334 465 résultats

Civ.3 13 février 2025 n° 23-17.370

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Rejet

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 96 F-D
Pourvoi n° F 23-17.370



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

1°/ M. [R] [L],
2°/ Mme [D] [E], épouse [L],
tous deux domiciliés [Adresse 3],
ont formé le pourvoi n° F 23-17.370 contre l'arrêt rendu le 13 avril 2023 par la cour d'appel d'Amiens (1re chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société Couverture Boclet, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],
3°/ à la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP), dont le siège est [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
La société Couverture Boclet a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident provoqué éventuel contre le même arrêt.
Les demandeurs au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident provoqué éventuel invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bironneau, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de M. et Mme [L], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Axa France IARD, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Couverture Boclet, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Bironneau, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. et Mme [L] du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Axa France IARD et la SMABTP.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 13 avril 2023), suivant devis du 24 janvier 2000, M. et Mme [L] ont confié à la société Couverture Boclet les travaux de couverture d'un bâtiment.
3. En raison du décrochage de tuiles à l'occasion de phénomènes venteux, la société Couverture Boclet a réalisé en octobre 2007 des travaux de reprise.
4. Se plaignant de nouveaux désordres, apparus en janvier 2017, M. et Mme [L] ont assigné, après expertise, la société Couverture Boclet afin d'obtenir la réparation de leurs préjudices au titre des travaux de reprise réalisés en 2007 sur le fondement de la garantie décennale.
5. La société Couverture Boclet a appelé en garantie la société Axa France IARD, son assureur en 2000, et la SMABTP, son assureur en 2007.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi principal
Enoncé du moyen
6. M. et Mme [L] font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes dirigées contre la société Couverture Bouclet, alors :
« 1°/ que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'en considérant que la persistance des infiltrations dans le grenier des maîtres d'ouvrage et leur aggravation depuis l'année 2017 ne trouvaient pas leur cause directe dans les travaux de reprise exécutés dans le courant de l'année 2007 mais dans les manquements commis par l'entreprise lors de la pose initiale de l'ensemble de la couverture, après avoir pourtant relevé que les travaux de couverture ont été initialement exécutés en 2000, qu'à la suite de premiers désordres, les parties ont conclu, en 2007, un protocole d'accord prévoyant, en vue de prévenir d'autres désordres, la mise en place systématique de pannetons en vue de fixer les tuiles du versant Est du toit et qu'en méconnaissance des règles de l'art, l'entreprise a persisté, à l'occasion des travaux de reprise réalisés en exécution de ce protocole, à ne fixer qu'un nombre insuffisant de tuiles, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1792 du code civil ;
2°/ que tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination ; qu'en considérant que la persistance et l'aggravation des désordres ne trouvaient pas leur cause directe dans les travaux de reprise dès lors que ceux-ci n'avaient concerné qu'une petite partie de la toiture, la cour d'appel, qui a statué par des motifs qui ne suffisent pas à exclure l'application de la garantie décennale, a violé l'article 1792 du code civil. »
Réponse de la Cour
7. Ayant souverainement retenu que les travaux de reprise, réalisés en 2007 dans la seule zone Sud-Est de la toiture, n'avaient ni causé ni aggravé les désordres se manifestant par des infiltrations persistantes, la cour d'appel a pu en déduire que ceux-ci étaient exclusivement imputables aux travaux initiaux exécutés par la société Couverture Boclet en 2000 et rejeter, en conséquence, la demande en réparation fondée sur sa responsabilité décennale au titre des travaux réalisés en 2007.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-18.327

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Rejet

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 99 F-D
Pourvoi n° W 23-18.327



