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Crim. 3 juin 2025 n° 24-86.793

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° M 24-86.793 F-D
N° 00736

ODVS 3 JUIN 2025

REOUVERTURE DES DÉBATS

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


Mme [G] [F] a formé un pourvoi contre l'arrêt n° 6 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 8e section, en date du 2 octobre 2024, qui, dans l'information suivie contre elle du chef d'omission de porter secours, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.
Par ordonnance du 4 février 2025, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de M. Hill, conseiller, les observations de la SARL Gury & Maitre, avocat de Mme [G] [F], les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat des défendeurs, et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Hill, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Cent treize parties civiles ont déposé des demandes d'aide juridictionnelle le 6 mai 2025, date de l'audience, l'affaire ayant été mise en délibéré au 3 juin suivant.
2. En conséquence, il y a lieu d'ordonner la réouverture des débats afin que le bureau d'aide juridictionnelle de la Cour de cassation puisse examiner ces demandes.




Crim. 3 juin 2025 n° 23-81.916

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 23-81.916 F-D
N° 00742

ODVS 3 JUIN 2025

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


Mme [B] [W] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Orléans, chambre correctionnelle, en date du 7 mars 2023, qui, pour violation de domicile et outrage, l'a condamnée à une interdiction de pénétrer dans les lieux pendant une durée de trois ans et a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de Mme Merloz, conseiller référendaire, les observations de Me Bardoul, avocat de Mme [B] [W], les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [S] [T], et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Merloz, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,


la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 15 juin 2014, le tribunal de grande instance a adjugé un immeuble ayant appartenu à Mme [B] [W] au profit de Mme [I] [C], épouse [T].
3. Mme [W] refusant de quitter le logement, une procédure d'expulsion a été initiée.
4. Le 1er août 2018, après qu'un huissier de justice a procédé à la clôture des lieux en exécution de la mesure d'expulsion, Mme [W] s'est introduite, par effraction, dans le logement litigieux.
5. Le 5 novembre 2018, Mme [T] a finalement obtenu les clés de la propriété.
6. Le 27 décembre 2018, Mme [W] s'est de nouveau introduite dans l'habitation en ayant recours à un serrurier pour forcer les verrous et la chaîne fermant l'entrée.
7. Convoquée devant le tribunal correctionnel notamment du chef de violation de domicile, Mme [W] a été déclarée coupable et condamnée à une interdiction de pénétrer dans les lieux pendant une durée de trois ans.
8. La prévenue, le ministère public et une partie civile ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur premier moyen
9. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.






Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré Mme [W] irrecevable en son exception de faux, l'a déclarée coupable des faits qui lui étaient reprochés et l'a, en conséquence, condamnée à une peine d'interdiction de pénétrer les lieux sis [Adresse 1] à [Localité 2] pour une durée de trois ans et à indemniser MM. [H] et [T] sur le plan civil, alors :
« 1°/ que l'article 226-4 du code pénal, dans sa rédaction issue de la loi du 24 juin 2015, dispose que l'introduction dans le domicile d'autrui à l'aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 euros d'amende ; que l'article susvisé, qui réprime le fait de s'introduire ou de se maintenir au domicile d'autrui, n'a pas pour objet de garantir d'une manière générale les propriétés immobilières contre une usurpation ; qu'en déclarant coupable Mme [W] de violation de domicile pour s'être introduite et maintenue les 1er août 2018 et 27 décembre 2018 dans les biens sis [Adresse 1] à [Localité 2] dont la société [3] avait été expulsée par suite de la vente par adjudication dudit bien quand la cour constatait que l'adjudicataire n'avait obtenu les clefs du bien en cause que le 5 novembre 2018 et sans établir en quoi l'adjudicataire avait pris possession des biens en cause et y avait établi un domicile à la date des faits litigieux par suite de l'expulsion, la cour d'appel a violé les articles 226-4 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 226-4 du code pénal, dans sa version en vigueur à la date des faits :
11. Seul constitue un domicile, au sens de ce texte, le lieu où une personne, qu'elle y habite ou non, a le droit de se dire chez elle, quels que soient le titre juridique de son occupation et l'affectation donnée aux locaux, ledit texte n'ayant pas pour objet de garantir d'une manière générale les propriétés immobilières contre une usurpation.
12. Pour déclarer la prévenue coupable de violation de domicile, l'arrêt attaqué retient que, expulsée du logement litigieux qui a fait l'objet d'une procédure de saisie immobilière et a été adjugé à Mme [T], la prévenue s'est introduite à deux reprises, le 1er août et le 27 décembre 2018, dans ledit logement, en forçant les chaînes apposées à l'entrée, actes constitutifs de voies de fait.
13. Les juges ajoutent que Mme [T] est régulièrement adjudicataire de l'immeuble litigieux, conformément à la procédure de saisie immobilière et du jugement d'adjudication du 15 juin 2017, signifié à la société dont Mme [W] est la gérante, Mme [T] n'ayant cependant pu obtenir les clés du logement que le 5 novembre 2018.
14. Ils relèvent encore, en substance, que Mme [W] ne pouvait se prétendre titulaire d'un bail sur le logement, ce dont elle avait connaissance, et qu'elle s'était introduite en forçant les ouvertures après son expulsion.
15. En statuant ainsi, alors qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que Mme [T], adjudicataire, n'a obtenu les clés du logement que postérieurement aux premiers faits visés par la prévention et que ni elle ni son époux n'avaient, eux-mêmes, jamais occupé le bien immobilier litigieux, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
16. La cassation est par conséquent encourue de ce chef, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs.
Portée et conséquences de la cassation
17. La cassation à intervenir concerne les seules dispositions relatives à la déclaration de culpabilité de Mme [W] du chef de violation de domicile, faits commis les 1er août et 27 décembre 2018, ainsi que, par voie de conséquence, la peine prononcée, et la condamnation sur les intérêts civils relative à cette infraction. Les autres dispositions seront donc maintenues.




Crim. 3 juin 2025 n° 24-81.662

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° J 24-81.662 F-D
N° 00737

ODVS 3 JUIN 2025

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


Mme [B] [T] et M. [C] [T] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 8 novembre 2023, qui, l'un et l'autre pour travail dissimulé, obstacle à fonctions, infractions aux règles d'hygiène et de sécurité dans le travail et non-déclaration d'un local affecté à l'hébergement collectif, le second, en outre, pour hébergement de travailleur dans un local non conforme, a condamné M. [C] [T] à trois ans d'emprisonnement avec sursis probatoire, Mme [B] [T] à deux ans d'emprisonnement avec sursis probatoire et 3 000 euros d'amende avec sursis, et les deux prévenus, chacun, à soixante amendes de 250 euros chacune, dont trente amendes avec sursis, une interdiction de gérer, et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [B] [T] et M. [C] [T], les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de MM. [N] [V], [K] et [D] [M], et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Un contrôle opéré le 14 février 2015 sur un chantier de rénovation d'un château appartenant à une société civile immobilière familiale détenue notamment par M. [C] [T] et sa soeur, Mme [B] [T], a conduit au constat de diverses infractions mettant notamment en cause quatre sociétés, dont l'une dirigée par Mme [T] et les trois autres, parmi lesquelles une immatriculée en Roumanie, gérées en droit ou en fait par M. [T].
3. Les agents de contrôle ont constaté la présence sur les lieux de vingt personnes de nationalité roumaine en posture de travail, parmi lesquelles dix-sept en situation apparente de détachement international.
4. À l'issue de l'enquête, M. [T] a été poursuivi pour travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, obstacle aux fonctions d'inspecteur du travail, non-déclaration d'un local affecté à l'hébergement collectif, hébergement de travailleurs dans un local non conforme, mise à disposition de travailleurs d'équipements de travail non conformes aux règles de sécurité, défaut de mise en place de mesures de protection collectives, défaut de vérification d'installations électriques mises à la disposition de salariés.
5. Mme [T] a pour sa part été poursuivie des mêmes chefs et, en outre, pour réalisation d'un bâtiment sans désignation, par le maître d'ouvrage, d'un coordinateur de sécurité.
6. Par jugement du 3 décembre 2020, le tribunal correctionnel a notamment déclaré les deux prévenus coupables des infractions qui leur étaient reprochées et a condamné M. [T] à trois ans d'emprisonnement avec sursis probatoire, soixante amendes de 250 euros dont trente amendes avec sursis, une interdiction de gérer et la confiscation des objets saisis.
7. Mme [T] a été condamnée à deux ans d'emprisonnement avec sursis probatoire et aux mêmes autres peines que ci-dessus.
8. Les deux prévenus, puis le ministère public, ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur les premier et troisième moyens et le deuxième moyen, pris en ses première et troisième branches, en ce que cette dernière branche est proposée pour M. [T]
9. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, en ce que cette dernière est proposée pour Mme [T]
Énoncé du moyen
10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. et Mme [T] coupables du délit d'obstacle à l'exercice des fonctions d'inspecteur ou de contrôleur du travail et a prononcé sur les peines et les intérêts civils, alors :
« 2°/ qu'en retenant, pour déclarer Mme [T] coupable du délit d'obstacle, qu'elle n'avait pas communiqué « les autorisations de travail permettant aux ressortissants roumains d'exercer une activité salariée en France, les bulletins de paie de chaque salarié détaché ainsi que les documents attestant du paiement effectif du salaire et ceux indiquant la durée du travail », quand ces documents ne sont en possession que de l'employeur des salariés et quand elle retenait elle-même qu'elle ne pouvait pas être « considér[ée] comme employeur des personnes travaillant sur le chantier », la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 6, § 1er, et 7 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 111-3, 111-4, 121-1 du code pénal et L. 8114-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 8114-1 du code du travail, dans sa version en vigueur du 1er mai 2008 au 1er juillet 2016, et 593 du code de procédure pénale :
11. Commet le délit défini par le premier de ces textes quiconque met obstacle à l'accomplissement des devoirs d'un inspecteur ou d'un contrôleur du travail.
12. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
13. Pour déclarer Mme [T] coupable du délit susvisé, l'arrêt attaqué énonce que les salariés étaient tous dirigés par M. [T] et que la société gérée par la prévenue, qui n'employait aucun salarié, avait le statut de maître d'ouvrage.
14. Les juges relèvent qu'en cette qualité, Mme [T] était tenue de communiquer aux agents de contrôle les pièces demandées par ces derniers, figurant dans une liste annexée au dossier de la procédure.
15. Ils retiennent que Mme [T] n'a communiqué aucun des documents visés à l'article R. 1263-1 du code du travail, dont les autorisations de travail permettant aux ressortissants roumains d'exercer une activité salariée en France, les bulletins de paie de chaque salarié détaché ainsi que les documents attestant du paiement effectif du salaire et ceux indiquant la durée du travail.
16. En se déterminant par ces motifs, pour partie contradictoires, alors que Mme [T], qui n'était l'employeur, en droit ou en fait, d'aucun des salariés concernés, ne pouvait être condamnée à raison du refus de produire des documents dont la remise ne pouvait être exigée que de l'employeur, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.
17. La cassation est par conséquent encourue de ce chef, sans qu'il soit nécessaire d'examiner l'autre grief.
Portée et conséquences de la cassation
18. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives à la déclaration de culpabilité de Mme [T] du chef d'obstacle aux fonctions de contrôleur ou d'inspecteur du travail et aux peines prononcées contre elle. Les autres dispositions seront donc maintenues.




Crim. 3 juin 2025 n° 25-82.296

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° U 25-82.296 F-D
N° 00908

SB4 3 JUIN 2025

REJET

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


M. [M] [Y] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 10e section, en date du 25 février 2025, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de traite d'êtres humains en bande organisée, administration de substances nuisibles et violences aggravées, a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant sa demande de mise en liberté.
Un mémoire personnel a été produit.
Sur le rapport de M. Hill, conseiller, et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 juin 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Hill, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 26 octobre 2023, M. [M] [Y] a été mis en examen des chefs susvisés et placé en détention provisoire.
3. Par ordonnance du 8 janvier 2025, le juge des libertés et de la détention a rejeté sa demande de mise en liberté.
4. Cette ordonnance a été notifiée à la personne mise en examen le 10 janvier 2025.
5. Le 14 février suivant, l'avocat de M. [Y] a relevé appel de cette décision, mentionnant sur l'acte d'appel l'absence de notification en langue arabe de l'ordonnance susvisée.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable, pour dépassement du délai d'appel, le recours de M. [Y] contre l'ordonnance du juge des libertés du 8 janvier 2025 rejetant sa demande de mise en liberté, alors :
1°/ que le délai d'appel contre une ordonnance de rejet de demande de mise en liberté, pièce essentielle à la défense, ne commence à courir qu'à compter de la notification en langue étrangère comprise par le détenu, permettant à celui-ci d'exercer une voie de recours et les droits de la défense ; qu'en énonçant, pour déclarer irrecevable le recours de l'exposant, que la notification en français et sans traduction à ce dernier était opposable et susceptible de constituer le point de départ d'un délai d'appel, au motif que l'exposant aurait une « compréhension suffisante de la procédure » (arrêt, p. 4) et ne démontrerait pas son « incapacité de comprendre le sens de la décision » (arrêt, p. 4), la chambre de l'instruction a méconnu les articles 6,§ 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, et les articles préliminaire, 803-5 et D. 594-6 du code de procédure pénale ;
2°/ que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'appelée à chercher si une notification en langue française était opposable à l'exposant et constituait le point de départ du délai d'appel, la chambre de l'instruction a, tout à la fois, caractérisé, d'une part, que « tant au cours de sa garde à vue que devant le magistrat instructeur [...] M. [M] [Y] a bénéficié d'un interprète en langue arabe » (arrêt, p.3), d'autre part, jugé qu'il ne démontrait pas son « incapacité de comprendre le sens de la décision » (arrêt, p. 4) ; qu'en statuant par de tels motifs contradictoires, la chambre de l'instruction a entaché sa décision d'une contradiction de motifs qui ne satisfait pas aux exigences de l'article 593 du code de procédure pénale ;
3°/ qu'il appartient aux autorités judiciaires de prouver que la personne mise en cause parle suffisamment la langue de la procédure et non à cette dernière de démontrer que tel n'est pas le cas ; qu'en énonçant néanmoins, pour déclarer tardif son recours, que l'exposant ne démontrait pas son « incapacité de comprendre le sens de la décision » (arrêt, p. 4), et, en se fondant pour ce faire, sur sa « compréhension suffisante de la procédure, des décisions qui lui étaient opposées et des moyens de faire valoir ses droits» (arrêt, p. 4), sans rechercher s'il avait une connaissance suffisante de la langue française, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 186, 199 alinéa 4, 803-5 et D. 594-6 du code de procédure pénale.
Réponse de la Cour
7. Pour déclarer irrecevable l'appel du demandeur, l'arrêt attaqué relève que, selon l'administration pénitentiaire, la personne mise en examen a une maîtrise imparfaite du français mais le comprend et s'exprime relativement correctement et que ce constat, nécessairement subjectif, contesté par l'avocat de l'intéressé, est conforté par les déclarations de ce dernier tenant au suivi de cours de français.
8. Les juges énoncent encore que M. [Y] a révélé, tout au long de cette procédure, qu'il avait une compréhension suffisante de cette dernière, des décisions qui lui étaient opposées et des moyens de faire valoir ses droits et qu'il a ainsi régulièrement, et seul, interjeté appel le 23 août 2024, soit dans le délai légal de dix jours prévu par l'article 186 du code de procédure pénale, d'une ordonnance de rejet de demande de mise en liberté du 20 août 2024.
9. Ils ajoutent qu'il n'est pas démontré en quoi, lors de la notification de l'ordonnance de rejet du 8 janvier 2025, il se serait trouvé dans l'incapacité de comprendre le sens de la décision puis d'en interjeter appel dans le délai légal, tout comme il l'avait précédemment fait.
10. Ils relèvent encore qu'aucune mention relative à une mauvaise compréhension ou à une demande de traduction n'a été portée par le greffe pénitentiaire lors de cette notification.
11. En prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a, sans insuffisance ni contradiction, justifié sa décision.
12. Par ailleurs, l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.




Crim. 3 juin 2025 n° 25-81.868 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° D 25-81.868 F-B
N° 00905

SB4 3 JUIN 2025

REJET

M. BONNAL président,






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


M. [I] [P] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 3e section, en date du 18 février 2025, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'assassinat, violences aggravées, arrestation, enlèvement, détention ou séquestration arbitraire, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Merloz, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [I] [P], et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 juin 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Merloz, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, Mme Merloz, conseiller référendaire, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [I] [P] a été mis en examen des chefs susvisés et placé sous mandat de dépôt criminel le 3 février 2023.
3. Saisi par ordonnance du 21 janvier 2025 d'un juge d'instruction suppléant le juge d'instruction en charge de l'information, le juge des libertés et de la détention a prolongé la détention provisoire par ordonnance du 30 janvier 2025.
4. Par arrêté du 28 janvier 2025, le magistrat en charge de l'information a été nommé dans un cabinet ministériel avec effet rétroactif à compter du 14 janvier précédent.
5. M. [P] a relevé appel de l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la nullité de la saisine du juge des libertés et de la détention et de l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire, alors :
« 1°/ qu'il résulte de l'article 84 du code de procédure pénale qu'en cas de nomination à un autre poste du juge chargé de l'information, celui-ci ne peut plus être suppléé dans ses fonctions et le président du tribunal doit désigner un nouveau juge pour poursuivre l'instruction ; qu'en l'espèce, l'arrêt constate que par un arrêté du 28 janvier 2025 du garde des sceaux publié le 31 janvier 2025 au journal officiel, M. Grégory Martin-Dit-Neuville, juge d'instruction initialement chargé du dossier de M. [P], a été nommé conseiller ministériel auprès du garde des sceaux « à compter du 14 janvier 2025 » ; que c'est donc à cette dernière date, 14 janvier 2025, peu important la date de l'arrêté rétroactif de nomination ou la date de sa publication, que le juge d'instruction a été nommé à un autre poste et ne pouvait en conséquence plus être suppléé ; qu'en décidant que ce juge d'instruction avait pu être suppléé régulièrement le 21 janvier 2025 pour saisir le juge de les libertés et de la détention aux fins de prolongation de la détention provisoire, au motif qu'à cette date, l'arrêté portant nomination « n'avait pas été pris » de sorte que le magistrat « n'était pas encore nommé à un autre poste » (arrêt, p. 13, § 3), la chambre de l'instruction a méconnu la portée du principe sus-énoncé et a violé le texte susvisé ; la cassation interviendra sans renvoi et avec remise en liberté immédiate du mis en examen dont le titre de détention a expiré le 3 février 2025 ;
2°/ qu'en tout état de cause, à supposer que le magistrat nommé au ministère de la justice pouvait encore être suppléé, il appartenait à la chambre de l'instruction de vérifier que les conditions de cette suppléance étaient réunies, à savoir notamment, aux termes du quatrième alinéa de l'article 84 du code de procédure pénale, la condition d'urgence ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, elle a privé sa décision de motifs au regard de ce texte et a violé l'article 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
7. C'est à tort que, pour rejeter l'exception de nullité de l'ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention, l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte de l'article 84, alinéa 3, du code de procédure pénale qu'en cas de nomination à un autre poste du magistrat chargé de l'information, le président de la juridiction doit désigner le juge d'instruction chargé de le remplacer et que ce magistrat ne peut en aucun cas être suppléé en application des dispositions prévues à l'alinéa 4 du même texte.
8. En effet, l'article 84, alinéa 4, du code de procédure pénale permet, en cas d'urgence et pour des actes isolés, à tout juge d'instruction du tribunal de suppléer un autre juge d'instruction du même tribunal, peu important la cause de l'empêchement.
9. Cependant, l'arrêt n'encourt pas la censure dès lors que, d'une part, l'ordonnance critiquée a été prise au visa de l'urgence, d'autre part, le juge suppléant n'a pas à justifier l'urgence qui est présumée, s'agissant au surplus, en l'espèce, de la saisine du juge des libertés et de la détention aux fins de prolongation de la détention provisoire.
10. Ainsi, le moyen doit être écarté.
11. Par ailleurs, l'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale.




