqu'un précédent appel du mis en examen contre une ordonnance du juge d'instruction ayant rejeté une demande d'acte est pendant devant la chambre de l'instruction ; qu'en déclarant irrecevable l'appel interjeté par M. X... à l'encontre de l'ordonnance de renvoi et de non-lieu partiel, lorsqu'il n'avait toujours pas décidé s'il y avait lieu de saisir la chambre de l'instruction du précédent appel formé par l'exposant à l'encontre de l'ordonnance de refus de mesure d'instruction complémentaire du 19 janvier 2017, le président de la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs et méconnu les dispositions de l'article 186-3, alinéa 3, du Code de procédure pénale" ;
Vu les articles 186, alinéa 2, et 186-3, alinéa 3, du code de procédure pénale ;
Attendu qu'en application du premier de ces textes, une partie civile peut interjeter appel d'une ordonnance de non-lieu ;
Attendu qu'il se déduit du second de ces textes, dans sa version issue de la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016, que l'appel formé contre l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel est recevable lorsqu'un précédent appel du mis en examen contre une ordonnance du juge d'instruction ayant rejeté une demande d'acte est pendant devant la chambre de l'instruction saisie par le président de cette juridiction ;
Attendu qu'il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de la procédure que dans l'information ouverte le 8 avril 2011, M. X..., qui s'était constitué partie civile par courrier du 11 janvier 2016, a été mis en examen le 15 septembre 2016 du chef susvisé ; qu'il a interjeté appel d'une ordonnance de refus de mesures d'instruction complémentaires rendue le 19 janvier 2017 par le juge d'instruction sur la demande d'actes qu'il avait présentée sur le fondement de l'article 175, alinéa 4, du code de procédure pénale ; que par ordonnance du 28 mai 2017, le vice-président chargé de l'instruction au tribunal de grande instance de Bobigny a prononcé un non-lieu partiel et pour le surplus renvoyé M. X... devant le tribunal correctionnel ; que ce dernier a interjeté appel de cette ordonnance auprès de la chambre de l'instruction ;
Attendu que pour déclarer cet appel irrecevable au regard de l'article 186-3 du code de procédure pénale, le président de la chambre de l'instruction retient que l'intéressé n'a pas soutenu que les faits qui lui sont reprochés constituent un crime qui aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, d'une part, le demandeur s'étant constitué partie civile au cours de l'information pouvait interjeter appel du non-lieu partiel prononcé en justifiant que ce non-lieu concernait les faits dont il s'estimait victime, d'autre part, le président de la chambre de l'instruction n'ayant pas encore statué sur la saisine de celle-ci à la suite de l'appel du mis en examen contre une ordonnance de rejet de demande d'actes, cet appel est toujours pendant, l'ordonnance attaquée doit être annulée pour excès de pouvoir ;
Par ces motifs :
ANNULE, en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé du président de la chambre de l'instruction de Paris, en date du 21 juillet 2017 et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;
CONSTATE que, du fait de l'annulation de cette ordonnance, la chambre de l'instruction, autrement présidée, se trouve saisie de l'appel ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 17-82.265

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Franck X...,- Mme Anne Y...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, chambre 8-1, en date du 6 février 2017, qui a condamné le premier pour vol, recel aggravé et blanchiment à trois ans d'emprisonnement avec sursis et à la confiscation de son compte bancaire, la seconde pour recel aggravé à un an d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;






La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller WYON, les observations de la société civile professionnelle MONOD, COLIN et STOCLET, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite d'une plainte de la compagnie Air France, qui avait découvert que certains matériels lui appartenant étaient mis en vente sur un site d'internet, les investigations se sont orientées sur M. X..., employé d'une société transitaire-commissionnaire implantée dans la zone de fret sécurisée de l'aéroport d'Orly, et sur la compagne de ce dernier, Mme Y... ; que les enquêteurs ont mis en évidence de nombreuses transactions effectuées sur internet par M. X..., et des mouvements de fonds sur les comptes de ce dernier ne correspondant pas à ses seuls revenus professionnels ; que M. X... a expliqué qu'il revendait ainsi des marchandises volées par l'un de ses collègues de travail pour, notamment, acheter ensuite d'autres marchandises et les revendre ; qu'il a également admis s'être approprié des chariots de la compagnie Air France, selon lui abandonnés ; que Mme Y... a déclaré avoir aidé son compagnon dans ses transactions, tout en se doutant de la provenance illégale des marchandises ; qu'à l'issue de l'enquête et de l'information judiciaire, M. X... et Mme Y... ont été renvoyés par ordonnance du juge d'instruction devant le tribunal correctionnel, le premier pour vol, recel commis à titre habituel, et blanchiment, la seconde pour recel commis à titre habituel ; que par jugement du 14 mars 2016, le tribunal correctionnel a rejeté leurs demandes de nullité, les a déclarés coupables des infractions reprochées, et a condamné M. X... à quatre ans d'emprisonnement dont un an avec sursis et à 5 000 euros d'amende, Mme Y... à trois ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, et à 5 000 euros d'amende, et a prononcé sur l'action civile ; que les prévenus ont relevé appel principal de ce jugement ;
En cet état ;
Sur les troisième et quatrième moyens de cassation :
Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;
Attendu que les moyens ne sont pas de nature à être admis ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 112-2 4° du code pénal, 6, 7 et 8 (dans sa version antérieure à la loi n° 2017-242 du 27 février 2017), 9-2, 174, 591, 593 et 802 du code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel a déclaré M. X... et Mme Y... coupables des faits qui leur étaient reprochés et les a condamnés de ce chef, sans appliquer la règle d'ordre public d'extinction de l'action publique par prescription ;
"aux motifs que les citations du 2 décembre 2015 délivrées aux prévenus pour comparaître devant le tribunal correctionnel de Créteil sont nulles ; que la cour annulera donc le jugement du tribunal correctionnel de Créteil en date du 14 mars 2016, évoquera et statuera sur le fond en application des dispositions de l'article 520 du code de procédure pénale ;
"alors que la prescription de l'action publique est une exception péremptoire d'ordre public qui doit être relevée d'office par le juge ; qu'en annulant les citations et le jugement, de sorte que le dernier acte interruptif de la prescription de l'action publique était l'ordonnance de renvoi rendue par le juge d'instruction du tribunal correctionnel de Créteil le 3 avril 2013, sans constater l'extinction de l'action publique dès avant la citation à l'audience d'appel du 30 septembre 2016, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, en violation des textes visés au moyen" ;
Attendu qu'il ne résulte d'aucune énonciation de l'arrêt attaqué, ni d'aucune conclusions, que la demanderesse ait excipé de la prescription de l'action publique devant les juges du fond ;
Attendu que si cette exception peut être invoquée pour la première fois devant la Cour de cassation, c'est à la condition que cette Cour trouve dans les constatations des juges du fond les éléments nécessaires pour en apprécier la valeur ;
Qu'en l'espèce, à défaut de telles constatations, le moyen, mélangé de fait, est nouveau et, comme tel, irrecevable ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, du protocole n° 7 additionnel à ladite convention, 389, 411, 485, 503-1, 512, 520, 555, 556, 557, 558, 565, 591, 593 et 802 du code de procédure pénale, violation des droits de la défense et des principes du contradictoire et du double degré de juridiction, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler les citations à comparaître devant la cour d'appel de M. X... et de Mme Y..., s'est déclarée saisie de l'affaire, a évoqué et a statué au fond ;
"aux motifs que le conseil des prévenus sollicite que la cour donne acte à M. X... de sa comparution volontaire devant la cour ; que la cour, au vu des documents produits par le conseil des prévenus leur donne acte de constater la présence aux audiences des 24 octobre et 13 décembre 2016 de M. X... et de Mme Y... sans que le mandat de l'arrêt décerné contre M. X... a été mis à exécution ; que les citations du 2 décembre 2015 délivrées aux prévenus pour comparaître devant le tribunal correctionnel de Créteil sont nulles ; que la cour annulera donc le jugement du tribunal correctionnel de Créteil en date du 14 mars 2016, évoquera et statuera sur le fond en application des dispositions de l'article 520 du code de procédure pénale ; que la cour rappelle que si les deux prévenus ont été cités par acte d'huissier à l'adresse déclarée par leur conseil dans la déclaration d'appel, il résulte toutefois de la combinaison des articles 503-1 et 558 du code de procédure pénale que l'huissier qui délivre une citation à la dernière adresse déclarée du prévenu appelant, conformément à l'article 503-1 du code de procédure pénale, est tenu d'effectuer les diligences prévues par l'article 558 alinéas 2 et 4 dudit code, que l'intéressé demeure ou non à l'adresse dont il a fait le choix, cette citation étant réputée faite à personne ; que la cour relève qu'en l'espèce ces diligences n'ont pas été accomplies et qu'en conséquence la nullité des citations est encourue ; qu'elle observe toutefois qu'en application des dispositions de l'article 565 du code de procédure pénale, la nullité d'un exploit ne peut être prononcée que lorsqu'elle a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la personne qu'il concerne ; que la cour relève qu'en l'espèce, les prévenus étaient avisés de la première date d'audience à laquelle ils étaient présents et à laquelle leur conseil a demandé qu'il leur soit donné acte de leur comparution volontaire ; qu'elle relève également que l'affaire a été renvoyée à une audience ultérieure du 13 décembre 2016 à laquelle ils ont de nouveau comparu, leur laissant ainsi amplement le temps de préparer leur défense ; qu'elle considère en conséquence que les irrégularités des citations délivrées le 30 septembre 2016 n'ont pas porté atteinte aux intérêts des prévenus et que la cour est ainsi valablement saisie ;
"1°) alors que la cour d'appel n'est pas saisie lorsque la citation n'est pas effectuée à l'adresse déclarée ; que M. X... et Mme Y... avaient soutenu avoir déclaré une nouvelle adresse et en avaient averti le parquet et que leur conseil avait porté plainte et allait formaliser en leur nom une inscription en faux à l'encontre des actes d'appel mentionnant une adresse erronée qui ne correspondait pas à celle qu'il avait fournie au greffe de la cour d'appel, de sorte que la citation à comparaître n'avait pas été faite à l'adresse déclarée ; qu'en ne recherchant pas si M. X... et Mme Y... avaient déclaré au greffe une autre adresse que celle mentionnée sur leurs déclarations d'appel, pour apprécier la réalité de sa saisine, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision, au regard des textes visés au moyen ;
"2°) alors, que l'annulation encourue d'une citation doit être prononcée si l'irrégularité constatée a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie ; que la cour d'appel a annulé les citations devant le tribunal correctionnel de Créteil ainsi que le jugement rendu du 14 mars 2016 par cette juridiction ; qu'en considérant que les irrégularités affectant la citation de M. X... et de Mme Y... devant elle, faisant encourir la nullité de ces actes, ne portait pas atteinte à leurs intérêts, sans qu'aucun acte du parquet ne les ait valablement avertis de l'exercice de l'action publique, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
"3°) alors que la cour d'appel ne peut pas évoquer après annulation de la citation devant le tribunal correctionnel et du jugement rendu en violation du principe de double degré de juridiction ; qu'en évoquant l'affaire quand l'irrégularité de la citation devant elle empêchait de surcroît qu'elle se substitue au tribunal, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
"4°) alors que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les conclusions des prévenus sollicitaient qu'il soit donné acte à M. X... de sa comparution volontaire ; qu'en se fondant sur la demande de constatation de la comparution volontaire tant de M. X... que de Mme Y..., dont il n'était pas question dans les conclusions d'appel des exposants, la cour d'appel s'est contredite et a privé sa décision de motifs, en violation des textes visés au moyen" ;
Sur le moyen pris, en ses deux premières branches :
Attendu que, pour écarter le moyen de nullité concernant les citations à comparaître devant la cour d'appel de M. X... et de Mme Y..., et se déclarer saisie de l'affaire, la cour énonce que si les diligences prévues par l'article 558, alinéas 2 et 4, du code de procédure pénale, n'ont pas été respectées, et si en conséquence la nullité des citations est encourue, la nullité d'un exploit ne peut toutefois être prononcée, en application des dispositions de l'article 565 du code de procédure pénale, que lorsque l'irrégularité a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la personne qu'il concerne ; que les juges relèvent qu'en l'espèce, les prévenus ont été avisés de la première dated'audience, à laquelle ils étaient présents, et que l'affaire a été renvoyée à une audience ultérieure, à laquelle ils ont de nouveau comparu, ce qui leur a laissé ainsi amplement le temps de préparer leur défense ; que les juges retiennent qu'en conséquence, les irrégularités des citations délivrées le 30 septembre 2016 n'ont pas porté atteinte aux intérêts des prévenus, et qu'ils sont ainsi valablement saisis ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, l'arrêt n'encourt pas la censure, dès lors que les prévenus, qui ont comparu à la première audience de la cour, puis à l'audience de renvoi, assistés à chaque fois de leur avocat, lequel a déposé des conclusions lors des deux audiences, et présenté leur défense tant sur les demandes de nullité qu'au fond, ne justifient d'aucune atteinte à leurs intérêts ;
D'où il suit que les griefs doivent être écartés ;
Sur le moyen pris, en sa troisième branche :
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief du fait que la cour d'appel, après avoir annulé les citations des prévenus à comparaître devant le tribunal correctionnel ainsi que le jugement rendu par ce tribunal, a évoqué l'affaire et statué sur le fond en application de l'article 520 du code de procédure pénale, dès lors que les dispositions de ce texte, qui obligent les juges d'appel à évoquer le fond lorsque le jugement est annulé pour violation ou omission non réparée des formes prescrites par la loi à peine de nullité, ne sont pas limitatives, et s'étendent au cas où l'irrégularité affecte la convocation du prévenu devant la juridiction, et non l'acte de saisine que constitue en l'espèce l'ordonnance de renvoi rendue par le juge d'instruction ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en sa quatrième branche en ce qu'il concerne un donner acte erroné sur lequel les motifs de la décision ne sont pas fondés, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 17-82.842

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

---M. Aldo X...,M. Florent Y...,M. B... A... ,

contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBÉRY, chambre correctionnelle, en date du 29 mars 2017, qui les a condamnés, le premier pour détention et usage de stupéfiants, complicité de cession de stupéfiants et recel, le deuxième pour usage de stupéfiant, complicité de cession de stupéfiant et recel, le troisième, pour acquisition, détention, cession et usage de stupéfiants, chacun à cinq ans d'emprisonnement et à une interdiction définitive du territoire français, et a ordonné une mesure de confiscation ;



La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. d'Huy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller D'HUY, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN et de la société civile professionnelle SEVAUX et MATHONNET, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Z... ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I - Sur le pourvoi formé par M. B... A... :
Attendu que M. A... s'est régulièrement pourvu en cassation contre l'arrêt susmentionné ;
Attendu que le demandeur n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son conseil, un mémoire exposant ses moyens de cassation ; qu'il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale ;
II - Sur le pourvoi formé par M. Aldo X... :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. X..., pris de la violation des articles 6, § 3 c) de la Convention européenne des droits de l'homme, 417 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné le prévenu à une peine de cinq ans d'emprisonnement et a prononcé à son encontre une interdiction du territoire français ainsi que la confiscation des marchandises, matériels et somme saisis ;
"aux énonciations de l'arrêt aux termes desquelles le prévenu a comparu sans être assisté par un avocat, et, à l'audience publique, le président a constaté l'identité des prévenus qui étaient assistés par un interprète et leur a donné connaissance des dispositions de l'article 406 du code de procédure pénale ;
"alors que l'exercice de la faculté reconnue au prévenu, qui comparaît devant la juridiction correctionnelle, de se faire assister d'un avocat, et, s'il n'en a pas fait le choix avant l'audience et demande cependant à en être assisté ou de s'en faire désigner un d'office par le président, implique, pour être effectif, y compris en cause d'appel, que ce dernier l'ait préalablement informé de cette faculté s'il n'a pas reçu cette information avant l'audience ; qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le prévenu a comparu devant la chambre des appels correctionnels sans être assisté d'un avocat ; qu'en statuant sans constater que le prévenu avait été informé de son droit d'être assisté d'un avocat, la cour d'appel a méconnu les textes précités" ;
Vu l'article 417 du code de procédure pénale ;
Attendu que l'exercice de la faculté reconnue au prévenu qui comparaît devant la juridiction correctionnelle de se faire assister d'un avocat et, s'il n'en a pas fait le choix avant l'audience et demande cependant à être assisté, de s'en faire désigner un d'office par le président implique, pour être effectif, que ce dernier l'ait préalablement informé de cette faculté s'il n'a pas reçu cette information avant l'audience ;
Attendu que M. X... a comparu devant la cour d'appel sans l'assistance d'un défenseur ; que, s'il a été informé par la convocation qui lui a été notifiée sur instruction du procureur général par le chef de l'établissement pénitentiaire, de la faculté de se faire assister d'un défenseur, il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt ni des pièces de procédure qu'il ait été informé qu'il pouvait, à sa demande, bénéficier d'un avocat commis d'office ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
III - Sur le pourvoi formé par M. Florent Y... :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 6, § 3 c) de la Convention européenne des droits de l'homme, 417 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. Y... à une peine de cinq ans d'emprisonnement et a prononcé à son encontre une interdiction du territoire français ainsi que la confiscation des marchandises, matériels et somme saisis ;
"alors que l'exercice de la faculté reconnue au prévenu, qui comparaît devant la juridiction correctionnelle, de se faire assister d'un avocat, et, s'il n'en a pas fait le choix avant l'audience et demande cependant à en être assisté ou de s'en faire désigner un d'office par le président, implique, pour être effectif, y compris en cause d'appel, que ce dernier l'ait préalablement informé de cette faculté s'il n'a pas reçu cette information avant l'audience ; qu'en l'espèce, le prévenu a comparu devant la chambre des appels correctionnels sans être assisté d'un avocat ; qu'il ne résulte cependant d'aucune des mentions de l'arrêt qu'il ait été informé avant l'audience de son droit de se faire désigner un avocat d'office" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite de l'appel qu'il a interjeté du jugement l'ayant condamné, M. Y..., cité par acte d'huissier l'informant outre de la faculté de se faire assister par un avocat de son choix, de la possibilité qui lui était offerte de demander au bâtonnier de l'ordre des avocats ou au président des appels correctionnels la désignation d'office d'un défenseur, a comparu devant la cour d'appel sans être assisté d'un conseil ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui permettent à la Cour de cassation de s'assurer que M. Y... a été mis en mesure de bénéficier d'un avocat, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation proposé pour M. Y..., pris de la violation des articles 4 du septième protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, 132-2, 132-3, 121-7, 222-37, 321-1, 121-4 du code pénal, 593 du code de procédure pénale et violation du principe de non bis in idem ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. Y... des chefs de recel de complicité d'offre ou de cession non autorisée de stupéfiants et de recel de bien venant de la cession de stupéfiants à autrui pour sa consommation personnelle à une peine de cinq ans d'emprisonnement et a prononcé à son encontre une interdiction définitive du territoire français, outre la confiscation des marchandises, matériels et sommes saisis ;
"aux motifs que le fait que des sommes importantes ont été retrouvées sur M. X... et sur M. Y..., le jour de leur interpellation après qu'ils se soient rendus ensemble sur le lieu de vente d'héroïne établissent la culpabilité des trois prévenus des faits visés en la prévention ;
"alors qu'une faute pénale unique ne peut donner lieu à plusieurs déclarations de culpabilité ; que constitue une faute pénale unique la complicité d'offre ou de cession de stupéfiants et le recel des biens provenant d'une cession lorsque les mêmes faits sont retenus sous cette qualification ; qu'en condamnant M. Y... du chef de ces deux délits pour la détention de la somme (145 euros) trouvée sur lui au moment de son arrestation, la cour d'appel a méconnu les articles 132-3 et 132-2 du code pénal et 4 du septième protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble le principe de non bis in idem" ;
Vu le principe ne bis in idem ;
Attendu que des faits qui procèdent de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable ne peuvent donner lieu, contre le même prévenu, à deux déclarations de culpabilité de nature pénale, fussent-elle concomitantes ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt et du jugement qu'il confirme partiellement, que M. Y... a comparu devant le tribunal correctionnel pour des faits de complicité de cession de stupéfiants, commis du 18 août 2016 au 3 octobre 2016, et de recel de cession de stupéfiants, commis le 3 octobre 2016 ; qu'il a été relaxé pour les faits de recel de cession de stupéfiants et déclaré coupable du surplus par un jugement dont le ministère public a interjeté appel ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et déclarer le prévenu coupable de l'ensemble des faits reprochés, l'arrêt énonce notamment que, M. X... et M. Y... ont été interpellés en même temps, dans le même véhicule, et qu'ils ont été vus ensemble, en compagnie de M. A... par plusieurs consommateurs, que ces derniers ont déclaré que tant M. Y... que M. X... leur avaient proposé de l'héroïne et parfois même de la cocaïne ; qu'il est ainsi parfaitement établi que les trois prévenus ont participé, de concert, au trafic de stupéfiants, parfaitement organisé au bois des Fornets, chacun y jouant un rôle déterminé, soit de récupération des fonds, soit de traduction entre des personnes ne parlant pas la même langue, soit même de revente ou de cession de stupéfiants ; que les juges ajoutent que, lors de l'interpellation des trois prévenus, les gendarmes ont saisi sur eux une somme totale de 1 700 euros ce qui pouvait correspondre à 17 clients sur la journée, moyennant 100 euros le sachet de 5 grammes, ce qui démontre l'ampleur du trafic ; que le fait que des sommes importantes ont été retrouvées sur M. X... et sur M. Y..., le jour de leur interpellation, après qu'ils se soient rendus ensemble sur le lieu de vente d'héroïne, établit la culpabilité des trois prévenus pour les faits visés dans la prévention ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que les faits constitutifs de l'infraction de complicité de cession de stupéfiant et ceux caractérisant le recel étaient les mêmes et ne procédaient pas d'une intention coupable distincte, la cour d'appel a méconnu le principe sus-énoncé ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés :
I - Sur le pourvoi formé par M. B... A... :
Le DECLARE déchu de son pourvoi ;
II - Sur les autres pourvois :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Chambéry, en date du 29 mars 2017, mais en ses seules dispositions relatives à MM. X... et Y..., et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Grenoble, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Chambéry et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 17-81.189 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
-le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens dentistes du Haut-Rhin,

contre l'ordonnance n° 109 du premier président de la cour d'appel de PARIS, en date du 28 septembre 2016, qui a prononcé sur la régularité des opérations de visite et de saisies effectuées par l'Autorité de la concurrence en vue de rechercher la preuve de pratiques anticoncurrentielles ; La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, M. Steinmann, M. Germain, Mme Planchon, M. Larmanjat, Mme Zerbib, M. d'Huy, conseillers de la chambre, Mmes Chauchis, Pichon, M. Ascensi, Mme Fouquet, conseillers référendaires ;
Avocat général : Mme Moracchini ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller WYON, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, et de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;
Vu les mémoires en demande et en défense, et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de procédure que par décision du 27 avril 2015, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Paris a autorisé le rapporteur général de l'Autorité de la concurrence à faire procéder aux visites et saisies prévues par les dispositions de l'article L. 450-4 du code de commerce dans les locaux de plusieurs entreprises, syndicats et organisations professionnelles du secteur de la chirurgie-dentaire, dont ceux du conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes du Haut-Rhin à Colmar ; que ces opérations de visite et saisies se sont déroulées dans les locaux du conseil départemental du Haut-Rhin le 5 mai 2015 ; que le 13 mai 2015, le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes du Haut-Rhin a formé un recours devant le premier président de la cour d'appel, pour contester le déroulement de ces opérations ; qu'il a demandé au premier président de la cour d'appel de prononcer l'annulation des opérations de visite et de saisies, ainsi que la restitution des éléments recueillis, et à défaut des éléments protégés par le secret médical ou saisis hors du champ de l'autorisation donnée par le juge des libertés et de la détention ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 450-4 et R. 450-2 du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté la demande d'annulation des opérations de visite domiciliaire ;
"Aux motifs que sur la prétendue méconnaissance du droit à un procès équitable, l'appelante expose que les agents de l'autorité de la concurrence n'ont pas indiqué quel était l'objet de leur enquête ; que le PV mentionne en page 2 que les OPJ ont justifié de leur qualité et « indiqué l'objet de notre enquête » ; que cette mention fait foi ; que, par ailleurs, les ordonnances du JLD ont été notifiées à Mme Z... en qualité d'occupante des locaux ; que les attestations fournies par Mme A... C... , Mme Z... et M. A... dépendants du conseil de l'ordre, sont rédigées en termes trop généraux pour établir une preuve contraire ; que l'appelante prétend que le PV de visite et saisie comporte une présentation erronée du déroulement des OVS ; que les opérations ont débuté à 9 heures 05, en présence de Mme Z..., assistante administrative, occupante des lieux puis en présence Mme A... C... , médecin, présidente du CDOCD, désignée représentante de l'occupant des lieux ; que, jusqu'à 11 heures 53, départ de cette dernière, deux équipes ont pu être constituées la première comportant Madame Z..., la seconde Mme A... C... , une seule équipe subsistant à partir de 11 heures 53, en présence de Mme Z... ; que Mme A... C... est revenue de 13 heures 10 à 13 heures 30 ; que les opérations se sont poursuivies, le docteur B... arrivé à 15 heures 30 étant également désigné représentant de l'occupant des lieux ; que Mme Z... a ainsi toujours été présente, seule de 11 heures 53 à 13 heures 10 puis de 13 heures 30 à 15 heures 30, et autrement accompagnée soit de Mme A... C... , médecin soit de M. B..., médecin ; que les contestations soulevées à ce titre par l'appelante ne sont pas fondées ; que sur l'absence de signature du procès-verbal par Mme A... C... , médecin que cet élément est indifférent puisque le PV a été signé par Mme Z... occupante des lieux présente sans interruption et M. B..., médecin, représentant de l'occupant des lieux, présent lors de la clôture des opérations à 17 heures ; que l'appelante soulève l'absence de contrôle effectif par les OPJ du déroulement des opérations ; que cette affirmation est contraire aux termes du procès-verbal ; que les attestations fournies par Mme A... C... , Mme Z... et M. A..., dépendants du conseil de l'ordre, sont rédigées en termes trop généraux pour établir une preuve contraire ; que, sur l'ingérence disproportionnée dans le droit du CDOCD du Haut Rhin au respect à son domicile et à celui de la vie privée de ses membres, dans son principe, la visite domiciliaire ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit fondamental que constitue la vie privée dès lors que, prévue par la loi et placée sous le contrôle d'un juge, elle a pour finalité d'assurer le bien-être économique du pays ; qu'en l'espèce, il s'agissait de s'assurer s'il existait des indices laissant présumer des présomptions simples d'entente anticoncurrentielles ; que l'opération de visite et saisie autorisée était nécessaire à l'autorité de la concurrence pour corroborer ses soupçons, le recours à l'article L. 450-3 du code de commerce s'avérant insuffisant ; que, par ailleurs, il n'existe pas un principe de proportionnalité entre les indices et le champ des visites, la seule condition préalable étant la suffisance desdits indices ; que la saisie du cahier à spirales n'est pas en soi illicite dès lors qu'il comporte au moins pour partie des éléments utiles à l'enquête ; que sur les éléments relevant du secret médical, le PV (page 3) mentionne que Mme Z... a procédé à l'occultation des informations nominatives relevant du secret médical sur les documents ou supports d'information concernés, occultations vérifiées par M. B..., médecin, qui n'a pas procédé à des occultations supplémentaires ; que, s'agissant des documents édités depuis le poste de travail de Mme Z..., tant cette dernière que M. B... ont indiqué qu'aucun de ces documents (scellé n°3) ne comportait d'éléments relevant du secret médical ; qu'enfin, la demanderesse au recours sollicite sans autre précision la restitution de pièces relatives à l'exercice des prérogatives de puissance publique du conseil départemental ou sans rapport avec les agissements visés dans l'ordonnance (hors champ) ; que cette demande non suffisamment étayée et contestée doit être rejetée ;
"1°) alors que le contrôle de la légalité et de la proportionnalité des visites domiciliaires ne pouvant être réalisé qu'au vu d'un procès-verbal rendant compte du déroulement des opérations, le vice affectant cet acte doit entraîner la nullité des opérations de visites domiciliaires ; que, par ordonnance du 27 avril 2015, le juge des libertés et de détention du tribunal de grande instance de Paris a autorisé la visite des locaux du conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes du Haut-Rhin ; que la visite des locaux de ce conseil a eu lieu le 5 mai 2015, à l'issue de laquelle a été dressé un procès verbal des opérations ; que le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes a exercé un recours contre ces opérations, en soutenant qu'elles devaient être annulées, dès lors que le procès-verbal des opérations de visite domiciliaire ne rendait pas compte de la réalité du déroulement de la visite, celui-ci ne mentionnant pas que deux équipes d'enquêteurs avaient été constituées pour procéder au contrôle et ne précisant pas non plus que les agents de l'administration avaient sollicité un tiers afin qu'il installe sur l'ordinateur du conseil un logiciel permettant de lire la messagerie personnelle de la Présidente du CDOCD et que, par conséquent, ce procès-verbal devait être annulé, de même que les opérations de visite dont il était censé rendre compte , que, faute d'avoir répondu à cette articulation essentielle du mémoire, le Premier président qui admettait pourtant que deux équipes de recherche avaient été constituées pour procéder aux opérations de visite, ce que ne mentionnait pas le procès-verbal de visite, et qui ne s'explique aucunement sur le défaut de mention de l'intervention d'un tiers, n'a pas justifié sa décision ;
"2°) alors que les enquêteurs ne peuvent utiliser des procédés déloyaux afin d'obtenir des preuves des pratiques anticoncurrentielles qu'ils recherchent, sans méconnaitre l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ; qu'ils doivent ainsi précisément indiquer à l'occupant des lieux ou à son représentant l'objet de leurs investigations ; que cette obligation s'impose également en vertu de l'article L. 450-4 du code de commerce qui renvoie à l'article 56 du code de procédure pénale ; que pour rejeter le moyen de nullité qui soutenait que l'occupant des lieux n'avait pas été informé de l'objet de la visite domiciliaire, le Premier président a relevé que le procès-verbal faisait état de la notification de l'objet de la visite ; que, dès lors que l'occupant des lieux n'a pas paraphé la partie du PV faisant état de la notification du l'objet de l'enquête, le premier président n'a pas justifié sa décision ;
"3) alors que ce procès-verbal n'étant pas fiable, faute d'indiquer les différentes opérations réalisées pendant la visite, le Premier président qui se fonde sur ses mentions pour en déduire que l'occupante des lieux a été informée de l'objet de visite domiciliaire n'a pas justifié sa décision ;
"4°) alors que le procès-verbal de visite domiciliaire doit être signé par l'occupant des lieux ou son représentant afin de s'assurer de la régularité des opérations et leur permettre de faire éventuellement des observations et réserves sur les conditions dans lesquelles les opérations se sont déroulées ; que, dans le mémoire déposé pour le Conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes, il était soutenu que Mme A... C... qui avait été désignée comme représentante de l'occupante et qui avait participé à une partie de la visite, aurait du signer au moins la partie du procès-verbal concernant les opérations réalisées en sa présence ; qu'en estimant ce défaut de signature indifférent, aux motifs que l'occupant des lieux et son représentant présent à la clôture des opérations, M. B..., avaient signés le procès-verbal, quand il avait constaté que Mme A... C... était seule présente pour assister l'une des deux équipes d'enquête constituée pendant la visite, le premier président a méconnu tant l'article L. 450-4 du code de commerce, que l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"5°) alors que les enquêteurs ne peuvent utiliser des procédés déloyaux pour obtenir des éléments de preuves ; que, sauf à méconnaître les droits de la défense, toute personne soupçonnée d'une infraction ne peut être entendue sans avoir été préalablement informée de l'objet de la visite ; que le mémoire pour le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes invoquait la nullité des opérations de visites dès lors que sa présidente, nécessairement entendue en qualité de représentante dudit organisme, avait été interrogée sur les recommandations données par le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes aux dentistes concernant les contrats d'inscription dans les réseaux de soin, sans avoir été informée de l'objet de l'enquête ; qu'en ne se prononçant pas sur la nullité de tout ou partie du procès-verbal de visite résultant de cette audition, pour violation des droits de la défense et du principe de loyauté dans la recherche des preuve, le président n'a pas justifié sa décision ;
"6°) alors que les atteintes au droit au respect du domicile et des correspondances doivent être nécessaires et proportionnées au but de recherche des pratiques anticoncurrentielles ; que, dans son mémoire, le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes soutenait que les opérations de visite domiciliaire devaient être annulées dès lors que les enquêteurs avaient fait en sorte d'avoir accès à la messagerie personnelle vialis de la présidente du CDOCD, en faisant installer un logiciel de lecture dont cet organisme ne disposait pas ; qu'en se prononçant abstraitement sur la conformité de l'article L. 450-4 du code de commerce aux exigences du droit au respect du domicile et des correspondances, sans envisager concrètement, au vu des faits de l'espèce, la disproportion des moyens d'investigation avec l'objet de la visite, quand la messagerie vialis ne faisait pas partie des correspondances présentes sur les lieux dans lesquels la visite avait été autorisée, le président n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
"7°) alors qu'en vertu de l'article L. 450-4 du code de commerce, les visites domiciliaires ne peuvent porter que sur les documents présent sur les lieux visés dans l'ordonnance les ayant autorisé ; qu'en faisant en sorte d'avoir accès à une messagerie qui, lors de leur arrivée dans les locaux du conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes n'étaient pas accessibles depuis le poste informatique de cet organisme, en ayant recours à l'assistance d'un tiers, les enquêteurs ont méconnu les limites de leur autorisation ; qu'en ne se prononçant pas sur la légalité du procédé au regard des limites de l'ordonnance, le premier président n'a pas justifié sa décision ;
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :
Attendu que, pour rejeter le grief selon lequel l'objet de la visite n'a pas été notifié à l'occupant des lieux, l'ordonnance énonce que le procès verbal mentionne en page deux que les officiers de police judiciaire ont justifié de leur qualité et indiqué l'objet de leur enquête, que cette mention fait foi, et que par ailleurs les ordonnances des juges des libertés et de la détention ont été notifiées à Mme Z... en sa qualité d'occupante des locaux ; que le premier président relève que les attestations fournies par Mme A... C... , Mme Z... et M. A..., dépendants du conseil de l'ordre, sont rédigées en termes trop généraux pour établir une preuve contraire ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, et dès lors que Mme Z... a signé, outre le procès-verbal de visite et saisies, qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, et qui relate que les enquêteurs lui ont fait part de l'objet de leur enquête, un procès-verbal distinct de notification des ordonnances des juges des libertés et de la détention, le premier président, qui a souverainement apprécié, au vu des éléments contradictoirement débattus devant lui, la valeur probatoire des procès-verbaux critiqués, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les griefs doivent être écartés ;
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche :
Attendu que, pour refuser d'annuler le procès-verbal de visite au motif que Mme A... C... , qui a assisté à une partie des opérations en qualité de représentante de l'occupant des lieux, n'a pas signé ce procès-verbal, l'ordonnance relève que l'absence de signature du docteur A... C... est indifférente, puisque le procès verbal a été signé par Mme Z..., occupante des lieux présente sans interruption, et par le docteur B..., représentant de l'occupant des lieux, présent lors de la clôture des opérations à 17 heures ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que Mme A... C... n'a assisté à une partie des opérations qu'en qualité de représentante de Mme Z..., occupante des lieux, laquelle était également présente sur place et a signé le procès-verbal, le premier président n'a méconnu aucun des textes visés au moyen ;
D'où il suit que le grief ne saurait être accueilli ;
Sur le moyen, pris en sa cinquième branche :
Attendu que le demandeur ne saurait se faire grief de ce que le premier président n'a pas fait droit au moyen selon lequel les opérations de visite encourraient la nullité au motif que Mme A... C... aurait été entendue par les enquêteurs sans avoir été préalablement informée de l'objet de la visite, alors que d'une part l'ordonnance du juge des libertés et de la détention précisant l'objet de la visite avait été notifiée préalablement à l'occupante des lieux, qui a chargé ensuite Mme A... C... de la représenter, d'autre part les enquêteurs n'ont procédé à aucune audition et n'ont établi aucun procès-verbal d'interrogatoire ;
D'où il suit que le grief n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes du Haut-Rhin soutenait que le procès-verbal établi à l'occasion des opérations de visite domiciliaire devait être annulé, de même que les opérations elles-mêmes, au motif que ce procès-verbal ne relate pas les investigations réalisées, notamment l'intervention d'un tiers, pour permettre d'avoir accès à la messagerie personnelle de la présidente du conseil précité ;
Attendu qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire tiré du caractère incomplet du procès-verbal, le premier président n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;Et sur le second moyen, pris de la violation des articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 450-4 du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'ordonnance attaquée a rejeté la demande de restitution de pièces saisies ;
"aux motifs que sur la prétendue méconnaissance du droit à un procès équitable, l'appelante expose que les agents de l'autorité de la concurrence n'ont pas indiqué quel était l'objet de leur enquête ; que le PV mentionne en page 2 que les OPJ ont justifié de leur qualité et « indiqué l'objet de notre enquête » ; que cette mention fait foi ; que, par ailleurs, les ordonnances du JLD ont été notifiées à Mme Z... en qualité d'occupante des locaux ; que les attestations fournies par Mme A... C... , Mme Z... et M. A... dépendants du conseil de l'ordre, sont rédigées en termes trop généraux pour établir une preuve contraire ; que l'appelante prétend que le PV de visite et saisie comporte une présentation erronée du déroulement des OVS ; que les opérations ont débuté à 9 heures 05, en présence de Mme Z..., assistante administrative, occupante des lieux puis en présence de Mme A... C... , médecin, Présidente du CDOCD, désignée représentante de l'occupant des lieux ; que, jusqu'à 11 heures 53, départ de cette dernière, deux équipes ont pu être constituées la première comportant Mme Z..., la seconde Mme A... C... , une seule équipe subsistant à partir de 11 heures 53, en présence de Mme Z... ; que Mme A... C... est revenue de 13 heures 10 à 13 heures 30 ; que les opérations se sont poursuivies, le docteur B... arrivé à 15 heures 30 étant également désigné représentant de l'occupant des lieux ; que Mme Z... a ainsi toujours été présente, seule de 11 heures 53 à 13 heures 10 puis de 13 heures 30 à 15 heures 30, et autrement accompagnée soit de Mme A... C... , médecin soit de M. B..., médecin ; que les contestations soulevées à ce titre par l'appelante ne sont pas fondées ; que l'appelante soulève l'absence de contrôle effectif par les OPJ du déroulement des opérations ; que cette affirmation est contraire aux termes du procès-verbal ; que les attestations fournies par Mme A... C... , Mme Z... et M. A..., dépendants du conseil de l'Ordre, sont rédigées en termes trop généraux pour établir une preuve contraire ; que, sur l'ingérence disproportionnée dans le droit du CDOCD du Haut Rhin au respect à son domicile et à celui de la vie privée de ses membres, dans, son principe, la visite domiciliaire ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit fondamental que constitue la vie privée dès lors que, prévue par la loi et placée sous le contrôle d'un juge, elle a pour finalité d'assurer le bien-être économique du pays ; qu'en l'espèce, il s'agissait de s'assurer s'il existait des indices laissant présumer des présomptions simples d'entente anticoncurrentielles ; que l'opération de visite et saisie autorisée était nécessaire à l'autorité de la concurrence pour corroborer ses soupçons, le recours à l'article L. 450-3 du code de commerce s'avérant insuffisant ; que, par ailleurs, il n'existe pas un principe de proportionnalité entre les indices et le champ des visites, la seule condition préalable étant la suffisance desdits indices ; que la saisie du cahier à spirales n'est pas en soi illicite dès lors qu'il comporte au moins pour partie des éléments utiles à l'enquête ; que sur les éléments relevant du secret médical, le PV (page 3) mentionne que Mme Z... a procédé à l'occultation des informations nominatives relevant du secret médical sur les documents ou supports d'information concernés, occultations vérifiées par le docteur B... qui n'a pas procédé à des occultations supplémentaires ; que, s'agissant des documents édités depuis le poste de travail de Mme Z..., tant cette dernière que M. B... ont indiqué qu'aucun de ces documents (scellé n° 3) ne comportait d'éléments relevant du secret médical ; qu'enfin, la demanderesse au recours sollicite sans autre précision la restitution de pièces relatives à l'exercice des prérogatives de puissance publique du conseil départemental ou sans rapport avec les agissements visés dans l'ordonnance (hors champ) ; que cette demande non suffisamment étayée et contestée doit être rejetée ;
"1°) alors que les atteintes au droit au respect du domicile et des correspondances doivent être proportionnées au but de recherches de pratiques anticoncurrentielles ; que les documents irrégulièrement saisis, parce que sans lien avec l'objet de l'enquête, doivent en tout état de cause être restitués à leur propriétaire ; que lorsque les ordres professionnels agissent dans le cadre de leurs prérogatives de puissance publique, leurs actes se situent hors du champ de la libre concurrence et ne relèvent pas de la compétence de l'autorité de la concurrence ; que, dès lors les documents en rapport avec ces prérogatives ne peuvent être saisis ; que, dans le mémoire déposé pour le CDOCD, il était soutenu que les enquêteurs ne pouvaient saisir des documents qui entraient dans ses prérogatives de puissance publique et sollicitait à ce titre la restitution de différentes pièces saisies qu'il listait, en précisant qu'il s'agissait de l'ensemble des pièces portant sur la communication par un praticien de ses contrats à son ordre en vertu de l'article L. 4113-9 du code de la santé publique, des pièces portant sur des dossiers disciplinaires en rapport avec ce défaut de communication entrant dans ses pouvoirs en vertu de l'article L. 4113-10 du code de la santé publique ou de la précision des obligations déontologiques ou professionnelles relevant de sa seule compétence ; que le Premier président de la cour d'appel a estimé que la demande de restitution de pièces n'était pas assez étayée et qu'elle était contestée, pour la rejeter ; qu'en refusant de se prononcer sur une demande de restitution parfaitement motivée, en ce qu'elle soutenait que des pièces se rapportant aux prérogatives de puissances publiques ne pouvaient avoir aucun lien avec les pratiques de boycott des réseaux de soins et les entreprises low costs visées dans l'autorisation de visite domiciliaire et précisait le contenu des pièces permettant d'apprécier si elles étaient en rapport avec ces prérogatives de puissances publiques, en affirmant que cette demande n'était pas suffisamment étayée, le président de la cour d'appel a méconnu les articles 6 et 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"2°) alors que la saisie est disproportionnée lorsqu'elle ne permet plus à la personne visée d'exercer son activité ; que dans ce cas, les documents saisis doivent être restitués ; que, dans le mémoire déposé par le Conseil départemental de l'Ordre des Chirurgiens dentistes, la restitution d'un cahier à spirale était sollicitée, en tant que la copie qui avait été laissée à sa disposition ne lui permettait pas d'exercer son activité ; qu'en se contentant de relever que la saisie du document était justifiée en ce qu'elle était en rapport avec l'objet de l'enquête, le Premier président a encore méconnu l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme" ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, pour rejeter la demande de restitution de pièces saisies, l'ordonnance énonce que la demanderesse au recours sollicite sans autre précision la restitution de pièces relatives à l'exercice des prérogatives de puissance publique du conseil départemental ou sans rapport avec les agissements visés dans l'ordonnance ; que le premier président retient que cette demande, non suffisamment étayée et contestée, doit être rejetée ;
Mais attendu qu'en se déterminant par ces seuls motifs, alors que le demandeur avait fourni la liste des pièces dont il demandait la restitution, et soutenait que celles-ci étaient sans lien avec l'enquête, le premier président n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encore encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance susvisée du premier président de la cour d'appel de Paris, en date du 28 septembre 2016, et pour qu'il soit à nouveau statué ;
RENVOIE la cause et les parties devant la juridiction du premier président de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
FIXE à 2500 euros la somme que le conseil départemental de l'ordre des chirurgiens-dentistes du Haut-Rhin devra payer à l'Autorité de la concurrence au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'ordonnance annulée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 17-85.825