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
La société The Golden Phoenix, société de droit portugais, dont le siège est [Adresse 2] (Portugal), a formé le pourvoi n° W 23-18.327 contre l'arrêt rendu le 10 mars 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 1), dans le litige l'opposant à la société CPH immobilier, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Cassou de Saint-Mathurin, conseiller référendaire, les observations de la SAS Zribi et Texier, avocat de la société The Golden Phoenix, de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société CPH immobilier, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 mars 2023), par acte du 3 mars 2019, M. [M] a confié à la société de droit portugais The Golden Phoenix, exerçant l'activité d'agent immobilier, un mandat non exclusif de vendre un château lui appartenant au prix de 60 millions d'euros, exigeant la confidentialité et l'absence de « curieux » lors des visites du bien.
2. La société The Golden Phoenix s'est rapprochée de la société de droit français CPH immobilier, exerçant également l'activité d'agent immobilier, à laquelle la société Catibat, représentée par M. [K], avait consenti, le 11 février 2019, un mandat de recherche d'un immeuble de cette nature.
3. Un accord de confidentialité a été conclu entre la société The Golden Phoenix et la société CPH immobilier le 6 mars 2019.
4. Le 7 mars 2019, une visite du château a été organisée au profit de M. [K].
5. Lui imputant la décision de M. [M] de mettre fin, postérieurement à cette visite, au mandat qu'il lui avait donné, la société The Golden Phoenix a assigné la société CPH immobilier en paiement de dommages-intérêts.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. La société The Golden Phoenix fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes indemnitaires, alors :
« 1°/ que débiteur d'un devoir de prudence et de transparence, l'agent immobilier doit communiquer à ses mandants et aux autres parties aux opérations pour lesquelles il est mandaté l'ensemble des informations qui leur sont utiles pour qu'ils prennent leurs décisions de façon libre et éclairée ; qu'après avoir constaté que la société The Golden Phoenix avait exigé l'absence de « curieux » lors de la visite du château et que la société Catibat n'est pas intervenue avec l'intention d'acquérir le bien concerné, la cour d'appel ne pouvait retenir, pour écarter tout manquement de la société CPH immobilier, que la société The Golden Phoenix n'ignorait pas que la société Catibat avait été désignée par le mandat de recherche comme « développeur foncier » ; qu'en statuant ainsi, par un motif impropre à établir que la société The Golden Phoenix aurait disposé de l'information selon laquelle la société Catibat n'était pas un potentiel acquéreur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1231-1 du code civil ;
2°/ qu'en s'abstenant de rechercher, comme il lui était demandé, si la société CPH immobilier, qui avait systématiquement utilisé l'appellation d'« acheteur » ou d'« acquéreur » et affirmé à la société Golden Phoenix que la capacité de la société Catibat à acquérir le bien immobilier ne pouvait être remise en doute, avait accompli la démarche positive, qui lui incombait, de communiquer à son cocontractant l'information essentielle selon laquelle la société Catibat n'avait aucunement l'intention d'acquérir le bien pour son propre compte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1231-1 du code civil ;
3°/ que faute d'avoir répondu aux conclusions de la société The Golden Phoenix faisant valoir que les informations préalablement données par la société CPH immobilier sur le sérieux de M. [K] étaient erronées et trompeuses dès lors que celui-ci n'était pas même intervenu en qualité d'intermédiaire immobilier mais en tant que simple « sachant », la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que la partie lésée n'est pas tenue d'agir dans l'intérêt de son cocontractant défaillant ; qu'en reprochant à la société The Golden Phoenix d'avoir mis fin à ses relations avec la société Catibat qui n'a pas été en mesure de présenter d'éventuels acquéreurs, la cour d'appel, qui a exigé d'elle qu'elle agisse dans l'intérêt de la société CPH immobilier, a violé l'article 1231-1 du code civil ;
5°/ qu'en reprochant à la société The Golden Phoenix d'avoir mis fin à ses relations avec la société Catibat qui n'a pas été en mesure de présenter d'éventuels acquéreurs, sans répondre aux conclusions de la société The Golden Phoenix faisant valoir que non seulement elle n'avait pas mis fin à ses relations avec la société Catibat au lendemain de la visite du château mais qu'elle avait au contraire sollicité à plusieurs reprises des informations complémentaires pour pouvoir restaurer sa crédibilité auprès de son plus gros client, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
7. En premier lieu, la cour d'appel a constaté que le mandant de la société The Golden Phoenix avait mis fin au mandat qui lui avait été confié à la suite de la diffusion de photographies du château mis en vente et souverainement retenu qu'il n'était pas établi que celle-ci fût imputable à M. [K] qui avait confié un mandat de recherche à la société CPH immobilier.
8. En deuxième lieu, elle a relevé que la société The Golden Phoenix avait elle-même dressé une liste de clients potentiels sur laquelle figuraient deux agences immobilières, faisant ainsi ressortir que la qualité d'acquéreur pour son propre compte ne constituait pas une information essentielle dans les relations entre les parties.
9. En troisième lieu, ayant constaté que le mandat de recherche du 11 février 2019 qui avait été transmis à la société The Golden Phoenix par la société CPH immobilier désignait M. [K], représentant de la société Catibat, en qualité de « développeur foncier », et que celui-ci s'était présenté, lors de la visite du château, comme professionnel de l'immobilier, elle a souverainement retenu que la société The Golden Pheonix ne pouvait ignorer que M. [K] n'était pas un « curieux » et qu'il n'avait pas l'intention d'acquérir pour son propre compte.
10. Elle a pu déduire de l'ensemble de ces constatations et appréciations, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deux dernières branches du moyen et répondant aux conclusions prétendument délaissées, qu'aucune faute dans les relations entre agences immobilières ne pouvait être reprochée à la société CPH immobilier en lien direct avec les préjudices résultant de la perte du mandat de vente de la société The Golden Phoenix.
11. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.