Crim. 3 juin 2025 n° 25-82.239

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° H 25-82.239 F-D
N° 00909

SB4 3 JUIN 2025

REJET

M. BONNAL président,








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


M. [R] [W] [X] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 4e section, en date du 7 mars 2025, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'assassinats et tentatives, a ordonné la prolongation exceptionnelle de sa détention provisoire.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Cavalerie, conseiller, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de M. [R] [W] [X], et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 juin 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Cavalerie, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 9 août 1982, un groupe d'hommes a fait irruption dans un restaurant parisien situé [Adresse 1], a fait exploser un engin dans l'établissement et, à l'aide d'armes automatiques, a ouvert le feu sur les personnes présentes et sur des passants, avant de prendre la fuite. Plusieurs personnes ont été tuées et d'autres, en nombre plus élevé, ont été blessées.
3. Le même jour, une information a été ouverte des chefs d'homicides volontaires et tentatives et infractions à la législation sur les armes.
4. Un mandat d'arrêt international a été délivré le 20 février 2015 contre M. [R] [W] [X], lequel, remis aux autorités françaises, a été mis en examen et placé en détention provisoire, sous mandat de dépôt criminel, le 5 décembre 2020.
5. Par arrêt du 27 novembre 2024, la chambre de l'instruction a ordonné la prolongation exceptionnelle de sa détention provisoire pour une durée de quatre mois.
6. Le 19 février 2025, le juge des libertés et de la détention a saisi la chambre de l'instruction d'une nouvelle requête tendant à la prolongation exceptionnelle de la détention provisoire pour une durée de quatre mois, en application de l'article 145-2 du code de procédure pénale.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la prolongation de la détention provisoire de M. [W] [X] pour une durée de quatre mois à partir de l'expiration du délai de la dernière prolongation de la détention, alors :
« 1°/ que constitue un seul crime le fait coupable unique procédant d'une même intention, commis dans les mêmes circonstances de temps et de lieu et entraînant les mêmes conséquences pénales, même s'il a entrainé une pluralité de victimes, de sorte que le deuxième alinéa de l'article 145-2 du code de procédure pénale prévoyant l'allongement de la durée de la détention provisoire du mis en examen à quatre ans en cas de pluralité de crimes, n'est pas applicable ; qu'en retenant que M. [W] [X] était poursuivi pour une pluralité de crimes de sorte que la durée maximale de la détention provisoire, indépendamment des prolongation exceptionnelle régie par le troisième alinéa de cette disposition, était de quatre ans, au motif inopérant qu'il avait été mis en examen pour l'assassinat et la tentative d'assassinat de plusieurs personnes, sans rechercher comme elle y était invitée (mémoire, p. 9, § 5 et 6) si les infractions alternativement qualifiées d'assassinats et de tentatives d'assassinats selon que les victimes avaient ou non trouvées la mort, n'avaient pas été causées par une seule et même action criminelle à l'occasion d'une scène unique de crime, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 145-2 du code de procédure pénale et a méconnu I'article 593 de ce code ;
2°/ que lorsqu'il excède un délai raisonnable, le maintien à l'iso|ement d'une personne placée en détention provisoire peut constituer un traitement inhumain ou dégradant prohibée par l'article 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en excluant que le maintien à l'isolement de M. [W] [X] dans le cadre de sa détention provisoire constituait un traitement inhumain ou dégradant, lorsqu'elle elle avait relevé qu'il souffrait de troubles psychiatriques depuis sa détention, sans rechercher comme elle y était invitée si la durée de cette mesure n'était pas susceptible d'avoir conféré à celle-ci la nature d'un traitement inhumain ou dégradant, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifé sa décision au regard de l'article 3 de la Convention précitée et a méconnu l'article 593 du code de procédure pénale ;
3°/ que pour apprécier le caractère raisonnable du délai de détention provisoire le juge doit prendre en considération les conditions dans lesquelles celle-ci se déroule effectivementet en particulier le prononcé, et le cas échéant la durée, d'une mesure d'isolement ; qu'en se bornant à retenir que la durée de la détention provisoire et le recours à cette mesure sont proportionnés à la nature de l'affaire et aux investigations qu'elle a nécessité et compatibles avec la situation personnelle de M. [W] [X] et partant que la durée de la détention provisoire n'excède pas le caractère raisonnable prévu par les dispositions des articles du code de procédure pénale et 5 § 3 dela Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sans rechercher comme elle y était invitée si, compte tenu de sa durée, la mesure de placement de M. [W] [X] à l'isoIement n'était pas de nature à rendre déraisonnable la durée de sa détention provisoire, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifé sa décision au regard de l'articles 144-1 du code de procédure pénale ensemble l'article 5 § 3 de la convention précitée et a méconnu l'article 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Sur le moyen, pris en sa première branche
8. Pour écarter l'argumentation de la personne mise en examen selon laquelle l'alinéa 2 de l'article 145-2 du code de procédure pénale n'était pas applicable, de sorte que la détention provisoire ne pouvait être prolongée, à titre exceptionnel, en application de l'alinéa 3 dudit article, l'arrêt attaqué, après avoir énuméré les faits d'assassinats et de tentatives d'assassinats reprochés à la personne mise en examen, énonce notamment que M. [W] [X] est mis en examen pour plusieurs crimes au préjudice de différentes victimes.
9. Les juges en déduisent que l'article 145-2 alinéa 2 peut recevoir application et qu'en conséquence, la détention provisoire peut être prolongée, pour une seconde fois, au delà de quatre ans.
10. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application de l'article 145-2, alinéa 2, du code de procédure pénale, qui n'exige pas, lorsque la personne est poursuivie pour plusieurs crimes mentionnés aux livres II et IV du code pénal, que ces derniers procèdent d'actions criminelles distinctes.
11. Le grief peut dès lors être écarté.
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
12. Pour rejeter l'argumentation de la personne mise en examen selon laquelle son maintien à l'isolement constituerait un traitement inhumain ou dégradant, en violation de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, et devait être pris en compte pour apprécier le caractère déraisonnable de la durée de sa détention, l'arrêt attaqué énonce que les expertises ordonnées par le juge d'instruction ont conclu que l'état de santé physique et psychiatrique de M. [W] [X] était compatible avec la détention.
13. Les juges ajoutent que le fait que la personne mise en examen ait été placée à l'isolement relève d'une décision de l'administration pénitentiaire dans le cadre de son règlement intérieur.
14. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.
15. En effet, d'une part, l'article 803-8 du code de procédure pénale ouvre à toute personne détenue provisoirement dans un établissement pénitentiaire, qui considère que ses conditions de détention sont contraires à la dignité de la personne humaine, la faculté de saisir le juge des libertés et de la détention afin qu'il soit mis fin à de telles conditions. Cette voie de recours spécifique exclut toute demande en ce sens formée dans le cadre du contentieux de la détention provisoire. Dès lors, le deuxième grief, qui fait valoir que la durée de l'isolement méconnaît l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, est irrecevable.
16. D'autre part, la personne qui, comme en l'espèce, fait l'objet d'une mesure d'isolement administratif dispose d'un recours effectif devant le juge des référés administratif, pour la contester et demander qu'il y soit mis fin. Dès lors, elle n'est pas fondée, à l'occasion d'une demande ayant trait à la détention provisoire, à se prévaloir de l'incidence d'une telle mesure sur ses conditions d'incarcération.
17. Il s'ensuit que le moyen ne saurait être accueilli.
18. Par ailleurs, l'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des articles 143-1 et suivants du code de procédure pénale.




Crim. 3 juin 2025 n° 25-82.111

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° T 25-82.111 F-D
N° 00914



3 JUIN 2025
SB4




QPC INCIDENTE : RENVOI AU CC






M. BONNAL président,




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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


M. [B] [T] a présenté, par mémoire spécial reçu le 5 mars 2025, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 20 février 2025, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de fausses déclarations ou manoeuvres ayant pour but d'obtenir un avantage indu, en bande organisée, blanchiment douanier, blanchiment aggravé, a confirmé l'ordonnance du procureur européen délégué prononçant sur sa demande de mainlevée du contrôle judiciaire.
Des observations ont été produites.
Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 juin 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Pradel, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« L'article 696-119 du code de procédure pénale est-il conforme aux principes constitutionnels du droit à la liberté individuelle (article 2 DDHC et 66 de la Constitution), à la présomption d'innocence (Article 9 DDHC), au droit à un recours effectif (article 16 DDHC), à l'égalité des citoyens devant la loi (article 6 DDHC) et à l'impartialité des juridictions (article 16 DDHC) en ce que le procureur européen délégué est compétent pour ajouter, supprimer, modifier les obligations du contrôle judiciaire et statuer sur sa mainlevée alors qu'il est la partie poursuivante ? ».
2. La disposition législative contestée, dans sa version issue de la loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020, est applicable à la procédure uniquement en ce qu'elle vise les décisions en matière de maintien du contrôle judiciaire et n'a pas été déjà déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
3. Cette disposition ne se borne pas à tirer les conséquences nécessaires du Réglement UE 2017/1939 du Conseil du 12 octobre 2017 mettant en oeuvre une coopération renforcée concernant le parquet européen.
4. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
5. La question posée présente un caractère sérieux, en ce que la disposition permet au procureur européen délégué de prononcer sur le maintien du contrôle judiciaire.
6. Cette disposition est donc susceptible de porter atteinte au principe d'impartialité, dans la mesure où la personne en charge de se prononcer sur le maintien du contrôle judiciaire est la personne en charge des poursuites.
7. Il convient, dès lors, de renvoyer la question au Conseil constitutionnel.




Crim. 3 juin 2025 n° 25-82.118

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° A 25-82.118 F-D
N° 00906

SB4 3 JUIN 2025

REJET DECHEANCE

M. BONNAL président,







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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


M. [Y] [H] et M. [I] [H] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 12 février 2025, qui les a renvoyés devant la cour d'assises sous l'accusation d'enlèvement, arrestation, séquestration et détention arbitraires aggravés et tentative d'extorsion aggravée, en bande organisée, et associations de malfaiteurs, en récidive.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de M. [Y] [H], et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 juin 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. MM. [Y] et [I] [H] ont été mis en examen pour les infractions précitées.
3. Un avis de fin d'information a été délivré le 8 juillet 2024.
4. Le jour même, le procureur de la République a rendu un réquisitoire aux fins de renvoi devant la juridiction criminelle.
5. Le 7 octobre 2024, M. [Y] [H] a adressé, en réponse à ces réquisitions, des observations complémentaires au juge d'instruction.
6. Ce magistrat, par ordonnance du 10 octobre suivant, a prononcé la mise en accusation des intéressés des chefs susvisés.
7. MM. [Y] et [I] [H] ont relevé appel de cette décision.
Déchéance du pourvoi formé par M. [I] [H]
2. M. [I] [H] n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale.
Examen du moyen proposé pour M. [Y] [H]
Enoncé du moyen
10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de l'ordonnance de mise en accusation, alors « qu'après délivrance de l'avis de fin d'information, le juge d'instruction ne peut rendre l'ordonnance de règlement qu'après l'écoulement des délais prévus par l'article 175 du code de procédure pénale ; que la chambre de l'instruction qui, après avoir constaté qu'ensuite des observations sur le réquisitoire définitif formulées par M. [H] le 7 octobre 2024, le juge d'instruction avait rendu son ordonnance de mise en accusation dès le 10 octobre 2024, sans attendre que ne s'écoule le délai d'un mois dont bénéficiait le ministère public pour formuler des réquisitions complémentaires, a retenu, pour la écarter la nullité de l'ordonnance de mise en accusation, qu'aucune atteinte aux droits du mis en examen ne résultait de ce manquement, a méconnu le texte précité, dans sa version issue de la loi du 23 mars 2019. »
Réponse de la Cour
11. Pour rejeter le grief de nullité de l'ordonnance contestée, pris du non-respect du délai prévu par l'article 175, V, du code de procédure pénale, l'arrêt attaqué énonce qu'à la suite des observations déposées par la personne mise en examen le 7 octobre 2024, le procureur de la République disposait d'un délai d'un mois pour présenter des réquisitions complémentaires.
12. Les juges observent qu'en rendant l'ordonnance de mise en accusation le 10 octobre suivant, le juge d'instruction n'a pas respecté ce délai.
13. Ils relèvent que la personne mise en examen a cependant été en mesure de formuler des observations, après avoir pris connaissance des réquisitions du procureur de la République, observations qui ont été portées à la connaissance du juge d'instruction et du ministère public.
14. Ils en déduisent que l'inobservation du délai susvisé n'a emporté aucune atteinte aux droits de la personne mise en examen.
15. En statuant ainsi, et dès lors que M. [H] ne se prévaut d'aucun grief, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen.
16. Ainsi, celui-ci doit être écarté.
17. Par ailleurs, la procédure est régulière et les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi.




Crim. 3 juin 2025 n° 24-82.035

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 24-82.035 F-D
N° 00740

ODVS 3 JUIN 2025

REJET

M. BONNAL président,







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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


L'association [1] et M. [J] [H], parties civiles, ont formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, chambre correctionnelle, en date du 12 décembre 2022, qui les a déboutés de leurs demandes après relaxe de Mme [Z] [B] des chefs de diffamation et injures publiques envers un particulier.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Hill, conseiller, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de l'association [1] et M. [J] [H], et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Hill, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 23 mars 2020, l'association [1] a porté plainte et s'est constituée partie civile devant le juge d'instruction du chef de diffamation publique envers un particulier, en raison des propos suivants publiés le 25 décembre 2019, sur le site 2U-trail.com, dont Mme [Z] [B] est directrice de publication, sous le titre « Guide du tricheur : spécial Grand Raid » : « Ce qui est génial dans ce guide c'est que même si tu te fais attraper, tu sembles risquer absolument rien. Dans un premier temps, ils sont bien plus occupés à voir si t'as ton tee shirt avec la marque de saucisson partenaire au niveau du Colorado. Et puis surtout si cela arrive, il ne faut surtout pas en parler ! Cela risquerait d'égratigner la réputation de cette course ».
3. Le 5 juin suivant, la même association et M. [J] [H], son président, ont porté plainte et se sont constitués partie civile, d'une part, du chef de diffamation publique envers un particulier en raison des propos suivants publiés sur le même site, le 16 avril 2020, « Alors que [J] [H] est très largement critiqué, alors que l'édition 2019 de la Diagonale des Fous a fait honte aux réunionnais, alors que la Diagonale des Fous 2020 devait être boudée, il semblerait que la crise sanitaire actuelle soit une aubaine pour le Grand Raid » ; « Les démissions s'accumulaient dans le comité de direction de l'organisation. Avec en point d'orgue, le président [H] qui claquait (enfin,) la porte, lassé par le fait qu'on puisse oser mettre sa parole en doute. Ce coup de théâtre ne durera cependant que le temps d'un week-end. Le goût du pouvoir suprême lui avait manqué » ; « Après la honte internationale de l'édition 2019 qui avait vu la grande majorité des coureurs élite se perdre après à peine 10 km de course, il paraissait compliqué pour l'organisation de séduire à nouveau ces coureurs (malgré la promesse du président [H] de prendre en charge les billets d'avion) » ; « Les locaux sont de moins en moins séduits par le Grand Raid tant le désamour avec l'organisation et notamment le président est avancé. On note donc une baisse spectaculaire des inscrits réunionnais » ; « Le président [H] a changé les règles se moquant complètement de l'intégrité de ses coureurs » ; « En effet afin d'obtenir le précieux sésame que représente le dossard il fallait s'acquitter de point qualificatifs. Cela permettait d'éviter à un novice de prendre le départ et ainsi de risquer sa santé. [J] [H] a balayé de la main cette règle afin d'accroître son nombre d'inscrits et de cacher la misère. Mais comme l'avocat est malin, il demandera à chacun des inscrits sans les points nécessaires de signer une décharge qui lui permette de ne pas être responsable » ; « Personne ne peut tirer un intérêt de cette pandémie mais force est de constater qu'elle est en train de permettre au Grand Raid de la Réunion de sauver les meubles en limitant les dégâts pour cette édition 2020. Mais au vu de l'incompétence de sa direction, on est en droit de se demander pour combien de temps ? », l'article étant illustré par une image représentant des billets de 100 dollars comportant le visage de M. [H], d'autre part, du chef d'injure publique envers un particulier, en raison des propos suivants publiés sur le même site, le 18 avril 2020 : « Coronavirus : avec [H] risque d'être une boucherie. A l'image du Tour de France, si la Diagonale des Fous a lieu en l'état, elle peut être une boucherie. Pourquoi ? Parce que l'avidité (notamment avec l'affaire [2]) et la psychorigidité des organisateurs (par rapport à ce qui est arrivé aux élites l'an dernier) me paraît dangereuse. Diagonale des Fous & coronavirus : une sécurité qui laisse désirer. » ; « Alors oui, ça fait clairement partie du charme de la diagonale des fous, mais la sécurité a pu parfois laisser à désirer. Trouvez moi un autre trail ou un Walmsley peut disparaître des radars comme ça a été le cas en 2017. Ce que je veux dire par là, c'est que ce côté un peu roots a quelque chose d'assez angoissant pour le respect sanitaire. Plus généralement, et par delà la question de la sécurité, ce qui me gêne, c'est plus l'esprit des organisateurs. Quand on va leur demander de relever la barre après une édition 2019 du grand raid absolument honteuse, ils ne changeront pas. Pire, il vous vendront ça comme un esprit trail qu'ils utilisent comme un synonyme d'amateurisme » ; « Le covid va-t-il tuer la Diagonale ? Un malheureux gâchis. La Diagonale des fous fait partie des trails les plus célèbres au monde. Avec l'UTMB et la Hardrock 100, la diagonale est assurément l'ultra à faire au moins une fois dans sa vie. Que ce soit pour l'accueil des réunionnais, leurs bons petit caris, la difficulté hallucinante de la course, la technicité de son terrain, la multiplicité des paysages et des sols (on peut aller de 3 degrés en altitude à 45 degrés quand on passe sur des roches volcaniques à la fin du parcours), elle est légendaire. Et si elle n'est aujourd'hui clairement pas dans mes cordes, elle fait partie de ce que j'ai envie de faire un jour. Et malheureusement, en raison de leur ego disproportionné, de leur incompétence non assumée et de leur avidité excessive, ses organisateurs vont finir par la tuer » ; « le covid ne va pas tuer la diagonale des fous parce qu'il s'inviterait sur le peloton (encore que..), mais plus parce qu'il mettrait en évidence les limites du système [H] », puis le 7 mai 2020, « Comment le président [H] se voit dans l'association du Grand Raid », illustré par une affiche du film « Le parrain » sur laquelle le visage de ce dernier avait été remplacé par celui de M. [H].
4. Par ordonnance d'un juge d'instruction, les deux plaintes ayant été jointes et Mme [B] ayant été mise en examen, celle-ci a été renvoyée devant le tribunal correctionnel des chefs susvisés.
5. Par jugement du 2 décembre 2021, le tribunal a rejeté l'exception de nullité de la poursuite, a relaxé Mme [B] et a prononcé sur les intérêts civils.
6. Seules les parties civiles ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
7. Le moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a débouté l'association [1] et M. [H] de leurs demandes de réparation civile contre Mme [B], alors :
« 1°/ que toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation ; qu'en retenant que les propos tenus dans l'article du 25 décembre 2019 ne portaient sur aucun fait précis et, en conséquence, ne sauraient être diffamatoires, quand pourtant cet article contenait une imputation précise selon laquelle les organisateurs de la course « Diagonale des Fous » favorisaient et faciliteraient la tricherie de la part des joueurs et seraient, à tous le moins, négligents et dépourvus de sérieux à ce sujet, la cour d'appel a violé l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;
2°/ que toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation ; qu'en retenant que les propos tenus dans l'article du 16 avril 2020 ne portaient sur aucun fait précis et, en conséquence, ne sauraient être diffamatoires, quand pourtant cet article contenait une imputation précise selon laquelle les organisateurs de la course « Diagonale des Fous » étaient incompétents, se moquaient de l'intégrité des joueurs, avaient très mal géré la course, et plus particulièrement son édition 2019, avaient fait honte à l'événement et avaient entraîné une grande insatisfaction et plusieurs démissions, la cour d'appel a violé l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. »
3°/ que toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure ; qu'en retenant que les propos tenus dans l'article du 18 avril 2020 n'étaient pas injurieux, quand pourtant y étaient fustigées « l'avidité » et la « psychorigidité » des responsables de la course « Diagonale des Fous », M [H] étant nommément cité, la cour d'appel a violé l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;