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. X... Y...,- Mme J... Z...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 12 septembre 2017, qui a condamné le premier, pour abus de biens sociaux et abus de confiance, à deux ans d'emprisonnement avec sursis, 100 000 euros d'amende et cinq ans d'interdiction de gérer, la seconde, pour faux, à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et 4 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. A..., conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire A..., les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général B... ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'à la suite du contrôle par l'administration fiscale notamment de la société à responsabilité limitée Média Consulting, gérée de fait par M. X... Y..., et des associations ATC et ARA, présidées par ce dernier, lesquelles participaient à l'exploitation de la radio indépendante Radio Vitamine située à la Valette du Var (84) et émettant dans les départements du Var, des Alpes-Maritimes et des Bouches-du-Rhône, ainsi que de la plainte déposée par M. K... Y..., président de la société anonyme Sud Média, M. X... Y... et Mme Z... ont été renvoyés devant le tribunal correctionnel des chefs précités ; qu'il était notamment reproché à M. Y... de s'être attribué des rémunérations excessives, en opérant des prélèvements sur les fonds sociaux de la société Média Consulting de manière occulte dans un intérêt personnel et en laissant persister son compte courant d'associé dans une position débitrice pendant plusieurs années, ainsi que d'avoir détourné des fonds qui lui avaient été remis et qu'il avait acceptés à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage déterminé au préjudice des associations ATC et ARA ; qu'il était par ailleurs reproché à Mme Z..., notamment, d'avoir pour les besoins du contrôle de l'administration fiscale rédigé de faux contrats de prestations de services au nom de la société Média Consulting ;
En cet état ;
I- Sur le pourvoi de Mme Z... :
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 441-1 du Code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel a déclaré Mme Z... coupable de faux ;
"aux motifs que « il était reproché à Mme Z..., MM. Hervé C..., X... Y... et I... D... l'établissement de faux contrats de prestations et de fausses factures à en-tête de la SARL Media Consulting , établis pour justifier certains prélèvement dans le cadre du contrôle fiscal ; qu'en effet Mme Z..., amie de M. X... Y..., elle-même PDG d'une société à Paris s'était mis en tête de venir en aide au prévenu dans le cadre du contrôle fiscal et de justifier des prestations qu'elle estimait réelles en "reconstituant" des contrats de prestations entre la SARL Media Consulting à d'autres sociétés, d'après les propos tenus par MM. C... et X... Y... ; que trois contrats de prestations de service ainsi "reconstitués" et ont été retrouvés dans le bureau de M. C... :-l'un entre la société Media Consulting et la société Midi Radio portait la date de 2005 et n'était pas signé,-un autre entre la société Media Consulting et la société Sud Radio portait la date de 2007 et n'était pas signé,- enfin le dernier entre la société Media Consulting et ATC était signé de M. X... Y... mais ne comportait pas de date ; que ces contrats, établis par Mme Z..., avaient été transmis par mail à M. D... qui les avait imprimés, soumis à la signature de M. X... Y... lequel avait refusé de les signer sauf celui concernant ATC ; qu'ils ont ensuite été communiqués par M. D... à M. C... lequel reconnaît les avoir reçus par mail, les avoir imprimés et emportés avec lui lors du contrôle fiscal ; que le mail de M. D... contenait également des indications pour établir des factures correspondantes aux contrats "reconstitués", que M. C... reconnaissait avoir établies et imprimées ; qu'il avait emporté l'ensemble de ces documents pour se rendre au contrôle fiscal, mais prétendait ne pas les avoir sortis de sa sacoche, à défaut de demande expresse de l'administration fiscale ; qu'un quatrième document était retrouvé avec la mention DRAFT (ébauche) dans le coffre du véhicule de M. X... Y... et n'était pas signé ; que Mme Sarah Y... confirmait avoir été avisée par l'intermédiaire de M. Said E... ancien salarié de la SAS Links que des faux avait été commis par M. X... Y... et ses amis dans le cadre de ce contrôle ; que Mme Z... était renvoyée devant le tribunal du chef de faux et tentative d'usage de faux, pour avoir altéré frauduleusement la vérité dans un écrit de nature à établir la preuve d'un droit ou d'un fait ayant des conséquences juridiques en l'espèce en rédigeant faux contrats de prestations de services au nom de la société Média Consulting et d'avoir tenté d'en faire usage en les remettant à M. D... dans le cadre du contrôle DIRCOFI ; que si elle ne conteste pas la matérialité des faits, Mme Z... ne leur reconnaît aucune qualification pénale et sollicite l'infirmation du jugement et la relaxe du chef de faux en écritures privées , qu'elle fait valoir l'absence d'élément matériel du faux, les contrats établis par ses soins n'étant que des projets qui auraient du être soumis à la signature des cocontractants originels et dans lesquels une clause précisait l'existence d'un effet rétroactif à la date portée sur le document, fis reconstituaient des contrats ayant réellement existé selon les propos qu'elle avait recueillis de MM. D... et X... Y... et les vérifications comptables effectuées sur les flux financiers entre la société Media Consulting et les autres entités du groupe Radio Vitamine ; qu'ils n'avaient pas été signés sauf celui entre la société Media Consulting et ATC et n'avaient pas selon elle été produits ; que quelles que soient les précautions prises par Mme Z... dans l'élaboration de ces documents, le fait qu'elle y ait porté des informations dont elle ne pouvait en aucun cas s'assurer de la fiabilité puisqu'elle n'a jamais eu les originaux entre les mains et que ses propos quant aux vérifications effectuées sur la réalité des contrats et leur contenu sont en contradiction avec les déclarations de M. Vincent F... qui affirme que la SARL Media Consulting n'a jamais fourni aucune prestation à la société Midi Radio et qu'il n'existait pas de contrat de prestations entre ces deux sociétés, invalidant ainsi au moins l'un des contrats, le fait qu'un des contrat ait été signé par M. X... Y... et que les deux autres nonobstant la précaution d'une clause de style, portaient une date d'exécution rétroactive, tous ces éléments établissent que Mme Z... a, en connaissance de cause, créé des documents dont le contenu était soit faux soit incertain, de manière à les présenter comme vrais dans le cadre du contrôle DIRCOFI ; que son intention délictueuse est confirmée par le fait qu'elle a même proposé et tenté d'utiliser du papier jauni pour renforcer la crédibilité et l'authenticité des contrats de prestations, idée qui a cependant été refusée par M. X... Y... et a été rapidement abandonnée mais qui est significative de l'état d'esprit dans lequel elle était et du but dans lequel ces contrats ont été élaborés ; que ce faisant elle s'est rendue coupable du délit de faux au sens de l'article 441-1 du code pénal et il convient de confirmer le jugement entrepris sur ce point ;
"1°) alors qu'un contrat établissant a posteriori, par l'effet d'une clause rétroactive, des relations contractuelles passées n'est pas un faux dès lors qu'il n'imite pas une pièce authentique et, se bornant à retracer l'historique de relations d'affaires entre plusieurs entreprises, il ne constate pas de faits inexacts et ne comporte ainsi aucune altération de la vérité ; qu'en qualifiant de faux les contrats rédigés par l'exposante qui se bornaient à reconstituer des relations d'affaires ayant réellement existé, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 441-1 du code pénal ;
"2°) alors que la cour d'appel ne pouvait juger que le contenu des documents litigieux était faux ou incertain sans rechercher si, comme le soutenait la prévenue, les vérifications comptables effectuées sur les flux financiers entre la société Media Consulting et les autres entités du groupe Radio Vitamine démontraient l'existence de relations d'affaires ayant réellement existé" ;
Attendu que, pour déclarer Mme Z... coupable des faits de faux qui lui sont reprochés, l'arrêt retient que, quelles que soient les précautions prises par l'intéressée dans l'élaboration des contrats de prestations de services qu'elle a reconnu avoir fabriqués, le fait qu'elle y ait porté des informations dont elle ne pouvait en aucun cas s'assurer de la fiabilité, puisqu'elle n'a jamais eu les originaux entre les mains et que ses propos quant aux vérifications effectuées sur la réalité des contrats et leur contenu sont en contradiction avec les déclarations d'un témoin qui affirme que la société Média Consulting n'a jamais fourni aucune prestation à la société Midi Radio et qu'il n'existait pas de contrat de prestations entre ces deux sociétés, qu'un des contrat ait été signé par M. Y... et que les deux autres, nonobstant la précaution d'une clause de style, portaient une date d'exécution rétroactive, établissent que M. Z... a, en connaissance de cause, créé des documents dont le contenu était soit faux soit incertain, de manière à les présenter comme vrais dans le cadre du contrôle fiscal ; que les juges ajoutent que son intention délictueuse est confirmée par le fait qu'elle a même proposé et tenté d'utiliser du papier jauni pour renforcer la crédibilité et l'authenticité des contrats de prestations, idée qui a cependant été refusée par M. Y... et a été rapidement abandonnée mais qui est significative de l'état d'esprit dans lequel elle était et du but dans lequel ces contrats ont été élaborés ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, dont il résulte que Mme Z... a fabriqué des actes sous seing privé pour servir de preuve à la société Média Consulting à l'occasion de la procédure de contrôle fiscal, et dès lors que la fabrication d'un document, forgé pour servir de preuve, constitue un faux matériel susceptible de porter préjudice à un tiers, même si ce document est conforme à l'original, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
II- Sur le pourvoi de M. Y... :
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3 4° du code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel a déclaré M. X... Y... coupable d'abus de biens sociaux au préjudice de la SA Media Consulting ;
"aux motifs que M. X... Y... conteste les faits d'abus de biens sociaux tout en admettant avoir laissé perdurer un compte courant associé en position débitrice de 2003 à 2010 tout comme son ancien associé au sein de la SARL Media Consulting, M. Franck G..., qui avait également un compte courant débiteur de 125 000 euros en 2005 ; qu'il justifie cette anomalie par la négligence de son comptable, M. C... en expliquant qu'il aurait dû convoquer les assemblées générales ordinaires annuelles et organiser la distribution de dividendes et qu'il était le seul habilité à agir en la matière, possédant tous les documents comptables nécessaires ; que la gérance de fait de la SARL, Media Consulting par M. X... Y... ressort des déclarations de la gérante de droit, Mme Sarah Y... qui précise notamment ne jamais avoir eu la main sur les instruments de paiements, des déclarations de M. C... ainsi que du courriel du 17 mai 2010 adressé par M. X... Y... à sa soeur lors du contrôle fiscal, lui confirmant qu'elle n'était qu'une gérante de paille et n'avait pas à s'inquiéter ; qu'elle n'est pas sérieusement contesté par le prévenu ; que si la réalité des prestations effectuées par la SARL Media Consulting et facturées notamment par la SA Sud Media fait débat, leur caractère fictif étant en particulier avancé par M. K... Y... et confirmé par l'ancien associé et co-gérant, M. G..., les seuls faits reprochés à M. X... Y... sont des abus de biens sociaux au préjudice de sa propre société ; qu'or, outre que des prélèvements indus à hauteur de 400 000 euros sont retracés dans le tableau "lazare.xlsx" établi par le comptable et dont l'exploitation partielle a permis de confirmer la véracité et la fiabilité, il est incontestable et incontesté que le compte courant de M. X... Y... au sein de sa société a fonctionné en position débitrice de 2003 à 2010, date du contrôle fiscal pour atteindre la somme de 394 457, 61 euros ; que le seul fait, en qualité de dirigeant de droit ou de fait d'une SARL, de maintenir un compte courant débiteur pendant plusieurs mois en violation de l'article L. 223-21 du code du commerce est constitutif de l'élément matériel de l'abus de biens sociaux ; qu'en l'espèce M. X... Y... a pendant plusieurs années laissé son compte courant au sein de la SARL Media Consulting en position débitrice et il ne pouvait ignorer, en sa qualité de dirigeant, la nécessité de comptabiliser rigoureusement les prélèvements effectués sur les comptes de sa société lesquels devaient être justifiés par des factures ; que c'est en vain qu'il tente de se décharger de sa responsabilité envers son comptable lequel en comptabilisant les prélèvements non justifiés sur le compte courant associé n'a fait que refléter la situation exacte et avait d'ailleurs, à plusieurs reprises, attiré son attention sur l'irrégularité de la situation ; qu'il ne pouvait ignorer accomplir un acte contraire aux intérêts de la SARL Media Consulting quand bien même la situation financière de celle ci aurait permis le cas échéant une distribution de dividendes qu'en sa qualité d'actionnaire majoritaire le prévenu avait la possibilité de provoquer ; qu'il résulte des déclarations de MM. K... Y..., G... et C... que l'existence de la SARL Media Consulting n'avait en réalité d'autre but que d'assurer la rémunération de M. X... Y..., lequel de surcroît était rémunéré par d'autres entités du groupe, et qu'il avait fini par opérer une véritable confusion entre son patrimoine personnel et celui de la société qu'il convient de confirmer la déclaration de culpabilité de M. X... Y... pour les faits d'abus de biens sociaux commis au préjudice de la SA Media Consulting » ;
"alors que la constatation de la contrariété de l'usage à l'intérêt de la société est nécessaire à la caractérisation de l'abus de bien social ; qu'en jugeant que le seul fait, en sa qualité de dirigeant de droit ou de fait d'un SARL, de maintenir un compte courant débiteur pendant plusieurs mois en violation de l'article L. 223-21 du code de commerce constitue un abus de biens sociaux, tout en reconnaissant que la situation financière de la SARL Media Consulting aurait permis le cas échéant une distribution de dividendes et sans rechercher si l'absence de contrepartie était réelle ou si les risques de non remboursement étaient avérés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 241-3 4° du Code de commerce, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel a déclaré M. X... Y... coupable d'abus de confiance au préjudice des associations ATC et ARA ;
"aux motifs que M. K... Y... dénonçait également des faits d'abus de confiance au préjudice de l'association ATC dont il était administrateur et' dont M. X... Y... était président et affirmait que son frère utilisait la carte bancaire de l'association à son profit personnel sans se préoccuper du paiement des dettes contractées auprès de la SACEM ou de la SPRE ; que M. H... était nommé administrateur provisoire des associations ATC et ARA par décision du président du tribunal de grande instance de Toulon en date du 31 janvier 2011 ; qu'il sollicitait la désignation d'un expert comptable aux fins d'audit des deux associations ; que ce dernier se heurtait à la réticence de M. C... lequel se refusait à lui communiquer des éléments comptables de la SAS Links intéressée par les flux financiers ; que les conclusions de Maître H... suite à cet audit sont édifiante ; qu'il ne s'expliquait pas pourquoi les associations avaient un tel passif d'environ 1,5 million d'euros pour ATC (dont 358 000 euros de dettes envers la SAS Links) et 1 million pour ARA(dont 358 000 euros de dettes envers la SAS Links) ; qu'il soupçonnait ainsi un détournement des fonds des associations au profit de cette SAS Links dont le PDG était M. X... Y... et constatait en outre les anomalies suivantes :-une facture acquittée de 48 000 euros en 2009 au profit de la SARL Media Consulting pour une prestation dont la réalité restait à établir,-une augmentation de la rémunération du salaire de X... Y... de 6,6% en 2010 sans l'autorisation par le conseil d'administration d'ATC. Maître H... estimait par ailleurs tout à fait anormal que M. X... Y... perçoive un salaire de 100 000 eurso par an d'une association en déficit et dont il était le président alors que par ailleurs les prestations devaient être contractuellement effectuées par la SAS Links,-le versement de loyers par l'association ATC à la SCI Kazim alors que l'association ne dispose d'aucun local à l'adresse de son siège social ; que Maître H... indiquait que dans le cadre d'un protocole d'investissement signé par M. X... Y... en sa qualité de PDG de la SAS Links et président des associations ATC et ARA ces dernières avaient été vidées de leurs actifs corporels et incorporels ce qui leur était préjudiciable puisqu'elles avaient un passif important ; que M. X... Y... était renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef d'abus de confiance pour avoir pour avoir courant 2003 à courant 2010 à Toulon et à la Valette détourné des fonds qui lui avait été remis à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage déterminé au préjudice des associations ATC et ARA ; que M. X... Y... conteste les faits et fait valoir que les difficultés financières des deux associations s'expliquent par le fait que la société Sud Media qui devait leur reverser une partie des fonds perçus au titre des ventes publicitaires avait bloqué ses versements à partir du mois d'avril 2010 ; que cependant ces éléments, à les supposer établis, ne rendent pas compte de l'ampleur de la déroute financière des deux associations et justifient d'autant moins le fait que M. X... Y... ait pu s'octroyer dans ces conditions, et sans y être autorisé par les conseils d'administration, un salaire de 100 000 euros par an, tout à fait excessif au regard de la situation des associations qui avaient des dettes importantes auprès de la SACEM et de la SPRE et par ailleurs des rémunérations déjà perçues par M. X... Y... dans l'entité Radio Vitamine et notamment dans le cadre des prélèvements effectués dans l'actif de la SARL Media Consulting ; qu'en détournant ainsi les fonds des associations ATC et ARA notamment par l'utilisation à titre privé de leurs cartes bancaires et par le virement d'une somme de 48 000 euros à la SARL Media Consulting, sans justification, alors qu'il est établi que cette société servait quasi exclusivement à la rémunération de M. X... Y..., au lieu de les affecter au paiement des dettes des associations, et en s'octroyant irrégulièrement une rémunération excessive, M. X... Y... a commis les faits d'abus de confiance et il convient de confirmer la déclaration de culpabilité sur cette infraction ;
1°) alors que les juridictions correctionnelles ne peuvent statuer que sur les faits pour lesquels elles ont été valablement saisies ; qu'en relevant, pour déclarer M. Y... coupable d'abus de confiance au préjudice des associations ATC et ARA, l'utilisation à titre privé de leurs cartes bancaires et par le virement d'une somme de 48.000 euros à la SARL Media Consulting sans justification, lorsque la prévention se borne à reprocher au prévenu d'avoir détourné des fonds qui lui avaient été remis et qu'il avait acceptés à charge de les rendre ou représenter ou d'en faire un usage déterminé et ce au préjudice des associations ATC et ARA, sans préciser les faits qui lui étaient reprochés, la cour d'appel a, en violation de l'article 388 du code de procédure pénale, statué sur des faits dont elle n'était pas valablement saisie ;
"2°)alors que la cour d'appel ne pouvait juger que le salaire de 100.000 euros par an perçu par le prévenu est tout à fait excessif au regard de la situation des associations qui avaient des dettes importantes auprès de la SACEM, sans répondre au moyen de défense faisant valoir la situation financière des associations résulte des fautes des dirigeants" ; .
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ;
Attendu que les moyens ne sont pas de nature à être admis ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-26-1 du code pénal, Préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel a déclaré M. X... Y... coupable des faits reprochés ;
"1°) alors que l'article 132-26-1 du code pénal dispose que lorsque la juridiction de jugement prononce une peine égale ou inférieure à deux ans d'emprisonnement, ou, pour une personne en état de récidive légale, une peine égale ou inférieure à un an, elle peut décider que la peine sera exécutée en tout ou partie sous le régime du placement sous surveillance électronique à l'égard du condamné après avoir obtenu son accord ; qu'il en résulte que la juridiction ne peut recueillir l'accord du prévenu qu'après le prononcé de la peine, lorsqu'elle décide du placement sous surveillance électronique ; qu'ainsi, la cour d'appel ne pouvait, sans violer ce texte, solliciter le consentement de M. Y... à ce placement sous ce régime à la fin des débats et avant même qu'une déclaration de culpabilité ait été prononcée ;
"2°) alors qu'en sollicitant le consentement de M. Y... à accomplir une éventuelle peine d'emprisonnement par le biais d'un placement sous surveillance électronique avant toute déclaration de culpabilité, la cour d'appel a violé son droit à la présomption d'innocence" ;
Attendu que M. Y... ne saurait se faire grief de ce que la cour d'appel a sollicité son consentement à accomplir, le cas échéant, une éventuelle peine d'emprisonnement par le biais d'un placement sous surveillance électronique avant toute déclaration de culpabilité, dès lors qu'une telle demande n'est prohibée par aucune disposition légale non plus que réglementaire et qu'elle ne porte pas atteinte, en soi, à la présomption d'innocence ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-20, alinéa 2 et 132-1 du code pénal, 485, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la cour d'appel a condamné M. X... Y... à une interdiction de gérer d'une durée de cinq ans et à une peine d'amende de 100.000 euros ;
"aux motifs que « M. X... Y..., jamais condamné à l'époque des faits et qui n'a eu depuis qu'une seule inscription à son casier judiciaire, sera condamné à la peine de deux ans d'emprisonnement assorti du sursis et à une interdiction de gérer d'une durée de cinq ans ; qu'il fournit un contrat de travail à temps partiel de mars 2017 pour un salaire mensuel net de 1 000 euros mais a fourni un cautionnement de 200 000 euros dans le cadre du contrôle judicaire ordonné par la chambre de l'instruction le 7 juillet 2011 dont 190 000 euros étaient affectés au paiement des dommages et intérêts et des amendes, par conséquent eu égard au montant des détournements et de ses capacités financières à l'époque des faits il convient de le condamner à une amende de 100 000 euros ;
"1°) alors que en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en prenant en compte les capacités financières de M. Y... à l'époque des faits pour prononcer une amende de 100.000 euros, sans s'expliquer sur ses ressources et ses charges au moment du prononcé de la décision et qu'elle devait prendre en considération la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"2°) alors que d'autre part, en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle ; qu'en prononçant une peine d'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle, de diriger, administrer, gérer ou contrôler une entreprise ou une société pour une durée de cinq ans, sans s'expliquer sur la gravité des faits, la personnalité de son auteur et sa situation personnelle qu'elle devait prendre en considération, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;
Attendu que, pour condamner M. Y... notamment à 100 000 euros d'amende et à cinq ans d'interdiction de gérer, l'arrêt relève, après avoir souligné que la société Média Consulting n'avait en réalité d'autre but que d'assurer la rémunération du prévenu, lequel de surcroît était rémunéré par d'autres entités du groupe, et qu'il avait fini par opérer une véritable confusion entre son patrimoine personnel et celui de la société, et avoir souligné la gravité des faits commis au préjudice des associations ATC et ARA, qu'il convient de prendre en considération les faits mais aussi la personnalité des prévenus ; que les juges ajoutent que M. Y... n'avait jamais été condamné à l'époque des faits et qu'une seule mention figure à son casier judiciaire ; qu'ils énoncent encore que le prévenu a fourni un contrat de travail à temps partiel de mars 2017 pour un salaire mensuel net de 1 000 euros, mais a fourni un cautionnement de 200 000 euros dans le cadre du contrôle judiciaire, dont 190 000 euros étaient affectés au paiement des dommages-intérêts et des amendes, et qu'ainsi, eu égard au montant des détournements et de ses capacités financières à l'époque des faits, une peine de 100 000 euros d'amende est justifiée ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, qui répondent, d'une part, à l'exigence résultant des articles 132-1 du code pénal et 485 du code de procédure pénale, selon laquelle, en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle, d'autre part, à l'exigence résultant des articles 132-20, alinéa 2, et 132-1 du code pénal et 485 et 593 du code de procédure pénale, selon laquelle, en matière correctionnelle, la peine d'amende doit être motivée au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges, et dès lors qu'aux termes de ses conclusions déposées devant la cour d'appel, le prévenu ne faisait pas état de ses charges, la cour d'appel, qui s'est référée de manière surabondante aux capacités financières du prévenu à la date des faits, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 17-87.510

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :


- M. François X...,- Mme Isabelle Y..., épouse X...,- M. C... D... Z...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 6 octobre 2017, qui, dans l'information suivie contre eux, notamment des chefs d'association de malfaiteurs et détention de trésor national sans document justificatif régulier, détention de bien culturel sans document justificatif régulier, et importation sans déclaration de marchandise prohibée en bande organisée, a prononcé sur leurs demandes d'annulation de pièces de la procédure ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. A..., conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller A..., les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU et de la société civile professionnelle MEIER-BOURDEAU et LÉCUYER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général B... ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 16 mars 2018 joignant les pourvois et prescrivant leur examen immédiat ;
Vu les mémoires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le 6 août 2013, les agents des douanes du port du Havre, procédant au contrôle du chargement d'un navire en provenance du Brésil, ont découvert dans un conteneur déclaré au déchargement comme renfermant des fûts de quartz, une importante quantité de fossiles d'animaux et de végétaux datant du Crétacé, qui étaient dissimulés au fond des fûts ; que ces marchandises étaient destinées à la société Eldonia, de [...] (03), dont les associés étaient M. François X..., Mme Isabelle Y..., épouse X..., et M. C... Z..., ce dernier ayant financé en partie l'achat et l'acheminement des fossiles depuis le Brésil ; que le 26 janvier 2015, les agents des douanes ont opéré une perquisition dans les locaux de la société Creazaurus, sise à [...] (63), lors de laquelle ils ont découvert un squelette complet de dinosaure, qui lui avait été confié par la société Eldonia ; que dans le cours de l'enquête, qui a mis notamment en évidence que M. Z... procédait à de nombreuses importations de fossiles, ont été saisis deux cent seize fossiles, essentiellement de dinosaures, de poissons, ou de reptiles, qui ont fait l'objet d'une expertise, dont il ressort que la très grande majorité de ceux-ci provient de pays extra-communautaires, tels, pour les plus nombreux, le Brésil, la Chine, Madagascar, ou la Mongolie ; qu'à la suite de l'ouverture d'une information judiciaire, M. Z... et Mme X... ont été mis en examen des chefs de participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de 10 ans d'emprisonnement, détention de trésor national sans document justificatif régulier, détention de bien culturel sans document justificatif régulier, et importation en bande organisée sans déclaration en douane applicable à une marchandise prohibée, et M. X... des mêmes chefs, ainsi que des chefs de vol en bande organisée et recel de vol en bande organisée, faits ayant tous été commis entre janvier 2012 et le 18 octobre 2016 ; que par requêtes des 18 avril 2017 et 24 mai 2017, les avocats de M. Z... et des époux X... ont sollicité de la chambre de l'instruction l'annulation de ces mises en examen, ainsi que de certaines pièces de la procédure, dont le rapport d'expertise des fossiles ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. Z..., pris de la violation des articles 111-3, 111-4, 112-1 et 450-1 du code pénal, 2 bis, 38, 215 ter , 414, 419 et 423 du code des douanes, L. 111-1, L. 111-2, L. 111-3, L. 111-8 , L. 111-9 et L. 112-1, R. 111-1 du code du patrimoine, 80-1, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a écarté la demande de M. Z... en annulation de sa mise en examen et des actes subséquents ;
"aux motifs qu'il résulte de la combinaison des articles 2 bis, 38, 215 ter et 419 du code des douanes, L. 111-1, L. 111-2, L. 111-3, L. 111-8 , L. 111-9 et L. 112-1 du code du patrimoine que l'importation des biens culturels provenant d'un État non membre de l'Union européenne est prohibée si la personne qui les détient ou les transporte ne peut justifier d'un certificat ou de tout autre document équivalent autorisant l'exportation du bien, établi par l'État d'exportation lorsque la législation de cet Etat le prévoit, et a fortiori si la législation de cet Etat prohibe cette exportation ; qu'ainsi l'interdiction légale de l'exportation de biens culturels dans un pays tiers confère à ces objets, à défaut d'être accompagnés d'un certificat de l'Etat d'origine, la nature d'objets prohibés ; qu'en l'espèce, l'exportation de fossiles est interdite par la loi brésilienne et constitue le délit de contrebande ; que l'article 1er de la Convention UNESCO de 1970 à laquelle la France est partie stipule que sont considérés comme biens culturels, notamment les collections et spécimens rares de zoologie, de minéralogie et d'anatomie, objet présentant un intérêt paléontologiques ce qui inclut donc les fossiles ; que l'argumentation selon laquelle un fossile ne serait pas un bien culturel du fait qu'il serait antérieur à l'apparition de toute civilisation humaine n'est pas recevable, outre que les références citées par la défense ne peuvent être entendues en ce qu'elle donnerait une définition restrictive ; que surtout une telle argumentation est contredite par le principe de l'inscription au patrimoine mondial de l'humanité de sites naturels ; que par ailleurs, la notion de biens culturels doit s'apprécier également au regard de la place occupée par les biens dans une civilisation donnée ; qu'ainsi tout site réputé pour sa présence de fossiles donne à ceux-ci la nature des biens culturels quand bien même serait discutée leur concomitance avec la présence d'une civilisation humaine ; que par ailleurs, il ne peut être a priori exclu que les fossiles, au regard de leur valeur, de la réception dans une exposition dans le cadre de musées ne constitue pas un trésor national ; qu'enfin, il résulte des circonstances de découverte des fossiles, le 6 août 2013, que les auteurs de l'importation entendaient les importer frauduleusement, que l'importation de fossiles en grande quantité depuis plusieurs pays étranger via diverses sociétés, les liens existant entre les mises en cause l'organisation mise en place à cette fin, sont autant d'éléments pouvant constituer des indices graves et concordants justifiant la mise en examen d'association de malfaiteurs et d'importation en bande organisée ;
"1°) alors que nul ne peut être puni pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi ; que la contrebande ou l'importation sans déclaration n'ont un caractère délictuel que lorsqu'elles portent sur des marchandises prohibées ou fortement taxées au sens du code des douanes ; que tel n'est pas le cas des biens culturels ou des trésors nationaux au regard des seules dispositions du code des douanes ; qu'en écartant la demande d'annulation de la mise en examen de M. Z... pour des faits commis entre le mois de janvier 2012 au 18 octobre 2016 fondée sur les délits de contrebande et d'importation sans déclaration, la cour d'appel a violé le principe de légalité des délits ;
"2°) alors que sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis ; qu'il résulte des dispositions de l'article 56-2° de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 que ce n'est que depuis son entrée en vigueur le 9 juillet 2016, qu'est interdite « l'importation de biens culturels appartenant à l'une des catégories prévues à l'article 1er de la Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l'importation, l'exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels, faite à Paris le 17 novembre 1970, en provenance directe d'un État non membre de l'Union européenne et partie à cette convention est subordonnée à la production d'un certificat ou de tout autre document équivalent autorisant l'exportation du bien établi par l'État d'exportation lorsque la législation de cet État le prévoit », ainsi que le fait « d'importer, d'exporter, de faire transiter, de transporter, de détenir, de vendre, d'acquérir et d'échanger des biens culturels présentant un intérêt archéologique, artistique, historique ou scientifique lorsqu'ils ont quitté illicitement le territoire d'un État dans les conditions fixées par une résolution du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies (ONU) adoptée en ce sens », dispositions respectivement codifiées aux articles L. 111-8 et L. 111-9 du code du patrimoine ; qu'en se fondant sur ces textes pour considérer que l'importation des fossiles litigieux était prohibée sur le territoire douanier entre janvier 2012 et le 18 octobre 2016, la cour d'appel a violé le principe de non rétroactivité de la loi pénale ;
"3°) alors qu'aux termes des dispositions de l'article L. 111-9 du code du patrimoine, « sous réserve de l'article L. 111-11, il est interdit d'importer, d'exporter, de faire transiter, de transporter, de détenir, de vendre, d'acquérir et d'échanger des biens culturels présentant un intérêt archéologique, artistique, historique ou scientifique lorsqu'ils ont quitté illicitement le territoire d'un État dans les conditions fixées par une résolution du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies adoptée en ce sens » ; qu'en se fondant sur ces dispositions pour refuser d'annuler la mise en examen de M. Z..., quand les faits justifiant sa mise en examen ne font aucunement état du départ des fossiles en cause d'un Etat dans les conditions fixées par une résolution de l'ONU, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"4°) alors qu'aux termes de l'articles L. 111-1 du code du patrimoine, « Sont des trésors nationaux :1°/ Les biens appartenant aux collections des musées de France ;2°/ Les archives publiques, au sens de l'article L. 211-4, ainsi que les biens classés comme archives historiques en application du livre II ;3°/ Les biens classés au titre des monuments historiques en application du livre VI ;4°/ Les autres biens faisant partie du domaine public mobilier, au sens de l'article L. 2112-1 du code général de la propriété des personnes publiques ;5°/ Les autres biens présentant un intérêt majeur pour le patrimoine national au point de vue de l'histoire, de l'art ou de l'archéologie. » ; qu'en considérant que les fossiles en cause étaient susceptibles de constituer des trésors nationaux par référence à leur valeur ou à la destination qui pourrait leur être donnée par un collectionneur ou un musée, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inapte à caractériser l'existence d'un trésor national en présence de fossiles et n'a, ainsi, pas légalement justifié sa décision ;
"5°) alors que le principe de légalité des délits et des peines s'oppose à ce qu'un texte d'incrimination soit interprété à la lumière d'une Convention internationale dépourvue d'effets directs en France ; qu'en se référant à la Convention UNESCO du 17 novembre 1970 pour définir un bien culturel, quand un tel instrument se borne à comporter des engagements réciproques des parties signataires, dépourvus d'effets en droit interne, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"6°) alors que relèvent de la catégorie des biens culturels visés par l'article L. 111-2 ceux, autres que les trésors nationaux, qui présentent un intérêt historique, artistique ou archéologique et entrent dans l'une des catégories définies par décret en Conseil d'Etat ; que l'article R. 111-1 du même code, pris pour son application, énumère un certain nombre de catégories de biens culturels qui ont en commun de procéder de l'action humaine ; que ne relèvent pas de la catégorie des biens culturels ceux qui ont pour seule particularité de présenter un intérêt scientifique, tels les fossiles qui n'appartiennent pas à l'ère de la civilisation humaine ; qu'en retenant cependant que les fossiles dont l'importation et la détention constituent la base de la mise en examen de M. Z... constituent des biens culturels, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour M. X... et Mme Y..., épouse X..., pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 111-1 du code du patrimoine, 419, 215, 38 du code des douanes, 111-3, 111-4, 112-1 du code pénal, préliminaire, 80-1, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre de l'instruction a rejeté le moyen tiré de la nullité de la mise en examen des demandeurs ;
"aux motifs qu'il résulte de la combinaison des articles 2 bis, 38, 215 ter et 419 du code des douanes, L. 111-1, L. 111-2, L. 111-3, L. 111-8, L. 111-9 et L. 112-1 du code du patrimoine que l'importation des biens culturels provenant d'un Etat non membre de l'Union européenne est prohibée si la personne qui les détient ou les transporte ne peut justifier d'un certificat ou de tout autre document équivalant autorisant l'exportation du bien, établi par l'Etat d'exportation lorsque la législation de cet Etat le prévoit, et a fortiori si la législation de cet Etat prohibe cette exportation ; qu'ainsi l'interdiction légale de l'exportation de biens culturels dans un pays tiers confère à ces objets, à défaut d'être accompagné d'un certificat de l'Etat d'origine, la nature d'objets prohibés ; qu'en l'espèce, l'exportation de fossiles est interdite par la loi brésilienne et constitue le délit de contrebande ; que l'article 1 de la Convention UNESCO de 1970 à laquelle la France est partie stipule que sont considérés comme biens culturels, notamment les collections et spécimens rares de zoologie, de minéralogie et d'anatomie, objets présentant un intérêt paléontologique, ce qui inclut donc les fossiles ; que l'argumentation selon laquelle un fossile ne serait pas un bien culturel du fait qu'il serait antérieur à l'apparition de toute civilisation humaine n'est pas recevable, outre que les références citées par la défense ne peuvent entendues en ce qu'elle donnerait une définition restrictive, que surtout une telle argumentation est contredite par le principe de l'inscription au patrimoine mondial de l'humanité de sites naturels ; que, par ailleurs, la notion de bien culturel doit s'apprécier également au regard de la place occupée par les dits biens dans une civilisation donnée ou une culture contemporaine, qu'ainsi, tout site réputé pour la présence de fossiles donne à ceux-ci la nature de biens culturels quand bien même serait discutée leur concomitance avec la présence d'une civilisation humaine ; que, par ailleurs, il ne peut être a priori exclu que les fossiles, au regard de leur valeur, de leur insertion dans une collection réputée et de leur exposition dans le cadre de musées ne constituent pas un trésor national ; qu'enfin, il résulte clairement des circonstances de découverte des fossiles le 6 août 2013 que les auteurs de l'importation entendaient les importer frauduleusement, que l'importation de fossiles en grandes quantités depuis plusieurs pays étrangers via différentes sociétés, les liens existant entre les mis en cause et l'organisation mise en place à cette fin, sont autant d'éléments pouvant constituer des indices graves et concordants justifiant la mise en examen contestée d'association de malfaiteurs et d'importation en bande organisée ; que, dès lors, la requête en annulation des mises en examen sera rejetée » ;
"1°) alors qu'en vertu de l'article 112-1 du code pénal, sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis ; qu'en avançant, comme fondement légal de la mise en examen, l'infraction d'importation de biens culturels prévue à l'article L. 111-9 du code du patrimoine, qui est issue de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, lorsque la période de mise en examen des exposants s'étend de « courant janvier 2012 et jusqu'au 18 octobre 2016 », la chambre de l'instruction a violé le principe de non-rétroactivité de la loi pénale ;
"2°) alors que des fossiles d'origine étrangère n'entrent pas dans la catégorie des biens culturels ou dans celle des trésors nationaux prévues au code du patrimoine, qui ne concernent que les biens français ; que par ailleurs, aucune classification établie par la France ou par l'un des pays de provenance des fossiles litigieux n'a été versée au dossier pour établir l'attribution d'une telle qualification à des fossiles ; qu'en conséquence, aucune des incriminations visées à la mise en examen ne trouve à s'appliquer, de sorte que celle-ci encourait l'annulation ;
"3°) alors que la Convention de l'UNESCO concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l'importation, l'exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels de 1970, qui n'est pas au demeurant un texte d'incrimination, prévoit dans son article 1er, que « sont considérés comme biens culturels les biens qui, à titre religieux ou profane, sont désignés par chaque Etat comme étant d'importance pour l'archéologie, la préhistoire, l'histoire, la littérature, l'art ou la science [] » ; qu'il résulte de ce texte que les Etats eux-mêmes désignent les biens qu'ils entendent protéger à ce titre ; que c'est au prix d'une interprétation erronée de cette convention et sans répondre à l'argumentation des exposants que la chambre de l'instruction a affirmé que « l'article 1 de la Convention UNESCO de 1970 à laquelle la France est partie stipule que sont considérés comme bien culturels, notamment les collections et spécimens rares de zoologie, minéralogie et d'anatomie, objets présentant un intérêt paléontologique, ce qui inclut donc les fossiles ;
"4°) alors que ne relèvent de la catégorie des biens culturels visés à l'article L. 111-2 que ceux, autres que les trésors nationaux, qui présentent un intérêt historique, artistique ou archéologique, et entrent dans l'une des catégories définies par décret en Conseil d'Etat ; que l'article R. 111-1 du même code, pris pour son application, fait référence à des biens culturels qui ont en commun de procéder de l'action humaine ; que ne relèvent pas de la catégorie des biens culturels ceux qui ont pour seule particularité de présenter un intérêt scientifique, tels les fossiles qui n'appartiennent pas à l'ère de la civilisation humaine ; qu'en retenant cependant que les fossiles seraient des biens culturels, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Vu les articles 38, 215 ter, 419 et 423, alinéa 1, du code des douanes, L.111-1, L. 111-2, L.111-3, L.111-8 , L.111-9 du code du patrimoine, 112-1 du code pénal et 80-1 du code de procédure pénale ;
Attendu que selon l'article 80-1 du code de procédure pénale, le juge d'instruction ne peut, à peine de nullité, mettre en examen que les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission d'infractions dont il est saisi ;
Attendu que selon l'article 112-1 du code pénal, seuls sont punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis ;
Attendu que, pour rejeter les demandes d'annulation des mises en examen des demandeurs des chefs de détention de trésor national sans justificatif, détention de bien culturel sans justificatif et importation en bande organisée sans déclaration en douane applicable à une marchandise prohibée, l'arrêt attaqué énonce que l'article 1 de la Convention UNESCO de 1970, à laquelle la France est partie, stipule que sont considérés comme biens culturels, notamment les collections et spécimens rares de zoologie, minéralogie et d'anatomie, objets présentant un intérêt paléontologique, ce qui inclut les fossiles ; que les juges retiennent que l'argumentation selon laquelle un fossile ne serait pas un bien culturel du fait qu'il serait antérieur à l'apparition de toute civilisation humaine n'est pas recevable, les références citées par la défense ne pouvant être entendues en ce qu'elle donneraient une définition restrictive, mais surtout parce qu'une telle argumentation est contredite par le principe de l'inscription au patrimoine mondial de l'humanité de sites naturels ; que la chambre de l'instruction relève par ailleurs que la notion de bien culturel doit s'apprécier également au regard de la place occupée par les dits biens dans une civilisation donnée ou une culture contemporaine, et qu'ainsi, tout site réputé pour la présence de fossiles donne à ceux-ci la nature de biens culturels quand bien même serait discutée leur concomitance avec la présence d'une civilisation humaine ; qu'enfin, les juges ajoutent qu' il ne peut être a priori exclu que les fossiles, au regard de leur valeur, de leur insertion dans une collection réputée, et de leur exposition dans le cadre de musées, ne constituent pas un trésor national ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que d'une part la Convention de l'Unesco du 14 novembre 1970 ne peut servir en elle-même à asseoir une incrimination pénale, d'autre part elle n'a pas justifié au regard des dispositions des articles L.111-1 et L.111-2 du code du patrimoine que les fossiles datant du Crétacé constituent des biens culturels, ou des trésors nationaux français, enfin, les dispositions de l'article L 111-8 du code du patrimoine issu de la loi du 7 juillet 2016, qui incriminent l'importation en France sans autorisation de biens culturels, n'étaient applicables qu'à compter du 9 juillet 2016, alors que la période de la prévention s'étend de janvier 2012 au 18 octobre 2016, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Sur le second moyen de cassation proposé pour M. Z..., pris de la violation des articles 174, 206, et 591 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a annulé le rapport d'expertise coté D213 et son retrait de la procédure mais non les actes subséquents ;
"alors que la nullité d'un acte de l'information doit s'étendre aux actes de la procédure ultérieure dont il est le support nécessaire ; qu'en ne recherchant pas, comme il le lui était demandé, à quels actes subséquents la nullité de cet acte d'information devait s'étendre, la cour d'appel a méconnu son office" ;
Sur le second moyen de cassation proposé pour M. X... et Mme Y..., épouse X..., pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 160, 170, 171, 173, 174, 802, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que la chambre de l'instruction s'est bornée à annuler le rapport d'expertise ;
"aux motifs que sur la nullité du rapport d'expertise Il est constant gue le rapport critiqué ne contient pas le procès-verbal ou les mentions permettant d'établir que les sept experts non inscrits ont préalablement prêté serment à l'accomplissement de leur mission ; que la violation des dispositions de l'article 160 du code de procédure pénale entraîne l'annulation du rapport d'expertise ;
"1°) alors que lorsqu'une irrégularité constitue une cause de nullité de la procédure, doivent être annulés les actes affectés par cette irrégularité et ceux dont ils sont le support nécessaire ; que la chambre de l'instruction, qui constatait en l'espèce l'absence de prestation de serment des experts ayant élaboré le rapport portant sur l'identification, la caractérisation et la détermination de l'origine des spécimens fossiles présents au domicile des époux X... et dans les locaux de la société Eldonia, ne pouvait s'abstenir d'annuler les opérations de saisie, qui étaient indissociables du rapport annulé ;
"2°) alors qu'en se bornant à annuler le rapport d'expertise, la chambre de l'instruction n'a pas répondu à une articulation essentielle du mémoire des demandeurs qui faisait valoir que « cette nullité affecte tous les actes dont les opérations d'expertise, et le rapport qui les relate, constituent le support nécessaire, en ce compris l'ensemble des saisies de fossiles réalisées dans cette affaire, car il ne fait aucun doute que la sélection des fossiles placés sous scellés définitifs a été décidée au regard des avis délivrés par les experts désignés, lesquels étaient présents lors des opérations de perquisitions et saisies, afin précisément de permettre la sélection des scellés définitifs »" ;
Les moyens étant réunis ;
Vu les articles 174 et 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, la chambre de l'instruction doit décider si l'annulation qu'elle prononce doit s'étendre à tout ou partie de la procédure ultérieure ;
Attendu, par ailleurs, que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision, et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'après avoir annulé le rapport d'expertise des fossiles, la chambre de l'instruction, qui n'a pas recherché les conséquences de cette annulation sur les autres pièces de la procédure, comme elle y était invitée par les mémoires des mis en examen, lesquels faisaient valoir que l'annulation du rapport d'expertise devait entraîner celle des saisies des fossiles, ainsi que des opérations d'ouverture des scellés, n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encore encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 6 octobre 2017, mais en ses seules dispositions ayant refusé d'annuler les mises en examen de M. Z..., de M. X... et de Mme Y..., épouse X..., et relatives aux conséquences de l'annulation du rapport d'expertise, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Riom, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction la cour d'appel Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 17-87.499

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :



- M. Karim X...,
contre l'arrêt n° 655 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 7 décembre 2017, qui, dans l'information suivie, notamment, contre lui des chefs d'escroquerie en bande organisée et blanchiment aggravé, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Planchon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Planchon, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MONDON ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle en date du 16 mars 2018 prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le 15 juillet 2016, M. Mathieu A..., brigadier, officier de police judiciaire affecté au service de la compagnie de sécurisation et d'intervention des Hauts-de-Seine, agissant sous couvert de sa hiérarchie, a été contacté par le concessionnaire Nissan à Montrouge (92) qui lui a fait part d'éléments susceptibles de caractériser des faits d'escroquerie commis notamment par la société Malvezin auto, consistant dans l'acquisition en leasing de véhicules Nissan en vue de leur revente très peu de temps après et à bas prix, par le biais de petites annonces diffusées sur les sites internet "La Centrale" ou encore "Le Bon coin" et lui a fourni différentes identités et numéros de téléphone ; que les premières vérifications effectuées à partir de ces renseignements, par la consultation des fichiers police et d'immatriculation sur la société en cause, son dirigeant ou les acquéreurs des véhicules, ont révélé que les dossiers de financement en vue de l'obtention du leasing étaient établis sous de fausses identités et que les adresses des uns et des autres étaient fausses ; que le 26 juillet 2016, M. A..., après avoir pris contact avec la société Malvezin à partir du numéro de téléphone figurant sur l'une des annonces diffusées par elle sur internet a été, ainsi que le lui avait indiqué la secrétaire qui lui a répondu, rappelé par un individu, prénommé Y... qui lui a fixé rendez-vous, le même jour, Porte Maillot à 13 heures 30 ; que s'étant rendu sur les lieux, il a constaté l'arrivée d'un véhicule Nissan Qashquai conduit par un individu qui s'est présenté comme le mandataire de la société Malvezin et a expliqué qu'il ne disposait d'aucune assurance ou carte grise sur lui ; qu'à l'issue du rendez-vous, M. A... et ses collègues ont pris l'individu en filature et ont constaté qu'il était soumis à un contrôle routier au cours duquel il a indiqué ne pas être en possession des papiers du véhicule et a remis son permis de conduire ; que le brigadier a appris des fonctionnaires ayant procédé à ce contrôle que l'intéressé se nommait M. Z... B... ; que, poursuivant la filature, il a constaté que celui-ci se stationnait à proximité d'un autre véhicule de même modèle qui est apparu comme ayant été acquis dans les mêmes conditions dans le cadre d'un leasing et sous une fausse identité ; que le 29 juillet 2016, M. A... a rédigé un procès-verbal intitulé "Rapport d'information sur une équipe s'adonnant à des escroqueries sur des véhicules en leasing" relatant les recherches et vérifications effectuées ainsi que le déroulement des opérations du 26 juillet 2016, qu'il a transmis, le 10 août 2016, à la sous-direction de la police judiciaire des Hauts-de-Seine qui l'a elle-même communiqué au procureur de la république, lequel, dès le 11 août 2016, l'a chargée de l'enquête préliminaire ; que les investigations effectuées dans ce cadre ont permis d'identifier, notamment, M. X... ainsi que son frère D..., comme susceptibles de participer à la fraude ; que ces derniers, mis en examen, ont saisi la chambre de l'instruction d'une demande d'annulation d'actes de la procédure ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, Préliminaire, 12, 19 alinéa 1, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulationformée par le mis en examen ;
"aux motifs que les cotes D12 à D17 correspondent à un "rapport d'information sur une équipe s'adonnant à des escroqueries sur des véhicules en leasing" rédigé le 29 juillet 2016 par un brigadier de police et transmis à son supérieur hiérarchique, chef de la compagnie de sécurisation et d'intervention des Hauts de Seine (CSI 92) pour toutes suites à donner ; qu' il résulte de la combinaison des articles 429 et 537 du code de procédure pénale, 19 du décret 95-654 du 9 mai 1995 et R. 434-19 du code de la sécurité intérieure que tout fonctionnaire de police est considéré comme étant en service et agissant dans l'exercice de ses fonctions dès lors qu'il intervient dans sa circonscription et dans le cadre de ses attributions de sa propre initiative pour prévenir ou réprimer tout acte de nature à troubler la sécurité et l'ordre public ; que l'article D. 11 du code de procédure pénale autorise tant les officiers de police judiciaire que les agents de police judiciaire énumérés à l'article 20 du même code à relater dans un seul procès-verbal les opérations effectuées au cours de la même enquête, ce qui induit que chacune d'elle ne fait pas obligatoirement l'objet d'une consignation immédiate ; qu'il ne peut donc pas être fait grief au rapport contesté, lequel est assimilable à un procès-verbal, de contenir toutes les vérifications effectuées par son auteur sur plusieurs jours ; qu'en première page (D12), le brigadier relate dans un premier temps les déclarations effectuées par M. C..., employé d'une concession automobile Nissan située à Montrouge (92) lors d'un appel téléphonique, auquel il a répondu, dénonçant de possibles agissements frauduleux ; qu'ainsi il n'est pas contestable que le brigadier agissait dans sa circonscription et dans l'exercice de ses fonctions d'officier de police judiciaire, conformément aux dispositions des articles 19 et 75 du code de procédure pénale ; que le brigadier n'a fait, à ce stade du rapport, que retranscrire des propos qu'il a directement et personnellement entendus, respectant ainsi l'ensemble des dispositions sus-visées ; []qu'entre la deuxième et la cinquième page (D13-D15) dans la partie intitulée "mes investigations", le brigadier rapporte les différentes vérifications qu'il a personnellement effectuées pour vérifier l'ensemble des informations communiquées par M. C... : identités données pour établir les dossiers de crédit, sociétés visées, adresses ; qu'il est faux d'affirmer que ces investigations ont été réalisées hors de tout cadre légal ; qu'il sera précisé que le rapport a été transmis au supérieur hiérarchique aux fins de poursuite de l'enquête avant toute mesure coercitive ; qu'ainsi le brigadier s'est conformé aux dispositions du code de procédure pénale selon lesquelles les officiers de police judiciaire peuvent effectuer d'office des enquêtes préliminaires ; que le parquet en a été avisé onze jours après et avant toute mesure attentatoire aux libertés ; qu'au demeurant, le défaut d'information ou le caractère tardif d'une telle information du procureur de la république, non établie en l'espèce, est sans effet sur la validité des actes accomplis ;
"1°) alors que la détermination du cadre légal de l'enquête menée par un officier de police judiciaire doit être explicite et antérieure à tout acte d'investigation ; que les procès-verbaux relatant les investigations doivent en outre préciser le cadre légal dans lequel celles-ci ont été accomplies ; qu'en affirmant que l'enquête n'aurait pas été effectuée hors de tout cadre légal et en la qualifiant rétroactivement d'enquête préliminaire, sans qu'aucun de ses motifs ne permette de s'assurer que cette qualification avait été retenue dès le début de la procédure et était précisée dans le rapport d'information rédigé par l'officier de police judiciaire ayant mené les investigations, la chambre de l'instruction a violé les principes susvisés et n'a pas donné de base légale à sa décision ;
"2°) alors que les officiers de police judiciaire sont tenus d'informer sans délai le procureur de la république des crimes, délits et contraventions dont ils ont connaissance, les enquêtes devant être effectuées sous sa surveillance et celle du procureur général ; qu'il en résulte qu'un officier de police judiciaire informé de la possible commission d'un délit doit en aviser immédiatement le procureur de la république, sans préjudice de la possibilité qu'il détient de procéder d'office à l'ouverture d'une enquête préliminaire ; que la chambre de l'instruction, qui constate que le parquet aurait été avisé après onze jours d'enquête, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a méconnu le principe susvisé" ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 34 de la Constitution, 111-5 du code pénal, préliminaire, 66, 75 à 78, 429, D. 11 et 591 du code de procédure pénale, exception d'illégalité ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation formée par le mis en examen ;
"aux motifs que l'article D. 11 du code de procédure pénale autorise tant les officiers de police judiciaire que les agents de police judiciaire énumérés à l'article 20 du même code à relater dans un seul procès-verbal les opérations effectuées au cours de la même enquête, ce qui induit que chacune d'elle ne fait pas obligatoirement l'objet d'une consignation immédiate ; qu'il ne peut donc pas être fait grief au rapport contesté, lequel est assimilable à un procès-verbal, de contenir toutes les vérifications effectuées par son auteur sur plusieurs jours ;
"1°) alors que l'article D. 11 alinéa 1 du code de procédure pénale, que la chambre de l'instruction oppose pour rejeter le moyen d'annulation soulevé par le mis en examen, est illégal en ce qu'il contrevient aux dispositions législatives des articles 66 et 429 du code de procédure pénale qui impliquent qu'un procès-verbal soit réalisé dans un temps proche des faits qui y sont constatés ; que son application, ou à tout le moins l'interprétation qu'en fait la chambre de l'instruction, qui considère que celui-ci dispenserait les autorités d'enquête de l'obligation de consigner immédiatement les actes d'investigation réalisés, devra dès lors être écartée ;
"2°) alors que l'article D. 11 alinéa 1 du code de procédure pénale, qui fixe des règles en matière de procédure pénale, est contraire à l'article 34 de la Constitution qui donne compétence exclusive au législateur dans cette matière ; que son application devra dès lors être écartée ;
"3°) alors que l'article D. 11 alinéa 1 du code de procédure pénale, qui prévoit en matière d'enquête préliminaire des règles de procédure moins strictes que celles prévues par la loi pour les enquêtes de flagrance à l'article 66 du code de procédure pénale, porte atteinte au droit à un procès équitable et au respect des droits de la défense, affirmés à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et à l'article préliminaire du code de procédure pénale ; que son application devra dès lors être écartée.
"4°) alors que la chambre de l'instruction, qui se fonde sur l'interprétation qu'elle fait d'une disposition réglementaire pour déroger à la règle de valeur législative selon laquelle les procès-verbaux doivent être établis dans un temps proche des faits qui y sont constatés, a méconnu le principe ainsi énoncé et l'ensemble des textes susvisés ;
"5°) alors que la déclaration d'inconstitutionnalité des articles 75 à 78 du code de procédure pénale que prononcera le Conseil constitutionnel entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt pour perte de fondement juridique" ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, Préliminaire, 61, 78, 429 alinéa 2, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation formée par le mis en examen ;
"aux motifs que s'agissant de l'appel de M. C..., le brigadier A... n'a fait, à ce stade du rapport, que retranscrire des propos qu'il a directement et personnellement entendus ; [] que le rapport d'information du 29 juillet 2016 ne vaut qu'à titre de simple renseignement conformément à l'article 430 du code de procédure pénale ; que le brigadier a précisé avoir effectué des vérifications de l'ensemble des adresses communiquées, ce que les dispositions légales précitées lui permettaient de réaliser ; qu'il a : [] mentionné l'identité et le numéro de téléphone des personnes dont il a recueilli les déclarations s'agissant de la gardienne de l'immeuble situé [...] ou la fonction de la personne rencontrée dans le parking public, ce qui permet d'autres investigations ultérieures et préserve ainsi les droits de la défense ;
"alors que les articles 78 et 61 du code de procédure pénale prévoient que les déclarations faites par toutes les personnes susceptibles de fournir des renseignements sur les faits doivent être consignées dans un procès-verbal qui doit être relu et signé par l'auteur des déclarations ; qu'en se bornant à constater que les déclarations consignées dans le rapport d'information indiquaient l'identité et le numéro de téléphone des personnes dont les déclarations ont été recueillies, sans rechercher comme cela lui était demandé par le requérant si ces déclarations avaient été relues et signées par leurs auteurs et si elles avaient été consignées dans un procès-verbal permettant de retracer les conditions dans lesquelles elles ont été faites, la chambre de l'instruction a méconnu les textes et principes exposés ci-dessus et elle n'a pas donné de base légale à sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour rejeter la requête en annulation d'actes de la procédure, prise de l'irrégularité du procès-verbal dressé le 29 juillet 2016, l'arrêt, après avoir relevé que les cotes D.12 à D.17 correspondent à un "rapport d'information sur une équipe s'adonnant à des escroqueries sur des véhicules en leasing" rédigé le 29 juillet 2016 par un brigadier de police et transmis à son supérieur hiérarchique, pour toutes suites à donner, énonce qu'il résulte de la combinaison des articles 429 et 537 du code de procédure pénale, 19 du décret n° 95-654 du 9 mai 1995 et R. 434-19 du code de la sécurité intérieure que tout fonctionnaire de police est considéré comme étant en service et agissant dans l'exercice de ses fonctions dès lors qu'il intervient dans sa circonscription et dans le cadre de ses attributions de sa propre initiative pour prévenir ou réprimer tout acte de nature à troubler la sécurité et l'ordre public, que l'article D.11 du code de procédure pénale autorise les officiers et les agents de police judiciaire énumérés à l'article 20 du même code à relater dans un seul procès-verbal les opérations effectuées au cours de la même enquête, ce qui induit que chacune d'elle ne fait pas obligatoirement l'objet d'une consignation immédiate et qu'il ne peut être fait grief au rapport contesté, lequel est assimilable à un procès-verbal, de contenir toutes les vérifications réalisées par son auteur sur plusieurs jours ; que les juges ajoutent, après avoir rappelé le contenu de la première page dudit procès-verbal, qu'il n'est pas contestable que le brigadier agissait dans sa circonscription et dans l'exercice de ses fonctions d'officier de police judiciaire, conformément aux dispositions des articles 19 et 75 du code de procédure pénale, qu'il n'a fait, à ce stade du rapport, que retranscrire des propos qu'il a directement et personnellement entendus, respectant ainsi l'ensemble des dispositions susvisées ; qu'après avoir évoqué le contenu des pages 2 à 5, dans la partie intitulée "Mes investigations", la chambre de l'instruction relève que le brigadier rapporte les différentes vérifications qu'il a personnellement effectuées pour vérifier l'ensemble des informations communiquées par M. C..., qu'il est faux d'affirmer que ces investigations ont été réalisées hors tout cadre légal, le rapport, qui ne vaut qu'à titre de simple renseignement conformément à l'article 430 du code de procédure pénale, ayant été transmis au supérieur hiérarchique aux fins de poursuite de l'enquête avant toute mesure coercitive ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que, d'une part, aucune disposition du code de procédure pénale ne fait obligation aux officiers de police judiciaire de préciser expressément le cadre dans lequel ils agissent dans les procès-verbaux qu'ils établissent, les mentions y figurant permettant au procureur de la République, dont le défaut d'information immédiat des actes ainsi accomplis, est sans effet sur leur validité, de le qualifier, d'autre part, l'article D. 11 du code de procédure pénale, qui ne porte pas atteinte en lui-même aux droits de la défense garantis par l'article préliminaire du même code et l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, et qui, dans sa version applicable à la date des faits, était applicable exclusivement à l'enquête préliminaire, n'est contraire ni aux dispositions de l'article 66 du même code relatif aux actes réalisés dans le cadre d'une enquête de flagrance, lesquelles ne sont pas prescrites à peine de nullité, ni à celles de l'article 34 de la Constitution et ne porte pas atteinte en lui-même aux droits de la défense, de troisième part, le procès-verbal intitulé "rapport d'information", établi par un officier de police judiciaire compétent, qui se borne à consigner les renseignements fournis par une personne qui a spontanément contacté son auteur, qui rend compte des vérifications sommaires effectuées sur la base de ces éléments afin de permettre des investigations ultérieures, est dépourvu de toute force probante et n'est soumis à aucune forme, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens, dont le deuxième, pris en sa cinquième branche, est devenu sans objet à la suite de la décision de la Cour de cassation disant dit n'y avoir lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité présentée par M. X..., ne peuvent qu'être écartés ;
Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, Préliminaire, 427, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation du principe de loyauté des preuves :
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation formée par le mis en examen ;
"aux motifs que les pages 5 et 6 du rapport ont trait aux investigations réalisées le 26 juillet 2017 ; que le brigadier indique avoir répondu à une annonce internet concernant un véhicule vendu par la société Malvezin et avoir ainsi été contacté ensuite par une secrétaire et un commercial ; que le requérant soutient qu'il s'agit là d'une ruse et d'un stratagème contrevenant au principe de loyauté de la preuve ; que porte atteinte au droit à un procès équitable et au principe de loyauté des preuves le stratagème qui en vicie la recherche par un agent de l'autorité publique ; que toutefois il convient de distinguer la provocation à la commission de l'infraction de la provocation à l'obtention d'une preuve de cette infraction ; qu'en effet le principe de la loyauté de la preuve doit en matière pénale être concilié avec celui de sa liberté, et avec les pouvoirs reconnus aux enquêteurs et aux magistrats dans leur mission de recherche et de poursuite des infractions et d'identification de leurs auteurs, objectifs de valeur constitutionnelle ; qu'ainsi la sanction d'un comportement déloyal viciant la recherche de la preuve par un agent de l'autorité publique présuppose une démarche positive de provocation de la part de ce dernier ; qu'en l'espèce, il ne s'agissait pas d'une provocation à la commission d'une infraction, laquelle était déjà réalisée, s'agissant du détournement d'un véhicule acquis initialement en leasing et déjà mis à la vente sur internet avant le terme de ce crédit, soit sans en être propriétaire ;
"1°) alors que porte atteinte au droit à un procès équitable et au principe de loyauté des preuves le stratagème qui en vicie la recherche par un agent de l'autorité publique ; qu'en affirmant que le principe de loyauté de la preuve ne permettait de sanctionner que la « démarche positive de provocation » à la commission d'une infraction par un agent, alors même qu'il prohibe tout procédé déloyal d'enquête mettant en échec le droit à un procès équitable et notamment le droit de ne pas s'auto-incriminer, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée du principe exposé ci-dessus ;
"2°)alors qu'à l'appui de sa requête, le requérant a notamment exposé que le fait pour un agent de l'autorité publique de dissimuler sa qualité en se faisant passer pour un client potentiel était constitutif d'un procédé d'enquête déloyal en ce qu'il s'agissait d'une opération d'infiltration non prévue par le code de procédure pénale ; que faute pour la chambre de l'instruction d'avoir recherché si et dans quelles conditions l'opération réalisée par le brigadier était autorisée par la loi, celle-ci n'a pas donné de base légale à sa décision ;
"3°) alors qu' en tout état de cause, le détournement allégué par la chambre de l'instruction dans ses motifs ne pouvant se réaliser que par la vente effective de la voiture et non la seule volonté de la mettre en vente, c'est en violation de la loi pénale et sans tirer les conséquences légales de ses propres constatations que la chambre de l'instruction a affirmé que le stratagème employé, intervenant en amont de la vente et destinée à la préparer, n'avait provoqué qu'à la preuve de l'infraction et non à sa commission" ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation d'acte, prise d'une atteinte au principe de la loyauté de la preuve, l'arrêt, après avoir constaté que le rédacteur du procès-verbal litigieux indique avoir répondu à une annonce internet concernant un véhicule vendu par la société Malvezin auto et avoir été ainsi contacté, notamment, par un commercial, énonce qu'il convient de distinguer la provocation à la commission de l'infraction de la provocation à l'obtention d'une preuve de celle-ci et qu'en l'espèce, il ne s'agissait pas d'une provocation à la commission d'une infraction, laquelle était déjà réalisée, s'agissant du détournement d'un véhicule acquis initialement en leasing et déjà mis en vente sur internet avant le terme de ce crédit, soit sans être propriétaire ; que les juges, après avoir précisé que le brigadier a relaté les faits auxquels il a personnellement participé, s'agissant de son appel téléphonique sur la ligne figurant dans l'annonce, de sa communication avec la secrétaire, puis du fait qu'elle l'avait recontacté, avant qu'un commercial lui téléphone pour convenir d'un rendez-vous Porte Maillot, qu'il a précisé avoir engagé, avec l'aide de ses collègues, une filature, avoir, à cette occasion, constaté que le commercial faisait l'objet d'un contrôle routier et avoir appris qu'il s'agissait de M. Z... B..., ajoutent qu'il résulte de ces précisions qu'il n'a pas participé au contrôle routier mais a assisté à celui-ci à l'occasion de la filature et que ces énonciations valent à titre de simples renseignements ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que ne porte pas atteinte, notamment, au principe de la loyauté des preuves et au droit à un procès équitable, le fait, pour un officier de police judiciaire, compétent pour ce faire, préalablement informé, de façon spontanée, par un tiers, de la possible commission d'infractions, de contacter, à l'aide d'un numéro de téléphone diffusée par elle sur internet, la société mettant en vente un véhicule susceptible d'avoir été acquis en leasing à l'aide d'un dossier contenant des pièces falsifiées, et de se rendre au rendez-vous fixé par le commercial qui l'a rappelé à cette fin, sans prendre aucun engagement ni faire une quelconque autre demande, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le cinquième moyen pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, Préliminaire, L. 233-1 et R. 233-1 du code de la route, 429, D. 11, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation formée par le mis en examen ;
"aux motifs que le brigadier a relaté des faits auxquels il a personnellement participé s'agissant d'une part de son appel téléphonique sur la ligne figurant dans l'annonce, de sa communication à cette occasion avec la secrétaire puis du fait qu'elle l'avait recontacté avant qu'un commercial lui téléphone pour convenir d'un rendez-vous Porte Maillot ; qu'il a précisé avoir engagé avec l'aide de ses collègues une filature et avoir à cette occasion constaté que le commercial faisait l'objet d'un contrôle routier ; qu'il a ajouté "j'apprenais qu'il s'agissait de M. B..." ; qu'il résulte de ces précisions qu'il n'a pas participé au contrôle routier mais a assisté à celui-ci à l'occasion de la filature ; que ces énonciations valent ainsi à titre de simples renseignements ; que ses recherches ultérieures se sont limitées à la consultation des fichiers de police concernant M. B... et le véhicule qu'il conduisait afin de connaître l'identité de ses propriétaires successifs ; qu' en application des articles L. 233-1 et R. 233-1 du code de la route, les forces de l'ordre peuvent procéder au contrôle d'un véhicule sans infraction préalable ; que ce contrôle se distingue ainsi du contrôle d'identité régi par l'article 78-2 du code de procédure pénale ; qu'en l'espèce, en page 16 du rapport litigieux, il n'est décrit qu'un contrôle routier, lequel n'imposait pas la rédaction d'un procès-verbal en ce qu'un tel contrôle peut être réalisé sans formalité particulière, ce d'autant plus que M. B... était porteur de son permis de conduire ;
"1°) alors que l'article D. 11 du code de procédure pénale prévoit en son deuxième alinéa que si plusieurs officiers de police judiciaire concourent à une enquête, le nom de celui qui a personnellement accompli chacune des opérations doit être précisé ; qu'il en résulte que, peu important le cadre procédural du contrôle routier ayant permis de connaître l'identité du suspect, le nom de l'officier ayant procédé à ce contrôle devait apparaître dans le rapport d'information ; qu'en concluant à la régularité du rapport ainsi établi sans que le nom de l'un des officiers de police ayant participé aux opérations ne soit précisé, la chambre de l'instruction a méconnu le principe exposé ci-dessus ;
"2°) alors que les contrôles routiers, comme toute autre forme de contrôles constitutifs d'une intrusion dans la vie des personnes qui en font l'objet, sont soumis à un principe de légalité et ne peuvent être réalisés dans les conditions prévues par la loi ; que la chambre de l'instruction, qui retient à tort que le contrôle routier aurait pu être effectué sans aucun motif et sans aucune formalité particulière, a méconnu le principe exposé ci-dessus ;
"3°) alors que faute pour la chambre de l'instruction d'avoir recherché les conditions dans lesquelles le contrôle routier, qui aurait été fortuitement réalisé sur la voiture qui faisait l'objet d'une filature, a été réalisé, et faute pour le rapport d'information de préciser les conditions dans lesquelles il a été pris attache avec l'officier ou l'agent de police auteur du contrôle afin d'obtenir l'identité de l'individu conduisant la voiture, la chambre de l'instruction ne permet pas de s'assurer, comme le demandait le requérant, que ce contrôle routier a été réalisé sans détournement de procédure et sans irrégularité ; que l'arrêt attaqué est ce faisant insuffisamment motivé" ;
Attendu que le moyen pris de l'irrégularité du contrôle routier, dont ni l'organisation ni la restranscription ne sont soumises à aucun formalisme particulier, pratiqué à l'égard d'un tiers susceptible d'être impliqué dans les infractions des chefs desquelles le demandeur a été mis en examen, est inopérant dès lors que cette éventuelle irrégularité ne peut être invoquée que par la personne qu'elle concerne ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 17-87.498

