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Civ.1 9 juillet 2025 n° 23-18.437

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Cassation

Mme CHAMPALAUNE, présidente


Arrêt n° 502 F-D
Pourvoi n° R 23-18.437



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
1°/ M. [X] [K],
2°/ Mme [C] [M], épouse [K],
tous deux domiciliés [Adresse 3],
ont formé le pourvoi n° R 23-18.437 contre l'arrêt rendu le 14 avril 2023 par la cour d'appel d'Angers (chambre A - civile), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [T] [B], domicilié [Adresse 4],
2°/ à la société Yannick Riou, notaire, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de M. [T] [B],
3°/ à la société HSA, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5],
4°/ à M. [V] [G], domicilié [Adresse 6],
5°/ à la société Gloaguen & associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, les observations de Me Haas, avocat de M. et Mme [K], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [B] et de la société Gloaguen & associés, après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Bruyère, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseillère doyenne, et Mme Vignes, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée de la présidente et des conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. et Mme [K] du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la Selarl Yannick Riou, venant aux droits de M. [B], de la Selarl HSA et de M. [G].
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 14 avril 2023), statuant sur renvoi après cassation (1re Civ., 27 novembre 2019, pourvoi n° 18-22.147), après consultation de la société Gloaguen & associés (la société d'avocats), M. et Mme [K] (les donateurs) ont, suivant acte authentique reçu le 10 décembre 2010 par M. [B] (le notaire), fait donation à titre de partage anticipé entre leurs deux enfants de la nue-propriété des parts sociales de deux sociétés civiles immobilières.
3. Courant 2014, l'administration fiscale a notifié à M. [K], en sa qualité de gérant des sociétés, et aux donateurs, des propositions de rectification sur l'ensemble des revenus imposables au motif que, si chaque société était propriétaire de deux maisons pour lesquelles il avait été opté pour le dispositif dit « Borloo neuf », le démembrement des parts sociales par l'acte de donation-partage remettait en cause le bénéfice de ce dispositif.
4. Estimant que le notaire et la société d'avocats avaient manqué à leurs obligations d'information et de conseil, les donateurs les ont assignés en responsabilité et indemnisation.
Examen des moyens
Sur les premier et second moyens, pris en leur troisième branche
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. Les donateurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes dirigées contre le notaire, alors « que le notaire est tenu d'indemniser tous les préjudices en lien de causalité avec la faute professionnelle qu'il a commise ; que la cour d'appel a retenu que le notaire avait commis une faute en n'attirant pas l'attention les donateurs sur le fait que la donation-partage au profit de leurs enfants de la nue-propriété des parts sociales qu'ils détenaient dans deux SCI était de nature à remettre en cause le bénéfice du dispositif fiscal « Borloo neuf », lequel était subordonné à l'engagement de maintenir les biens en location pendant une durée d'au moins neuf ans ; que, pour rejeter l'action en responsabilité contre ce notaire, la cour d'appel a retenu que, s'il était établi que les deux SCI avaient opté pour le dispositif « Borloo neuf » en s'engageant à louer les immeubles leur appartenant pendant au moins neuf ans, en revanche, les donateurs ne justifiaient pas voir satisfait à leurs propres obligations déclaratives de conservation des parts de ces SCI pendant la même durée, auxquelles était également subordonné le bénéfice du dispositif fiscal, et considéré qu'il importait peu « que l'administration fiscale se soit uniquement prévalue, pour remettre en cause l'avantage fiscal du dispositif « Borloo neuf », du non-respect par les donateurs des engagements de conservation des parts que ceux-ci auraient dû souscrire, et non de l'absence de ces engagements, dès lors qu'il ne ressort nullement des propositions de rectification et réponses aux contribuables que ces engagements ont effectivement été souscrits », de sorte que la faute du notaire était sans lien avec la perte de l'avantage fiscal ; qu'en statuant de la sorte, quand il résultait de ses propres constatations que l'administration fiscale avait fondé les redressements sur le « non-respect par les donateurs des engagements de conservation des parts que ceux-ci auraient dû souscrire », ce dont il résulte que l'administration n'avait pas remis en cause la réalité de cet engagement, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil (dans sa rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; nouvel article 1240 du code civil). »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil :
7. Il résulte de ce texte qu'ouvre droit à réparation le dommage en lien causal direct et certain avec la faute délictuelle.
8. Pour rejeter la demande d'indemnisation dirigée contre le notaire, l'arrêt retient que les donateurs ne justifient pas avoir satisfait à leurs propres obligations déclaratives en tant que porteurs de parts des sociétés civiles immobilières, faute de produire leurs engagements personnels à conserver celles-ci pendant une durée de neuf ans, engagements qui devaient être constatés lors du dépôt de leur déclaration de revenus de l'année au titre de laquelle les parts ont été souscrites ou acquises ou, si elle est postérieure, de l'année de l'acquisition ou de l'achèvement de l'immeuble, soit l'année 2009.
9. Il ajoute qu'il importe peu que l'administration fiscale se soit uniquement prévalue, pour remettre en cause l'avantage fiscal du dispositif « Borloo neuf », du non-respect par les donateurs des engagements de conservation des parts que ceux-ci auraient dû souscrire, et non de l'absence de ces engagements, dès lors qu'il ne ressort nullement des propositions de rectification et réponses aux contribuables que ces engagements ont effectivement été souscrits.
10. Il en déduit qu'il ne peut être considéré que le manquement du notaire à son devoir de conseil et d'information est en lien de causalité avec le redressement fiscal dont les donateurs ont fait l'objet sur la période 2009-2013 et la perte de l'avantage lié au dispositif « Borloo neuf » pour les années suivantes.
11. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que l'administration n'avait pas remis en cause la réalité des engagements personnels des donateurs à conserver leurs parts pendant une durée de neuf ans, de sorte que seul le manquement du notaire à ses obligations était la cause du redressement notifié par l'administration, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Et sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
12. Les donateurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes d'indemnisation des préjudices financiers et moral contre la société d'avocats, alors « que l'avocat est tenu d'indemniser tous les préjudices en lien de causalité avec la faute professionnelle qu'il a commise ; que la cour d'appel a retenu que la société d'avocats avait commis une faute pour s'être abstenue de vérifier les éventuels avantages fiscaux associés à la détention des parts des SCI, le cas échéant en réclamant la communication du dernier avis d'imposition et/ou de la dernière déclaration de revenus des donateurs ; que, pour rejeter l'action en responsabilité contre l'avocat, la cour d'appel a retenu que, s'il était établi que les deux SCI avaient opté pour le dispositif « Borloo neuf » en s'engageant à louer les immeubles leur appartenant pendant au moins neuf ans, en revanche, les donateurs ne justifiaient pas avoir satisfait à leurs propres obligations déclaratives de conservation des parts de ces SCI pendant la même durée, et considéré qu'il importait peu « que l'administration fiscale se soit uniquement prévalue, pour remettre en cause l'avantage fiscal du dispositif « Borloo neuf », du non-respect par les donateurs des engagements de conservation des parts que ceux-ci auraient dû souscrire, et non de l'absence de ces engagements, dès lors qu'il ne ressort nullement des propositions de rectification et réponses aux contribuables que ces engagements ont effectivement été souscrits », de sorte que la faute de l'avocat était sans lien avec la perte de l'avantage fiscal ; qu'en statuant de la sorte, quand il résultait de ses propres constatations que l'administration fiscale avait fondé les redressements sur le « non-respect par les donateurs des engagements de conservation des parts que ceux-ci auraient dû souscrire », ce dont il résulte que l'administration n'avait pas remis en cause la réalité de cet engagement, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil (dans sa rédaction applicable avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; nouvel article 1231-1 du code civil). »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
13. Il résulte de ce texte qu'ouvre droit à réparation le dommage en lien causal direct et certain avec la faute contractuelle.
14. Pour rejeter la demande d'indemnisation dirigée contre la société d'avocats, l'arrêt retient que la faute de celle-ci n'est, pas plus que celle du notaire ayant le même objet, en relation de causalité avec les préjudices financier et moral invoqués par les donateurs.
15. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que l'administration n'avait pas remis en cause la réalité de l'engagement des donateurs à conserver leurs parts pendant une durée de neuf ans, de sorte que seul le manquement de la société d'avocats à ses obligations était la cause du redressement notifié par l'administration, la cour d'appel a violé le texte susvisé.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 23-22.851

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
IJ


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, présidente


Arrêt n° 506 F-D
Pourvoi n° P 23-22.851




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
M. [I] [D], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 23-22.851 contre l'arrêt rendu le 14 septembre 0023 par la cour d'appel de Limoges (chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la Société générale, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits et obligations de la banque [C],
3°/ au Trésor public, service des impôts des particuliers de [Localité 5], dont le siège est [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Peyregne-Wable, conseillère, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de M. [D], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la Société générale, après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, présidente, Mme Peyregne-Wable, conseillère rapporteure, Mme Guihal, conseillère doyenne, et Mme Vignes, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée de la présidente et conseillères précitées, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 14 septembre 2023), par acte notarié du 29 août 2016, la banque Populaire du Massif Central, aux droits de laquelle se trouve la banque Populaire Auvergne Rhône Alpes (la banque), a consenti à M. [D] (l'emprunteur) un prêt immobilier d'un certain montant, remboursable par mensualités.
2. Le 22 juillet 2021, après vaine mise en demeure de régulariser sa situation dans un délai maximal de huit jours puis déchéance du terme, la banque a délivré à l'emprunteur un commandement de payer valant saisie immobilière pour avoir paiement d'une certaine somme.
3. Le 5 novembre 2021, la banque a assigné l'emprunteur à l'effet de voir ordonner la vente forcée des biens immobiliers, objet du commandement, et dénoncé la procédure au Trésor public et à la banque [C], en leur qualité de créanciers inscrits.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de dire qu'en raison de sa défaillance, la banque était en droit de se prévaloir de la déchéance du terme du prêt immobilier, laquelle avait entraîné l'exigibilité immédiate de l'intégralité des sommes restant dues au titre du prêt, de dire que la délivrance du commandement de payer du 22 juillet 2021 pour un montant de 116 747,76 euros portait bien sur une créance de prêt devenue intégralement exigible, de valider ce commandement de payer, de lui déclarer opposable et de juger régulière la procédure de saisie immobilière, alors « qu'est abusive toute clause créant, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat conclu par celui-ci avec un professionnel ; qu'il en va ainsi de la stipulation d'un contrat de prêt conclu par un consommateur avec un prêteur professionnel prévoyant, en cas de défaut de paiement de tout ou partie d'une échéance, la déchéance du terme huit jours après mise en demeure infructueuse d'avoir à régulariser sa situation, en ce que cette clause ne distingue pas selon la gravité de l'inexécution du consommateur et ne lui offre pas un délai raisonnable pour régulariser sa situation, ni la possibilité de procéder à une telle régularisation postérieurement à l'expiration de ce bref délai ; qu'en jugeant pourtant qu'une telle clause, contenue dans le prêt souscrit par l'emprunteur n'était pas abusive dès lors que la délivrance d'une mise en demeure préalable à l'acquisition de la déchéance du terme représente une protection suffisante de l'emprunteur défaillant pour le cas où, comme en l'espèce, il bénéficie d'un délai de 8 jours qui constitue un préavis d'un délai raisonnable, pour régulariser la situation, pour en déduire que la déchéance du terme était dépourvue de caractère abusif et parfaitement régulière, ce dont il résultait que cette clause de déchéance du terme, ne distinguant pas selon l'ampleur des manquements de l'emprunteur et prévoyant un délai insuffisant de huit jours sans possibilité de régularisation, créait un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur, de sorte qu'elle devait être déclarée abusive, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi l'article L. 212-1 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 212-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :
5. Selon ce texte, dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
6. Par arrêt du 26 janvier 2017 (C-421/14), la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a dit pour droit que l'article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 devait être interprété en ce sens que s'agissant de l'appréciation par une juridiction nationale de l'éventuel caractère abusif de la clause relative à la déchéance du terme en raison de manquements du débiteur à ses obligations pendant une période limitée, il incombait à cette juridiction d'examiner si la faculté laissée au professionnel de déclarer exigible la totalité du prêt dépendait de l'inexécution par le consommateur d'une obligation qui présentait un caractère essentiel dans le cadre du rapport contractuel en cause, si cette faculté était prévue pour les cas dans lesquels une telle inexécution revêtait un caractère suffisamment grave au regard de la durée et du montant du prêt, si ladite faculté dérogeait aux règles de droit commun applicables en la matière en l'absence de dispositions contractuelles spécifiques et si le droit national prévoyait des moyens adéquats et efficaces permettant au consommateur soumis à l'application d'une telle clause de remédier aux effets de ladite exigibilité du prêt.
7. Par arrêt du 8 décembre 2022 (C-600/21), elle a dit pour droit que l'arrêt précité devait être interprété en ce sens que les critères qu'il dégageait pour l'appréciation du caractère abusif d'une clause contractuelle, notamment du déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat que cette clause créait au détriment du consommateur, ne pouvaient être compris ni comme étant cumulatifs ni comme étant alternatifs, mais devaient être compris comme faisant partie de l'ensemble des circonstances entourant la conclusion du contrat concerné, que le juge national devait examiner afin d'apprécier le caractère abusif d'une clause contractuelle.
8. Pour exclure le caractère abusif de la clause stipulant la résiliation de plein droit du contrat de prêt, huit jours après une simple mise en demeure adressée à l'emprunteur restée sans effet, l'arrêt retient que la délivrance d'une mise en demeure préalable à l'acquisition de la déchéance du terme représente une protection suffisante de l'emprunteur défaillant pour le cas où, comme en l'espèce, il bénéficie d'un délai de huit jours qui constitue un préavis d'une durée raisonnable, pour régulariser sa situation.
9. En statuant ainsi, alors que la clause qui prévoit la résiliation de plein droit du contrat de prêt après une mise en demeure de régler une ou plusieurs échéances impayées sans préavis d'une durée raisonnable, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ainsi exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Et sur le second moyen
Enoncé du moyen
10. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de dire que la créance revendiquée par la Société générale venant aux droits et obligations de la banque [C] à l'encontre de l'emprunteur sera retenue pour la somme de 74 931,14 euros selon le décompte arrêté au 24 mai 2022, alors « qu'en se bornant à relever que la société banque [C] avait régulièrement déclaré sa créance pour un montant de 74 931,14 euros le 2 juin 2022 sans qu'une telle déclaration et sa dénonciation aient, alors, suscité la moindre contestation, sans répondre au moyen tiré de ce que le 8 novembre 2022, soit cinq mois après cette déclaration, la banque avait conclu avec l'emprunteur un protocole d'accord transactionnel, en cours d'exécution et portant réduction de sa créance à la somme de 48 167,37 euros, moyen reposant sur le protocole d'accord produit par M. [I] [D] au soutien de ses conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
11. La Société générale conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que l'emprunteur n'a pas sollicité devant la cour d'appel le rejet ou l'actualisation de la demande de la Société générale tendant à voir admettre provisoirement sa créance à la somme de 74 931 euros.
12. Cependant, le moyen se trouvait inclus dans le débat.
13. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
14. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Un défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
15. Pour dire que la créance revendiquée par la Société générale venant aux droits de la banque [C] contre l'emprunteur sera retenue pour la somme de 74 931,14 euros selon décompte arrêté au 24 mai 2022, l'arrêt retient que le 2 juin 2022, la banque [C] a régulièrement déclaré au greffe du juge de l'exécution la créance revendiquée pour ce montant selon décompte arrêté provisoirement au 24 mai 2022 et que la dénonciation de cette déclaration de créance n'a suscité aucune contestation.
16. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'emprunteur qui faisait valoir que l'arriéré n'était pas de 74 931 euros mais de 48 167,37 euros au moment de la signature le 8 novembre 2022 de la transaction intervenue avec la banque [C], la cour d'appel, qui n'a pas examiné le moyen pris de la réduction du montant de la créance, a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
17. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt disant que la banque était en droit de se prévaloir de la déchéance du terme du prêt immobilier consenti à l'emprunteur, disant que lors de la délivrance du commandement de payer valant saisie du 22 juillet 2021, la banque était titulaire à l'égard de l'emprunteur d'une créance de prêt devenue intégralement exigible après intervention d'une déchéance du terme dépourvue de tout caractère abusif et parfaitement régulière, validant le commandement de payer, le déclarant opposable à l'emprunteur à concurrence de la somme de 116 747,76 euros, jugeant régulière la procédure de saisie immobilière diligentée par la banque à l'encontre de l'emprunteur, et disant que la créance revendiquée par la Société générale venant aux droits et obligations de la banque [C] à l'encontre de l'emprunteur, sera retenue pour la somme de 74 931,14 euros selon décompte arrêté au 24 mai 2022, entraîne la cassation des autres chefs de dispositif, sauf celui déclarant recevable l'appel interjeté par la banque et l'appel incident formé par l'emprunteur, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire. 