Civ.3 13 février 2025 n° 18-25.531 B

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL


COUR DE CASSATION ______________________


Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 82 FS-B
Pourvoi n° Y 18-25.531




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
1°/ M. [Z] [G],
2°/ Mme [R] [U], épouse [G],
tous deux domiciliés [Adresse 3],
ont formé le pourvoi n° Y 18-25.531 contre deux arrêts rendu le 18 septembre 2018 rectifié le 27 novembre 2018 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [W] [B], domicilié [Adresse 1],
2°/ à la société [Adresse 2], société civile d'exploitation agricole, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, six moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Guillaudier, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. et Mme [G], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [B] et de la société [Adresse 2], et l'avis de Mme Delpey-Corbaux, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Guillaudier, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, Brillet, Mme Foucher-Gros, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, Mme Delpey-Corbaux, avocat général, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 18 septembre 2018, rectifié le 27 novembre 2018) et les productions, par acte authentique des 12 novembre et 4 décembre 2003, M. et Mme [G] et la société [Adresse 2] ont vendu à la société civile d'exploitation agricole [Adresse 2] (la SCEA), représentée par son gérant, M. [B], une propriété agricole.
2. Par acte sous seing privé du 18 mars 2004, M. et Mme [G] et la société [Adresse 2] ont vendu le stock de vins millésimés à la SCEA.
3. Invoquant des manoeuvres frauduleuses des vendeurs, la SCEA a, par actes des 19 et 20 octobre 2005, assigné M. et Mme [G] en réparation de son préjudice.
4. Par jugement du 28 février 2006, confirmé par arrêt du 26 juin 2007, les demandes de la SCEA ont été rejetées.
5. En 2006, la SCEA et M. [B] ont déposé une plainte pour escroquerie.
6. Par jugement du 8 novembre 2011, le tribunal correctionnel de Valence a relaxé M. [G], déclaré les constitutions de partie civile de la SCEA et de M. [B] recevables en la forme, et « les a déboutés de leurs demandes en raison de la relaxe du prévenu ».
7. A la suite de l'appel du procureur de la République, la cour d'appel de Grenoble a, par arrêt du 18 décembre 2012, réformé le jugement et déclaré M. [G] coupable d'escroquerie.
8. Par acte du 5 mai 2014, la SCEA et M. [B] ont assigné M. et Mme [G] devant le juge civil en réparation de leurs préjudices.
Examen des moyens
Sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, le troisième moyen, pris en sa seconde branche, le quatrième moyen, le cinquième moyen, pris en ses première et deuxième branches, et le sixième moyen
9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
10. M. [G] fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement du tribunal correctionnel de Valence du 8 novembre 2011 et de déclarer la SCEA et M. [B] recevables en leurs demandes dirigées contre lui, alors :
« 1°/ que, dans son jugement du 8 novembre 2011, le tribunal correctionnel « déclare les constitutions de partie civile de [I] [T], de la SCEA [Adresse 2], de [B] [W] et [O] [X] [L] recevables en la forme », mais les « déboute de leurs demandes en raison de la relaxe du prévenu » ; qu'en retenant que les parties civiles avaient été déclarées irrecevables et que le tribunal correctionnel n'avait pas statué sur le fond de leur demande, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette décision et méconnu l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