4°/ que toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure ; qu'en retenant que le détournement de l'affiche du film « The Godfather » (titre français : « Le Parrain ») avec le portait de M [H] en parrain de la mafia, l'assimilant ainsi à un chef mafieux, n'était pas injurieuse, en se fondant sur la considération, inopérante, selon laquelle il était évident qu'en réalité, il n'était pas un chef délinquant, la cour d'appel a violé l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;
5°/ que le droit à la réputation des personnes mises en cause, en tant qu'élément de la vie privée, est protégé et garanti et doit ainsi, le cas échéant, être mis en balance avec le droit à la liberté d'expression ; qu'en se bornant à se référer au droit à la liberté d'expression et à la liberté de l'information et, le cas échéant, par motifs éventuellement adoptés, au droit à la critique satirique, sans les mettre en balance avec le droit à la réputation de la ou des personnes mises en cause par les propos et images dont les victimes soutenaient qu'ils étaient injurieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 8 et 10, combinés, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
Sur le moyen, pris en ses deux premières branches
9. Pour rejeter l'existence de fautes civiles imputables à Mme [B], l'arrêt attaqué retient, par motifs propres et adoptés, s'agissant des propos poursuivis des 25 décembre 2019 et 16 avril 2020, que les premiers juges ont, par des motifs exacts et suffisants, déduit des circonstances de la cause les conséquences juridiques qui s'imposaient en relaxant la prévenue pour des propos et des caricatures qui s'inscrivaient dans le domaine de la liberté d'expression et d'information qui constituent des libertés fondamentales limitées uniquement par l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.
10. Les juges ajoutent qu'en l'espèce il n'existe aucune imputation d'un fait précis susceptible de faire l'objet d'un débat probatoire contradictoire.
11. En prononçant ainsi, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.
12. En effet, la Cour de cassation est en mesure de s'assurer, en considération du sens et de la portée des propos poursuivis, que les appréciations critiques faites par la prévenue sur l'organisation du trail par l'association [1] et M. [H] n'étaient pas susceptibles de porter atteinte à leur honneur ou d'entacher leur considération personnelle ou professionnelle pour les motifs qui suivent.
13. D'une part, les propos du 25 décembre 2019, selon lesquels les organisateurs de la course « Diagonale des Fous » favoriseraient et faciliteraient la tricherie de la part des participants, ne font état d'aucun fait précis pouvant leur être imputé.
14. D¿autre part, s'agissant des risques que les organisateurs auraient fait courir aux coureurs, il est précisé dans les propos litigieux que les « novices » doivent signer une décharge, ce dont il résulte que le risque n'était pas caché, et les autres propos démontrent qu'un tel risque fait partie intégrante de cette épreuve.
15. Dès lors, les griefs doivent être écartés.
Sur le second moyen, pris en ses trois dernières branches
16. Pour rejeter l'existence de fautes civiles imputables à Mme [B], l'arrêt attaqué retient notamment, par motifs propres et adoptés, s'agissant des propos poursuivis du chef d'injure, que le détournement de l'affiche du film « le Parrain », sur laquelle le visage de [F] [E] a été remplacé par celui de M. [H], accompagné de la légende « comment le président [H] se voit dans l'association du Grand Raid », ne saurait dépasser les limites de la liberté d'expression, en ce que, d'une part, la réputation de l'intéressé comme membre de la « cosa nostra » est inexistante, d'autre part, ce procédé entre dans le domaine de la caricature, étant évident que les parties civiles ne peuvent pas être assimilées à un groupe de délinquants contrôlant des activités, ce d'autant que les propos poursuivis traitent des conséquences de l'épidémie de covid sur l'organisation des épreuves.
17. En statuant ainsi, la cour d'appel n'a méconnu aucun des textes visés au moyen.
18. D'une part, les propos litigieux, consistant en des critiques, certes virulentes, des organisateurs de la course ne contiennent pas d'expressions outrageantes ou méprisantes à leur égard au sens de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881.
19. D'autre part, le photomontage en cause, relevant de la caricature, pour outrageant qu'il soit vis-à-vis de M. [H], n'a pas dépassé les limites admissibles de la liberté d'expression.
20. Dès lors, le moyen doit être écarté.
21. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.





Crim. 3 juin 2025 n° 25-81.897

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° K 25-81.897 F-D
N° 00904

SB4 3 JUIN 2025

CASSATION

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


M. [W] [J] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 3 décembre 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de blanchiment, et association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de M. [W] [J], et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 3 juin 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 9 novembre 2024, M. [W] [J] a été mis en examen des chefs susvisés puis placé en détention provisoire par ordonnance du juge des libertés et de la détention.
3. Il a relevé appel de cette décision.
4. M. [J] et son avocat ont été convoqués les 19 et 22 novembre 2024 pour une audience fixée au 2 décembre suivant à 14 heures, l'intéressé devant comparaître par le biais de la visioconférence.
5. Par voie électronique, l'avocat a informé le greffe de la chambre de l'instruction qu'il serait aux côtés de la personne mise en examen dans les locaux de l'établissement pénitentiaire et a produit un mémoire, enregistré le 29 novembre.
6. L'affaire a été appelée vers 18 heures le 2 décembre.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance de placement en détention provisoire de M. [J], alors :
« 1/° que lorsque l'avocat de la personne mise en examen a averti la chambre de l'instruction en temps utile de sa présence, son absence lors de l'audience qui ne résulte pas de sa propre défaillance porte atteinte aux droits de la défense ; qu'en l'espèce, [W] [J] et son avocate ont été convoqués pour une audience qui devait se tenir le lundi 2 décembre 2024 à 14h00 en visioconférence ; que l'avocate d'[W] [J] a écrit le 28 novembre 2024 au greffe de la chambre de l'instruction pour lui préciser qu'elle se trouvera au moment du débat auprès de son client au centre pénitentiaire ; qu'il résulte des pièces de la procédure qu'elle s'est présentée au centre pénitentiaire à 14h et a été contrainte de quitter les lieux à 17h en raison de la fermeture des parloirs ; que la chambre de l'instruction qui s'est néanmoins réunie aux alentours de 18h00 et a statué sur l'appel du placement en détention provisoire d'[W] [J], sans la présence de l'avocate, a porté atteinte aux droits de la défense en violation des articles 137-1, 148-2, 197, 199, 706-71, 591 à 593 du code de procédure pénale, ensemble les articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
2°/ que lorsque l'avocat de la personne mise en examen a averti la chambre de l'instruction en temps utile de sa présence, son absence lors de l'audience qui ne résulte pas de sa propre défaillance porte atteinte aux droits de la défense ; qu'en l'espèce, [W] [J] et son avocat ont été convoqués pour une audience qui devait se tenir le lundi 2 décembre 2024 à 14h00 en visioconférence ; que l'avocate d'[W] [J] a écrit le 28 novembre 2024 au greffe de la chambre de l'instruction pour lui préciser qu'elle se trouvera au moment du débat auprès de son client au centre pénitentiaire ; qu'il résulte des pièces de la procédure qu'elle s'est présentée au centre pénitentiaire à 14h et a été contrainte de quitter les lieux à 17h en raison de la fermeture des parloirs ; que la chambre de l'instruction qui s'est néanmoins réunie aux alentours de 18h00 et a statué sur l'appel du placement en détention provisoire d'[W] [J], sans chercher à joindre l'avocate afin de lui permettre de revenir à la maison d'arrêt ou de rejoindre la juridiction, a porté atteinte aux droits de la défense en violation des articles 137-1, 148-2, 197, 199, 706-71, 591 à 593 du code de procédure pénale, ensemble les articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme et 199 du code de procédure pénale :
8. Il résulte de ces textes que la chambre de l'instruction doit entendre les avocats des parties.
9. Pour confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, l'arrêt attaqué énonce que l'avocat de l'intéressé, quoique régulièrement avisé de la date d'audience, n'est pas présent à l'audience ou dans l'établissement pénitentiaire auprès de son client.
10. Les juges ajoutent qu'un mémoire a été produit devant la chambre de l'instruction et que M. [J] a comparu par le biais de la visioconférence et a été entendu.
11. En statuant ainsi, alors que l'avocat de M. [J], qui était présent aux côtés de ce dernier à 14 heures, avait été invité par l'administration pénitentiaire à quitter l'établissement à 17 heures, sans que cette décision soit justifiée par une cause insurmontable et imprévisible, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé.
12. La cassation est ainsi encourue.




Crim. 3 juin 2025 n° 24-81.678

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° B 24-81.678 F-D
N° 00739

ODVS 3 JUIN 2025

REJET

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


Mme [J] [K] [U], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-7, en date du 14 février 2024, qui, dans la procédure suivie contre M. [Z] [P] du chef de diffamation publique envers un particulier, a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de Mme Merloz, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de Mme [J] [K] [U], les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [Z] [P], et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Merloz, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Mme [J] [K] [U] a porté plainte et s'est constituée partie civile devant le doyen des juges d'instruction contre M. [Z] [P], en sa qualité de directeur de publication de l'hebdomadaire [1], en raison d'un article intitulé « Me [K] réduite à la manche » publié dans l'édition du 4 octobre 2017, comprenant les propos suivants : « Depuis six ans qu'elle a enfilé la robe noire, elle a oublié de régler ses cotisations à la caisse de retraite des avocats » ; « Elle ne paie pas non plus, depuis un an, ses cotisations à l'ordre des avocats de Paris ».
3. Par ordonnance du 20 janvier 2021, le juge d'instruction a renvoyé M. [P] devant le tribunal correctionnel du chef susvisé.
4. Par jugement du 6 décembre suivant, le tribunal a rejeté une première exception de nullité et a renvoyé l'examen de l'affaire au fond au 15 décembre 2022.
5. Par jugement du 17 février 2023, le tribunal a rejeté les exceptions de nullité et de prescription, a relaxé le prévenu et a prononcé sur les intérêts civils.
6. M. [P] a relevé appel de ces deux décisions, la partie civile relevant appel du seul jugement du 17 février 2023.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, statuant sur la faute civile de M. [P] à partir et dans la limite des faits objets de la poursuite, a renvoyé l'intéressé des fins de la poursuite du chef de diffamation publique envers un particulier, alors :
« 1°/ que lorsqu'une diffamation est caractérisée, l'auteur ne peut être relaxé des fins de la poursuite que s'il justifie de la vérité des faits ou de sa bonne foi ; que la bonne foi doit reposer sur une enquête sérieuse préalable ou une base factuelle suffisante au regard de l'ensemble des propos poursuivis et non d'une partie seulement de ceux-ci ; qu'en renvoyant [Z] [P] des fins de la poursuite du chef de diffamation publique au bénéfice de la bonne foi bien que les éléments produits au titre de la base factuelle, relatifs uniquement à « diverses cotisations sociales dues pour les années 2016 et 2017 », ne permettaient ni de justifier l'accusation selon laquelle la partie civile aurait omis de payer ses cotisations depuis six ans, ni de distinguer entre les imputations de manquements relatifs à deux organismes collecteurs différents, la cour d'appel a violé les articles 29 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881, 591 à 593 du code de procédure pénale, 10 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
2°/ que la partie civile faisait valoir dans ses conclusions que, faute pour le journaliste d'avoir satisfait à ses obligations de contradiction et de vérification, il ne saurait être regardé comme ayant procédé à une enquête sérieuse ou comme s'étant appuyé sur une base factuelle suffisante ; qu'en renvoyant [Z] [P] des fins de la poursuite, sans vérifier, comme elle y était invitée, si l'auteur des propos poursuivis avait suffisamment rempli son obligation de contradiction, la cour d'appel a violé les articles 29 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881, 591à 593 du code de procédure pénale, 10 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
3°/ qu'en se bornant, pour écarter la faute civile de [Z] [P], à analyser des éléments sans lien avec les imputations particulièrement circonstanciées des propos poursuivis, sans vérifier ni la qualité et la quantité des recoupements effectués, ni les conditions de l'introduction de la contradiction, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence d'une base factuelle suffisante pour permettre au prévenu de bénéficier de la bonne foi, en violation des articles 10 de la Convention européenne des droits de l'homme et 29 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 ;
4°/ que lorsque l'auteur de propos diffamatoires prétend qu'il était de bonne foi, il appartient au juge de rechercher si lesdits propos s'inscrivent dans un débat d'intérêt général et reposent sur une base factuelle suffisante ; que lorsque l'auteur encourt uniquement des sanctions de nature civile, la gravité de l'ingérence est moindre en sorte que l'ensemble des critères de la bonne foi doivent s'analyser de façon plus rigoureuse ; qu'en adoptant les motifs des premiers juges, saisis de la commission d'une infraction pénale, selon lesquels les propos poursuivis n'avaient pas dépassé les limites admissibles de la liberté d'expression, la cour d'appel, qui était saisie de la seule faute civile de l'auteur et aurait dû apprécier plus strictement les critères de la bonne foi, a violé les articles 10 de la Convention européenne des droits de l'homme, 497 du code de procédure pénale, 29 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881. »
Réponse de la Cour
8. Pour rejeter l'existence d'une faute civile commise par le prévenu, en raison de sa bonne foi, l'arrêt attaqué énonce notamment, par motifs propres et adoptés, que les propos poursuivis imputent à la partie civile, pour les premiers, de ne pas avoir payé ses cotisations sociales à la caisse nationale des barreaux français (CNBF), au titre de la retraite, à hauteur de 32 215 euros sur une période de six ans, pour les seconds, de ne pas avoir payé ses cotisations à l'ordre des avocats de Paris sur une période d'un an, soit, au vu de la date de parution de l'article, du 4 octobre 2016 au 4 octobre 2017.
9. Les juges, après avoir rappelé que les critères de la bonne foi doivent s'analyser avec plus de rigueur lorsque l'auteur des propos diffamatoires est un journaliste qui fait profession d'informer, relèvent que les propos s'inscrivaient dans un débat d'intérêt général relatif à la problématique de la cohérence entre les valeurs professées par les hommes et femmes politiques et leur probité, à laquelle les citoyens sont particulièrement attentifs.
10. Ils observent, s'agissant du premier passage poursuivi, qu'il ressort des quatre pièces initialement produites au titre de l'exception de vérité, ainsi que de la pièce n° 1 produite par la partie civile, que Mme [K] [U] était redevable de diverses cotisations sociales, recouvrées par l'URSSAF et la CNBF, pour les années 2016 et 2017 et notamment d'une dette d'un montant de 32 215 euros à titre de cotisations et contributions aux droits de plaidoiries dues pour l'année 2016.
11. Ils ajoutent, s'agissant du second passage poursuivi, qu'il résulte du témoignage de M. [S] [M] qu'une source anonyme, travaillant auprès de l'ordre des avocats de Paris, avait informé l'auteur de l'article de l'existence d'une dette de la partie civile, cette information étant confirmée par les communications dudit ordre faisant état d'un échéancier, et donc d'une dette, négocié par Mme [K] [U] en septembre 2017.
12. Ils relèvent encore que, préalablement à la publication de l'article, la journaliste a voulu adresser un message à Mme [K] [U] afin de recueillir ses observations sur le défaut de paiement de ses cotisations à la CNBF, ce qui témoigne d'une démarche contradictoire, participant de la démonstration de sa bonne foi, même en l'absence de réception effective dudit message par la partie civile, pour des raisons manifestement techniques.
13. Ils en concluent que ces éléments constituent une base factuelle sérieuse en lien avec les imputations formulées.
14. Ils observent enfin, s'agissant de la prudence dans l'expression, eu égard aux éléments tangibles dont disposait la journaliste, de l'intérêt général s'attachant au sujet traité et enfin de la tonalité ironique de ce très court article, qui fait état « d'oubli », « d'étourderie » ou de « distraction » pour justifier les manquements imputés à Mme [K] [U], conforme au mode d'expression satirique revendiqué par le journal, que les limites admissibles de la liberté d'expression, particulièrement étendue dans le cadre de la polémique politique, n'ont pas été dépassées.
15. En prononçant ainsi, la cour d'appel, qui a répondu aux chefs péremptoires des conclusions des parties, a justifié sa décision pour les motifs qui suivent.
16. En premier lieu, les juges du fond ont exactement retenu, en considération des éléments extrinsèques qu'ils ont souverainement appréciés, que les premiers propos diffamatoires poursuivis ne contiennent pas l'affirmation claire que la prévenue n'aurait pas payé ses cotisations pendant six ans.
17. En second lieu, les juges du fond, saisis de la faute civile, ont exactement admis le prévenu au bénéfice de la bonne foi, dont la démonstration ne saurait être subordonnée à la preuve de la vérité des faits ni à une contradiction effective avec la personne visée par les propos diffamatoires, mais suppose que, comme en l'espèce, la journaliste ait vérifié les informations, avant leur publication, par un recoupement suffisant de plusieurs sources fiables et convergentes établissant ainsi, d'une part, l'existence de dettes en lien avec l'activité professionnelle de Mme [K] [U] et les obligations de cotisations qui en découlent, d'autre part, que cette dernière ne contestait pas l'existence de la dette puisqu'elle avait sollicité une compensation.
18. Ainsi, le moyen doit être écarté.