Com. 9 juillet 2025 n° 24-14.777

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
MB


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Cassation

M. PONSOT, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 409 F-D
Pourvoi n° G 24-14.777



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 JUILLET 2025
1°/ Le directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône, domicilié [Adresse 3],
2°/ la directrice générale des finances publiques, domiciliée [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° G 24-14.777 contre l'arrêt rendu le 25 janvier 2024 par la cour d'appel d'Orléans (Chambre commerciale), dans le litige les opposant à la société Oceanis JV, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Maigret, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques de Provence-Alpes-Côte d'Azur et du département des Bouches-du-Rhône et de la directrice générale des finances publiques, de la SARL Cabinet Briard, Bonichot et Associés, avocat de la société Oceanis JV, après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présents M. Ponsot, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Maigret, conseiller référendaire rapporteur, Mme Graff-Daudret, conseillère, et M. Doyen, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 25 janvier 2024) et les productions, par un acte du 5 janvier 2007, la société Marguerite de Valois a acquis un ensemble immobilier composé de six bâtiments, en prenant l'engagement de revendre l'un de ces bâtiments dans les quatre ans de son achat et d'effectuer, dans ce même délai, des travaux de rénovation, de réhabilitation et de construction sur les autres bâtiments, la partie du prix portant sur l'immeuble à revendre étant soumise au tarif réduit des taxes de mutation prévu à l'article 1115 du code général des impôts et la partie du prix correspondant à l'acquisition des autres bâtiments étant exonéré
2. Le 13 octobre 2011, la société Oceanis JV, qui exerce une activité de marchand de biens, a acquis l'intégralité des parts de la société Marguerite de Valois. Le 18 octobre 2011, elle a procédé à la dissolution sans liquidation de cette société, dont elle était devenue l'associée unique, cette dissolution entraînant la transmission universelle de son patrimoine à son profit.
3. Du 24 octobre 2013 au 9 avril 2014, la société Oceanis JV a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à la suite de laquelle l'administration fiscale a considéré que, faute de réalisation des travaux de construction dans les délais requis, l'impôt dont avait été exonérée la société Marguerite de Valois, aux droits de laquelle elle se trouvait, devenait exigible. Le 29 avril 2014, l'administration fiscale a alors adressé à la société Oceanis JV une proposition de rectification au titre de la taxe de publicité foncière, qui a été annulée et remplacée par une nouvelle proposition de rectification du 19 septembre 2016.
4. Le 3 avril 2018, l'administration fiscale a émis un avis de mise en recouvrement (AMR) d'un montant de 173 015 euros, qui a été notifié à la société Oceanis JV, le 5 avril 2018.
5. Sa réclamation contentieuse ayant été rejetée, la société Oceanis JV a assigné l'administration fiscale aux fins de voir déclarer non fondée cette décision de rejet, d'annulation de l'avis de mise en recouvrement en cause, et d'obtenir la décharge de l'imposition et des pénalités contestées.

Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. La directrice générale des finances publiques fait grief à l'arrêt de prononcer, par substitution de motifs, la nullité de l'avis de mise en recouvrement du 3 avril 2018 et d'accueillir la demande de décharge des droits et pénalités qui ont été réclamés à la société Oceanis JV par cet avis, alors « que l'article R.* 256-1 du livre des procédures fiscales précise : "l'avis de mise en recouvrement prévu à l'article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis" ; qu'en application de cette disposition, l'avis de mise en recouvrement qui comporte la mention de l'impôt réclamé, la période concernée, ainsi que la référence à la proposition de rectification, qui, elle, contient les moyens de droit et de fait permettant d'en apprécier le bien-fondé, remplit les conditions fixées par ce texte ; qu'en retenant l'existence d'un risque de confusion, alors que ces mentions essentielles figuraient sur l'avis de mise en recouvrement, la cour d'appel a violé l'article R.* 256-1 du livre des procédures fiscales. »
Réponse de la Cour
Vu l'article R.* 256-1 du livre des procédures fiscales :
7. Il résulte de ce texte que l'AMR prévu à l'article L. 256 du livre des procédures fiscales, qui doit indiquer le montant des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet AMR et, lorsqu'il est consécutif à une procédure de rectification, faire référence à la proposition de rectification ainsi que, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications, doit permettre au contribuable de connaître les moyens de droit et de fait permettant d'apprécier le bien-fondé de l'imposition réclamée et d'identifier précisément la dette fiscale que l'administration s'apprête à recouvrer.
8. Pour prononcer la nullité de l'AMR du 3 avril 2018 et accueillir la demande de décharge des droits et pénalités formée par la société Oceanis JV, l'arrêt, après avoir relevé qu'au cas particulier, cet AMR mentionne avoir pour origine la proposition de rectification du 19 septembre 2016 et la réponse aux observations du contribuable du 3 mars 2017, relè
9. En statuant ainsi, alors que l'AMR ne mettait pas en recouvrement des droits d'enregistrement mais la taxe de publicité foncière et différentes taxes découlant de la soumission de l'opération à la taxe de publicité foncière, spécialement, la taxe perçue au profit de l'Etat de 0,2 % prévue par l'article 678 bis du code général des impôts pour les opérations donnant lieu à la perception d'un droit d'enregistrement ou d'une taxe de publicité foncière, la cour d'appel a violé le texte susvisé.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 25-15.983

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
CF


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, présidente


Arrêt n° 628 F-D
Pourvoi n° Q 25-15.983



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
Mme [D] [B] [V], domiciliée [Adresse 4], a formé le pourvoi n° Q 25-15.983 contre l'ordonnance rendue le 6 juin 2025 par le premier président de la cour d'appel de Caen, dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [U] [I], domicilié [Adresse 2],
2°/ à Mme [W] [I], épouse [K], domiciliée [Adresse 1],
3°/ à Mme [O] [M], épouse [B] [V], domiciliée [Adresse 3],
4°/ à M. [Z] [B] [V], domicilié [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Agostini, conseillère, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [D] [B] [V], de la SCP Spinosi, avocat de MM. [U] [I] et [Z] [B] [V] et de Mmes [W] [I] épouse [K] et [O] [M] épouse [B] [V], et l'avis de M. Poirret, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 8 juillet 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, Mme Agostini, conseillère rapporteure, Mme Auroy, conseillère doyenne, M. Poirret, premier avocat général, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée de la présidente et des conseillères précitées, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Caen, 6 juin 2025), à la suite du décès de [C] [I], survenu le 28 mai 2025, à [Localité 5], sa mère, Mme [D] [B] [V], d'une part, son père, M. [U] [I], sa demi-soeur, Mme [W] [I], et sa tante et son oncle maternels, Mme [O] [B] [V] et M. [Z] [B] [V], d'autre part, se sont opposés quant à l'organisation des funérailles et au choix du lieu de sépulture.
Sur le moyen unique
Enoncé du moyen
Mme [D] [B] [V] fait grief à l'ordonnance de dire que [C] [I] devait être inhumé à [Localité 6] (14), de l'ordonner en tant que de besoin et de confier à Mme [O] [B] [V] et à M. [Z] [B] [V] ou l'un d'eux seulement le soin d'organiser les obsèques du défunt, alors :
« 1°/ que les droits d'un parent sur la dépouille mortelle de son enfant, et notamment celui de décider du lieu, de l'heure et des modalités de l'inhumation, sont protégés par le principe selon lequel toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; qu'en retenant, pour débouter la mère du défunt de sa demande de se voir confier l'organisation des funérailles de son fils et le choix de son lieu de sépulture, que le choix de la mère ne pouvait prévaloir sur celui du défunt lui-même, quand il ressortait de ses propres constatations que ce dernier n'avait laissé aucun écrit ni aucune disposition testamentaire pour indiquer les modalités qu'il souhaitait pour ses propres funérailles, de sorte que le défunt n'avait pas exprimé de volonté claire relative à ses funérailles et sa sépulture dont le respect aurait justifié qu'il soit fait obstacle au droit de sa mère au respect de sa vie privée et familiale, la cour d'appel, n'a pas ménagé un juste équilibre entre le droit de la mère au respect de sa vie privée et familiale et le but légitime visé, violant l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme ;
2°/ qu'en toute hypothèse, l'article 3 de la loi du 15 novembre 1887 sur la liberté des funérailles impose au juge de s'assurer que les volontés exprimées par le défunt quant à ses funérailles et sa sépulture soient respectées ; qu'en se fondant, après avoir constaté que M. [I] n'avait laissé aucun écrit ni aucune disposition testamentaire pour indiquer les modalités qu'il souhaitait pour ses funérailles, sur des attestations faisant état de sa volonté de vivre à [Localité 6], pour ordonner qu'il y soit inhumé, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision, la privant de base légale au regard de cet article ;
3°/ qu'en toute hypothèse, en l'absence d'instructions expresses du défunt relatives aux conditions de ses funérailles et le lieu de sa sépulture, la personne la mieux qualifiée pour interpréter sa volonté reste son parent le plus proche sauf circonstances exceptionnelles ; qu'en désignant l'oncle et la tante du défunt pour organiser ses obsèques et en se rapportant à leur jugement pour décider de son lieu d'inhumation quand, en l'absence d'hoir le plus proche habile à lui succéder, la mère du défunt, dont les excellentes relations avec le défunt jusqu'au jour de son décès étaient admises, était la mieux qualifiée pour interpréter la volonté de son fils, la cour d'appel a violé l'article 3 de la loi du 15 novembre 1887, ensemble l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme. »
Réponse de la Cour
2. Aux termes de l'article 3 de la loi du 15 novembre 1887, tout majeur ou mineur émancipé, en état de tester, peut régler les conditions de ses funérailles, notamment en ce qui concerne le caractère civil ou religieux à leur donner et le mode de sa sépulture. Il peut charger une ou plusieurs personnes de veiller à l'exécution de ses dispositions. Sa volonté, exprimée dans un testament ou dans une déclaration faite en forme testamentaire, soit par devant notaire, soit sous signature privée, a la même force qu'une disposition testamentaire relative aux biens, elle est soumise aux mêmes règles quant aux conditions de la révocation.
3. Il résulte de ce texte qu'en l'absence de testament ou de déclaration faite en forme testamentaire, il appartient au juge saisi d'une contestation sur les modalités des funérailles, de rechercher, par tous moyens, quelles étaient les intentions du défunt et, à défaut, de désigner la personne la mieux qualifiée pour en décider.
4. Ces dispositions légales, qui prévoient la primauté de la volonté exprimée par le défunt, éventuellement établie judiciairement selon une procédure contradictoire, et, à défaut, de trancher le différend entre les proches en déterminant la personne la mieux qualifiée pour décider des modalités des funérailles, par une mise en balance des intérêts en présence et qui garantit ainsi le droit au respect de leur vie privée et familiale conventionnellement protégé, ne sont pas contraires à l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme.
5. Après avoir constaté l'absence de toute expression écrite ou testamentaire de la volonté du défunt quant aux modalités de ses funérailles, c'est par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et sans méconnaître le droit au respect de la vie privée et familiale de Mme [D] [B] [V] que le premier président a estimé qu'en exprimant la volonté de ne jamais retourner dans le sud de la France où vivait encore sa mère ainsi que son père, auxquels il portait une affection indéniable, et de demeurer en son lieu d'ancrage qu'était la Normandie et plus particulièrement [Localité 6] pour y finir ses jours, [C] [I] avait manifesté implicitement celle d'y demeurer encore après sa mort.
6. Relevant l'opposition manifestée par Mme [D] [B] [V] à ce lieu d'inhumation ainsi décidé par lui, le premier président a pu en déduire, en l'absence de volonté exprimée par le défunt à ce sujet, qu'il convenait de confier l'organisation des obsèques à Mme [O] [B] [V] et M. [Z] [B] [V], ou à l'un d'eux, après avoir constaté la volonté de ces derniers d'y intégrer Mme [D] [B] [V].
7. Le moyen n'est donc pas fondé