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Mounir X...,
contre l'arrêt n° 654 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 7 décembre 2017, qui, dans l'information suivie, notamment, contre lui des chefs d'escroquerie en bande organisée et blanchiment aggravé, a prononcé sur sa demande d'annulation d'actes de la procédure ;La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 27 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Y..., conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Y..., les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Z...;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle en date du 16 mars 2018 prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le 15 juillet 2016, M. Mathieu A..., brigadier, officier de police judiciaire affecté au service de la compagnie de sécurisation et d'intervention des Hauts-de-Seine, agissant sous couvert de sa hiérarchie, a été contacté par le concessionnaire Nissan à Montrouge (92) qui lui a fait part d'éléments susceptibles de caractériser des faits d'escroquerie commis notamment par la société Malvezin auto, consistant dans l'acquisition en leasing de véhicules Nissan en vue de leur revente très peu de temps après et à bas prix, par le biais de petites annonces diffusées sur les sites internet "La Centrale" ou encore "Le Bon coin" et lui a fourni différentes identités et numéros de téléphone ; que les premières vérifications effectuées à partir de ces renseignements, par la consultation des fichiers police et d'immatriculation sur la société en cause, son dirigeant ou les acquéreurs des véhicules, ont révélé que les dossiers de financement en vue de l'obtention du leasing étaient établis sous de fausses identités et que les adresses des uns et des autres étaient fausses ; que le 26 juillet 2016, M. A..., après avoir pris contact avec la société Malvezin à partir du numéro de téléphone figurant sur l'une des annonces diffusées par elle sur internet a été, ainsi que le lui avait indiqué la secrétaire qui lui a répondu, rappelé par un individu, prénommé Kevin qui lui a fixé rendez-vous, le même jour, Porte Maillot à 13 heures 30 ; que s'étant rendu sur les lieux, il a constaté l'arrivée d'un véhicule Nissan Qashquai conduit par un individu qui s'est présenté comme le mandataire de la société Malvezin et a expliqué qu'il ne disposait d'aucune assurance ou carte grise sur lui ; qu'à l'issue du rendez-vous, M. A... et ses collègues ont pris l'individu en filature et ont constaté qu'il était soumis à un contrôle routier au cours duquel il a indiqué ne pas être en possession des papiers du véhicule et a remis son permis de conduire ; que le brigadier a appris des fonctionnaires ayant procédé à ce contrôle que l'intéressé se nommait M. Bilal B... ; que, poursuivant la filature, il a constaté que celui-ci se stationnait à proximité d'un autre véhicule de même modèle qui est apparu comme ayant été acquis dans les mêmes conditions dans le cadre d'un leasing et sous une fausse identité ; que le 29 juillet 2016, M. A... a rédigé un procès-verbal intitulé "Rapport d'information sur une équipe s'adonnant à des escroqueries sur des véhicules en leasing" relatant les recherches et vérifications effectuées ainsi que le déroulement des opérations du 26 juillet 2016, qu'il a transmis, le 10 août 2016, à la sous-direction de la police judiciaire des Hauts-de-Seine qui l'a elle-même communiqué au procureur de la République, lequel, dès le 11 août 2016, l'a chargée de l'enquête préliminaire ; que les investigations effectuées dans ce cadre ont permis d'identifier, notamment, M. X... ainsi que son frère Karim, comme susceptibles de participer à la fraude ; que ces derniers, mis en examen, ont saisi la chambre de l'instruction d'une demande d'annulation d'actes de la procédure ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, Préliminaire, 12, 19 alinéa 1, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale,
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation formée par le mis en examen ;
"aux motifs que les cotes D12 à D17 correspondent à un "rapport d'information sur une équipe s'adonnant à des escroqueries sur des véhicules en leasing" rédigé le 29 juillet 2016 par un brigadier de police et transmis à son supérieur hiérarchique, chef de la compagnie de sécurisation et d'intervention des Hauts de Seine (CSI 92) pour toutes suites à donner ; qu' il résulte de la combinaison des articles 429 et 537 du code de procédure pénale, 19 du décret 95-654 du 9 mai 1995 et R.434-19 du code de la sécurité intérieure que tout fonctionnaire de police est considéré comme étant en service et agissant dans l'exercice de ses fonctions dès lors qu'il intervient dans sa circonscription et dans le cadre de ses attributions de sa propre initiative pour prévenir ou réprimer tout acte de nature à troubler la sécurité et l'ordre public ; que l'article D. 11 du code de procédure pénale autorise tant les officiers de police judiciaire que les agents de police judiciaire énumérés à l'article 20 du même code à relater dans un seul procès-verbal les opérations effectuées au cours de la même enquête, ce qui induit que chacune d'elle ne fait pas obligatoirement l'objet d'une consignation immédiate ; qu'il ne peut donc pas être fait grief au rapport contesté, lequel est assimilable à un procès-verbal, de contenir toutes les vérifications effectuées par son auteur sur plusieurs jours ; qu'en première page (D12), le brigadier relate dans un premier temps les déclarations effectuées par M. C..., employé d'une concession automobile Nissan située à Montrouge (92) lors d'un appel téléphonique, auquel il a répondu, dénonçant de possibles agissements frauduleux ; qu'ainsi il n'est pas contestable que le brigadier agissait dans sa circonscription et dans l'exercice de ses fonctions d'officier de police judiciaire, conformément aux dispositions des articles 19 et 75 du code de procédure pénale ; que le brigadier n'a fait, à ce stade du rapport, que retranscrire des propos qu'il a directement et personnellement entendus, respectant ainsi l'ensemble des dispositions sus-visées ; [] qu'entre la deuxième et la cinquième page (D13-D15) dans la partie intitulée "mes investigations", le brigadier rapporte les différentes vérifications qu'il a personnellement effectuées pour vérifier l'ensemble des informations communiquées par M. C... : identités données pour établir les dossiers de crédit, sociétés visées, adresses ; qu'il est faux d'affirmer que ces investigations ont été réalisées hors de tout cadre légal ; qu'il sera précisé que le rapport a été transmis au supérieur hiérarchique aux fins de poursuite de l'enquête avant toute mesure coercitive ; qu'ainsi le brigadier s'est conformé aux dispositions du code de procédure pénale selon lesquelles les officiers de police judiciaire peuvent effectuer d'office des enquêtes préliminaires ; que le parquet en a été avisé onze jours après et avant toute mesure attentatoire aux libertés ; qu'au demeurant, le défaut d'information ou le caractère tardif d'une telle information du procureur de la république, non établie en l'espèce, est sans effet sur la validité des actes accomplis ;
"1°) alors que la détermination du cadre légal de l'enquête menée par un officier de police judiciaire doit être explicite et antérieure à tout acte d'investigation ; que les procès-verbaux relatant les investigations doivent en outre préciser le cadre légal dans lequel celles-ci ont été accomplies ; qu'en affirmant que l'enquête n'aurait pas été effectuée hors de tout cadre légal et en la qualifiant rétroactivement d'enquête préliminaire, sans qu'aucun de ses motifs ne permette de s'assurer que cette qualification avait été retenue dès le début de la procédure et était précisée dans le rapport d'information rédigé par l'officier de police judiciaire ayant mené les investigations, la chambre de l'instruction a violé les principes susvisés et n'a pas donné de base légale à sa décision ;
"2°) alors que les officiers de police judiciaire sont tenus d'informer sans délai le procureur de la république des crimes, délits et contraventions dont ils ont connaissance, les enquêtes devant être effectuées sous sa surveillance et celle du procureur général ; qu'il en résulte qu'un officier de police judiciaire informé de la possible commission d'un délit doit en aviser immédiatement le procureur de la république, sans préjudice de la possibilité qu'il détient de procéder d'office à l'ouverture d'une enquête préliminaire ; que la chambre de l'instruction, qui constate que le parquet aurait été avisé après onze jours d'enquête, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a méconnu le principe susvisé" ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 34 de la Constitution, 111-5 du code pénal, Préliminaire, 66, 75 à 78, 429, D. 11 et 591 du code de procédure pénale, exception d'illégalité ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation formée par le mis en examen ;
"aux motifs que l'article D. 11 du code de procédure pénale autorise tant les officiers de police judiciaire que les agents de police judiciaire énumérés à l'article 20 du même code à relater dans un seul procès-verbal les opérations effectuées au cours de la même enquête, ce qui induit que chacune d'elle ne fait pas obligatoirement l'objet d'une consignation immédiate ; qu'il ne peut donc pas être fait grief au rapport contesté, lequel est assimilable à un procès-verbal, de contenir toutes les vérifications effectuées par son auteur sur plusieurs jours ;
"1°) alors que l'article D. 11 alinéa 1 du code de procédure pénale, que la chambre de l'instruction oppose pour rejeter le moyen d'annulation soulevé par le mis en examen, est illégal en ce qu'il contrevient aux dispositions législatives des articles 66 et 429 du code de procédure pénale qui impliquent qu'un procès-verbal soit réalisé dans un temps proche des faits qui y sont constatés ; que son application, ou à tout le moins l'interprétation qu'en fait la chambre de l'instruction, qui considère que celui-ci dispenserait les autorités d'enquête de l'obligation de consigner immédiatement les actes d'investigation réalisés, devra dès lors être écartée ;
"2°) alors que l'article D. 11 alinéa 1 du code de procédure pénale, qui fixe des règles en matière de procédure pénale, est contraire à l'article 34 de la Constitution qui donne compétence exclusive au législateur dans cette matière ; que son application devra dès lors être écartée ;
"3°) alors que l'article D. 11 alinéa 1 du code de procédure pénale, qui prévoit en matière d'enquête préliminaire des règles de procédure moins strictes que celles prévues par la loi pour les enquêtes de flagrance à l'article 66 du code de procédure pénale, porte atteinte au droit à un procès équitable et au respect des droits de la défense, affirmés à l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et à l'article préliminaire du code de procédure pénale ; que son application devra dès lors être écartée ;
"4°) alors que la chambre de l'instruction, qui se fonde sur l'interprétation qu'elle fait d'une disposition réglementaire pour déroger à la règle de valeur législative selon laquelle les procès-verbaux doivent être établis dans un temps proche des faits qui y sont constatés, a méconnu le principe ainsi énoncé et l'ensemble des textes susvisés.
"5°) alors que la déclaration d'inconstitutionnalité des articles 75 à 78 du code de procédure pénale que prononcera le Conseil constitutionnel entraînera, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt pour perte de fondement juridique" ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, Préliminaire, 61, 78, 429 alinéa 2, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation formée par le mis en examen ;
"aux motifs que s'agissant de l'appel de M. C..., M. A..., brigadier n'a fait, à ce stade du rapport, que retranscrire des propos qu'il a directement et personnellement entendus ; [] que le rapport d'information du 29 juillet 2016 ne vaut qu'à titre de simple renseignement conformément à l'article 430 du code de procédure pénale ; que le brigadier a précisé avoir effectué des vérifications de l'ensemble des adresses communiquées, ce que les dispositions légales précitées lui permettaient de réaliser ; qu'il a : [] mentionné l'identité et le numéro de téléphone des personnes dont il a recueilli les déclarations s'agissant de la gardienne de l'immeuble situé [...] ou la fonction de la personne rencontrée dans le parking public, ce qui permet d'autres investigations ultérieures et préserve ainsi les droits de la défense ;
"alors que les articles 78 et 61 du code de procédure pénale prévoient que les déclarations faites par toutes les personnes susceptibles de fournir des renseignements sur les faits doivent être consignées dans un procès-verbal qui doit être relu et signé par l'auteur des déclarations ; qu'en se bornant à constater que les déclarations consignées dans le rapport d'information indiquaient l'identité et le numéro de téléphone des personnes dont les déclarations ont été recueillies, sans rechercher comme cela lui était demandé par le requérant si ces déclarations avaient été relues et signées par leurs auteurs et si elles avaient été consignées dans un procès-verbal permettant de retracer les conditions dans lesquelles elles ont été faites, la chambre de l'instruction a méconnu les textes et principes exposés ci-dessus et elle n'a pas donné de base légale à sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour rejeter la requête en annulation d'actes de la procédure, prise de l'irrégularité du procès-verbal dressé le 29 juillet 2016, l'arrêt, après avoir relevé que les cotes D 12 à D 17 correspondent à un "rapport d'information sur une équipe s'adonnant à des escroqueries sur des véhicules en leasing" rédigé le 29 juillet 2016 par un brigadier de police et transmis à son supérieur hiérarchique, pour toutes suites à donner, énonce qu'il résulte de la combinaison des articles 429 et 537 du code de procédure pénale, 19 du décret n° 95-654 du 9 mai 1995 et R. 434-19 du code de la sécurité intérieure que tout fonctionnaire de police est considéré comme étant en service et agissant dans l'exercice de ses fonctions dès lors qu'il intervient dans sa circonscription et dans le cadre de ses attributions de sa propre initiative pour prévenir ou réprimer tout acte de nature à troubler la sécurité et l'ordre public, que l'article D.11 du code de procédure pénale autorise les officiers et les agents de police judiciaire énumérés à l'article 20 du même code à relater dans un seul procès-verbal les opérations effectuées au cours de la même enquête, ce qui induit que chacune d'elle ne fait pas obligatoirement l'objet d'une consignation immédiate et qu'il ne peut être fait grief au rapport contesté, lequel est assimilable à un procès-verbal, de contenir toutes les vérifications réalisées par son auteur sur plusieurs jours ; que les juges ajoutent, après avoir rappelé le contenu de la première page dudit procès-verbal, qu'il n'est pas contestable que le brigadier agissait dans sa circonscription et dans l'exercice de ses fonctions d'officier de police judiciaire, conformément aux dispositions des articles 19 et 75 du code de procédure pénale, qu'il n'a fait, à ce stade du rapport, que retranscrire des propos qu'il a directement et personnellement entendus, respectant ainsi l'ensemble des dispositions susvisées ; qu'après avoir évoqué le contenu des pages 2 à 5, dans la partie intitulée "Mes investigations", la chambre de l'instruction relève que le brigadier rapporte les différentes vérifications qu'il a personnellement effectuées pour vérifier l'ensemble des informations communiquées par M. C..., qu'il est faux d'affirmer que ces investigations ont été réalisées hors tout cadre légal, le rapport, qui ne vaut qu'à titre de simple renseignement conformément à l'article 430 du code de procédure pénale, ayant été transmis au supérieur hiérarchique aux fins de poursuite de l'enquête avant toute mesure coercitive ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que, d'une part, aucune disposition du code de procédure pénale ne fait obligation aux officiers de police judiciaire de préciser expressément le cadre dans lequel ils agissent dans les procès-verbaux qu'ils établissent, les mentions y figurant permettant au procureur de la République, dont le défaut d'information immédiat des actes ainsi accomplis, est sans effet sur leur validité, de le qualifier, d'autre part, l'article D. 11 du code de procédure pénale, qui ne porte pas atteinte en lui-même aux droits de la défense garantis par l'article préliminaire du même code et l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, et qui, dans sa version applicable à la date des faits, était applicable exclusivement à l'enquête préliminaire, n'est contraire ni aux dispositions de l'article 66 du même code relatif aux actes réalisés dans le cadre d'une enquête de flagrance, lesquelles ne sont pas prescrites à peine de nullité, ni à celles de l'article 34 de la Constitution et ne porte pas atteinte en lui-même aux droits de la défense, de troisième part, le procès-verbal intitulé "rapport d'information", établi par un officier de police judiciaire compétent, qui se borne à consigner les renseignements fournis par une personne qui a spontanément contacté son auteur, qui rend compte des vérifications sommaires effectuées sur la base de ces éléments afin de permettre des investigations ultérieures, est dépourvu de toute force probante et n'est soumis à aucune forme, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens, dont le deuxième, pris en sa cinquième branche, est devenu sans objet à la suite de la décision de la Cour de cassation disant n'y avoir lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité présentée par M. X..., ne peuvent qu'être écartés ;
Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, Préliminaire, 427, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation du principe de loyauté des preuves ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation formée par le mis en examen ;
"aux motifs que les pages 5 et 6 du rapport ont trait aux investigations réalisées le 26 juillet 2017 ; que le brigadier indique avoir répondu à une annonce internet concernant un véhicule vendu par la société Malvezin et avoir ainsi été contacté ensuite par une secrétaire et un commercial ; que le requérant soutient qu'il s'agit là d'une ruse et d'un stratagème contrevenant au principe de loyauté de la preuve ; que porte atteinte au droit à un procès équitable et au principe de loyauté des preuves le stratagème qui en vicie la recherche par un agent de l'autorité publique ; que toutefois il convient de distinguer la provocation à la commission de l'infraction de la provocation à l'obtention d'une preuve de cette infraction ; qu'en effet le principe de la loyauté de la preuve doit en matière pénale être concilié avec celui de sa liberté, et avec les pouvoirs reconnus aux enquêteurs et aux magistrats dans leur mission de recherche et de poursuite des infractions et d'identification de leurs auteurs, objectifs de valeur constitutionnelle ; qu'ainsi la sanction d'un comportement déloyal viciant la recherche de la preuve par un agent de l'autorité publique présuppose une démarche positive de provocation de la part de ce dernier ; qu'en l'espèce, il ne s'agissait pas d'une provocation à la commission d'une infraction, laquelle était déjà réalisée, s'agissant du détournement d'un véhicule acquis initialement en leasing et déjà mis à la vente sur internet avant le terme de ce crédit, soit sans en être propriétaire ;
"1°) alors que porte atteinte au droit à un procès équitable et au principe de loyauté des preuves le stratagème qui en vicie la recherche par un agent de l'autorité publique ; qu'en affirmant que le principe de loyauté de la preuve ne permettait de sanctionner que la « démarche positive de provocation » à la commission d'une infraction par un agent, alors même qu'il prohibe tout procédé déloyal d'enquête mettant en échec le droit à un procès équitable et notamment le droit de ne pas s'auto-incriminer, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée du principe exposé ci-dessus ;
"2°) alors qu'à l'appui de sa requête, le requérant a notamment exposé que le fait pour un agent de l'autorité publique de dissimuler sa qualité en se faisant passer pour un client potentiel était constitutif d'un procédé d'enquête déloyal en ce qu'il s'agissait d'une opération d'infiltration non prévue par le code de procédure pénale ; que faute pour la chambre de l'instruction d'avoir recherché si et dans quelles conditions l'opération réalisée par le brigadier était autorisée par la loi, celle-ci n'a pas donné de base légale à sa décision ;
"3°) alors qu' en tout état de cause, le détournement allégué par la chambre de l'instruction dans ses motifs ne pouvant se réaliser que par la vente effective de la voiture et non la seule volonté de la mettre en vente, c'est en violation de la loi pénale et sans tirer les conséquences légales de ses propres constatations que la chambre de l'instruction a affirmé que le stratagème employé, intervenant en amont de la vente et destinée à la préparer, n'avait provoqué qu'à la preuve de l'infraction et non à sa commission ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation d'acte, prise d'une atteinte au principe de la loyauté de la preuve, l'arrêt, après avoir constaté que le rédacteur du procès-verbal litigieux indique avoir répondu à une annonce internet concernant un véhicule vendu par la société Malvezin auto et avoir été ainsi contacté, notamment, par un commercial, énonce qu'il convient de distinguer la provocation à la commission de l'infraction de la provocation à l'obtention d'une preuve de celle-ci et qu'en l'espèce, il ne s'agissait pas d'une provocation à la commission d'une infraction, laquelle était déjà réalisée, s'agissant du détournement d'un véhicule acquis initialement en leasing et déjà mis en vente sur internet avant le terme de ce crédit, soit sans être propriétaire ; que les juges, après avoir précisé que le brigadier a relaté les faits auxquels il a personnellement participé, s'agissant de son appel téléphonique sur la ligne figurant dans l'annonce, de sa communication avec la secrétaire, puis du fait que celle-ci l'avait recontacté, avant qu'un commercial lui téléphone pour convenir d'un rendez-vous Porte Maillot, qu'il a précisé avoir engagé, avec l'aide de ses collègues, une filature, avoir, à cette occasion, constaté que le commercial faisait l'objet d'un contrôle routier et avoir appris qu'il s'agissait de M. B..., ajoutent qu'il résulte de ces précisions qu'il n'a pas participé au contrôle routier mais a assisté à celui-ci à l'occasion de la filature et que ces énonciations valent à titre de simples renseignements ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que ne porte pas atteinte, notamment, au principe de la loyauté des preuves et au droit à un procès équitable, le fait, pour un officier de police judiciaire, compétent pour ce faire, préalablement informé, de façon spontanée, par un tiers, de la possible commission d'infractions, de contacter, à l'aide d'un numéro de téléphone diffusée par elle sur internet, la société mettant en vente un véhicule susceptible d'avoir été acquis en leasing à l'aide d'un dossier contenant des pièces falsifiées, et de se rendre au rendez-vous fixé par le commercial qui l'a rappelé à cette fin, sans prendre aucun engagement ni faire une quelconque autre demande, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le cinquième moyen pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, L. 233-1 et R. 233-1 du code de la route, 429, D. 11, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation formée par le mis en examen ;
"aux motifs que le brigadier a relaté des faits auxquels il a personnellement participé s'agissant d'une part de son appel téléphonique sur la ligne figurant dans l'annonce, de sa communication à cette occasion avec la secrétaire puis du fait qu'elle l'avait recontacté avant qu'un commercial lui téléphone pour convenir d'un rendez-vous Porte Maillot ; qu'il a précisé avoir engagé avec l'aide de ses collègues une filature et avoir à cette occasion constaté que le commercial faisait l'objet d'un contrôle routier ; qu'il a ajouté "j'apprenais qu'il s'agissait de M. B..." ; qu'il résulte de ces précisions qu'il n'a pas participé au contrôle routier mais a assisté à celui-ci à l'occasion de la filature ; que ces énonciations valent ainsi à titre de simples renseignements ; que ses recherches ultérieures se sont limitées à la consultation des fichiers de police concernant M. B... et le véhicule qu'il conduisait afin de connaître l'identité de ses propriétaires successifs ; qu' en application des articles L. 233-1 et R. 233-1 du code de la route, les forces de l'ordre peuvent procéder au contrôle d'un véhicule sans infraction préalable ; que ce contrôle se distingue ainsi du contrôle d'identité régi par l'article 78-2 du code de procédure pénale ; qu'en l'espèce, en page 16 du rapport litigieux, il n'est décrit qu'un contrôle routier, lequel n'imposait pas la rédaction d'un procès-verbal en ce qu'un tel contrôle peut être réalisé sans formalité particulière, ce d'autant plus que M. B... était porteur de son permis de conduire ;
"1°) alors que l'article D. 11 du code de procédure pénale prévoit en son deuxième alinéa que si plusieurs officiers de police judiciaire concourent à une enquête, le nom de celui qui a personnellement accompli chacune des opérations doit être précisé ; qu'il en résulte que, peu important le cadre procédural du contrôle routier ayant permis de connaître l'identité du suspect, le nom de l'officier ayant procédé à ce contrôle devait apparaître dans le rapport d'information ; qu'en concluant à la régularité du rapport ainsi établi sans que le nom de l'un des officiers de police ayant participé aux opérations ne soit précisé, la chambre de l'instruction a méconnu le principe exposé ci-dessus ;
"2°) alors que les contrôles routiers, comme toute autre forme de contrôles constitutifs d'une intrusion dans la vie des personnes qui en font l'objet, sont soumis à un principe de légalité et ne peuvent être réalisés dans les conditions prévues par la loi ; que la chambre de l'instruction, qui retient à tort que le contrôle routier aurait pu être effectué sans aucun motif et sans aucune formalité particulière, a méconnu le principe exposé ci dessus ;
"3°) alors que faute pour la chambre de l'instruction d'avoir recherché les conditions dans lesquelles le contrôle routier, qui aurait été fortuitement réalisé sur la voiture qui faisait l'objet d'une filature, a été réalisé, et faute pour le rapport d'information de préciser les conditions dans lesquelles il a été pris attache avec l'officier ou l'agent de police auteur du contrôle afin d'obtenir l'identité de l'individu conduisant la voiture, la chambre de l'instruction ne permet pas de s'assurer, comme le demandait le requérant, que ce contrôle routier a été réalisé sans détournement de procédure et sans irrégularité ; que l'arrêt attaqué est ce faisant insuffisamment motivé ;
Attendu que le moyen pris de l'irrégularité du contrôle routier, dont ni l'organisation ni la restranscription ne sont soumises à aucun formalisme particulier, pratiqué à l'égard d'un tiers susceptible d'être impliqué dans les infractions des chefs desquelles le demandeur a été mis en examen, est inopérant dès lors que cette éventuelle irrégularité ne peut être invoquée que par la personne qu'elle concerne ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 17-83.793 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Joël X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de CAEN, chambre correctionnelle, en date du 15 mai 2017, qui, pour atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics et abus de confiance, l'a condamné à deux ans d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, à une interdiction professionnelle définitive, a ordonné la confiscation des scellés et a prononcé sur les intérêts civils ;