Crim. 3 juin 2025 n° 24-86.347 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° B 24-86.347 FS-B
N° 00638

RB5 3 JUIN 2025

CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI

M. BONNAL président,






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025

M. [C] [F] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 8e section, en date du 23 octobre 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs d'importation de stupéfiants en bande organisée, infractions à la législation sur les stupéfiants, blanchiment, blanchiment aggravé et association de malfaiteurs, en récidive, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure.
Par ordonnance du 30 décembre 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Dary, conseiller, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de M. [C] [F], et les conclusions de M. Dureux, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 8 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Dary, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, MM. Cavalerie, Maziau, Seys, Mmes Thomas, Chaline-Bellamy, M. Hill, conseillers de la chambre, M. Violeau, Mme Merloz, M. Pradel, conseillers référendaires, M. Dureux, avocat général référendaire, et Mme Boudalia, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 12 janvier 2023, M. [C] [F] a été mis en examen des chefs susvisés.
3. Le 21 juin suivant, il a déposé une requête en nullité à laquelle la chambre de l'instruction a fait partiellement droit en prononçant l'annulation des actes cotés D 855 à D 959 relatifs à la captation des données informatiques de son téléphone, ainsi que l'annulation ou la cancellation de diverses autres pièces de la procédure par voie de conséquence.
4. Le 28 octobre 2024, il a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction.
5. Par courrier reçu au greffe de la Cour de cassation le 4 avril 2025, le demandeur a déclaré se désister de son pourvoi mais seulement en ce qu'il porte sur l'annulation par la chambre de l'instruction des cotes D 855 à D 959 ainsi que sur l'annulation et la cancellation par voie de conséquence de pièces et actes de la procédure, le pourvoi étant expressément maintenu en ce qu'il a rejeté le surplus des demandes et ordonné, sous la réserve de l'annulation prononcée, la validation de la procédure jusqu'à la cote D 2120.
Examen de la portée du désistement partiel
6. Il se déduit de l'article 174, alinéa 2, du code de procédure pénale que l'annulation par voie de conséquence de pièces de la procédure ne saurait être fondée sur la nullité d'une pièce ou d'un acte de la procédure prononcée à tort par la chambre de l'instruction.
7. Cette règle, qui touche à la bonne administration de la justice, est d'ordre public.
8. Il s'ensuit que, saisie d'un pourvoi contestant l'étendue des nullités prononcées par voie de conséquence, la Cour de cassation doit s'assurer que la chambre de l'instruction a, à bon droit, annulé à titre principal l'acte ou la pièce dont découleraient les nullités par voie de conséquence, peu important que le demandeur ait limité son pourvoi aux seules dispositions de l'arrêt attaqué prononçant sur les nullités par voie de conséquence.
9. En l'espèce, il en résulte que la Cour de cassation est saisie des chefs de l'arrêt attaqué ayant prononcé l'annulation des cotes D 855 à D 959 ainsi que l'annulation et la cancellation par voie de conséquence de pièces et actes de la procédure.
Examen des moyens
Sur le moyen relevé d'office et mis dans le débat
Vu les articles 706-102-1 et 706-95-17 du code de procédure pénale :
10. Selon ces textes, si le juge d'instruction peut prescrire le recours aux moyens de l'Etat soumis au secret de la défense nationale pour l'exécution d'une mesure de captation de données informatiques, l'officier de police judiciaire peut aussi requérir, sous réserve de l'étendue de sa délégation, l'un des services habilités mentionnés à l'article D. 15-1-6 du code susvisé qui encadre et met en oeuvre cette modalité particulière d'exécution de la mesure.
11. Pour faire droit au moyen de nullité de la personne mise en examen pris de ce que les enquêteurs en charge de l'exécution de la mesure de captation des données informatiques du téléphone de M. [F] ont excédé les limites de leur mission, l'arrêt attaqué retient en substance qu'ils ont eu recours aux moyens de l'Etat soumis au secret de la défense nationale en méconnaissance des dispositions de l'article 706-102-1 du code de procédure pénale selon lesquelles le juge d'instruction peut prescrire le recours à de tels moyens selon les formes prévues au chapitre Ier du titre IV du livre Ier de ce code.
12. Ils en concluent que, faute d'avoir été ordonné par le juge d'instruction, ce recours ne pouvait intervenir à la seule initiative des services enquêteurs.
13. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé pour les motifs qui suivent.
14. En premier lieu, et dès lors que le juge d'instruction n'avait nullement restreint l'étendue de sa délégation à ce titre, l'officier de police judiciaire a pu régulièrement requérir, dans la liste des services habilités mentionnés à l'article D. 15-1-6 précité, la direction générale de la sécurité intérieure aux fins de saisine du service technique national de captation judiciaire qui lui est rattaché et qui encadre et met en oeuvre le recours aux moyens de l'Etat soumis au secret de la défense nationale.
15. En second lieu, dès lors que la mesure se déroule sous l'autorité et le contrôle du magistrat qui l'a autorisée et qui peut ordonner à tout moment son interruption, il est indifférent que le recours aux moyens de l'Etat résulte d'une réquisition de l'officier de police judiciaire plutôt que d'une prescription du juge d'instruction.
16. La cassation est par conséquent encourue de ce chef, rendant inopérant le moyen de cassation proposé pour M. [F].
Portée et conséquences de la cassation
17. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire.
18. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives aux annulations totales ou partielles des pièces cotées D 855 à D 959, D 467, D 468, D 469, D 471, D 472, D 475, D 481, D 484, D 486 à D 489, D 491, D 493, D 494, D 496, D 500 à D 507, D 509 à D 518, D 1727/3, D 1727/4 à D 1727/5, D 1733/9, D 2113/11 à D 2113/19, D 2113/23, D 2114/10, D 2114/15. Les autres dispositions seront donc maintenues.




Crim. 3 juin 2025 n° 24-82.142

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° F 24-82.142 F-D
N° 00738

ODVS 3 JUIN 2025

CASSATION

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


M. [M] [U] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-13, en date du 1er mars 2024, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de travail dissimulé et infraction à la législation relative aux commerçants et artisans, a prononcé sur les intérêts civils.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [M] [U], et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 16 décembre 2015, le tribunal correctionnel a déclaré M. [M] [U] coupable des infractions susvisées et a renvoyé l'affaire sur intérêts civils.
3. Par un nouveau jugement du 15 juin 2021, ce même tribunal, siégeant en formation à juge unique, a condamné l'intéressé à indemniser l'URSSAF d'Île-de-France de son préjudice financier.
4. M. [U] a relevé appel de cette décision
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce que le tribunal a siégé en formation collégiale, alors « que selon l'article 510 alinéa 2 du code de procédure pénale, lorsque le jugement attaqué a été rendu selon les modalités prévues au troisième alinéa de l'article 398 ou selon celles prévues à l'avant-dernier alinéa de l'article 464, la chambre des appels correctionnels est composée d'un seul de ces magistrats exerçant les pouvoirs confiés au président de chambre ; que la cour d'appel peut d'office décider de statuer en formation collégiale, sous réserve de constater la complexité de l'affaire ; qu'en l'espèce, le tribunal correctionnel avait statué sur les intérêts civils à juge unique ; que dès lors la cour d'appel qui a statué en formation collégiale, sans qu'il soit justifié de la complexité de l'affaire, a méconnu l'article 510 alinéa 2 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 464, alinéa 4, et 510, alinéa 2, du code de procédure pénale :
6. Selon le premier de ces textes, lorsque, après avoir statué sur l'action publique, le tribunal renvoie l'affaire à une date ultérieure pour statuer sur l'action civile, il est composé du seul président siégeant à juge unique.
7. Il résulte du second que, lorsque le jugement attaqué a été ainsi rendu en formation à juge unique, la chambre des appels correctionnels est composée d'un seul conseiller, sauf si le prévenu est en détention provisoire pour les faits qui lui sont reprochés, si l'appelant demande expressément que l'affaire soit examinée par une formation collégiale ou si le renvoi devant une telle formation semble justifié en raison de la complexité des faits.
8. En l'espèce, le tribunal correctionnel a prononcé sur les intérêts civils en formation à juge unique et la cour d'appel a siégé en formation collégiale.
9. En statuant dans une composition collégiale, en l'absence de toute demande des parties ou du ministère public, sans motiver sa décision au regard des critères légaux permettant de justifier un tel choix, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
10. La cassation est ainsi encourue.




Crim. 3 juin 2025 n° 24-85.666

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° M 24-85.666 F-D
N° 00744

ODVS 3 JUIN 2025

CASSATION

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


Mme [P] [Z], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 6e section, en date du 18 juin 2024, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée du chef de harcèlement moral, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction.
Un mémoire personnel et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Maziau, conseiller, et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Maziau, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseillers de la chambre, M. Tarabeux, avocat général, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 1er juillet 2021, Mme [P] [Z] a porté plainte et s'est constituée partie civile du chef notamment de harcèlement moral.
3. Par ordonnance du 27 septembre 2023, le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de harcèlement moral.
4. Mme [Z] a interjeté appel de cette ordonnance.
Examen des moyens
Sur les premier et deuxième moyens
Enoncé des moyens
5. Le premier moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction alors que les mentions de l'arrêt sont erronées en ce qu'elles précisent que Mme [Z] était assistée par un avocat quand tel n'était pas le cas.
6. Le deuxième moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction alors que la partie civile a demandé, par courrier adressé au procureur général, à recevoir une copie du dossier de la procédure, demande à laquelle il n'a pas été répondu.
Réponse de la Cour
7. Les moyens sont réunis.
Vu les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 114, 197 et 593 du code de procédure pénale :
8. Il se déduit des quatre premiers de ces textes que le respect des principes du contradictoire et de l'équilibre des droits des parties interdit à la chambre de l'instruction de statuer sur l'appel d'une ordonnance de non-lieu sans que la partie civile qui a choisi de se défendre sans avocat ait été mise en mesure d'obtenir la délivrance, si elle en a fait la demande, d'une copie du dossier de la procédure.
9. Selon le dernier, tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
10. En premier lieu, il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que, d'une part, le dossier comprenant le réquisitoire écrit du procureur général a été déposé au greffe de la chambre de l'instruction et tenu à la disposition de l'avocat de la partie civile, d'autre part, devant la chambre de l'instruction, Mme [Z] n'était pas assistée d'un avocat.
11. En second lieu, la partie civile a, par courrier du 19 avril 2024 adressé au procureur général, sollicité que lui soit communiquée une copie du dossier de la procédure, demande à laquelle il n'a pas été répondu.
12. En l'état de mentions contradictoires de l'arrêt qui laissent incertain le point de savoir si la partie civile était assistée d'un avocat et alors qu'elle a sollicité que lui soit délivrée une copie du dossier de la procédure sans qu'il soit établi qu'il ait été répondu à sa demande, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer si les prescriptions des articles 197, alinéa 3, et 114 du code de procédure pénale ont été respectées.
13. La cassation est encourue de ce chef.




Crim. 3 juin 2025 n° 24-86.337

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 24-86.337 F-D
N° 00730

ODVS 3 JUIN 2025

ANNULATION

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


M. [P] [T] a formé un pourvoi contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 15 octobre 2024, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs d'importation de stupéfiants en bande organisée, infractions à la législation sur les stupéfiants et associations de malfaiteurs, a déclaré non admis son appel de l'ordonnance du juge d'instruction le renvoyant devant le tribunal correctionnel.
Par ordonnance du 30 décembre 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen du pourvoi.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Chaline-Bellamy, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [P] [T], et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 6 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Chaline-Bellamy, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [P] [T] a été mis en examen des chefs susvisés.
3. Par ordonnance du 16 septembre 2024, le juge d'instruction a prononcé un non-lieu partiel s'agissant des faits d'importation de stupéfiants en bande organisée et d'association de malfaiteurs en vue de la préparation de ce crime et renvoyé M. [T] devant le tribunal correctionnel des chefs d'infractions à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de dix ans d'emprisonnement.
4. L'avocat de M. [T] a relevé appel de cette décision en précisant dans sa déclaration que « les motifs de la recevabilité de l'appel seront explicités par mémoire qui sera déposé en vue de l'audience de la chambre de l'instruction ».
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a dit que l'appel de M. [T] ne sera pas admis, alors :
« 1°/ d'une part, que la recevabilité de l'appel interjeté par le mis en examen contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel peut être appréciée, non seulement au vu des indications figurant sur l'acte d'appel, mais aussi en fonction des motifs de ce recours exposés par mémoire devant la Chambre de l'instruction ; que si le président de ladite Chambre peut déclarer non-admis l'appel du mis en examen avant d'avoir permis à ce dernier d'expliciter par mémoire les motifs de son appel, c'est à la condition sine qua non qu'une bonne administration de la justice le justifie ; que tel n'est pas le cas lorsque l'intéressé a explicitement indiqué dans son acte d'appel qu'il justifierait les motifs de son recours dans un mémoire ; qu'au cas d'espèce, il résulte des mentions de l'acte d'appel qu'il y a explicitement indiqué que « les motifs de recevabilité de l'appel seront explicités par mémoire » ; qu'il ne pouvait dès lors être exclu, avant le dépôt de ce mémoire, que l'exposant entendait faire valoir, au visa de l'article 186-3 du Code de procédure pénale, que les faits pour lesquels il a été renvoyé devant le tribunal correctionnel constituaient en réalité un crime, et qu'il aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises ou devant la cour criminelle départementale ; qu'il s'ensuit que la bonne administration de la justice ne justifiait pas que le président de la Chambre de l'instruction statue sans attendre le dépôt par l'exposant du mémoire annoncé dans la déclaration d'appel ; qu'en déclarant toutefois l'appel non-admis en affirmant à tort que « l'ordonnance susvisée n'est pas de celles dont l'article 186 du Code de procédure pénale autorise l'appel », le président de la Chambre de l'instruction, qui a excédé ses pouvoirs, a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 186, 186-3, 591 et 593 ;
2°/ d'autre part, que la recevabilité de l'appel interjeté par le mis en examen contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel peut être appréciée non seulement au vu des indications figurant dans l'acte d'appel, mais aussi en fonction des motifs de ce recours exposés par mémoire devant la Chambre de l'instruction ; que si le président de ladite Chambre peut déclarer non-admis l'appel du mis en examen avant d'avoir permis à ce dernier d'expliciter par mémoire les motifs de son appel, c'est à la condition que la procédure ait été suivie dès l'origine sous une qualification délictuelle et qu'il n'existe aucune possibilité de qualification criminelle des faits retenus ; qu'au cas d'espèce, les faits pour lesquels Monsieur [T] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel, qualifiés d'infractions à la législation sur les stupéfiants et de participation à une association de malfaiteurs, étaient, tels que présentés par le juge d'instruction dans son ordonnance, susceptibles de recevoir la qualification criminelle d'importation ou de complicité d'importation de stupéfiants en bande organisée en application de l'article 222-36, alinéa 2, et 121-7 du Code pénal ; qu'en retenant, pour dire l'appel formé contre l'ordonnance de renvoi non-admis, que « l'ordonnance susvisée n'est pas de celles dont l'article 186 du Code de procédure pénale autorise l'appel » quand l'exposant pouvait - ainsi qu'il l'avait annoncé au sein de l'acte d'appel - faire valoir par mémoire que les faits pour lesquels il était renvoyé devant le tribunal correctionnel étaient susceptibles de revêtir une qualification criminelle et qu'il devait, en conséquence, faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la Cour d'assises ou la Cour criminelle départementale, le président de la Chambre de l'instruction, qui a excédé ses pouvoirs, a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 186, 186-3, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
3°/ enfin, que la recevabilité de l'appel interjeté par le mis en examen contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel peut être appréciée non seulement au vu des indications figurant dans l'acte d'appel, mais aussi en fonction des motifs de ce recours exposés par mémoire devant la Chambre de l'instruction ; que si le président de ladite Chambre peut déclarer non-admis l'appel du mis en examen avant d'avoir permis à ce dernier d'expliciter par mémoire les motifs de son appel, c'est à la condition que la procédure ait été suivie dès l'origine sous une qualification délictuelle et qu'il n'existe aucune possibilité de qualification criminelle des faits retenus ; qu'au cas d'espèce, Monsieur [T] a initialement été poursuivi des chefs de crime d'importation non autorisée de stupéfiants et de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime ; qu'en retenant, pour dire l'appel formé contre l'ordonnance de renvoi non-admis, que « l'ordonnance susvisée n'est pas de celles dont l'article 186 du Code de procédure pénale autorise l'appel » quand l'exposant, qui avait initialement été poursuivi sous une qualification criminelle, pouvait - ainsi qu'il l'avait indiqué au sein de l'acte d'appel - faire valoir par mémoire que les faits renvoyés constituaient un crime et qu'il aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la Cour d'assises ou la Cour criminelle départementale, le président de la Chambre de l'instruction, qui a excédé ses pouvoirs, a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'Homme, 186, 186-3, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
6. Le grief pris de ce que l'appelant avait été initialement poursuivi sous une qualification criminelle est inopérant en ce que, suite à son seul appel, les dispositions de l'ordonnance de règlement emportant non-lieu sur les faits poursuivis sous une qualification criminelle sont devenues définitives.
Mais, sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
Vu l'article 186-3, alinéa premier, du code de procédure pénale :
7. Selon ce texte, la personne mise en examen peut interjeter appel des ordonnances prévues par le premier alinéa de l'article 179 du code de procédure pénale dans le cas où elle estime que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime qui aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation.
8. Pour dire non admis l'appel de M. [T], l'ordonnance attaquée énonce que la décision contestée n'est pas de celles dont l'article 186 du code de procédure pénale autorise l'appel.
9. En prononçant ainsi, le président de la chambre de l'instruction a excédé ses pouvoirs.
10. En effet, ce magistrat ne pouvait statuer sur l'appel avant que le demandeur ait exposé les motifs de son recours par mémoire devant la chambre de l'instruction sans constater que les faits poursuivis dès l'origine sous une qualification délictuelle ne comportaient aucune possibilité de qualification criminelle.
11. L'annulation est par conséquent encourue.