Soc. 9 juillet 2025 n° 24-11.169

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CZ


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Cassation partielle

Mme CAPITAINE, conseillère doyenne faisant fonction de présidente


Arrêt n° 744 F-D
Pourvoi n° M 24-11.169



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 JUILLET 2025
La société Mutualité française Champagne Ardenne, société mutualiste, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 24-11.169 contre l'arrêt rendu le 7 décembre 2023 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), dans le litige l'opposant à Mme [K] [E], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Nirdé-Dorail, conseillère, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Mutualité française Champagne Ardenne, de la SARL Gury & Maitre, avocat de Mme [E], et l'avis écrit de Mme Roques, avocate générale référendaire, après débats en l'audience publique du 11 juin 2025 où étaient présentes Mme Capitaine, conseillère doyenne faisant fonction de présidente, Mme Nirdé-Dorail, conseillère rapporteure, Mme Degouys, conseillère, et Mme Jouanneau, greffière de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des présidente et conseillères précitées, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 7 décembre 2023) et les productions, Mme [E] a été engagée en qualité d'assistante dentaire le 6 juillet 2015 par la société Mutualité française Champagne Ardenne.
2. Elle s'est vue reconnaître la qualité de travailleur handicapé le 18 janvier 2019.
3. Déclarée inapte à la reprise de son poste mais apte à un poste de secrétariat par le médecin du travail le 10 décembre 2019, la salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 28 janvier 2020 et a saisi la juridiction prud'homale.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses trois premières branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser à la salariée diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité au titre du préavis doublé pour reconnaissance de travailleur compte tenu du manquement à l'obligation de reclassement, alors « qu'aux termes de L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, lorsque le salarié victime d'une maladie ou d'un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel ; pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce" ; que, pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a retenu que la salariée produit une liste de sociétés comportant les dénominations sociales de mutualité française de PACA (106 établissements), Normandie (261 établissements) et grand sud (106 établissements), l'employeur se born[ant] à soutenir que la salariée n'apporte pas d'éléments probants sur l'existence d'un groupe", et que cette affirmation est insuffisante et il n'apporte aucun élément comme il le pouvait pour déterminer l'existence d'un groupe dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code du code du commerce ; aussi, et alors que la salariée n'a pas refusé de reclassement dans le secteur géographique PACA, Normandie ou Grand Sud, l'employeur n'a pas exécuté correctement son obligation préalable de reclassement" ; qu'en statuant ainsi, sans qu'il résulte de ses constatations que les sociétés ayant les dénominations sociales de mutualité française de PACA, Normandie et grand sud, appartenaient, avec l'employeur, à un groupe au sens de l'article L. 1226-2 du code du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard dudit texte dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1226-2 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1718 du 20 décembre 2017, L. 233-1, L. 233-3 I et II et L. 233-16 du code de commerce :
6. Il résulte du premier de ces textes que le périmètre du groupe à prendre en considération au titre de la recherche de reclassement est l'ensemble des entreprises, situées sur le territoire national, appartenant à un groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
7. Si la preuve de l'exécution de l'obligation de reclassement incombe à l'employeur, il appartient au juge, en cas de contestation sur l'existence ou le périmètre du groupe de reclassement, de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis par les parties.
8. Pour condamner l'employeur à payer à la salariée une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une indemnité de préavis doublée prévue par l'article L. 5213-9 du code du travail pour manquement à l'obligation de reclassement du salarié reconnu travailleur handicapé, l'arrêt retient que la salariée, qui invoquait l'appartenance de l'employeur à un groupe, produisait une liste de sociétés comportant les dénominations sociales de mutualité française de Paca, Normandie et Grand Sud et le nombre d'établissements rattachés à chacune d'elles.
9. Il relève ensuite que l'employeur, qui contestait l'existence d'un groupe, se bornait à affirmer que les éléments apportés par la salariée n'étaient pas probants sans produire ceux dont il disposait pour déterminer une telle existence au sens des articles du code du commerce précités.
10. En se déterminant ainsi, sans caractériser l'appartenance de l'employeur à un groupe de reclassement au sens des textes précités, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.




Soc. 9 juillet 2025 n° 24-16.281

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
ZB1


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Cassation partielle

Mme MONGE, conseillère doyenne faisant fonction de présidente


Arrêt n° 750 F-D
Pourvoi n° T 24-16.281

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 JUILLET 2025
La société [Localité 2] ambulances, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], [Localité 2], a formé le pourvoi n° T 24-16.281 contre l'arrêt rendu le 18 avril 2024 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale, section 2), dans le litige l'opposant à Mme [F] [Z], domiciliée [Adresse 1], [Localité 3], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Cavrois, conseillère, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société [Localité 2] ambulances, de la SCP Françoise Fabiani - François Pinatel, avocat de Mme [Z], après débats en l'audience publique du 11 juin 2025 où étaient présentes Mme Monge, conseillère doyenne faisant fonction de présidente, Mme Cavrois, conseillère rapporteure, Mme Deltort, conseillère, et Mme Pontonnier, greffière de chambre,


la chambre sociale de la Cour de cassation, composée de la présidente et conseillères précitées, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nancy,18 avril 2024), Mme [Z] a été engagée en qualité d'ambulancière, par la société [Localité 2] ambulances à compter du 18 février 2019.
2. La convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 s'applique au contrat de travail.
3. A compter du 9 janvier 2021, la salariée a été placée en arrêt de travail, pour maladie, prolongé de manière continue.
4. Le 1er avril 2022, la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes en paiement de rappels de salaires.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la salariée diverses sommes au titre de la garantie de maintien de salaire pour la période de janvier 2021 à juillet 2021 et à titre d'indemnité compensatrice de congés payés, et de le débouter de l'ensemble de ses demandes, alors « que la cour d'appel ne pouvait pas faire droit à la demande de la salariée de bénéficier, pour la période d'arrêt maladie de janvier 2021 à juillet 2021, du niveau de maintien du salaire tel qu'il est prévu par la convention collective pour les salariés ayant plus de 10 ans d'ancienneté alors que son ancienneté réelle était de deux ans, au motif que sur ses bulletins de salaire figure la mention d'une prime d'ancienneté et que la mention au contrat de travail de cet avantage "ne démontre pas que les parties ne se sont pas entendues à l'embauche sur une reprise d'ancienneté au bénéfice de Mme [F] [Z]", sans répondre aux conclusions de l'employeur indiquant que "les bulletins de salaire de Mme [Z] mentionnent la date d'embauche de cette dernière au 18/02/2019 et aucune autre date qui pourrait faire remonter l'ancienneté de cette dernière" ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen qui était de nature à établir que les parties s'étaient accordées sur le principe d'une prime d'ancienneté sans cependant reprendre l'ancienneté acquise par la salariée auprès d'autres employeurs, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »


Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civil :
6. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé, à peine de nullité. Le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs.
7. Pour condamner l'employeur à payer à la salariée une somme au titre de l'indemnité complémentaire aux indemnités journalières prévues à l'article L. 1226-1 du code du travail, l'arrêt rappelle que selon les dispositions des articles L. 3243-1 et R. 3243-1 du code du travail la date d'ancienneté figurant sur le bulletin de paie vaut présomption de reprise d'ancienneté sauf à l'employeur à apporter la preuve contraire. Il retient que l'article 13 de l'annexe 1 de la convention collective nationale des transports routiers et activités auxiliaires du transport du 21 décembre 1950 dispose que le salarié bénéficie d'une majoration de rémunération au titre de l'ancienneté qui s'établit à 6 % après 10 années de présence dans l'entreprise. Il relève que les bulletins de salaire mentionnent une prime d'ancienneté de 6 % et que si le contrat de travail précise que « l'ancienneté acquise par le salarié dans l'entreprise, à la date d'embauche, donne lieu à un versement de l'indemnité conventionnelle qui est versée dans les conditions suivantes ...6 % après 10 ans », cette mention ne démontre pas que les parties ne se sont pas entendues à l'embauche sur une période d'ancienneté au bénéfice de la salariée.
8. En statuant ainsi sans répondre aux conclusions de l'employeur qui faisait valoir que les bulletins de paie de la salariée mentionnaient une date d'embauche au 18 février 2019 et qu'ils ne mentionnaient aucune autre date qui pourrait faire remonter l'ancienneté de la salariée au-delà, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.




Com. 9 juillet 2025 n° 23-24.019 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
MB


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

M. PONSOT, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 394 F-B
Pourvoi n° G 23-24.019



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 JUILLET 2025
M. [P] [M], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 23-24.019 contre l'arrêt rendu le 10 octobre 2023 par la cour d'appel de Poitiers (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Mcs et associés, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Graff-Daudret, conseillère, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de M. [M], et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présents M. Ponsot, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Graff-Daudret, conseillère rapporteure, Mme Ducloz, conseillère, et M. Doyen, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 10 octobre 2023), par un acte notarié du 9 février 2012, la Banque populaire du Sud (la banque), aux droits de laquelle est venue la société Mcs et associés, a accordé à la société Mise en toile (la société) un prêt de 100 000 euros, garanti par le cautionnement de M. [M] à hauteur du montant du prêt, augmenté de tous les intérêts, commissions, frais et accessoires évalués forfaitairement à 30 % du montant du prêt.
2. Par un jugement d'orientation du 1er juillet 2014, le juge de l'exécution a fixé le principal de la créance de la banque à l'encontre de M. [M] à la somme de 107 481,59 euros.
3. Le 27 décembre 2018, la banque a cédé sa créance à la société Mcs et associés.
4. Par requête reçue le 21 décembre 2021, la société Mcs et associés a saisi le juge de l'exécution aux fins de saisie des rémunérations de M. [M], lequel lui a opposé la disproportion manifeste de son cautionnement à ses biens et revenus.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. M. [M] fait grief à l'arrêt de dire que l'engagement de caution par acte notarié du 9 février 2012 lui était opposable, de fixer la créance due à la société Mcs et associés, qui vient aux droits de la Banque populaire du Sud, à la somme totale de 140 366,20 euros et d'autoriser la saisie de ses rémunérations pour le recouvrement de ces sommes, alors :
« 1°/ qu'un créancier professionnel est privé du droit de poursuivre la caution lorsqu'il s'avère que l'engagement conclu par cette dernière était, lors de la souscription, manifestement disproportionné par rapport à ses biens et revenus ; que les indemnités kilométriques consistent dans le remboursement de frais de transport et de fonctionnement du véhicule personnel utilisé par le salarié à des fins professionnelles et ne peuvent être qualifiées de revenus ; qu'en intégrant, pour retenir que les revenus annuels de Monsieur [M] devaient être évalués à 55 200 euros, l'indemnité kilométrique de 24 000 euros mentionnée dans la fiche de renseignement, la cour d'appel, qui a augmenté de plus de 40 % et ce, de manière artificielle et indue, les revenus réels de Monsieur [M] pour en conclure que son engagement de caution n'était pas disproportionné à ses biens et revenus au moment de la souscription, a violé l'article L. 332-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige ;
2°/ que l'existence d'une fiche de renseignement certifiée exacte par la caution elle-même a pour effet de dispenser le créancier de vérifier l'exactitude des déclarations qu'elle contient, à moins que cette fiche ne contienne des anomalies apparentes ; que cette réserve suppose de la part du créancier professionnel, prêteur, une obligation de vigilance, tant à l'égard de ce qui est déclaré que de ce qui ne l'est pas ; que la proportionnalité du cautionnement du conjoint, marié sous le régime de la séparation de biens, doit s'apprécier au regard de ses seuls patrimoine et revenus ; que M. [M] faisait valoir que la fiche de renseignement du 15 octobre 2011 mentionnait une somme de 32 000 euros correspondant aux ressources de son épouse, cependant que le couple était marié sous le régime de la séparation de biens, qu'il s'était seul engagé en tant que caution et que cette anomalie apparente aurait dû conduire la Banque populaire du Sud à attirer son attention sur le fait qu'il n'avait pas à intégrer les ressources de son épouse dès lors que le couple était marié sous le régime de la séparation de biens, comme cela ressortait de la première page de la fiche de renseignement ; qu'en se bornant à énoncer, pour écarter l'existence d'une anomalie apparente, que la fiche de renseignement avait distingué les revenus de la caution de ceux de sa conjointe séparée de biens, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, si la mention des revenus de la conjointe de M. [M] n'aurait pas dû conduire la Banque populaire du Sud à l'informer de ce qu'il n'avait pas à mentionner les ressources de son épouse, séparée de biens, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 332-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige ;
3°/ que l'existence d'une fiche de renseignement certifiée exacte par la caution elle-même a pour effet de dispenser le créancier de vérifier l'exactitude des déclarations qu'elle contient, à moins que cette fiche ne contienne des anomalies apparentes ; que cette réserve suppose de la part de l'établissement financier prêteur une obligation de vigilance, tant à l'égard de ce qui est déclaré que de ce qui ne l'est pas ; qu'en l'espèce, la fiche de renseignement mentionnait à la rubrique "ressources actuelles" une somme de 24 000 euros correspondant à des indemnités kilométriques ; que Monsieur [M] faisait valoir que les indemnités kilométriques ne constituaient pas des revenus et correspondaient au remboursement annuel de charges qu'il avait dépensées, que lorsqu'il avait indiqué les frais kilométriques sur la fiche de renseignement, c'était uniquement parce qu'il ignorait s'il devait porter à la connaissance de la banque ces sommes et qu'il appartenait à la banque de retrancher ces sommes pour définir ses revenus personnels ; qu'en se bornant à retenir qu'il importait peu que les indemnités kilométriques aient le caractère de remboursement de frais et soient non imposables, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la mention au titre des "autres revenus" des indemnités kilométriques dans cette fiche de renseignement, ne constituait pas une anomalie apparente dès lors que des indemnités kilométriques ne pouvaient s'analyser en revenus et si elle ne devait pas conduire la Banque Populaire du Sud à interroger Monsieur [M] sur ce point et à retrancher ces sommes de ses revenus effectivement à prendre en compte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 332-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige ;
4°/ que les parts sociales dont est titulaire la caution au sein de sociétés font partie du patrimoine de la caution qui doivent être prises en considération pour l'appréciation de ses biens et revenus, à la date de la souscription de son engagement de caution ; qu'il ressort des constatations mêmes de la cour d'appel que Monsieur [M] était titulaire de 99 des 100 parts composant le capital social de la Sci du Bosquet, détentrice d'un bien immobilier hypothéqué, évalué à 450 000 euros, acquis avec des crédits pour lequel le capital restant dû était de 308 000 euros, la valeur nette du bien immobilier étant de 142 000 euros ; qu'en énonçant que le patrimoine de Monsieur [M] au moment de son engagement pouvait être évalué "au moins" à 194 000 euros (142 000 + 52 000 euros), cependant qu'elle avait constaté que Monsieur [M] détenait 99 % des parts, ce dont il s'évinçait que l'évaluation des parts s'élevait tout au plus à la somme de 140 580 euros (0,99 x 142 000 ) et non à celle de 142 000, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article L. 332-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige. »
Réponse de la Cour
6. Après avoir constaté que la fiche de renseignements établie par la caution indique notamment que M. [M] est marié sous le régime de la séparation de biens, qu'il perçoit 31 200 euros de salaires bruts ainsi que 24 000 euros annuels au titre d'indemnités kilométriques, que son épouse perçoit 32 000 euros annuels de revenus, soit un total de revenus du couple de 87 200 euros, l'arrêt relève que la fiche mentionne qu'il est titulaire des parts d'une société civile propriétaire d'un bien immobilier représentant une valeur nette de 142 000 euros. L'arrêt retient que le patrimoine de la caution au moment de son engagement pouvait être évalué au moins à 194 000 euros (142 000 + 52 200) et que ses revenus personnels annuels doivent être évalués à 55 200 euros, de sorte que son engagement de caution d'un montant de 130 000 euros n'est pas manifestement disproportionné à un patrimoine d'au moins 194 000 euros et à des revenus annuels de 55 200 euros.
7. En premier lieu, si c'est à tort que l'arrêt a pris en considération des indemnités kilométriques comme étant des revenus, l'arrêt n'encourt pas la censure, dès lors qu'il ressort des constatations des juges du fond que l'engagement de caution, d'un montant de 130 000 euros, n'était pas manifestement disproportionné au patrimoine net déclaré par la caution, de 194 000 euros, même ramené à la somme de 192 580 euros (140 580 + 52 200).
8. En second lieu, il résulte de l'arrêt que la cour d'appel n'a pas pris en considération les revenus de l'épouse de la caution dans l'appréciation de la disproportion manifeste de l'engagement.
9. Le moyen, qui manque en fait en sa deuxième branche, n'est pas fondé pour le surplus.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.088