La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Y..., conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Y..., les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, de la société civile professionnelle CÉLICE, SOLTNER, TEXIDOR et PÉRIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que le procureur de la République, saisi par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, des conditions dans lesquelles avait été réalisée, au regard des règles des marchés publics, la rénovation de plusieurs logements de fonction du centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen, a ouvert une information des chefs d'atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics et de détournement de fonds publics ; que les investigations conduites dans ce cadre ont révélé que, nommé le 1er février 2007 en qualité de directeur général du CHU, M. X... a, dès avant sa prise de fonction, contacté le cabinet d'architecte de M. Philippe A... afin de lui demander de travailler sur le projet de rénovation de son futur logement de fonction à partir des plans qu'il lui a lui-même fournis ; que ce cabinet a réalisé plusieurs prestations, avant de signer, le 24 avril 2007, sans qu'ait été mise en oeuvre une quelconque procédure de publicité et de mise en concurrence avec le CHU, un premier marché de maîtrise d'oeuvre d'un montant de 31 262 euros portant sur des travaux intérieurs et extérieurs du pavillon de fonction occupé par M. X..., suivi de trois avenants, dont les deux derniers ont été visés par celui-ci, portant la rémunération du maître d'oeuvre à la somme de 63 763,21 euros HT, l'estimation prévisionnelle des travaux passant de 284 200 euros HT à 625 120 euros HT ; qu'un second marché de maîtrise d'oeuvre d'un montant de 6 686 euros HT a également été conclu, l'estimation des travaux étant de 66 860 euros ; que par ailleurs, en vue de la rénovation du logement de fonction du directeur-adjoint du CHU, M. Z... B..., M. A... a conclu, dans les mêmes conditions, un marché de maîtrise d'oeuvre le 4 juin 2008, qui a été contresigné par M. X..., le montant total des travaux ayant été évalué à la somme de 317 112,42 euros HT ;
Que le demandeur, pour financer les travaux, a eu recours au marché à bons de commande passé aux fins d'entretien des locaux de l'établissement hospitalier par le CHU avec différentes entreprises, ce qui a généré, outre un fractionnement du montant global des rénovations, des surfacturations et des surcoûts liés à l'inadaptation des prestations et matériaux prévus dans le marché mais également au comportement des époux X... qui, choisissant des matériaux de prix, ont, à plusieurs reprises, fait détruire et recommencer certains travaux ;
Attendu qu'à l'issue de l'information, M. X... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir à Caen, entre 2007 et 2009, en sa qualité de directeur général du CHU de CAEN, exerçant les fonctions de représentant ou agent d'établissement public ou agissant pour leur compte, procuré ou tenté de procurer à autrui un avantage injustifié au cabinet d'architecture A... et à diverses entreprises par un ou des actes contraires aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public, et ce particulièrement en ne respectant pas les principes généraux de la commande publique résultant notamment de l'article 1er du code des marchés publics, concernant des études et travaux d'architecte et d'entreprises effectués pour le logement de fonction du directeur-adjoint du CHU, M. Z... B..., ainsi que pour son propre logement de fonction, et pour avoir, dans les mêmes circonstances de temps et de lieu, détourné au préjudice d'autrui des fonds qui lui avaient été remis et qu'il avait acceptés à charge d'en faire un usage déterminé, à savoir en procédant à des travaux abusifs, excessifs et disproportionnés dans son logement de fonction de directeur général du CHU, dont le coût final n'aurait pas dû dépasser le plafond du seuil fixé par le code des marchés publics, à savoir 210 000 euros HT au-delà duquel une publicité et un appel d'offre sont d'ailleurs prévus et qui en tout cas n'auraient pas dû dépasser la somme de 284 200 euros HT qui était le chiffre figurant dans l'acte d'engagement officiel du cabinet d'architecture A..., le surplus de dépense au delà de 284 200 euros, soit la somme de 355 733 euros, ayant été ainsi détourné puisque le montant total des travaux a été de l'ordre de 639 913 euros et ce au préjudice du CHU de Caen ;
Que, par jugement en date du 24 mai 2016, le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable de l'ensemble de ces faits et l'a condamné à trente-six mois d'emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis avec mise à l'épreuve, à une interdiction professionnelle définitive, à cinq ans de privation de ses droits civils, civiques et de famille, a ordonné la confiscation des scellés et a prononcé sur les intérêts civils ; que le prévenu et le ministère public ont interjeté appel de cette décision ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles R. 121-1 du code de l'organisation judiciaire, 510 et 592 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a été rendu notamment par Mme Lepeltier-Durel , "désignée par ordonnance de M. le premier président de la cour d'appel de Caen, en date du 15 décembre 2017";
"alors que la composition des chambres de cour est fixée par ordonnance du premier président de chaque cour ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la cour d'appel était notamment composée de deux conseillers, dont l'un d'eux aurait été désigné par une ordonnance postérieure à l'arrêt rendu ; qu'en cet état, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer de la régularité de la composition de la cour d'appel" ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de l'erreur matérielle manifeste affectant la mention de l'arrêt selon laquelle un conseiller, siégeant à l'audience, a été désigné par ordonnance de M. Le premier président de la cour d'appel de Caen, en date du 15 décembre 2017, soit à une date postérieure à l'audience ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et 4 du protocole additionnel n° 7 à ladite convention, 121-6, 121-7, 432-14 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable du délit d'octroi d'avantage injustifié et l'a condamné pénalement et civilement ;
"aux motifs que sur l'avantage injustifié procuré au cabinet A... pour la maîtrise d'oeuvre du logement de fonction situé au [...] , estimant comme il a pu lui-même l'indiquer devant le magistrat instructeur, que « ça fait partie du statut du directeur d'avoir un logement confortable », M. X... lance un programme de travaux importants pour rénover son logement de fonction et permettre dira-t-il, à son épouse et leur trois enfants de venir s'y installer à ses côtés à compter du mois de septembre 2007 ; que pour ce faire, le cabinet M. Philippe A..., architecte d'intérieur, signe avec la direction du patrimoine et des infrastructures (DPI) du CHU de Caen, le 24 avril 2007, un premier marché de maîtrise d'oeuvre (un acte d'engagement) d'un montant de 31 262 euros hors taxe (HT) portant sur des travaux d'aménagement intérieurs et extérieurs du pavillon de fonction du directeur général situé au [...] , suivi de deux avenants portant la rémunération du maître d'oeuvre à 68 763, 21 euros HT, l'estimation prévisionnelle des travaux passant de 284200 euros HT à 625 120 euros HT ; qu'un second contrat de maîtrise d'oeuvre d'un montant de 6 686 euros HT est signé le 29 juillet 2008, l'estimation des travaux étant de 66 860 euros HT ; qu'il est établi par l'enquête et l'information judiciaire qu'avant même sa prise de fonction à Caen, M. X... alors directeur de l'hôpital du Havre, a été mis en relation avec M. A... par M. C..., architecte avec qui l'hôpital du Havre avait pu travailler, que dès le début de l'année 2007 M. A... a commencé à travailler sur le projet de rénovation du futur logement de fonction du [...] à partir des plans que lui a fournis M. X..., que M. A... a soumis des projets d'esquisse aux époux X... aux fins de répondre à leur demande de rénovation et de réaménagement du pavillon de fonction et qu'il a dressé le 7 février 2007, un « diagnostic avant études » ; enfin, M. A... a adressé le 20 février 2007 un courrier à Mme Catherine D... (directrice de la DPI) en indiquant : « pour faire suite à la demande de M. X... de réaliser la maîtrise d'oeuvre des travaux de réfection et extension de la maison qu'il doit occuper prochainement, vous trouverez ci-joint le contrat de mission y faisant référence ; je vous remercie de me retourner un exemplaire de ce contrat dûment signé » ; que pour rappel, l'acte d'engagement sera signé le 24 avril 2007, Cette chronologie ayant présidé au choix du cabinet A... corrobore pleinement les déclarations de M. A... qui estime avoir été « missionné » par M. X... et qui a travaillé sur le projet de rénovation du logement fonction de ce dernier avant même la signature d'un quelconque contrat avec le CHU de Caen, Au regard du code des marchés publics alors en vigueur et de son article 40, vu le coût premier de la maîtrise d'oeuvre (31 262 euros HT), une procédure de publicité avec mise en concurrence adaptée aurait dû être déclenchée pour choisir le maître d'oeuvre, Or, par son action, M. X... a contourné cette règle de la commande publique, d'une part, en choisissant personnellement son cabinet d'architecte comme peut le faire tout particulier pour ses propres travaux, d'autre part, en contraignant la DPI du CHU de Caen à conclure avec le cabinet A... l'acte d'engagement suivi du second contrat de maîtrise d'oeuvre ; que M. X... ne saurait sérieusement soutenir que lesdits travaux présentaient une urgence impérieuse au sens de l'article 35 II du code des marchés publics pas plus que les circonstances au sens de l'article 28 dudit code ne l'autorisaient à éviter toute publicité avec mise en concurrence : en tout état de cause, cette preuve n'est nullement rapportée ; que par conséquent, la violation des dispositions du code des marchés publics est caractérisée et n'est que la résultante de l'intention de M. X... d'agir à son unique guise, pour avoir la main sur le choix du maître d'oeuvre, Sur l'avantage injustifié procuré au cabinet A... pour la maîtrise d'oeuvre du logement de fonction situé au [...] Concernant les travaux de rénovation entrepris dans le logement de fonction de M. Z... B..., le contrat de mission d'architecte d'intérieur est signé par M. A... le 4 juin 2008 et co-signé par le directeur général, M. X..., à une date illisible ; que le montant total de la rémunération du maître d'oeuvre est chiffré à la somme de 26 949 euros HT, sans avenant au contrat, et le montant total des travaux à la somme de 317 112,42 euros, M. A... indique là encore avoir été « missionné » par M. X... dont l'épouse est venue visiter le logement de fonction attribué à M. Z... B... avant que ce dernier ne prenne ses fonctions, en disant notamment qu'il fallait aménager le sous-sol en chambre ; qu'il ressort de façon claire et précise que le cabinet A... s'est vu confier ce marché sans aucune publicité ni mise en concurrence, alors que le montant de sa rémunération aurait dû déclencher une telle procédure et que M. X... a, une fois de plus, personnellement choisi ledit cabinet d'architecte sans laisser la possibilité à la DPI du CHU de Caen de venir le contester, Mme Catherine D... disant qu'il ne lui laissait pas le choix et qu'elle craignait son autoritarisme ; que dès lors, la violation des dispositions du code des marchés publics est constituée après avoir rappelé qu'en sa seule qualité d'ordonnateur général, M. X... est présumé connaître pleinement les dispositions légales relatives aux marchés publics ;
"et aux motifs que, si par décision, en date du 6 octobre 2014, la cour de discipline budgétaire et financière, juridiction administrative chargée de réprimer les infractions en matière de finances publiques, a déclaré M. X... en sa qualité d'ordonnateur principal responsable notamment de la passation des marchés de maîtrise d'oeuvre et de leurs avenants en violation des règles des marchés publics ladite violation étant constitutive de l'infraction prévue et réprimée par l'article L. 313·4 du code des juridictions financières, il convient de relever que contrairement à ce qui est allégué, cette juridiction ne s' est pas prononcée sur la question de la régularité de l'usage des marchés à bon de commande, iI ressort en effet de la lecture attentive de la décision de renvoi, en date du 2 juin 2014, que le procureur général près la cour des comptes, ministère public près la cour de discipline budgétaire et financière, a décidé de ne pas renvoyer M. X... dudit chef en considérant qu'aucune irrégularité « ne nous semble » pouvoir être constatée quant à la conclusion des marchés à bons de commande ni aux travaux hors marchés des années 2007-2008, ainsi, ce n'est qu'au terme d'une appréciation que le procureur général a décidé de ne pas renvoyer M. X... de ce chef devant la cour de discipline budgétaire et financière laquelle ; que faute d'en être saisie, n'a donc nullement pu se prononcer sur la régularité de l'usage des marchés à bons de commande ; qu'en tout état de cause, il sera rappelé qu'en vertu du principe général à valeur constitutionnelle de la séparation des ordres juridictionnels, une juridiction judiciaire répressive n'est nullement liée par la décision d'une juridiction administrative ;
"1°) alors que nul ne peut être poursuivi et condamné deux fois pour les mêmes faits ; que la cour d'appel a constaté que la cour de discipline budgétaire et financière avait, par un arrêt du 6 octobre 2014, condamné M. X..., en qualité d'ordonnateur principal, au paiement d'une amende notamment pour octroi d'avantage injustifié dans l'attribution de marchés de maîtrise d'oeuvre ; que, dès lors qu'il ressort de cette décision que M. X... a été condamné notamment pour octroi d'avantage injustifié, faute visée par l'article L. 313-6 du code des juridictions administratives, en ne constatant pas que, dès lors qu'elle ne niait pas le caractère définitif de cette condamnation, les mêmes faits ne pouvaient pas être poursuivis et sanctionnés une seconde fois, au titre du délit d'octroi d'avantage injustifié incriminé par l'article 432-14 du code pénal, la cour d'appel a méconnu l'article 4 du protocole additionnel n° 7 à la Convention européenne des droits de l'homme;
"2°) alors que le délit de l'article 432-14 du code pénal consiste dans le fait de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ; que dès lors qu'elle constatait que le contrat initial et les avenants portant sur les prestation de maîtrise d'oeuvre confiées à M. A... avaient été signés par la directrice et le directeur adjoint de la Direction du patrimoine et des infrastructures, en faisant notamment état de la transmission directe du contrat par M. A... à la directrice de ladite direction pour signature, en ne précisant quels pouvoirs propres dans la passation des marchés publics aurait utilisés le prévenu qui l'aurait conduit à accomplir un acte méconnaissant la réglementation destinée à assurer la liberté d'accès aux marchés publics permettant de lui imputer le délit de favoritisme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"3°) alors que, seuls d'éventuels faits de complicité peuvent être reprochés à la personne qui n'est pas chargée de passer les marchés publics ou d'y participer ; qu'en retenant la culpabilité du prévenu du fait des pressions sur la direction du patrimoine et des infrastructures en vue de passer les marchés de maîtrise d'oeuvre avec M. A..., la cour d'appel qui relevait ainsi que le prévenu n'était pas l'auteur des actes constitutifs d'une méconnaissance des règles sur les marchés publics et qui ne pouvait envisager sa culpabilité éventuelle qu'en caractérisant un acte de complicité après avoir appelé ses observations sur cette requalification, n'a pas justifié sa décision" ;
Sur le troisième moyen de cassation, violation des articles des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 4 du protocole n°7 à ladite convention, 121-6, 121-7, 432-14 du code pénal, 26, 27, 35 et 77 du code des marchés publics de 2006, 459, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Joël X... coupable du délit d'octroi d'avantage injustifié et l'a condamné pénalement et civilement ;
"aux motifs que sur l'avantage injustifié procuré aux entreprises pour la réalisation des travaux dans les logements de fonction situés au [...] , les travaux litigieux ont été réalisés par les entreprises titulaires des marchés annuels d'entretien avec le CHU de Caen lesquelles ont été consultées par le cabinet A... qui lorsque la prestation n'entrait pas dans le marché d'entretien, a lui-même fait le choix de l'entreprise et fait passer le devis ; que prévus à l'article 77 du code des marchés publics eu vigueur sur la période litigieuse, les marchés à bon de commande sont des marches à exécution successive conclus avec un ou plusieurs opérateurs économiques pouvant être conclus sans montant maximum ni minimum, avec une seule procédure complète de mise en concurrence préalable sans publicité ; que la pratique de ces marchés correspond à une procédure de marché fractionné avec pour dérive possible le fractionnement artificiel d'une prestation pour s'affranchir des contraintes du code des marchés publics ; que Maître E..., avocat de M. X..., soutient que la cour de discipline budgétaire et financière aurait clairement rappelé qu'aucune irrégularité ne pouvait être reprochée au prévenu s'agissant des marchés avec les entreprises non plus que quant aux travaux hors marchés confiés à celles-ci, dès lors qu'elles étaient titulaires des marchés à bon de commande, lesquels prévoyaient expressément la possibilité de recourir à l'entreprise titulaire sans publicité ni mise en concurrence pour des prestations similaires et qu'ainsi, les marchés de travaux passés avec les entreprises pour réaliser la réfection des logements de fonction seraient exempts de toute critique selon ladite cour, si par décision en date du 6 octobre 2014, la cour de discipline budgétaire et financière, juridiction administrative chargée de réprimer les infractions en matière de finances publiques, a déclaré M. X... en sa qualité d'ordonnateur principal responsable notamment de la passation des marches de maîtrise d'oeuvre et de leurs avenants en violation des règles des marchés publics ladite violation étant constitutive de l'infraction prévue et réprimée par l'article L. 313-4 du code des juridictions financières, il convient de relever que contrairement à ce qui est allégué, cette juridiction ne s'est pas prononcée sur la question de la régularité de l'usage des marchés à bon de commande, iI ressort en effet de la lecture attentive de la décision de renvoi, en date du 2 juin 2014, que le procureur général près la cour des comptes, ministère public près la cour de discipline budgétaire et financière, a décidé de ne pas renvoyer M. X... dudit chef en considérant qu'aucune irrégularité « ne nous semble » pouvoir être constatée quant à la conclusion des marchés à bons de commande ni aux travaux hors marchés des années 2007-2008 ainsi, ce n'est qu'au terme d'une appréciation que le procureur général a décidé de ne pas renvoyer M. X... de ce chef devant la cour de discipline budgétaire et financière laquelle; faute d'en être saisie, n'a donc nullement pu se prononcer sur la régularité de l'usage des marchés à bons de commande ; qu'en tout état de cause, il sera rappelé qu'en vertu du principe général à valeur constitutionnelle de la séparation des ordres juridictionnels, une juridiction judiciaire répressive n'est nullement liée par la décision d'une juridiction administrative, dès lors, en application des dispositions de l'article 432-14 du code pénal, il convient d'examiner si M. X... a procuré un avantage injustifié aux entreprises ayant réalisé les travaux dans son logement de fonction et dans celui attribué à M. B..., il ressort des investigations que M. A... s'est conformé à la volonté de M. X... de faire appel aux entreprises titulaires des marchés d'entretien avec le CHU de Caen pour réaliser au plus vite les travaux, volonté clairement exprimée par le prévenu dans une note écrite sur une carte de visite à l'attention de M. D... (directrice de la DPI du CHU) dans les tenues suivants: « Catherine, OK pour moi, merci de m'en parler. Il semble par ailleurs que certaines entreprises travaillant au CHU et sur les logements atteignent le plafond de leur marché. Voir cela pour ne pas freiner les travaux. Je suis déjà à la bourre » ; que les entrepreneurs entendus ont déclaré unanimement avoir été mis en difficulté ; que les prestations demandées les obligeant à recourir à des prix hors marchés d'entretien ou à appliquer aux logements de fonction les normes applicables au bâtiment principal du CHU de Caen, de plus, ces mêmes entrepreneurs sont nombreux à indiquer que le recours aux bons de commande n'a fait qu'engendrer de facto un surcoût, d'autant que les souhaits et désirs des époux X... étaient très changeants tant dans les directives que le choix des matériaux souvent très onéreux ; qu'ils ont en outre souligné la présence quasi constante de l'épouse de M. X... aux réunions de chantier, certains entrepreneurs entendus se sont même dits être étonnés d'apprendre que les travaux étaient entrepris pour le compte du CHU de Caen, ainsi, le gérant de l'entreprise HUE titulaire d'un contrat d'entretien, dira avoir traité le chantier comme « un chantier privé normal » et avoir pensé que « c'était le directeur qui payait lui-même les travaux » ; que la SARL Leluan, titulaire du marché d'entretien en menuiserie, indiquera spontanément qu'au vu de l'importance des travaux, il aurait fallu faire des appels d'offre ; qu'il apparaît une fois de plus, sans contestation sérieuse possible, que M. X... a contourné les règles de la commande publique en vidant de leur objet les marchés à bon de commande et a ainsi fractionné artificiellement des prestations qui auraient dû constituer une opération globale déclenchant un marché formalisé ; que par cet usage abusif des marchés à bon de commande, M. X... a trouvé le moyen d'échapper aux filtres de contrôle, n'a cessé de se présenter tant auprès des entreprises que de l'architecte comme l'unique donneur d'ordre, et a sciemment écarté la DPI du CHU de Caen du contrôle de ce chantier qu'il a géré comme un chantier privé mais financé par les deniers publics ; qu'ainsi, les règles de mise en concurrence et de publicité ont-elles été violées dans le choix des entreprises ayant réalisé les travaux tant dans le logement de fonction situé au [...] , le directeur général du CHU de Caen est chargé d'une mission de service public et dispose de pouvoirs dans la passation des marchés ; qu'il est ordonnateur principal de la dépense et mène la politique financière de l'établissement sous le contrôle des autorités de tutelle ; que le lancement d'une procédure d'un marché formalisé déclenche une réunion de la commission d'appel d'offre, un contrôle de la régularité des procédures par le contrôle de la légalité, une information du conseil d'administration, voire une alerte donnée à l'agence régionale hospitalière ; que les règles des marchés publics poursuivent les objectifs de transparence de la commande publique, de mise en concurrence des candidats et d'égalité de traitement des candidats ; qu'instauré par la loi du 3 janvier 1991 relative à la transparence et à la régularité des procédures de marché, le délit de favoritisme protège l'impératif de probité notamment des agents publics, tout en assurant le respect des règles de concurrence nécessaires au bon fonctionnement des marchés ; qu'ainsi, le délit de favoritisme sanctionne la violation par un agent public des règles législatives et réglementaires qui garantissent la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics, principes à valeur constitutionnelle ; que les travaux de rénovation/aménagement des logements de fonction des [...] ne pouvaient que constituer une opération globale laquelle devait déclencher une procédure de marché formalisé ; que M. X... en avait pleinement conscience puisqu'il avait lui-même, estimé la première tranche des travaux sur son logement de fonction à environ 460 000 euros et que son expérience professionnelle en qualité de directeur d'hôpital était telle qu'il se devait de connaître les règles de la commande publique ; que si les marchés à bon de commande permettent beaucoup de souplesse et constituent une dérogation aux règles fixées par le code des marchés publics, le législateur n'a, néanmoins, nullement entendu qu'un usage irrégulier vienne vider de leur sens les principes à valeur constitutionnelle de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ; que malgré ses dénégations, M. X... n'a été mu que par son intérêt particulier; il a choisi son maître d'oeuvre avant même sa prise de fonction et a délibérément bloqué le déclenchement des filtres d'alerte et de contrôle :- en contournant les règles des marchés publics par un usage irrégulier des marchés à bon de commande lesquels ont été détournés de leur nature, *en écartant la DPI du CHU de Caen du contrôle des chantiers tel que cela ressort des déclarations précises et concordantes de l'architecte, des entreprises, de la directrice de la DPI, du responsable de la cellule des marchés dépendant de la direction des affaires juridiques du CHU, du responsable de la cellule marchés du service économique et de l'équipement du CHU,- en visant un nombre considérable de devis, de factures, d'estimations prévisionnelles de travaux, d'ordre de service, en agissant comme le donneur d'ordre exclusif, à l'instar d'un donneur privé, du cabinet A... et des entreprises, en suivant personnellement les opérations,- et en confiant le contrôle du chantier à sa propre épouse présente à la plupart des trente-trois réunions de chantiers ; que dans de telles circonstances, il ne peut être sérieusement soutenu qu'il a été fait un usage régulier des marchés à bon de commande puisqu'au contraire il résulte de tout ce qui précède que l'ampleur de l'opération globale des travaux, laquelle ne pouvait que déclencher un marché formalisé, a fait l'objet par M. X... d'un fractionnement artificiel et répété pour lui permettre de s'affranchir intentionnellement des règles des marchés publics et ainsi esquiver les filtres constitués par les instances de contrôle interne au CHU de Caen qui n'auraient pu qu'être défavorables, en période d'importante restriction budgétaire, au financement et à la réalisation de tels de travaux d'autant moins impérieux que son logement de fonction était nécessairement entretenu puisqu'occupé jusqu'à son arrivée, par son prédécesseur et sa famille composée à l'instar de la sienne, de trois enfants et pour qui les combles étaient déjà aménagés pour y réaliser trois chambres ; que la même intention frauduleuse a présidé pour les travaux réalisés dans le logement de fonction de M. B... dont le chantier avec un coût de 317 112, 42 euros relevait nécessairement d'une procédure formalisée ; que par conséquent, le délit de favoritisme est caractérisé en tous ses éléments constitutifs et le jugement entrepris sera confirmé sur la déclaration de culpabilité de ce chef ;
"1°) alors que le délit de l'article 432-14 du code pénal consiste dans le fait de procurer ou de tenter de procurer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté d'accès et l'égalité des candidats dans les marchés publics et les délégations de service public ; que dès lors qu'elle constatait que le prévenu invitait la directrice de la direction du patrimoine et des infrastructures à s'assurer que les seuils des marchés à bons de commande du CHU n'étaient pas dépassés pour faire réaliser les travaux de rénovation des logements de fonction, en ne précisant quels pouvoirs propres dans la passation des marchés publics aurait utilisé le prévenu qui l'aurait conduit à accomplir un acte méconnaissant la réglementation destinée à assurer la liberté d'accès aux marchés publics permettant de lui imputer le délit de favoritisme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"2°) alors que seuls d'éventuels faits de complicité peuvent être reprochés à la personne qui n'était pas chargée de passer les marchés publics ou d'y participer ; qu'en retenant la culpabilité du prévenu du fait des pressions sur la DPI en vue de faire réaliser les travaux de rénovation des logements de fonction comme relevant des marchés à bons de commande passé par le CHU, sans plus s'en expliquer, la cour d'appel qui ne pouvait envisager sa culpabilité qu'au titre de la complicité, après avoir expliqué en quoi le comportement du prévenu impliquait un abus de pouvoir ou d'autorité, et l'avoir invité à s'expliquer sur cette éventuelle requalification, n'a pas légalement justifié sa décision ;
"3°) alors qu'enfin et à tout le moins, le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; qu'en vertu de l'article 77 du code des marchés publics, issue du décret 2006-975 du 1er août 2006, un marché à bons de commande est un marché conclu avec un ou plusieurs opérateurs économiques et exécuté au fur et à mesure de l'émission de bons de commande ; qu'un tel marché est passé au regard des besoins définis par le pouvoir adjudicateur, sans considération de la possibilité ou non de définir l'étendue de la ou des prestations faisant l'objet dudit marché, le décret précité ayant supprimé, dans l'article 77, toute référence aux prestations pour lesquelles l'étendue des besoins n'est pas déterminable à l'avance ; que selon l'article 27 VI, ces marchés sont passés selon les procédures formalisées, notamment selon la procédure d'appels d'offres, lorsqu'elle atteignent les montants qu'il vise, ou lorsque le marché ne permet pas de déterminer le montant maximum des prestations qui en sont l'objet ; qu'il en résulte que de tels marchés ne peuvent conduire à un fractionnement artificiel des commandes, sauf si les règles de passation qui leur sont propres n'ont pas été respectées ; que, dans ses conclusions, M. X... soutenait que les marchés à bons de commande avaient été passés par le CHU en vue de la réalisation de travaux concernant l'ensemble de son patrimoine, précisant, en outre, qu'ils s'appliquaient aux prestations décrites et à toutes celles qui leur seraient similaires, ce conformément aux articles 35 et 77 du code des marchés publics alors applicables, et que dès lors, les travaux de rénovation des logements entraient dans le cadre de ces marchés, au moins en tant qu'il s'agissait de prestations similaires à celles visées dans les marchés passés et prévues par eux ; qu'en considérant que les marchés à bons de commande ne pouvaient être utilisés pour des prestations de rénovation de logements, lesquels auraient dû donner lieu au regard du montant des travaux en cause, à un appel d'offres, sans expliquer en quoi ces logements qui faisaient partie du patrimoine du CHU, n'entraient pas dans le cadre des marchés à bons de commande passés, au motif inopérant que la rénovation des logements de fonction était une prestation dont l'étendue pouvait être déterminée à l'avance devant faire l'objet d'une procédure distincte d'appel d'offres, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche ;
Attendu que l'interdiction d'une double condamnation en raison de mêmes faits, prévue par l'article 4 du Protocole n° 7, additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, ne trouve à s'appliquer, selon la réserve émise par la France et qui n'est pas remise en cause par la Cour européenne des droits de l'homme, que pour les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale et n'interdit pas le prononcé de sanctions disciplinaires parallèlement aux peines infligées par le juge répressif ;
D'où il suit que le grief ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux dernières branches ;
Sur le troisième moyen ;
Attendu que, pour déclarer M. X... coupable du délit d'atteinte à la liberté et à l'accès des candidats dans les marchés publics, l'arrêt, après avoir rappelé les conditions dans lesquelles le prévenu a eu recours aux services du cabinet A..., en dehors de toute procédure de publicité et de mise en concurrence, et au marché à bons de commande conclu par le CHU pour les besoins de l'établissement, pour financer les travaux de rénovation des deux appartements de fonction, énonce que le demandeur a personnellement choisi le cabinet d'architecte sans laisser la possibilité à la direction du patrimoine et des infrastructures (DPI) du CHU, de venir le contester et a, par son action, contourné les règles relatives à la procédure de publicité avec mise en concurrence qui s'imposaient au regard du montant des marchés de maîtrise d'oeuvre en application de l'article 40 du code des marchés publics en vigueur à l'époque des faits et qu'en sa seule qualité d'ordonnateur général, il est présumé connaître les dispositions légales relatives aux marchés publics ;
Que les juges ajoutent que le recours au marché à bons de commande a permis au prévenu de contourner les règles de la commande publique en fractionnant artificiellement des prestations qui auraient dû constituer une opération globale déclenchant un marché formalisé, qu'il n'a cessé de se présenter, tant auprès des entreprises que de l'architecte, comme l'unique donneur d'ordre, et a sciemment écarté la DPI du CHU du contrôle de ce chantier qu'il a géré comme un chantier privé financé par des deniers publics ;
Que la cour d'appel relève que le prévenu n'a été mû que par son intérêt particulier et a délibérément bloqué le déclenchement des filtres d'alerte et de contrôle en contournant les règles des marchés publics par un usage irrégulier des marchés à bons de commande qui ont été détournés de leur nature, en écartant la DPI du contrôle des chantiers, en agissant comme le donneur d'ordre privé à l'égard des prestataires et en confiant le contrôle du chantier à sa propre épouse, présente à la plupart des trente-trois réunions de chantiers et que, dans ces conditions, il ne peut être sérieusement soutenu qu'il a été fait un usage régulier des marchés à bons de commande, le fractionnement artificiel et répété des prestations lui ayant permis, tant pour son logement de fonction que pour celui de M. B..., de s'affranchir des règles des marchés publics et esquiver les instances de contrôle interne de l'établissement hospitalier qui n'auraient pu qu'être défavorables, en période d'importantes restrictions budgétaires, au financement et à la réalisation de tels travaux d'autant moins impérieux que son logement de fonction était nécessairement entretenu ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, relevant de son appréciation souveraine des faits et des circonstances de la cause ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, dont il résulte que le prévenu a mis en place le système lui ayant permis de contourner les règles des marchés publics, peu important qu'il ne soit pas le signataire des marchés publics dès lors qu'entre dans la catégorie des personnes visées à l'article 432-14 du code pénal, le directeur général d'un CHU, ordonnateur principal des recettes et des dépenses de ce dernier, qui a le pouvoir d'intervenir dans le déroulement d'une procédure d'attribution de marchés, en vue de préparer ou de proposer les décisions prises par d'autres, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires de conclusions régulièrement déposées devant elle, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens, dont le deuxième pris en sa troisième branche et le troisième, pris en sa deuxième branche, sont inopérants en ce qu'ils invoquent des faits de complicité non retenus par l'arrêt, ne peuvent qu'être écartés ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-4 et 314-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'abus de confiance et l'a condamné pénalement et civilement ;
"aux motifs qu'en vertu des dispositions de l'article 314-1 du code pénal, l'abus de confiance est le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé ; qu'il est de jurisprudence constante que, d'une part, l'abus de confiance ne suppose pas nécessairement que l'objet détourné ait été remis au prévenu en vertu d'un contrat conclu directement avec son propriétaire, d'autre part, est constitutif d'un abus de confiance le fait pour un ordonnateur d'engager et liquider des dépenses à des fins étrangères à celles prévues par les lois et règlement, peu important qu'il n'ait pas eu la détention matérielle de ces fonds publics ; que comme il l'a déjà été très largement développé ci-dessus, lors de l'examen du délit de favoritisme, M. X..., ordonnateur général des dépenses du CHU de Caen, a totalement perdu de vue l'intérêt général pour ne se soucier que de son seul intérêt particulier en faisant réaliser dans son logement de fonction des travaux d'aménagement intérieurs et extérieurs de pure convenance et payés avec les deniers publics, au préjudice du CHU de Caen qu'il a délibérément écarté de la conduite desdits travaux ; qu'ainsi, l'usage abusif est-il caractérisé par le comportement même de M. X... qui a disposé des fonds publics du CHU de Caen comme s'il s'agissait de ses deniers propres, élément matériel constitutif du détournement générateur d'un préjudice non sérieusement contestable pour le CHU de Caen qui n'avait nullement l'intention de lancer une telle opération de rénovation/embellissement du logement de fonction de son directeur général, travaux qui ne sont nullement pris en charge en application du décret de 1943 relatif à la mise à disposition d'un logement nu aux directeurs hospitaliers ; qu'il convient de rappeler que le premier contrat de maîtrise d'oeuvre, en date du 24 février 2007, et signé entre le cabinet A... et la DPI du CHU de Caen portait le montant total des travaux à la somme de 284 200 euros HT, que deux avenants audit contrat ont porté ce montant total à la somme de 625 120 euros HT, ces deux avenants pour des montants importants ont totalement bouleversé l'économie du marché et les deux situations dressées par le cabinet A... datées du 21 janvier 2008 ont toutes deux été visées par M. X... qui a également visé les états récapitulatifs des travaux complémentaires ;que le montant du détournement ainsi opéré se basera sur l'état général du logement de fonction à la date de l'entrée en fonction de M. X..., ce pavillon de fonction était jusque-là occupé par l'ancien directeur général qui avait fait réaliser en son temps quelques travaux dont l'aménagement des combles, des travaux de peinture et de ravalement ; que M. André F... chargé de l'intendance des logements de fonction et se présentant comme « l'homme de confiance » du directeur général a déclaré qu'à l'arrivée de M. X... « le logement était correct avec une usure normale », il n'est pas contesté, pas même par le CHU de Caen, qu'à côté des travaux de pure convenance personnelle, des travaux devaient nécessairement être réalisés dans ce logement de fonction tel qu'il ressort d'ailleurs du diagnostic avant études réalisé par le cabinet A..., pour notamment procéder à une remise aux normes électriques, à une isolation thermique, à l'installation VMC dans les toilettes et sous les combles, à des travaux sur le système de chauffage collectif, et au remplacement de l'ensemble des radiateurs et des robinets de réglage, c'est dans ces conditions que les premiers juges ont pu à juste titre considérer que le coût des travaux qui devaient être réalisés et rester à la charge du CHU de Caen car relevant de travaux d'entretien, a été fixé à la somme de 284 200 euros HT correspondant au montant des travaux figurant dans l'acte d'engagement officiel du cabinet A..., au-delà de ce montant et jusqu'à celui de 639 933 euros HT tel que visé au rapport d'expertise judiciaire au titre du total des travaux, il doit être considéré que les sommes ont été abusivement dépensées et détournées, soit à hauteur de 355 733 euros, montant correspondant au financement de travaux de pure convenance et qui ne saurait, comme le prétend le conseil du prévenu, faire l'objet d'une compensation avec une quelconque plus-value apportée par lesdits travaux au logement de fonction, le préjudice matériel ayant été généré par l'opération en tant que telle ; qu'en effet ne peuvent qu'être considérés comme ayant été abusivement dépensés, les deniers publics ayant servi notamment à la réalisation de travaux d'extension (création d'un sas d'entrée et d'une extension de la cuisine avec un puits de lumière), la transformation d'une cave en dressing, à hauteur de 11 041 euros TTC pour des travaux supplémentaires de plomberie (pose, dépose et repose de radiateurs à la verticale puis à l'horizontale), à hauteur de 40 792 euros TTC pour des travaux de menuiserie intérieure (pose de 131 m2 de parquet au prix unitaire de 133 euros, fourniture et pose de placards pour 8 933 euros HT), à hauteur de 44 144 euros TTC pour des travaux de peinture, à hauteur de 22 636 euros TTC pour des travaux d'aménagement/extérieur/terrassement/voirie, à hauteur de 11 413 euros TTC pour les espaces verts (fourniture et pose d'un gazon prévégétalisé sur sol préparé; 400 m² au prix de 6 300 euros TT et une haie prévégétalisée de 15 m² au prix de 5 112 euros TTC), à hauteur de 10 810 euros TTC pour des travaux supplémentaires de peinture, à hauteur de 14 860 euros TTC pour des travaux complémentaires de menuiserie intérieure (fabrication et pose de placards pour 8 925 euros HT correspondant à la réalisation d'un dressing derrière la tête de lit), fourniture et pose aménagement plan de travail avec portes et tiroirs pour 3 235 euros HT-2 unités), à hauteur de 51 413 euros TTC pour la fourniture et la pose de 104 claustras, à hauteur de 4 979, 61 euros TTC pour la fourniture et la pose d'étagères, de tablettes et de caches radiateurs, etc., enfin, l'allégation portant sur d'éventuelles surfacturations ne saurait être recevable puisque, d'une part, ce risque éventuel aurait été écarté dans le cadre d'un marché contrôlé que M. X... a tout fait pour contourner, d'autre part, le surcoût n'est que la conséquence du changement permanent de directives des époux X... dans la nature des travaux, le choix des matériaux et leur pose ; qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que le délit d'abus de confiance est caractérisé en tous ses éléments constitutifs; par conséquent, le jugement entrepris sera confirmé sur la déclaration de culpabilité de M. X... de ce chef ;
"1°) alors que l'abus de confiance est le fait par une personne de détourner, au préjudice d'autrui, des fonds, des valeurs ou un bien quelconque qui lui ont été remis et qu'elle a acceptés à charge de les rendre, de les représenter ou d'en faire un usage déterminé ; que le détournement résulte de l'appropriation du bien par le bénéficiaire de la remise ; qu'en l'espèce, pour déclarer M. X... coupable d'abus de confiance, la cour d'appel a estimé qu'il avait fait entreprendre des travaux de rénovation des logements de fonction au coût excessif, dépassant les pouvoirs qui lui avaient été confiés pour l'ordonnancement des dépenses du CHU dont il était le directeur et qu'il avait ainsi fait perdre des fonds au CHU que celui-ci aurait pu affecter à d'autres fins ; que, dès lors qu'elle constatait que les fonds avaient été utilisés pour la rénovation d'un logement qui appartenait au CHU, ce qui excluait que le prévenu les ait détournés, ne pouvant se les approprier, ces faits caractérisant au plus un abus de pouvoirs, la cour d'appel a violé l'article 314-1 du code pénal ;
"2°) alors qu'à tout le moins, dès lors qu'elle constatait que la rénovation d'un logement de fonction devait être assurée par le CHU, aucune disposition ne précisant de limites quant aux modalités de cette rénovation, la cour d'appel n'a pu caractériser l'utilisation des fonds dudit centre à des fins autres que celles pour lesquelles ils avaient été remis ;
"3°) alors que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en estimant que seuls les travaux réalisés sur la base du premier acte d'engagement de l'architecte pouvaient être justifiés par la nécessité de rénover le logement de fonction, sans dire en quoi les autres actes qu'elle listaient, portant notamment sur des travaux de peinture, étaient excessifs et sur quels critères concernant un logement de fonction de directeur d'hôpital elle se fondait pour se déterminer, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"4°) alors qu'enfin, le détournement implique l'intention de ne pas utiliser les fonds ou biens aux fins pour lesquelles ils ont été remis ; qu'en ne constatant pas que M. X... savait qu'il ordonnait des paiements excessifs au regard des fins pour lesquels les fonds du CHU avaient été mis à sa disposition, en qualité d'ordonnateur des paiements, paiements qu'elle estimait constitutif d'abus, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'ensemble des éléments constitutifs du délit d'abus de confiance" ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable du délit d'abus de confiance, l'arrêt énonce notamment qu'est constitutif de ce délit le fait pour un ordonnateur d'engager et de liquider des dépenses à des fins étrangères à celles prévues par les lois et règlements, peu important qu'il n'ait pas eu la détention matérielle des fonds, et que M. X..., ordonnateur principal des dépenses du CHU de Caen, a totalement perdu de vue l'intérêt général pour ne se soucier que de son seul intérêt particulier en faisant réaliser dans son logement de fonction des travaux d'aménagement intérieurs et extérieurs de pure convenance et payés avec les deniers publics, au préjudice du CHU, l'usage abusif étant caractérisé par le comportement même de l'intéressé qui a disposé des fonds publics comme s'il s'agissait de ses deniers propres pour une opération de rénovation et embellissement de son logement de fonction, travaux qui ne sont nullement pris en charge en application du décret n° 43-891 du 17 avril 1943 relatif à la mise à disposition d'un logement nu aux directeurs hospitaliers ; que les juges ajoutent qu'il n'est pas contesté par le CHU de Caen que certains travaux devaient nécessairement être réalisés dans le logement de fonction, que les premiers juges ont pu à juste titre fixer le coût des travaux qui devaient être réalisés et rester à la charge du CHU car relevant de travaux d'entretien, à la somme de 284 200 euros HT correspondant au montant des travaux figurant sur l'acte d'engagement officiel dudit cabinet et que, au delà de ce montant et jusqu'à celui de 639 933 euros HT, tel que visé au rapport d'expertise judiciaire au titre du total des travaux, il doit être considéré que les sommes ont été abusivement dépensées et détournées, soit à hauteur de 355 733 euros, montant correspondant aux travaux de pure convenance et qui ne saurait faire l'objet d'une compensation avec une quelconque plus-value apportée par lesdits travaux ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que l'usage abusif des fonds publics par le prévenu résulte du fait, par ce dernier, qui a utilisé les moyens mis à sa disposition dans le cadre de ses fonctions pour financer des travaux dont une partie, souverainement évaluée par les juges, s'est avérée de pure convenance, de se comporter comme le propriétaire des fonds employés, sans aucune mesure, à des fins sans rapport avec la nature du logement de fonction qu'il occupait et sans utilité pour la personne morale, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation de la loi des 16-24 août 1790, du décret du 16 fructidor an III et des articles 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit par la victime, ensemble l'article 1382 devenu 1241 du code civil ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X... à verser au CHU de Caen, 355 733 euros en réparation de son préjudice matériel et 10 000 euros à titre de son préjudice moral ;
"aux motifs que les juridictions judiciaires sont compétentes pour statuer sur la réparation des conséquences dommageables de la faute commise par un agent public lorsque celle-ci revêt le caractère d'une faute personnelle, détachable de la fonction ; que M. X..., directeur général du CHU de Caen, n'a agi sciemment que dans son intérêt personnel en contournant les règles des marchés publics afin d'éviter toutes les instances de contrôle et ainsi parvenir à faire financer sur les deniers publics, des travaux de pure convenance dans son logement de fonction ; que la recherche de cet intérêt personnel caractérise amplement la faute détachable ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont déclaré recevable la constitution de partie civile du CHU de Caen ; que sur le préjudice matériel, M. X... est entièrement responsable du préjudice matériel subi par le CHU de Caen, ledit préjudice ayant été généré par le détournement en tant que tel et dans le cadre duquel le CHU de Caen s'est vu imposer contre sa volonté les divers travaux de pure convenance, le montant des sommes détournées par M. X... pour réaliser ces travaux sera fixé à la somme de 355 733 euros, et correspondant à l'appauvrissement du CHU de Caen qui n'a pu disposer de cette somme pour l'affecter à d'autres dépenses ; que dès lors, le préjudice matériel subi par le CHU de Caen est certain et a été généré par les agissements délictueux de M. X... qui a détourné de son objet cette somme laquelle doit lui être restituée, toute idée de compensation avec une quelconque plus-value apportée par lesdits travaux au logement de fonction n'ayant pas lieu d'être ; que l'allégation portant sur d'éventuelles surfacturations ne saurait être recevable puisque, d'une part, ce risque éventuel aurait été écarté dans le cadre d'un marché contrôlé que M. X... a tout fait pour contourner, d'autre part, le surcoût n'est que la conséquence du changement permanent de directives des époux X... dans la nature des travaux, le choix des matériaux et leur pose ; que le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a condamné M. X... à verser au CHU de Caen la somme de 355 733 euros à titre d'indemnisation de son préjudice matériel, sur le préjudice moral, du fait des agissements délictueux de M. X..., le CHU de Caen a nécessairement subi un préjudice moral à raison du discrédit jeté sur cet établissement hospitalier ;
"1°) alors que l'agent d'un service public n'est personnellement responsable des conséquences dommageables de l'acte délictueux qu'il a commis que si cet acte constitue une faute détachable de ses fonctions ; qu'il en va ainsi si l'agent poursuivait un intérêt personnel sans lien avec le service ; que, dès lors que la cour d'appel avait admis que les travaux de rénovation des logements de fonction relevaient des fonctions du centre hospitalier, la cour d'appel qui constatait ainsi que les travaux dont M. X... avait ordonné le paiement n'étaient pas sans lien avec le service, ne pouvait caractériser une faute personnelle détachable de ses fonctions ;
"2°) alors que le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime impliquait qu'il soit tenu compte de la plus-value apportée au logement de fonction pour évaluer le préjudice prétendument subi par le CHU ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"3°) alors qu'en outre, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en évaluant à 355 733 euros le préjudice matériel subi par le CHU de Caen, comme correspondant au montant des travaux dépassant une simple rénovation, sur la base du premier acte d'engagement de l'architecte, sans dire en quoi les autres actes ne portaient pas sur des travaux utiles, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"4°) alors qu'en évaluant à 355 733 euros le préjudice matériel subi par le CHU de Caen, tout en précisant, dans les motifs portant sur l'évaluation des détournements, les dépenses jugées excessives dont l'addition n'atteint que 212 088,61 euros, la cour d'appel s'est contredite ;
"5°) alors qu'en ne caractérisant pas les manifestations du discrédit qui aurait été jeté sur le CHU, la cour d'appel qui a condamné M. X... à réparer le préjudice en résultant, n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu que pour condamner le prévenu à payer des dommages-intérêts au CHU de Caen, partie civile, l'arrêt énonce notamment que le demandeur, qui n'a agi sciemment que dans son intérêt personnel en contournant les règles des marchés publics afin d'éviter toutes les instances de contrôle, est parvenu à faire financer sur les deniers publics des travaux de pure convenance dans son logement de fonction ; que les juges ont ensuite évalué le préjudice matériel du CHU à la somme de 355 733 euros correspondant à l'appauvrissement de celui-ci qui n'a pu disposer de cette somme pour l'affecter à d'autres dépenses, et son préjudice moral à la somme de 10 000 euros à raison du discrédit jeté sur l'établissement en raison des agissements délictueux de son directeur ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les fautes commises par M. X..., même non dépourvues de tout lien avec le service, constituent des manquements volontaires et inexcusables à des obligations d'ordre professionnel et déontologique, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer le dommage né de l'infraction ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 500 euros la somme que M. X... devra payer au CHU de Caen au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 12 septembre 2018 n° 15-86.288

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-Anne X..., épouse Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 3 septembre 2015, qui, pour escroqueries l'a condamnée à un an d'emprisonnement et un an d'interdiction professionnelle et a prononcé sur les intérêts civils ;








La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 13 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire FOUQUET, les observations de la société civile professionnelle GARREAU, BAUER-VIOLAS et FESCHOTTE-DESBOIS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ;
Attendu qu'il résulte d'un extrait des actes de l'état civil de la ville de Béziers qu'Anne Y..., qui avait formé son pourvoi le 4 septembre 2015, est décédée le [...] ;
Qu'il s'ensuit que, par application de l'article 6 du code de procédure pénale, il y a lieu de déclarer l' action publique éteinte à son égard ;
Que cependant, la Cour de Cassation demeurant compétente pour statuer sur les intérêts civils, il convient de donner acte à ses héritiers, M. Yannick Y... et Mmes B... et H... Y... , de leur reprise de l'instance ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'en 2008 et 2009, le service du contentieux de la caisse primaire d'assurance maladie de Béziers a procédé à une enquête sur des anomalies de facturation des soins effectués par le cabinet au sein duquel exerçait Anne Y..., infirmière libérale, procédant notamment à l'audition des infirmiers concernés et de certains de leurs patients ; qu'une enquête préliminaire a ensuite été réalisée par les services de police judiciaire au vu du rapport d'enquête administrative transmis au procureur de la République, à l'issue de laquelle Anne Y... a été citée devant le tribunal correctionnel de Béziers du chef d'escroqueries pour avoir courant juillet 2007 trompé la CPAM de Haute-Savoie en déclarant des soins infirmiers non effectués et en la déterminant à remettre la somme de 668,58 euros, entre le 25 juin 2007 et le 28 novembre 2007, trompé la CPAM de Haute-Savoie en déclarant des actes de nursing non effectués, la déterminant ainsi à remettre la somme de 3 337,26 euros et entre le 1er janvier 2005 et le 7 octobre 2007, par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, en l'espèce en cumulant la facturation d'actes infirmiers en soins (AIS) et d'actes médicaux infirmiers (AMI), en facturant des actes non remboursables, en facturant un nombre d'AMI et de majoration de nuit non justifié, en comptabilisant des démarches de soins infirmiers (imprimés DSI) non contresignées par le médecin et non fournies, trompé la CPAM de Béziers en la déterminant à remettre la somme de 150 291,07 euros, ramenée à 91 641,07 euros ; que, condamnée par jugement du 24 septembre 2012 rendu par défaut, Anne Y... a formé opposition ; que le tribunal correctionnel l'a déclarée coupable des délits d'escroquerie pour une valeur de 668,58 euros au préjudice de la CPAM de Haute-Savoie, et par le cumul des AIS-AMI au préjudice de la CPAM de l'Hérault, a prononcé sa relaxe pour les autres chefs de prévention et l'a condamnée à une peine d'emprisonnement d'un mois avec sursis, par jugement du 9 septembre 2013 dont il a été formé appel principal par le procureur de la République et la partie civile et appel incident par la prévenue ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 313-1 du code pénal, L.162-1-7 du code de la sécurité sociale, 7 de la première partie de la nomenclature générale des actes professionnels, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, insuffisance de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a infirmé le jugement de relaxe des chefs d'escroquerie au préjudice de la CPAM de Haute-Savoie pour les faits de déclaration d'actes de nursing non effectués et d'escroquerie au préjudice de la CPAM de Béziers pour les faits de facturation d'actes non remboursables et d'un nombre d'actes médicaux infirmiers et de majoration de nuit non justifié ainsi que de comptabilisation de démarches de soins infirmiers non contresignés par le médecin et non fournies et a déclaré l'exposante coupable de ces faits, l'a condamnée en répression à la peine d'un an d'emprisonnement avec sursis et a ordonné l'interdiction d'exercer la profession d'infirmière pendant une durée d'un an ;
"aux motifs que les éléments recueillis lors de l'enquête administrative effectuée par un agent assermenté suffisent à la cour pour comprendre que dans le cabinet libéral dirigé par M. C... l'ensemble des infirmiers bénéficiait de facturations irrégulières toujours au détriment de la CPAM, que la fraude était délibérée puisque le cabinet avait mis en place un système ne permettant pas à la CPAM de se rendre compte des cumuls, qu'en effet lorsqu'un infirmier facturait des AIS et frais de déplacement pour un assuré, un autre infirmier facturait des AMI et frais de déplacement pour le même assuré et à la même période et que M. D... qui avait pris conscience très tôt de cette fraude n'a pu la combattre, sous l'emprise de ses collègues dont tous ont admis avoir décidé d'une position concertée lors de l'enquête pour répondre des faits qui leur, étaient reprochés ; qu'il sera précisé que Mme Y... avait une position privilégiée au sein de ce cabinet pour y travailler depuis de nombreuses années et que son mari avait tenté de mettre au point un logiciel pour institutionnaliser cette fraude ; que Mme Y... après avoir reconnu les faits tant devant le service contentieux de la CPAM de l'Hérault que devant les enquêteurs, tente de les contester devant les juridictions ; que l'escroquerie qui porte sur des sommes très importantes et sur une période de plusieurs années est établie par les constatations du service contentieux de la CPAM, les déclarations des mis en cause, et les pièces justificatives sur lesquelles tant Mme Y... que Mme E... ont pu s'expliquer ; que la cour en conséquence infirmera l'appréciation du tribunal correctionnel qui a, dans son jugement du 9 septembre 2013 renvoyé des fins de la poursuite les prévenues pour une grande partie des faits reprochés et ce, en contradiction avec son précédent jugement du 24 septembre 2012 ; que sur la peine, s'agissant d'une fraude institutionnelle au détriment, de la collectivité et qui a duré plusieurs années, la cour condamnera Anne Y... et Mme E... épouse F... à la peine d'un an d'emprisonnement assorti d'un sursis et ordonnera à leur encontre à titre de peine complémentaire l'interdiction d'exercer la profession d'infirmière dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, selon les modalités prévues par l'article 131-27 du code pénal et ce, pour une durée d'un an ;
"1°) alors que le principe de la présomption d'innocence impose à l'accusation de rapporter la preuve des éléments constitutifs de l'infraction poursuivie, spécialement lorsque les faits sont contestés ; qu'en infirmant la décision de relaxe des premiers juges et en déclarant l'exposante coupable d'escroquerie au préjudice de la CPAM de Haute- Savoie pour les faits de déclaration d'actes de nursing non effectués et d'escroquerie au préjudice de la CPAM de Béziers pour les faits de facturation d'actes non remboursables et d'un nombre d'actes médicaux infirmiers et de majoration de nuit non justifié ainsi que de comptabilisation de démarches de soins infirmiers non contresignés par le médecin et non fournies, au seul visa des constatations du service contentieux de la CPAM, des déclarations des mis en cause au cours de l'enquête de police et des justificatifs produits par les parties civiles lorsque le rapport d'enquête administrative du service contentieux de la CPAM n'a opéré aucune constatation concernant ces faits, que l'enquête préliminaire s'est limitée à une audition succincte des infirmiers, dont l'exposante, sur le cumul des facturations d'actes infirmiers en soins et d'actes médicaux infirmiers à l'exclusion de tout autre fait et qu'aucune pièce produite par les parties poursuivantes n'a précisé, pour chacun de ces faits, le patient concerné, l'acte frauduleusement déclaré, facturé ou comptabilisé, la réalité de la facturation, déclaration ou comptabilisation en cause ainsi que la date de ceux-ci, de sorte qu'aucune véritable enquête n'a été menée sur ces faits, la cour d'appel a violé la présomption d'innocence ;
"2°) alors que le délit d'escroquerie suppose que soient caractérisées la commission d'une manoeuvre frauduleuse déterminante de la remise de fonds et la volonté de commettre celle-ci ; qu'en omettant de préciser à aucun moment dans ses motifs les actes déclarés, facturés ou comptabilisés, le nom des patients concernés, les documents de déclaration, facturation ou comptabilisation concernés ainsi que la date des actes et des déclarations, la cour a nécessairement privé sa décision de tout motif ;
"3°) alors que le délit d'escroquerie suppose que soient caractérisées la commission d'une manoeuvre frauduleuse déterminante de la remise de fonds ; que l'infirmier est tenu de respecter la nomenclature générale des actes professionnels (NGAP), acte réglementaire dont l'article 7 de la première partie relatif à l'accord préalable prévoit que pour effectuer des soins AIS et les facturer, l'infirmier doit adresser au médecin conseil de l'assurance maladie obligatoire dont dépend le patient concerné la photocopie ou l'original de la prescription de démarche de soins infirmiers et la démarche de soins infirmiers et que le silence gardé pendant plus de 15 jours à compter de la réception de la prescription de la DSI et de la DSI vaut décision d'acceptation ; que l'accord préalable étant donné, le médecin conseil fait savoir au service administratif qu'il est autorisé à rembourser les soins infirmiers découlant de la démarche de soins infirmiers pour laquelle il a donné son accord, de sorte que la comptabilisation des démarches de soins infirmiers ne peut être effective sans l'accord préalable du médecin conseil de la CPAM ; qu'en déclarant l'exposante coupable de comptabilisation de démarches de soins infirmiers non contresignés alors que la comptabilisation de démarches de soins infirmiers suppose nécessairement que le médecin-conseil de la CPAM ait donné son accord préalable à cette comptabilisation y compris en gardant le silence plus de quinze jours après la réception de la prescription de la DSI et de la DSI, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 7 de la première partie de la nomenclature générale des actes professionnels et des textes susvisés" ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 7.4.1 b § 2 de la Convention nationale des infirmiers libéraux, L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale, 11 de la première partie et 11 II du chapitre 1er du titre XVI de la nomenclature générale des actes professionnels, 121-1, 121-3, 313-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, insuffisance de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré l'exposante coupable de l'ensemble des faits poursuivis et l'a condamnée en répression à la peine d'un an d'emprisonnement avec sursis et a ordonné l'interdiction d'exercer la profession d'infirmière pendant une durée d'un an ;
"aux motifs que les éléments recueillis lors de l'enquête administrative effectuée par un agent assermenté suffisent à la cour pour comprendre que dans le cabinet libéral dirigé par M. C... l'ensemble des infirmiers bénéficiait de facturations irrégulières toujours au détriment de la CPAM, que la fraude était délibérée puisque le cabinet avait mis en place un système ne permettant pas à la CPAM de se rendre compte des cumuls, qu'en effet lorsqu'un infirmier facturait des AIS et frais de déplacement pour un assuré, un autre infirmier facturait des AMI et frais de déplacement pour le même assuré et à la même période et que M. D... qui avait pris conscience très tôt de cette fraude n'a pu la combattre, sous l'emprise de ses collègues dont tous ont admis avoir décidé d'une position concertée lors de l'enquête pour répondre des faits qui leur, étaient reprochés ; qu'il sera précisé que Mme Y... avait une position privilégiée au sein de ce cabinet pour y travailler depuis de nombreuses années et que son mari avait tenté de mettre au point un logiciel pour institutionnaliser cette fraude ; que Mme Y... après avoir reconnu les faits tant devant le service contentieux de la CPAM de l'Hérault que devant les enquêteurs, tente de les contester devant les juridictions ; que l'escroquerie qui porte sur des sommes très importantes et sur une période de plusieurs années est établie par les constatations du service contentieux de la CPAM, les déclarations des mis en cause, et les pièces justificatives sur lesquelles tant Mme Y... que Mme E... ont pu s'expliquer ; que la cour en conséquence infirmera l'appréciation du tribunal correctionnel qui a, dans son jugement du 9 septembre 2013 renvoyé des fins de la poursuite les prévenues pour une grande partie des faits reprochés et ce, en contradiction avec son précédent jugement du 24 septembre 2012 ; que sur la peine, s'agissant d'une fraude institutionnelle au détriment, de la collectivité et qui a duré plusieurs années, la cour condamnera Anne Y... et Mme E..., épouse F... à la peine d'un an d'emprisonnement assorti d'un sursis et ordonnera à leur encontre à titre de peine complémentaire l'interdiction d'exercer la profession d'infirmière dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, selon les modalités prévues par l'article 131-27 du code pénal et ce, pour une durée d'un an ;
"1°) alors que nul n'est responsable que de son propre fait ; que pour déclarer l'exposante coupable de l'ensemble des faits d'escroqueries poursuivies, la cour d'appel a retenu que les éléments recueillis lors de l'enquête administrative permettaient de comprendre que l'« ensemble des infirmiers » du cabinet libéral bénéficiaient de facturations irrégulières au détriment de la CPAM et que « le cabinet » aurait mis en place un système ne permettant pas à la CPAM de se rendre compte de la fraude, que lorsqu'« un » infirmier facturait des AIS et frais de déplacement pour un assuré, « un autre infirmier » facturait des AMI et frais de déplacement pour le même assuré et à la même période et que « tous les infirmiers » se seraient concertés pour présenter au service contentieux de la CPAM la même version des faits ; qu'en se limitant ainsi à faire état d'une fraude généralisée imputable à tous les infirmiers membres du cabinet auquel appartenait l'exposante sans caractériser les éléments établissant que l'exposante aurait commis personnellement les infractions d'escroquerie reprochées et sans préciser dans ses motifs les actes reprochés personnellement à Mme Y..., les facturations afférentes, le nom des patients, les dates de ces actes et des facturations, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard du principe susvisé ;
"2°) alors que l'insuffisance de motifs équivaut à l'absence de motifs ; qu'en retenant, pour fonder la déclaration de culpabilité de l'exposante et affirmer l'existence d'une fraude généralisée instaurée par tous les membres du cabinet d'infirmiers, l'existence d'une concertation entre infirmiers préalablement à leurs auditions par le service d'enquête de la CPAM lorsqu'il ressort du rapport d'enquête administrative que seul M. D... a fait état d'une telle concertation dans un contexte spécifique où celui-ci venait de faire une tentative de suicide et allait être hospitalisé en psychiatrie, que M. D... a ultérieurement infirmé l'existence d'une concertation entre infirmiers devant les enquêteurs en déclarant « non, nous nous sommes pas concertés car nous ne connaissions pas la raison réelle de notre convocation » et qu'aucun autre infirmier n'a confirmé l'existence d'une telle concertation, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;
"3°) alors que la personne poursuivie doit bénéficier des droits de la défense dès l'enquête administrative préalable ; que l'article 7.4.1 b § 2 de la Convention nationale des infirmiers libéraux prévoit notamment, en cas de reproches adressés par une Caisse d'un non-respect des dispositions de la Convention nationale des infirmiers libéraux et notamment d'un non-respect de façon répétée de la liste visée à l'article L. 162-1-7 du code de la sécurité sociale (NGAP), que l'infirmier est informé de son droit de se faire assister par un avocat ou une infirmière de son choix exerçant régulièrement sa profession et placée sous le régime de la présente convention ; qu'en retenant, pour déclarer l'exposante coupable de l'ensemble des faits reprochés, que Mme Y... a reconnu les faits devant le service contentieux de l'Hérault et devant les services de police avant de finalement tenter de les contester devant les juridictions de jugement, lorsque les prétendus aveux passés par l'exposante sont intervenus lors d'une enquête administrative préalable au cours de laquelle n'ont pas été respectés les droits de la défense, l'exposant n'ayant pas reçu de convocation, ne s'étant pas vu notifier le droit d'être assisté par un avocat et n'ayant pas eu précisément connaissance des accusations portées contre elle, puis lors d'une enquête policière très sommaire réduite à l'information de l'exposante sur les nouveaux calculs d'indus opérés par la CPAM, la cour d'appel a violé les droits de la défense ;
"4°) alors que les enquêteurs d'une autorité administrative doivent respecter le principe de loyauté de l'enquête ; que Mme Y... a produit devant la cour d'appel une attestation en date du 21 août 2013 de M. G..., époux d'une patiente de Mme Y..., établissant que des pressions auraient été exercées par les enquêteurs de la CPAM sur les patients entendus lors de l'enquête préalable et plus précisément que les agents assermentés avaient fait usage d'une fausse qualité de médecins-conseils, avaient imposé à une femme malade un interrogatoire, avaient acté dans un procès-verbal de réponses fausses de la patiente et avaient contraint celle-ci, par la menace de la priver de la prise en charge de ses soins, à signer le procès-verbal malgré son refus en lui indiquant faussement qu'elle pourrait revenir sur ses déclarations ultérieurement ; qu'en se fondant sur les constatations du service contentieux de la CPAM, partant sur les procès-verbaux d'audition des assurés annexés au rapport d'enquête administrative en dépit de ces éléments démontrant l'absence de loyauté de l'enquête, la cour d'appel a violé ce principe et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"5°) alors que l'insuffisance de motifs équivaut à l'absence de motifs ; que pour déclarer Mme Y... coupable des escroqueries reprochées, la cour d'appel a retenu la position privilégiée de celle-ci au sein du cabinet pour y travailler depuis de nombreuses années et une prétendue mise au point par son mari, M. Y..., d'un logiciel de nature à institutionnaliser la fraude poursuivie ; qu'en statuant ainsi, lorsque l'exposante a justifié devant la cour d'appel avait débuté son activité en tant qu'infirmière au sein du cabinet le 15 mars 2006 et avoir ainsi travaillé dix-neuf mois au sein de ce cabinet et non de « nombreuses années », et lorsqu'aucun élément de l'enquête n'a établi que M. Y..., qui n'a jamais été mis en cause comme complice, aurait mis au point un logiciel de nature à permettre une fraude au préjudice de la CPAM, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"6°) alors que l'insuffisance de motifs équivaut à l'absence de motifs ; que la cour d'appel, pour déclarer l'exposante coupable des faits reprochés de cumul de facturation des AIS et AMI, s'est bornée à faire référence de façon générale aux pièces produites par l'accusation ; que l'article 11 II du chapitre 1er du titre XVI « Soins infirmiers » de la nomenclature générale des actes professionnels autorise le cumul de soins infirmiers (AIS) avec la réalisation d'actes infirmiers médicaux (AMI) consistant en une « perfusion, telle que définie au chapitre 1er ou au chapitre II du présent titre, ou d'un pansement lourd et complexe nécessitant des conditions d'asepsie rigoureuse » ; que l'article 11 de la première partie de la NGAP vise en outre uniquement le cumul d'actes au cours de la même séance ; qu'en statuant comme elle l'a fait, lorsqu'il ressortait des pièces de la procédure que d'une part, certains des actes de soins infirmiers facturés par l'exposante se sont cumulés avec l'un des actes médicaux infirmiers visés à l'article 11 II du chapitre 1er du titre XVI de la nomenclature générale des actes professionnels et que, d'autre part, les AMI et les AIS pour un même patient ont été effectués par le même infirmier mais lors de séances distinctes ou par des infirmiers distincts lors de séances distinctes soit jamais au cours de la même séance, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard des textes susvisés ;
"7°) alors que l'insuffisance de motifs équivaut à l'absence de motifs ; qu'en contentant de se fonder sur les pièces produites par l'accusation alors qu'il ressortait de celles-ci que des actes ont été facturés par un collègue de l'exposante et réglé à celui-ci par la CPAM et non à l'exposante, que des actes ont vu leur remboursement être réclamé en double par la CPAM alors qu'ils ont été réglés une seule fois à Mme Y..., encore que certains des actes sont des AIS qui n'ont pas été cumulés avec des AMI ou sont des AMI qui n'ont pas été cumulés avec des AIS, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;
"8°) alors que le délit d'escroquerie est une infraction intentionnelle ; qu'en se fondant sur le rapport d'enquête administrative de la CPAM et l'audition de Mme Y... par les enquêteurs pour retenir que la prévenue aurait avoué les faits lorsque celle-ci n'a jamais reconnu, lors des enquêtes administrative et policière, avoir commis volontairement des faits d'escroquerie mais a reconnu seulement qu'elle avait pu effectuer des erreurs dans ses déclarations d'actes, relevant tout au plus de la négligence, et a simplement accepté deprocéder au remboursement des sommes réclamées par la CPAM et sans caractériser davantage l'élément moral de l'infraction d'escroquerie, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Sur le premier moyen et sur deuxième moyen, pris en ses première, deuxième, cinquième, sixième, septième et huitième branches ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, caractérisé en tous leurs éléments, tant matériel qu'intentionnel, les délits, objets de la présente procédure ;
D'où il suit que le grief, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses troisième et quatrième branches ;
Attendu que les griefs, nouveau et mélangé de fait, en ce qu'ils invoquent pour la première fois devant la Cour de cassation des atteintes portées aux droits de la défense et au principe de loyauté des preuves, au cours de l'enquête administrative, sont comme tels irrecevables ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 313-1 du code pénal, 1382 du code civil, 2, 3, 418, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, insuffisance de motifs ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevables les constitutions de partie civile de la CPAM de Haute-Savoie et de la CPAM de l'Hérault et a condamné l'exposante à payer à la CPAM de Haute- Savoie la somme de 3 100 euros en réparation de son préjudice et à la CPAM de l'Hérault la somme de 91 461,07 euros en réparation de son préjudice ;
"aux motifs que sur l'action civile les faits dont Anne X..., épouse Y..., et Mme E..., épouse F..., ont été déclarées coupables ont causé à la CPAM un préjudice dont elles doivent être déclarées entièrement responsables ; que les listings informatiques versées aux débats ainsi que les tableaux récapitulatifs par assurés des sommes indûment versées avec explications sur la nature des actes réalisés et des actes facturés, éléments qui ont été présentés lors de l'enquête administrative aux mises en cause et sur lesquelles elles n'ont apporté aucun démenti probant, permettent à la cour de retenir au titre de leur préjudice le montant des sommes réclamées par les caisses ; que sur le préjudice de la CPAM de Haute-Savoie la cour condamnera Mme Y... à lui payer la somme de 3 100 euros selon décompte actualisé et versés aux débats ; que sur le préjudice subi par la CPAM de l'Hérault la cour condamnera Mme Y... à lui payer la somme de 91 641, 07 euros selon décompte actualisé et versés aux débats ;
"1°) alors que l'insuffisance de motifs équivaut à l'absence de motifs ; que les parties civiles ont produit devant la cour d'appel au soutien de leurs prétentions des listings dont elles ont soutenu qu'ils mentionneraient systématiquement le numéro de sécurité sociale du bénéficiaire de la prescription, la date de prescription, le nom de l'exécutant, la nomenclature concernant l'acte effectué (AIS ou autre), la quantité, le coefficient retenu, la date de l'acte, le jour, le montant facturé, le montant du remboursement, le taux, le numéro de la facture, la date de paiement par la CPAM (conclusions p. 7), faisant ainsi croire que ces documents permettaient d'identifier chaque acte reproché à l'exposante au titre des faits poursuivis ainsi que le préjudice afférent ; qu'en se fondant sur ces listings pour condamner l'exposante à payer aux parties civiles des sommes à titre de dommages intérêts lorsqu'il ressortait de leur examen qu'ils ne contiennent aucune colonne relative à la nature de l'acte réalisé, élément pourtant essentiel, ni aucune colonne indiquant le « jour » ainsi que la « nomenclature de l'acte », qu'ils font état de numéros de factures ne correspondant à aucune facture payée par les CPAM à Mme Y... et de dates de paiement ne correspondant à aucun des paiements intervenus au bénéfice de l'exposante, qu'ils contiennent des feuillets mis en double, des feuillets comportant des cases vides ou des points d'interrogation et font état du nom d'assurés qui n'ont jamais été évoqués au cours de l'enquête, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;
"2°) alors que le préjudice doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit ; qu'il ressort de la prévention que l'exposante a été poursuivie des chefs d'une première escroquerie au préjudice de la CPAM de Haute-Savoie pour un montant de 668,58 euros sur la période de juillet 2007, d'une deuxième escroquerie toujours au préjudice de la CPAM de Haute-Savoie pour un montant de 3 337,26 euros sur la période du 25 juin 2007 au 28 novembre 2007, enfin d'une troisième escroquerie au préjudice de la CPAM de l'Hérault pour un montant de 150 291,07 euros sur la période du 1er janvier 2005 au 7 octobre 2007 ; que dans les conclusions d'appel, la CPAM de Haute-Savoie a réclamé le paiement de la somme de 3 100,32 euros et la CPAM de l'Hérault le paiement de somme de 91 641,07 euros se décomposant en 668,58 euros pour la période du 1er juillet au 31 juillet 2007, 337,26 euros pour la période du 25 juin 2007 au 28 novembre 2007 et 90 635,23 euros pour la période du 1er janvier 2005 au 7 octobre 2007 ; qu'en faisant droit à ces demandes et en indemnisant la CPAM de l'Hérault à hauteur de 91 641,07 euros en ce inclus la somme de 668,58 euros pour la période du 1er juillet au 31 juillet 2007 concernant pourtant les faits poursuivis au préjudice de la seule CPAM de Haute-Savoie et la somme de 337,26 euros pour la période du 25 juin 2007 au 28 novembre 2007 alors que la somme de 3 337,26 euros, et non 337,36 euros, était visée au titre de l'escroquerie commise au seul préjudice également de la CPAM de Haute-Savoie et que la CPAM de Haute-Savoie a déjà été indemnisée pour ces préjudices par la cour, la cour d'appel a violé le principe susvisé" ;
Attendu que, pour fixer le montant de l'indemnité propre à réparer le dommage subi par les parties civiles, l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, sans insuffisance, ni contradiction, dans la limite des conclusions des parties, et des faits, objet de la poursuite, l'indemnité propre à réparer le dommage résultant directement de l'infraction, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs :
DONNE acte à M. Y... et Mmes B... et H... Y... de leur intervention ;
DECLARE l'action publique éteinte ;
REJETTE le pourvoi sur les intérêts civils ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze septembre deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 11 septembre 2018 n° 18-82.359