Crim. 3 juin 2025 n° 25-80.497

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° P 25-80.497 FS-D
N° 00814



3 JUIN 2025
SL2




QPC INCIDENTE : NON LIEU À RENVOI AU CC QPC INCIDENTE : NON LIEU A RENVOI AU CC






M. BONNAL président,






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025


M. [X] [W] a présenté, par mémoire spécial reçu le 14 avril 2025, deux questions prioritaires de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 18 novembre 2024, qui a déclaré irrecevable sa demande d'annulation de pièces de la procédure.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [X] [W], et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, MM. Cavalerie, Maziau, Mme Thomas, M. Hill, conseillers de la chambre, M. Violeau, Mme Merloz, M. Pradel, conseillers référendaires, M. Quintard, avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

1. La première question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions des articles 170 et 173 du Code de procédure pénale, qui interdisent à la personne poursuivie dans le cadre d'une procédure pénale étrangère à laquelle ont été versés des éléments issus d'une information judiciaire française, de saisir la chambre de l'instruction d'une demande d'annulation des actes irréguliers sur lesquels reposent ces éléments, méconnaissent-elles le droit à un recours effectif, le droit à un procès équitable et les droits de la défense, garantis par l'article 16 de la Déclaration de 1789 ? »
2. La seconde question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions des articles 170, 173, 694-41 et 695-9-31 et suivants du code de procédure pénale, qui interdisent à la personne poursuivie dans le cadre d'une procédure pénale ouverte dans un Etat membre de l'Union européenne, de solliciter devant la chambre de l'instruction l'annulation d'actes irréguliers issus d'une information judiciaire française et transmis aux autorités de cet Etat membre par le biais d'un échange simplifié d'information, alors qu'elles permettent à l'intéressé de solliciter l'annulation des mêmes actes lorsqu'ils sont réalisés dans le cadre d'une demande décision d'enquête européenne émanant du même Etat membre, méconnaissent-elles le droit à un recours effectif, le droit à un procès équitable et les droits de la défense, garantis par l'article 16 de la Déclaration de 1789 ? »
Sur la première question prioritaire de constitutionnalité
3. Les dispositions contestées sont applicables à la procédure et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
4. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
5. La question posée ne présente pas un caractère sérieux, pour les motifs qui suivent.
6. D'une part, en réservant, au cours de l'information, au juge d'instruction, au procureur de la République, au témoin assisté ou aux parties la possibilité de contester la régularité d'actes ou de pièces versés au dossier de la procédure, en application des articles 170 et 173 du code de procédure pénale, le législateur a entendu préserver le secret de l'enquête et de l'instruction et protéger les intérêts des personnes concernées par celles-ci.
7. Ce faisant, il a poursuivi les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et de recherche des auteurs d'infractions et entendu garantir le droit au respect de la vie privée et de la présomption d'innocence, qui résulte des articles 2 et 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, sans porter une atteinte disproportionnée aux principes dont la violation est invoquée.
8. D'autre part, les griefs pris de la violation des principes constitutionnels du respect des droits de la défense, du droit à un recours effectif et du droit à un procès équitable sont inopérants dès lors que le demandeur, qui allègue la violation de ces principes devant une juridiction étrangère, ne fait l'objet d'aucune procédure en France.
Sur la seconde question prioritaire de constitutionnalité
9. En l'état des pièces de la procédure, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer que les seules dispositions effectivement contestées par la question, à savoir les articles 695-9-31 et suivants du code de procédure pénale relatifs à l'échange simplifié d'informations, à supposer même qu'elles soient définies de manière suffisamment précise, sont applicables à la procédure.
10. Il n'y a pas lieu, dès lors, de renvoyer les questions prioritaires de constitutionnalité.




Crim. 3 juin 2025 n° 25-80.792

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° J 25-80.792 FS-D
N° 00815



3 JUIN 2025
SL2




QPC INCIDENTE : NON LIEU À RENVOI AU CC QPC INCIDENTE : NON LIEU A RENVOI AU CC






M. BONNAL président,




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 3 JUIN 2025

MM. [U] [G], [N] [G], [L] [G] et M. [Z] [K] « dit [G] » ont présenté, par mémoires spéciaux reçus le 14 avril 2025, deux questions prioritaires de constitutionnalité à l'occasion des pourvois formés contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 2 décembre 2024, qui a déclaré irrecevable leur demande d'annulation de pièces de la procédure.
Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de MM. [U] [G], [L] [G], [N] [G] et [Z] [K] dit [G], et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 20 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, MM. Cavalerie, Maziau, Mme Thomas, M. Hill, conseillers de la chambre, M. Violeau, Mme Merloz, M. Pradel, conseillers référendaires, M. Quintard, avocat général, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La première question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions des articles 170 et 173 du code de procédure pénale, qui interdisent à la personne poursuivie dans le cadre d'une procédure pénale étrangère à laquelle ont été versés des éléments issus d'une information judiciaire française, de saisir la Chambre de l'instruction d'une demande d'annulation des actes irréguliers sur lesquels reposent ces éléments, méconnaissent-elles le droit à un recours effectif, le droit à un procès équitable et les droits de la défense, garantis par l'article 16 de la Déclaration de 1789 ? ».
2. La seconde question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions des articles 170, 173, 694-41 et 695-9-31 et suivants du code de procédure pénale, qui interdisent à la personne poursuivie dans le cadre d'une procédure pénale ouverte dans un Etat membre de l'Union européenne, de solliciter devant la Chambre de l'instruction l'annulation d'actes irréguliers issus d'une information judiciaire française et transmis aux autorités de cet Etat membre par le biais d'un échange simplifié d'information, alors qu'elles permettent à l'intéressé de solliciter l'annulation des mêmes actes lorsqu'ils sont réalisés dans le cadre d'une demande décision d'enquête européenne émanant du même Etat membre, méconnaissent-elles le droit à un recours effectif, le droit à un procès équitable et les droits de la défense, garantis par l'article 16 de la Déclaration de 1789 ? ».
Sur la première question prioritaire de constitutionnalité
3. Les dispositions contestées sont applicables à la procédure et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.
4. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.
5. La question posée ne présente pas un caractère sérieux, pour les motifs qui suivent.
6. D'une part, en réservant, au cours de l'information, au juge d'instruction, au procureur de la République, au témoin assisté ou aux parties la possibilité de contester la régularité d'actes ou de pièces versés au dossier de la procédure, en application des articles 170 et 173 du code de procédure pénale, le législateur a entendu préserver le secret de l'enquête et de l'instruction et protéger les intérêts des personnes concernées par celles-ci.
7. Ce faisant, il a poursuivi les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et de recherche des auteurs d'infractions et entendu garantir le droit au respect de la vie privée et de la présomption d'innocence, qui résulte des articles 2 et 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, sans porter une atteinte disproportionnée aux principes dont la violation est invoquée.
8. D'autre part, les griefs pris de la violation des principes constitutionnels du respect des droits de la défense, du droit à un recours effectif et du droit à un procès équitable sont inopérants dès lors que le demandeur, qui allègue la violation de ces principes devant une juridiction étrangère, ne fait l'objet d'aucune procédure en France.
Sur la seconde question prioritaire de constitutionnalité
9. Les seules dispositions effectivement contestées par la question, à savoir les articles 695-9-31 et suivants du code de procédure pénale relatifs à l'échange simplifié d'informations, à supposer même qu'elles soient définies de manière suffisamment précise, ne sont pas applicables à la procédure aux termes de la requête en nullité qui fait état d'une transmission des pièces en exécution de plusieurs décisions d'enquête européenne.
10. Dès lors, il n'y a pas lieu de renvoyer les questions prioritaires de constitutionnalité au Conseil constitutionnel.




Crim. 28 mai 2025 n° 24-81.300

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 24-81.300 F-D
N° 00715

ECF 28 MAI 2025

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025

Le procureur général près la cour d'appel de Paris et la commune de [Localité 1], partie civile, ont formé des pourvois contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre 2-12, en date du 19 février 2024, qui a déclaré irrecevables, d'une part, leurs appels du jugement du tribunal correctionnel ayant relaxé M. [M] [E] des chefs de favoritisme, prise illégale d'intérêts et trafic d'influence passif et MM. [Z] [I] et [Y] [T] des chefs de favoritisme, prise illégale d'intérêts et recel et, d'autre part, la constitution de partie civile de la commune de [Localité 1].
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de M. Gillis, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la commune de [Localité 1], les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [M] [E], les observations de Me Haas, avocat de M. [Y] [T], les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, Lassalle-Byhet, avocat de M. [Z] [I], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gillis, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 22 octobre 2021, le tribunal correctionnel a relaxé MM. [M] [E], [Z] [I] et [Y] [T], lesquels étaient poursuivis notamment des chefs de favoritisme et prise illégale d'intérêts.
3. Le procureur de la République et la commune de [Localité 1], partie civile, ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le moyen proposé par le procureur général près la cour d'appel de Paris et le moyen proposé pour la commune de [Localité 1]
Enoncé des moyens
4. Le moyen, pris en sa seconde branche, proposé par le procureur général près la cour d'appel de Paris, est pris de la violation de l'article 502 du code de procédure pénale.
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable l'appel du procureur de la République, alors que la cour d'appel ne pouvait déduire de ce que l'acte d'appel porte uniquement la mention qu'il a été reçu par un adjoint administratif son absence de présomption de régularité.
6. Le moyen proposé pour la commune de [Localité 1] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a constaté la nullité de son acte d'appel, a déclaré cet appel irrecevable et dit que les dispositions relatives à son action civile sont définitives, alors :
« 1°/ que, premièrement, toute personnes à droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal ; qu'il en est ainsi lorsque la personne a fait appel dans les forme requises et a signé la déclaration d'appel avec la personne se présentant comme greffier ; qu'en déclarant néanmoins l'appel de la commune de [Localité 1] irrecevable, « au vu des irrégularités présentées par l'acte d'appel reçu par une adjointe administrative », la cour d'appel a porté atteinte à son droit d'accès à une juridiction, et partant a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article R.123-14 du code de l'organisation judiciaire et les articles préliminaire, 2, 3, 497, 502, 503, 591 et 593 du Code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
7. Les moyens sont réunis.
Vu les articles préliminaire du code de procédure pénale et 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme :
8. Selon le premier de ces textes, la procédure pénale doit être équitable et selon le second toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement.
9. Il se déduit de ces textes que, si le droit d'exercer un recours peut être soumis à des conditions légales, les tribunaux doivent, en appliquant des règles de procédure, éviter un excès de formalisme qui porterait atteinte à l'équité du procès.
10. Ainsi, l'irrégularité d'un acte d'appel en raison du défaut de compétence de la personne l'ayant reçu ne peut être opposée à une partie appelante dès lors que ce défaut de compétence n'était pas apparent.
11. Pour déclarer irrecevables les appels formés par le procureur de la République et la commune de [Localité 1] du jugement du tribunal correctionnel, l'arrêt attaqué retient que ces appels ont été déposés devant des adjoints administratifs en fonction au service d'accueil unique du justiciable de la juridiction ayant rendu la décision.
12. Les juges ajoutent que la méconnaissance des dispositions de l'article 502 du code de procédure pénale, qui prévoit que la déclaration d'appel doit être faite au greffier de la juridiction qui a rendu la décision attaquée, conduit à la nullité de l'acte d'appel et que le ministère public ne soutient pas en l'espèce l'existence d'une force majeure qui aurait empêché le respect de ces dispositions.
13. Ils énoncent ensuite que les agents appartenant à la catégorie C de la fonction publique peuvent, en application de l'article R. 123-14 du code de l'organisation judiciaire, à titre exceptionnel et temporaire, après avoir prêté le serment prévu à l'article 24 du décret n° 2015-1275 du 13 octobre 2015, être chargés des fonctions conférées aux greffiers énumérées à l'article R. 123-13 et d'une partie des fonctions énumérées à l'article R. 123-5 du même code.
14. Ils ajoutent que s'il n'appartient pas aux appelants de vérifier la régularité de la qualité de l'agent qui reçoit l'appel, la présomption de régularité ne peut s'appliquer dès lors que les mentions figurant sur l'acte ne correspondent pas aux exigences textuelles de l'article 502 du code de procédure pénale.
15. Ils retiennent que cette présomption aurait trouvé à s'appliquer si l'acte d'appel avait mentionné qu'il avait été reçu par un adjoint administratif « faisant fonction de greffier » ou un adjoint administratif « habilité » ou « ayant prêté serment » mais que ce n'est pas le cas en l'espèce, où il est uniquement indiqué que l'acte a été reçu par un adjoint administratif, ce qui ne permet pas de s'assurer de la capacité de l'agent.
16. Ils indiquent encore que la mention « P/ le greffier » contredit également la présomption de régularité puisqu'elle signifie que l'adjoint administratif n'a pas pris l'acte à raison de sa qualité mais sur instruction, ordre, délégation du greffier, ce qui n'est pas prévu par les textes.
17. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé pour les motifs qui suivent.
18. En effet, d'une part, il se déduit de ce que le service d'accueil unique du justiciable a accepté de recevoir la déclaration d'appel une apparence de ce que cet acte a été reçu par une personne compétente pour ce faire.
19. D'autre part, l'absence d'apparence de régularité de l'acte d'appel reçu au service d'accueil unique du justiciable par un adjoint administratif ne peut se déduire de ce qu'il n'y est pas mentionné que cet adjoint n'était pas assermenté, habilité ou faisait fonction de greffier ni de ce qu'il est signé sous une mention « P/ le greffier ».
20. La cassation est par conséquent encourue, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs.
Portée et conséquences de la cassation
21. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions ayant déclaré nuls les actes d'appel du procureur de la République et de la commune de [Localité 1], irrecevables ces appels et définitives les dispositions relatives à l'action publique et à l'action civile de ladite commune. Les autres dispositions seront donc maintenues.




Crim. 28 mai 2025 n° 24-81.006

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° W 24-81.006 F-D
N° 00713

ECF 28 MAI 2025

REJET

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025


M. [O] [G], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Basse-Terre, en date du 11 janvier 2024, qui, dans la procédure suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée du chef d'escroquerie, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Jaillon, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [O] [G], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Jaillon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. M. [O] [G] a déposé plainte auprès du procureur de la République, puis, le 12 octobre 2016, devant le juge d'instruction où il s'est constitué partie civile, du chef d'escroquerie.
3. Le 15 septembre 2017, une information a été ouverte du chef d'escroquerie commise depuis le 1er avril 2013 et jusqu'au 12 octobre 2016, au préjudice de M. [G].
4. Il résulte des déclarations de ce dernier que, propriétaire d'un laboratoire d'analyses médicales, il a vendu son activité pour le prix de 1 300 000 euros. Mme [T], en charge de sa comptabilité, lui a proposé un montage financier lui permettant de bénéficier d'une exonération fiscale, passant par la création d'une société, la société [2] ayant notamment pour objet social le conseil en affaires et gestion d'entreprises.
5. A la suite de son accord, cette société a été créée le 1er juillet 2013, Mme [T] nommée gérante, apportant sa clientèle estimée à 9 100 euros et M. [G] la somme en numéraire de 900 900 euros. Mme [T] a ouvert un compte sur lequel elle a une procuration.
6. Parallèlement, Mme [T] a proposé un placement à M. [G] et lui a présenté M. [J], directeur de l'association des [1] ([1]) qui souhaitait contracter un prêt.
7. C'est ainsi que la société [2] représentée par sa gérante et en accord avec M. [G] a consenti, le 16 septembre 2013, un prêt à intérêt de 500 000 euros au taux de 5 % d'intérêts à l'[1], pour une durée de six mois à compter du 1er octobre 2013.
8. A l'échéance du contrat de prêt, le 31 mars 2014, l'[1] n'a pas remboursé les sommes empruntées, faute, selon M. [J], de subventions suffisantes versées par la Région de Guadeloupe.
9. Lors de la remise des fonds à l'emprunteur, Mme [T] a effectué un virement du compte de la société [2] d'un montant de 22 000 euros sur ses comptes personnels.
10. Mme [T] et M. [J] ont été placés sous le statut de témoin assisté du chef d'escroquerie ayant déterminé la remise de la somme de 500 000 euros.
11. Le 19 septembre 2022, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu.
12. M. [G] a relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deuxième, quatrième et cinquième branches
13. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le moyen, pris en ses première et troisième branches
Enoncé du moyen
14. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque, alors :
« 1°/ que le juge d'instruction est tenu d'informer sur tous les faits dont il a été régulièrement saisi par une plainte avec constitution de partie civile ; qu'à l'appui de sa plainte pour escroquerie avec constitution de partie civile, M. [G] faisait notamment valoir que Mme [T] et M. [J] l'avaient trompé afin qu'il consente un prêt à l'[1], via la constitution de la société [2] ; que pour dire n'y avoir lieu à suivre, la chambre de l'instruction a énoncé « que l'absence de réponse de la part du Conseil Régional de Guadeloupe ne permet pas de contredire la version avancée par [P] [J] de versements opérés par l'[1] dans le cadre de son fonctionnement, dans l'attente de subventions qui en réalité n'auraient jamais été versées » et que « d'après le témoignage de Mme [H], cadre bancaire en charge du compte bancaire de [2], lorsque [L] [T], agissant en qualité de gérante de [2], demandait à l'établissement bancaire de procéder à des virements de sommes importantes, elle faisait des contre-appels à M. [G], qui pourtant en sa qualité d'associé n'avait selon les statuts de celle-ci aucun pouvoir de direction ou de disposition des sommes gérées par la société, qui les confirmait par téléphone. Il avait tout validé sauf le dernier virement de 22.000 euros. Il résulte de ce témoignage que les sommes versées à [L] [T] correspondaient à la rémunération de celle-ci, que [O] [G] en était systématiquement informé et qu'il les validait, à l'exception de la dernière, qui avait donné lieu à l'établissement d'une reconnaissance de dettes et du remboursement d'une somme de 10.000 euros » (ibid) ; qu'il en résulte que la chambre de l'instruction, qui s'est bornée à examiner, s'agissant de l'élément matériel de l'infraction d'escroquerie, d'une part, les virements opérés par l'[1] au profit de tiers et de Mme [T] à compter du 26 septembre 2013, d'autre part, les virements ordonnés par Mme [T] à son profit à partir de comptes de la société [2], n'a pas recherché si l'élément matériel de l'infraction était constitué par le fait d'avoir consenti un prêt au profit de l'[1] via la constitution de la société [2] ; qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 80, 85, 86 et 212 du code de procédure pénale ;
3°/ qu'au titre de son élément matériel, l'escroquerie suppose une tromperie ayant conduit à la remise d'un bien au préjudice d'une victime, la loi n'exigeant ni une remise entre les mains de l'auteur du délit ou entre celles de ses complices, ni que les valeurs escroquées aient tourné au profit de l'auteur du délit ; qu'en énonçant, pour dire n'y avoir lieu à suivre contre M. [J] de ce chef, qu' « aucun enrichissement, ni de l'association ni de son dirigeant n'ont été démontrés », la chambre de l'instruction, qui a exigé que les valeurs escroquées aient tourné au profit de M. [J] ou aient été remises entre ses mains, a méconnu l'article 313-1 du code pénal. »
Réponse de la Cour
15. Pour confirmer l'ordonnance de non-lieu, l'arrêt attaqué énonce que l'information n'a pas permis de contredire les affirmations des témoins assistés, et qu'en l'absence de réponse du conseil régional de Guadeloupe rien ne permet de remettre en cause la version avancée par M. [J] de versements opérés par l'[1] dans le cadre de son fonctionnement, dans l'attente de subventions qui en réalité n'auraient jamais été versées.
16. Les juges relèvent qu'aucun enrichissement, ni de l'association, ni de son dirigeant, n'a été démontré.
17. Ils ajoutent que les manoeuvres frauduleuses constitutives du délit d'escroquerie reproché à M. [J] ne sont pas établies.
18. Ils retiennent que les virements de la société [2] au profit de Mme [T], qui correspondent à sa rémunération, ont été validés par M. [G] à l'exception du dernier versement de 22 000 euros.
19. Ils concluent qu'ils ne peuvent donc caractériser des manoeuvres frauduleuses.
20. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.
21. En effet, elle a, par une appréciation souveraine, vérifié l'absence des manoeuvres frauduleuses alléguées par la partie civile, qui auraient, via la création de la société [2], déterminé la remise de la somme de 500 000 euros.
22. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.