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 379 FS-D
Pourvoi n° M 24-10.088






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 24-10.088 contre l'arrêt rendu le 23 novembre 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 novembre 2023) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à M. et Mme [O] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 11 mai 2021, M. et Mme [O] ont assigné la société TMR en remboursement du prix de la croisière et en paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes de M. et Mme [O] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, la cour d'appel a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle, de sorte qu'il appartenait à la société TMR de "prouver que celle-ci a commis une faute en décidant d'annuler cette croisière" ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, la cour d'appel a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, la cour d'appel a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que la cour d'appel a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de M. et Mme [O] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.077

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 378 FS-D
Pourvoi n° Z 24-10.077






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 24-10.077 contre l'arrêt rendu le 7 décembre 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 décembre 2023) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR), a vendu à M. et Mme [V] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 12 au 22 octobre 2020 (TMR2), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés, l'itinéraire de la croisière TMR2 a été modifié et celle-ci a finalement été interrompue, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 30 avril 2021, M. et Mme [V] ont assigné la société TMR en remboursement d'une partie du prix de la croisière et en paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes M. et Mme [V] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, la cour d'appel a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle, de sorte qu'il appartenait à la société TMR de "prouver que celle-ci a commis une faute en décidant d'annuler cette croisière" ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, la cour d'appel a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, la cour d'appel a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Il doit en aller de même si l'organisateur se trouve empêché de poursuivre l'exécution du contrat en raison de telles circonstances exceptionnelles et inévitables.
13. Ainsi, en cas d'inexécution partielle des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser au voyageur la somme correspondant aux prestations qui n'ont pas été exécutées .
14. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
15. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
16. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
17. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
18. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
19. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'interruption du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées.




20. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables qui justifiaient l'interruption de la croisière par la société Costa Crociere et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement partiel de M. et Mme [V] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
21. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Com. 9 juillet 2025 n° 24-16.223 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
JB


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

M. PONSOT, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 403 F-B
Pourvoi n° E 24-16.223



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 JUILLET 2025
1°/ M. [W] [S], domicilié [Adresse 2],
2°/ la société Batsecur, société à responsabilité limitée,
3°/ la société Xabia, société civile immobilière,
toutes deux ayant leur siège [Adresse 2],
4°/ la société Blue Parrot Limited,
5°/ la société Prince Vidéo Limited,
toutes deux ayant leur siège [Adresse 1] (Hong-Kong)
6°/ la société Blue Parrot FZE,
7°/ la société Prince Middle East FZE,
toutes deux ayant leur siège [Adresse 4] (Émirats Arabes Unis)
8°/ Mme [P] [S], domiciliée [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° E 24-16.223 contre l'ordonnance rendue le 14 mai 2024 par la cour d'appel de Lyon (juridiction du premier président), dans le litige les opposant à la directrice générale des finances publiques, représentée par l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction nationale d'enquêtes fiscales, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Gauthier, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [S], des sociétés Batsecur, Xabia, Blue Parrot Limited, Prince Vidéo Limited, Blue Parrot FZE, Prince Middle East FZE, et de Mme [S], de la SCP Foussard et Froger, avocat de la directrice générale des finances publiques, représentée par l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction nationale d'enquêtes fiscales, après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présentes M. Ponsot, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Gauthier, conseiller rapporteur, Mme Graff-Daudret, conseillère, et M. Doyen, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillères précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'ordonnance attaquée (Lyon, 14 mai 2024), rendue par le premier président d'une cour d'appel sur renvoi après cassation (Com., 11 mai 2023, pourvoi n° 21-16.900), un juge des libertés et de la détention a, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, autorisé l'administration fiscale à effectuer des visites et saisies dans les locaux situés au [Adresse 2] à [Localité 5], susceptibles d'être occupés par M. [W] [S] et/ou Mme [P] [S], née [K], et/ou M. [V] [K] et/ou la SARL Batsecur et/ou la SCI Xabia et/ou la société de droit hongkongais Blue Parrot Limited et/ou la société de droit hongkongais Prince Video Limited et/ou la société de droit émirati Blue Parrot FZE et/ou la société de droit émirati Prince Middle East FZE, en vue de rechercher la preuve de fraudes fiscales commises par les sociétés de droit hongkongais et émirati et par leur dirigeant, M. [S].
2. Les opérations de visite et saisies ont été réalisées le 24 septembre 2020.
3. M. et Mme [S], M. [K] et les sociétés Batsecur, Xabia, Blue Parrot Limited, Prince Video Limited, Blue Parrot FZE et Prince Middle East FZE ont formé un recours contre le déroulement des opérations de visite et saisies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. M. et Mme [S] et les sociétés Batsecur, Xabia, Blue Parrot Limited, Prince Video Limited, Blue Parrot FZE et Prince Middle East FZE font grief à l'ordonnance de rejeter leur demande tendant à l'annulation des opérations de visite et saisie qui se sont déroulées le 24 septembre 2020 dans leur intégralité, à l'annulation du procès-verbal de visite et de saisie du 24 septembre 2021 dans son intégralité et d'annuler l'inventaire et la saisie de l'intégralité des documents qu'il recense, alors « que selon le III bis de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, au cours de la visite autorisée pour rechercher la preuve des agissements d'un contribuable présumé s'être soustrait à l'établissement ou au paiement de l'impôt, les agents des impôts peuvent recueillir, sur place, des renseignements et justifications concernant ces agissements auprès de l'occupant des lieux ou de son représentant et, s'il est présent, de ce contribuable, à condition toutefois de les avoir informés que leur consentement était nécessaire ; que l'obligation d'informer préalablement le contribuable de la nécessité d'obtenir son consentement pour recueillir des renseignements et justifications dont le contenu est susceptible d'être en lien avec la fraude présumée participe des mesures visant à lui garantir le respect de ses droits de la défense parmi lesquels le droit de garder le silence et de ne pas contribuer à sa propre incrimination ; que la violation de cette obligation par les agents des impôts doit être sanctionnée par l'annulation de l'intégralité des opérations de visite et de saisies ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'ordonnance attaquée que les déclarations de M. [S] concernant l'identité des titulaires de comptes bancaires situés à l'étranger et les codes d'accès à distance à ces comptes ont été recueillis sans qu'il ait été préalablement informé de la nécessité de recueillir son consentement et sous la menace injustifiée des sanctions prévues à l'article 1735 quater du code général des impôts ; qu'en déboutant néanmoins M. [S] de sa demande d'annulation de l'intégralité des opérations de visite et de saisie, le délégataire du premier président a violé l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ».
Réponse de la Cour
6. Selon l'article L. 16 B, III bis du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2019-964 du 18 septembre 2019, les agents des impôts habilités peuvent recueillir, sur place, des renseignements et justifications concernant les agissements du contribuable mentionné au I du même texte auprès de l'occupant des lieux ou de son représentant et, s'il est présent, de ce contribuable, après les avoir informés que leur consentement est nécessaire et que ces renseignements et justifications sont consignés dans un compte-rendu annexé au procès-verbal mentionné au IV du même texte et qui est établi par les agents des impôts et signé par ces agents, les personnes dont les renseignements et justifications ont été recueillis ainsi que l'officier de police judiciaire présent.
7. Après avoir relevé que les déclarations effectuées par M. [S] auprès des agents des impôts constituaient des renseignements et justifications concernant des agissements susceptibles de caractériser la fraude présumée et constaté qu'il n'était pas mentionné dans le procès-verbal de visite et de saisie du 24 septembre 2020 que la personne entendue a été préalablement informée de ce que son consentement était nécessaire, l'ordonnance en déduit que le procès-verbal était, pour partie, irrégulier.
7. En l'état de ces constatations et appréciations, le premier président a retenu à bon droit, sans méconnaître les exigences de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que cette irrégularité ne devait pas conduire à l'annulation de l'intégralité des opérations de visite et saisies et qu'il n'y avait lieu d'ordonner que la seule cancellation des passages du procès-verbal se rapportant aux déclarations irrégulièrement recueillies ainsi que l'annulation de la saisie de relevés bancaires et de trois fichiers informatiques, ces pièces n'ayant pu être obtenues que grâce à ces déclarations.
8. Le moyen n'est pas donc fondé.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 23-20.456