2°/ que si les dispositions civiles d'un jugement pénal sont dépourvues de l'autorité de chose jugée du pénal sur le civil, elles conservent le caractère d'une décision rendue au civil et dotée de l'autorité de chose jugée ; que la réformation par la cour d'appel des dispositions pénales du jugement correctionnel, sur le seul appel du ministère public, n'a pas pour effet de remettre en cause les dispositions civiles de cette décision ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351 (ancien), devenu 1355, du code civil. »
Réponse de la Cour
11. Il résulte de l'article 1351, devenu 1355, du code civil, que si les décisions de la justice pénale ont au civil autorité absolue, à l'égard de tous en ce qui concerne ce qui a été nécessairement jugé quant à l'existence du fait incriminé, sa qualification, la culpabilité ou l'innocence de ceux auxquels le fait est imputé, il en est autrement lorsque les décisions statuent sur les intérêts civils (2e Civ., 3 mai 2006, pourvoi n° 05-11.339, publié).
12. Par ailleurs, il résulte de ce même texte que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation reconnue antérieurement en justice (2e Civ., 8 février 2024, pourvoi n° 22-10.614, publié).
13. Constitue un événement postérieur modifiant la situation antérieurement reconnue en justice la décision du juge pénal, qu'elle prononce la condamnation ou la relaxe du mis en cause (2e Civ., 17 janvier 2019, pourvoi n° 18-10.350).
14. La cour d'appel a constaté, par motifs propres et adoptés, que, postérieurement au jugement du tribunal correctionnel du 8 novembre 2011 qui avait déclaré la SCEA et son gérant en exercice recevables en leur constitution de partie civile mais avait rejeté leurs demandes contre M. [G] en raison de la relaxe intervenue, celui-ci avait été déclaré coupable d'escroquerie, par arrêt du 18 décembre 2012, pour avoir, courant 2002 à 2004 et en particulier le 4 décembre 2003 et le 18 mars 2004, en employant des manoeuvres frauduleuses, en augmentant le volume de production de son domaine viticole et en y incorporant des raisins et vins d'origine exogène et non conforme, trompé M. [B] et la SCEA pour les déterminer à acheter un stock de vins et ledit domaine pour un prix de 2 286 735 euros ne correspondant pas à la valeur réelle des biens.
15. Elle en a déduit, à bon droit, abstraction faite du motif erroné, mais surabondant, concernant l'irrecevabilité des parties civiles, que, l'arrêt pénal ayant modifié la situation antérieurement reconnue en justice à l'égard de M. [G], la SCEA et M. [B] pouvaient valablement présenter leurs demandes devant le juge civil sans qu'il puisse leur être opposée la chose jugée en matière civile par le tribunal correctionnel.
16. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, et sur le troisième moyen, pris en sa première branche, réunis
Enoncé des moyens
17. Par son deuxième moyen, pris en sa première branche, M. [G] fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 26 juin 2007 et de déclarer la SCEA recevable en ses demandes dirigées contre lui, alors « que