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. B... X..., partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 8 mars 2018, qui, dans la procédure suivie contre Mme C... Y... du chef de non- représentation d'enfant, a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 12 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Harel-Dutirou, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de Mme le conseillerHAREL-DUTIROU et les conclusions de M. l'avocat général QUINTARD ;
Vu le mémoire personnel et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. B... X... et Mme C... Y... ont eu un enfant, Mathieu né le [...] ; que, par jugement du [...], le juge aux affaires familiales a fixé la résidence habituelle de l'enfant chez la mère et octroyé un droit de visite au père, sauf meilleur accord des parties, les 1er, 3ème et 5ème samedis de chaque mois avec remise dans les locaux d'une association, et pendant la fermeture de celle-ci, devant le commissariat de police de [...] ; que Mme Y... a été citée directement devant le tribunal correctionnel par M. X... du chef de non-représentation d'enfant pour des faits commis les 19 juillet et 2 août 2014 ; que le tribunal l'a relaxée des fins de la poursuite et a débouté X... de l'ensemble de ses demandes ; que seul ce dernier a interjeté appel du jugement ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 497-3°, 472,111-4, du code de procédure pénale, 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'union, ensemble violation du droit à un recours effectif, violation du principe de double degré de juridiction et violation du principe de l'effet dévolutif de l'appel ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 227-5 du code pénal, 3, § 1, de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant, 373-2 du code civil, et 8 de la Convention européenne des droit de l'homme, ensemble violation du droit à une vie privée et familiale normale ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1134 ancien, 1103 et 1104 nouveau du code civil, ensemble abus de droit ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que, pour confirmer les dispositions civiles du jugement, l'arrêt énonce que M. X... ne pouvait accueillir l'enfant selon des modalités différentes de celles prévues par le jugement que tant que la mère en était d'accord et qu'ainsi, la décision de celle-ci de rompre leur accord de remettre l'enfant le dimanche devant le commissariat de police, ne saurait être constitutive d'une faute ; que les juges, après avoir relevé qu'il appartenait à X..., s'il rencontrait des difficultés pour accueillir l'enfant les samedis en raison de ses contraintes professionnelles, de saisir le juge aux affaires familiales d'une requête en révision, retiennent que Mme Y... l'avait avisé qu'elle présenterait l'enfant le samedi 19 juillet 2014 dans les locaux de l'association, ce qui le mettait en mesure d'exercer ses droits ce jour là ; qu'ils ajoutent qu'en l'absence d'élément de preuve contraire, il est acquis que, le 2 août 2014, Mme Y... s'est rendue dans les Iocaux de l'association, conformément au jugement, sans qu'il soit possible de lui reprocher d'avoir quitté les lieux au bout de 10 minutes dans la mesure où M. X... avait clairement exprimé son refus de récupérer l'enfant, ce qui rendait inutile toute attente dans ces lieux ; qu'ils en déduisent qu'aucune faute civile n'est établie à l'encontre de Mme Y... ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que, saisie du seul appel de la partie civile contre une décision de relaxe, elle devait rechercher l'existence d'une faute civile à partir et dans les limites des faits objet de la poursuite, la cour d'appel, qui, par une appréciation souveraine, a estimé qu'une telle faute n'était pas établie puisque l'accord des parents ayant été dénoncé, il convenait de revenir aux dispositions du jugement, a justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 472 du code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble violation du droit d'accès à un tribunal impartial ;
Attendu que, pour retenir le caractère abusif de la constitution de partie civile de M. X..., l'arrêt confirmatif retient que ce dernier savait qu'il n'avait pas de droit sur l'enfant le dimanche puisque Mme Y... lui avait signifié d'abord par texto puis par lettre recommandée qu'il n'y avait plus d'accord entre eux et que seules les dispositions du jugement du 15 avril 2014 s'appliquaient, son droit d'accueil sur l'enfant étant fixé aux samedis ; que les juges en déduisent qu'il a agi contre elle de mauvaise foi ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, relevant de son pouvoir souverain d'appréciation, dont il résulte que la partie civile, procédant de façon téméraire, a abusé de son droit d'agir en justice, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 11 septembre 2018 n° 17-83.276

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :


- Mme Jeanine X..., épouse Y...,- M. Z... Y...,- M. Roger Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AGEN, chambre correctionnelle, en date du 4 mai 2017, qui, pour infractions au code de l'environnement, a condamné la première à 5 000 euros d'amende avec sursis et le deuxième à 10 000 euros d'amende, et pour infractions au code de l'environnement, non-tenue de registre par revendeur de biens mobiliers et travail dissimulé, a condamné le troisième à 10 000 euros d'amende, et a ordonné la remise en état des lieux sous astreinte ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 12 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Guého, conseiller rapporteur, ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GUÉHO, les observations de la société civile professionnelle ORTSCHEIDT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général QUINTARD ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que durant plusieurs années, des carcasses de véhicules usagés ainsi que des métaux et déchets de métaux non dangereux ont été stockés sur un terrain appartenant à M. Z... Y... et son épouse Mme Jeanine Y... ; que ces derniers ainsi que leur fils M. Roger Y... ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel pour exploitation, sans autorisation préfectorale préalable, d'une installation classée pour la protection de l'environnement consistant dans le stockage massif de véhicules hors d'usage et pour exploitation, sans enregistrement, d'une installation classée consistant dans le stockage massif de métaux ou déchets de métaux non dangereux ; que M. Roger Y... a en outre été poursuivi pour non-tenue de registre par revendeur de biens mobiliers et travail dissimulé par dissimulation de son activité consistant dans la vente de métaux ferreux et non ferreux entre le 1er janvier 2011 et le 13 avril 2015 pour un montant de 25 573,68 euros ; que le tribunal a déclaré les prévenus coupables et a condamné MM. Y... à des amendes et Mme Y... à une amende avec sursis ; que toutes les parties ont relevé appel de cette décision;
En cet état ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 173-1, L. 511-1, L. 511-2 du code de l'environnement, 111-4, 121-3 du code pénal, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré MM. Z... et Roger Y... et Mme Jeannine Y... coupables d'avoir exploité deux installations classées pour la protection de l'environnement consistant en un "stockage massif de véhicules hors d'usage" sans enregistrement et un "stockage massif de métaux ou déchets de métaux dangereux" sans autorisation préfectorale ou départementale, a prononcé sur l'action publique et a ordonné aux prévenus, in solidum, de remettre en état les lieux et de réparer les dommages causés à l'environnement, sous astreinte ;
"aux motifs qu'il est constant que, depuis plusieurs années, et notamment entre le 10 avril 2013 et le 16 janvier 2015, et ce malgré mises en demeure de l'autorité administrative, les époux Y... et leurs fils stockent sur leur terrain situé à Puy L'Evêque des carcasses de véhicules hors d'usage sur une superficie d'environ 2 000 m2 et, sur une superficie d'environ 27 000 m2 des métaux ou déchets de métaux non dangereux ; qu'ils ont été mis en demeure de régulariser la situation dans les deux mois par arrêté préfectoral du 24 janvier 2014, mais un survol des lieux le 11 septembre 2014 et une visite le 16 janvier 2015 ont permis de constater la présence de carcasses de véhicules et de déchets en dépit de la vente de ferrailles à des ferrailleurs pour un montant de 15 375,80 euros ;
"et aux motifs adoptés que tant M. Z... Y... que son épouse Mme Jeannine X..., et leurs enfants Jean-Louis et Roger Y..., reconnaissent avoir stocké des véhicules, carcasses, engins de chantier, ferraille qui jonchent le sol sur plusieurs parcelles appartenant aux époux Y..., sur environ 2 000 m2 concernant l'entreposage de véhicules hors d'usage et sur environ 27 000 m2 concernant l'activité de regroupement de métaux ou déchets de métaux non dangereux et alors qu'ils avaient été informés des risques et des infractions que cela représentait et mis en demeure de débarrasser ; qu'ils ont déclaré que ces véhicules, engins, carcasses, etc leur avaient été cédés à titre gratuit et qu'ils les utilisaient parfois pour récupérer des pièces mécaniques puis en vendaient une partie aux ferrailleurs ;
"alors que l'exploitant de fait d'une installation classée pour la protection de l'environnement est la personne physique ou morale, publique ou privée, qui exerce ou contrôle effectivement, à titre professionnel, une activité économique lucrative ou non lucrative ; qu'en retenant MM. Z... et Roger Y... et Mme Jeannine Y... dans les liens de la prévention des chefs d'exploitation illicite de deux installations classées, en l'espèce consistant, pour l'une, au "stockage massif de véhicules hors d'usage" et, pour l'autre, au "stockage massif de métaux ou déchets de métaux dangereux", sans caractériser que chaque prévenu exerçait personnellement et pour son compte, avec un pouvoir de décision autonome et financier, l'activité caractéristique des installations classées visées à la poursuite, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen" ;
Attendu que, pour déclarer M. Z... Y... et Mme Jeanine Y... coupables des délits d'exploitation irrégulière d'installations classées, l'arrêt attaqué retient, par motifs propres et adoptés, que les prévenus reconnaissent avoir stocké pendant plusieurs années des véhicules, carcasses, engins de chantier, ferrailles qui jonchent le sol sur plusieurs parcelles appartenant aux époux Y... alors qu'ils avaient été informés des risques et des infractions que cela représentait et mis en demeure de débarrasser ; que les juges ajoutent que les intéressés ont déclaré que ces objets leur avaient été cédés à titre gratuit et qu'ils les utilisaient parfois pour récupérer des pièces mécaniques puis en vendaient une partie aux ferrailleurs ;
Attendu que par ces énonciations, qui établissent que chaque prévenu exerçait ou contrôlait effectivement, à titre professionnel, une activité économique, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 406, alinéa 2, et 528 du code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble les droits de la défense ;
"en ce qu'il ne résulte pas des mentions de l'arrêt attaqué que M. Roger Y..., prévenu a été informé, au cours des débats, de son droit de se taire ;
"alors que la méconnaissance de l'obligation d'informer le prévenu du droit de se taire, prévue à l'article 406, alinéa 2 du code de procédure pénale, lui fait nécessairement grief ; qu'en déclarant M. Roger Y..., prévenu, coupable des infractions qui lui étaient reprochées après l'avoir entendu en son interrogatoire, sans que ne lui ait été préalablement notifié son droit au silence, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen" ;
Vu les articles 406 et 512 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'en application du premier de ces textes, devant le tribunal correctionnel, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; que la méconnaissance de l'obligation d'informer le prévenu du droit de se taire lui fait nécessairement grief ;
Que, selon le second, ces dispositions sont applicables devant la chambre des appels correctionnels ;
Attendu qu'il ne résulte pas de l'arrêt attaqué que M. Roger Y..., qui a comparu à l'audience de la cour d'appel en qualité de prévenu, ait été informé du droit de se taire au cours des débats ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et les principes ci-dessus énoncés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le quatrième moyen, pris de la violation des articles 132-20, alinéa 2, et 132-1 du code pénal, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré M. Roger Y..., M. Z... Y... et Mme Jeannine Y... coupables des infractions qui leur étaient reprochées et les a condamnés à payer respectivement une amende délictuelle de 10.000 euros, de 10.000 euros et de 5.000 euros avec sursis ;
"aux motifs que au regard de la persistance des faits et de la persistance des prévenus dans leur activité délictuelle, les peines d'amende prononcées à leur encontre par le premier juge seront confirmées ;
"alors qu' en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en condamnant MM. Z... et Roger Y... à payer chacun une amende de 10.000 euros et Mme Jeannine Y... à payer une amende de 5.000 euros, sans s'expliquer ni sur les ressources ni sur les charges des prévenus qu'elle devait prendre en considération pour fonder sa décision, quand le jugement n'était pas motivé sur ce point, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes visés au moyen" ;
Vu les articles 132-1 et 132-20, alinéa 2, du code pénal et les articles 485, 512 et 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Qu'il appartient au juge de motiver la peine qu'il prononce en se référant, dans sa décision, aux éléments qui résultent du dossier et à ceux qu'il a sollicités et recueillis lors des débats ; qu'il revient au prévenu, à la demande du juge ou d'initiative, d'exposer sa situation et de produire, éventuellement, des justificatifs de celle-ci ; que lorsque le prévenu n'a pas comparu et n'a pas fourni ni fait fournir d'éléments sur sa situation, il n'incombe pas au juge d'en rechercher d'autres que ceux dont il dispose ;Attendu que, pour condamner M. Z... Y... à 10000 euros d'amende et Mme Jeanine Y... à 5000 euros d'amende avec sursis, l'arrêt retient par motifs adoptés que Mme Y... peut légalement bénéficier du sursis simple et par motifs propres, qu'au regard de la nature des faits et de la persistance des prévenus dans leur activité délictuelle, les peines d'amende prononcées par le premier juge seront confirmées ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans mieux s'expliquer sur les circonstances des infractions et la personnalité des prévenus et sans se référer aux ressources et aux charges qu'elle devait prendre en considération pour fonder sa décision, la cour d'appel ne l'a pas justifiée ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle sera limitée, concernant Mme Jeanine Y... et M. Z... Y..., à la peine d'amende, dès lors que la déclaration de culpabilité et le prononcé de la mesure réelle de remise en état n'encourent pas la censure ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner le troisième moyen proposé :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Agen, en date du 4 mai 2017, en toutes ses dispositions relatives à M. Roger Y... et à ses dispositions relatives aux peines d'amende prononcées à l'encontre de Mme Jeanine Y... et de M. Z... Y..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bordeaux, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Agen et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 11 septembre 2018 n° 17-86.038

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :

--M. Christophe X...,M. Stéphane Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7e chambre, en date du 5 septembre 2017, qui, pour infractions au code de l'urbanisme, a condamné le premier à 25 000 euros et le second à 15 000 euros d'amende, a ordonné la remise en état des lieux sous astreinte et a prononcé sur les intérêts civils ;







La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Z..., conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller Z..., les observations de la société civile professionnelle CÉLICE, SOLTNER, TEXIDOR et PÉRIER, de la société civile professionnelle POTIER DE LAVARDE, BUK-LAMENT et ROBILLOT, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire A... ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire, commun aux demandeurs, et le mémoire en défense produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. X... et M. Y... ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel, du chef de réalisation irrégulière d'affouillement ou d'exhaussement du sol pour avoir surélevé sans autorisation un terrain de plus de deux mètres sur une surface de 4 000 m²; que les juges du premier degré les ont déclarés coupables ; que les parties civiles, les prévenus et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 480-4 du code de l'urbanisme, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, insuffisance de motifs ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré requalifiés les faits visés à la prévention en disant que MM. Y... et X... étaient poursuivis en leur qualité de bénéficiaires des travaux, rejeté les exceptions de nullité soulevées par les prévenus et déclaré MM. Y... et X... coupables des faits « requalifiés » ;
"aux motifs que « Sur la nullité de la procédure : Le fait que des poursuites ne seraient pas dirigées contre les bonnes personnes n'est pas un cas de nullité de cette procédure ; qu'il s'agit d'une question de fond qui, en l'espèce et de surcroît, relève d'une simple insuffisance de la qualification des faits poursuivis ; que l'exécution de travaux en méconnaissance des obligations légales ou en méconnaissance des prescriptions imposées par un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou par la décision prise sur une déclaration préalable est punie d'une amende comprise entre 1 200 euros et un montant qui ne peut excéder () 300 000 euros ; que ces peines peuvent être prononcées contre les utilisateurs du sol, les bénéficiaires des travaux, les architectes, les entrepreneurs ou autres personnes responsables de l'exécution desdits travaux; que la poursuite vise MM. Y... et X... en leur qualité de propriétaires du terrain litigieux ; qu'il est vrai qu'ils ne sont pas les propriétaires de ce terrain qui a été, en définitive, acquis le 9 avril 2010 par la SCI El Dorado ; mais qu' en tant que seuls associés et cogérants de cette SCI, ils sont également et nécessairement les seuls bénéficiaires des travaux entrepris sur ce terrain et, à ce titre, encourent les mêmes sanctions que le propriétaire ou les entrepreneurs ; que cette requalification ayant été mise aux débats et les parties invitées à présenter leurs observations sur ce point, il convient : de requalifier les faits objets de la poursuite en disant que MM. Y... et X... sont poursuivis en leur qualité de bénéficiaires des travaux, de rejeter l'exception de nullité soulevée qui est doublement sans objet (en ce qu'elle n'est pas une exception de nullité et du fait de la requalification) » ;
"alors que la juridiction de jugement qui est saisie in personam, ne peut statuer à l'égard du prévenu qu'en la qualité en laquelle il a été cité, à l'exclusion de toute autre ; qu'en l'espèce, MM. Y... et X... ont été prévenus d'avoir réalisé des travaux sans autorisation d'urbanisme, en leur qualité exclusive de « propriétaires du terrain » ; qu'en déclarant MM. Y... et X... coupables « en leur qualité de bénéficiaires des travaux », sans constater que MM. Y... et X... avaient accepté de comparaître volontairement en cette qualité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen" ;
Attendu que pour rejeter l'exception de nullité de la procédure, l'arrêt énonce que le fait que la procédure soit dirigée contre MM. X... et Y... présentés à tort dans la citation comme propriétaires alors qu'ils sont en réalité les seuls bénéficiaires des travaux, n'est pas une nullité mais une question de fond, que cette requalification a été mise dans le débat et les parties invitées à présenter leurs observations sur ce point et qu'il y a lieu de requalifier les faits de la poursuite ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme prévoit que les peines prévues par ce texte sont applicables, non aux propriétaires en tant que tels, mais aux utilisateurs du sol ou aux bénéficiaires des travaux et que les parties ont été mis en mesure de s'expliquer sur cette qualité, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 421-1, R. 421-23 f), R. 421-19 k), L. 480-4 du code de l'urbanisme dans sa version applicable aux faits de l'espèce, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, défaut de motifs ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a dit que MM. Y... et X... sont poursuivis en leur qualité de bénéficiaires des travaux, rejeté les exceptions de nullité soulevées par les prévenus et déclarés MM. Y... et X... coupables des faits « requalifiés » ;
"aux motifs que « Sur la culpabilité : L'article R. 421-23 f du code de l'urbanisme prévoit que les exhaussements du sol dont la hauteur excède deux mètres et qui portent sur une superficie supérieure ou égale à cent mètres carrés doivent être précédés d'une déclaration préalable, à moins qu'ils ne soient nécessaires à l'exécution d'un permis de construire ; qu'il est soutenu que l'infraction n'est pas caractérisée :- l'élément matériel ne peut être considéré comme démontré en raison de l'absence de précision du procès-verbal d'infraction sur ce point,- les travaux réalisés ne sont pas irréguliers ayant été dûment autorisés par le permis de construire initial délivré le 3 décembre 2007 puis par le second permis accordé le 24 juin 2015 ; que le 13 août 2010 l'agent de police municipale a constaté qu'une, plate-forme de remblais s'agrandissait sur le terrain ; que les photographies jointes aux procès-verbaux d'infraction dressés le 13 août 2010 et le 1er octobre 2010 sont particulièrement explicites puisqu'elles montrent que les remblais occupent une grande partie du terrain (environ 4 000 m² selon l'agent municipal) et dépassent manifestement les deux mètres de haut rapportés à la taille des arbres ou des véhicules stationnés à proximité ; que ces procès-verbaux font foi jusqu'à preuve du contraire que MM. Y... et X... ne rapportent pas ; qu'il convient de rappeler que les gendarmes ont constaté le 24 septembre 2011 que ces exhaussements excédaient 3 mètres de haut établissant ainsi que la situation a perduré après les premiers procès-verbaux et qu'elle s'est même aggravée ; que les procès-verbaux d'infraction sont donc très clairs et ne prêtent pas à discussion ; que les exhaussements réalisés dépassent sans aucune contestation possible les deux mètres de haut et les cent mètres carrés de surface ;que MM. Y... et X... soutiennent :- que les exhaussements ont été autorisés par le permis de construire accordé en 2007 puisque ces exhaussements de 2,50 mètres (ce qui constitue une reconnaissance de leur hauteur) étaient « implicitement » mentionnés sur le permis puisque le terrain présentait un fort dénivelé d'environ 3,50 mètres et que l'exhaussement était nécessaire pour permettre l'exploitation du bâtiment à construire,- qu'en tout état de cause, le nouveau permis de construire qui leur a été accordé le 24 juin 2015 a régularisé la situation,- que la déclaration préalable déposée en juillet 2010 résulte d'une erreur de leur architecte et ne remet pas en cause l'autorisation du permis de construire ;qu'il convient de relever :- que lors de l'acquisition du terrain, la SCI avait accepté sans réserve celui-ci dans sa forme et sa configuration,- qu'elle s'était engagée à y construire un atelier de ferronnerie conformément au permis de construire qui lui serait accordé et conformément aux dispositions du plan d'aménagement de la zone,- qu'aucun terrassement n'apparaît dans la demande de permis de construire déposée par la SCI (permis initial de 2007 et permis modificatif de 2009),- que la construction, d'une superficie hors oeuvre nette de 583,10 m2, devait être implantée dans la partie Nord-Est du terrain et que seule cette partie du terrain devait être déboisée, les végétaux étant préservés sur le reste du terrain (d'une superficie de 5 935m2),- que les plans du permis de construire ne comportent aucune indication d'altimétrie après construction mais que l'engagement de préserver les végétaux sur la partie non construite du terrain et les nombreux arbres dessinés sur cette partie démontrent qu'il n'était pas prévu de modifier l'aspect du terrain,- que la déclaration préalable déposée le 1er juillet 2010 et ayant fait l'objet d'un arrêté de non-opposition autorise la SCI à rehausser le terrain de 0,50 mètres maximum ; qu'il en résulte que, contrairement à ce que soutiennent MM. Y... et X..., les travaux d'exhaussement n'ont pas été déclarés dans le permis de Construire, même « implicitement »; qu'un permis de construire doit en effet être présenté de façon complète et exhaustive ; qu'il doit notamment, ce que ne saurait ignorer leur architecte, - préciser l'état initial du terrain et de ses abords, ainsi que l'organisation et l'aménagement des accès au terrain et aux constructions et aires de stationnement, - comprendre un plan de masse faisant apparaître les travaux extérieurs aux constructions, - comprendre un plan de coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain, ce plan devant faire apparaître l'état initial et l'état futur lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain ; que force est de constater que l'absence de ce plan et la préservation des végétaux initialement prévue démontrent qu'aucun exhaussement ne devait être entrepris sur ce terrain ; que seul a été accordé par la déclaration préalable de juillet 2010 le droit de rehausser le terrain de 0,50 mètres maximum ; que. M. Y... qui a déposé cette déclaration préalable, tout comme M. X... qui a transmis l'arrêté de non-opposition aux enquêteurs lorsqu'il a été entendu, savaient parfaitement que ce type de travaux devait être préalablement déclaré et autorisé ; qu'ils ne peuvent pas plus soutenir que le plan de la ZAC les autorisait à réaliser des exhaussements sans aucune limite de hauteur ; que l'article ZA2 du programme d'aménagement de la ZAC permet en effet « les affouillements et exhaussements de sol nécessaires aux travaux de construction et à l'aménagement des abords à la condition que l'écoulement des eaux superficielles et souterraines soit assuré de façon telle qu'il n'en résulte aucun dommage sur le fonds voisin » ;que les exhaussements sont donc autorisés mais à la double condition :- qu'ils soient nécessaires : or rien ne justifiait de rehausser de 2,50 mètres l'intégralité du terrain quand bien même il était en pente,- que ces exhaussements ne gênent pas l'écoulement des eaux superficielles et souterraines et ne créent pas de dommage sur le fonds voisin, ce qui n'était pas le cas puisque l'agent de police a constaté, notamment le 13 août 2010, que des coulures de boue s'étalaient sur 50 mètres environ sur la parcelle voisine ; et qu'en tout état de cause, les exhaussements définis par le programme d'aménagement de la ZAC devaient également et avant tout respecter les prescriptions légales et faire l'objet d'une déclaration préalable qui n'a pas été faite (ou de façon plutôt édulcorée) ; que le procès-verbal établi par un huissier le 20 janvier 2012, hors période de prévention, à la demande des prévenus et dans les conditions définies par eux, ne peut remettre en cause :- ni le fait que ces exhaussements n'étaient pas mentionnés dans le permis de construire et n'ont fait l'objet d'aucune déclaration préalable,- ni les constatations faites par les photographies prises par l'agent de police municipale ; que l'autorisation de réaliser de tels exhaussements n'a jamais été sollicitée et ils ont donc été réalisés en toute illégalité. Il est rappelé que, lors du dépôt de la demande de permis de construire, M. Y... s'était engagé à ne pas abattre les arbres se trouvant sur ce terrain à l'exception des arbres situés sur l'emprise de la construction et à apporter « un soin particulier » pour préserver les végétaux existant ; que les photographies jointes aux procès-verbaux d'infraction montrent effectivement le soin particulier qui a été déployé pour détruire toute la végétation du terrain en l'utilisant comme station de concassage et ce, sans avoir obtenu l'autorisation d'utiliser ce terrain comme installation classée ; que ces faits sont à l'origine d'une autre procédure pénale ayant conduit à la condamnation de M. X... et d'une procédure administrative entamée par la CCIT du Var aux fins de faire annuler la cession du terrain ; que MM. Y... et X... ont été les incontestables bénéficiaires de ces travaux qui leur ont permis à tous les deux d'aplanir un terrain en sachant parfaitement qu'ils n'en avaient pas le droit, ne serait-ce qu'en déposant en juillet 2010 une déclaration préalable loin de dévoiler la réalité des travaux effectivement entrepris sur le terrain ; que l'infraction est donc caractérisée et MM. Y... et X... seront retenus dans les liens de la prévention telle que redéfinie ci-dessus » ;
"alors que les exhaussements liés à l'exécution de travaux autorisés par un permis de construire ne sont pas soumis à une autorisation distincte ; que le permis de construire est délivré par le maire au regard de l'ensemble des informations et éléments produits à l'appui du dossier de demande et que la lacune d'un document peut être comblée par un autre ; qu'en l'espèce, il résultait du plan topographique du dossier de demande de permis de construire délivré le 3 décembre 2007, que le terrain d'assiette du projet de construction présentait un dénivelé de plus de trois mètres et il résultait des plans de coupe et de façades des constructions que le projet était implanté sur une plate-forme parfaitement horizontale ; qu'il résultait donc de la combinaison de ces plans que des exhaussements étaient indispensables à l'exécution du projet, de sorte qu'en délivrant le permis de construire le bâtiment, le maire avait nécessairement autorisé les exhaussements indispensables à l'édification du bâtiment autorisé ; qu'en considérant toutefois que les exhaussements avaient été réalisés en toute illégalité en l'absence d'autorisation adéquate, la cour a violé les textes visés au moyen" ;
Attendu que pour déclarer les prévenus coupables d'exécution de travaux d'exhaussement du sol sans autorisation, l'arrêt énonce que lesdits exhaussements portant sur une surface de 4 000 m² n'étaient pas mentionnés, même implicitement, dans la demande de permis de construire, lequel, devant être présenté de façon complète et exhaustive, aurait dû être accompagné d'un plan de masse et d'un plan de coupe, que l'absence de ce plan et la préservation des végétaux montrent qu'aucune surélévation n'était prévue, que ces travaux n'ont pas fait l'objet d'une déclaration préalable, que rien ne justifiait de rehausser de 2,50 m l'intégralité du terrain et que les prévenus savaient d'autant plus qu'ils n'en avaient pas le droit qu'ils ont déposé en juillet 2010 une déclaration portant sur un exhaussement de 0,50 m sur 5 935 m² ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'elle a souverainement apprécié que le permis de construire n'avait pu autoriser les travaux d'exhaussement du sol compte tenu du caractère incomplet de la demande sur lequel il était fondé, la cour d'appel a justifié sa décision et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'exécution de travaux d'exhaussement sans autorisation dont elle a déclaré les prévenus coupables ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en cause l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause et les moyens de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 421-1, R. 421-23 f), R. 421-19 k), L. 480-4, L. 480-5 et L. 480-7, L. 480-13 du code de l'urbanisme dans sa version applicable aux faits de l'espèce, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, insuffisance de motifs ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué, après avoir déclaré MM. Y... et X..., ès-qualité de bénéficiaires des travaux, a ordonné à leur encontre la mise en conformité des lieux, sous astreintes ;
"aux motifs que « Sur la mesure de restitution : Contrairement à ce que soutiennent MM. Y... et X..., le permis de construire déposé par eux le 24 juin 2015 n'a pas régularisé « la première situation» puisque ce nouveau permis, comme le précédent, ne prévoit pas l'exhaussement de tout le terrain mais seulement un rehaussement sous le bâtiment à construire ; qu'aussi, en l'état, et indépendamment de la procédure qui est actuellement pendante devant la Cour administrative d'appel puisque la CCIT a obtenu la résolution de la vente du terrain litigieux, il apparaît que la situation n'est pas régularisée et que, de surcroît, selon le dernier constat dressé le 13 décembre 2016, la SCI Eldorado persiste à déposer de nouveaux matériaux sur le terrain ; qu'aussi, en l'état de cette parfaite mauvaise foi, il convient d'ordonner à l'encontre de MM. Y... et X... la remise en état des lieux en leur état antérieur dans un délai d'un an à compter du jour où le présent arrêt sera définitif et ce, sous astreinte de 75 euros par jour de retard passé ce délai ; qu'il est rappelé que MM. Y... et X... seront, si l'astreinte devait être exigible, tenus in solidum au paiement de celle-ci» ;
"alors que lorsque des travaux ont été réalisés irrégulièrement sans autorisation, la délivrance ultérieure d'une autorisation, si elle ne fait pas disparaître l'infraction consommée, fait obstacle à une mesure de démolition ou de remise en état des lieux ; que lorsque les travaux irrégulièrement réalisés sont partiellement régularisés, il incombe au juge d'en tenir compte et de n'ordonner une remise en état que pour la partie des travaux qui n'a pas fait l'objet d'une régularisation ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le permis de construire délivré le 24 juin 2015 prévoyait « un rehaussement sous le bâtiment à construire », de sorte qu'une partie des travaux d'exhaussement était régularisée, ce qui faisait obstacle au prononcé de la peine complémentaire de remise en état de tout le terrain d'assiette ; qu'en ordonnant toutefois une remise en état des lieux dans leur état antérieur, sans limiter cette remise en état aux exhaussements non régularisés, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les textes visés au moyen" ;Attendu que, pour ordonner une mesure de restitution l'arrêt énonce que le permis de construire du 24 juin 2015 n'a pas régularisé la situation puisque ce permis, comme le précédent, ne prévoit pas d'exhaussement du terrain, d'une surface de 5 935 m², mais seulement un rehaussement sous le bâtiment à construire d'une surface de 583 m² ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'elle a constaté que le nouveau permis de construire n'avait pas eu pour effet de régulariser la situation, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des L. 480-4 du code de l'urbanisme, 132-20 du code pénal, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, violation de la loi, insuffisance de motifs ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné M. Y... à une amende de 15 000 euros et M. X... à une amende de 25 000 euros ;
"aux motifs que « Sur la peine Le casier judiciaire de M. Y... porte mention, outre une condamnation à une amende prononcée par le tribunal d'instance de Toulon pour des faits de pêche sous-marine de loisirsans signaler sa présence par une bouée (26 août 2016), de quatre condamnations prononcées par le tribunal correctionnel de Toulon :- le 7 janvier 2003, pour non production de dossier ordonnant la fermeture d'une installation classée exploitée, exploitation d'une activité sans autorisation de l'autorité requise, non-respect de l'état d'un site d'activité,- le 13 octobre 2003, pour vol aggravé par deux circonstances et vol en réunion,- le 9 avril 2004, pour violences avec usage ou menace d'une arme (ITT inférieure à 8 jours),- le 15 février 2010, pour recel de biens en récidive ; que compte tenu de la nature et de la gravité des faits, d'une part, et, d'autre part, de la personnalité de M. Y... telle qu'elle ressort de la procédure et de ses antécédents judiciaires dont il ne tient aucun compte, il sera condamné à une amende de 15 000 euros ; que le casier judiciaire de M. X... fait état de cinq condamnations prononcées par le tribunal correctionnel de Toulon :- le 27 septembre 2010, pour embauche de salarié sans déclaration préalable,- le 18 novembre 2011, pour prise illégale d'intérêts par dépositaire de l'autorité publique dans une affaire dont il assure l'administration ou la surveillance,- le 16 avril 2012, pour emploi de travailleur à une activité comportant des risques d'exposition à l'amiante sans respect des règles de prévention,- le 18 février 2013, pour conduite sous l'empire d'un état alcoolique, mise en danger d'autrui, excès de vitesse d'au moins 50 km/h,- le 27 mai 2015, pour exploitation non autorisée d'une installation classée pour la protection de l'environnement ; que compte tenu tant de la nature et de la gravité des faits d'une part, de la personnalité de M X... d'autre part, telle qu'elle ressort de la procédure mais également de ses antécédents judiciaires, il sera condamné à une amende de 25 000 euros » ;
"alors qu'en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte des ressources et de ses charges ; qu'en condamnant MM. Y... et X... à une amende respectivement de 15 000 et 25 000 euros sans motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de ses auteurs et sans tenir compte de leurs ressources et de leurs charges, la cour d'appel n'a pas justifié celle-ci" ;
Attendu que pour condamner les prévenus à des peines d'amende, l'arrêt énonce que M. X... était le gérant de la société CMTP, spécialisée dans les travaux de terrassement qui employait 45 personnes, qu'il percevait un salaire de 5 000 euros, que son casier judiciaire fait état de cinq condamnations, qu'Il est divorcé et a trois enfants à charge, est actuellement directeur d'exploitation d'une société de transport et perçoit une rémunération mensuelle de 1 800 euros ; que les juges ajoutent que M. Y... a fait l'objet de quatre condamnations et que, compte tenu de la nature et de la gravité des faits et de leur personnalité telle qu'elle ressort de la procédure mais également de leur casier judiciaire, M. X... sera condamné à une amende de 25 000 euros et M. Y... à une amende de 15 000 euros ;
Attendu qu'en statuant ainsi par des motifs qui satisfont aux exigences des articles 132-1 et 132-20 du code pénal, et dès lors que, d'une part, les peines d'amende son déterminées en fonction des éléments du dossier de la procédure, d'autre part, M. Y..., appelant d'une condamnation à 15.000 euros d'amende, n'a pas justifié de ses revenus et de ses charges devant la juridiction du second degré, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
REJETTE le pourvoi ;
Fixe à 2 000 euros la somme que MM. Christophe X... et Stéphane Y... devront verser à la chambre de commerce et d'industrie du Var au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 11 septembre 2018 n° 16-81.766

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. Rachid X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre coererctionnelle, en date du 16 février 2016, qui, pour exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi, l'a condamné à 1 000 euros d'amende, un mois de suspension du permis de conduire et a prononcé sur les intérêts civils ;










La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Y..., conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller Y..., les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et BOUCARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Z... ;
Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Rachid X..., chômeur en fin de droits, a été contrôlé à deux reprises alors qu'il transportait des passagers pris en charge grâce à l'application Uberpop ; que poursuivi du chef d'exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi, il a été déclaré coupable ; que le prévenu et le ministère public ont relevé appel de cette décision ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 88-1 de la Constitution, 8 de la directive 98/34/CE du 22 juin 1998, 111-4 du code pénal, L. 3120-2, L. 3121-1, L. 3121-11, L. 3124-4, R. 3124-11 du code des transports, 388, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi et l'a condamné pénalement et civilement ;
"aux motifs que le 15 février 2015 à 02h30, alors qu'il conduisait son véhicule de marque Citroën C4 Picasso, immatriculé DC-81 I-TF, M. X... a été contrôlé par les agents de police judiciaire de l'unité de la sécurité routière de Bordeaux qui étaient en mission de lutte contre la délinquance routière dans le secteur du [...] ; qu'à bord du véhicule, se trouvait une passagère en la personne de Mme Caroline A... ; qu'interrogée par les agents de police, cette dernière a immédiatement indiqué avoir contacté le conducteur du véhicule par le biais de l'application Uberpop ; que conduit au commissariat, M. X... a reconnu se livrer au transport onéreux de personnes via l'application Uberpop sans être titulaire ni d'une autorisation de stationnement, ni d'une licence professionnelle ; qu'une semaine après cette première interpellation, M. X... a fait l'objet d'un second contrôle le 22 février 2015, les enquêteurs ont immédiatement reconnu le véhicule comme étant celui de M. X... avant fait l'objet d'un précédent contrôle qu'alors qu'ils le suivaient ce dernier s'est arrêté pour prendre en charge une personne, décidant ainsi les agents à procéder au contrôle du véhicule ; que le passager/client, M. Martin B..., a immédiatement reconnu avoir contacté M. X... par l'intermédiaire de l'application Uberpop ; qu'en une semaine, M. X... s'est donc fait contrôler à deux reprises par les services de police ; qu'à l'audience de la cour, le prévenu par le truchement de son avocat fait plaider et conclure à sa relaxe ; que M. X... soutient en substance que l'appellation de taxis ne peut être attribuée qu'à des véhicules remplissant les conditions d'être munis d'équipements spéciaux et d'un terminal de paiement ; qu'en outre l'activité, qu'il lui est reproché d'avoir exercé ne ressortait nullement de celle que la loi attache à l'autorisation de stationnement ; que l'activité protégée est limitée à la quête de clientèle sur la voie publique et le prévenu n'a nullement exercé une telle activité ; que l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-11 du code des transports permet aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle dans leur commune de rattachement (et) dans une commune faisant partie d'un service commun de taxis (...) » ; que cette autorisation administrative permet ainsi, et c'est là sa finalité première, la quête de clientèle sur la voie publique, cela que l'on soit à l'arrêt à un emplacement signalisé ou que l'on circule en pouvant être hélé par un passant à la recherche d'une voiture de place, mais elle ne réserve, en aucun cas aux taxis le monopole du transport particulier des personnes et de leurs bagages à titre onéreux ; que le Conseil constitutionnel l'a explicitement admis dans une décision du 17 octobre 2014, qui se prononce sur le champ de la protection accordée aux taxis telle qu'attachée à l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 312 1-1 susvisé ; que le monopole du stationnement sur la voirie ne signifie pas monopole de transport ; qu'il ne porte que sur le moyen d'attirer la clientèle, comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel au profit des motos taxis (Cons. const., déc. 7 juin 2013, n°2013-318 QPC ; que la maraude est un droit réservé aux taxis ; qu'il convient vient toutefois de relever que depuis la loi Thévenoud du 1er octobre 2014, l'article L. 3120-2 du code des transports prévoit en son point III qu'est un acte prohibé « 1° le fait d'informer un client, avant la réservation mentionnée au 1° du II du présent article, quel que soit le moyen utilisé, à la fois de la localisation et de la disponibilité d'un véhicule mentionné au I quand il est situé sur la voie ouverte à la circulation publique sans que son propriétaire ou son exploitant soit titulaire d'une autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 » et que le conseil constitutionnel dans une décision n° 2015-468/469/472 QPC du 22 mai 2015, a validé ce que l'on dénomme le maraudage électronique, désormais autorisé pour les seuls taxis, en considérant que le législateur avait entendu, pour les motifs d'ordre public de police de la circulation et du stationnement, garantir l'effectivité de leur monopole légal qui découle du fait lorsqu'ils ont seuls la possibilité de stationner sur la voie publique et d'y circuler en quête de clients ; qu'à partir du moment où le maraudage électronique est autorisé aux seuls taxis et découle de l'autorisation de stationnement qui leur est délivré, il doit être considéré que le fait de se livrer à un tel maraudage en circulant sur la voie publique est constitutif de l'infraction d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi, cela alors même que le véhicule piloté ne correspondrait pas à la définition du taxi, telle qu'elle résulte des articles L. 3121, R. 3121 et R. 3121-7 du code des transports ; qu'à cet égard, on considère en effet habituellement qu'adopter un comportement qui n'est permis que par une autorisation professionnelle spécifique accordée à une profession, sans être détenteur d'une telle autorisation, revient à s'arroger les prérogatives de cette profession et à l'exercer illégalement, cela même si le véhicule conduit est, par exemple un VTC (cf. crim 27 octobre 2015 pourvoi: 14-84134) ; qu'il est très précisément reproché au prévenu d'avoir à Bordeaux exercé illégalement l'activité d'exploitant de taxi en l'espèce sic «en effectuant, à la demande de la clientèle le transport particulier des personnes et de leurs bagages à titre onéreux, ou en attendant à cette fin la clientèle sur la voie publique, sans être titulaire de l'autorisation de stationnement délivrée par l'autorité compétente», délit défini par les articles L. 3124-4, § 1, 3121-1 3121-11, R. 3121-5, R. 3121-9 du code des transports, selon l'article L. 3124-4 du code des transports est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende le fait d'effectuer à la demande et à titre onéreux le transport particulier de personnes et de bagages sans être titulaire d'une autorisation de stationnement sur la voie publique en attente de clientèle, ou d'exercer l'activité de conducteur de taxi sans être titulaire de la carte professionnelle en cours de validité ; qu'aux termes de l'article L. 3121-11 du code des transports, texte, notamment, visé par la poursuite et ensuite modifié par la loi 2015-990 du 6 août 2015, la définition de l'autorisation visée par l'article était la suivante : "l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du présent code permet aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle (c'est le maraudage) dans leur commune de rattachement.... En dehors du ressort de l'autorisation de stationnement, les conducteurs de taxis sont soumis à l'article L. 3120-2 du présent code, notamment s'agissant de la prise en charge de la clientèle sur la voie ouverte à la circulation publique sous réserve de justification d'une réservation préalable" ; qu'il n'est pas fait allusion au maraudage électronique visé à l'article L. 3120-2 du code des transports en son point III auquel le titulaire de l'autorisation de stationnement peut, désormais, depuis la loi Thevenoud, seul recourir et qui permet de garantir réflectivité du monopole à lui conféré, le client n'est certes pas trouvé sur la voie publique et ne hèle pas le taxi depuis cette voie l'article L. 3120-2 susvisé a été à toutes fins mis dans les débats par la cour mais il doit être considéré que ce visa était superfétatoire à partir du moment où le maraudage électronique n'est rien d'autre qu'un type de maraudage qui, dans sa globalité, relève du monopole découlant de l'autorisation qu'il faut détenir pour s'y livrer ; que se livrer au maraudage électronique, lorsqu'on n'a pas d'autorisation, c'est s'arroger abusivement une prérogative découlant de cette autorisation, ce qu'entend réprimer l'article L. 3124-4 du code des transports ; qu'en conséquence, c'est à bon droit que le tribunal a déclaré le prévenu coupable des faits à lui reprochés ;
"1°) alors que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article L. 3224-4 du code des transports, applicable depuis le 3 octobre 2014, incrimine le fait d'exercer l'activité d'exploitant de taxi sans être titulaire de l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du même code ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a condamné le prévenu pour exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxis, en relevant que si l'activité de transport de particuliers à titre onéreux n'était pas un monopole des exploitants de taxis, ce qui ne permettait pas de retenir le délit, en revanche l'article L. 3120-2 III interdisant l'utilisation d'un système de localisation et de disponibilité d'un véhicule de transports sans être muni d'une autorisation de stationnement constituait un monopole des conducteurs de taxis dont le non-respect entrait dans le cadre de l'incrimination ; que l'interdiction d'utiliser un système de localisation et de disponibilité d'un véhicule de transport de particuliers s'appliquant non seulement aux personnes qui ne sont pas titulaires d'une autorisation de stationnement mais également aux conducteurs de taxis circulant hors du ressort de leur autorisation de stationnement et la méconnaissance d'une telle interdiction n'impliquant en elle-même aucun acte d'exploitation d'un véhicule de transport de particuliers, faute de viser la prise en charge de passagers, le non respect de cette interdiction n'entre pas dans le cadre du délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi ; qu'ainsi, la cour d'appel a méconnu les articles 111-4 du code pénal, L. 3120-2 III et L. 3224-4 du code des transports ;
"2°) alors que l'article R. 3124-11 du code des transports incriminait spécialement le non-respect du III de l'article L. 3120-2, à l'époque des faits ; qu'en retenant à l'encontre du prévenu le fait d'avoir méconnu l'interdiction de l'article L. 3120-2 III du code des transports, la cour d'appel aurait dû constater que ce fait n'était constitutif que de la contravention de l'article R. 3124-11 du code des transports ; que cet article R. 3124-11 ayant été annulé par le Conseil d'Etat, l'arrêt attaqué ne trouve plus de base légale et doit être annulé ;
"3°) alors qu'il appartient au juge répressif d'écarter l'application d'un texte de droit interne fondant des poursuites lorsque ce dernier méconnaît une disposition du Traité de fonctionnement de l'Union européenne ou un texte pris pour l'application de celui-ci ; qu'à supposer le délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi caractérisé en présence de la méconnaissance de l'interdiction d'utiliser un système de localisation et disponibilité en circulant sur la voie publique, sans autorisation de stationnement, prévu par l'article L. 3120-2 du code des transports, la cour d'appel aurait du laisser inappliquée cette disposition, en tant qu'elle comportait des modifications de règles techniques applicables aux transports de particuliers qui n'avaient pas été adoptées conformément à la procédure prévue l'article 8 de la directive 98/34/CE, imposant aux Etats membres d'informer la Commission européenne de tout projet de norme ou réglementation technique en matière de services d'information afin de lui permettre d'émettre un avis, voire de proposer l'adoption d'une directive en ce domaine ; qu'ainsi, la cour d'appel a méconnu l'article 8 de la directive précitée et l'article 88-1 de la Constitution ;
"4°) alors que les juges ne peuvent statuer que sur les faits visés à la prévention ; que l'acte de prévention visait le fait d'exercer une activité de transports de particuliers « en attendant à cette fin la clientèle sur la voie publique » ; que l'interdiction de stationner ou de circuler sur la voie publique, en utilisant un système de localisation et de disponibilité de son véhicule, en l'absence d'une autorisation administrative de stationnement, n'étant pas visée à la prévention, laquelle ne renvoyait en outre aucunement à la méconnaissance de l'article L. 3120-2 III du code des transports au titre des textes de répression, en condamnant le prévenu pour utilisation d'un tel système de localisation et de disponibilité de son véhicule, sans autorisation de transport, la cour d'appel a méconnu l'article 388 du code de procédure pénale ;
"5°) alors qu'à supposer que la méconnaissance de l'interdiction prévue par l'article L. 3120-2 III 1° du code des transports soit constitutive du délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxis, le délit n'est caractérisé que s'il est établi d'une part, que le conducteur du véhicule, non titulaire d'une autorisation administrative de circuler sur la voie publique, utilisait une application permettant aux personnes souhaitant réserver un véhicule d'en connaître la localisation et la disponibilité et d'autre part, que ce conducteur utilisait une telle application alors qu'il circulait ou attendait sur la voie publique ; qu'en n'expliquant pas en quoi l'application Uberpop que le prévenu utilisait constituait un système de localisation et d'indication de la disponibilité des véhicules, tel que défini à l'article L. 3120-2 III du code des transports, et ce, quand pourtant le prévenu contestait le fait qu'ait été apportée la moindre preuve en ce sens, en faisant état de constats d'huissier tendant à établir que l'application Uberpop n'était pas un système de localisation et de disponibilité des véhicules, dès lors que cette application permettait certes de connaître la position des véhicules qui y étaient connectés, mais ne comportait aucune information sur leur disponibilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"6°) alors qu'enfin et par ailleurs, en ne recherchant pas si le prévenu avait utilisé une application telle que définie par l'article L. 3120-2 III 1° du code des transports pendant qu'il se trouvait sur la voie publique, aux fins de trouver des clients, quand elle relevait seulement qu'il avait pris, deux fois, en charge des passagers qui avaient indiqué l'avoir contacté par l'application Uberpop, avant que le véhicule ne soit intercepté, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;
Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu qu'une réglementation nationale, qui sanctionne pénalement le fait d'organiser un système de mise en relation de clients et de personnes qui fournissent des prestations de transport routier de personnes à titre onéreux avec des véhicules de moins de dix places au moyen d'une application pour téléphone, sans disposer d'une habilitation à cet effet, porte sur un service dans le domaine des transports et est exclu du champ d'application de l'article 56 du Traité sur le fonctionnement de l'union européenne et de l'article 1er de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, modifiée par la directive 98/48/CE, prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information, tel que ces dispositions ont été interprétées par les décisions C-434/15 du 20 décembre 2017 et C-320/16 du 10 avril 2018 de la Cour de Justice de l'Union européenne ;
D'où il suit que le grief n'est pas fondé ;
Sur le moyen, pris en ses autres branches :
Attendu que pour déclarer le prévenu coupable d'exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi, l'arrêt énonce, par motifs adoptés, que M. X..., chômeur en fins de droit, a signé un contrat fin 2014 avec la société Uber, a fait l'objet de deux contrôles les15 et 22 février 2015, après avoir pris en charge des passagers au centre ville de Bordeaux qui avaient commandé leur course via l'application Uberpop et a déclaré initialement faire onze courses par nuit à raison de trois à quatre nuits par semaine et ne se considérer ni comme un chauffeur de taxi, bien qu'il soit inscrit au Siret sous la rubrique «transport de personnes par taxi» ni comme un chauffeur de véhicule de véhicule de transport avec chauffeur et n'a produit aucun document attestant qu'il était en droit d'exercer ces activités, ni d'autorisation de stationnement ; que les juges ajoutent que M. X..., qui a reconnu se livrer au transport de particuliers à titre onéreux, stationne sur la voie publique pour prendre des passagers, que la société Uber incite les chauffeurs utilisant l'application Uberpop à marauder dans le centre ville de Bordeaux et que, domicilié à dix kilomètres du centre de cette ville, il doit nécessairement stationner en ville dans l'attente de ses courses et qu'il a déclaré lui même se trouver à la gare Saint-Jean lorsqu'il a reçu commande de la seconde course ;
Attendu que, par ces seuls motifs qui établissent que le prévenu était en quête de clientèle sur une voie ouverte à la circulation publique sans être titulaire d'une autorisation de stationnement, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses première, deuxième, quatrième, cinquième et sixième branche, ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-1 et 132-20 du code pénal, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X..., à titre de peine complémentaire, à la suspension de son permis de conduire pendant deux mois ;
"aux motifs qu'en considération de la situation personnelle du prévenu qui n'a jamais été condamné, de la période limitée de commission des faits, la cour réforme le jugement sur la peine et inflige au prévenu une amende de 1 000 euros et la suspension du permis de conduire pendant un mois ;
"alors qu'il résulte des articles 132-1, 132-20 alinéa 2 du code pénal et 485 du code de procédure pénale qu'en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; que la cour d'appel a condamné le prévenu, à titre de peine complémentaire, à la suspension de son permis de conduire pendant un mois, sans aucunement motiver la peine prononcée au regard de la situation personnelle du prévenu, la référence à l'absence de condamnation visant en réalité la personnalité du prévenu ; qu'elle a ainsi méconnu les articles précités" ;
Attendu que pour condamner le prévenu à une peine d'amende et de suspension de permis de conduire, l'arrêt attaqué énonce, par motifs propres et adoptés, que le prévenu, chômeur en fin de droits, est propriétaire d'une Citroën Picasso, qu'il effectue du transport de personnes à titre onéreux sans être déclaré, qu'il a refusé de fournir tout document sur les revenus tirés de son activité sur les recommandations de son conseil, que la concurrence déloyale causée par les chauffeurs Uberpop qui travaillent en toute illégalité, crée une concurrence déloyale, un trouble à l'ordre économique et un trouble à l'ordre public, que le délit est puni de peines sévères d'emprisonnement d'amende et de suspension de permis de conduire, et que, compte tenu de la gravité des faits et de sa personnalité du prévenu, qui n'a jamais été condamné, et de la période limitée de commission des faits, il y a lieu, de ramener la peine de 3 000 euros d'amende dont 1 000 euros avec sursis et quatre mois de suspension de permis de conduire infligée en première instance à 1 000 euros d'amende et un mois de suspension de permis de conduire ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'elle a motivé les peines au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 2131-3, L. 2132-3, R. 2131-1 du code du travail, 2 et 591 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'action civile du Syndicat autonome des artisans taxis 33 et a condamné le prévenu à verser à ce syndicat la somme de 500 euros à titre d'indemnisation, 500 euros à titre d'indemnité procédurale et 300 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
"aux motifs que quant au syndicat autonome des artisans taxis 33, cette organisation justifie, par production en délibéré en respectant le principe de la contradiction, du cahier administratif qui recense l'ensemble des réunions et délibérations, que depuis près de dix ans, le Conseil Syndical n'est plus élu mais seul le Bureau (qui est une instance qui en découle) fait l'objet d'un vote lors des Assemblées Générales de ce Syndicat ; que le précédent président du syndicat autonome des artisans taxi de Bordeaux et de la Gironde explique par attestation que le syndicat fonctionne en formation de bureau syndical qui est de fait conseil syndical pour toutes les décisions et actions en justice à mettre en oeuvre ; qu'au surplus, la lecture des statuts de ce syndicat montre que le Bureau est l'émanation du Conseil et qu'il a pour tâche statutaire de subvenir aux besoins administratifs et immédiats des adhérents ; que dans ces conditions la décision prise le 11 juin 2015 par les membres du bureau mandatant la présidente aux fins d'agir en justice dans toutes les procédures est conforme aux statuts de cette organisation de sorte que la constitution de partie civile est recevable sur le fond, en considération du préjudice effectivement et directement subi par ces organisations syndicales qui chacune pour qui les concerne a pour objet de défendre et représenter les exploitants taxis notamment en présence de concurrence déloyale ou d'exercice illégal de la profession de taxi, la cour réforme le jugement entrepris et alloue à chacune des parties civiles la somme de 500 euros ; que l'indemnité procédurale en première instance est minorée à 500 euros pour chacune des parties civiles ;
"alors que ne peuvent agir en justice au nom d'un syndicat professionnel que les personnes qui y sont habilitées par les statuts, ou celles qui reçoivent un mandat exprès de l'organe habilité statutairement ; que pour rejeter le moyen invoquant l'irrecevabilité de l'action du Syndicat, remarquant que la présidente qui agissait en son nom n'était pas habilité par le conseil syndical conformément aux statuts, puisqu'elle prétendait fonder son mandat sur une décision du bureau syndical, la cour d'appel a relevé que le bureau était l'émanation de fait du Conseil syndical et qu'il avait pour tâche statutaire de subvenir aux besoins administratifs et immédiats des adhérents ; qu'en l'état de tels motifs qui ne constataient pas que le bureau était statutairement habilité à agir en justice, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale" ;
Vu l'article L. 2132-3 du code du travail ;
Attendu qu'il se déduit de ce texte que seuls disposent du droit d'ester en justice les représentants des syndicats tirant ce pouvoir, soit des statuts, soit d'un mandat exprès régulier ;
Attendu que pour déclarer recevable la constitution de partie civile du Syndicat autonome des artisans taxis, contestée par le prévenu aux motifs que le président de cette structure n'avait pas été autorisé à ester en justice par le conseil syndical en application de l'article 11 des statuts, l'arrêt énonce que depuis dix ans le conseil syndical n'est plus élu mais seulement le bureau qui en découle, que le bureau est l'émanation du Conseil, et que la décision du 11 juin 2015 du bureau syndical mandatant la présidente pour agir en justice est conforme aux statuts de cette organisation, de telle sorte que la constitution de partie civile est recevable ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale :
Attendu que les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel ; que la déclaration de culpabilité étant devenue définitive, par suite du rejet de ses premier, deuxième, troisième et quatrième moyens de cassation, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande de l'Union des taxis ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 16 février 2016, mais en ses seules dispositions civiles relatives au Syndicat autonome des artisans taxis, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Dit que la constitution de partie civile du Syndicat autonome des artisans taxis est irrecevable ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
FIXE à 2 000 euros la somme que M. Rachid X... devra payer à l'Union nationale des taxis au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 11 septembre 2018 n° 16-81.762