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, présidente


Arrêt n° 503 F-D
Pourvoi n° K 23-20.456



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
M. [D] [J], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23-20.456 contre l'arrêt rendu le 25 mai 2023 par la cour d'appel d'Orléans (chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [N] [Y], notaire, domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [J], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [Y], après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Bruyère, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseillère doyenne, et Mme Vignes, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée de la présidente et des conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 25 mai 2023), suivant acte reçu le 23 août 2012 par M. [Y], notaire (le notaire), M. [J] (l'acquéreur) a signé une promesse synallagmatique de vente d'un terrain sur lequel était édifiée une maison à usage d'habitation.
2. Le 12 septembre 2012, le notaire a reçu le certificat d'urbanisme faisant mention que le bien était situé en zone agricole.
3. Après que l'acquéreur a refusé de régulariser l'acte authentique, une cour d'appel l'a, par arrêt devenu irrévocable du 10 mai 2017, condamné à des indemnités en réparation des préjudices nés du défaut de signature de l'acte et de l'immobilisation du bien.
4. Par acte du 20 février 2017, l'acquéreur a assigné le notaire en responsabilité et indemnisation.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses cinquième à septième branches
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses première à quatrième branches
Enoncé du moyen
6. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes au titre des manquements du notaire à ses devoirs de conseil, à l'exception de celui tiré du défaut d'attention portée à l'acquéreur sur l'absence de conformité du bien vendu au permis de construire et les incidences de cette non-conformité et, en conséquence, de condamner le notaire à lui verser la seule somme de 14 048,74 euros, en réparation de son préjudice résultant de la perte de chance, alors :
« 1°/ que le notaire, tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques des actes auxquels il est requis de donner la forme authentique, ainsi que de s'assurer de l'efficacité de ces derniers, doit, à ce titre, procéder à toutes les vérifications et investigations utiles, notamment en ce qui concerne la nature du bien vendu ; qu'en se fondant, pour écarter la responsabilité du notaire au titre de son défaut de vérification de la nature du terrain sur lequel était construite la maison, antérieurement à la signature de la promesse de vente, sur les circonstances tirées de ce qu'aucune disposition légale n'imposait au notaire de solliciter un certificat d'urbanisme avant la promesse de vente et qu'il n'était pas justifié de circonstances particulières qui auraient dû inciter le notaire à solliciter ce document avant la signature du compromis, lesquelles n'étaient pas de nature à dispenser le professionnel de son obligation de vérification lui incombant, et, partant, à exclure sa responsabilité, a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil ;
2°/ que le notaire, tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques des actes auxquels il est requis de donner la forme authentique, ainsi que de s'assurer de l'efficacité de ces derniers, doit découvrir la volonté de ses clients afin que leur convention produise les effets recherchés ; qu'en se fondant, pour écarter la responsabilité du notaire au titre de son défaut de vérification de la nature du terrain sur lequel était construite la maison, antérieurement à la signature de la promesse de vente, sur la circonstance tirée de ce que M. [J] n'avait pas fait mention lors de la signature du compromis, d'un projet de construction ou d'extension sur la parcelle litigieuse, laquelle n'excluait pas l'obligation incombant au professionnel de se renseigner sur l'intention exacte de ses clients, la cour d'appel a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil ;
3°/ que le notaire, tenu d'éclairer les parties et d'appeler leur attention, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques des actes auxquels il est requis de donner la forme authentique, ainsi que de s'assurer de l'efficacité de ces derniers, doit, à ce titre, procéder toutes les vérifications et investigations utiles, notamment en ce qui concerne la nature du bien vendu ; qu'en se fondant, pour écarter la responsabilité du notaire au titre de son défaut de vérification de la nature du terrain sur lequel était construite la maison, antérieurement à la signature de la promesse de vente, sur la circonstance tirée de ce que la promesse de vente comportait, au titre des conditions suspensives, le fait que « les pièces d'urbanismes ne révèlent pas de servitudes ou de charges, autres que celles éventuellement indiquées aux présentes, ni de vices non révélés aux présentes, pouvant grever l'immeuble et en diminuer la valeur ou le rendre impropres à la destination que l'acquéreur déclare à usage d'habitation », laquelle n'était pas de nature à dispenser le notaire de son obligation de vérification avant la conclusion du compromis de vente, la cour d'appel a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil ;
4°/ qu'en toute hypothèse, le notaire est tenu de procéder à toutes les vérifications et investigations utiles pour assurer l'efficacité de l'acte, notamment en ce qui concerne la nature du bien vendu, peu important que ces recherches ne révèlent pas de vice grevant l'immeuble et en diminuant sensiblement la valeur, ou rendant ce dernier impropre à sa destination ; qu'en jugeant, pour écarter la responsabilité du notaire au titre de son défaut de vérification de la nature du terrain sur lequel était construite la maison, antérieurement à la signature de la promesse de vente, sur la circonstance tirée de ce que l'acquéreur ne démontrait pas que le classement de la parcelle en zone agricole rendait le bien impropre à sa destination ou diminuait la valeur de ce dernier, laquelle ne suffisait pas à dispenser le professionnel de son obligation de vérification lui incombant, et, partant, à exclure sa responsabilité, la cour d'appel a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil. »
Réponse de la Cour
7. Le notaire n'est pas tenu d'obtenir la délivrance d'un état de l'immeuble préalablement à la conclusion d'une promesse de vente, dès lors que cet avant-contrat est destiné à arrêter la volonté des parties sans attendre l'expiration des délais utiles à l'obtention des documents administratifs et hypothécaires nécessaires à la perfection de la vente, ni de vérifier la possibilité de modifier la construction existante, qui n'est pas mentionnée à l'acte et dont il n'a pas été avisé, à moins qu'il n'ait pu raisonnablement l'ignorer.
8. L'arrêt constate, d'abord, que la promesse de vente comportait au titre des conditions suspensives de droit commun, le fait que « les pièces d'urbanisme ou autres documents obtenus ne révèlent pas de servitudes ou charges, autres que celles éventuellement indiquées aux présentes, ni de vices non révélés aux présentes, pouvant grever l'immeuble et en diminuer sensiblement la valeur ou la rendre impropre à la destination que l'acquéreur déclare être à usage d'habitation », de sorte qu'une information révélée par le certificat d'urbanisme et répondant à ces conditions était de nature à justifier le refus de signature de l'acte authentique par l'acquéreur.
9. Il ajoute, ensuite, qu'il n'est pas soutenu que l'acquéreur aurait fait mention, lors de la signature du compromis, d'un projet de construction ou d'extension sur la parcelle litigieuse qui aurait justifié qu'une condition suspensive relative à la constructibilité du terrain soit insérée dans l'acte.
10. Il retient, enfin, que l'acquéreur ne démontre ni que le classement de la parcelle en zone agricole rend le bien impropre à sa destination, ni que ce classement a la portée qu'il lui prête en terme de limites à sa constructibilité puisqu'un tel classement n'interdit pas toute construction et que les extensions sont possibles.
11. De ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire que, ayant inséré à l'acte une condition suspensive tenant au caractère habitable de l'immeuble construit sur la parcelle achetée, conformément à l'intention exprimée par l'acquéreur, le notaire n'avait pas manqué à son devoir de conseil.
12. Le moyen, pris en ses quatre branches, n'est donc pas fondé.




Crim. 9 juillet 2025 n° 25-83.159

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° H 25-83.159 F-D
N° 01097

SB4 9 JUILLET 2025

CASSATION PARTIELLE

Mme LABROUSSE conseiller le plus ancien faisant fonction de président,










R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 9 JUILLET 2025


M. [D] [X] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nouméa, en date du 6 novembre 2024, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises de Wallis-et-Futuna, sous les accusations de viol et agression sexuelle, aggravés.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Brugère, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [D] [X], et les conclusions de M. Fusina, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 juillet 2025 où étaient présents Mme Labrousse, conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Brugère, conseiller rapporteur, Mme Leprieur, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Par ordonnance d'un juge d'instruction, en date du 15 janvier 2024, M. [D] [X] a été renvoyé devant la cour d'assises sous les accusations susvisées.
3. Il a relevé appel de cette ordonnance.
Examen des moyens
Sur le moyen du mémoire, pris en ses première et troisième branches, et le moyen relevé d'office et mis dans le débat
Enoncé des moyens
4. Le moyen du mémoire critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit qu'il existe à l'encontre de M. [X] des indices graves et concordants rendant vraisemblable qu'il a pu commettre comme auteur les infractions pour lesquelles il a été mis en examen et a confirmé l'ordonnance qui a prononcé sa mise en accusation devant la cour d'assises de Wallis-et-Futuna des chefs de viol et agressions sexuelles envers un mineur de quinze ans, faits commis les 13 et 14 juin 2017, alors :
« 1°/ que le renvoi d'une personne mise en examen du chef de viol devant une juridiction criminelle suppose l'existence de charges suffisantes à son encontre d'avoir commis un acte de pénétration sexuelle sur la personne de la victime ; que M. [X] soutenait qu'il n'avait jamais commis une pénétration digitale intra annale sur M. [E], soulignant que sa position avait été constante sur ce point au contraire des déclarations de la partie civile, non seulement tardives mais inconstantes ; que pour ces mêmes raisons, le parquet général avait requis le non-lieu ; qu'en se bornant à énoncer d'une manière générale que la partie civile a décrit les faits poursuivis de façon précise, claire et circonstanciée, cohérente et mesurée, qu'elle avait pu éprouver des réticences à dénoncer les faits les plus graves, qu'elle a subi un stress post traumatique et un trouble de l'adaptation liés à sa confrontation à des faits de nature sexuelle, que le mise en examen est décrit comme ayant des penchants pédophiles, sans énoncer aucun motif particulier relatif à la réalité de la pénétration digitale, pourtant déterminante pour caractériser les charges suffisantes contre M. [X] d'avoir commis le viol poursuivi, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 222-23 du code pénal et 181, 215, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que le renvoi d'une personne mise en examen du chef de viol devant une juridiction criminelle suppose l'existence de charges suffisantes à son encontre d'avoir commis un acte de pénétration sexuelle sans le consentement de la victime ; que si l'absence de consentement peut se déduire de la différence d'âge entre les protagonistes, il appartient au juge de se prononcer sur ce point ; qu'en rappelant que le mis en examen soutient que la victime était consentante aux faits d'atteintes sexuelles et en se bornant à énoncer que cette interprétation est « peu vraisemblable » s'agissant d'un acte de viol commis par un adulte âgé de 25 ans sur mineur de 12 ans, la chambre de l'instruction, qui s'est prononcée par des motifs dubitatifs, a privé sa décision de base légale au regard 222-22-1, dans sa version issue de la loi n° 2010-121 du 8 février 2010, et des articles 222-23 du code pénal, 181, 215, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
5. Le moyen relevé d'office est pris de la violation des articles 214 et 215 du code de procédure pénale.
Réponse de la Cour
6. Les moyens sont réunis.
Vu les articles 211, 214 et 215 du code de procédure pénale :
7. Selon le premier de ces textes, la chambre de l'instruction saisie d'un appel d'une ordonnance de règlement examine s'il existe contre la personne mise en examen des charges suffisantes.
8. Il résulte des deux derniers qu'il appartient à la chambre de l'instruction, saisie de l'appel d'une ordonnance de mise en accusation, d'apprécier par elle-même s'il existe à l'encontre de la personne mise en examen des charges suffisantes d'avoir commis un crime et, dans l'affirmative, d'ordonner son renvoi devant la cour d'assises.
9. Pour confirmer l'ordonnance de mise en accusation du juge d'instruction, la chambre de l'instruction déduit des éléments qu'elle a retenus l'existence, à l'encontre de M. [X], d'indices graves et concordants rendant vraisemblable qu'il a pu commettre les infractions reprochées.
10. En statuant ainsi, sans relever l'existence de charges suffisantes contre M. [X], qui seules pouvaient fonder son renvoi devant une juridiction de jugement, d'une part, et sans ordonner elle-même sa mise en accusation et son renvoi devant la cour d'assises, d'autre part, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé.
11. Dès lors, la cassation est encourue, sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre grief.
Portée et conséquences de la cassation
12. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives, d'une part, à l'existence d'indices graves et concordants à l'encontre de M. [X], d'autre part, à la confirmation de l'ordonnance de mise en accusation rendue par le juge d'instruction. Les autres dispositions seront donc maintenues.




Com. 9 juillet 2025 n° 24-18.368

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
JB


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Cassation partielle

M. PONSOT, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 397 F-D
Pourvoi n° M 24-18.368



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 JUILLET 2025
La société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique, société coopérative de banque à forme anonyme et capital variable, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 24-18.368 contre l'arrêt rendu le 30 mai 2024 par la cour d'appel de Limoges (chambre économique et sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [L] [C],
2°/ à Mme [U] [K],
tous deux domiciliés [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ducloz, conseillère, les observations de la SAS Boucard-Capron-Maman, avocat de la société Banque populaire Aquitaine Centre Atlantique, de Me Bardoul, avocat de M. [C] et de Mme [K], après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présents M. Ponsot, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ducloz, conseillère rapporteure, Mme Graff-Daudret, conseillère, et M. Doyen, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 30 mai 2024), le 21 novembre 2017, la Banque populaire Aquitaine Centrale Atlantique (la banque) a consenti deux prêts de 150 000 euros chacun à la société [C] [K].
2. M. [C] et Mme [K], directeur général et présidente de la société [C] [K], se sont rendus cautions solidaires de ces prêts, à hauteur, chacun, de la somme de 180 000 euros, pour le premier prêt, et de celle de 18 750 euros, pour le second.
3. Le 23 novembre 2021, la société [C] [K] a été mise en liquidation judiciaire.
4. Les 17 et 18 février 2022, la banque a assigné M. [C] et Mme [K] en paiement.
Examen du moyen
Sur le moyen
Enoncé du moyen
5. La banque fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « que la caution ne peut être déchargée de son engagement si au moment où elle est appelée, son patrimoine lui permet de faire aux sommes qu'elle reste devoir ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a apprécié la proportionnalité du cautionnement en comparant les revenus et le patrimoine des cautions au montant pour lequel celles-ci se sont engagées et non pas au montant des sommes qui leur étaient réclamées au moment où elles ont été appelées ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'ancien article L. 343-4 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen

6. M. [C] et Mme [K] contestent la recevabilité du moyen. Ils soutiennent qu'il est contraire aux écritures d'appel de la banque.
7. Cependant, dans ses conclusions d'appel, la banque soutenait que M. [C] et Mme [K] pouvaient faire face, avec leur seul patrimoine, aux sommes restant dues et dont elle réclamait le paiement.
8. Le moyen est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu l'article L. 343-4 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, alors applicable ;
9. Aux termes de ce texte, un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
10. Pour apprécier si le patrimoine de la caution lui permet de faire face à son obligation au moment où elle est appelée, le juge doit se placer au jour où la caution est assignée.
11. Pour rejeter les demandes de la banque qui, invoquant la capacité des cautions à faire face à leurs obligations au moment où elles ont été appelées, faisait valoir que les sommes réclamées aux cautions s'élevaient à 91 186,06 euros et 11 153,16 euros, cependant qu'elles demeuraient propriétaires d'un immeuble d'habitation acquis au prix de 145 000 euros, l'arrêt se borne à constater que leurs avoirs n'avaient pas prospéré lors de l'appel de la caution.
12. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si, à la date où les cautions ont été appelées, leur patrimoine leur permettait de faire face aux sommes réclamées, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 23-22.062

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 372 FS-D
Pourvoi n° F 23-22.062






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 23-22.062 contre le jugement n° RG : 21/04887 rendu le 2 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 2 décembre 2022) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR), a vendu à M. et Mme [B] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 12 au 22 octobre 2020 (TMR2), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés, l'itinéraire de la croisière TMR2 a été modifié et celle-ci a finalement été interrompue, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 26 août 2021, M. et Mme [B] ont assigné la société TMR en remboursement d'une partie du prix de la croisière TMR2. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes de M. et Mme [B] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Il doit en aller de même si l'organisateur se trouve empêché de poursuivre l'exécution du contrat en raison de telles circonstances exceptionnelles et inévitables.
13. Ainsi, en cas d'inexécution partielle des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser au voyageur la somme correspondant aux prestations qui n'ont pas été exécutées.
14. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
15. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
16. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
17. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
18. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
19. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'interruption du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées.
20. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables qui justifiaient l'interruption de la croisière par la société Costa Crociere et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement partiel de M. et Mme [B] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
21. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 23-22.064

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 374 FS-D
Pourvoi n° G 23-22.064






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 23-22.064 contre le jugement n° RG : 22/00622 rendu le 2 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 2 décembre 2022) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à M. et Mme [U] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. A la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 24 février 2022, M. et Mme [U] ont demandé à la société TMR et, subsidiairement, à la société Costa Crociere, le remboursement du prix de la croisière et le paiement de dommages et intérêts. La société TMR a demandé à être garantie par la société Costa Crociere.
5. Les demandes de M. et Mme [U] à l'encontre de la société TMR ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de M. et Mme [U] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.627

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 386 FS-D
Pourvoi n° X 24-10.627






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° X 24-10.627 contre le jugement rendu le 24 août 2023 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 24 août 2023) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à M. [K] et à Mme [R] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 28 avril 2022, M. [K] et Mme [R] ont assigné la société TMR en remboursement du prix de la croisière et en paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes de M. [K] et Mme [R] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de M. [K] et Mme [R] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 23-22.059

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 369 FS-D
Pourvoi n° C 23-22.059






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° C 23-22.059 contre le jugement n° RG : 22/00750 rendu le 2 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 2 décembre 2022) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à Mme [F] et à Mme [V] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues, comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 21 juin 2022, Mme [F] et Mme [V] ont demandé le remboursement par la société TMR du prix de la croisière et le paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes de Mme [F] et Mme [V] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de Mme [F] et de Mme [V] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.