la partie civile déboutée par la juridiction répressive de première instance, qui n'interjette pas appel, renonce à obtenir réparation du préjudice découlant de la faute pénale ; qu'elle ne peut, pour obtenir l'indemnisation de ce préjudice, se prévaloir de la décision pénale de condamnation, rendue sur le seul appel du ministère public, comme d'un événement de nature à écarter l'autorité de chose jugée attachée à une décision civile antérieure ; qu'en retenant que la SCEA pouvait invoquer, pour écarter l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt civil du 26 juin 2007, la condamnation pénale définitive de M. [G] prononcée en 2012, la cour d'appel, qui avait relevé que la SCEA avait été reçue en sa constitution de partie civile, mais n'avait pas interjeté appel du jugement qui n'avait pas fait droit à ses demandes, a violé l'article 1351 (ancien), devenu 1355, du code civil. »
18. Par son troisième moyen, pris en sa première branche, Mme [G] fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 26 juin 2007 et de déclarer la SCEA recevable en ses demandes dirigées contre elle, alors « qu'un jugement ne constitue un événement postérieur, de nature à écarter l'autorité de chose jugée attachée à une précédente décision, que s'il modifie la situation antérieurement reconnue en justice des parties ; qu'en l'espèce, la cour d'appel de Grenoble avait définitivement reconnu, dans l'arrêt du 26 juin 2007, qu'aucune manoeuvre dolosive ne pouvait être imputée à Mme [G] au titre de la vente du domaine agricole et du stock de vin ; que, pour écarter l'autorité de chose jugée attachée à cette décision, la cour d'appel s'est bornée à constater que M. [G] avait été définitivement condamné pour escroquerie ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'existence d'un événement modifiant la situation antérieurement reconnue en justice de Mme [G], à savoir la non-imputabilité de manoeuvres dolosives, la cour d'appel, qui a au surplus constaté que Mme [G] n'était pas partie à l'instance pénale, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1351 (ancien), devenu 1355, du code civil. »
Réponse de la Cour
19. Aux termes de l'article 1351, devenu 1355, du code civil, l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
20. Il résulte du même texte que l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation reconnue antérieurement en justice.
21. Constitue un événement postérieur modifiant la situation antérieurement reconnue en justice la décision du juge pénal, qu'elle prononce la condamnation ou la relaxe du mis en cause (2e Civ., 17 janvier 2019, pourvoi n° 18-10.350).
22. Par ailleurs, les décisions pénales ont au civil autorité absolue à l'égard de tous en ce qui concerne ce qui a été jugé quant à l'existence du fait incriminé et la culpabilité de celui auquel le fait est imputé (2e Civ., 5 juillet 2018, pourvoi n° 17-22.453, publié)
23. La cour d'appel a constaté, d'une part, par motifs propres et adoptés, que, postérieurement à l'arrêt civil du 26 juin 2007, M. [G] avait été déclaré coupable d'escroquerie, par arrêt pénal du 18 décembre 2012, pour avoir, courant 2002 à 2004 et en particulier le 4 décembre 2003 et le 18 mars 2004, en employant des manoeuvres frauduleuses, en augmentant le volume de production de son domaine viticole et en y incorporant des raisins et vins d'origine exogène et non conforme, trompé M. [B] et la SCEA pour les déterminer à acheter un stock de vins et ledit domaine pour un prix de 2 286 735 euros ne correspondant pas à la valeur réelle des biens, d'autre part, que Mme [G] était venderesse, avec son époux, de la propriété agricole et du stock de vins millésimés mais également gérante de la société [Adresse 2].
24. Elle a pu déduire de ces seuls motifs que l'arrêt du 18 décembre 2012 avait modifié la situation antérieurement reconnue en justice tant à l'égard de M. [G] que de Mme [G], qui ne pouvaient, dès lors, opposer l'autorité de la chose jugée de l'arrêt du 26 juin 2007.
25. Les moyens ne sont donc pas fondés.
Mais sur le cinquième moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
26. M. et Mme [G] font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer à la SCEA la somme de 1 167 113, 60 euros au titre de sa perte de chance de ne pas contracter, alors « que le juge ne peut se déterminer au seul vu d'une expertise établie non contradictoirement dès lors qu'elle est contestée ; qu'en déterminant le montant du préjudice réparable exclusivement au regard d'un rapport amiable établi non contradictoirement, à la demande de la SCEA [Adresse 2], quand les époux [G] avaient contesté sa valeur probante, la cour d'appel a violé les articles 16 du code de procédure civile et 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
27. Il résulte de ce texte que, si le juge ne peut refuser d'examiner une pièce régulièrement versée aux débats et soumise à la discussion contradictoire, il ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties.
28. Pour condamner M. et Mme [G] à payer à la SCEA la somme de 1 167 113, 60 euros, l'arrêt retient que, au regard du document d'expertise comptable rédigé par la société Cabinet Jean-Marc Gieules, les pertes financières s'élèvent à la somme de 1 458 892 euros et que c'est à bon droit que le tribunal à fixé la perte de chance à 80 % et le montant de l'indemnisation à ce titre à la somme de 1 167 113,60 euros.
29. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui s'est fondée exclusivement sur une expertise comptable non judiciaire réalisée à la demande d'une des parties, a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
30. La cassation du chef de dispositif qui fixe le montant du préjudice de la SCEA à la somme de 1 167 113, 60 euros n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant M. et Mme [G] aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à leur encontre, non remises en cause.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-18.418