Crim. 28 mai 2025 n° 24-81.503

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° M 24-81.503 F-D
N° 00714

ECF 28 MAI 2025

CASSATION

M. BONNAL président,




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025


Le procureur général près la cour d'appel d'Angers, a formé un pourvoi contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 13 février 2024, qui, dans la procédure suivie contre M. [F] [T], la société [2] et la société [1], du chef de favoritisme pour le premier, complicité de favoritisme pour le deuxième et recel pour le troisième, a prononcé la nullité des poursuites.
Des mémoires en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de Mme Jaillon, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [F] [T], les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat des sociétés [2] et [1], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025, les avocats ayant eu la parole en dernier, où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Jaillon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le 26 juin 2013, le responsable commercial de la société [4] a dénoncé au procureur financier près la chambre régionale des comptes de possibles anomalies ayant entaché le marché public afférent à la vente et l'installation d'un cube vidéo lors de la construction de la salle Arena [Localité 3] dans la ville de [Localité 5] (49).
3. A la suite de son rapport, le procureur financier près la chambre régionale des comptes a, le 17 septembre 2014, adressé un rapport de signalement au procureur de la République.
4. M. [F] [T], maire de la commune de Trélazé, la société [2] et la société [1] ont été cités devant le tribunal correctionnel des chefs susvisés.
5. Les juges du premier degré ont rejeté l'exception de nullité des citations et relaxé les prévenus.
6. Le procureur de la République, puis les prévenus ont relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
7. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le moyen, pris en ses autres branches
Enoncé du moyen 8. Le moyen, pris de la violation de l'article 551 du code de procédure pénale, critique l'arrêt en ce qu'il a constaté la nullité des citations des prévenus, alors :
1°/ que l'obligation d'une nouvelle mise en concurrence en cas d'avenant modifiant l'équilibre économique du marché en faveur d'un titulaire d'une manière qui n'était pas prévue dans le marché initial, dont il est reproché à ces derniers la violation, est, en des termes très précis, contenue dans la citation délivrée aux prévenus, et ce, en dépit de l'absence de référence expresse aux dispositions législatives et réglementaires ;
2°/ que la règle édictée par ces textes correspond à un principe de base de la commande publique ;
4°/ qu'à supposer cette seule omission constitutive d'une irrégularité, elle n'entraîne pas, au terme de la jurisprudence, nullité de la citation dès lors que le prévenu a été en mesure de préparer sa défense.
Réponse de la Cour
Vu l'article 551 du code de procédure pénale :
9. Il résulte de ce texte que la citation telle que complétée par les pièces qui lui sont jointes est régulière lorsqu'elle énonce les faits poursuivis et vise les textes de loi qui les répriment.
10. Pour faire droit aux conclusions des prévenus invoquant la nullité des citations, l'arrêt attaqué énonce que la lecture des actes de poursuite ne permet pas de savoir quel est le texte réglementaire ou législatif violé par les prévenus qui caractériserait ainsi l'élément matériel de l'infraction de favoritisme.
11. Les juges relèvent qu'en ne mentionnant pas dans les actes de poursuite les textes que les prévenus auraient méconnus, le ministère public ne met pas ceux-ci en état de se défendre, pas plus que le juge pénal en état de se prononcer sur l'élément légal de l'infraction.
12. Ils en déduisent que les citations délivrées aux prévenus ne répondent pas aux exigences de l'article 551 du code de procédure pénale.
13. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé.
14. En effet, les citations précisent suffisamment les faits reprochés, visent l'absence de mise en concurrence rendue nécessaire du fait du changement de la consistance du lot initialement attribué à la société [1] ainsi que les textes de répression, permettant aux prévenus, même en l'absence de référence aux dispositions législatives et réglementaires applicables, de préparer utilement leur défense sur les délits de favoritisme, de complicité et de recel reprochés. 15. La cassation est par conséquent encourue.




Crim. 28 mai 2025 n° 25-82.223

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 25-82.223 F-D
N° 00878

GM 28 MAI 2025


IRRECEVABILITE REJET


M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025


M. [K] [T] a formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, en date du 13 mars 2025, qui, dans la procédure suivie contre lui, des chefs de viol aggravé et détention d'images pédopornographiques, a rejeté sa demande de mise en liberté.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Michon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de M. [K] [T], et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 28 mai 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Michon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. A la suite d'une information, M. [K] [T] a été, ainsi que de nombreux autres prévenus, mis en accusation des chefs rappelés ci-dessus devant la cour criminelle départementale par arrêt du 5 octobre 2023.
3. Il a été condamné à dix ans de réclusion criminelle par arrêt de cette juridiction du 19 décembre 2024, dont il a interjeté appel, et placé en détention.
4. Le 13 janvier 2025, M. [T] a formé une demande de mise en liberté devant la chambre de l'instruction.
Examen de la recevabilité du pourvoi n° 2025/10
5. Le demandeur, ayant épuisé, par l'exercice qu'il en avait fait le même jour, 13 mars 2025, en formant le pourvoi n° 2025/9, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision.
6. Seul est recevable le pourvoi n° 2025/9.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
7. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le moyen, pris en ses autres branches Enoncé du moyen
8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la demande de mise en liberté de M. [T], alors :
« 3°/ que dans son mémoire régulièrement déposé, M. [T] expliquait que la détention provisoire pendant l'instruction avait eu des effets dévastateurs sur sa santé mentale, ce qui avait conduit à sa mise en liberté et à son suivi socio-judiciaire avec injonction de soin ; en retenant, pour juger justifié son maintien en détention, le risque de représailles pesant M. [T] sans répondre à cette articulation essentielle de son mémoire établissant l'effet délétère de la détention sur sa santé, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 593 du code de procédure pénale ;
4°/ que dans son mémoire régulièrement déposé, M. [T] rappelait les conclusions d'expertise établissant son absence de perversion sexuelle et de dangerosité ainsi que ses déclarations manifestant son empathie pour Mme [O] et la difficulté pour lui de vivre avec la conscience de ses actes ; en déduisant, pour juger justifié son maintien en détention, le risque de renouvellement de l'infraction du seul constat, non étayé, d'absence de prise de conscience de la gravité des faits, sans procéder à un examen global de la situation de M. [T] au regard de l'ensemble des circonstances qu'il invoquait, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 143-1, 144, 148-1 et 593 du code de procédure pénale ;
5°/ que dans son mémoire régulièrement déposé, M. [T] rappelait son contrôle judiciaire inviolé pendant deux ans d'instruction, sa comparution libre devant la cour criminelle départementale, y compris après les très lourdes réquisitions, et ses gages de réinsertion professionnelle et produisait une offre d'hébergement compatible avec une surveillance électronique ; qu'en jugeant insuffisantes ses garanties de représentation aux seuls motifs que, compte tenu de la lourde peine encourue, M. [T] pourrait être incité à ne pas se présenter devant la cour d'assises d'appel, sans procéder à un examen global de la situation de M. [T] au regard de l'ensemble des circonstances qu'il invoquait, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 143-1, 144, 148-1 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
9. Pour rejeter la demande de mise en liberté, l'arrêt attaqué énonce notamment que le déroulement du procès et les conditions dans lesquelles les accusés libres ont été pris à partie font craindre des actions violentes à l'égard des personnes mises en cause, dont M. [T], dont le nom a été diffusé sur les réseaux sociaux.
10. Les juges ajoutent que les risques de renouvellement de faits d'infraction sexuelle restent particulièrement élevés compte tenu de l'absence de prise en compte de la gravité des faits par le demandeur, mais aussi de sa consultation régulière de sites de rencontre proposant des pratiques sexuelles déviantes et de sa consultation d'images pédopornographiques.
11. Ils précisent qu'il convient également de s'assurer de ses garanties de représentation en justice, M. [T] n'ayant pu que prendre conscience de la lourde peine encourue et étant, selon l'arrêt de première instance, sans emploi.

12. En statuant ainsi, par des motifs relevant de son appréciation souveraine et dès lors qu'elle n'avait pas à suivre le demandeur dans le détail de son argumentation, la chambre de l'instruction a justifié sa décision.
13. Ainsi, le moyen doit être écarté.
14. Par ailleurs, l'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 143-1 et suivants du code de procédure pénale.




Crim. 28 mai 2025 n° 24-82.910

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 24-82.910 F-D
N° 00717

ECF 28 MAI 2025

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025

M. [N] [T], Mme [Y] [C] et M. [O] [L] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Papeete, chambre correctionnelle, en date du 18 avril 2024, qui, pour tentative d'inscription indue sur une liste électorale, a condamné, le premier, à neuf mois d'emprisonnement avec sursis probatoire, 1 000 000 de francs CFP d'amende et cinq ans d'inéligibilité, la deuxième, à six mois d'emprisonnement avec sursis, 500 000 francs CFP d'amende et trois ans d'inéligibilité, et le troisième, pour faux et usage, à neuf mois d'emprisonnement avec sursis et 500 000 francs CFP d'amende.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire a été produit pour M. [N] [T] et Mme [Y] [C].
Sur le rapport de M. Gillis, conseiller référendaire, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [N] [T] et de Mme [Y] [C], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gillis, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 27 septembre 2022, le tribunal correctionnel a déclaré M. [N] [T] et Mme [Y] [C] coupables de tentatives d'inscription indue sur les listes électorales et M. [O] [L] coupable de faux et usage de faux.
3. Les prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Déchéance du pourvoi formé par M. [L]
4. M. [L] n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale.
Examen des pourvois formés par M. [T] et Mme [C]
Sur les premier, deuxième et cinquième moyens
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur les troisième et sixième moyens
Enoncé des moyens
6. Le troisième moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [T] à une peine d'emprisonnement délictuel de neuf mois avec sursis probatoire, alors « que toute peine prononcée par la juridiction doit être individualisée et déterminée dans son quantum et sa nature en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu'en retenant que la peine d'emprisonnement de neuf mois avec sursis probatoire prononcée par le tribunal correctionnel était justifiée en ce qu'elle constituait une sanction adaptée à la gravité des faits et justifiée « par les éléments de sa personnalité dont la cour dispose en particulier de son casier judiciaire déjà chargé », la cour d'appel, qui n'a pas individualisé et personnalisé la peine d'emprisonnement en prenant en considération sa situation matérielle, familiale et sociale, a violé les articles 130-1, 132-1, 132-19 du code pénal et les articles 485-1, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
7. Le sixième moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclarée Mme [C] coupable de tentative d'inscription indue sur les listes électorales et l'a condamnée à une peine d'emprisonnement délictuel de six mois avec sursis, alors « que toute peine prononcée par la juridiction doit être individualisée et déterminée dans son quantum et sa nature en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu'en retenant que la peine d'emprisonnement de six mois avec sursis simple prononcée par le tribunal correctionnel était justifié en ce qu'elle constituait une sanction adaptée à la gravité des faits et justifiée par les « éléments de personnalité dont la cour dispose en particulier de son casier judiciaire déjà chargé », la cour d'appel, qui n'a pas individualisé et personnalisé la peine d'emprisonnement en ne s'intéressant pas aux éléments de sa situation matérielle, familiale et sociale, a violé les articles 130-1, 132-1, 132-19 du code pénal, ensemble les articles 485-1, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
8. Les moyens sont réunis.
Vu les articles 485-1 et 593 du code de procédure pénale :
9. Selon le premier de ces textes, en matière correctionnelle, le choix de la peine doit être motivé au regard des dispositions des articles 132-1 et 132-20 du code pénal, sauf s'il s'agit d'une peine obligatoire ou de la confiscation du produit ou de l'objet de l'infraction. Il en résulte qu'à l'exception de ces cas, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle.
10. Selon le second, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
11. Pour confirmer le jugement en ce qu'il a condamné M. [T] à neuf mois d'emprisonnement avec sursis probatoire, l'arrêt attaqué retient que cette peine constitue une sanction adaptée à la gravité des faits et que le prévenu ayant déjà exercé des mandats publics, il aurait dû, plus que tout autre, se conformer à la loi.
12. Les juges ajoutent que cette peine est également justifiée par les éléments de personnalité dont la cour d'appel dispose, en particulier son casier judiciaire déjà chargé.
13. Pour confirmer le jugement en ce qu'il a condamné Mme [C] à six mois d'emprisonnement avec sursis, l'arrêt retient que cette peine constitue une sanction adaptée à la gravité des faits commis ainsi qu'aux éléments de personnalité dont la cour d'appel dispose.
14. En se déterminant ainsi, la cour d'appel, qui ne s'est pas expliquée sur la situation personnelle des prévenus, n'a pas justifié sa décision.
15. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
16. Sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés, la cassation sera limitée aux peines prononcées à l'encontre de M. [T] et Mme [C]. Les autres dispositions seront donc maintenues.




Civ.2 28 mai 2025 n° 23-21.644

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 28 mai 2025



Cassation partielle

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 524 F-D
Pourvoi n° B 23-21.644


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2025
La société L'Équité, société d'assurances et de réassurances contre les risques de toute nature, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 23-21.644 contre l'arrêt rendu le 22 juin 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-6), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à l'Union départementale des associations familiales de Martinique, dont le siège est [Adresse 3], prise en sa qualité de tutrice légale de M. [D] [I],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société L'Équité, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Axa France IARD, après débats en l'audience publique du 9 avril 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 22 juin 2023), le 19 août 2008, alors qu'il était passager d'une motocyclette assurée par la société L'Équité, M. [I] a été grièvement blessé dans un accident de la circulation impliquant également un véhicule automobile assuré par la société Axa France IARD (la société Axa).
2. En exécution d'un jugement rendu le 30 juillet 2012 par un tribunal correctionnel statuant sur intérêts civils et ayant condamné in solidum les conducteurs des deux véhicules à payer à M. [I] la somme de 3 517 727,06 euros en réparation de ses préjudices, provisions déduites, chacun des assureurs a versé à ce dernier la somme de 1 758 863,53 euros.
3. Par un arrêt infirmatif du 13 décembre 2013, le montant de cette condamnation in solidum a été réduite à la somme de 1 128 754,82 euros.
4. En 2018, la société Axa a assigné l'Union départementale des associations familiales de Martinique (l'UDAF), en sa qualité de tutrice de M. [I], et la société L'Équité, aux fins d'obtenir la restitution par la victime des sommes indûment perçues en exécution du jugement du 30 juillet 2012 et la condamnation de l'autre assureur à lui rembourser toutes les sommes versées à la suite de l'accident, au titre de son recours en contribution à la dette.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. La société L'Équité fait grief à l'arrêt de la condamner à régler à la société Axa la somme de 858 925,32 euros, alors « que le codébiteur tenu in solidum, qui a exécuté l'obligation, ne peut, même s'il agit par subrogation, répéter contre les autres débiteurs que les part et portion de chacun d'eux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les sociétés L'Équité et Axa "ont réglé chacune 1 758 863,53 euros à la victime" en exécution du jugement du 30 juillet 2012 ; que la société L'Équité expliquait qu'à la suite de l'infirmation de ce jugement par l'arrêt du 13 décembre 2013, l'UDAF lui avait remboursé la somme de 1 233 486,12 euros ; qu'après avoir évalué à 85 % la part de la dette incombant à la société L'Équité et à 15 % la part incombant à la société Axa, la cour d'appel a retenu que "la société Axa justifie avoir versé les sommes de 1 758 863,53 euros + 40 000,00 euros = 1 798 863,53 euros", que "sa contribution à la dette est de 1 798 863,53 euros x 15 % = 269 829,53 euros", qu' "elle peut prétendre à la restitution d'une somme de 1 798 863,53 euros - 269 829,53 euros = 1 529 034,00 euros, de laquelle se déduit la somme de 670 108,87 euros restituée par l'UDAF le 21 septembre 2022, soit un montant de 858 925,32 euros restant dû par la société L'Équité à la société Axa" ; qu'en statuant ainsi, quand il convenait, pour calculer les sommes dues par la société L'Équité au titre de sa contribution à la dette, d'appliquer le taux de 85 % au montant de la dette, soit 1 128 754,63 euros, et non au montant payé en partie indûment par la société Axa, avant de soustraire les sommes versées par la société L'Équité à M. [I] et conservées par lui, la cour d'appel a violé l'article 1214 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1214, 1251 et 1382 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
7. Il résulte des deux derniers de ces textes que la contribution à la dette de réparation du dommage subi par la victime d'un accident de la circulation, entre un conducteur impliqué dans l'accident et un autre coobligé fautif, a lieu en proportion de la gravité des fautes respectives.
8. Selon le premier, le codébiteur d'une dette solidaire, qui l'a payée en entier, ne peut répéter contre les autres que les part et portion de chacun d'eux.
9. Pour condamner la société L'Équité à payer une certaine somme à la société Axa au titre de son recours en contribution, l'arrêt retient que les conducteurs des véhicules impliqués dans l'accident ont chacun commis une faute ayant contribué à l'accident à hauteur de 85 % et 15 %.
10. L'arrêt calcule ensuite la contribution à la dette de la société Axa en appliquant la part de 15 % sur la somme totale versée par cet assureur à la victime, en exécution du jugement du 30 juillet 2012, puis en évaluant le montant des restitutions auxquelles la société Axa pouvait prétendre en tenant compte des sommes déjà restituées par la victime à cet assureur.
11. En statuant ainsi, alors que, saisie d'un recours en contribution à la dette de responsabilité et d'une demande de répétition, il lui appartenait d'appliquer les parts de responsabilité retenues sur la somme définitivement allouée à la victime pour déterminer la dette de chaque assureur et statuer sur la demande de remboursement présentée par l'un d'eux, la cour d'appel a violé les textes susvisés.