Civ.1 9 juillet 2025 n° 23-22.066

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 376 FS-D
Pourvoi n° K 23-22.066






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23-22.066 contre le jugement rendu le 4 septembre 2023 par le tribunal de proximité de Charenton-le-Pont, dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal de proximité de Charenton-le-Pont, 4 septembre 2023) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à M. [Z] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 12 au 22 octobre 2020 (TMR2), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés, l'itinéraire de la croisière TMR2 a été modifié et celle-ci a finalement été interrompue, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 7 octobre 2022, M. [Z] a demandé le remboursement par la société TMR d'une partie du prix de la croisière et le paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes de M. [Z] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa sixième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ que, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour la débouter de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal, après avoir estimé que "la société TMR International Consultant ne peut mettre en oeuvre la responsabilité de la société Costa Crociere SPA que si elle apporte la preuve de la faute commise par celui-ci" et retenu son "absence de faute", a énoncé que "la demande concernant de relever et garantie la société TMR International Consultant contre toute condamnation ne peut prospérer car aucun comportement fautif de la société Costa Crociere SPA n'a été démontré" ; qu'en statuant ainsi, quand la société Costa Crociere, tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client, devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée ;
2°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR International Consultant a fait valoir que la société Costa Crociere s'était "engagée à gérer le risque épidémique à bord du navire", dès lors que, "dès août 2020, soit quelques semaines avant le début des croisières TMR, Costa a abondamment communiqué sur les réseaux sur toutes les mesures de protection sanitaire qu'elle avait mises en place pour assurer la reprise des croisières en toute sérénité" et qu'elle mettait en avant "ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ayant été "la première compagnie de croisières à être titulaire de la certification Bio Safety Trust de Rina", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle indiquait notamment : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa", de sorte qu'elle avait "confirmé son aptitude à exécuter ses prestations en dépit de la crise sanitaire qui pouvait sévir de nouveau à tout moment, invitant ainsi TMR et tous les passagers concernés à lui faire confiance" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur ces éléments de nature à établir sa faute, prise de ce qu'elle avait "communiqué sur son aptitude à gérer le risque épidémique" et induit fautivement en erreur la société TMR, le juge de proximité a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR International Consultant a fait valoir que la société Costa Crociere avait interrompu sans raisons valables la croisière litigieuse, dès lors qu'"aucune mesure de prévention prise par les pouvoirs publics empêchait Costa de poursuivre la croisière TMR2 prévue jusqu'au 22 octobre 2020", qu'elle avait "offert des croisières à la vente à bord du "Costa Diadema" juste après avoir interrompu la croisière TMR2", qu'elle avait "continué d'effectuer des croisières après avoir interrompu la croisière TMR2" et, enfin, qu'elle "s'était engagée à gérer le risque épidémique à bord du navire" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere pour avoir interrompu la croisière sans raisons valables, le juge de proximité a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR International Consultant a exposé qu'elle avait "souvent interrogé Costa sur la nécessité de tout simplement annuler les croisières et que Costa ne voulait pas en entendre parler" et que, "si [elle] avait réellement voulu agir selon un principe de précaution, elle ne [l']aurait pas incitée, en dépit des interrogations de cette dernière sur la faisabilité du projet, à reporter l'exécution de la charte partie, initialement prévue en avril-mai 2020, à l'automne 2020", ce qui résultait d'un courrier du 6 mai 2020, dans lequel elle écrivait au dirigeant de la société TRM, que "la croisière dont le départ est prévu le 28 septembre est possible tout simplement parce qu'il n'y a pas de raisons défavorables de l'envisager autrement. [?] Donc, pour répondre à votre question très précise : oui, nous pensons qu'il est possible de mener notre opération à une date prévue." ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans se prononcer sur ces éléments établissant que la société Costa Crociere avait fautivement trompé la société TMR, le tribunal de proximité a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR a invoqué diverses décisions rendus les juridictions du fond, dont il résultait que le risque épidémique étant connue de la société Costa Crociere et prévisible à la date de la croisière, auquel elle avait décidé de faire face, en maintenant la croisière, elle ne pouvait se prévaloir du principe de précaution pour justifier de son interruption ; qu'en retenant cependant qu'il ne pouvait "être reproché à la société Costa Crociere SPA d'avoir annulée la croisière afin d'éviter la formation d'un "cluster" qui est la transmission rapide d'une épidémie dans un lieu fermé", et donc en permettant au croisiériste d'invoquer le principe de précaution, sans répondre à ces chefs de conclusions démontrant le contraire, le tribunal de proximité a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Il doit en aller de même si l'organisateur se trouve empêché de poursuivre l'exécution du contrat en raison de telles circonstances exceptionnelles et inévitables.
13. Ainsi, en cas d'inexécution partielle des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser au voyageur la somme correspondant aux prestations qui n'ont pas été exécutées .
14. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
15. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
16. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
17. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
18. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
19. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'interruption du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées.
20. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables qui justifiaient l'interruption de la croisière par la société Costa Crociere et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement partiel de M. [Z] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
21. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.622

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Cassation partielle sans renvoi

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 381 FS-D
Pourvoi n° S 24-10.622



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° S 24-10.622 contre le jugement rendu le 14 août 2023 par le tribunal de proximité de Puteaux, dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Costa Crociere SPA, dont le siège est [Adresse 4] (Italie), société de droit étranger, ayant un établissement en France, [Adresse 3],
2°/ à Mme [D] [N],
3°/ à M. [Z] [N],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.

La société Costa Crociere SPA a formé un pourvoi incident contre le même jugement.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA et de M. et Mme [N], et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal de proximité de Puteaux, 14 août 2023) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à M. et Mme [N] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre celles-ci et la croisière a été annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou l'annulation des croisières prévues, comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Les 19 octobre et 17 novembre 2022, M. et Mme [N] ont assigné la société TMR et la société Costa Crociere aux fins d'obtenir leur condamnation in solidum au remboursement du prix de la croisière et la condamnation de la société TMR en paiement de dommages et intérêts. La société TMR a demandé à être garantie par la société Costa Crociere.
5. La société TMR a admis devoir rembourser à M. et Mme [N] le prix de la croisière.
Recevabilité du pourvoi incident, en ce qu'il est dirigé contre M. et Mme [N], contestée par la défense
6. M. et Mme [N] contestent la recevabilité du pourvoi incident de la société Costa Crociere en qu'il les concerne au motif qu'ils ne sont pas cités dans la déclaration de pourvoi de la société TMR.
7. Mais, par application des articles 548 et 614 du code de procédure civile, le pourvoi incident peut être valablement formé contre toutes les parties à l'arrêt d'appel, même non appelées jusqu'alors devant la Cour de cassation.
8. Le pourvoi incident, en ce qu'il concerne M. et Mme [N], est donc recevable.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi principal et le second moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi incident
9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen du pourvoi incident
Enoncé du moyen
10. La société Costa Crociere fait grief au jugement de la condamner in solidum avec la société TMR à payer à M. et Mme [N] la somme de 3 005 euros en remboursement de la prestation inexécutée, outre des intérêts, alors « que chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ; qu'en outre, les services fournis au consommateur doivent présenter la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, à charge de prendre toute mesure utile pour que ces services ne portent pas atteinte à la santé des personnes qui y ont recours ; qu'en conséquence, ne peut être constitutif d'une faute le fait pour le propriétaire de navires de croisière de résilier un contrat d'affrètement d'un de ces navires, en raison d'un contexte sanitaire ne permettant pas de garantir la santé des passagers et la sécurité à laquelle ceux-ci peuvent légitimement s'attendre ; qu'en l'espèce, le tribunal a imputé à faute à la société Costa Crociere de ne pas avoir mis de navire à disposition pour l'organisation de la croisière prévue, en constatant néanmoins qu'il n'était « pas contestable que la crise sanitaire constitue un événement extérieur à la société et qu'elle échappe au contrôle de celle-ci », que lorsque la société Costa Crociere avait décidé de résilier le contrat d'affrètement, il existait « une pandémie d'une ampleur mondiale ayant conduit à une réduction drastique de la liberté de circulation et des échanges nationaux », qu'il « ressor[tait] effectivement des pièces que le 14 octobre 2020, soit deux jours avant la décision d'annulation de la croisière, le Président de la République française a annoncé la prise d'une série de mesures immédiates afin de limiter la propagation du virus, lesquelles se sont montrées insuffisantes, conduisant la France à ordonner un reconfinement le 29 octobre 2020 », et qu'il était « démontré que des cas de Covid [avaient] été déclarés lors de la croisière TMR2 » ; qu'en se prononçant comme il l'a fait, quand il résultait de ces constatations que la société Costa Crociere n'avait pu commettre de faute en ne mettant pas à disposition de navire pour la croisière prévue, puisqu'en cas contraire il aurait pu lui être reprochée de n'avoir pas pris les mesures utiles pour préserver la sécurité et la santé des personnes devant effectuer cette croisière, le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations ; qu'il a ainsi violé les articles 1240 et 1241 du code civil, ensemble l'article L. 421-3 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
11. Conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
12. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
13. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
14. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
15. Ainsi, en cas d'annulation des prestations, notamment en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
16. Le tribunal a constaté que la société Costa Crociere, qui avait organisé la croisière TMR3, l'avait annulée en raison de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19.
17. Il s'en déduit que la société Costa Crociere était tenue, in solidum avec la société TMR, de rembourser intégralement à M. et Mme [N] la somme versée en paiement de cette croisière.
18. Par ce motif de pur droit, substitué d'office à ceux critiqués par le moyen, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, la décision se trouve légalement justifiée.
Mais sur le moyen relevé d'office
19. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.
Vu les articles L. 211-14, III, 2°, R. 211-10 et L. 211-16, I, alinéa 1er, du code du tourisme :
20. En premier lieu, comme il a été dit aux § 11 et 15 , en application des deux premiers de ces textes, en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et doit alors rembourser intégralement le voyageur.
21. En second lieu, aux termes du troisième de ces textes, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
22. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyages, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
23. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit, en principe, entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
24. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
25. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
26. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation ou de l'interruption par l'organisateur.
27. Pour condamner la société Costa Crociere à garantir l'agence de voyage, après avoir constaté que la crise sanitaire provoquée par la Covid-19 constituait un événement extérieur, échappant à son contrôle, que l'existence d'une pandémie d'ampleur mondiale avait conduit à une réduction drastique de la liberté de circulation, imprévisible pour les parties, que le 14 octobre 2020, soit deux jours avant la décision d'annulation de la croisière TMR3, le Président de la République française avait annoncé la prise de mesures immédiates afin de limiter la propagation du virus, qu'un nouveau confinement avait ensuite été ordonné le 29 octobre 2020 et que des cas de Covid avaient été déclarés lors d'une autre croisière de la société Costa Crociere, alors en cours, le jugement retient que celle-ci a manqué à son obligation contractuelle de mise à disposition d'un navire pour l'organisation de la croisière, ce qui était constitutif d'une faute.
28. En statuant ainsi, alors, d'une part, qu'il résultait de ces constatations que l'annulation de la croisière était justifiée par des circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, du code du tourisme, d'autre part, qu'un accord avait été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, le tribunal a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
29. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
30. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
31. Dès lors, d'une part, que l'annulation de la croisière était justifiée par des circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, du code du tourisme, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, la demande en paiement de la société TMR contre cette dernière doit être rejetée, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.624

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 383 FS-D
Pourvoi n° U 24-10.624






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 24-10.624 contre le jugement n° RG : 22/00737 rendu le 11 avril 2023 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 11 avril 2023) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR), a vendu à Mme [P] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 12 au 22 octobre 2020 (TMR2), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés, l'itinéraire de la croisière TMR2 a été modifié et celle-ci a finalement été interrompue, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 25 mars 2022, Mme [P] a saisi le tribunal d'une demande à l'encontre de la société TMR en remboursement d'une partie du prix de la croisière et en paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes de Mme [P] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empê
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Il doit en aller de même si l'organisateur se trouve empêché de poursuivre l'exécution du contrat en raison de telles circonstances exceptionnelles et inévitables.
13. Ainsi, en cas d'inexécution partielle des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser au voyageur la somme correspondant aux prestations qui n'ont pas été exécutées .
14. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
15. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
16. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
17. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
18. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
19. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'interruption du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées.

20. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables qui justifiaient l'interruption de la croisière par la société Costa Crociere et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement partiel de Mme [P] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
21. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.629

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 388 FS-D
Pourvoi n° Z 24-10.629






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 24-10.629 contre le jugement rendu le 8 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal de commerce de Marseille, 8 juin 2023) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à M. [O] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 26 septembre 2022, M. [O] a assigné la société TMR en remboursement du prix de la croisière. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. La demande de M. [O] a été accueillie.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de M. [O] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 23-22.060

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 370 FS-D
Pourvoi n° D 23-22.060






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 23-22.060 contre le jugement n° RG : 22/02223 rendu le 2 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, conseillers, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillères, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 2 décembre 2022) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à Mme [L] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord a été conclu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 10 juin 2022, Mme [L] a demandé le remboursement par la société TMR et, subsidiairement, par la société Costa Crociere, du prix de la croisière TMR3 et le paiement de dommages et intérêts. La société TMR a demandé à être garantie par la société Costa Crociere.
5. Les demandes de Mme [L] à l'encontre de la société TMR ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.

19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de Mme [L] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.076

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 377 FS-D
Pourvoi n° Y 24-10.076






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 24-10.076 contre le jugement rendu le 7 novembre 2023 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 7 novembre 2023) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à Mme [B] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 13 septembre 2022, Mme [B] a assigné la société TMR en remboursement du prix de la croisière et en paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes de Mme [B] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de Mme [B] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.625

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 384 FS-D
Pourvoi n° V 24-10.625






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° V 24-10.625 contre le jugement n° RG : 22/04021 rendu le 11 avril 2023 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 11 avril 2023) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR), a vendu à M. [M] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 12 au 22 octobre 2020 (TMR2), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés, l'itinéraire de la croisière TMR2 a été modifié et celle-ci a finalement été interrompue, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 13 septembre 2022, M. [M] a demandé le remboursement par la société TMR d'une partie du prix de la croisière et en paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes de M. [M] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.