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
CC


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Rejet

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 89 F-D
Pourvoi n° V 23-18.418



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

La société Ixora, société civile immobilière, dont le siège est chez Locadress, [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 23-18.418 contre l'arrêt rendu le 28 février 2023 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [F] [Y],
2°/ à Mme [E] [L], épouse [Y],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
3°/ à la société Latanier 5, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pety, conseiller, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Ixora, de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. et Mme [Y] et de la société Latanier 5, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Pety, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 28 février 2023), par acte du 28 juillet 2016, la société civile immobilière Ixora (la venderesse) a conclu avec la société civile immobilière Latanier 5 (l'acquéreure) une promesse synallagmatique de vente portant sur un lot dans un groupe d'immeubles, au prix de 276 000 euros, sous la condition suspensive d'obtention d'un prêt.
2. Par avenant du 30 août 2016, les parties ont prorogé au 30 octobre 2016 le délai de réalisation de la condition suspensive et porté au 16 décembre de la même année le terme fixé pour réitérer la vente sous la forme authentique.
3. L'acquéreure a obtenu l'accord de prêt le 11 août 2017.
4. Par acte du 7 février 2018, l'acquéreure ainsi que M. et Mme [Y], gérants et associés de celle-ci, ont assigné la venderesse en exécution forcée de la vente et paiement de dommages-intérêts.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. La venderesse fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de constat de la caducité de la promesse de vente et le surplus de ses prétentions, alors :
« 1°/ que, lorsque dans une promesse synallagmatique de vente, un délai est prévu pour la réalisation de la condition suspensive et qu'à la date prévue pour la réitération de l'acte authentique, cette condition n'est pas accomplie, la promesse est caduque ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats qu'à la date du 16 décembre 2016 prévue par l'avenant pour la réitération de l'acte authentique, la condition suspensive n'était toujours pas réalisée ; qu'en conséquence, la promesse était de plein droit atteinte de caducité dès le 16 décembre 2016 ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1176 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause (antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016) ;
2°/ qu'il résultait des propres constatations de l'arrêt que les délais de réalisation de la promesse de vente avaient été tacitement prorogés par « des échanges postérieurs au 16 décembre 2016 », soit à une date à laquelle la caducité était déjà automatiquement acquise ; que, dès lors, à supposer même que les parties aient eu une « volonté commune de parvenir à la vente effective de ce bien », une telle volonté, en tant qu'elle était postérieure au délai de réitération de la vente, ne pouvait avoir pour effet de faire revivre une promesse de vente déjà caduque ; qu'en conséquence, en retenant « la manifestation tacite des parties de proroger les effets de l'acte sous seing privé du 28 juillet 2016 au-delà du délai initialement prévu pour la signature de l'acte authentique, mais sans toutefois fixer un nouveau terme pour la réalisation des conditions suspensives et la signature de l'acte authentique de vente » la cour d'appel a statué par un motif inopérant et ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1176 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ;
3°/ que la cour d'appel a expressément constaté que la SCI Latanier avait « renoncé à acquérir » ; que cette renonciation de la part du bénéficiaire de la promesse de vente, bien qu'intervenue en cause d'appel, rendait de facto la promesse caduque ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et, partant, a violé l'article 1176 (ancien) du code civil. »
Réponse de la Cour
6. Ayant relevé que les parties à la promesse de vente avaient maintenu, postérieurement au terme fixé pour établir l'acte authentique, des échanges réciproques faisant ressortir leur volonté commune de parvenir à la vente effective de l'immeuble, la cour d'appel en a souverainement déduit qu'elles avaient convenu d'en proroger les effets au-delà du délai prévu, de sorte que, peu important que l'acquéreure ait renoncé en cours d'instance à solliciter l'exécution forcée de la vente, la demande de la venderesse tendant à voir constater la caducité de la promesse tirée de l'absence d'obtention d'un prêt et de réitération de la vente dans les délais initialement convenus ne pouvait être accueillie.
7. Elle a ainsi légalement justifié sa décision.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-18.683

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Rejet

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 91 F-D
Pourvoi n° G 23-18.683