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. B... Z... ,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 16 février 2016, qui, pour travail dissimulé et exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi, l'a condamné à 2 000 euros d'amende, deux mois de suspension du permis de conduire et a prononcé sur les intérêts civils ;









La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 juin 2018 où étaient présents : M. Soulard, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, Mme Dreifuss-Netter, M. Fossier, Mmes Schneider, Ingall-Montagnier, M. Lavielle, conseillers de la chambre, Mmes Harel-Dutirou, Guého, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Cordier ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller Bellenger, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et BOUCARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Cordier ;
Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur la recevabilité du mémoire complémentaire ;
Attendu que le mémoire produit le 3 mars 2017, après le dépôt du rapport, est irrecevable en application de l'article 590 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que M. B... Z... a été poursuivi devant le tribunal correctionnel des chefs d'exercice d'un travail dissimulé et d'exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi pour avoir notamment pris en charge trois passagers sur la voie publique qui l'avaient contacté à l'aide de l'application Uberpop ; que les juges du premier degré l'ont déclaré coupable ; que le Syndicat autonome des artisans taxis et l'Union nationale des taxis, parties civiles, le prévenu et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;
En cet état :
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, 551, 565 et 591 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la citation à comparaître de M. Z... ;
"aux motifs que quant à la citation, force est de constater que la rédaction de la citation relative au travail dissimulé expressément reprise par les premiers juges dans leur motivation correspond au libellé de l'incrimination telle qu'elle résulte de la loi applicable et énonce la période de commission des faits reprochés, le lieu, et l'ensemble des textes répressifs de sorte que le prévenu était en mesure d'organiser sa défense ;
"et aux motifs éventuellement adoptés que la citation ainsi rédigée est suffisamment précise d'autant que le prévenu s'est expliqué dans ses auditions sur la déclaration des revenus tirés de cette activité, le rejet de son dossier par l'URSSAF ;
"1°) alors que selon les articles préliminaire et 551 du code de procédure pénale ainsi que 6, 1 et 3, a de la Convention européenne des droits de l'homme, d'une part, la citation doit énoncer le fait poursuivi et viser le texte de loi qui le réprime, d'autre part, tout prévenu a le droit d'être informé avec certitude et précision de la nature et de la cause de la prévention dont il est l'objet ; que dans les conclusions déposées par le prévenu, il était soutenu que la citation à comparaître était nulle en tant qu'elle visait le travail dissimulé, faute de préciser quelles obligations déclaratives étaient en cause, à l'égard de quels organismes et dans quels délais de telles déclarations devaient être effectuées ; que, pour rejeter le moyen de nullité de la citation, la cour d'appel a estimé que dès lors que la citation reprenait le texte d'incrimination et précisait la date des faits, elle était suffisamment précise ; qu'ainsi, dès lors qu'elle constatait que la citation se contentait de reprendre les termes de l'incrimination, sans plus de précision, la cour d'appel a méconnu les dispositions précitées ;
"2°) alors qu'en estimant par motifs éventuellement adoptés que le prévenu savait nécessairement qu'il était poursuivi pour défaut de déclaration de son activité à l'URSSAF, dès lors qu'il avait été interrogé sur ce point au cours de l'enquête, quand de telles questions ne constituaient aucunement la notification officielle de l'objet des poursuites, la cour d'appel a encore méconnu les dispositions précitées" ;
Attendu que, pour rejeter le moyen pris de la nullité de la citation, l'arrêt retient que la citation énonce l'incrimination telle quelle résulte de la loi applicable, et indique la date et le lieu des faits et l'ensemble des textes répressifs de sorte que le prévenu était en mesure d'organiser sa défense ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que le prévenu n'a pu se méprendre sur la portée de la citation et a pu préparer utilement sa défense en déposant des conclusions argumentées sur chacun des délits qui lui étaient reprochés, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 61-1, 385, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler le procès-verbal d'audition de M. Z..., entendu comme suspect, et de la procédure subséquente ;
"aux motifs que les énonciations du jugement attaqué mettent la cour en mesure de s'assurer que les premiers juges ont sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont ils étaient saisis et rejeté les exceptions de nullité ; qu'il sera seulement ajouté que le prévenu a été, dans le cadre de l'audition libre rempli de ses droits, la simple circonstance que par suite d'une erreur de plume manifeste le policier l'a informé d'une qualification pénale de non respect de la réglementation des tarifs de courses de taxi au lieu de celle retenue finalement, est sans emport sur la régularité de son audition ; qu'en effet les informations délivrées par les policiers en début de procédure sont celles qui peuvent être appréciées à ce stade de l'enquête ;
"aux motifs adoptés qu'en ce qui concerne le moyen tiré du non respect de l'article 61-1 du code de procédure pénale ; qu'aux termes de l'article 61-1 du code de procédure pénale, la personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction ne peut être entendue librement sur ces faits qu'après avoir été informée de la qualification, de la date et du lieu présumé de l'infraction qu'elle est soupçonnée d'avoir commise ou tenté de commettre -si l'infraction pour laquelle elle est entendue est un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement du droit d'être assisté au cours de son audition par un avocat ; qu'il ressort du premier procès verbal d'audition du prévenu qu'il a été porté à sa connaissance qu'il était soupçonné d'avoir commis ou tenté de commettre l'infraction de "non respect de la réglementation aux tarifs des courses de taxi à Bordeaux" ; qu'il lui a ensuite été notifié, comme mentionné sur le procès verbal, qu'il avait le droit d'être assisté au cours de son audition par un avocat, droit qu'il n'a pas souhaité exercer ; que selon la défense, l'infraction de non respect de la réglementation étant une contravention, et le droit à l'assistance d'un avocat seulement prévu dans le cas d'une infraction qualifiée de crime ou de délit, la notification de ce droit n'est pas valable ; qu'en outre, se pensant poursuivi pour une contravention, le prévenu n'a peut-être pas vu l'intérêt d'être assisté d'un avocat alors qu'il aurait pu y trouver une nécessité s'il avait su qu'il était soupçonné d'avoir commis un délit ; que l'atteinte aux droits de la défense est donc certaine ; que le prévenu a été entendu une deuxième fois par les enquêteurs, toujours selon la procédure d'audition libre ; que lors de cette deuxième audition, il lui a été notifié qu'il était soupçonné d'avoir commis ou tenté de commettre l'infraction de travail dissimulé et d'exercice illégal de la profession de conducteur de taxi ; que le droit à l'assistance d'un avocat lui a été également notifié ; que selon la défense, cette audition est tout aussi nulle au motif que l'infraction d'exercice illégal de la profession de taxi a été abrogée par la loi du 1er octobre 2014 ; que le procès-verbal de saisine préalable à l'audition du prévenu permet d'établir que l'enquête était ouverte des chefs d'exercice illégal de la profession de taxi, défaut d'assurance professionnelle, travail dissimulé ; que ces infractions apparaissent encore sur le procès verbal d'interpellation comme sur toutes les pièces de procédure postérieures à l'audition libre ; que c'est manifestement par une erreur matérielle qu'il a été indiqué au prévenu qu'il était entendu pour "non respect de la réglementation aux tarifs des courses de taxi" puisque le droit à l'avocat lui a été notifié, notification à laquelle l'enquêteur n'aurait pas procédé s'il avait réellement eu l'intention de l'entendre sur une simple contravention ; que toute l'audition a porté sur les conditions de l'exercice du transport de personnes par le prévenu, c'est à dire sur l'exercice illégal de la profession de taxi, le travail dissimulé ; qu'à tout moment, comme cela lui avait également été notifié, le prévenu pouvait mettre fin à cette audition ; que tout aussi regrettable que soit le manque de soin apporté à la procédure, cette erreur matérielle n'a pas fait grief aux droits du prévenu ; que d'ailleurs lorsque dans la deuxième audition, il est bien précisé au prévenu qu'il est soupçonné d'avoir commis un délit, il ne souhaite pas davantage être assisté d'un avocat ; qu'il lui est également notifié qu'en matière correctionnelle, aucune condamnation ne pourra être prononcée à son encontre sur le fondement de ses seules déclarations faute d'avoir pu s'entretenir avec un avocat et être assisté de lui ;
"1°) alors qu'en vertu de l'article 61-1 du code de procédure pénale, la personne suspectée d'un délit doit être informée de la qualification de l'infraction qu'elle soupçonnée d'avoir commise, du droit de quitter les lieux où elle est entendue, du droit de se taire et du droit d'être assisté par un avocat, au cours de ses auditions et confrontations ; qu'in limine litis, la défense a invoqué la nullité du procès-verbal de première audition de M. Z... qui avait été informé du fait qu'il était entendu pour des faits qualifiés de non-respect de la tarification des taxis, alors que l'enquête avait été requise pour des faits qualifiés d'exercice illégal de la profession de taxi, de non présentation de l'assurance obligatoire et de travail dissimulé ; que pour rejeter ce moyen de nullité, la cour d'appel a estimé que le procès-verbal ne comportait qu'une erreur matérielle et que celle-ci n'avait pas fait grief aux intérêts du prévenu qui avait été informé de son droit de se taire et du droit à l'assistance d'un avocat, assistance qu'il avait refusée, tant lors de cette audition, qu'ultérieurement, lors de sa seconde audition, lorsqu'il lui avait été précisé qu'il était soupçonné d'exercice illégal de la profession de taxi ; que dès lors que seul le procès-verbal de première audition établissait le contenu de l'information donnée à M. Z..., la cour d'appel ne pouvait considérer que ce procès-verbal ne comportait qu'une simple erreur matérielle, aucun autre acte ne pouvant établir que l'information avait porté sur la qualification « d'exercice illégal de la profession de taxi », qui était visée dans le cadre de l'enquête ;
"2°) alors que la cour d'appel a estimé que l'erreur ne faisait pas grief à M. Z..., dès lors qu'il avait refusé l'assistance d'un avocat lorsqu'il avait été informé de la qualification exacte des faits à l'occasion de sa seconde audition ; qu'en omettant de prendre en compte le fait que l'erreur dans la qualification avait pu influencer le suspect quant au choix d'exercer ses autres droits, dont celui de se taire, son audition ultérieure ne pouvant couvrir l'atteinte initiale à ses droits, celle-ci pouvant au contraire expliquer qu'il n'ait pas entendu exercer ces droits lorsqu'il a été informé de la réelle qualification des faits, dès lors qu'il avait déjà été entendu, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 88-1 de la Constitution, 8 de la directive 98/34/CE du 2 juin 1998, 111-4 du code pénal, L. 3120-2, L. 3121-1, L. 3121-11, L. 3124-4, R. 3124-11 du code des transports, 388, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Z... coupable d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi et l'a condamné pénalement et civilement ;
"aux motifs que M. Z... comparaît devant le tribunal correctionnel des chefs d'exercice illégal de la profession d'exploitant de taxi et d'exercice d'un travail dissimulé par dissimulation d'activité ; que le 14 février 2015 à 1 heure 35, les agents de la police judiciaire en mission de lutte contre la délinquance routière, et plus particulièrement à la recherche de conducteurs Uber Pop, ont remarqué un véhicule Peugeot 308, immatriculé [...], circulant devant eux quai de Brienne et précédemment répertorié comme étant conduit par un chauffeur Uber Pop et de ce fait placé sous surveillance ; qu'il convient au demeurant, de préciser que l'attention des agents s'était déjà portée sur ce véhicule plus tôt dans la soirée dans le secteur des allées de Toumy où l'on pouvait penser qu'il était à la recherche de clientèle qu'il n'avait pas toutefois chargée ; qu'alors que les agents de police suivaient le véhicule, ce dernier s'est stationné en pleine voie publique manifestement en attente de clients et trois individus, paraissant l'attendre se sont présentés au conducteur ; que c'est à ce moment que les agents ont décidé de procéder à un contrôle ; que l'un des passagers du véhicule, M. Mickaël A..., interrogé par les agents de police, a immédiatement indiqué que le conducteur avait été contacté via de l'application Uber Pop ; que conduit au commissariat, M. Z... a reconnu se livrer au transport onéreux de personnes via l'application Uber Pop sans être titulaire ni d'une autorisation de stationnement ni d'une licence professionnelle ; qu'il indiquait également n'être ni inscrit au registre des commerces et des sociétés, ni au régime social indépendant et ne pas avoir déclaré les revenus tirés de cette activité dans la mesure où il n'avait pas encore reçu sa feuille d'impôt ; que c'est dans ces conditions qu'il est poursuivi devant le tribunal correctionnel sur le fondement de l'article L. 3124-4 du code des transports, s'agissant de l'exercice illégal de la profession d'exploitant de taxis et sur celui de l'article L. 8221-3 du code du travail s'agissant de l'exercice d'une activité dissimulée ; qu'à l'audience de la cour, le prévenu, par le truchement de son conseil fait plaider et conclure à sa relaxe ; que M. Z... soutient en substance que l'appellation de taxis ne peut être attribuée qu'à des véhicules remplissant les conditions d'être munis d'éléments spéciaux et d'un terminal de paiement ; qu'en outre l'activité qu'il lui est reproché d'avoir exercé ne ressortirait nullement de celle que la loi attache à l'autorisation de stationnement ; que l'activité protégée est limitée à la quête de clientèle sur la voie publique et le prévenu n'a nullement exercé une telle activité ; qu'il conteste avoir commis l'infraction de travail dissimulé ; qu'il sera rappelé que l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-11 du code des transports "permet aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle dans leur commune de rattachement (et) dans une commune faisant partie d'un service commun de taxis (...)" ; que cette autorisation administrative permet ainsi, et c'est là sa finalité première, la quête de clientèle sur la voie publique, cela que l'on soit à l'arrêt à un emplacement signalisé ou que l'on circule en pouvant être hélé par un passant à la recherche d'une voiture de place ; qu'elle ne réserve, en aucun cas aux taxis le monopole du transport particulier des personnes et de leurs bagages à titre onéreux ; que le Conseil constitutionnel l'a explicitement admis dans une décision du 17 octobre 2014, qui se prononce sur le champ de la protection accordée aux taxis telle qu'attachée à l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 ; qu'il convient vient toutefois de relever que depuis la loi Thevenoud du 1er octobre 2014 l'article L. 3120-2 du code des transports prévoit en son point III qu'est un acte prohibé « 1° le fait d'informer un client, avant la réservation mentionnée au 1° du II du présent article, quel que soit le moyen utilisé, à la fois de la localisation et de la disponibilité d'un véhicule mentionné au I quand il est situé sur la voie ouverte à la circulation publique sans que son propriétaire ou son exploitant soit titulaire d'une autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 » ; que le Conseil constitutionnel dans une décision n° 2015-468/469/472 QPC du 22 mai 2015 a validé ce que l'on dénomme le maraudage électronique, désormais autorisé pour les seuls taxis, en considérant que le législateur avait entendu, pour les motifs d'ordre public de police de la circulation et du stationnement, garantir l'effectivité de leur monopole légal qui découle du fait lorsqu'ils ont seuls la possibilité de stationner sur la voie publique et d'y circuler en quête de clients ; qu'à partir du moment où le maraudage électronique est autorisé aux seuls taxis et découle de l'autorisation de stationnement qui leur est délivré, il doit être considéré que le fait de se livrer à un tel maraudage en circulant sur la voie publique est constitutif de l'infraction d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi, cela alors même que le véhicule piloté ne correspondrait pas à la définition du taxi, telle qu'elle résulte des articles L. 3121,R. 3121 et R. 3121-7 du code des transports ; qu'on considère en effet habituellement qu'adopter un comportement qui n'est permis que par une autorisation professionnelle spécifique accordée à une profession, sans être détenteur d'une telle autorisation, revient à s'arroger les prérogatives de cette profession et à l'exercer illégalement, cela même si le véhicule conduit est, par exemple un VTC (cf. Crim. 27 octobre 2015 pourvoi: 14-84134) ; que l'acte de poursuite est ainsi rédigé au cas particulier : il est reproché au prévenu d'avoir à Bordeaux exercé illégalement l'activité d'exploitant de taxi en l'espèce sic «en effectuant, à la demande de la clientèle le transport particulier des personnes et de leurs bagages à titre onéreux, ou en attendant à cette fin la clientèle sur la voie publique, sans être titulaire de l'autorisation de stationnement délivrée par l'autorité compétente», délit défini par les articles L. 3124-4, § 1,3121-1, 3121-11, R. 3121-5, R. 3129 du code des transports ; que selon l'article L. 3124-4 du code des transports est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende le fait d'effectuer à la demande et à titre onéreux le transport particulier de personnes et de bagages sans être titulaire d'une autorisation de stationnement sur la voie publique en attente de clientèle, ou d'exercer l'activité de conducteur de taxi sans être titulaire de la carte professionnelle en cours de validité ; qu'aux termes de l'article L. 3121-11 du code des transports, texte notamment visé par la poursuite et ensuite modifié par la loi 2015-990 du 6 août 2015, la définition de l'autorisation visée par l'article était la suivante : "L'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du présent code permet aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle (c'est le maraudage) dans leur commune de rattachement.... En dehors du ressort de l'autorisation de stationnement, les conducteurs de taxis sont soumis à l'article L. 3120-2 du présent code, notamment s'agissant de la prise en charge de la clientèle sur la voie ouverte à la circulation publique sous réserve de justification d'une réservation préalable." ; qu'il n'est pas fait allusion au maraudage électronique visé à l'article L. 3120-2 du code des transports en son point III auquel le titulaire de l'autorisation de stationnement peut, désormais, depuis la loi Thevenoud, seul recourir et qui permet de garantir réflectivité du monopole à lui conféré ; que le client n'est certes pas trouvé sur la voie publique et ne hèle pas le taxi depuis cette voie l'article L. 3120-2 susvisé a été à toutes fins mis dans les débats par la cour mais il doit être considéré que ce visa était superfétatoire à partir du moment où le maraudage électronique n'est rien d'autre qu'un type de maraudage qui, dans sa globalité, relève du monopole découlant de l'autorisation qu'il faut détenir pour s'y livrer ; que se livrer au maraudage électronique, lorsqu'on n'a pas d'autorisation, c'est s'arroger abusivement une prérogative découlant de cette autorisation, ce qu'entend réprimer l'article L. 3124-4 du code des transports ; qu'en conséquence, c'est à bon droit que le tribunal a déclaré le prévenu coupable des faits à lui reprochés ;
"1°) alors que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article L. 3224-4 du code des transports, applicable depuis le 3 octobre 2014, incrimine le fait d'exercer l'activité d'exploitant de taxi sans être titulaire de l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du même code ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a condamné le prévenu pour exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxis, en relevant que si l'activité de transport de particuliers à titre onéreux n'était pas un monopole des exploitants de taxis, ce qui ne permettait pas de retenir le délit, en revanche l'article L. 3120-2 III interdisant l'utilisation d'un système de localisation et de disponibilité d'un véhicule de transports sans être muni d'une autorisation de stationnement constituait un monopole des conducteurs de taxis dont le non-respect entrait dans le cadre de l'incrimination ; que l'interdiction d'utiliser un système de localisation et de disponibilité d'un véhicule de transport de particuliers s'appliquant non seulement aux personnes qui ne sont pas titulaires d'une autorisation de stationnement mais également aux conducteurs de taxis circulant hors du ressort de leur autorisation de stationnement et la méconnaissance d'une telle interdiction n'impliquant en elle-même aucun acte d'exploitation d'un véhicule de transport de particuliers, faute de viser la prise en charge de passagers, le non respect de cette interdiction n'entre pas dans le cadre du délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi ; qu'ainsi, la cour d'appel a méconnu les articles 111-4 du code pénal, L. 3120-2 III et L. 3224-4 du code des transports ;
"2°) alors que l'article R. 3124-11 du code des transports incriminait spécialement le non-respect du III de l'article L. 3120-2, à l'époque des faits ; qu'en retenant à l'encontre du prévenu le fait d'avoir méconnu l'interdiction de l'article L. 3120-2 III du code des transports, la cour d'appel aurait dû constater que ce fait n'était constitutif que de la contravention de l'article R. 3124-11 du code des transports ; que cet article R. 3124-11 ayant été annulé par le Conseil d'Etat, l'arrêt attaqué ne trouve plus de base légale et doit être annulé ;
"3°) alors qu'il appartient au juge répressif d'écarter l'application d'un texte de droit interne fondant des poursuites lorsque ce dernier méconnaît une disposition du Traité de fonctionnement de l'Union européenne ou un texte pris pour l'application de celui-ci ; qu'à supposer le délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi caractérisé en présence de la méconnaissance de l'interdiction d'utiliser un système de localisation et disponibilité en circulant sur la voie publique, sans autorisation de stationnement, prévu par l'article L. 3120-2 du code des transports, la cour d'appel aurait du laisser inappliquée cette disposition, en tant qu'elle comportait des modifications de règles techniques applicables aux transports de particuliers qui n'avaient pas été adoptées conformément à la procédure prévue l'article 8 de la directive 98/34/CE, imposant aux Etats membres d'informer la Commission européenne de tout projet de norme ou réglementation technique en matière de services d'information afin de lui permettre d'émettre un avis, voire de proposer l'adoption d'une directive en ce domaine ; qu'ainsi, la cour d'appel a méconnu l'article 8 de la directive précitée et l'article 88-1 de la Constitution ;
"4°) alors que les juges ne peuvent statuer que sur les faits visés à la prévention ; que l'acte de prévention visait le fait d'exercer une activité de transports de particuliers « en attendant à cette fin la clientèle sur la voie publique »; que l'interdiction de stationner ou de circuler sur la voie publique, en utilisant un système de localisation et de disponibilité de son véhicule, en l'absence d'une autorisation administrative de stationnement, n'étant pas visée à la prévention, laquelle ne renvoyait en outre aucunement à la méconnaissance de l'article L. 3120-2 III du code des transports au titre des textes de répression, en condamnant le prévenu pour utilisation d'un tel système de localisation et de disponibilité de son véhicule, sans autorisation de transport, la cour d'appel a méconnu l'article 388 du code de procédure pénale ;
"5°) alors qu'à supposer que la méconnaissance de l'interdiction prévue par l'article L. 3120-2 III 1° du code des transports soit constitutive du délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxis, le délit n'est caractérisé que s'il est établi, d'une part, que le conducteur du véhicule, non titulaire d'une autorisation administrative de circuler sur la voie publique, utilisait une application permettant aux personnes souhaitant réserver un véhicule d'en connaître la localisation et la disponibilité et, d'autre part, que ce conducteur utilisait une telle application alors qu'il circulait ou attendait sur la voie publique ; qu'en n'expliquant pas en quoi l'application Uber Pop que le prévenu utilisait constituait un système de localisation et d'indication de la disponibilité des véhicules, tel que défini à l'article L. 3120-2 III du code des transports, et ce, quand pourtant le prévenu contestait le fait qu'ait été apportée la moindre preuve en ce sens, en faisant état de constats d'huissier tendant à établir que l'application Uber Pop n'était pas un système de localisation et de disponibilité des véhicules, dès lors que cette application permettait certes de connaître la position des véhicules qui y étaient connectés, mais ne comportait aucune information sur leur disponibilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"6°) alors qu'en ne recherchant pas si le prévenu avait utilisé une application telle que définie par l'article L. 3120-2 III 1° du code des transports pendant qu'il se trouvait sur la voie publique, aux fins de trouver des clients, quand elle relevait seulement qu'il avait pris en charge trois passagers pour un trajet dont l'un avait indiqué l'avoir contacté par l'application Uber Pop, avant que le véhicule ne soit intercepté, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu qu'une réglementation nationale, qui sanctionne pénalement le fait d'organiser un système de mise en relation de clients et de chauffeurs non professionnels qui fournissent des prestations de transport routier de personnes à titre onéreux avec des véhicules de moins de dix places au moyen d'une application pour téléphone, sans disposer d'une habilitation à cet effet, porte sur un service dans le domaine des transports et est exclu du champ d'application des articles 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et de l'article 1er de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, modifiée par la directive 98/48/CE, prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information, tel que ces dispositions ont été interprétées par la Cour de Justice de l'Union européenne dans ses décisions C-434/15 du 20 décembre 2017 et C-320/16 du 10 avril 2018 ;
D'où il suit que le grief n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen ;
Sur le troisième moyen, pris en ses autres branches :
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi, l'arrêt retient, par motifs propres, que l'attention des agents s'était déjà portée sur ce véhicule plus tôt dans la soirée dans le secteur des Allées de Tourny où l'on pouvait penser qu'il était à la recherche de clientèle qu'il n'avait pas toutefois chargée et qu'alors que les agents de police suivaient le véhicule, ce dernier s'est stationné en pleine voie publique manifestement en attente de clients et trois individus paraissant l'attendre se sont présentés au conducteur ; que les juges ajoutent que l'un des passagers a confirmé avoir commandé la course à l'aide de l'application Uberpop ; que les juges retiennent, par motifs adoptés, que M. Z... n'a produit aucun document lui permettant d'exercer l'activité de taxi ou de chauffeur de véhicule de transport avec chauffeur, que les trajets étaient effectués à titre onéreux, que la société Uber incitait par messages les chauffeurs utilisant l'application Uberpop à pratiquer la maraude en se rapprochant du centre ville de Bordeaux, que le prévenu, qui résidait à plusieurs kilomètres de Bordeaux, devait nécessairement stationner en ville dans l'attente des courses, et que n'ayant pas d'autorisation de stationnement, il s'est comporté comme un taxi ;
Attendu qu'en l'état de ces seules énonciations, qui établissent que le prévenu était en quête de clientèle sur une voie ouverte à la circulation publique sans être titulaire d'une autorisation de stationnement, abstraction faite de motifs surabondants fondés sur les déclarations effectuées par le prévenu lors de sa première audition libre après notification d'une infraction erronée, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que les moyens, inopérant pour le troisième en ses première, deuxième, quatrième, cinquième et sixième branches en ce qu'elles critiquent des motifs surabondants, ne sauraient être accueillis ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-1, L.8221-3, L.8224-1 du code du travail, 49, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Z... coupable de travail dissimulé par dissimulation d'activité et l'a condamné pénalement et civilement ;
"aux motifs que selon l'article L. 8221-3 du code du travail, la dissimulation d'activité est la situation d'une personne physique ou d'une personne morale qui se livre à une activité artisanale, commerciale libérale ou agricole sans requérir son immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ou sans effectuer les déclarations obligatoires aux organismes de protection sociales ou à l'administration fiscale ; qu'il résulte d'une jurisprudence bien assise qu'entre dans le champ d'application de ce délit toutes les activités accomplies dans un but lucratif (Crim. 19 février 2013 pourvoi 12-80440 droit social 2013 p 631 note Salomon ) exercées aussi bien par des commerçants, des sociétés, des travailleurs indépendants ou des professions libérales, l'auteur devant avoir l'intention de retirer un gain, un avantage de son activité illégale, même si en définitive l'intérêt qu'il en tire se trouve minime ; qu'il est précisé que, selon l'article L. 8221-4 du code du travail sont présumés, sauf preuve contraire, accomplies à titre lucratif certaines activités lorsque la fréquence ou leur importance est établie (cf. Crim. 7 décembre 2004 pourvoi 04 -81721) ou lorsque la facturation est absente ou frauduleuse ; qu'à cet égard, il doit être relever que lors de son audition le prévenu a admis qu'il se livrait à l'activité qui lui est reprochée depuis plusieurs mois, la nuit de façon régulière, cela en dehors de tout contrat de travail, ce qui rapportait un revenu conséquent qu'il chiffrait au moins 150 euros par semaine, alors qu'il n'est pas contesté par lui qu'il n'avait fan aucune démarche pour s'affilier au régime social des indépendants et qu'il poursuivait cette activité pour améliorer ses revenus ; que c'est seulement à compter du 13 avril 2015 soit postérieurement à la période de prévention que le prévenu s'est inscrit auprès du RSI en qualité d'auto-entrepreneur pour une activité dite "'autres services personnels" ; que quant au fait que le prévenu a indiqué sur sa feuille de déclaration d'impôt la somme totale perçue au titre de son activité de chauffeur Uber Pop est sans emport sur la réalité de l'infraction dans la mesure où une seule des omissions prévues au texte d'incrimination suffit à caractériser le délit de travail dissimulé lequel n'exige pas une omission cumulative des déclarations sociales et fiscales ; que l'élément moral de l'infraction s'évince de l'abstention volontaire du prévenu de déclarer son activité qu'il exerçait depuis plusieurs mois ;
"1°) alors que l'article L. 8224-1 du code du travail incrimine la soustraction aux obligations déclaratives visées dans l'article L. 8221-3 ; qu'en ne précisant pas dans quel délai devait être réalisée la déclaration d'activité à l'URSSAF ou à l'administration fiscale, la cour d'appel n'a pu justifier la décision par laquelle elle a estimé que le prévenu avait dissimulé son activité, quand il indiquait avoir entrepris de se déclarer en auto-entrepreneur le 17 février 2015 ;
"2°) alors que l'article L. 8224-1 du code du travail incrimine la soustraction intentionnelle aux obligations déclaratives visées dans l'article L. 8221-3 ; qu'en considérant que le prévenu avait commis intentionnellement l'infraction, sans répondre à ses conclusions selon lesquelles, s'il n'avait pas déclaré son activité, cette omission s'expliquait par le fait qu'il s'était fondé sur les informations délivrées par le site Uber qui indiquait que jusqu'à un certain niveau de revenu tiré de l'activité, aucune déclaration en qualité de travailleur indépendant n'était nécessaire, ces revenus devant être considérés comme une participation aux frais du véhicule par le passager, admis dans le cadre du covoiturage ; qu'elle n'a ainsi pu justifier sa décision ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé, en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de travail dissimulé dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ,
Mais sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 2131-3, L. 2132-3, R. 2131-1 du code du travail, 2 et 591 du cade de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'action civile du syndicat autonome des artisans taxis 33 et a condamné le prévenu à verser à ce syndicat la somme de 500 euros à titre d'indemnisation, 500 euros à titre d'indemnité procédurale et 300 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
"aux motifs que quant au syndicat autonome des artisans taxis 33, cette organisation justifie, par production en délibéré en respectant le principe de la contradiction, du cahier administratif qui recense l'ensemble des réunions et délibérations, que depuis près de dix ans, le Conseil syndical n'est plus élu mais seul le bureau (qui est une instance qui en découle) fait l'objet d'un vote lors des assemblées générales de ce syndicat ; que le précédent président du syndicat autonome des artisans taxi de Bordeaux et de la Gironde explique par attestation que le syndicat fonctionne en formation de bureau syndical qui est de fait conseil syndical pour toutes les décisions et actions en justice à mettre en oeuvre ; qu'au surplus, la lecture des statuts de ce syndicat montre que le bureau est l'émanation du Conseil et qu'il a pour tâche statutaire de subvenir aux besoins administratifs et immédiats des adhérents ; que dans ces conditions la décision prise le 11 juin 2015 par les membres du bureau mandatant la présidente aux fins d'agir en justice dans toutes les procédures est conforme aux statuts de cette organisation de sorte que la constitution de partie civile est recevable Sur le fond, en considération du préjudice effectivement et directement subi par ces organisations syndicales qui chacune pour qui les concerne a pour objet de défendre et représenter les exploitants taxis notamment en présence de concurrence déloyale ou d'exercice illégal de la profession de taxi, la cour réforme le jugement entrepris et alloue à chacune des parties civiles la somme de 500 euros ; que l'indemnité procédurale en première instance est minorée à 500 euros pour chacune des parties civiles ;
" alors que ne peuvent agir en justice au nom d'un syndicat professionnel que les personnes qui y sont habilitées par les statuts, ou celles qui reçoivent un mandat exprès de l'organe habilité statutairement ; que pour rejeter le moyen invoquant l'irrecevabilité de l'action du syndicat, remarquant que la présidente qui agissait en son nom n'était pas habilité par le conseil syndical conformément aux statuts, puisqu'elle prétendait fonder son mandat sur une décision du bureau syndical, la cour d'appel a relevé que le bureau était l'émanation de fait du conseil syndical et qu'il avait pour tâche statutaire de subvenir aux besoins administratifs et immédiats des adhérents ; qu'en l'état de tels motifs qui ne constataient pas que le bureau était statutairement habilité à agir en justice, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale" ;
Vu l'article L.2132-3 du code du travail ;
Attendu qu'il se déduit de ce texte que seuls disposent du droit d'ester en justice les représentants des syndicats tirant ce pouvoir, soit des statuts, soit d'un mandat exprès régulier ;
Attendu que, pour déclarer recevable la constitution de partie civile du Syndicat autonome des artisans taxis, contestée par le prévenu aux motifs que le président de cette structure n'avait pas été autorisé à ester en justice par le conseil syndical en application de l'article 11 des statuts, l'arrêt énonce que depuis dix ans le conseil syndical n'est plus élu mais seulement le bureau qui en découle, que le bureau est l'émanation du Conseil, et que la décision du 11 juin 2015 du bureau syndical mandatant la présidente pour agir en justice est conforme aux statuts de cette organisation, de telle sorte que la constitution de partie civile est recevable ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale :
Attendu que les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel ; que la déclaration de culpabilité de M. Z..., demandeur au pourvoi partiellement rejeté, étant devenue définitive, par suite du rejet de ses premier, deuxième, troisième et quatrième moyens de cassation, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande de l'Union nationale des taxis ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 16 février 2016, mais en ses seules dispositions civiles relatives au Syndicat autonome des artisans taxis (SAAT 33), toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT que la constitution de partie civile du Syndicat autonome des artisans taxis est irrecevable ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
FIXE à 2 000 euros la somme que M. B... Z... devra verser à l'Union nationale des taxis au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 11 septembre 2018 n° 16-81.764

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. X... Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 16 février 2016, qui, pour exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi, l'a condamné à 500 euros d'amende, un mois de suspension du permis de conduire et a prononcé sur les intérêts civils ;