12. Il doit en aller de même si l'organisateur se trouve empêché de poursuivre l'exécution du contrat en raison de telles circonstances exceptionnelles et inévitables.
13. Ainsi, en cas d'inexécution partielle des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser au voyageur la somme correspondant aux prestations qui n'ont pas été exécutées .
14. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
15. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
16. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
17. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
18. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
19. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'interruption du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées.
20. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables qui justifiaient l'interruption de la croisière par la société Costa Crociere et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement partiel de M. [M] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
21. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-14.352

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, présidente


Arrêt n° 499 FS-D
Pourvoi n° W 24-14.352



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
M. [U] [H], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 24-14.352 contre l'arrêt rendu le 22 février 2024 par la cour d'appel de Chambéry (2e chambre), dans le litige l'opposant à la caisse de Crédit mutuel du Genevois, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Tréard, conseillère, les observations écrites et orales de Me Laurent Goldman, avocat de M. [H], les observations écrites et orales de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la caisse de Crédit mutuel du Genevois, et l'avis de Mme Cazaux-Charles, avocate générale, après débats en l'audience publique du 27 mai 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, Mme Tréard, conseillère rapporteure, Mme Guihal, conseillère doyenne, MM. Bruyère, Ancel, Mmes Peyregne-Wable, Corneloup, conseillers, Mme Robin-Raschel, conseillère référendaire, Mme Cazaux-Charles, avocate générale, et Mme Vignes, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, de la présidente et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 22 février 2024), le 1er avril 2011, la caisse de Crédit mutuel du Genevois (la banque) a consenti à M. [H] (l'emprunteur), lequel travaillait alors en Suisse, un prêt immobilier libellé en francs suisses, remboursable dans la même devise, destiné à l'acquisition d'un bien immobilier situé en France. Les parents de l'emprunteur se sont portés cautions du remboursement à hauteur d'un certain montant.
2. À la suite de la perte de son emploi en Suisse le 31 décembre 2012 et de difficultés pour faire face au remboursement de son prêt, et après refus de la banque au cours de l'année 2015 de lui consentir amiablement une suspension de ses mensualités, l'emprunteur a obtenu cette suspension, pour une durée de 24 mois, par une ordonnance de référé du 21 juillet 2016.
3. Estimant que la banque lui avait fait souscrire un prêt inadapté et préjudiciable compte tenu de la variation importante du taux de change entre le franc suisse et l'euro depuis sa souscription, et arguant du caractère abusif de certaines clauses du contrat, l'emprunteur a assigné la banque en annulation du prêt le 28 décembre 2017.
4. La banque a opposé à l'emprunteur la prescription de ses demandes.
5. Parallèlement, un plan conventionnel de redressement a été établi par une commission de surendettement au bénéfice de l'emprunteur. La vente du bien immobilier ordonnée dans ce cadre n'ayant pas permis de régler l'intégralité de ses dettes, une seconde commission de surendettement a adopté une mesure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, entraînant l'effacement total de ces dernières le 4 mai 2021.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
7. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de dire que ses demandes formées au titre des clauses abusives et de la nullité du contrat de prêt sont devenues sans objet en suite de l'effacement total de ses dettes résultant du rétablissement personnel sans liquidation judiciaire prononcé le 4 mai 2021 et de dire n'y avoir lieu à statuer de ces chefs, alors « que, en tout état de cause, l'action de l'emprunteur tendant à voir déclarer abusives certaines clauses du contrat de prêt et annuler en conséquence ledit contrat, conserve son objet y compris après que le solde de sa dette a été effacé par une décision de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, et même s'il ne forme, dans l'instance, aucune demande pécuniaire à l'encontre de la banque en rapport avec ces prétentions ; qu'en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, que l'action de l'emprunteur avait perdu son objet compte tenu, d'une part, de l'effacement du solde de sa dette par l'effet d'une décision de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire et, d'autre part, de la circonstance qu'il ne formait dans l'instance aucune demande de restitution ou de dommages et intérêts à l'encontre de la banque, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 et L. 241-1, du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :
8. En application de ces dispositions, d'ordre public, les clauses abusives sont réputées non écrites et le contrat qui les contient reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans lesdites clauses.
9. Pour dire que les demandes formées au titre des clauses abusives et de la nullité du contrat de prêt sont devenues sans objet et dire n'y avoir lieu à statuer de ces chefs, l'arrêt retient qu'en suite de l'effacement total des dettes de l'emprunteur résultant du rétablissement personnel sans liquidation judiciaire prononcé le 4 mai 2021 et au regard de l'absence de demande dirigée contre la banque, l'objet même du litige portant sur le caractère abusif des clauses du contrat et son éventuelle nullité a disparu, l'action éventuelle de la banque contre les cautions, tiers à l'instance, n'ayant aucune incidence sur la perte d'objet des demandes de l'emprunteur.
10. En statuant ainsi, alors que l'emprunteur invoquait le caractère abusif des clauses du contrat de prêt au soutien d'une demande tendant à l'anéantissement rétroactif de ce contrat, lequel emportait des restitutions de plein droit entre les parties et la résolution des cautionnements qui en étaient l'accessoire, de sorte que sa demande continuait à avoir un objet consistant à déterminer si la validité du contrat de prêt était affectée, tant dans ses rapports avec la banque qu'au regard du recours personnel des cautions auquel l'exposait l'action de la banque à leur encontre, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé.
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
11. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable comme prescrite son action en responsabilité au titre du dol et de l'ensemble des demandes subséquentes, alors « que la charge de la preuve du point de départ d'un délai de prescription incombe à celui qui invoque cette fin de non-recevoir ; qu'en retenant néanmoins, pour déclarer prescrite l'action indemnitaire de l'emprunteur fondée sur le dol, qu'il appartenait à celui auquel on oppose la prescription de l'action de prouver la date à laquelle il avait découvert les manoeuvres dont il se prévaut et que, en l'occurrence, l'emprunteur échouait à rapporter la preuve de ce que le point de départ de la prescription de l'action fondée sur le dol devait être retardée à une date postérieure à celle de la signature du contrat, la cour d'appel, qui a ainsi inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
12. La banque conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est contraire aux écritures d'appel dans la mesure où l'emprunteur ayant lui même indiqué la date à laquelle il a eu révélation des faits lui permettant d'exercer son action fondée sur le dol, il n'est pas recevable à soutenir que la cour d'appel a inversé la charge de la preuve en statuant comme elle a fait.
13. Cependant le moyen est né de la décision attaquée. Il est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 1315, alinéa 2, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 2224 du code civil :
14. Selon le premier de ces textes, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
15. Aux termes du second, les actions personnelles se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
16. Pour déclarer prescrite l'action en responsabilité engagée par l'emprunteur contre la banque fondée sur le dol, l'arrêt relève, d'abord, que celui-ci prétend que la révélation des faits n'a pu exister qu'à partir du moment où il n'a plus été en mesure de faire face à la charge du remboursement du crédit, avançant un début de prescription en mars 2015. Il retient, ensuite, que l'intervention de la Banque nationale suisse invoquée par l'emprunteur comme lui ayant été dissimulée et constituant les manoeuvres dolosives reprochées à la banque était inexistante au jour de la conclusion du contrat, puisque n'ayant été effective qu'en 2015, soit plus de quatre ans après la souscription du contrat, de sorte qu'il échoue à rapporter la preuve de ce que le point de départ de la prescription de l'action fondée sur le dol devrait être retardée à une date postérieure à celle de la signature du contrat.
17. En statuant ainsi, alors que la charge de la preuve du point de départ d'un délai de prescription incombe à celui qui invoque cette fin de non-recevoir, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
18. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de condamner la banque à l'indemniser sur le seul fondement d'un manquement à son devoir de mise en garde, alors « que lorsqu'elle consent un prêt libellé et remboursable en devises à un résident français qui destine les fonds au financement d'une acquisition en euros, et ayant pour effet de faire peser le risque de change sur l'emprunteur, la banque est tenue de fournir à celui-ci des informations suffisantes et exactes lui permettant de comprendre le fonctionnement concret du mécanisme financier en cause et d'évaluer ainsi le risque des conséquences économiques négatives, potentiellement significatives, de telles clauses sur ses obligations financières pendant toute la durée de ce même contrat, notamment en cas de dépréciation importante de l'euro ; que la cour d'appel qui, bien qu'elle ait constaté, d'une part, que le prêt litigieux, libellé et remboursable en francs suisses, avait été consenti à l'emprunteur, travailleur frontalier, en vue de l'acquisition d'un bien immobilier en France et, d'autre part, qu'il n'avait été fourni à l'emprunteur aucun document expliquant précisément les conséquences éventuelles du risque de change, particulièrement en cas de perte des revenus en francs suisses, a néanmoins retenu, pour écarter le manquement de la banque à son obligation d'information, que le contrat, qui ne présenterait pas de risque inhabituel à la date de souscription, n'appelait pas de la part de la banque des informations complémentaires qui ne figureraient pas dans le contrat lui-même, rédigé en termes clairs et intelligibles, a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
19. En application de ce texte, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts à raison de l'inexécution de son obligation.
20. L'établissement financier qui propose un prêt libellé en devises étrangères, doit fournir à l'emprunteur des informations claires et compréhensibles pour lui permettre de prendre sa décision avec prudence et en toute connaissance de cause des risques inhérents à la souscription d'un tel prêt. Il lui incombe à ce titre d'exposer de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme contractuel proposé, sur toute sa durée, afin de permettre à l'emprunteur de mesurer, notamment, l'incidence sur les remboursements d'une dépréciation importante de la monnaie ayant cours légal dans l'État où le bien financé est situé et/ou dans lequel l'emprunteur est domicilié et viendrait à percevoir ses revenus au cours du contrat.
21. Pour écarter tout manquement de la banque à son obligation d'information et rejeter les demandes indemnitaires présentées à ce titre, l'arrêt retient que le contrat de prêt en devises, remboursable en devises, pour un travailleur frontalier percevant alors l'ensemble de ses revenus en devises, n'appelait pas de la part de la banque des informations complémentaires qui ne figureraient pas dans le contrat lui-même, rédigé en termes clairs et intelligibles. Il rappelle le libellé du point 7.2 "dispositions propres aux crédits en devises" qui précise que les remboursements auront lieu dans la devise empruntée, les échéances étant débitées sur un compte en devises et stipule que "l'emprunteur assume les conséquences du changement de parité entre la devise empruntée et l'euro, qui pourrait intervenir jusqu'au complet remboursement du prêt", ainsi que les points 8.1 et 8.2 qui contiennent une clause de réévaluation des garanties en fonction des variations des cours du change. Il ajoute, que les caractéristiques du prêt souscrit étaient parfaitement intelligibles et ne présentaient pas, à la date de la souscription, de risque inhabituel, dès lors que la variation du taux de change n'avait pas d'incidence sur la vie du contrat remboursable en devises par un emprunteur percevant ses revenus en devises.
22. En statuant ainsi, après avoir constaté qu'en dépit des termes clairs du contrat, il n'avait été fourni à l'emprunteur aucun document expliquant précisément les conséquences éventuelles du risque de change, de sorte que la banque n'avait pas fourni à l'emprunteur d'informations suffisantes lui permettant de comprendre le fonctionnement concret du mécanisme financier en cause et d'évaluer ainsi le risque des conséquences économiques négatives, potentiellement significatives, des clauses contractuelles sur ses obligations financières pendant toute la durée du contrat, dans l'hypothèse d'une dépréciation importante de la monnaie dans laquelle il pouvait être amené à percevoir ses revenus par rapport à la monnaie de compte, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 23-22.065

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 375 FS-D
Pourvoi n° J 23-22.065






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 23-22.065 contre le jugement rendu le 24 août 2023 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 24 août 2023) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à M. et Mme [I] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Les 29 avril et 4 mai 2022, M. et Mme [I] ont assigné la société TMR et, à titre subsidiaire, la société Costa Crociere, en remboursement du prix de la croisière et en paiement de dommages et intérêts. La société TMR a demandé à être garantie par la société Costa Crociere.
5. Les demandes de M. et Mme [I] à l'encontre de la société TMR ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaires s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de M. et Mme [I] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.621

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 380 FS-D
Pourvoi n° R 24-10.621