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
1°/ M. [F] [B],
2°/ M. [V] [K],
tous deux domiciliés [Adresse 5],
ont formé le pourvoi n° G 23-18.683 contre l'arrêt rendu le 16 mai 2023 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [U] [M], domicilié [Adresse 3],
2°/ à M. [W] [M], domicilié [Adresse 9],
3°/ à M. [Y] [M], domicilié [Adresse 8],
4°/ à Mme [I] [M], épouse [D], domiciliée [Adresse 4],
5°/ à Mme [A] [M], domiciliée [Adresse 6],
6°/ à Mme [J] [M], domiciliée [Adresse 2],
7°/ à M. [T] [M], domicilié [Adresse 1],
8°/ à M. [R] [M], domicilié [Adresse 7],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Guillaudier, conseiller, les observations de la SCP Françoise Fabiani-François Pinatel, avocat de MM. [B] et [K], de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de MM. [U], [W], [Y], [T] et [R] [M] et de Mmes [I], [A] et [J] [M] , après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Guillaudier, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 16 mai 2023), par acte sous seing privé en date du 6 décembre 2018, MM. [U], [W], [Y], [T] et [R] [M], Mmes [I], [A] et [J] [M] (les consorts [M]) ont conclu avec MM. [K] et [B] un « compromis de vente » stipulant une clause pénale et portant sur un bien immobilier, sous la condition suspensive d'obtention d'un prêt, la signature de l'acte authentique de vente devant intervenir au plus tard le 30 avril 2019.
2. MM. [K] et [B] ont versé la somme de 30 000 euros à titre de dépôt de garantie.
3. Le 29 mars 2019, ils ont informé les consorts [M] qu'ils n'avaient pas obtenu leur prêt.
4. N'ayant pas obtenu la restitution du dépôt de garantie, ils ont assigné les consorts [M] en remboursement de celui-ci et en dommages-intérêts.
Examen des moyens
Sur le second moyen
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
6. MM. [B] et [K] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande au titre de la clause pénale, alors « que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ; qu'en déclarant, en l'espèce, irrecevable la demande de MM. [K] et [B] tendant à la condamnation des consorts [M] à leur verser la somme de 60 000 euros au titre de la clause pénale contractuelle, tandis que cette demande tendait aux mêmes fins que celle présentée en première instance pour obtenir le remboursement du dépôt de garantie en raison de la caducité du compromis et visait à écarter la propre demande de condamnation au titre de la clause pénale sollicitée par les consorts [M], la cour d'appel a violé l'article 564 du code de procédure civile, ensemble les article 565 et 566 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
7. La cour d'appel a constaté que MM. [K] et [B] avaient demandé au premier juge le remboursement du dépôt de garantie d'un montant de 30 000 euros et des dommages-intérêts du même montant.
8. Elle a relevé que, en cause d'appel, ils avaient ajouté une demande supplémentaire tendant à la condamnation des consorts [M] à leur payer la somme de 60 000 euros au titre de la clause pénale contractuelle.
9. Elle en a déduit, à bon droit, que cette prétention, qui ne tendait pas aux mêmes fins que celles en restitution du dépôt de garantie et en dommages-intérêts, était nouvelle, et, partant, irrecevable, dès lors qu'elle n'avait pour objet d'opposer compensation, de faire écarter les prétentions adverses des consorts [M] ou de faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait et qu'elle n'était pas l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des prétentions soumises au premier juge.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-21.815

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
CC


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 94 F-D
Pourvoi n° N 23-21.815



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
1°/ M. [X] [Y],
2°/ Mme [P] [R], épouse [Y],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
ont formé le pourvoi n° N 23-21.815 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2023 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre civile), dans le litige les opposant à la commune de [Localité 3], représentée par son maire en exercice, domicilié en cette qualité en [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Rat, conseiller référendaire, les observations de la SARL Gury & Maitre, avocat de M. et Mme [Y], de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la commune de [Localité 3], après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Rat, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 6 juillet 2023), par un jugement irrévocable, un juge de l'expropriation a fixé l'indemnité principale de dépossession due par la commune de [Localité 3] (la commune) à M. et Mme [Y], par suite de l'expropriation d'une parcelle leur appartenant.
2. Cette indemnité a été évaluée en tenant compte du coût des travaux de dépollution nécessaires à la réalisation du projet déclaré d'utilité publique.
3. Soutenant que ces travaux n'avaient pas été réalisés par la commune et qu'elle s'était ainsi enrichie à leurs dépens, M. et Mme [Y] l'ont assignée en expertise.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
4. M. et Mme [Y] font grief à l'arrêt de les déclarer irrecevables comme dépourvus d'intérêt à agir en leur demande d'expertise, alors « que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien fondé de l'action ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu qu'en l'absence de force obligatoire des travaux litigieux, les époux [Y] étaient dépourvus d'intérêt à agir ; qu'en se prononçant ainsi, quand l'obligation de réaliser les dits travaux conditionnait le bien-fondé de la mesure d'expertise sollicitée et non sa recevabilité, la cour d'appel a violé l'article 31 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 31 du code de procédure civile :
5. Selon ce texte, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention.
6. Pour déclarer M. et Mme [Y] irrecevables en leur demande d'expertise, l'arrêt retient, d'une part, que la décision par laquelle le juge de l'expropriation a pratiqué un abattement sur l'indemnité principale au titre des travaux de dépollution de la parcelle expropriée jugés nécessaires à la réalisation du projet déclaré d'utilité publique n'emportait aucune obligation, pour la commune, de procéder auxdits travaux, d'autre part, que le litige sur le montant de l'indemnité d'expropriation a été irrévocablement tranché.
7. En statuant ainsi, alors que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action, soit en l'espèce du motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution du litige, la cour d'appel a violé le texte susvisé.