La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller Bellenger, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et BOUCARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CORDIER ;
Vu les mémoires en demande, en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur la recevabilité du mémoire complémentaire
Attendu que le mémoire produit le 3 mars 2017, après le dépôt du rapport effectué le 23 février 2017, est irrecevable en application de l'article 590 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte du jugement attaqué et des pièces de procédure que le 21 mars 2015, M. X... Y..., qui était déjà connu des services de police et dont le véhicule avait été enregistré dans le système de lecture automatique des plaques d'immatriculation, a été contrôlé alors qu'il transportait à titre onéreux un passager, pris sur la voie publique, qui avait commandé sa course à l'aide de l'application Uberpop ; que M. Y... a été cité devant le tribunal correctionnel du chef d'exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi ; que le tribunal l'a déclaré coupable ; que l'Union nationale des taxis et le Syndicat autonome des artisans taxis, parties civiles, le prévenu et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 233-1 du code de la sécurité intérieure, 53, 591, 385, 593 et 802 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande d'annulation de la procédure d'enquête concernant M. Y... ;
"aux motifs adoptés qu'en ce qui concerne le moyen tiré de l'utilisation illégale du dispositif LAPI, il s'agit d'un dispositif de Lecture Automatisé des Plaques d'Immatriculation ; qu'en raison de l'enquête en cours, l'immatriculation du véhicule du prévenu avait été enregistrée dans le fichier FOVES qui alimente directement et automatiquement le système LAPI ce qui a permis aux fonctionnaires de police, de repérer le véhicule en passant à proximité, et d'entamer la surveillance du véhicule puis de l'intercepter ; que le dispositif LAPI a simplement permis aux fonctionnaires de police de découvrir le véhicule qu'ils recherchaient dans le cadre des infractions poursuivies ; que cependant, selon la défense, conformément à l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure, ce dispositif ne pouvait être utilisé que dans le but de prévenir ou de réprimer le terrorisme, constater des infractions criminelles ou nées à la criminalité organisée au sens de l'article 706-73 du code de procédure pénale ou des infractions de vol et de recel de véhicules volés ou des infractions de contrebande, d'importation ou d'exportation commises en bande organisée prévues et réprimées par l'article 414 du code des douanes ou des opérations financières portant sur des fonds issus des précédentes infractions conformément à l'article 415 du même code ; que l'article L. 233-1 permet également l'emploi de ce dispositif, par les services de police ou de gendarmerie, à titre temporaire pour la préservation de l'ordre public, à l'occasion d'événements particuliers ou de grands rassemblements de personnes par décision de l'autorité administrative ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ; que l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure, stipule donc que le dispositif LAPI peut être utilisé dans le but de prévenir ou de réprimer des infractions criminelles ou liées à la criminalité organisée au sens de l'article 706-73 du code de procédure pénale ; que l'article 706-73 du code de procédure pénale se rapporte dans son 20e créé par la loi du 10 juillet 2014 aux délits de dissimulation d'activité ... ; qu'en conséquence, il apparaît qu'il a été fait du dispositif LAPI un usage conforme à la loi et ce moyen de nullité ne saurait prospérer ; qu'en ce qui concerne l'absence d'indice objectif de commission d'une infraction permettant le recours à la procédure de flagrant délit, sur directive du parquet, une enquête était diligentée concernant l'exercice de la profession de taxi ; que l'immatriculation du véhicule du prévenu avait été portée à la connaissance des enquêteurs comme pouvant être celui d'un chauffeur Uber ; que M. Y... avait par ailleurs fait l'objet d'un premier contrôle trois jours auparavant au cours duquel il avait évoqué l'activité de transport de personnes via l'application Uber Pop ; qu'encore auparavant, le 16 janvier 2015, ainsi que cela ressort des pièces communiquées par la défense, il avait déposé plainte pour des violences commises à son encontre par des chauffeurs de taxi ; qu'à l'occasion de cette procédure, il disait "chauffeur pour la société Uber" ; qu'il était donc parfaitement connu des services de police comme pouvant se livrer au transport de personnes ; que c'est après avoir repéré et suivi le véhicule conduit par le prévenu, constaté qu'un passager se trouvait à bord, que les fonctionnaires de police ont procédé au contrôle du véhicule et de son conducteur ; que le prévenu étant connu comme étant « chauffeur Uber », la présence d'un passager était un élément suffisamment objectif, une raison plausible de soupçonner qu'il était entrain de commettre un délit lié à un transport de personnes effectué dans des conditions illégales ; que les fonctionnaires de police pouvaient donc légitimement agir selon la procédure de flagrance conformément à l'article 53 du code de procédure pénale lequel n'exige que l'existence d'indices de commission d'une infraction ;
"1°) alors que la police ne peut recourir à l'utilisation de procédés illégaux pour établir des infractions ou en découvrir les auteurs ; qu'en vertu de l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure, les services de police et de gendarmerie nationales et des douanes peuvent mettre en oeuvre des dispositifs fixes ou mobiles de contrôle automatisé des données signalétiques des véhicules prenant la photographie de leurs occupants, en tous points appropriés du territoire, afin d'établir une liste limitative d'infractions et d'en découvrir les auteurs ; qu'ainsi peuvent donner à introduction dans le traitement automatisé les seuls crimes visés par l'article 706-73 du code de procédure pénale, à l'exclusion de la délinquance organisée ; qu'en l'espèce, le prévenu a été interpellé alors qu'il conduisait son véhicule et se trouvait en compagnie de passagers, par un agent de police en mission de surveillance de la circulation routière ; que cet agent a indiqué qu'alors qu'il utilisait le système LAPI, celui-ci s'était déclenché au passage du véhicule du prévenu ; qu'il apparaissait que celui-ci était inscrit dans ce fichier comme conducteur d'un véhicule UberPop ; que pour rejeter le moyen de nullité de cette interpellation et des actes subséquents, invoquant le fait que le système LAPI, trouvant son fondement dans l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure avait été détourné, la cour d'appel a jugé, par adoption de motifs, que le fichage du prévenu dans le traitement automatisé des plaques d'immatriculation, était justifié dès lors que l'article 706-73 20° du code de procédure pénale visait les délits de dissimulation d'activité ; qu'ainsi, il a méconnu l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure qui n'a autorisé que le traitement automatisé des plaques d'immatriculation, en lien avec les crimes visés par l'article 706-73, à l'exclusion des délits, dont ceux de son 20° ;
"2°) alors que pour pouvoir agir dans le cadre de la procédure de flagrant délit, et mettre en oeuvre les pouvoirs prévus aux articles 53 et suivants du code de procédure pénale, un officier de police judiciaire doit avoir eu, au préalable, connaissance d'indices apparents d'un comportement révélant l'existence d'une infraction en train ou venant de se commettre ; que pour retenir le caractère flagrant de l'infraction, la cour d'appel a considéré que dès lors que le prévenu était déjà connu comme un chauffeur Uberpop et transportait des passagers, il en résultait des indices apparents permettant de supposer qu'il était entrain de commettre un délit lié à un transport de personnes effectué dans des conditions illégales ; que le fichage, par ailleurs illégal, portant sur des faits qui n'avaient donné lieu à aucune poursuite et le constat que le prévenu transportait un passager ne constituant pas des indices apparents du fait que le prévenu était en train de commettre le délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi, la cour d'appel a méconnu l'article 53 du code de procédure pénale" ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité tirée de l'illégalité du dispositif de lecture automatique des plaques d'immatriculations, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que le dispositif de lecture automatique des plaques d'immatriculation, prévu en application de l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure pour les délits énumérés à l'article 706-73 du code de procédure pénale, dans sa version applicable au moment des faits, prévoyait en son 20°, qu'il pouvait être mis en oeuvre pour les délits de dissimulation d'activités ou de salariés, de recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé, infractions dont M. Y... était soupçonné de se livrer, sa qualité de chauffeur Uberpop étant connue des services de police à la suite notamment d'une dénonciation, d'un contrôle effectué trois jours auparavant et d'une plainte déposée par lui pour des violences imputées à des chauffeurs de taxi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le grief ne peut qu'être écarté ;
Sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que pour, rejeter l'exception de nullité tirée de la mise en oeuvre illicite par les officiers de police judiciaire des pouvoirs découlant de la procédure de flagrance, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'au passage de la voiture conduite par M. Y..., les policiers, alertés par le dispositif de lecture automatisé des plaques d'immatriculation, régulièrement renseigné suite à des soupçons d'activité illicite de transport et de travail dissimulé, et connaissant le conducteur qui avait, fait l'objet d'un contrôle le 18 mars 2015 au cours duquel il avait reconnu exercer l'activité de chauffeur en utilisant l'application Uberpop, après avoir repéré et suivi ce véhicule, ont constaté qu'un passager y était transporté, ce qui constituait l'indice apparent d'un comportement délictueux, la cour d'appel a justifié sa décision;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 88-1 de la Constitution, 8 de la directive 98/34/CE du 22 juin 1998, 111-4 du code pénal, L. 3120-2, L. 3121-1, L. 3121-11, L .3124-4, R. 3124-11 du code des transports, 388, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Y... coupable d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi et l'a condamné pénalement et civilement ;
"aux motifs que le 21 mars 2015 à Bordeaux, les services de police, en patrouille dans l'agglomération, ont croisé un véhicule de marque BMW dans laquelle deux individus étaient assis à l'avant et l'ont identifié comme étant un véhicule déjà contrôlé le 18 mars précédent et recherché dans le cadre d'une activité de taxi clandestin ; que les enquêteurs ont décidé par voie de conséquence, de procéder à son interception et ont interrogé le passager qui a déclaré être un ami personnel du conducteur se prénommant X... ; qu'à la question d'un des policiers concernant le nom de famille du chauffeur, le passager qui n'a pas pu répondre a dû finalement admettre qu'il avait eu recours à l'application Uberpop de son smartphone pour qu'un véhicule vienne le chercher Porte de Bourgogne à Bordeaux ; que le passager qui se révélera être M. B... Z... a précisé, après interrogation, que le conducteur de la BMW lui avait demandé, avant que ne soit procédé à l'interception de son véhicule, de dire aux policiers qu'il le connaissait, cela en lui fournissant son prénom ; que le conducteur identifié en la personne de M. Y... a, quant à lui indiqué aux policiers qu'il ne travaillait pas sous l'application Uberpop et qu'il avait le droit de transporter des personnes, cela en disposant, selon ses dires des documents exigés par la réglementation et un numéro SIRET, en tant que conducteur d'un véhicule de tourisme avec chauffeur(VTC) faisant l'objet d'une réglementation spécifique et privé de la possibilité de rentrer directement en contact avec leurs utilisateurs ; qu'interrogé, ultérieurement par les enquêteurs, M. Y... a maintenu cette version des faits et afin d'accréditer sa version s'est prévalu du bon de commande qui lui avait été remis pour cette course « signé » du nom de Uber faisant connaître qu'il était un chauffeur de VTC professionnel et qu'il transmettrait son attestation d'aptitude physique délivrée par le préfet de Gironde de même que l'ensemble des documents démontrant qu'il était en conformité avec le RSI et l'URSSAF avant de réaffirmer qu'il n'était pas inscrit sur Uberpop ; que lors d'une nouvelle audition effectuée le 24 mars 2015 M. Y... a admis avoir eu recours de fin décembre à début janvier 2015 sur Bordeaux à l'application mobile de l'entreprise technologique Uberpop, permettant par l'intermédiaire de leur smartphone la mise en contact d'utilisateurs avec des conducteurs réalisant des services de transport cela sans être déclaré ; que pour les faits ayant donné lieu à l'interception de son véhicule qui venait d'intervenir et même si le bon de commande dont il s'était prévalu s'est avéré douteux, il a, par contre, fermement contesté exercer une activité de taxi clandestin dans la mesure où il n'avait, avec son véhicule, en aucun cas stationné ou circulé sur la voie publique en quête de clientèle, mais s'était contenté de prendre en charge, le 21 mars 2015, quai de Queyris à Bordeaux un particulier qui l'avait contacté au travers de l'application, dont il devait admettre finalement qu'il s'agissait d'Uberpop, ce qui n'était pas à même de permettre la caractérisation du délit d'exercice illégal de la profession d'exploitant de taxi qui suppose que soit caractérisé un stationnement ou une circulation sur la voie publique , « en quête de clientèle » en contestant que le maraudage électronique qu'on entendait lui reprocher puisse correspondre à une telle quête ; qu'il a maintenu cette position devant le tribunal en s'attachant à rappeler les contours de l'activité protégée par l'autorisation de stationnement qu'il a admis ne pas détenir, avant de préciser quelle était son activité effective ; qu'à l'audience de la cour, le prévenu par le truchement de son conseil fait plaider et conclure à sa relaxe ; que M. Y... soutient en substance que l'appellation de taxis ne peut être attribuée qu'à des véhicules remplissant les conditions d'être munis d'équipements spéciaux et d'un terminal de paiement ; qu'en outre l'activité qu'il lui est reproché d'avoir exercé ne ressortait nullement de celle que la loi attache à l'autorisation de stationnement ; que l'activité protégée est limitée à la quête de clientèle sur la voie publique et le prévenu n'a nullement exercé une telle activité ; que l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-11 du code des transports permet aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle dans leur commune de rattachement (et) dans une commune faisant partie d'un service commun de taxis (...) ; que cette autorisation administrative permet ainsi, et c'est là sa finalité première, la quête de clientèle sur la voie publique, cela que l'on soit à l'arrêt à un emplacement signalisé ou que l'on circule en pouvant être hélé par un passant à la recherche d'une voiture de place ; qu'elle ne réserve, en aucun cas aux taxis le monopole du transport particulier des personnes et de leurs bagages à titre onéreux ; que le Conseil constitutionnel l'a explicitement admis dans une décision du 17 octobre 2014, qui se prononce sur le champ de la protection accordée aux taxis telle qu'attachée à l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 312 1-1 ; qu'il convient vient toutefois de relever que depuis la loi Thevenoud du 1er octobre 2014 l'article L. 3120-2 du code des transports prévoit en son point III qu'est un acte prohibé « 1° le fait d'informer un client, avant la réservation mentionnée au 1° du II du présent article, quel que soit le moyen utilisé, à la fois de la localisation et de la disponibilité d'un véhicule mentionné au I quand il est situé sur la voie ouverte à la circulation publique sans que son propriétaire ou son exploitant soit titulaire d'une autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 » ; que le Conseil constitutionnel dans une décision n° 2015-468/469/472 QPC du 22 mai 2015 a validé ce que l'on dénomme le maraudage électronique, désormais autorisé pour les seuls taxis, en considérant que le législateur avait entendu, pour les motifs d'ordre public de police de la circulation et du stationnement, garantir l'effectivité de leur monopole légal qui découle du fait lorsqu'ils ont seuls la possibilité de stationner sur la voie publique et d'y circuler en quête de clients ; qu'à partir du moment où le maraudage électronique est autorisé aux seuls taxis et découle de l'autorisation de stationnement qui leur est délivré, il doit être considéré que le fait de se livrer à un tel maraudage en circulant sur la voie publique est constitutif de l'infraction d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi, cela alors même que le véhicule piloté ne correspondrait pas à la définition du taxi, telle qu'elle résulte des articles L. 3121, R. 3121 et R. 3121-7 du code des transports ; qu'on considère en effet habituellement qu'adopter un comportement qui n'est permis que par une autorisation professionnelle spécifique accordée à une profession, sans être détenteur d'une telle autorisation, revient à s'arroger les prérogatives de cette profession et à l'exercer illégalement, cela même si le véhicule conduit est, par exemple un VTC (cf. Crim. 27 octobre 2015 pourvoi: 14-84134) ; qu'il est reproché au prévenu d'avoir à Bordeaux exercé illégalement l'activité d'exploitant de taxi en l'espèce sic «en effectuant, à la demande de la clientèle le transport particulier des personnes et de leurs bagages à titre onéreux, ou en attendant à cette fin la clientèle sur la voie publique, sans être titulaire de l'autorisation de stationnement délivrée par l'autorité compétente », délit défini par les articles L. 3124-4, § 1, 3121-1 3121-11, R. 3121-5, R. 3129 du code des transports ; que selon l'article L. 3124-4 du code des transports est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende le fait d'effectuer à la demande et à titre onéreux le transport particulier de personnes et de bagages sans être titulaire d'une autorisation de stationnement sur la voie publique en attente de clientèle, ou d'exercer l'activité de conducteur de taxi sans être titulaire de la carte professionnelle en cours de validité ; qu'aux termes de l'article L. 3121-11 du code des transports, texte notamment visé par la poursuite et ensuite modifié par la loi 2015-990 du 6 août 2015, la définition de l'autorisation visée par l'article était la suivante : « L'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du présent code permet aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle (c'est le maraudage) dans leur commune de rattachement.... En dehors du ressort de l'autorisation de stationnement, les conducteurs de taxis sont soumis à l'article L. 3120-2 du présent code, notamment s'agissant de la prise en charge de la clientèle sur la voie ouverte à la circulation publique sous réserve de justification d'une réservation préalable. » ; qu'il n'est pas fait allusion au maraudage électronique visé à l'article L. 3120-2 du code des transports en son point III auquel le titulaire de l'autorisation de stationnement peut, désormais, depuis la loi Thevenoud, seul recourir et qui permet de garantir réflectivité du monopole à lui conféré ; que le client n'est certes pas trouvé sur la voie publique et ne hèle pas le taxi depuis cette voie l'article L. 3120-2 susvisé a été à toutes fins mis dans les débats par la cour mais il doit être considéré que ce visa était superfétatoire à partir du moment où le maraudage électronique n'est rien d'autre qu'un type de maraudage qui, dans sa globalité, relève du monopole découlant de l'autorisation qu'il faut détenir pour s'y livrer ;que se livrer au maraudage électronique, lorsqu'on n'a pas d'autorisation, c'est s'arroger abusivement une prérogative découlant de cette autorisation, ce qu'entend réprimer l'article L. 3124-4 du code des transports ; qu'en conséquence, c'est à bon droit que le tribunal a déclaré le prévenu coupable des faits à lui reprochés ;
"1°) alors que loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article L. 3224-4 du code des transports, applicable depuis le 3 octobre 2014, incrimine le fait d'exercer l'activité d'exploitant de taxi sans être titulaire de l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du même code ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a condamné le prévenu pour exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxis, en relevant que si l'activité de transport de particuliers à titre onéreux n'était pas un monopole des exploitants de taxis, ce qui ne permettait pas de retenir le délit, en revanche l'article L. 3120-2 III interdisant l'utilisation d'un système de localisation et de disponibilité d'un véhicule de transports sans être muni d'une autorisation de stationnement constituait un monopole des conducteurs de taxis dont le non-respect entrait dans le cadre de l'incrimination ; que l'interdiction d'utiliser un système de localisation et de disponibilité d'un véhicule de transport de particuliers s'appliquant non seulement aux personnes qui ne sont pas titulaires d'une autorisation de stationnement mais également aux conducteurs de taxis circulant hors du ressort de leur autorisation de stationnement et la méconnaissance d'une telle interdiction n'impliquant en elle-même aucun acte d'exploitation d'un véhicule de transport de particuliers, faute de viser la prise en charge de passagers, le non respect de cette interdiction n'entre pas dans le cadre du délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi ; qu'ainsi, la cour d'appel a méconnu les articles 111-4 du code pénal, L. 3120-2 III et L. 3224-4 du code des transports ;
"2°) alors que l'article R. 3124-11 du code des transports incriminait spécialement le non-respect du III de l'article L. 3120-2, à l'époque des faits ; qu'en retenant à l'encontre du prévenu le fait d'avoir méconnu l'interdiction de l'article L. 3120-2 III du code des transports, la cour d'appel aurait dû constater que ce fait n'était constitutif que de la contravention de l'article R. 3124-11 du code des transports ; que cet article R. 3124-11 ayant été annulé par le Conseil d'Etat, l'arrêt attaqué ne trouve plus de base légale et doit être annulé ;
"3°) alors qu'il appartient au juge répressif d'écarter l'application d'un texte de droit interne fondant des poursuites lorsque ce dernier méconnaît une disposition du Traité de fonctionnement de l'Union européenne ou un texte pris pour l'application de celui-ci ; qu'à supposer le délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi caractérisé en présence de la méconnaissance de l'interdiction d'utiliser un système de localisation et disponibilité en circulant sur la voie publique, sans autorisation de stationnement, prévu par l'article L. 3120-2 du code des transports, la cour d'appel aurait du laisser inappliquée cette disposition, en tant qu'elle comportait des modifications de règles techniques applicables aux transports de particuliers qui n'avaient pas été adoptées conformément à la procédure prévue l'article 8 de la directive 98/34/CE, imposant aux états membres d'informer la Commission européenne de tout projet de norme ou réglementation technique en matière de services d'information afin de lui permettre d'émettre un avis, voire de proposer l'adoption d'une directive en ce domaine ; qu'ainsi, la cour d'appel a méconnu l'article 8 de la directive précitée et l'article 88-1 de la Constitution ;
"4°) alors que les juges ne peuvent statuer que sur les faits visés à la prévention ; que l'acte de prévention visait le fait d'exercer une activité de transports de particuliers « en attendant à cette fin la clientèle sur la voie publique »; que l'interdiction de stationner ou de circuler sur la voie publique, en utilisant un système de localisation et de disponibilité de son véhicule, en l'absence d'une autorisation administrative de stationnement, n'étant pas visée à la prévention, laquelle ne renvoyait en outre aucunement à la méconnaissance de l'article L. 3120-2 III du code des transports au titre des textes de répression, en condamnant le prévenu pour utilisation d'un tel système de localisation et de disponibilité de son véhicule, sans autorisation de transport, la cour d'appel a méconnu l'article 388 du code de procédure pénale ;
"5°) alors qu'à supposer que la méconnaissance de l'interdiction prévue par l'article L. 3120-2 III 1° du code des transports soit constitutive du délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxis, le délit n'est caractérisé que s'il est établi, d'une part, que le conducteur du véhicule, non titulaire d'une autorisation administrative de circuler sur la voie publique, utilisait une application permettant aux personnes souhaitant réserver un véhicule d'en connaître la localisation et la disponibilité et, d'autre part, que ce conducteur utilisait une telle application alors qu'il circulait ou attendait sur la voie publique ; qu'en n'expliquant pas en quoi l'application Uberpop que le prévenu utilisait constituait un système de localisation et d'indication de la disponibilité des véhicules, tel que défini à l'article L. 3120-2 III du code des transports, et ce, quand pourtant le prévenu contestait le fait qu'ait été apportée la moindre preuve en ce sens, en faisant état de constats d'huissier tendant à établir que l'application Uberpop n'était pas un système de localisation et de disponibilité des véhicules, dès lors que cette application permettait certes de connaître la position des véhicules qui y étaient connectés, mais ne comportait aucune information sur leur disponibilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"6°) alors qu'en ne recherchant pas si le prévenu avait utilisé une application telle que définie par l'article L. 3120-2 III 1° du code des transports pendant qu'il se trouvait sur la voie publique, aux fins de trouver des clients, quand elle relevait seulement qu'il avait pris en charge deux passagers qui avaient indiqué l'avoir contacté par l'application Uberpop, avant que le véhicule ne soit intercepté, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu qu'une réglementation nationale, qui sanctionne pénalement le fait d'organiser un système de mise en relation de clients et de chauffeurs non professionnels qui fournissent des prestations de transport routier de personnes à titre onéreux avec des véhicules de moins de dix places au moyen d'une application pour téléphone, sans disposer d'une habilitation à cet effet, porte sur un service dans le domaine des transports et est exclu du champ d'application des articles 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et de l'article 1er de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, modifiée par la directive 98/48/CE, prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information, tel que ces dispositions ont été interprétées par la Cour de Justice de l'Union européenne dans ses décisions C-434/15 du 20 décembre 2017 et C-320/16 du 10 avril 2018 ;
D'où il suit que le grief n'est pas fondé ;
Sur le moyen, pris en ses autres branches :
Attendu que pour déclarer le prévenu coupable d'exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi, l'arrêt énonce, par motifs adoptés, que M. Y... faisait l'objet d'une enquête pour exercice illégal de l'activité de taxi, qu'il a fait l'objet d'un contrôle le 18 mars 2015 au cours duquel il a admis travailler comme chauffeur utilisant l'application Uberpop, que le 16 décembre 2015, il avait déposé plainte pour violences contre des chauffeurs de taxi en se présentant comme chauffeur Uber, et qu'après avoir été repéré et suivi par la police, il a été contrôlé le 21 mars 2015 après avoir pris à bord de sa voiture un passager qui a déclaré avoir commandé la course via l'application Uberpop, en ayant prétendu initialement être un ami du chauffeur ; que les juges ajoutent que M. Y..., a ensuite produit un bon de commande mentionnant la société Uber, pourtant non implantée à Bordeaux, avec des horaires incompatibles avec ladite course, qu'il n'a pas d'autorisation de stationnement, n'a pas produit de documents permettant d'exercer une activité de chauffeur de taxi ou de véhicule de transport avec chauffeur, que l'activité de transport de personnes à titre onéreux exercée par M. Y... n'est pas du covoiturage et que la société Uber incite les chauffeurs Uberpop à la maraude en se rendant à cette fin dans le centre ville de Bordeaux ; que les juges en concluent que M. Y... a agi comme un exploitant taxi et s'est livré à l'exercice illégal de cette activité ;Attendu que, par ces seuls motifs qui établissent que le prévenu, qui n'était pas titulaire d'une autorisation de stationnement, était en quête de clientèle sur une voie ouverte à la circulation publique et n'avait pas justifié d'une réservation préalable, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses première, deuxième, quatrième, cinquième et sixième branche en ce qu'elles critiquent des motifs surabondants, ne saurait être accueilli ;Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 2131-3, L. 2132-3, R. 2131-1 du code du travail, 2 et 591 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'action civile du syndicat autonome des artisans taxis 33 et a condamné le prévenu à verser à ce syndicat la somme de 500 euros à titre d'indemnisation, 500 euros à titre d'indemnité procédurale et 300 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
"aux motifs que quant au syndicat autonome des artisans taxis 33, cette organisation justifie, par production en délibéré en respectant le principe de la contradiction, du cahier administratif qui recense l'ensemble des réunions et délibérations, que depuis près de dix ans, le conseil syndical n'est plus élu mais seul le bureau (qui est une instance qui en découle) fait l'objet d'un vote lors des assemblées générales de ce syndicat ; que le précédent président du syndicat autonome des artisans taxi de Bordeaux et de la Gironde explique par attestation que le syndicat fonctionne en formation de bureau syndical qui est de fait conseil syndical pour toutes les décisions et actions en justice à mettre en oeuvre ; qu'au surplus, la lecture des statuts de ce syndicat montre que le bureau est l'émanation du conseil et qu'il a pour tâche statutaire de subvenir aux besoins administratifs et immédiats des adhérents ; que dans ces conditions la décision prise le 11 juin 2015 par les membres du bureau mandatant la présidente aux fins d'agir en justice dans toutes les procédures est conforme aux statuts de cette organisation de sorte que la constitution de partie civile est recevable ; que sur le fond, en considération du préjudice effectivement et directement subi par ces organisations syndicales qui chacune pour qui les concerne a pour objet de défendre et représenter les exploitants taxis notamment en présence de concurrence déloyale ou d'exercice illégal de la profession de taxi, la cour réforme le jugement entrepris et alloue à chacune des parties civiles la somme de 500 euros ; que l'indemnité procédurale en première instance est minorée à 500 euros pour chacune des parties civiles ;
"alors que ne peuvent agir en justice au nom d'un syndicat professionnel que les personnes qui y sont habilitées par les statuts, ou celles qui reçoivent un mandat exprès de l'organe habilité statutairement ; que pour rejeter le moyen invoquant l'irrecevabilité de l'action du syndicat, remarquant que la présidente qui agissait en son nom n'était pas habilité par le conseil syndical conformément aux statuts, puisqu'elle prétendait fonder son mandat sur une décision du bureau syndical, la cour d'appel a relevé que le bureau était l'émanation de fait du conseil syndical et qu'il avait pour tâche statutaire de subvenir aux besoins administratifs et immédiats des adhérents ; qu'en l'état de tels motifs qui ne constataient pas que le bureau était statutairement habilité à agir en justice, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale" ;

Vu l'article L.2132-3 du code du travail ;
Attendu qu'il se déduit de ce texte que seuls disposent du droit d'ester en justice les représentants des syndicats tirant ce pouvoir, soit des statuts, soit d'un mandat exprès régulier ;
Attendu que, pour déclarer recevable la constitution de partie civile du Syndicat autonome des artisans taxis (SAAT 33), contestée par le prévenu aux motifs que le président de cette structure n'avait pas été autorisé à ester en justice par le conseil syndical en application de l'article 11 des statuts, l'arrêt énonce que depuis dix ans le conseil syndical n'est plus élu mais seulement le bureau qui en découle, que le bureau est l'émanation du Conseil, et que la décision du 11 juin 2015 du bureau syndical mandatant la présidente pour agir en justice est conforme aux statuts de cette organisation, de telle sorte que la constitution de partie civile est recevable ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et du principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale :
Attendu que les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel ; que la déclaration de culpabilité de M. Y..., demandeur au pourvoi partiellement rejeté, étant devenue définitive, par suite du rejet de ses premier et deuxième moyens de cassation, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande de l'Union nationale des taxis ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 16 février 2016, mais en ses seules dispositions civiles relatives au Syndicat autonome des artisans taxis, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Dit que la constitution de partie civile du Syndicat autonome des artisans taxis (SAAT 33) est irrecevable ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Fixe à 2 000 euros la somme que M. X... Y... devra verser à l'Union nationale des taxis au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 11 septembre 2018 n° 16-81.765

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. Loïc A... ,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 16 février 2016, qui, pour travail dissimulé et exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi l'a condamné à 800 euros d'amende, à deux mois de suspension du permis de conduire et a prononcé sur les intérêts civils ;










La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. X..., conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller X..., les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, de la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et BOUCARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Y... ;
Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que M. Loïc A... a été poursuivi devant le tribunal correctionnel des chefs d'exercice d'un travail dissimulé et d'exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi pour avoir transporté des personnes à titre onéreux après un contact pris sur l'application Uberpop ; que les juges du premier degré l'ont déclaré coupable ; que les parties civiles, le prévenu et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;
En cet état :
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, 551, 565 et 591 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la citation à comparaître de M. A... ;
"aux motifs que quant à la citation, force est de constater que la rédaction de la citation relative au travail dissimulé expressément reprise par les premiers juges dans leur motivation correspond au libellé de l'incrimination telle qu'elle résulte de la loi applicable et énonce la période de commission des faits reprochés, le lieu, et l'ensemble des textes répressifs de sorte que le prévenu était en mesure d'organiser sa défense ;
"et aux motifs éventuellement adoptés que la citation ainsi rédigée est suffisamment précise d'autant que le prévenu s'est expliqué dans ses auditions sur la déclaration des revenus tirés de cette activité, le rejet de son dossier par l'URSSAF ;
"1°) alors que selon les articles préliminaire et 551 du code de procédure pénale ainsi que 6, 1 et 3, a de la Convention européenne des droits de l'homme, d'une part, la citation doit énoncer le fait poursuivi et viser le texte de loi qui le réprime, d'autre part, tout prévenu a le droit d'être informé avec certitude et précision de la nature et de la cause de la prévention dont il est l'objet ; que dans les conclusions déposées par le prévenu, il était soutenu que la citation à comparaître était nulle en tant qu'elle visait le travail dissimulé, faute de préciser quelles obligations déclaratives étaient en cause, à l'égard de quels organismes et dans quels délais de telles déclarations devaient être effectuées ; que, pour rejeter le moyen de nullité de la citation, la cour d'appel a estimé que dès lors que la citation reprenait le texte d'incrimination et précisait la date des faits, elle était suffisamment précise ; qu'ainsi, dès lors qu'elle constatait que la citation se contentait de reprendre les termes de l'incrimination, sans plus de précision, la cour d'appel a méconnu les dispositions précitées ;
"2°) alors qu'en estimant par motifs éventuellement adoptés que le prévenu savait nécessairement qu'il était poursuivi pour défaut de déclaration de son activité à l'URSSAF, dès lors qu'il avait été interrogé sur ce point au cours de l'enquête, quand de telles questions ne constituaient aucunement la notification officielle de l'objet des poursuites, la cour d'appel a encore méconnu les dispositions précitées" ;
Attendu que, pour rejeter le moyen pris de la nullité de la citation, l'arrêt énonce que la citation énonce l'incrimination telle quelle résulte de la loi applicable, et énonce la date et le lieu des faits et l'ensemble des textes répressifs de sorte que le prévenu était en mesure d'organiser sa défense ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que le prévenu n'a pu se méprendre sur la portée de la citation et a pu préparer utilement sa défense en déposant des conclusions argumentées sur chacun des délits qui lui étaient reprochés, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 61-1, 385, 593 et 802 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler le procès-verbal d'audition de M. A... , entendu comme suspect, et de la procédure subséquente ;
"aux motifs adoptés qu'en ce qui concerne le moyen tiré du non respect de l'article 61-1 du code de procédure pénale ; qu'auxtermes de l'article 61-1 du code de procédure pénale, la personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction ne peut être entendue librement sur ces faits qu'après avoir été informée de la qualification, de la date et du lieu présumé de l'infraction qu'elle est soupçonnée d'avoir commise ou tenté de commettre -si l'infraction pour laquelle elle est entendue est un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement du droit d'être assisté au cours de son audition par un avocat ; qu'il ressort du premier procès verbal d'audition du prévenu qu'il a été porté à sa connaissance qu'il était soupçonné d'avoir commis ou tenté de commettre l'infraction de "non respect de la réglementation aux tarifs des courses de taxi à Bordeaux" ; qu'il lui a ensuite été notifié, comme mentionné sur le procès verbal, qu'il avait le droit d'être assisté au cours de son audition par un avocat, droit qu'il n'a pas souhaité exercer ; que selon la défense, l'infraction de non respect de la réglementation étant une contravention, et le droit à l'assistance d'un avocat seulement prévu dans le cas d'une infraction qualifiée de crime ou de délit, la notification de ce droit n'est pas valable ; qu'en outre, se pensant poursuivi pour une contravention, le prévenu n'a peut-être pas vu l'intérêt d'être assisté d'un avocat alors qu'il aurait pu y trouver une nécessité s'il avait su qu'il était soupçonné d'avoir commis un délit ; que l'atteinte aux droits de la défense est donc certaine ; que le prévenu a été entendu une deuxième fois par les enquêteurs, toujours selon la procédure d'audition libre ; que lors de cette deuxième audition, il lui a été notifié qu'il était soupçonné d'avoir commis ou tenté de commettre l'infraction de travail dissimulé et d'exercice illégal de la profession de conducteur de taxi ; que le droit à l'assistance d'un avocat lui a été également notifié ; que selon la défense, cette audition est tout aussi nulle au motif que l'infraction d'exercice illégal de la profession de taxi a été abrogée par la loi du 1er octobre 2014 ; que le procès-verbal de saisine préalable à l'audition du prévenu permet d'établir que l'enquête était ouverte des chefs d'exercice illégal de la profession de taxi, défaut d'assurance professionnelle, travail dissimulé ; que ces infractions apparaissent encore sur le procès verbal d'interpellation comme sur toutes les pièces de procédure postérieures à l'audition libre ; que c'est manifestement par une erreur matérielle qu'il a été indiqué au prévenu qu'il était entendu pour "non respect de la réglementation aux tarifs des courses de taxi" puisque le droit à l'avocat lui a été notifié, notification à laquelle l'enquêteur n'aurait pas procédé s'il avait réellement eu l'intention de l'entendre sur une simple contravention ; que toute l'audition a porté sur les conditions de l'exercice du transport de personnes par le prévenu, c'est à dire sur l'exercice illégal de la profession de taxi, le travail dissimulé ; qu'à tout moment, comme cela lui avait également été notifié, le prévenu pouvait mettre fin à cette audition ; que tout aussi regrettable que soit le manque de soin apporté à la procédure, cette erreur matérielle n'a pas fait grief aux droits du prévenu ; que d'ailleurs lorsque dans la deuxième audition, il est bien précisé au prévenu qu'il est soupçonné d'avoir commis un délit, il ne souhaite pas davantage être assisté d'un avocat ; qu'il lui est également notifié qu'en matière correctionnelle, aucune condamnation ne pourra être prononcée à son encontre sur le fondement de ses seules déclarations faute d'avoir pu s'entretenir avec un avocat et être assisté de lui ;
"1°) alors qu'en vertu de l'article 61-1 du code de procédure pénale, la personne suspectée d'un délit doit être informée de la qualification de l'infraction qu'elle soupçonnée d'avoir commise, du droit de quitter les lieux où elle est entendue, du droit de se taire et du droit d'être assisté par un avocat, au cours de ses auditions et confrontations ; qu'in limine litis, la défense a invoqué la nullité du procès-verbal de première audition de M. A... qui avait été informé du fait qu'il était entendu pour des faits qualifiés de non-respect de la tarification des taxis, alors que l'enquête avait été requise pour des faits qualifiés d'exercice illégal de la profession de taxi, de non présentation de l'assurance obligatoire et de travail dissimulé ; que pour rejeter ce moyen de nullité, la cour d'appel a estimé que le procès-verbal ne comportait qu'une erreur matérielle et que celle-ci n'avait pas fait grief aux intérêts de M. A... qui avait été informé de son droit de se taire et du droit à l'assistance d'un avocat, assistance qu'il avait refusée, tant lors de cette audition, qu'ultérieurement, lors de sa seconde audition, lorsqu'il lui avait été précisé qu'il était soupçonné d'exercice illégal de la profession de taxi ; que dès lors que seul le procès-verbal de première audition établissait le contenu de l'information donnée à M. A... , la cour d'appel ne pouvait considérer que ce procès-verbal ne comportait qu'une simple erreur matérielle, aucun autre acte ne pouvant établir que l'information avait porté sur la qualification « d'exercice illégal de la profession de taxi », qui était visée dans le cadre de l'enquête ;
"2°) alors que la cour d'appel a estimé que l'erreur ne faisait pas grief à M. A... , dès lors qu'il avait refusé l'assistance d'un avocat lorsqu'il avait été informé de la qualification exacte des faits à l'occasion de sa seconde audition ; qu'en omettant de prendre en compte le fait que l'erreur dans la qualification avait pu influencer le suspect quant au choix d'exercer ses autres droits, dont celui de se taire, son audition ultérieure ne pouvant couvrir l'atteinte initiale à ses droits, celle-ci pouvant au contraire expliquer qu'il n'ait pas entendu exercer ces droits lorsqu'il a été informé de la réelle qualification des faits, dès lors qu'il avait déjà été entendu, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 88-1 de la Constitution, 8 de la directive 98/34/CE du 2 juin 1998, 111-4 du code pénal, L. 3120-2, L. 3121-1, L. 3121-11, L. 3124-4, R. 3124-11 du code des transports, 388, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. A... coupable d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi et l'a condamné pénalement et civilement ;
"aux motifs que dans le cadre de leur mission, laquelle visait tout particulièrement les conducteurs Uber Pop, les agents ont décidé de procéder à une surveillance rapprochée ; qu'ils ont alors constaté qu'une personne se présentant, elle aussi téléphone en main, au chauffeur, était prise en charge à bord de la Mercedes ; que le véhicule a ensuite pris la direction de la place Tourny pour rejoindre la rue Fondaudège où le passager est descendu du véhicule au niveau de la rue Laclotte ; que c'est à ce moment que les agents ont décidé de procéder à un contrôle ; que le passager du véhicule, M. Hugo Z..., interrogé par les agents de police, a immédiatement indiqué avoir contacté le conducteur du véhicule par le biais de l'application UberPop ; que conduit au commissariat, M. A... a reconnu s'être livré à un transport onéreux de personnes via l'application Uber Pop sans être titulaire ni d'une autorisation de stationnement, ni d'une licence professionnelle ; qu'il a admis ne pas être inscrit au régime social indépendant et a prétendu dans un premier ne pas se livrer à une activité lucrative avant d'admettre que sa profession de barman ne lui rapportait pas de ressources suffisantes et qu'il entendait trouver dans son activité complémentaire un complément de revenus qui lui faisait défaut et d'indiquer qu'il avait une cadence qui lui avait tout récemment permis de faire 17 courses en une nuit ; qu'il sera rappelé que l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L 3121-11 du code des transports permet aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle dans leur commune de rattachement (et) dans une commune faisant partie d'un service commun de taxis (...) » ;que cette autorisation administrative permet ainsi, et c'est là sa finalité première, la quête de clientèle sur la voie publique, cela que l'on soit à l'arrêt à un emplacement signalisé ou que l'on circule en pouvant être hélé par un passant à la recherche d'une voiture de place ; qu'elle ne réserve, en aucun cas aux taxis le monopole du transport particulier des personnes et de leurs bagages à titre onéreux ; que le Conseil constitutionnel l'a explicitement admis dans une décision du 17 octobre 2014, qui se prononce sur le champ de la protection accordée aux taxis telle qu'attachée à l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 ; qu'il convient vient toutefois de relever que depuis la loi Thevenoud du 1er octobre 2014 l'article L. 3120-2 du code des transports prévoit en son point III qu'est un acte prohibé « 1° le fait d'informer un client, avant la réservation mentionnée au 1° du II du présent article, quel que soit le moyen utilisé, à la fois de la localisation et de la disponibilité d'un véhicule mentionné au I quand il est situé sur la voie ouverte à la circulation publique sans que son propriétaire ou son exploitant soit titulaire d'une autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 » ; que le Conseil constitutionnel dans une décision n° 2015-468/469/472 QPC du 22 mai 2015 a validé ce que l'on dénomme le maraudage électronique, désormais autorisé pour les seuls taxis, en considérant que le législateur avait entendu, pour les motifs d'ordre public de police de la circulation et du stationnement, garantir l'effectivité de leur monopole légal qui découle du fait lorsqu'ils ont seuls la possibilité de stationner sur la voie publique et d'y circuler en quête de clients ; qu'à partir du moment où le maraudage électronique est autorisé aux seuls taxis et découle de l'autorisation de stationnement qui leur est délivré, il doit être considéré que le fait de se livrer à un tel maraudage en circulant sur la voie publique est constitutif de l'infraction d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi, cela alors même que le véhicule piloté ne correspondrait pas à la définition du taxi, telle qu'elle résulte des articles L. 3121,R. 3121 et R. 3121-7 du code des transports ; qu'on considère en effet habituellement qu'adopter un comportement qui n'est permis que par une autorisation professionnelle spécifique accordée à une profession, sans être détenteur d'une telle autorisation, revient à s'arroger les prérogatives de cette profession et à l'exercer illégalement, cela même si le véhicule conduit est, par exemple un VTC (cf. Crim. 27 octobre 2015 pourvoi: 14-84134) ; que l'acte de poursuite est ainsi rédigé au cas particulier : il est reproché au prévenu d'avoir à Bordeaux exercé illégalement l'activité d'exploitant de taxi en l'espèce sic «en effectuant, à la demande de la clientèle le transport particulier des personnes et de leurs bagages à titre onéreux, ou en attendant à cette fin la clientèle sur la voie publique, sans être titulaire de l'autorisation de stationnement délivrée par l'autorité compétente», délit défini par les articles L. 3124-4, § 1,3121-1, 3121-11, R. 3121-5, R. 3129 du code des transports ; que selon l'article L. 3124-4 du code des transports est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende le fait d'effectuer à la demande et à titre onéreux le transport particulier de personnes et de bagages sans être titulaire d'une autorisation de stationnement sur la voie publique en attente de clientèle, ou d'exercer l'activité de conducteur de taxi sans être titulaire de la carte professionnelle en cours de validité ; qu'aux termes de l'article L. 3121-11 du code des transports, texte notamment visé par la poursuite et ensuite modifié par la loi 2015-990 du 6 août 2015, la définition de l'autorisation visée par l'article était la suivante : "L'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du présent code permet aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle (c'est le maraudage) dans leur commune de rattachement.... En dehors du ressort de l'autorisation de stationnement, les conducteurs de taxis sont soumis à l'article L. 3120-2 du présent code, notamment s'agissant de la prise en charge de la clientèle sur la voie ouverte à la circulation publique sous réserve de justification d'une réservation préalable." ; qu'il n'est pas fait allusion au maraudage électronique visé à l'article L. 3120-2 du code des transports en son point III auquel le titulaire de l'autorisation de stationnement peut, désormais, depuis la loi Thevenoud, seul recourir et qui permet de garantir réflectivité du monopole à lui conféré ; que le client n'est certes pas trouvé sur la voie publique et ne hèle pas le taxi depuis cette voie l'article L. 3120-2 susvisé a été à toutes fins mis dans les débats par la cour mais il doit être considéré que ce visa était superfétatoire à partir du moment où le maraudage électronique n'est rien d'autre qu'un type de maraudage qui, dans sa globalité, relève du monopole découlant de l'autorisation qu'il faut détenir pour s'y livrer ; que se livrer au maraudage électronique, lorsqu'on n'a pas d'autorisation, c'est s'arroger abusivement une prérogative découlant de cette autorisation, ce qu'entend réprimer l'article L. 3124-4 du code des transports ; qu'en conséquence, c'est à bon droit que le tribunal a déclaré le prévenu coupable des faits à lui reprochés ;
"1°) alors que la loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article L. 3224-4 du code des transports, applicable depuis le 3 octobre 2014, incrimine le fait d'exercer l'activité d'exploitant de taxi sans être titulaire de l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du même code ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a condamné le prévenu pour exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxis, en relevant que si l'activité de transport de particuliers à titre onéreux n'était pas un monopole des exploitants de taxis, ce qui ne permettait pas de retenir le délit, en revanche l'article L. 3120-2 III interdisant l'utilisation d'un système de localisation et de disponibilité d'un véhicule de transports sans être muni d'une autorisation de stationnement constituait un monopole des conducteurs de taxis dont le non-respect entrait dans le cadre de l'incrimination ; que l'interdiction d'utiliser un système de localisation et de disponibilité d'un véhicule de transport de particuliers s'appliquant non seulement aux personnes qui ne sont pas titulaires d'une autorisation de stationnement mais également aux conducteurs de taxis circulant hors du ressort de leur autorisation de stationnement et la méconnaissance d'une telle interdiction n'impliquant en elle-même aucun acte d'exploitation d'un véhicule de transport de particuliers, faute de viser la prise en charge de passagers, le non respect de cette interdiction n'entre pas dans le cadre du délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi ; qu'ainsi, la cour d'appel a méconnu les articles 111-4 du code pénal, L. 3120-2 III et L. 3224-4 du code des transports ;
"2°) alors que l'article R. 3124-11 du code des transports incriminait spécialement le non-respect du III de l'article L. 3120-2, à l'époque des faits ; qu'en retenant à l'encontre du prévenu le fait d'avoir méconnu l'interdiction de l'article L. 3120-2 III du code des transports, la cour d'appel aurait dû constater que ce fait n'était constitutif que de la contravention de l'article R. 3124-11 du code des transports ; que cet article R. 3124-11 ayant été annulé par le Conseil d'Etat, l'arrêt attaqué ne trouve plus de base légale et doit être annulé ;
"3°) alors qu'il appartient au juge répressif d'écarter l'application d'un texte de droit interne fondant des poursuites lorsque ce dernier méconnaît une disposition du Traité de fonctionnement de l'Union européenne ou un texte pris pour l'application de celui-ci ; qu'à supposer le délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi caractérisé en présence de la méconnaissance de l'interdiction d'utiliser un système de localisation et disponibilité en circulant sur la voie publique, sans autorisation de stationnement, prévu par l'article L. 3120-2 du code des transports, la cour d'appel aurait du laisser inappliquée cette disposition, en tant qu'elle comportait des modifications de règles techniques applicables aux transports de particuliers qui n'avaient pas été adoptées conformément à la procédure prévue l'article 8 de la directive 98/34/CE, imposant aux Etats membres d'informer la Commission européenne de tout projet de norme ou réglementation technique en matière de services d'information afin de lui permettre d'émettre un avis, voire de proposer l'adoption d'une directive en ce domaine ; qu'ainsi, la cour d'appel a méconnu l'article 8 de la directive précitée et l'article 88-1 de la Constitution ;
"4°) alors que les juges ne peuvent statuer que sur les faits visés à la prévention ; que l'acte de prévention visait le fait d'exercer une activité de transports de particuliers « en attendant à cette fin la clientèle sur la voie publique »; que l'interdiction de stationner ou de circuler sur la voie publique, en utilisant un système de localisation et de disponibilité de son véhicule, en l'absence d'une autorisation administrative de stationnement, n'étant pas visée à la prévention, laquelle ne renvoyait en outre aucunement à la méconnaissance de l'article L. 3120-2 III du code des transports au titre des textes de répression, en condamnant le prévenu pour utilisation d'un tel système de localisation et de disponibilité de son véhicule, sans autorisation de transport, la cour d'appel a méconnu l'article 388 du code de procédure pénale ;
"5°) alors qu'à supposer que la méconnaissance de l'interdiction prévue par l'article L. 3120-2 III 1° du code des transports soit constitutive du délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxis, le délit n'est caractérisé que s'il est établi, d'une part, que le conducteur du véhicule, non titulaire d'une autorisation administrative de circuler sur la voie publique, utilisait une application permettant aux personnes souhaitant réserver un véhicule d'en connaître la localisation et la disponibilité et, d'autre part, que ce conducteur utilisait une telle application alors qu'il circulait ou attendait sur la voie publique ; qu'en n'expliquant pas en quoi l'application Uber Pop que le prévenu utilisait constituait un système de localisation et d'indication de la disponibilité des véhicules, tel que défini à l'article L. 3120-2 III du code des transports, et ce, quand pourtant le prévenu contestait le fait qu'ait été apportée la moindre preuve en ce sens, en faisant état de constats d'huissier tendant à établir que l'application Uber Pop n'était pas un système de localisation et de disponibilité des véhicules, dès lors que cette application permettait certes de connaître la position des véhicules qui y étaient connectés, mais ne comportait aucune information sur leur disponibilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"6°) alors qu'en ne recherchant pas si le prévenu avait utilisé une application telle que définie par l'article L. 3120-2 III 1° du code des transports pendant qu'il se trouvait sur la voie publique, aux fins de trouver des clients, quand elle relevait seulement qu'il avait pris en charge trois passagers pour un trajet dont l'un avait indiqué l'avoir contacté par l'application Uber Pop, avant que le véhicule ne soit intercepté, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Sur le troisième moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu qu'une réglementation nationale, qui sanctionne pénalement le fait d'organiser un système de mise en relation de clients et de chauffeurs non professionnels qui fournissent des prestations de transport routier de personnes à titre onéreux avec des véhicules de moins de dix places au moyen d'une application pour téléphone, sans disposer d'une habilitation à cet effet, porte sur un service dans le domaine des transports et est exclu du champ d'application de l'article 56 du Traité sur le fonctionnement de l'union européenne et de l'article 1er de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, modifiée par la directive 98/48/CE, prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information, tel que ces dispositions ont été interprétées par les décisions C-434/15 du 20 décembre 2017 et C-320/16 du 10 avril 2018 de la Cour de Justice de l'Union européenne ;
D'où il suit que le grief n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen :
Sur le troisième moyen, pris en ses autres branches :
Attendu que, pour déclarer le prévenu coupable d'exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi, l'arrêt énonce, par motifs adoptés, que M. A... a fait l'objet le 13 février 2015 d'un contrôle à bord d'un véhicule Mercédès où il est apparu qu'il transportait à titre onéreux une personne pour une course à l'aide de l'application Uberpop, qu'il a produit des documents montrant que cette activité lui avait rapporté 3 553 euros en février et en mars 2015 ; que les juges ajoutent que la société Uber incite par écrit les chauffeurs utilisant l'application Uberpop à la maraude dans le centre ville de Bordeaux et que M. A... , qui réside dans une commune distante de 10 km du centre de Bordeaux, stationne nécessairement dans cette ville dans l'attente de courses ; que les juges en concluent que M. A... , qui n'a pas d'autorisation de stationnement ni de documents lui permettant d'exercer la profession de taxi, s'est livré à l'exercice illégal de cette activité ;
Attendu qu'en l'état de ses seules énonciations qui établissent que le prévenu était en quête de clientèle sur la voie publique sans être titulaire d'une autorisation de stationnement, abstraction faite de motifs surabondants fondés sur les déclarations faites par le prévenu dans sa première audition libre au début de laquelle une infraction erronée lui a été notifiée, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que les moyens, inopérant pour le troisième moyen pris en ses première, deuxième, quatrième, cinquième et sixième branche, en ce qu'elles critiquent des motifs surabondants, ne sauraient être accueillis ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 8221-1, L. 8221-3, L. 8224-1 du code du travail, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. A... coupable de travail dissimulé par dissimulation d'activité et l'a condamné pénalement et civilement ;
"aux motifs que selon l'article L. 8221-3 du code du travail, la dissimulation d'activité est la situation d'une personne physique ou d'une personne morale qui se livre à une activité artisanale, commerciale libérale ou agricole sans requérir son immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ou sans effectuer les déclarations obligatoires aux organismes de protection sociales ou à l'administration fiscale ; qu'il résulte d'une jurisprudence bien assise qu'entre dans le champ d'application de ce délit toutes les activités accomplies dans un but lucratif (Crim. 19 février 2013 pourvoi 12-80440 droit social 2013 p 631 note Salomon ) exercées aussi bien par des commerçants, des sociétés, des travailleurs indépendants ou des professions libérales, l'auteur devant avoir l'intention de retirer un gain, un avantage de son activité illégale, même si en définitive l'intérêt qu'il en tire se trouve minime ; qu'il est précisé que, selon l'article L. 8221-4 du code du travail sont présumés, sauf preuve contraire, accomplies à titre lucratif certaines activités lorsque la fréquence ou leur importance est établie (cf. Crim. 7 décembre 2004 pourvoi 04 -81721) ou lorsque la facturation est absente ou frauduleuse ; qu'à cet égard, il doit être relever que lors de son audition le prévenu a admis qu'il se livrait à l'activité qui lui est reprochée depuis plusieurs mois, la nuit de façon régulière, cela en dehors de tout contrat de travail, alors qu'il n'est pas contesté par lui qu'il n'avait fait aucune démarche pour s'affilier au régime social des indépendants et qu'il poursuivait cette activité pour améliorer ses revenus ; qu'en effet M. A... a été inscrit auprès du RSI Aquitaine du 24 juin 2011 au 30 juin 2013 en qualité d'auto-entrepreneur pour une activité de commerce de détail spécialisé en pains sous le RCS 533.263.628 et n'a eu aucun revenu de sorte qu'il a été radié à compter du 30 juin 2013 compte tenu des chiffres d'affaires nuls pendant deux ans ; que pour la période de travail dissimulé à lui reprochée qui court du 8 au 13 février 2015 il n'y a pas eu d'affiliation au RSI et si c'est à tort que le tribunal s'est appuyé pour faire sa démonstration de culpabilité sur une période de temps outrepassant sa saisine, il n'en demeure pas moins que le prévenu n'était pas affilié pour la période visée à la à la prévention ; que l'élément moral de l'infraction s'évince de l'abstention volontaire du prévenu de déclarer son activité qu'il exerçait depuis peu de temps mais de manière soutenue ; qu'en conséquence le jugement est confirmé sur cette infraction ;
"1°) alors que l'article L.8224-1 du code du travail incrimine la dissimulation d'une activité de nature à créer un gain pour la personne l'exerçant ; qu'en ne recherchant pas si le prévenu pouvait prétendre réaliser un bénéfice au vu des tarifs pratiqués, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"2°) alors que l'article L. 8224-1 du code du travail incrimine la soustraction aux obligations déclaratives visées dans l'article L. 8221-3 ; qu'en ne précisant pas dans quel délai devait être réalisée la déclaration d'activité à l'URSSAF ou à l'administration fiscale, la cour d'appel n'a pu justifier la décision par laquelle elle a estimé que le prévenu avait dissimulé son activité, quand il indiquait avoir entrepris de se déclarer en auto-entrepreneur le 17 février 2015 ;
"3°) alors que l'article L. 8224-1 du code du travail incrimine la soustraction intentionnelle aux obligations déclaratives visées dans l'article L. 8221-3 ; qu'elle implique nécessairement l'intention d'échapper à tout contrôle des administrations auprès desquelles doivent être faites les déclarations ; que l'importance d'une activité ne constitue qu'un élément de présomption du caractère lucratif d'une activité ; que la cour d'appel a déduit l'intention coupable de l'abstention du prévenu de déclarer son activité qu'il exerçait « depuis peu de temps mais de manière soutenue » ; que le seul fait d'exercer une activité de manière soutenue, pouvant au plus faire présumer le caractère lucratif de l'activité, ne suffisait pas pour caractériser l'intention de dissimuler l'activité aux fins d'échapper au contrôle des différentes administrations visées dans l'article L. 8221-3 précité ;
"4°) alors que l'article L. 8224-1 du code du travail incrimine la soustraction intentionnelle aux obligations déclaratives visées dans l'article L. 8221-3 ; que les juges sont tenus de répondre aux chefs péremptoires de conclusions ; qu'en considérant que le prévenu avait commis intentionnellement l'infraction, sans répondre à ses conclusions selon lesquelles, s'il n'avait pas déclaré son activité, cette omission s'expliquait par le fait qu'il s'était fondé sur les informations délivrées par le site Uber qui indiquait que jusqu'à un certain niveau de revenu tiré de l'activité, aucune déclaration en qualité de travailleur indépendant n'était nécessaire, ces revenus devant être considérés comme une participation aux frais du véhicule par le passager, admis dans le cadre du covoiturage ; qu'elle n'a ainsi pu justifier sa décision" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions régulièrement déposées devant elle et caractérisé, en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit de travail dissimulé dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;
Sur le sixième moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-1 et 132-20 du code pénal, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. A... , à titre de peine complémentaire, à la suspension de son permis de conduire pendant deux mois ;
"aux motifs qu'en considération de la situation personnelle du prévenu, de la brève période de commission des faits, la cour réforme le jugement sur la peine et inflige au prévenu une amende de 800 euros et la suspension du permis de conduire pendant deuxmois ;
"alors qu'il résulte des articles 132-1, 132-20 alinéa 2 du code pénal et 485 du code de procédure pénale qu'en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; que la cour d'appel a condamné le prévenu, à titre de peine complémentaire, à la suspension de son permis de conduire pendant deux mois, sans aucunement motiver la peine prononcée ; qu'elle a ainsi méconnu les articles précités" ;
Attendu que pour condamner le prévenu à une peine de 800 euros d'amende et de deux mois de suspension de son permis de conduire, l'arrêt attaqué énonce, par motifs propres et adoptés, que le prévenu exerce la profession de barman, qu'il déclare percevoir à ce titre 400 euros par mois, qu'il est propriétaire d'un véhicule Velsatis et son épouse d'une Mercédès , qu'il se livrait de manière soutenue au transport de personnes à titre onéreux pour compléter ses revenus, sans être déclaré, que la concurrence des taxis Uberpop est loin d'être négligeable, qu' outre son caractère déloyal, cette activité illicite porte atteinte à la profession de taxi, entraîne un trouble économique et un trouble à l'ordre public, que les délits de travail dissimulé et d'exercice illégal de la profession de taxi sont punis de peines sévères, et qu'il convient d'apprécier la peine eu égard à la situation personnelle du prévenu et à la brève période de commission des faits ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors qu'elle a motivé les peines correctionnelles au regard des circonstances des infractions, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Mais sur le cinquième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 2131-3, L. 2132-3, R. 2131-1 du code du travail, 2 et 591 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'action civile du syndicat autonome des artisans taxis 33 et a condamné le prévenu à verser à ce syndicat la somme de 500 euros à titre d'indemnisation, 500 euros à titre d'indemnité procédurale et 300 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
"aux motifs que quant au syndicat autonome des artisans taxis 33, cette organisation justifie, par production en délibéré en respectant le principe de la contradiction, du cahier administratif qui recense l'ensemble des réunions et délibérations, que depuis près de dix ans, le Conseil syndical n'est plus élu mais seul le bureau (qui est une instance qui en découle) fait l'objet d'un vote lors des assemblées générales de ce syndicat ; que le précédent président du syndicat autonome des artisans taxi de Bordeaux et de la Gironde explique par attestation que le syndicat fonctionne en formation de bureau syndical qui est de fait conseil syndical pour toutes les décisions et actions en justice à mettre en oeuvre ; qu'au surplus, la lecture des statuts de ce syndicat montre que le bureau est l'émanation du Conseil et qu'il a pour tâche statutaire de subvenir aux besoins administratifs et immédiats des adhérents ; que dans ces conditions la décision prise le 11 juin 2015 par les membres du bureau mandatant la présidente aux fins d'agir en justice dans toutes les procédures est conforme aux statuts de cette organisation de sorte que la constitution de partie civile est recevable Sur le fond, en considération du préjudice effectivement et directement subi par ces organisations syndicales qui chacune pour qui les concerne a pour objet de défendre et représenter les exploitants taxis notamment en présence de concurrence déloyale ou d'exercice illégal de la profession de taxi, la cour réforme le jugement entrepris et alloue à chacune des parties civiles la somme de 500 euros ; que l'indemnité procédurale en première instance est minorée à 500 euros pour chacune des parties civiles ;
"alors que ne peuvent agir en justice au nom d'un syndicat professionnel que les personnes qui y sont habilitées par les statuts, ou celles qui reçoivent un mandat exprès de l'organe habilité statutairement ; que pour rejeter le moyen invoquant l'irrecevabilité de l'action du syndicat, remarquant que la présidente qui agissait en son nom n'était pas habilité par le conseil syndical conformément aux statuts, puisqu'elle prétendait fonder son mandat sur une décision du bureau syndical, la cour d'appel a relevé que le bureau était l'émanation de fait du conseil syndical et qu'il avait pour tâche statutaire de subvenir aux besoins administratifs et immédiats des adhérents ; qu'en l'état de tels motifs qui ne constataient pas que le bureau était statutairement habilité à agir en justice, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale" ;
Vu l'article L.2132-3 du code du travail ;
Attendu qu'il se déduit de ce texte que seuls disposent du droit d'ester en justice les représentants des syndicats tirant ce pouvoir, soit des statuts, soit d'un mandat exprès régulier ;
Attendu que, pour déclarer recevable la constitution de partie civile du Syndicat autonome des artisans taxis, contestée par le prévenu aux motifs que le président de cette structure n'avait pas été autorisé à ester en justice par le conseil syndical en application de l'article 11 des statuts, l'arrêt énonce que depuis dix ans le conseil syndical n'est plus élu mais seulement le bureau qui en découle, que le bureau est l'émanation du Conseil, et que la décision du 11 juin 2015 du bureau syndical mandatant la présidente pour agir en justice est conforme aux statuts de cette organisation, de telle sorte que la constitution de partie civile est recevable ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale :
Attendu que les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel ; que la déclaration de culpabilité étant devenue définitive, par suite du rejet de ses premier, deuxième, troisième et quatrième moyens de cassation, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande de l'Union des taxis ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 16 février 2016, mais en ses seules dispositions civiles relatives au Syndicat autonome des artisans taxis (SAAT33), toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;Dit que la constitution de partie civile du Syndicat autonome des artisans taxis (SAAT 33) est irrecevable ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Fixe à 2 000 euros la somme que M. Loïc A... devra verser à l'Union nationale des taxis au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 11 septembre 2018 n° 16-81.763

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. Jacques X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 16 février 2016, qui, pour exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi, l'a condamné à 1 500 euros d'amende, deux mois de suspension du permis de conduire et a prononcé sur les intérêts civils ;