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 24-10.621 contre le jugement rendu le 1er juillet 2022 par le tribunal de proximité de Trévoux, dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal de proximité de Trévoux, 1er juillet 2022) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à M. [W] et à Mme [H] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 17 novembre 2021, M. [W] et Mme [H] ont assigné la société TMR en remboursement du prix de la croisière et en paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes de M. [W] et Mme [H] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa cinquième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ que, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour rejeter l'appel en garantie formé par la société TMR contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'il n'était "pas possible de faire fi [du] contexte sanitaire lorsque la société Costa Crociere SPA a pris la décision d'annuler la croisière", dès lors que, "en octobre 2020, la situation sanitaire était fortement dégradée" et que "les décisions gouvernementales nationales et internationales étaient particulièrement incertaines et évolutives", ce dont il a déduit que le croisiériste avait "pris une décision prudente justifiée par le contexte sanitaire exceptionnel de l'époque", pour en conclure que "cette décision n'est pas constitutive d'une faute permettant d'engager sa responsabilité" ; qu'en statuant ainsi, quand la société Costa Crociere, tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client, devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, et non pas de sa faute, le tribunal de proximité a violé la disposition susvisée ;
2°/ que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que la société Costa Crociere avait interrompu sans raisons valables la croisière litigieuse, dès lors qu'"à la date du 15 octobre, la situation sanitaire en France n'empêchait nullement l'embarquement des passagers à bord du "Costa Diadema" le 22 octobre 2020 : les déplacements entre départements n'étaient ni interdits ni limités", d'autant que "la croisière TMR3 devait être réalisée en Italie, pays qui, le 15 octobre 2020, ne limitait pas l'activité des navires de croisière battant pavillon italien" ("1re raison"), qu'elle avait "offert des croisières à la vente à bord du "Costa Diadema" juste après avoir interrompu la croisière TMR3" ("2e raison"), qu'elle avait "continué d'effectuer des croisières après avoir interrompu la croisière TMR3" ("3e raison") ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere pour avoir annulé la croisière sans raisons valables, le juge de proximité a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a exposé qu'elle avait "souvent interrogé Costa sur la nécessité de tout simplement annuler les croisières et que Costa ne voulait pas en entendre parler" et que, "si [elle] avait réellement voulu agir selon un principe de précaution, elle ne [l']aurait pas incitée, en dépit des interrogations de cette dernière sur la faisabilité du projet, à reporter l'exécution de la charte partie, initialement prévue en avril-mai 2020, à l'automne 2020", ce qui résultait d'un courrier du 6 mai 2020 (pièce n° 14), dans lequel la société Costa Crociere écrivait au dirigeant de la société TRM (M. [U]), que "la croisière dont le départ est prévu le 28 septembre est possible tout simplement parce qu'il n'y a pas de raisons défavorables de l'envisager autrement. [?] Donc, pour répondre à votre question très précise : oui, nous pensons qu'il est possible de mener notre opération à une date prévue." ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans se prononcer sur ces éléments établissant que la société Costa Crociere avait fautivement trompé la société TMR, le tribunal de proximité a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR a fait état de huit décisions rendus les juridictions du fond, ayant "retenu la responsabilité de Costa au motif qu'elle ne démontrait pas avoir eu d'autre choix que d'annuler le voyage", décisions dont elle citait divers extraits ; qu'en estimant cependant que la société Costa Crociere avait "pris une décision prudente justifiée par le contexte sanitaire exceptionnel de l'époque", sans se prononcer sur ces décisions démontrant le contraire, le tribunal de proximité a derechef méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de M. [W] et Mme [H] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.628

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 387 FS-D
Pourvoi n° Y 24-10.628




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 24-10.628 contre le jugement rendu le 2 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 2 décembre 2022) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à MM. [X], [B] et [O] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 1er avril 2022, MM. [X], [B] et [O] ont demandé le remboursement du prix de la croisière par la société TMR et subsidiairement par la société Costa Crociere et le paiement de dommages et intérêts. La société TMR a demandé à être garantie par la société Costa Crociere.
5. Les demandes de MM. [X], [B] et [O] à l'encontre de la société TMR ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les é
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de MM. [X], [B] et [O] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 24-10.630

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 389 FS-D
Pourvoi n° A 24-10.630






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 24-10.630 contre le jugement rendu le 28 novembre 2022 par le tribunal judiciaire de Rennes, dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Rennes, 28 novembre 2022) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à M. [R] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer Méditerranée du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord est intervenu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 24 janvier 2022, M. [R] a demandé le remboursement par la société TMR du prix de la croisière et le paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5.Les demandes de M. [R] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses quatrième à sixième branches
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses trois premières branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ que, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a estimé que, compte tenu de la crise sanitaire, l'annulation de la croisière "peut être analysée comme la mesure la plus prudente" et qu'ainsi cette dernière "n'a commis aucune faute" ; qu'en conditionnant ainsi le succès du recours en garantie de l'agent de voyage contre le voyagiste à la démonstration de la faute de ce dernier, quand la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée ;
2°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage ''rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de M. [R] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




Civ.1 9 juillet 2025 n° 23-22.061

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 9 juillet 2025



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 371 FS-D
Pourvoi n° E 23-22.061






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 JUILLET 2025
La société TMR International Consultant, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 23-22.061 contre le jugement n° RG : 21/04766 rendu le 2 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Marseille (pôle de proximité), dans le litige l'opposant à la société Costa Crociere SPA, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 3] (Italie), ayant un établissement en France, [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société TMR International Consultant, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Costa Crociere SPA, et l'avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents Mme Champalaune, présidente, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseillère doyenne, MM. Jessel, Mornet, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Dumas, Kass-Danno, conseillères référendaires, M. Aparisi, avocat général référendaire, et Mme Tifratine, greffière de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort (tribunal judiciaire de Marseille, 2 décembre 2022) et les productions, la société TMR International Consultant (la société TMR) a vendu à M. et Mme [I] un voyage à forfait consistant en une croisière en mer du 22 au 28 octobre 2020 (TMR3), sur un bateau de la société de droit italien Costa Crociere, loué à la société Tartacover appartenant au même groupe que la société TMR.
2. À la suite de la survenue de la crise sanitaire liée à l'épidémie de Covid-19, un avenant au contrat existant entre les sociétés TMR, Costa Crociere et Tartacover relatif à l'organisation des croisières a été conclu, le 3 septembre 2020, entre ces sociétés et la croisière TMR3 a été finalement annulée, le 16 octobre 2020, par la société Costa Crociere.
3. Le 2 avril 2021, un accord a été conclu entre les mêmes sociétés consécutivement à l'interruption ou à l'annulation des croisières prévues comportant la restitution par la société Costa Crociere d'une somme de 4 294 680 euros à la société Tartacover.
4. Le 25 août 2021, M. et Mme [I] ont assigné la société TMR en remboursement du prix de la croisière TMR3 et en paiement de dommages et intérêts. La société TMR a assigné la société Costa Crociere en garantie.
5. Les demandes de M. et Mme [I] ont été accueillies.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa quatrième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen
7. La société TMR fait grief au jugement de rejeter sa demande de garantie, alors :
« 1°/ qu'aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 4, du code du tourisme, lorsqu'un organisateur ou un détaillant verse des dommages et intérêts, accorde une réduction de prix ou s'acquitte des autres obligations qui lui incombent, il peut demander réparation à tout tiers ayant contribué au fait à l'origine de l'indemnisation, de la réduction de prix ou d'autres obligations ; que, pour débouter la société TMR de son appel en garantie contre la société Costa Crociere, le tribunal a énoncé qu'en sa qualité de "prestataire de services", la disposition précitée ne lui était pas applicable et qu'elle ne répondait que de sa faute, sur le terrain de sa responsabilité délictuelle ; qu'en refusant ainsi d'admettre que la société Costa Crociere était un tiers à la relation contractuelle entre l'agence de voyage et son client et devait répondre de son fait à l'origine de l'indemnisation du voyageur, le tribunal judiciaire a violé la disposition susvisée par fausse interprétation ;
2°/ que, en toute hypothèse, le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a fait valoir que, lors de la signature de l'avenant du 3 septembre 2021 ayant pour objet l'organisation des croisières litigieuses, la société Costa Crociere "avait pris en considération le risque épidémique puisqu'elle faisait valoir ses compétences particulières en termes de prévention et de traitement des conséquences de la crise sanitaire", ce qui était établi par un communiqué de presse du 25 août 2020, dans lequel elle "faisait part de la certification RINA BIO SAFETY TRUST dont elle était la première à être titulaire", et indiquait : "Afin d'obtenir la certification du RINA, des modules de formation spécifiques pour les équipages ont été créés dans le strict respect des nouveaux protocoles sanitaires et du système de gestion de bord mis en place par Costa. Ces programmes de formation renforcent les procédures strictes déjà en place à bord des navires, dans les terminaux d'embarquement et lors des excursions à terre, introduites avec le protocole de sécurité Costa. Ce nouveau protocole sanitaire a été développé par Costa, avec le soutien scientifique d'experts indépendants, en réponse à la crise du Covid-19", de sorte que la publication de ces informations "incitait ses cocontractants et les voyageurs à placer en elle sa confiance quant à sa capacité de gestion du risque épidémique à bord" ; qu'en statuant comme il l'a fait, pour exonérer la société Costa Crociere de sa responsabilité, sans se prononcer sur les éléments invoqués par l'agent de voyage, de nature à établir sa faute, le tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ en toute hypothèse, que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société TMR international consultant a souligné que la société Costa Crociere "s'était présentée comme la première ? et la seule ? à être en mesure de gérer le risque épidémique à bord, en isolant puis en débarquant les personnes testées positives au cours de la croisière" ; qu'elle a invoqué les termes d'une "foire aux questions" établie par le voyagiste, suivant lesquels : "Si un client présente des symptômes de Covid-19, que se passe-t-il ? Si un client présente des symptômes similaires à ceux du Covid-19, il ou elle sera immédiatement transféré(e) à la salle d'isolement dédiée au sein du centre médical à bord du navire ; il/elle pourra ensuite être placé(e) en isolement dans des cabines spécifiques avec balcons, déjà identifiées à cet effet sur chacun de nos navires. Même ceux/celles qui ont été en contact étroit et direct avec des personnes symptomatiques seront traité(e)s au centre médical et, si nécessaire, transféré(e)s en isolement dans des cabines réservées à cet effet. Si un client est testé positif au test de dépistage "rapide'' par prélèvement, que se passe-t-il ? Si un client est testé positif à partir d'un prélèvement il sera immédiatement isolé et débarqué au premier port disponible en coordination avec les autorités sanitaires à terre, en suivant toutes les procédures appropriées avec un transfert protégé et un rapport à l'ASL afin que la quarantaine puisse être réalisée à domicile ou dans un établissement hospitalier à terre. Par mesure de précaution, la même procédure sera également adoptée pour les compagnons de voyage figurant sur la même réservation. Le navire suivra alors le protocole d'urgence qui a déjà été prédéfini selon les protocoles convenus avec les autorités.", ce dont elle a déduit que "la présence à bord de deux personnes prétendument testées positives au Covid-19 n'était en aucun cas une cause légitime et proportionnée d'interruption et d'annulation des croisières TMR2 et TMR3", dès lors que "leur isolement puis leur débarquement au prochain port, était la solution idoine aux termes mêmes du protocole sanitaire de Costa" ; qu'en laissant sans réponse ces chefs de conclusions de nature à établir la faute commise par la société Costa Crociere, le tribunal judiciaire a encore méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. En premier lieu, conformément au 2° du III de l'article L. 211-14 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant peut résoudre le contrat et rembourser intégralement le voyageur des paiements effectués, mais il n'est pas tenu à une indemnisation supplémentaire s'il est empêché d'exécuter le contrat en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables et notifie la résolution du contrat au voyageur dans les meilleurs délais avant le début du voyage ou du séjour.
9. Cette disposition transpose l'article 12, § 3, b), de la directive (UE) 2015/2302 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, modifiant le règlement (CE) n° 2006/2004 et la directive 2011/83/UE du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 90/314/CEE du Conseil.
10. La pandémie de Covid-19 peut, en tant que telle, être considérée comme susceptible de relever de la notion de « circonstances exceptionnelles et inévitables », au sens de l'article 12 de la directive 2015/2302 (CJUE, 8 juin 2023, UFC - Que Choisir et CLCV, C 407/21, point 45). Eu égard au risque grave qu'elle représente pour la santé humaine, elle peut constituer un événement en raison duquel l'organisateur est « empêché d'exécuter le contrat », au sens de l'article 12, paragraphe 3, sous b), de cette directive, indépendamment du fait qu'elle ne soit pas nécessairement de nature à rendre cette exécution objectivement impossible (CJUE, 4 octobre 2024, GF C-546/22, point 50).
11. Selon l'article R. 211-10 du code du tourisme, l'organisateur ou le détaillant procède aux remboursements requis en vertu du 2° du III de l'article L. 211-14 du même code.
12. Ainsi, en cas d'annulation des prestations en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, tant l'agence de voyage que l'organisateur du voyage sont tenus de rembourser la somme versée par le voyageur.
13. En second lieu, aux termes de l'article L. 211-16, I, alinéa 1er, de ce code, le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l'article L. 211-1 est responsable de plein droit de l'exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d'autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci.
14. Ce texte, ayant admis un droit au recours de l'agence de voyage, n'a prévu ni en son alinéa 1 ni en son alinéa 4 les conditions de ce recours. La Cour de cassation a jugé que l'agence de voyage, qui avait indemnisé une passagère victime d'un accident de la circulation lors d'un voyage à forfait, pouvait agir en garantie contre l'organisateur de ce voyage à charge pour elle d'apporter la preuve de la faute commise par cet organisateur (1re Civ., 15 mars 2005, pourvoi n° 02-15.940, Bull. 2005, I, n° 138).
15. Or, en droit commun, la contribution à la dette de personnes responsables sans faute d'un même dommage se répartit en principe entre elles à parts égales (1re Civ., 26 novembre 2014, pourvoi n° 13-18.819, Bull. 2014, I, n° 198 ; 1re Civ., 10 avril 2013, pourvoi n° 12-14.219, Bull. 2013, I, n° 78).
16. De plus, dès lors que l'agence de voyage et l'organisateur du voyage sont tenus à l'égard du voyageur de la même responsabilité de plein droit, il n'y a pas lieu de faire dépendre le régime du recours entre eux du choix du voyageur d'assigner l'une ou l'autre.
17. Il y a donc lieu de juger désormais que ce recours n'est pas soumis à l'exigence d'une faute.
18. Il se déduit de ce qui précède que, en cas d'annulation du voyage en raison de circonstances exceptionnelles et inévitables, l'agence de voyage ayant désintéressé le voyageur peut obtenir de l'organisateur de voyage le remboursement :
- des sommes que l'organisateur a reçues au titre de prestations qu'il devait assurer et qui n'ont pas été exécutées ;
- le cas échéant, des sommes dues au voyageur à titre de dommages et intérêts en cas de notification tardive de l'annulation par l'organisateur.
19. Dès lors, d'une part, que le tribunal a fait ressortir l'existence de circonstances exceptionnelles et inévitables au sens de l'article L. 211-14, III, 2, du code du tourisme qui justifiaient la résolution par la société Costa Crociere du contrat et sa notification le 16 octobre 2020 et ouvraient droit, en conséquence, à un remboursement de M. et Mme [I] sans indemnisation supplémentaire, d'autre part, qu'un accord a été conclu par les parties à propos du remboursement des sommes perçues par la société Costa Crociere pour l'exécution des prestations annulées ou interrompues, il en résulte que la demande en paiement contre cette société ne pouvait qu'être rejetée.
20. Par ces motifs de pur droit, substitués à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, le jugement se trouve légalement justifié, sans qu'il y ait lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de questions préjudicielles.




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