Civ.1 28 mai 2025 n° 23-22.370

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 28 mai 2025



Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 354 F-D
Pourvoi n° R 23-22.370






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2025

Mme [L] [W], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° R 23-22.370 contre l'arrêt rendu le 14 septembre 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 9 - A), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Renov-France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Tréard, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [W], de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, après débats en l'audience publique du 1er avril 2025 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Tréard, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 septembre 2023), le 28 juin 2017, Mme [W] a conclu, hors établissement, un contrat de fourniture et de pose d'une centrale photovoltaïque et d'un ballon ECS thermodynamique avec la société Renov-France (le vendeur), dont le prix a été financé par un contrat de crédit souscrit auprès de la société Cofidis (le prêteur). Une attestation de livraison et d'installation a été établie le 12 juillet 2017 et le raccordement de l'installation a été effective le 4 avril 2018. Après mise en demeure de régler des échéances impayées, restée vaine, le prêteur s'est prévalu de la déchéance du terme le 19 février 2019.
2. Les 10 et 17 mai 2019, Mme [W] a assigné le vendeur et le prêteur en annulation des contrats de vente et de crédit affecté.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. Mme [W] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de nullité des contrats de vente et de crédit affecté et ses demandes subséquentes, de rappeler qu'elle est redevable de plein droit du remboursement des sommes perçues en exécution du jugement infirmé, de la condamner à payer à la société Cofidis la somme de 24 495,51 euros majorée des intérêts au taux de 2,69 % à compter du 19 février 2019 et la somme de 100 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 19 février 2019 et de rejeter le surplus de ses demandes, alors « que les opérations de démarchage à domicile font l'objet d'un contrat qui mentionne notamment, à peine de nullité, en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service ; qu'en se bornant à retenir, pour écarter le moyen de nullité tiré d'un défaut de mention suffisamment précise des délais de livraison, que ceux-ci « ont été précisés et respectés », sans rechercher, comme elle y était invitée, si le bon de commande signé distinguait le délai des opérations matérielles de livraison et d'installation des biens de celui d'exécution des autres prestations auxquelles le vendeur s'était s'engagé et si les délais indiqués permettaient à l'acquéreur de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 242-1, L. 221-9, alinéa 2, L. 221-5, 1°, et L. 111-1, 3°, du code de la consommation, dans leur rédaction applicable à la cause. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 242-1, L. 221-9, alinéa 2, L. 221-5, 1°, et L. 111-1, 3°, du code de la consommation, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 :
4. Aux termes du premier de ces textes, les dispositions de l'article L. 221-9 sont prévues à peine de nullité du contrat conclu hors établissement.
5. Aux termes du deuxième, ce contrat comprend toutes les informations prévues à l'article L. 221-5.
6. Aux termes du troisième, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2.
7. Aux termes du dernier, avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service.
8. Il résulte de ces textes que les opérations de démarchage à domicile font l'objet d'un contrat qui mentionne notamment, à peine de nullité, en l'absence d'exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s'engage à livrer le bien ou à exécuter le service.
9. Pour rejeter les demandes d'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, l'arrêt constate, d'abord, que le bon de commande prévoit la fourniture de biens, la livraison, la main-d'oeuvre et toutes démarches administratives inclues (déclaration en mairie, frais Enedis, Consuel, frais de raccordement et kit fiscal récupération TVA). Il relève, ensuite, que les délais de livraison y sont mentionnés (un mois pour le ballon et trois mois pour les panneaux) et que les conditions générales de vente précisent les délais maximum de livraison. Il retient que les délais de livraison ont ainsi été précisés et respectés.
10. En statuant ainsi, alors que ces indications étaient insuffisantes pour répondre aux exigences de l'article L. 111-1, 3°, du code de la consommation, dès lors que, limité au délai des opérations matérielles de livraison et d'installation des biens, ce bon ne fournissait aucune indication concernant le délai d'exécution des autres prestations auxquelles le vendeur s'était s'engagé, ce qui ne permettait pas à l'acquéreur de déterminer de manière suffisamment précise quand le vendeur aurait exécuté ses différentes obligations, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Sur le même moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches
Enoncé du moyen
11. Mme [W] fait le même grief à l'arrêt, alors :
« 4°/ que Mme [W] soutenait, dans ses conclusions d'appel, que le contrat conclu hors établissement doit comprendre, à peine de nullité, le numéro d'identification TVA du vendeur, ce qui n'était pas le cas en l'espèce ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que Mme [W] soutenait, dans ses conclusions d'appel, que le contrat conclu hors établissement doit comprendre, à peine de nullité, les coordonnées de l'assureur responsabilité professionnelle du vendeur, ce qui n'était pas le cas en l'espèce ; qu'en ne répondant pas à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
12. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
13. Pour rejeter les demandes d'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, l'arrêt rappelle, d'abord, que Mme [W] invoque, au visa des articles L. 111-1 et suivants du code de la consommation, des violations de dispositions impératives régissant le bon de commande, notamment le fait qu'il ne mentionne pas le numéro de TVA de la venderesse, ni les coordonnées de l'assureur de responsabilité professionnelle ou civile du vendeur. Il constate, ensuite, que le bon de commande comporte les informations relatives à l'identité du vendeur, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités et permettent aisément de l'identifier. Il en déduit que le bon de commande n'encourt pas l'annulation au regard des textes invoqués.
14. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions d'appel de Mme [W] qui se prévalait de l'absence sur le bon de commande des informations exigées par les dispositions de l'article R. 111-2, 5° et 9°, du code de la consommation, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
15. La cassation prononcée n'emporte pas celle du chef de dispositif de l'arrêt confirmant le jugement en ce qu'il s'est déclaré compétent pour connaître du litige.




Crim. 28 mai 2025 n° 24-80.196

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 24-80.196 F-D
N° 00718

ECF 28 MAI 2025

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025


M. [R] [Y] et la société [1] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 7 décembre 2023, qui, pour contraventions douanières, les a condamnés à des amendes douanières.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de Mme Bloch, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [R] [Y] et de la société [1], les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Bloch, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. La société [1] (ci-après la société [1]), ayant pour gérant M. [R] [Y], est un fournisseur entrepositaire agréé de tabac à narguilé qu'elle commercialise en France.
3. Le 17 juillet 2019, l'administration des douanes a fait citer la société [1] et M. [Y] devant le tribunal de police, des chefs de fausse déclaration dans la valeur et d'infraction aux dispositions des lois et règlements que l'administration des douanes est chargée d'appliquer.
4. Par jugement du 1er mars 2022, le tribunal de police a condamné les prévenus des chefs susmentionnés à des amendes douanières.
5. Les prévenus ont relevé appel principal, et le ministère public appel incident, de cette décision.
Examen des moyens
Sur les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens et le sixième moyen, pris en sa troisième branche
6. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement en toutes ses dispositions après avoir déclaré recevable l'appel incident du ministère public et avoir entendu l'avocat général en ses réquisitions aux fins de confirmation du jugement, alors « que en vertu des dispositions de l'article 343 du code des douanes, l'action pour l'application des sanctions fiscales est exercée par l'administration des douanes ; qu'il s'en déduit que cette action ne peut être exercée par le ministère public, accessoirement à l'action publique, que lorsque ce dernier agit pour l'application des peines d'emprisonnement prévues par ce code en matière de délits ; qu'il appert de l'arrêt et des pièces de procédure que c'est à la seule initiative de l'Administration des douanes que M. [Y] et la société [1] ont été cités devant le tribunal de police en vue de l'application des sanctions fiscales des articles 411§1 et 412 2° du code des douanes et que cette administration était représentée à l'audience par M. [O] [P], inspecteur des douanes ; que le procureur de la République près le tribunal de police de Valence ayant interjeté appel incident du jugement portant condamnation des prévenus, la cour d'appel a déclaré cet appel recevable, puis confirmé le jugement en toutes ses dispositions après que l'avocat général a été entendu en ses réquisitions aux fins de confirmation du jugement, tant sur l'exception de nullité que sur le fond ; qu'en prononçant ainsi, quand les poursuites ne tendant qu'au prononcé des sanctions fiscales prévues pour des contraventions douanières de deuxième et troisième classe, le ministère public n'avait pas qualité pour exercer la voie de recours ouverte par l'article 546 du code de procédure pénale et était irrecevable à agir, la cour d'appel a méconnu les textes précités et le principe susvisé. »
Réponse de la Cour
8. C'est à tort que la cour d'appel, qui était saisie de contraventions douanières des deuxième et troisième classes, a déclaré recevable l'appel du procureur de la République.
9. En effet, les poursuites ne tendant qu'au prononcé de sanctions fiscales, en application des dispositions de l'article 343 du code des douanes, le ministère public n'avait pas qualité pour exercer la voie de recours prévue par l'article 546 du code de procédure pénale.
10. Cependant, l'arrêt n'encourt pas la censure pour les motifs qui suivent.
11. D'une part, la cour d'appel, statuant sur le recours des prévenus, n'a pas aggravé les sanctions prononcées en première instance.
12. D'autre part, devant les juridictions de police, en application des articles 458, 536, 512 et 547 du code de procédure pénale, le ministère public, fût-il partie jointe, prend au nom de la loi les réquisitions tant écrites qu'orales qu'il croit convenables au bien de la justice.
13. Il s'ensuit que le moyen doit être écarté.
Mais sur le sixième moyen, pris en ses première et deuxième branches
Enoncé du moyen
14. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement du tribunal de police ayant condamné M. [Y] et la société [1] solidairement au paiement d'une amende douanière de 82 500 euros au titre des contraventions de fausses déclarations dans la valeur des marchandises importées lorsqu'un droit de douane ou une taxe quelconque se trouve éludé, ainsi qu'au paiement d'une amende douanière de 3 965 971 euros au titre de l'infraction aux dispositions des lois et règlements que l'administration des douanes est chargée d'appliquer ayant pour but ou pour résultat d'éluder ou de compromettre le recouvrement d'une taxe, alors :
« 1°/ d'une part que il se déduit des articles 365, 369 du code des douanes, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale que le juge qui prononce une amende en application de l'article 412 2° du code des douanes en répression des infractions de fausse déclaration dans la valeur des marchandises importées lorsqu'un droit de douane ou une taxe quelconque se trouve éludé, après avoir fixé les montants minimum et maximum de l'amende encourue, doit motiver sa décision au regard de l'ampleur et de la gravité de l'infraction commise ainsi que de la personnalité de son auteur, quel que soit le montant de l'amende qu'il retient ; qu'en se bornant à confirmer la condamnation des prévenus à une amende douanière de 82 500 euros correspondant au montant maximal encouru, nonobstant les conclusions aux fins de dispense de sanction de ces derniers, sans s'expliquer sur l'ampleur et la gravité de l'infraction commise, ni sur la personnalité des prévenus, qu'elle devait prendre en considération pour fonder sa décision, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
2°/ d'autre part que il se déduit des articles 365, 369 du code des douanes, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale que le juge qui prononce des amendes en application de l'article 411 § 1 du code des douanes en répression des infractions aux dispositions des lois et règlements que l'administration des douanes est chargée d'appliquer ayant pour but ou pour résultat d'éluder ou de compromettre le recouvrement d'une taxe, après avoir recherché le montant des droits et taxes éludés et fixé en conséquence les montants minimum et maximum de l'amende encourue, doit motiver sa décision au regard de l'ampleur et de la gravité de l'infraction commise ainsi que de la personnalité de son auteur, quel que soit le montant de l'amende qu'il retient ; qu'en se bornant à confirmer la condamnation des prévenus à une de amende douanière de 3 965 971 euros correspondant au montant prétendu des droits éludés, montant minimal de l'amende encourue, nonobstant leurs conclusions d'appel concluant à la dispense de sanction et dénonçant la fausseté du calcul des droits éludés et sa contrariété à la décision du Conseil d'Etat du 26 décembre 2018, sans s'expliquer ni sur l'erreur de calcul ainsi alléguée, ni sur l'ampleur et la gravité de l'infraction commise, pas plus que sur la personnalité des prévenus, qu'elle devait prendre en considération pour fonder sa décision, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 365, 369 du code des douanes, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale :
15. Aux termes du deuxième de ces textes, eu égard à l'ampleur et à la gravité de l'infraction commise, ainsi qu'à la personnalité de son auteur, le tribunal peut réduire le montant de l'amende fiscale prononcée à l'encontre de l'auteur d'une infraction douanière jusqu'à un montant inférieur à son montant minimal.
16. Il résulte du premier et des trois derniers qu'en matière douanière, toute peine d'amende doit être motivée.
17. Pour condamner solidairement M. [Y] et la société [1] à une amende douanière de 82 500 euros au titre de l'infraction de fausse déclaration dans la valeur, l'arrêt attaqué énonce que la société [1] a procédé entre le 13 juillet 2012 et le 12 avril 2016 à cinquante-cinq importations de tabac à narguilé pour lesquelles elle n'a pas inclus dans la valeur en douane les frais de commission de courtage ainsi que les frais d'emballage.
18. Pour condamner ces mêmes prévenus à une amende douanière de 3 965 971 euros au titre de l'infraction aux dispositions des lois et règlements que l'administration des douanes est chargée d'appliquer, les juges énoncent que la société [1] a réussi à éluder le paiement de 3 965 971 euros sur la période contrôlée, par la non-intégration des droits de consommation sur les tabacs à la base d'imposition à la TVA.
19. En prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.
20. En effet, si la cour d'appel a tenu compte de l'ampleur et de la gravité des infractions commises, résultant de l'importance des droits éludés sur une période de plusieurs années, elle ne s'est pas expliquée sur la personnalité des prévenus, qu'elle devait prendre en considération pour fonder sa décision.
21. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquences de la cassation
22. La cassation à intervenir sera limitée au prononcé des amendes douanières. Les autres dispositions seront donc maintenues.
23. La cour d'appel de renvoi ne pourra aggraver les amendes douanières en l'absence d'appel de l'administration des douanes.




Crim. 28 mai 2025 n° 23-83.939

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° P 23-83.939 F-D
N° 00709

ECF 28 MAI 2025

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025


M. [U] [T], la société [2] et l'administration des douanes, partie intervenante, ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre 5-4, en date du 12 avril 2023, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 28 juillet 2021, pourvoi n° 20-85.403), les a condamnés, chacun, pour fausse déclaration de valeur et fausse déclaration de marchandises importées, à deux amendes douanières.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire pour M. [U] [T] et la société [2] a été produit.
Sur le rapport de M. Wyon, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [U] [T] et de la société [2], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. La société [2] (société [2]), sise à [Localité 4] (06), présidée par M. [U] [T], importait des Etats-Unis du matériel destiné à l'industrie du cinéma, notamment des serveurs vidéo.
3. L'administration des douanes, qui a procédé au contrôle des déclarations d'importation des serveurs déposées par la société [2] au cours des années 2009 à 2012, a notamment relevé que les factures produites à l'appui desdites déclarations d'importation ne correspondaient pas à celles enregistrées dans la comptabilité de la société [2], les premières n'incluant pas la facturation de licences se rapportant aux matériels importés, et qu'elles étaient ainsi minorées.
4. Le directeur général des douanes a fait citer devant le tribunal correctionnel la société [2] et son dirigeant de l'époque, M. [T], des chefs, notamment, de fausses déclarations d'espèces concernant des lunettes 3D, et de fausses déclarations de valeur s'agissant de la non-intégration dans la valeur en douane des serveurs vidéo des droits de licence dus pour les logiciels.
5. Par jugement du 14 novembre 2018, le tribunal correctionnel a notamment déclaré les prévenus coupables de ces délits, et les a condamnés solidairement à deux amendes douanières, de 80 000 euros pour le délit douanier de fausses déclarations de valeur en douane concernant les serveurs vidéo, et 1 000 euros pour la contravention douanière de fausse déclaration d'espèce tarifaire concernant les lunettes 3D.
6. M. [T], la société [2], le ministère public et l'administration des douanes ont interjeté appel de ce jugement.
Déchéance du pourvoi formé par l'administration des douanes
7. L'administration des douanes n'a pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par son avocat, un mémoire exposant ses moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de la déclarer déchue de son pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale.
Examen des pourvois formés par M. [U] [T] et la société [2]
Sur le moyen, pris en sa deuxième branche
8. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le moyen, pris en ses autres branches
Énoncé du moyen
9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement déféré ayant déclaré M. [T] et la société [2] coupables de fausses déclarations de valeur relativement à la non-intégration des droits de licence dus pour différents logiciels, alors :
« 1°/ que d'une part, l'intégration des droits de licence dans la valeur en douane des marchandises importées suppose que ces droits soient en relation avec la marchandise à évaluer ; que tel n'est pas le cas des droits de licence qui rémunèrent des prestations postérieures à l'importation ; qu'ainsi, en constatant que les logiciels pour lesquels des droits de licence sont prévus ont été créés et développés en France puis intégrés aux matériels après l'importation de ceux-ci sur le territoire français, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 414-2 du Code des douanes et 591 du Code de procédure pénale, ensemble les articles 29 et 32 du Code des douanes communautaire.
3°/ qu'enfin, le délit de fausse déclaration de valeur en douane prévu par l'article 414-2 du Code des douanes est une infraction intentionnelle ; qu'en se bornant à retenir que « la bonne foi des prévenus n'apparait pas constituée », ce dont il se déduit que les juges n'ont pas recherché l'intention coupable des prévenus mais ont, tout au contraire, inversé la charge de la preuve, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 414-2 du Code des douanes et 593 du Code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
Sur le moyen, pris en sa première branche
10. Pour déclarer M. [T] et la société [2] coupables de fausses déclarations relatives à la non-intégration dans la valeur en douane des droits de licence ayant pour but ou pour résultat d'obtenir une exonération, un droit réduit ou un avantage financier attachés à l'importation, l'arrêt attaqué énonce que les factures définitives payées à la société exportatrice [1] par la société [2] et enregistrées dans sa comptabilité indiquent à la fois le coût des matériels importés et le coût des frais de licence.
11. Les juges ajoutent que la valeur transactionnelle des appareils importés était fixée par une annexe aux contrats passés entre la société [2] et la société américaine [1], la définition du prix incluant les appareils et les licences.
12. Ils relèvent encore que l'implantation en France des logiciels sur les appareils importés était effectuée par la société [1] Europe, succursale localisée à [Localité 3] de la société américaine [1], qui était liée à la société importatrice et avait le même dirigeant.
13. Ils en concluent que la valeur déclarée par la société [2] lors des importations de ces appareils a été minorée du prix des licences.
14. En l'état de ces énonciations, qui caractérisent l'existence d'une relation entre les logiciels et les serveurs conditionnant la vente, peu important le fait que les logiciels aient été installés après l'arrivée des matériels en France dès lors que leur implantation était prévue avant même l'importation, la cour d'appel a justifié sa décision.
15. Dès lors, le grief doit être écarté.
Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche
Vu les articles 414-2 du code des douanes et 593 du code de procédure pénale :
16. Le premier de ces textes incrimine tout fait intentionnel de fausse déclaration, d'utilisation d'un document faux, inexact ou incomplet ou de non-communication d'un document, ayant pour but ou pour résultat, en tout ou partie, d'obtenir un remboursement, une exonération, un droit réduit ou un avantage financier attachés à l'importation ou à l'exportation.
17. Selon le second, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
18. Pour déclarer M. [T] et la société [2] coupables de fausses déclarations relatives à la non-intégration dans la valeur en douane des droits de licence ayant pour but ou pour résultat d'obtenir une exonération, un droit réduit ou un avantage financier attachés à l'importation, l'arrêt attaqué énonce encore que la bonne foi des prévenus n'apparaît pas constituée dès lors que, s'il est constant que les appareils importés en France étaient des éléments informatiques standards librement programmables qui ont été ensuite, en France, l'objet d'intégrations de logiciels développés en France par la société [1] Europe, cette société était liée à la société importatrice et avait pour dirigeant M. [T].
19. En cet état, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs insuffisants à caractériser l'intention frauduleuse des prévenus, n'a pas justifié sa décision.
20. En effet, l'article 414-2 du code des douanes ayant remplacé l'article 426, 4°, du même code, applicable à la date des faits, l'exigence d'un élément intentionnel, qui rend le régime de l'incrimination moins sévère, est en conséquence applicable immédiatement aux faits retenus contre les prévenus, seules les peines moins sévères encourues prévues par l'ancien texte pouvant être prononcées.
21. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Portée et conséquences de la cassation
22. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives au délit de fausses déclarations de valeur en douane concernant les serveurs vidéo, et à la peine prononcée en répression de ce délit. Les autres dispositions seront donc maintenues.