La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 26 juin 2018 où étaient présents : M. Soulard, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, Mme Dreiffuss-Netter, M. Fossier, Mmes Schneider, Ingall-Montagnier, M. Lavielle, conseillers de la chambre, Mmes Harel-Dutirou, Guého, conseillers référendaires ;
Avocat Général : M. Cordier
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller BELLENGER, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, la société civile professionnelle THOUIN-PALAT et BOUCARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général CORDIER ;
Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que, le 24 mars 2015, M. Jacques X..., retraité, qui était déjà connu des services de police et dont le véhicule avait été enregistré dans le système de lecture automatique des plaques d'immatriculation, a été contrôlé alors qu'il transportait à titre onéreux deux passagers, pris sur la voie publique, qui ont déclaré avoir commandé leur course à l'aide de l'application Uberpop ; que M. X... a été cité devant le tribunal correctionnel du chef d'exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi ; que le tribunal l'a déclaré coupable ; que l'Union nationale des taxis et le Syndicat autonome des artisans taxis (SAAT 33), parties civiles, le prévenu et le procureur de la République ont relevé appel de cette décision ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 233-1 du code de la sécurité intérieure, 53, 591, 385, 593 et 802 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande d'annulation de la procédure d'enquête concernant M. X... ;
"aux motifs adoptés qu'en ce qui concerne le moyen tiré de l'utilisation illégale du dispositif LAPI, il s'agit d'un dispositif de Lecture Automatisé des Plaques d'Immatriculation ; qu'en raison de l'enquête en cours, l'immatriculation du véhicule du prévenu avait été enregistrée dans le fichier FOVES qui alimente directement et automatiquement le système LAPI ce qui a permis aux fonctionnaires de police, de repérer le véhicule en passant à proximité, et d'entamer la surveillance du véhicule puis de l'intercepter ; que le dispositif LAPI a simplement permis aux fonctionnaires de police de découvrir le véhicule qu'ils recherchaient dans le cadre des infractions poursuivies ; que cependant, selon la défense, conformément à l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure, ce dispositif ne pouvait être utilisé que dans le but de prévenir ou de réprimer le terrorisme, constater des infractions criminelles ou nées à la criminalité organisée au sens de l'article 706-73 du code de procédure pénale ou des infractions de vol et de recel de véhicules volés ou des infractions de contrebande, d'importation ou d'exportation commises en bande organisée prévues et réprimées par l'article 414 du code des douanes ou des opérations financières portant sur des fonds issus des précédentes infractions conformément à l'article 415 du même code ; que l'article L. 233-1 permet également l'emploi de ce dispositif, par les services de police ou de gendarmerie, à titre temporaire pour la préservation de l'ordre public, à l'occasion d'événements particuliers ou de grands rassemblements de personnes par décision de l'autorité administrative ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ; que l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure, stipule donc que le dispositif LAPI peut être utilisé dans le but de prévenir ou de réprimer des infractions criminelles ou liées à la criminalité organisée au sens de l'article 706-73 du code de procédure pénale ; que l'article 706-73 du code de procédure pénale se rapporte dans son 20e créé par la loi du 10 juillet 2014 aux délits de dissimulation d'activité ... ; qu'en conséquence, il apparaît qu'il a été fait du dispositif LAPI un usage conforme à la loi et ce moyen de nullité ne saurait prospérer ; qu'en ce qui concerne l'absence d'indice objectif de commission d'une infraction permettant le recours à la procédure de flagrant délit, sur directive du parquet, une enquête était diligentée concernant l'exercice de la profession de taxi ; que l'immatriculation du véhicule du prévenu avait été portée à la connaissance des enquêteurs comme pouvant être celui d'un chauffeur Uber ; que M. X... s'était par ailleurs, ainsi que cela ressort des pièces communiquées par la défense, le 15 puis le 18 janvier 2015, présenté au commissariat de Bordeaux pour faire des "déclarations de main courante" pour signaler des différends avec des chauffeurs de taxi ; qu'il se présentait comme "travaillant pour Uber"ou chauffeur Uber" ; qu'il était donc parfaitement connu des services de police comme pouvant se livrer au transport de personnes ; que le24 mars 2015, les fonctionnaires de police ont d'abord repéré le véhicule en stationnement, puis ayant suivi le véhicule conduit par le prévenu et constate que deux passagers se trouvaient à bord, les fonctionnaires ont procédé au contrôle ; que le prévenu étant connu comme étant « chauffeur Uber », la présence de deux passagers était un élément suffisamment objectif, une raison plausible de soupçonner qu'il était entrain de commettre un délit lié à un transport de personnes effectué dans des conditions illégales ; que les fonctionnaires de police pouvaient donc légitimement agir selon la procédure de flagrance conformément à l'article 53 du code de procédure pénale lequel n'exige que l'existence d'indices de commission d'une infraction ;
"1°) alors que la police ne peut recourir à l'utilisation de procédés illégaux pour établir des infractions ou en découvrir les auteurs ; qu'en vertu de l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure, les services de police et de gendarmerie nationales et des douanes peuvent mettre en oeuvre des dispositifs fixes ou mobiles de contrôle automatisé des données signalétiques des véhicules prenant la photographie de leurs occupants, en tous points appropriés du territoire, afin d'établir une liste limitative d'infractions et d'en découvrir les auteurs ; qu'ainsi peuvent donner à introduction dans le traitement automatisé les seuls crimes visés par l'article 706-73 du code de procédure pénale, à l'exclusion de la délinquance organisée ; qu'en l'espèce, le prévenu a été interpellé alors qu'il conduisait son véhicule et se trouvait en compagnie de passagers, par un agent de police en mission de surveillance de la circulation routière ; que cet agent a indiqué qu'alors qu'il utilisait le système LAPI, celui-ci s'était déclenché au passage du véhicule du prévenu ; qu'il apparaissait que celui-ci était inscrit dans ce fichier comme conducteur d'un véhicule Uber Pop ; que pour rejeter le moyen de nullité de cette interpellation et des actes subséquents, invoquant le fait que le système LAPI, trouvant son fondement dans l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure avait été détourné, la cour d'appel a jugé, par adoption de motifs, que le fichage du prévenu dans le traitement automatisé des plaques d'immatriculation, était justifié dès lors que l'article 706-73 20° du code de procédure pénale visait les délits de dissimulation d'activité ; qu'ainsi, il a méconnu l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure qui n'a autorisé que le traitement automatisé des plaques d'immatriculation, en lien avec les crimes visés par l'article 706-73, à l'exclusion des délits, dont ceux de son 20° ;
"2°) alors que pour pouvoir agir dans le cadre de la procédure de flagrant délit, et mettre en oeuvre les pouvoirs prévus aux articles 53 et suivants du code de procédure pénale, un officier de police judiciaire doit avoir eu, au préalable, connaissance d'indices apparents d'un comportement révélant l'existence d'une infraction en train ou venant de se commettre ; que pour retenir le caractère flagrant de l'infraction, la cour d'appel a considéré que dès lors que le prévenu était déjà connu comme un chauffeur Uberpop et transportait des passagers, il en résultait des indices apparents permettant de supposer qu'il était entrain de commettre un délit lié à un transport de personnes effectué dans des conditions illégales ; que le fichage, par ailleurs illégal, portant sur des faits qui n'avaient donné lieu à aucune poursuite et le constat que le prévenu transportait un passager ne constituant pas des indices apparents du fait que le prévenu était en train de commettre le délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi, la cour d'appel a méconnu l'article 53 du code de procédure pénale" ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité tirée de l'illégalité du dispositif de lecture automatique des plaques d'immatriculations (LAPI), l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que le dispositif de lecture automatique des plaques d'immatriculation, prévu en application de l'article L. 233-1 du code de la sécurité intérieure pour les délits énumérés à l'article 706-73 du code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable au moment des faits, prévoyait en son 20°, qu'il pouvait être mis en oeuvre pour les délits de dissimulation d'activités ou de salariés et de recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé, infractions dont M. X..., déjà condamné pour travail dissimulé et connu pour ses activités de chauffeur Uberpop était soupçonné, la cour d'appel a justifié sa décision;
D'où il suit que le grief ne peut qu'être écarté ;
Sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité tirée de la mise en oeuvre illicite par les officiers de police judiciaire des pouvoirs découlant de la procédure de flagrance, l'arrêt, retient notamment, par motifs propres et adoptés, qu'au passage du véhicule conduit par M. X..., les policiers, alertés par le dispositif de lecture automatisé des plaques d'immatriculation, régulièrement renseigné suite à une enquête ayant mis en exergue un soupçon d'activité illicite de transport et de travail dissimulé, et connaissant parfaitement le conducteur qui avait indiqué antérieurement exercer cette activité de transport de personnes en déposant des mains-courantes à la suite d'incidents avec des taxis, ont constaté que deux passagers étaient transportés dans ce véhicule, ce qui constituait l'indice apparent d'un comportement délictueux ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 88-1 de la Constitution, 8 de la directive 98/34/CE du 22 juin 1998, 111-4 du code pénal, L. 3120-2, L. 3121-1, L. 3121-11, L .3124-4, R. 3124-11 du code des transports, 388, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi et l'a condamné pénalement et civilement ;
"aux motifs qu'il résulte de la procédure que le 24 mars 2015 à 17 heures 55 alors qu'il conduisait son véhicule de marque Audi, M. X... était contrôlé par les agents de police judiciaire de l'unité de la sécurité routière de Bordeaux alors que se trouvaient à bord du véhicule deux passagers qui indiquaient avoir contacté le conducteur du véhicule par le biais de l'application Uberpop ; que les enquêteurs reconnaissaient dans ce véhicule Audi le véhicule qu'ils avaient découvert par le système LAPI [...] quelques jours auparavant le 21 mars 2015 ; que le prévenu expliquait que pour compléter ses revenus obérés par des saisies importantes ; qu'il avait découvert l'activité de chauffeur Uber par le biais d'internet en novembre début décembre 2014, s'était inscrit et avait démarré début janvier 2015 une activité qui lui avait rapporté 400 à 500 euros par mois à raison de 5 à 6 courses pour jour ; qu'à l'audience de la cour, le prévenu par le truchement de son conseil fait plaider et conclure à sa relaxe ; que M. X... soutient en substance que l'appellation de taxis ne peut être attribuée qu'à des véhicules remplissant les conditions d'être munis d'équipements spéciaux et d'un terminal de paiement ; qu'en outre l'activité qu'il lui est reproché d'avoir exercé ne ressortait nullement de celle que la loi attache à l'autorisation de stationnement ; que l'activité protégée est limitée à la quête de clientèle sur la voie publique et le prévenu n'a nullement exercé une telle activité ; que l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-11 du code des transports permet aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle dans leur commune de rattachement (et) dans une commune faisant partie d'un service commun de taxis (...) ; que cette autorisation administrative permet ainsi, et c'est là sa finalité première, la quête de clientèle sur la voie publique, cela que l'on soit à l'arrêt à un emplacement signalisé ou que l'on circule en pouvant être hélé par un passant à la recherche d'une voiture de place ; qu'elle ne réserve, en aucun cas aux taxis le monopole du transport particulier des personnes et de leurs bagages à titre onéreux ; que le Conseil constitutionnel l'a explicitement admis dans une décision du 17 octobre 2014, qui se prononce sur le champ de la protection accordée aux taxis telle qu'attachée à l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 312 1-1 ; qu'il convient vient toutefois de relever que depuis la loi Thevenoud du 1er octobre 2014 l'article L. 3120-2 du code des transports prévoit en son point III qu'est un acte prohibé « 1° le fait d'informer un client, avant la réservation mentionnée au 1° du II du présent article, quel que soit le moyen utilisé, à la fois de la localisation et de la disponibilité d'un véhicule mentionné au I quand il est situé sur la voie ouverte à la circulation publique sans que son propriétaire ou son exploitant soit titulaire d'une autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 » ; que le Conseil constitutionnel dans une décision n° 2015-468/469/472 QPC du 22 mai 2015 a validé ce que l'on dénomme le maraudage électronique, désormais autorisé pour les seuls taxis, en considérant que le législateur avait entendu, pour les motifs d'ordre public de police de la circulation et du stationnement, garantir l'effectivité de leur monopole légal qui découle du fait lorsqu'ils ont seuls la possibilité de stationner sur la voie publique et d'y circuler en quête de clients ; qu'à partir du moment où le maraudage électronique est autorisé aux seuls taxis et découle de l'autorisation de stationnement qui leur est délivré, il doit être considéré que le fait de se livrer à un tel maraudage en circulant sur la voie publique est constitutif de l'infraction d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi, cela alors même que le véhicule piloté ne correspondrait pas à la définition du taxi, telle qu'elle résulte des articles L. 3121, R. 3121 et R. 3121-7 du code des transports ; qu'on considère en effet habituellement qu'adopter un comportement qui n'est permis que par une autorisation professionnelle spécifique accordée à une profession, sans être détenteur d'une telle autorisation, revient à s'arroger les prérogatives de cette profession et à l'exercer illégalement, cela même si le véhicule conduit est, par exemple un VTC (cf. Crim. 27 octobre 2015 pourvoi : 14-84134) ; qu'il est reproché au prévenu d'avoir à Bordeaux exercé illégalement l'activité d'exploitant de taxi en l'espèce sic « en effectuant, à la demande de la clientèle le transport particulier des personnes et de leurs bagages à titre onéreux, ou en attendant à cette fin la clientèle sur la voie publique, sans être titulaire de l'autorisation de stationnement délivrée par l'autorité compétente », délit défini par les articles L. 3124-4, § 1, 3121-1 3121-11, R. 3121-5, R. 3129 du code des transports ; que selon l'article L. 3124-4 du code des transports est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende le fait d'effectuer à la demande et à titre onéreux le transport particulier de personnes et de bagages sans être titulaire d'une autorisation de stationnement sur la voie publique en attente de clientèle, ou d'exercer l'activité de conducteur de taxi sans être titulaire de la carte professionnelle en cours de validité ; qu'aux termes de l'article L. 3121-11 du code des transports, texte notamment visé par la poursuite et ensuite modifié par la loi 2015-990 du 6 août 2015, la définition de l'autorisation visée par l'article était la suivante : « L'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du présent code permet aux conducteurs de taxis d'arrêter leur véhicule, de le stationner ou de le faire circuler sur la voie ouverte à la circulation publique en quête de clientèle (c'est le maraudage) dans leur commune de rattachement.... En dehors du ressort de l'autorisation de stationnement, les conducteurs de taxis sont soumis à l'article L. 3120-2 du présent code, notamment s'agissant de la prise en charge de la clientèle sur la voie ouverte à la circulation publique sous réserve de justification d'une réservation préalable. » ; qu'il n'est pas fait allusion au maraudage électronique visé à l'article L. 3120-2 du code des transports en son point III auquel le titulaire de l'autorisation de stationnement peut, désormais, depuis la loi Thevenoud, seul recourir et qui permet de garantir réflectivité du monopole à lui conféré ; que le client n'est certes pas trouvé sur la voie publique et ne hèle pas le taxi depuis cette voie l'article L. 3120-2 susvisé a été à toutes fins mis dans les débats par la cour mais il doit être considéré que ce visa était superfétatoire à partir du moment où le maraudage électronique n'est rien d'autre qu'un type de maraudage qui, dans sa globalité, relève du monopole découlant de l'autorisation qu'il faut détenir pour s'y livrer ; que se livrer au maraudage électronique, lorsqu'on n'a pas d'autorisation, c'est s'arroger abusivement une prérogative découlant de cette autorisation, ce qu'entend réprimer l'article L. 3124-4 du code des transports ; qu'en conséquence, c'est à bon droit que le tribunal a déclaré le prévenu coupable des faits à lui reprochés ;
"1°) alors que loi pénale est d'interprétation stricte ; que l'article L. 3224-4 du code des transports, applicable depuis le 3 octobre 2014, incrimine le fait d'exercer l'activité d'exploitant de taxi sans être titulaire de l'autorisation de stationnement mentionnée à l'article L. 3121-1 du même code ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a condamné le prévenu pour exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxis, en relevant que si l'activité de transport de particuliers à titre onéreux n'était pas un monopole des exploitants de taxis, ce qui ne permettait pas de retenir le délit, en revanche l'article L. 3120-2 III interdisant l'utilisation d'un système de localisation et de disponibilité d'un véhicule de transports sans être muni d'une autorisation de stationnement constituait un monopole des conducteurs de taxis dont le non-respect entrait dans le cadre de l'incrimination ; que l'interdiction d'utiliser un système de localisation et de disponibilité d'un véhicule de transport de particuliers s'appliquant non seulement aux personnes qui ne sont pas titulaires d'une autorisation de stationnement mais également aux conducteurs de taxis circulant hors du ressort de leur autorisation de stationnement et la méconnaissance d'une telle interdiction n'impliquant en elle-même aucun acte d'exploitation d'un véhicule de transport de particuliers, faute de viser la prise en charge de passagers, le non respect de cette interdiction n'entre pas dans le cadre du délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi ; qu'ainsi, la cour d'appel a méconnu les articles 111-4 du code pénal, L. 3120-2 III et L. 3224-4 du code des transports ;
"2°) alors que l'article R. 3124-11 du code des transports incriminait spécialement le non-respect du III de l'article L. 3120-2, à l'époque des faits ; qu'en retenant à l'encontre du prévenu le fait d'avoir méconnu l'interdiction de l'article L. 3120-2 III du code des transports, la cour d'appel aurait dû constater que ce fait n'était constitutif que de la contravention de l'article R. 3124-11 du code des transports ; que cet article R. 3124-11 ayant été annulé par le Conseil d'Etat, l'arrêt attaqué ne trouve plus de base légale et doit être annulé ;
"3°) alors qu'il appartient au juge répressif d'écarter l'application d'un texte de droit interne fondant des poursuites lorsque ce dernier méconnaît une disposition du Traité de fonctionnement de l'Union européenne ou un texte pris pour l'application de celui-ci ; qu'à supposer le délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxi caractérisé en présence de la méconnaissance de l'interdiction d'utiliser un système de localisation et disponibilité en circulant sur la voie publique, sans autorisation de stationnement, prévu par l'article L. 3120-2 du code des transports, la cour d'appel aurait du laisser inappliquée cette disposition, en tant qu'elle comportait des modifications de règles techniques applicables aux transports de particuliers qui n'avaient pas été adoptées conformément à la procédure prévue l'article 8 de la directive 98/34/CE, imposant aux Etats membres d'informer la Commission européenne de tout projet de norme ou réglementation technique en matière de services d'information afin de lui permettre d'émettre un avis, voire de proposer l'adoption d'une directive en ce domaine ; qu'ainsi, la cour d'appel a méconnu l'article 8 de la directive précitée et l'article 88-1 de la Constitution ;
"4°) alors que les juges ne peuvent statuer que sur les faits visés à la prévention ; que l'acte de prévention visait le fait d'exercer une activité de transports de particuliers « en attendant à cette fin la clientèle sur la voie publique » ; que l'interdiction de stationner ou de circuler sur la voie publique, en utilisant un système de localisation et de disponibilité de son véhicule, en l'absence d'une autorisation administrative de stationnement, n'étant pas visée à la prévention, laquelle ne renvoyait en outre aucunement à la méconnaissance de l'article L. 3120-2 III du code des transports au titre des textes de répression, en condamnant le prévenu pour utilisation d'un tel système de localisation et de disponibilité de son véhicule, sans autorisation de transport, la cour d'appel a méconnu l'article 388 du code de procédure pénale ;
"5°) alors qu'à supposer que la méconnaissance de l'interdiction prévue par l'article L. 3120-2 III 1° du code des transports soit constitutive du délit d'exercice illégal de l'activité d'exploitant de taxis, le délit n'est caractérisé que s'il est établi, d'une part, que le conducteur du véhicule, non titulaire d'une autorisation administrative de circuler sur la voie publique, utilisait une application permettant aux personnes souhaitant réserver un véhicule d'en connaître la localisation et la disponibilité et, d'autre part, que ce conducteur utilisait une telle application alors qu'il circulait ou attendait sur la voie publique ; qu'en n'expliquant pas en quoi l'application Uberpop que le prévenu utilisait constituait un système de localisation et d'indication de la disponibilité des véhicules, tel que défini à l'article L. 3120-2 III du code des transports, et ce, quand pourtant le prévenu contestait le fait qu'ait été apportée la moindre preuve en ce sens, en faisant état de constats d'huissier tendant à établir que l'application Uberpop n'était pas un système de localisation et de disponibilité des véhicules, dès lors que cette application permettait certes de connaître la position des véhicules qui y étaient connectés, mais ne comportait aucune information sur leur disponibilité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
"6°) alors qu'en ne recherchant pas si le prévenu avait utilisé une application telle que définie par l'article L. 3120-2 III 1° du code des transports pendant qu'il se trouvait sur la voie publique, aux fins de trouver des clients, quand elle relevait seulement qu'il avait pris en charge deux passagers qui avaient indiqué l'avoir contacté par l'application Uberpop, avant que le véhicule ne soit intercepté, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;
Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu qu'une réglementation nationale, qui sanctionne pénalement le fait d'organiser un système de mise en relation de clients et de chauffeurs non professionnels qui fournissent des prestations de transport routier de personnes à titre onéreux avec des véhicules de moins de dix places au moyen d'une application pour téléphone, sans disposer d'une habilitation à cet effet, porte sur un service dans le domaine des transports et est exclu du champ d'application des articles 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et de l'article 1er de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, modifiée par la directive 98/48/CE, prévoyant une procédure d'information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l'information, tel que ces dispositions ont été interprétées par la Cour de Justice de l'Union européenne dans ses décisions C-434/15 du 20 décembre 2017 et C-320/16 du 10 avril 2018 ;
D'où il suit que le grief n'est pas fondé ;
Sur le moyen, pris en ses autres branches :
Attendu que, pour déclarer M. X... coupable d'exercice illégal de l'activité d'exploitant taxi, l'arrêt énonce, par motifs adoptés, que M. X..., professeur à la retraite, était parfaitement connu des services de police de Bordeaux comme chauffeur Uber se livrant au transport onéreux de personnes pour avoir fait l'objet d'un précédent contrôle le 22 janvier 2015 et avoir déposé les 15 et 18 janvier 2015 des mains courantes à la suite de différends avec des chauffeurs de taxi lors de transport de passagers, à l'occasion desquels M. X... a déclaré travailler comme chauffeur Uber pour obtenir un complément de revenus ; que les juges retiennent que, le 24 mars 2015, les policiers ont constaté que le véhicule Audi de M. X... ,déjà repéré par le système LAPI le 21 mars 2015 sur la voie publique, était en stationnement, puis, ayant suivi ce véhicule, ils ont constaté que M. X... avait pris en charge deux passagers [...] pour les conduire à leur domicile [...], et que, lors du contrôle, les passagers ont déclaré que la course avait été commandée via l'application Uberpop et payée par carte bancaire ; que les juges ajoutent que c'est à l'évidence alors qu'il roule ou stationne sur la voie publique que le chauffeur Uberpop reçoit les commandes de courses, dans la mesure où la société Uber, comme cela résulte de ses mails et courriers, recommande aux chauffeurs utilisant l'application Uberpop de pratiquer la maraude en se rapprochant du centre ville de Bordeaux, que M. X... n'a pu présenter aucun document l'autorisant à exercer la profession de taxi ou de véhicule de transport avec chauffeur, qu'il n'était pas titulaire d'une autorisation de stationnement et que, contrôlé à plusieurs reprises, il a commis ces faits intentionnellement ;
Attendu que par ces seuls motifs qui établissent que le prévenu était en quête de clientèle sur une voie ouverte à la circulation publique sans être titulaire d'une autorisation de stationnement, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses première, deuxième, quatrième, cinquième et sixième branches en ce qu'elles critiquent des motifs surabondants, ne saurait être accueilli ;
Sur le quatrième moyen, pris de la violation des articles 132-1 et 132-20 du code pénal, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. X..., à titre de peine complémentaire, à la suspension de son permis de conduire pendant deux mois ;
"aux motifs qu'en considération de la situation personnelle du prévenu, qui a déjà été condamné pour travail dissimulé, de la période de commission des faits de trois mois, la cour réforme le jugement sur la peine et inflige au prévenu une amende de 1 500 euros et deux mois de suspension du permis de conduire ;
"alors qu'il résulte des articles 132-1, 132-20 alinéa 2 du code pénal et 485 du code de procédure pénale qu'en matière correctionnelle, le juge qui prononce une amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; que la cour d'appel a condamné le prévenu, à titre de peine complémentaire, à la suspension de son permis de conduire pendant deux mois, sans aucunement motiver la peine prononcée au regard de la gravité des faits ou de la situation personnelle du prévenu ; qu'elle a ainsi méconnu les articles précités" ;
Attendu que pour condamner le prévenu à 1 500 euros d'amende et à deux mois de suspension de son permis de conduire, l'arrêt attaqué énonce, par motifs propres et adoptés, que M. X... est professeur d'éducation physique à la retraite, qu'il est locataire d'un véhicule Audi A3, qu'il a effectué des activités saisonnières pour obtenir un complément de ressources à sa pension de retraite, qu'il exerce le transport de personnes depuis décembre 2014 jusqu'au 24 mars 2015 et perçoit à ce titre 400 à 500 euros par semaine, que l'activité de chauffeur Uberpop exercée en toute illégalité concurrence déloyalement la profession de taxi et crée un trouble économique et un trouble à l'ordre public, que les peines encourues sont graves, que le prévenu a déjà été condamné pour travail dissimulé en 2012 et qu'il y a lieu de prendre en compte la gravité des faits, la personnalité du prévenu et de la période de commission des faits sur trois mois ;
Attendu qu'en l'état des ces énonciations desquelles il résulte qu'ont été prises en considération les circonstances de l'infraction, la personnalité et la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 2131-3, L. 2132-3, R. 2131-1 du code du travail, 2 et 591 du cade de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable l'action civile du syndicat autonome des artisans taxis 33 et a condamné le prévenu à verser à ce syndicat la somme de 500 euros à titre d'indemnisation, 500 euros à titre d'indemnité procédurale et 300 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;
"aux motifs que quant au syndicat autonome des artisans taxis 33, cette organisation justifie, par production en délibéré en respectant le principe de la contradiction, du cahier administratif qui recense l'ensemble des réunions et délibérations, que depuis près de dix ans, le Conseil syndical n'est plus élu mais seul le bureau (qui est une instance qui en découle) fait l'objet d'un vote lors des assemblées générales de ce syndicat ; que le précédent président du syndicat autonome des artisans taxi de Bordeaux et de la Gironde explique par attestation que le syndicat fonctionne en formation de bureau syndical qui est de fait conseil syndical pour toutes les décisions et actions en justice à mettre en oeuvre ; qu'au surplus, la lecture des statuts de ce syndicat montre que le bureau est l'émanation du Conseil et qu'il a pour tâche statutaire de subvenir aux besoins administratifs et immédiats des adhérents ; que dans ces conditions la décision prise le 11 juin 2015 par les membres du bureau mandatant la présidente aux fins d'agir en justice dans toutes les procédures est conforme aux statuts de cette organisation de sorte que la constitution de partie civile est recevable sur le fond, en considération du préjudice effectivement et directement subi par ces organisations syndicales qui chacune pour qui les concerne a pour objet de défendre et représenter les exploitants taxis notamment en présence de concurrence déloyale ou d'exercice illégal de la profession de taxi, la cour réforme le jugement entrepris et alloue à chacune des parties civiles la somme de 500 euros ; que l'indemnité procédurale en première instance est minorée à 500 euros pour chacune des parties civiles ;
"alors que ne peuvent agir en justice au nom d'un syndicat professionnel que les personnes qui y sont habilitées par les statuts, ou celles qui reçoivent un mandat exprès de l'organe habilité statutairement ; que pour rejeter le moyen invoquant l'irrecevabilité de l'action du syndicat, remarquant que la présidente qui agissait en son nom n'était pas habilité par le conseil syndical conformément aux statuts, puisqu'elle prétendait fonder son mandat sur une décision du bureau syndical, la cour d'appel a relevé que le bureau était l'émanation de fait du conseil syndical et qu'il avait pour tâche statutaire de subvenir aux besoins administratifs et immédiats des adhérents ; qu'en l'état de tels motifs qui ne constataient pas que le bureau était statutairement habilité à agir en justice, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale" ;
Vu l'article L. 2132-3 du code du travail ;
Attendu qu'il se déduit de ce texte que seuls disposent du droit d'ester en justice les représentants des syndicats tirant ce pouvoir, soit des statuts, soit d'un mandat exprès régulier ;
Attendu que, pour déclarer recevable la constitution de partie civile du Syndicat autonome des artisans taxis(SAAT 33), contestée par le prévenu aux motifs que le président de cette structure n'avait pas été autorisé à ester en justice par le conseil syndical en application de l'article 11 des statuts, l'arrêt énonce que depuis dix ans le conseil syndical n'est plus élu mais seulement le bureau qui en découle, que le bureau est l'émanation du Conseil, et que la décision du 11 juin 2015 du bureau syndical mandatant la présidente pour agir en justice est conforme aux statuts de cette organisation, de telle sorte que la constitution de partie civile est recevable ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale :
Attendu que les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel ; que la déclaration de culpabilité de M. X..., demandeur au pourvoi partiellement rejeté, étant devenue définitive, par suite du rejet de ses premier et deuxième moyens de cassation, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande de l'Union nationale des taxis ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 16 février 2016, mais en ses seules dispositions civiles relatives au Syndicat autonome des artisans taxis (SAAT 33), toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Dit que la constitution de partie civile du Syndicat autonome des artisans taxis (SAAT 33) est irrecevable ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
FIXE à 2000 euros la somme que M. Jacques X... devra payer à l'Union nationale des taxis au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Civ.2 6 septembre 2018 n° 17-23.752

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'un juge de la mise en état a prononcé un sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir à la suite d'une plainte avec constitution de partie civile déposée par Mme X... contre son époux M. Y... avec lequel elle est en instance de divorce et rejeté une enquête bancaire et une communication de pièces ;
Sur le premier moyen :
Vu les articles 272, 380 et 776 du code de procédure civile ;
Attendu que pour infirmer la décision rendue par le juge de la mise en état ordonnant un sursis à statuer, l'arrêt retient qu'il n'existe aucun élément nouveau depuis l'arrêt rendu le 8 novembre 2016 de nature à établir que la connaissance de l'issue des procédures pénales engagées par Mme X... ait une incidence sur la solution du procès civil ;
Attendu qu'en infirmant l'ordonnance du juge de la mise en état ayant prononcé un sursis à statuer, sans que l'exercice de l'appel ait été préalablement autorisé par le premier président pour un motif grave et légitime, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs ;
Sur le second moyen :
Vu les articles 150 et 272 du code de procédure civile ;
Attendu que l'arrêt a statué sur la demande de confirmation de l'ordonnance du juge de la mise en état en tant qu'elle rejetait une demande de communication de pièces et d'enquête bancaire ;
Qu'en confirmant le rejet de ces demandes, alors qu'en dehors de celles qui ordonnent une expertise, susceptibles d'être frappées d'appel immédiat sur autorisation du premier président de la cour d'appel, les ordonnances du juge de la mise en état se bornant à statuer sur de telles mesures ne peuvent être frappées d'appel indépendamment du jugement sur le fond, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile ;




Crim. 5 septembre 2018 n° 17-82.512

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. Didier X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 3 avril 2017, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 14 décembre 2016, n° 15-87.042), a rejeté sa requête en restitution d'objets saisis ;









La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 20 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Laurent, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire LAURENT, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PETITPREZ ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1, et 6, § 2, de la Convention européenne des droits de l'homme, 1er du Protocole n°11, additionnel à ladite Convention, 131-21 et 131-75 du code pénal, 41-4, 591 et 593 du code de procédure pénal ;
"en ce que la chambre de l'instruction a rejeté la demande de restitution de M. Didier X... et confirmé la décision de non restitution du 23 avril 2015 ;
"aux motifs qu'il y a lieu de constater qu'en l'état du renvoi après cassation, la chambre de l'instruction n'a pas à se prononcer sur la recevabilité de la requête de M. X... ; qu'il y a lieu également de constater qu'ont été régulièrement versées aux débats les copies de six autorisations d'acquisition et de détention d'armes, d'éléments d'armes et de munitions délivrées par le préfet des Alpes-de-Haute-Provence qui concernent les armes saisies au domicile du requérant le 20 janvier 2014 et dont M. X... sollicite restitution et que la chambre n'est saisie d'aucune contestation sur l'authenticité et la régularité de ces autorisations administratives ; qu'il sera toutefois relevé qu'à ce jour les autorisations d'acquisition et de détention du pistolet Smith & Wesson 9 mm n° SDB 0122 {placé sous scellé n° 1 ), du revolver Dan Wesson 44 nc B026880 (placé sous scellé n° 5) et du pistolet CZ 74 Kadet n° BL9141 (placé sous scellé n° 6), valables du 12 mars 2013 au 11 mars 2016, ont expiré, il n'apparaît donc pas qu'en l'état M. X... puisse se prévaloir de leur détention régulière et donc qu'elles puissent lui être restituées ; que pour le reste, il ne fait aucun doute que les courriers inquiétants dont le ministère public fait état dans ses réquisitions, qui "donnaient lieu à la découverte en perquisition de six armes de poing et leurs munitions", sont ceux précisément sur lesquels étaient fondées les plaintes qui ont donné lieu à l'ouverture d'une enquête le 17 janvier 2014 ; qu'en l'état des éléments qui lui sont soumis, la chambre de l'instruction constate donc que M. X... dispose des autorisations lui permettant à ce jour de détenir régulièrement trois des armes saisies à son domicile le 20 janvier 2014 ainsi que les munitions correspondantes ; que pour autant, s'agissant d'armes et de munitions, contrairement à ce qui a pu être soutenu cette seule constatation ne saurait ipso facto emporter la restitution des années concernées sans qu'ait été examinée, comme le requiert le ministère public, l'éventualité qu'il puisse résulter de cette restitution un danger pour les personnes ou pour ces biens ; qu'en l'espèce, si le parquet près le tribunal de grande instance de Digne-les-Bains a pu décider, par une stricte application de la loi pénale, qu'il n'y avait pas lieu à poursuivre M. X... à raison de propos que sous réserve d'une précision technique concernant le calibre 8 mm - celui-ci ne conteste pas avoir tenus ou écrits, il y a lieu pour la chambre de l'instruction de constater qu'à défaut d'être pénalement punissables de tels propos sont de nature à caractériser un comportement laissant objectivement craindre une utilisation de ces armes dangereuse pour leur auteur ou pour autrui ; que partant, la décision du parquet près le tribunal de grande instance de Digne-les-Bains portant refus de restitution des armes et des munitions saisies au domicile de M. X... à l'occasion de l'enquête ouverte à la suite des plaintes suscitées par les propos qu'il a tenus par téléphone et par courrier électronique le 17 janvier 2014 sera confirmée ;
"1°) alors qu'en rejetant la demande de restitution en relevant que les propos prétendument proférés par M. X... caractérisent un comportement laissant objectivement craindre une utilisation dangereuse des armes dont il est propriétaire, lorsque la détention licite de celles-ci par le demandeur, lequel est bénéficiaire de plusieurs autorisations de détention délivrées par les autorités préfectorales, est exclusive d'un danger au sens de l'article 41-4 du code de procédure pénale, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de ce texte ;
"2°) alors que la chambre de l'instruction ne pouvait, pour refuser la restitution des armes demandée par M. X..., se fonder sur les « propos inquiétants » qu'il aurait tenu et son « irascibilité », dès lors que ce comportement, formellement contesté par le demandeur, n'a jamais été établi par une décision définitive, sauf à rendre une décision arbitraire sur laquelle la chambre criminelle ne peut exercer aucun contrôle ;



"3°) alors que toute mesure s'apparentant à une confiscation est incompatible avec l'article 6, § 2, de la Convention lorsqu'elle se rapporte à un acte dont la personne qui y est soumise n'a pas été reconnue coupable ; qu'en se fondant, pour refuser la restitution des armes pourtant régulièrement détenues par M. X..., sur un prétendu comportement dangereux qui n'a jamais été judiciairement établi par une décision judiciaire passée en force de chose jugée, un classement sans suite ayant été prononcé pour ces faits, la chambre de l'instruction a prononcé à l'encontre de M. X... une sanction s'apparentant à une peine de confiscation et s'appuyant sur des faits pour lesquels le demandeur n'a jamais été déclaré coupable, en méconnaissance de l'article 6, § 2, de la Convention ;
"4°) alors que selon la jurisprudence européenne, si la confiscation rejoint l'intérêt général prévu à l'article 1 du Protocole n°1 permettant de porter atteinte au droit de propriété, c'est à la condition que la sanction imposée ne soit pas disproportionnée au regard du manquement commis ; qu'en refusant la restitution des armes régulièrement détenues par le demandeur et aux motifs d'un comportement irascible qui n'a jamais été judiciairement établi et pour lequel le demandeur n'a jamais été déclaré coupable, la chambre de l'instruction, qui a in fine prononcé une sanction de confiscation définitive de ces biens, a violé cette exigence conventionnelle" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'au cours de l'enquête consécutive à une plainte portée contre M. X... pour menaces de mort, une perquisition a été effectuée à son domicile, où des armes ont été saisies ; que, la plainte ayant été classée sans suite, il en a demandé la restitution ; qu'à la suite de la décision de refus prise par le procureur de la République, il a saisi la chambre de l'instruction sur le fondement de l'article 41-4, alinéa 2, du code de procédure pénale ;
Attendu que, pour confirmer la décision déférée, l'arrêt prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Attendu qu'en statuant ainsi, à l'issue d'une procédure contradictoire, la chambre de l'instruction, après avoir, par des motifs procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, suffisamment caractérisé le risque d'atteinte à l'ordre public et le danger que la restitution sollicitée créerait pour les personnes ou les biens, en l'absence même de toute condamnation pénale du requérant, a, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées, justifié sa décision ;


D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 5 septembre 2018 n° 17-85.181

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. Raymond X...,

contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PAPEETE, en date du 11 juillet 2017, qui a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance du juge d'instruction refusant d'informer sur sa plainte contre personne non dénommée des chefs d'abus de confiance, abus de faiblesse et recel ;





La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 6 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Y..., conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller Y..., les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Z... ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 183, 186 du Code de procédure pénale, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, du préambule de la Constitution de 1958, de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'ordonnance attaquée a déclaré l'appel formé le 19 juin 2017 par M. Raymond X... de l'ordonnance d'irrecevabilité de constitution de partie civile du 2 juin 2017 non admis ;
"aux motifs que le 2 juin 2017, le juge d'instruction de Papeete a rendu une ordonnance d'irrecevabilité de constitution de partie civile à la suite de la plainte avec constitution de partie civile de M. Raymond X... contre X... pour abus de faiblesse, recel d'abus de faiblesse, abus de confiance et recel d'abus de confiance ; que cette ordonnance a été notifiée le même jour à la partie civile et à son avocat, ainsi qu'il résulte de la mention apposée sur l'ordonnance par le greffier du juge d'instruction et des récépissés d'envoi des lettres recommandées joints à la procédure ; que le 19 juin 2017, l'avocat de M. Raymond X... a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration au greffe ; que le dossier a été reçu au greffe de la chambre de l'instruction le 7 juillet 2017 ; qu'en application de l'article 186 du code de procédure pénale, il appartient au président de la chambre de l'instruction de constater que l'appel a été formé dans le délai de dix jours suivant la notification de la décision, prévu par le quatrième alinéa de l'article précité ; qu'à défaut, il est compétent pour rendre d'office une ordonnance de non-admission de l'appel ; que l'appel interjeté par la partie civile n'a pas respecté les délais impartis par l'article 186 alinéa 4 du code de procédure pénale ; qu'en effet, le délai de dix jours court du jour de la notification elle-même, c'est-à-dire le 2 juin 2017, et non du jour où l'intéressé en acquiert connaissance ; qu'en conséquence, l'appel interjeté le 19 juin 2017 est irrecevable, le délai ayant expiré le lundi 12 juin 2017 et aucun cas de force majeure n'étant allégué par ailleurs ;
"1°) alors que le deuxième alinéa de l'article 183 du code de procédure pénale, tel qu'il est interprété par la chambre criminelle qui considère de façon constante que la notification qu'il prévoit est réalisée par l'expédition d'une lettre recommandée, en sorte que le délai d'appel de dix jours prévu par l'article 186 du même code court à compter d'une date à laquelle les parties ne peuvent agir faute d'avoir reçu et pris connaissance de la décision du juge d'instruction, porte atteinte au droit au recours juridictionnel effectif garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; que ces textes qui ne précisent pas que le délai d'appel doit commencer à courir à compter du jour où la partie concernée a pu avoir connaissance de la décision, et ainsi été mise en mesure d'exercer son recours et qui autorise donc que le délai de dix jours pour exercer les voies de recours soient de facto inférieur à sa durée légale pour certains justiciables, et l'interprétation qu'ils supposent seront donc déclarés inconstitutionnels à la suite de la QPC formée par mémoire distinct et motivé ; qu'à la suite de cette déclaration d'inconstitutionnalité, l'ordonnance attaquée sera dépourvue de toute base légale ;
"2°) alors que les dispositions du deuxième alinéa de l'article 183 du code de procédure pénale combinées à celles de l'article 186 du même code qui aboutissent à ce que la partie à qui les décisions susceptibles de faire l'objet d'un appel soient notifiées par lettre recommandée, dispose d'un délai d'appel nécessairement inférieur au délai de dix jours dont elle doit disposer pour interjeter appel, portent atteinte aux droits et liberté garantis par les articles 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, à l'équilibre des droits des parties, aux principes d'égalité des armes entre les parties au procès et de sécurité juridique au respect des droits de la défense et au principe d'égalité devant la loi en sorte que la déclaration d'inconstitutionnalité à intervenir à la suite de la QPC formée parallèlement privera ladite ordonnance de tout fondement ;
"3°) alors qu'un délai de recours ne peut commencer à courir qu'à compter du jour où celui qui l'invoque est en mesure d'agir valablement, c'est-à-dire à la date à laquelle il a eu ou pouvait avoir connaissance de l'acte ou de la décision susceptible d'avoir porté atteinte à ses droits et contre lequel il souhaite agir ; qu'en affirmant pour déclarer l'appel formé par M. X... irrecevable comme étant hors délai, l'appel formé le 19 juin 2017 par la partie civile à l'encontre de l'ordonnance d'irrecevabilité du 2 juin 2017 que le délai d'appel aurait commencé à courir à la date de l'expédition de la lettre recommandée, soit le 2 juin 2017, alors même qu'à cette date M. X... et son conseil ne pouvaient avoir connaissance de la décision du juge d'instruction, l'ordonnance attaquée a violé l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"4°) alors que le président de la chambre de l'instruction ne pouvait déclarer irrecevable l'appel interjeté par M. X... comme formé hors délai, sans avoir vérifié que la notification de l'ordonnance a bien été adressée à M. X... et à son avocat à leur adresse déclarée, dans des conditions permettant une remise dans les délais les plus brefs en main propre ; qu'il résulte de l'examen des pièces de la procédure que les lettres recommandées ont été expédiées par le greffe à une boite postale, et non point à l'adresse respective de M. X... et de son conseil, en ville ; qu'en ne vérifiant pas si M. X... et son avocat avaient bien été personnellement destinataires de la décision et si la notification avait bien eu lieu à leur adresse déclarée, le président de la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs et violé les articles 183 et 186 du code de procédure pénale" ;
Attendu qu'il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de la procédure que, à la suite d'une première information ouverte en 2001 sur sa plainte clôturée par une décision de non-lieu prononcée le 6 juillet 2004, M. Raymond X... a déposé une plainte contre personne non dénommée pour abus de confiance, abus de faiblesse et recel d'abus de faiblesse et s'est constitué partie civile auprès du doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance de Papeete le 21 mars 2017 ; que le 2 juin 2017, le juge d'instruction a déclaré irrecevable ladite plainte au motif qu'elle avait été déposée plus de trois ans après la réception définitive de fonds qui lui avaient été attribués le 20 juin 2009 dans le cadre d'une succession ; que le 19 juin 2017, l'avocat de M. X... a interjeté appel de cette décision notifiée par lettre recommandée expédiée le 2 juin 2017 à la partie civile et son avocat ;
Attendu que, pour déclarer cet appel irrecevable, le président de la chambre de l'instruction constate, par ordonnance du 11 juillet 2017, que cet appel est tardif, le délai ayant expiré le lundi 12 juin 2017 et qu'aucun cas de force majeure n'est allégué par la partie civile ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, et dès lors que, d'une part, l'ordonnance entreprise mentionne qu'elle a été notifiée à la partie civile et à l'avocat des parties civiles par lettre recommandée du 2 juin 2017, d'autre part, la notification prévue par l'article 183 du code de procédure pénale, qui constitue le point de départ du délai de dix jours fixé par l'article 186 dudit code pour former appel, est réalisée par l'expédition effective de la lettre recommandée, le délai pouvant être prorogé dans le cas où un obstacle insurmontable a mis la partie concernée dans l'impossibilité d'exercer son recours en temps utile, ce qui, en l'espèce, n'a pas été établi ni même allégué, le président de la chambre de l'instruction n'a pas excédé ses pouvoirs mais fait l'exacte application des textes susvisés qui, édictés dans un but de sécurité juridique et pour une bonne administration de la justice, ne méconnaissent pas les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen, devenu sans objet en ses première et deuxième branches, par suite de l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 11 avril 2018, ayant dit n'y avoir lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 183 du code de procédure pénale, et qui manque en fait dans sa quatrième branche, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'ordonnance est régulière en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 5 septembre 2018 n° 17-84.402 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-Le procureur général près la cour d'appel de Lyon,

contre l'arrêt de la dite cour, 9e chambre, en date du 19 juin 2017, qui, a renvoyé des fins de la poursuite M. Yves X... des chefs d'agressions sexuelles ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 21 juin 2018 où étaient présents : M. Soulard, président, M.Guéry , conseiller rapporteur, MM. Pers, Straehli, Castel, Mmes de la Lance, Dreifuss-Netter, M. Fossier, Mmes Planchon, Durin-Karsenty, MM. Cathala, Stephan, Wyon, conseillers de la chambre, Mme Harel-Dutirou, M. Laurent, Mme Chauchis, M. Talabardon, conseillers référendaires ;
Avocat général : Mme Moracchini ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller Guéry et les conclusions de Mme l'avocat général Moracchini ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 410 et 411 du code de procédure pénale ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 427 et 470 du code de procédure pénale ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 6, § 1, et § 3, a et c, de la Convention européenne des droits de l'homme ainsi que l'article préliminaire du code de procédure pénale, ensemble l'article 470 dudit code ;
Attendu qu'il se déduit de ces textes qu'il ne peut être statué sur la culpabilité d'une personne que l'altération de ses facultés physiques ou psychiques met dans l'impossibilité de se défendre personnellement contre l'accusation dont elle fait l'objet, fût-ce en présence de son tuteur et assistée d'un avocat ; qu'en l'absence de l'acquisition de la prescription de l'action publique ou de disposition légale lui permettant de statuer sur les intérêts civils, la juridiction pénale, qui ne peut interrompre le cours de la justice, est tenue de renvoyer l'affaire à une audience ultérieure et ne peut la juger qu'après avoir constaté que l'accusé ou le prévenu a recouvré la capacité à se défendre ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Yves X..., né le [...] , a été poursuivi du chef de viols et agressions sexuelles commis sur plusieurs victimes, qu'une information judiciaire a été ouverte le 6 février 2009, que l'intéressé, après requalification partielle, a été renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef d'agressions sexuelles par ordonnance du 22 mai 2014, que son état de santé s'est dégradé postérieurement, le rendant incapable de communiquer avec un tiers, qu'il a été placé sous tutelle le 24 mai 2016, que le tribunal correctionnel, après avoir ordonné une expertise médicale ayant conclu à ce que M. X... présentait des atteintes irréversibles à ses capacités intellectuelles ne lui permettant pas de comparaître devant une juridiction pénale, a déclaré se trouver dans l'incapacité de décider de la culpabilité éventuelle du mis en cause et des demandes présentées par les parties civiles et ne pouvoir surseoir à statuer, que le ministère public et certaines parties civiles ont formé appel de cette décision ;
Attendu que pour annuler le jugement, évoquer, et renvoyer M. X... des fins de de la poursuite, l'arrêt, après avoir relevé que le juge ne pouvait refuser de trancher un litige qui lui était soumis au motif du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi, retient qu'il résulte des dispositions combinées de l'article préliminaire du code de procédure pénale et de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme que, lorsque l'altération des facultés mentales d'une personne mise en examen est telle que celle-ci se trouve dans l'impossibilité absolue d'assurer effectivement sa défense, il doit être sursis à statuer en attendant qu'elle retrouve ses capacités, qu'en l'espèce et en l'état des données actuelles de la science, il apparaît que le prévenu est atteint d'une maladie le privant de façon irréversible et définitive de ses capacités intellectuelles, de sorte que dans une telle situation, la mise en suspens de l'action publique n'apparaît pas justifiée et paralyse l'action des parties civiles en application des dispositions de l'article 4 alinéa 2 du code de procédure pénale ; que les juges ajoutent qu'il est de principe que toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente tant que sa culpabilité n'est pas établie et qu'en conséquence, il y a lieu de renvoyer le prévenu des fins de la poursuite en raison de son impossibilité absolue, définitive et objectivement constatée d'assurer sa défense devant la juridiction de jugement ;
Mais attendu qu'en disposant ainsi, la cour d'appel, qui devait surseoir à statuer et ne pouvait pas relaxer le prévenu pour un motif non prévu par la loi, a méconnu le sens des textes légaux et conventionnels susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon, en date du 19 juin 2017, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




Crim. 5 septembre 2018 n° 17-86.097

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-M. Alain X...,

contre l'arrêt de la cour d'assises de l'EURE, en date du 4 octobre 2017, qui, pour viols et agressions sexuelles aggravés, l'a condamné à quatorze ans de réclusion criminelle et dix ans de suivi socio-judiciaire, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ;





La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 20 juin 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Stephan, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de M. le conseiller STEPHAN, les observations de la société civile professionnelle BOULLEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PETITPREZ ;
Vu le mémoire produit ;
I - Sur le pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt pénal :
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 131-36-1, 131-36-4 et 132-1 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale, ensemble le principe constitutionnel de personnalisation des peines ;
"Il est fait grief à l'arrêt pénal attaqué et à la feuille de motivation qui lui est annexée, de ne pas comporter de motivation justifiant le choix de la peine de quatorze ans de réclusion prononcée par la cour d'assises, d'avoir ordonné à l'encontre de l'accusé un suivi socio-judiciaire pendant une durée de dix ans, prononcé une injonction de soins et fixé à sept ans la durée maximum la durée de l'emprisonnement encouru en cas d'inobservation des obligations imposées ;
"1°) alors que selon les dispositions des articles 131-36-1 et 131-36-4 du code pénal, le président doit, d'abord avertir le condamné des obligations résultant du suivi socio-judiciaire et des conséquences qu'entraînerait leur inobservation, ensuite l'aviser qu'aucun traitement ne pourra être entrepris sans son consentement mais que, s'il refuse les soins qui lui seront proposés, l'emprisonnement prononcé à son encontre en vertu de l'article 131-36-1 pourra être mis à exécution, enfin l'informer de ce qu'il aura la possibilité de commencer un traitement pendant l'exécution de la peine de réclusion criminelle prononcée à son encontre ; qu'en l'espèce, ni le procès-verbal des débats ni l'arrêt pénal ne mentionnent les divers avertissements précités ; qu'en statuant comme elle l'a fait la cour d'assises d'appel a violé les textes visés au moyen ;
"2°) alors que l'article 132-1 du code pénal impose au juge d'individualiser la peine ; que ces dispositions ne font aucune distinction entre les peines contraventionnelles, correctionnelles ou criminelles ; que, selon la Cour européenne des droits de l'Homme, « c'est face aux peines les plus lourdes que le droit à un procès équitable doit être assuré au plus haut degré possible par les sociétés démocratiques » ; que le Conseil constitutionnel a par ailleurs récemment imposé la motivation des peines criminelles ; que la motivation de la peine est seule à même de permettre le contrôle de son individualisation ; qu'en omettant de motiver la peine de quatorze ans de réclusion, la cour d'assises a violé les textes et le principe visés au moyen" ;
Sur le moyen, pris en sa première branche :
Attendu que, d'une part, la Cour de cassation est en mesure de s'assurer, par les mentions de l'arrêt pénal, que l'avertissement prévu par l'article 131-36-1 du code pénal a été donné par le président de la cour d'assises à M. X..., condamné à un suivi socio-judiciaire ;
Que, d'autre part, s'il ne résulte d'aucune des mentions de l'arrêt attaqué et du procès-verbal des débats, ni d'aucun visa de l'article 131-36-4 du code pénal, que l'avertissement prescrit par ce texte a été donné à M. X..., la cassation n'est cependant pas encourue, dès lors qu'aucune mise à exécution de l'emprisonnement fixé en application de l'article 131-36-1 du même code ne pourra intervenir, en raison du refus, par le condamné, de commencer ou de poursuivre le traitement proposé dans le cadre d'une injonction de soins, sans que l'avertissement omis par le président de la juridiction de jugement lui ait été préalablement notifié par le juge de l'application des peines ;
Sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que, d'une part, par décision du 2 mars 2018, le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution l'article 365-1, deuxième alinéa, du code de procédure pénale ; que cette décision a reporté au 1er mars 2019 la date de cette abrogation et dit que les arrêts de cour d'assises rendus en dernier ressort avant la publication de cette décision et ceux rendus à l'issue d'un procès ouvert avant la même date ne peuvent être contestés sur le fondement de cette inconstitutionnalité ; que M. X... a été condamné, par l'arrêt attaqué, avant la publication de la décision du Conseil constitutionnel, le 3 mars 2018 ;
Que, d'autre part, il ne résulte d'aucune disposition de la Convention européenne des droits de l'homme que la cour d'assises, après avoir statué sur la culpabilité, soit tenue de motiver la peine qu'elle prononce ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
II - Sur le pourvoi en ce qu'il est formé contre l'arrêt civil :
Attendu que le moyen est devenu inopérant par suite du rejet des moyens dirigés contre l'arrêt pénal ;
Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq septembre deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.




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