Crim. 28 mai 2025 n° 24-83.385

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° H 24-83.385 F-D
N° 00722

ECF 28 MAI 2025

CASSATION

M. BONNAL président,




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025

M. [L] [B] et la société [1] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Nouméa, chambre correctionnelle, en date du 2 avril 2024, qui, pour escroquerie, a condamné, le premier, à six mois d'emprisonnement avec sursis et 500 000 francs CFP d'amende, la seconde, à 4 000 000 de francs CFP d'amende, et pour fausse déclaration ou manoeuvre en Nouvelle-Calédonie ayant pour but ou effet d'obtenir une exonération attachée à l'importation de produits, et solidairement, à une amende douanière et au paiement des droits éludés.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de Mme Bloch, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan et Féliers, avocat de la société [1] et de M. [L] [B], les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction générale des douanes et droits indirects et de la direction du service des douanes de la Nouvelle-Calédonie, et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Bloch, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le service régional d'enquête des douanes de Nouméa a procédé au contrôle des opérations d'importation de marchandises réalisées par la société [1], gérée par M. [L] [B], qui a mis en évidence des minorations des valeurs déclarées en douane par cette société.
3. Par jugement du 14 octobre 2022, le tribunal correctionnel a condamné M. [B] à six mois d'emprisonnement avec sursis et 500 000 francs CFP d'amende, la société [1] à 4 000 000 francs CFP d'amende et, solidairement, à 21 025 549 francs CFP d'amende douanière et au paiement des droits éludés.
4. Les prévenus et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté l'intégralité des exceptions de nullité soulevées par les prévenus, a déclaré la société [1] et M. [B] coupables de fausses déclarations ayant pour but d'obtenir une exonération attachée à l'importation de produits et d'escroquerie, et a prononcé sur la peine, la sanction douanière et le paiement des droits, alors « qu'en vertu du principe du secret du délibéré, seuls doivent participer au délibéré les juges devant lesquels l'affaire a été plaidée, à l'exclusion du greffier et du représentant du ministère public ; en l'espèce, il résulte des mentions de l'arrêt que Mme Abentin, greffier, était présente « lors des débats, du délibéré », et que le ministère public était « représenté aux débats, au délibéré et au prononcé de l'arrêt par M. Philippe Faisandier, avocat général » ; en l'état de ces mentions, dont il résulte que le ministère public et le greffier ont participé au délibéré et qui, en toute hypothèse, ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer de la régularité de la composition de la juridiction lors du délibéré, la cour d'appel a violé le principe susvisé et l'article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l'Homme, et l'arrêt est nul. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 485, 486 et 512 du code de procédure pénale :
6. Selon ces textes, tout jugement ou arrêt doit établir la régularité de la composition de la juridiction qui l'a rendu.
7. Il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le greffier et le représentant du ministère public étaient présents lors du délibéré.
8. En l'état de ces énonciations, la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer de la régularité de la composition de la juridiction.
9. La cassation est par conséquent encourue de ce chef.
Et sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté l'intégralité des exceptions de nullité soulevées par les prévenus, a déclaré la société [1] et M. [B] coupables de fausses déclarations ayant pour but d'obtenir une exonération attachée à l'importation de produits et d'escroquerie, et a prononcé sur la peine, la sanction douanière et le paiement des droits, alors :
« 1°/ que selon l'article 406 du code de procédure pénale, devant la chambre des appels correctionnels, le président ou l'un des conseillers, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; la méconnaissance de cette obligation d'information fait nécessairement grief au prévenu ; en l'espèce, il résulte des mentions de l'arrêt qu'après que « le président a constaté l'absence des prévenus », M. [L] [B], prévenu, a été entendu « en personne et pour le compte de la Sarl [1] (RCS 521 179) en ses explications » ; ces mentions contradictoires sur la présence ou l'absence des prévenus à l'audience, qui ne peuvent être complétées par les notes d'audience non signées du greffier et du président, ne mettent pas la Cour de cassation en mesure d'établir si le président devait ou non leur notifier leur droit de se taire ; en cet état, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé, outre les droits de la défense, et l'arrêt est nul d'une nullité d'ordre public ;
2°/ que selon l'article 513 du code de procédure pénale, le prévenu ou son avocat auront toujours la parole en dernier ; cette même contradiction sur la présence ou l'absence des prévenus à l'audience ne permet pas non plus à la Cour de cassation de déterminer si les prévenus devaient avoir la parole en dernier, le récit du déroulement des débats s'achevant par les réquisitions du ministère public ; la cour d'appel a donc également violé l'article 513 du code de procédure pénale et les droits de la défense ;
3°/ que même à supposer que la chambre criminelle se considère en mesure d'affirmer que les prévenus n'étaient pas comparants, les énonciations de l'arrêt, qui ne peuvent être complétées par les notes d'audience non signées par le greffier et le président, n'établissent pas que leur avocat, qui était présent à l'audience, a eu la parole en dernier ; la cour d'appel a donc violé l'article 513 du code de procédure pénale et les droits de la défense. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 406, 512, 513, alinéa 4, et 593 du code de procédure pénale :
11. Selon le premier et le deuxième de ces textes, devant la chambre des appels correctionnels, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. La méconnaissance de l'obligation d'informer le prévenu du droit de se taire lui fait nécessairement grief.
12. Aux termes du troisième, le prévenu ou son avocat auront toujours la parole les derniers.
13. Il résulte du dernier que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
14. Il ressort des mentions de l'arrêt attaqué que, d'une part, M. [B] et la société [1], dont il est constaté l'absence à l'audience, sont représentés par leur avocat et le président n'a pas été en mesure de donner au prévenu, absent, l'avertissement prévu par les dispositions de l'article 132-29 du code pénal sur le sursis simple, d'autre part, lors des débats, M. [B] a été entendu en ses explications, enfin, l'avocat des prévenus l'a été en sa plaidoirie avant les réquisitions du ministère public.
15. En statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés.
16. En effet, les mentions de l'arrêt, lesquelles ne peuvent être complétées par les notes d'audiences qui ne sont ni signées par le greffier, ni visées par le président, sont contradictoires sur la présence ou l'absence des prévenus à l'audience, de sorte qu'elles ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer s'ils devaient être informés de leur droit de se taire, et font apparaître que le ministère public a été entendu après que l'avocat des prévenus eut présenté ses moyens de défense.
17. La cassation est donc également encourue de ce chef.




Civ.2 28 mai 2025 n° 23-21.067

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD


COUR DE CASSATION ______________________

Arrêt du 28 mai 2025



Cassation sans renvoi

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 523 F-D
Pourvoi n° Z 23-21.067



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 28 MAI 2025
1°/ M. [L] [R], domicilié [Adresse 2],
2°/ la société Sailliers de Bourgogne, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 3],
ont formé le pourvoi n° Z 23-21.067 contre l'arrêt rendu le 16 mai 2023 par la cour d'appel de Dijon (1re chambre civile), dans le litige les opposant à la société caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles de Rhône-Alpes-Auvergne (Groupama), caisse de réassurances mutuelles agricoles, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Briard, Bonichot et Associés, avocat de M. [R] et de la société Sailliers de Bourgogne, de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de la société caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles de Rhône-Alpes-Auvergne, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 avril 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 16 mai 2023), le 22 juillet 2014, un dégât des eaux a endommagé un local pris à bail par M. [R], appartenant à la société Sailliers de Bourgogne, et assuré par la société caisse régionale d'assurances mutuelles agricoles de Rhône-Alpes-Auvergne, dite Groupama (l'assureur) selon un contrat d'assurance professionnelle, souscrit tant par M. [R] que par cette société.
2. Le 22 octobre 2021, M. [R] et la société Sailliers de Bourgogne ont assigné l'assureur devant un tribunal judiciaire aux fins de mise en oeuvre de la garantie et d'indemnisation du sinistre.
3. Devant le juge de la mise en état, l'assureur a soulevé une fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
4. M. [R] et la société Sailliers de Bourgogne font grief à l'arrêt de confirmer une ordonnance du juge de la mise en état qui déclare leur demande formée contre l'assureur irrecevable comme étant prescrite, alors :
« 2°/ que l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance les dispositions relatives à la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité de la prescription biennale prévue à l'article L. 114-1 du code des assurances ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que le délai biennal de prescription était indiqué dans les conditions générales de la police d'assurance remise à l'assuré, sans néanmoins rechercher si l'utilisation de schémas simplifiés pour énoncer les mécanismes de prescription n'avait pas eu pour effet de neutraliser le caractère impératif de l'information transmise et si une telle présentation répondait suffisamment à l'obligation d'avertir l'assuré quant à la durée et au point de départ du délai de prescription, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 114-1, dans sa version alors applicable, et R. 112-1 du code des assurances ;
3°/ que l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance les causes d'interruption de la prescription biennale prévues à l'article L. 114-2 du code des assurances, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du même code ; qu'ainsi, ne satisfont pas à ces exigences les stipulations du contrat d'assurance qui, s'agissant de la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance, se bornent à indiquer que toute action liée au contrat est prescrite par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance, sans aucunement préciser les causes d'interruption de cette prescription ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu' "il est porté mention en toutes lettres du délai de deux ans suivant la date du sinistre de manière à aviser l'assuré de ses obligations et des conséquences qui en découlent, sans que les stipulations en question ne présentent d'ambiguïté ou une insuffisante clarté" ; qu'en rejetant ainsi le moyen pris de l'inopposabilité de la prescription biennale quand il résultait de ses propres constatations que le contrat d'assurance ne précisait pas les causes ordinaires d'interruption de la prescription, la cour d'appel a violé les articles L. 114-1, L. 114-2, dans leur version alors applicable, et R. 112-1 du code des assurances. »
Réponse de la Cour
Vu l'article R. 112-1 du code des assurances :
5. Il résulte de ce texte que l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du code des assurances, les différents points de départ et les différentes causes d'interruption du délai de la prescription biennale, prévus aux articles L. 114-1 et L. 114-2 du même code.
6. Pour déclarer irrecevable comme prescrite l'action de M. [R] et de la société Sailliers de Bourgogne contre l'assureur, l'arrêt relève que le délai biennal de prescription est indiqué dans les conditions générales, qui, sous chacune des rubriques intitulées « premier cas d'indemnisation », « deuxième cas d'indemnisation » et « l'expert détermine la valeur de remplacement des matériels et aménagements au jour du sinistre », portent mention en toutes lettres du délai de deux ans suivant la date du sinistre, de manière à aviser l'assuré de ses obligations et des conséquences qui en découlent, sans que les stipulations en question ne présentent d'ambiguïté ou une insuffisante clarté.
7. L'arrêt en déduit que l'assureur a satisfait à son obligation d'information relative au délai de prescription conformément aux dispositions de l'article R. 112-1 du code des assurances.
8. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que les conditions générales du contrat d'assurance ne comportaient aucune mention relative aux points de départ du délai de la prescription biennale ni aux causes d'interruption, y compris ordinaires, du délai de prescription, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
11. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 5 et 8 que l'action de M. [R] et de la société Sailliers de Bourgogne contre l'assureur n'est pas prescrite et est, dès lors, recevable.




Crim. 28 mai 2025 n° 24-81.295

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° K 24-81.295 F-D
N° 00719

ECF 28 MAI 2025

REJET

M. BONNAL président,




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025


M. [X] [K] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, en date du 29 janvier 2024, qui, pour transfert de capitaux sans déclaration et blanchiment, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis, une confiscation et une amende douanière.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de Mme Bloch, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de M. [X] [K], les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction interrégionale des douanes et droits indirects de Normandie et de la direction générale des douanes et droits indirects, et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Bloch, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Le 30 avril 2020, les agents des douanes ont procédé au contrôle et à la fouille du véhicule dont M. [X] [K] était passager, et y ont découvert la somme de 63 050 euros en espèces.
3. Le tribunal correctionnel a annulé la procédure douanière et relaxé M. [K].
4. Le ministère public et l'administration des douanes ont relevé appel de ce jugement.
Examen des moyens
Sur les deuxième à septième moyens
5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté l'exception de nullité tirée de la retenue contrainte dans les locaux des services des douanes, alors :
« 1°/ que l'exercice du droit de visite des marchandises, des moyens de transport et des personnes ne peut donner lieu au maintien des personnes concernées à la disposition des agents des douanes au-delà de ce qui est strictement nécessaire à l'accomplissement de cette mesure et à l'établissement du procès-verbal qui la constate ; que, dans ce cadre, les agents des douanes peuvent recueillir des déclarations en vue de la reconnaissance des objets découverts mais ne disposent pas d'un pouvoir général d'audition de la personne contrôlée ; que les agents ne peuvent entendre la personne contrôlée qui n'est pas placée en rétention douanière au cours de l'exercice du droit de visite lorsqu'il s'accompagne d'une mesure de contrainte ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt et des procès-verbaux que M. [K], qui a été conduit au siège de la brigade de sécurité intérieure de [Localité 1] après la fouille de son véhicule, a été maintenu à la disposition des agents des douanes au-delà du temps nécessaire aux opérations de visite ; que les auditions auxquelles les agents ont procédé au cours du droit de visite étaient par conséquent irrégulières ; qu'en rejetant le moyen de nullité de la procédure douanière pris de ce que le requérant a été maintenu à la disposition des agents des douanes au-delà du temps nécessaire au contrôle, la cour d'appel a méconnu l'article 60 du code des douanes et l'article 591 du code de procédure pénale ;
2°/ que la personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction et qui n'est pas placée en retenue douanière ne peut être entendue sur ces faits qu'après la notification des informations prévues à l'article 61-1 du code de procédure pénale ; qu'il résulte du procès-verbal de saisie établi par les agents des douanes le 30 avril 2020 que M. [K] a fait l'objet d'une première audition sans qu'aucune des informations prévues à l'article 61-1 du code de procédure pénale ne lui ait été d'abord notifiée ; qu'en relevant qu'il résultait des procès-verbaux que les droits de l'article 61-1 du code de procédure pénale avaient été notifiés à M. [K] à l'occasion de ses auditions devant les services des douanes et que les diligences prévues par ces textes ont été respectées, la cour d'appel a méconnu les articles 67 F du code des douanes et 61-1, 591 et 593 du code de procédure pénale. »
Réponse de la Cour
7. Pour écarter l'exception de nullité de l'audition de M. [K] réalisée par les agents des douanes, l'arrêt attaqué énonce que l'intéressé a fait l'objet de la fouille du véhicule et de la saisie des sommes découvertes, d'une audition libre de 17 heures 50 à 21 heures, puis qu'il a été procédé, entre 21 heures 40 et 23 heures, avec l'intéressé, à la notification de la saisie effectuée, diligence qui justifiait pleinement sa présence dans les locaux du service des douanes, qu'il a quittés à 23 heures.
8. Les juges ajoutent que l'audition de M. [K] dans les locaux du service des douanes, après le contrôle, portait exclusivement sur l'infraction douanière de transfert de capitaux sans déclaration, non réprimée par de l'emprisonnement, et ne permettant donc pas une mesure de retenue douanière.
9. Ils relèvent également qu'il résulte des procès-verbaux signés par l'intéressé qu'il avait accepté de se rendre librement dans les locaux des douanes, et que le seul fait qu'il soit resté dans ces lieux après son audition, pour procéder aux formalités de saisie de la somme découverte, ne saurait constituer la preuve d'une retenue contraire aux dispositions de l'article 323-1 du code des douanes.
10. Ils considèrent établi que M. [K] a été entendu librement par les agents des douanes, et en concluent que l'audition pouvait être effectuée dans les conditions prévues par l'article 67 F du code des douanes, notamment quant aux droits devant être notifiés, en l'occurrence ceux prévus par l'article 61-1 du code de procédure pénale.
11. C'est à tort que la cour d'appel a rejeté l'exception de nullité.
12. En effet, il résulte de ses constatations et des procès-verbaux de la procédure douanière que la personne contrôlée, invitée à suivre les agents des douanes dans leurs locaux, où elle a été maintenue à leur disposition, a fait l'objet d'une audition formelle sur sa situation personnelle, notamment financière, et sur l'origine des fonds transportés, audition à laquelle les agents des douanes ne pouvaient procéder, fût-ce en application de l'article 67 F du code des douanes, au cours de cette visite et qui a conduit à retenir l'intéressé au-delà du temps strictement nécessaire à la mise en oeuvre du contrôle.
13. Cependant, l'arrêt n'encourt pas la censure dès lors que les juges pour retenir la culpabilité du prévenu se sont fondés sur d'autres éléments, soumis au débat contradictoire, notamment sur les constatations matérielles contenues dans les procès-verbaux et les déclarations sommaires effectuées par l'intéressé lors de la visite du véhicule.
14. Le moyen sera donc écarté.
15. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.




Crim. 28 mai 2025 n° 24-82.225

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° W 24-82.225 F-D
N° 00721

ECF 28 MAI 2025

CASSATION

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 28 MAI 2025


M. [Z] [R] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes, en date du 8 mars 2024, qui, dans la procédure suivie des chefs de blanchiment et transfert de capitaux sans déclaration, a confirmé la décision de remise à l'AGRASC aux fins d'aliénation prise par le procureur de la République.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Bloch, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [Z] [R], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 30 avril 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Bloch, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Pinna, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 11 novembre 2022, les agents des douanes ont procédé au contrôle de M. [Z] [R], qui a permis la découverte et la saisie d'un lingotin, de pièces et d'un combibar, en or.
3. Dans le cadre de l'enquête diligentée des chefs susmentionnés, le procureur de la République a rendu le 23 janvier 2023 une décision de remise à l'agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués ([1]) aux fins d'aliénation des biens saisis.
4. M. [R] a contesté cette décision devant la chambre de l'instruction.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches
5. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la remise à l'AGRASC en vue de leur aliénation des biens meubles faisant l'objet des scellés AH 001 (un lingotin de 10 grammes d'or, un combibar de 50 x 1 gramme d'or, un combibar de 100 x 0,5 gramme d'or) et AH 002 (10 pièces en or [2] d'un poids total de 31,10 grammes, 5 piè
« 1°/ que la décision de remise à l'AGRASC aux fins d'aliénation d'un bien meuble saisi peut être contestée devant la chambre de l'instruction par les personnes ayant des droits sur le bien et les personnes mises en cause, afin de demander, le cas échéant, la restitution du bien saisi ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que dans son mémoire devant la chambre de l'instruction déposé au greffe le 11 janvier 2024 puis le 15 janvier 2024, M. [R] a sollicité notamment la restitution des objets saisis ; qu'en confirmant la décision de remise à l'AGRASC aux fins d'aliénation, sans statuer sur la demande de restitution du bien dont elle était régulièrement saisie, la chambre de l'instruction a méconnu l'article 41-5 du code de procédure pénale et le principe ci-dessus rappelé. »


Réponse de la Cour
Vu l'article 41-5, alinéa 5, du code de procédure pénale :
7. Il résulte de ce texte que la décision de remise à l'AGRASC aux fins d'aliénation d'un bien meuble saisi peut être contestée devant la chambre de l'instruction par les personnes ayant des droits sur le bien et les personnes mises en cause, afin de demander, le cas échéant, la restitution du bien saisi.
8. Il ressort des énonciations de l'arrêt que la chambre de l'instruction a été saisie le 11 janvier 2024 d'un mémoire déposé à son greffe par l'avocat du demandeur sollicitant notamment la restitution des objets saisis.
9. En confirmant la décision de remise à l'AGRASC aux fins d'aliénation, sans statuer sur la demande de restitution des biens dont elle était régulièrement saisie, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
10. La cassation est par conséquent encourue.




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