Civ.2 13 février 2025 n° 22-11.778

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Rejet

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 152 F-D
Pourvoi n° H 22-11.778






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

1°/ la société Bee Design, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],
2°/ la société MJS Partners, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], agissant en la personne de M. [T] [X], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Bee Design,
3°/ la société BMA administrateurs judiciaires, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], agissant en la personne de M. [K] [W], en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Bee Design,
ont formé le pourvoi n° H 22-11.778 contre l'arrêt n° RG : 21/01106 rendu le 18 novembre 2021 par la cour d'appel de Montpellier (2e chambre civile), dans le litige les opposant :
1°/ à la société La Coutellerie de Laguiole - Honoré Durand, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la société La Coutellerie de Laguiole - Christophe Durand, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5],
défenderesses à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Riuné, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société Bee Design, en redressement judiciaire, de la société MJS Partners, agissant en la personne de M. [T] [X], en qualité de liquidateur judicaire de la société Bee Design, de la société BMA administrateurs judiciaires, agissant en la personne de M. [K] [W], en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Bee Design, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société La Coutellerie de Laguiole - Honoré Durand et de la société La Coutellerie de Laguiole - Christophe Durand, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Riuné, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Reprise d'instance
1. Il est donné acte à la société BMA administrateurs judiciaires, prise en la personne de M. [W], de sa reprise d'instance en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Bee Design.
2. Il est donné acte à la société M.J.S. Partners, représentée par M. [X], de sa reprise d'instance en qualité de liquidateur judiciaire de la société Bee Design.
Faits et procédure
3. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 18 novembre 2021) et les productions, sur demande des sociétés La Coutellerie de Laguiole - Honoré Durand et La Coutellerie de Laguiole - Christophe Durand (les Coutelleries de Laguiole), un arrêt du 15 mai 2020 de la cour d'appel de Montpellier a condamné la société Bee Design à cesser, sous astreinte, « toute pratique commerciale trompeuse sur son site internet ou tout autre support de communication (blog, brochure, etc.) et notamment, d'utiliser les expressions "boutique officielle Laguiole", "site officiel Laguiole", "protège de la contrefaçon", "boutique en ligne officielle de la marque Laguiole", et de se présenter sous l'expression générique "Laguiole". »
4. Saisi par les Coutelleries de Laguiole, un juge de l'exécution a prononcé la liquidation de l'astreinte provisoire, a condamné la société Bee Design à leur payer la somme de 92 000 euros assortie d'intérêts de retard et a ordonné la reconduction de l'astreinte provisoire.
5. La société Bee Design a été placée en redressement judiciaire puis a bénéficié d'un plan de redressement par voie de continuation. La société M.J.S. Partners, prise en la personne de M. [X], et la société BMA administrateurs judiciaires, prise en la personne de M. [W], ont été désignées respectivement mandataire judiciaire et commissaire à l'exécution du plan de la société Bee Design.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa neuvième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses première, deuxième, troisième et septième branches
La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a délibéré sur ce moyen, après débats à l'audience publique du 3 septembre 2024, où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre.
7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses quatrième, cinquième, sixième et huitième branches
La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a délibéré sur ce moyen, après débats à l'audience publique du 3 septembre 2024, où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre.
Enoncé du moyen
8. La société Bee Design fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la liquidation de l'astreinte provisoire fixée par l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 15 mai 2020 à la somme de 92 000 euros pour une période d'inexécution de 92 jours consécutifs, du 9 août 2020 au 8 novembre 2020 inclus, condamné en conséquence la société Bee Design à payer aux sociétés Coutelleries de Laguiole la somme de 92 000 euros, majorée des intérêts de retard au taux légal et ordonné la reconduction de l'astreinte provisoire à hauteur de 2 500 euros par jour de retard, sans condition de durée, pour assurer le strict respect de l'injonction judiciaire, telle que fixée par les dispositifs combinés du jugement du tribunal de commerce de Rodez du 2 mai 2017 et de l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 15 mai 2020, et ce, à compter du lendemain de la signification du jugement, alors :
« 4°/ que si le juge statuant sur la liquidation de l'astreinte doit déterminer l'étendue exacte de l'obligation assortie de celle-ci et dire si cette obligation a été ou non remplie, il doit cependant s'en tenir à cette vérification, sans pouvoir porter une nouvelle appréciation sur les faits ni mettre à la charge du débiteur de l'astreinte de nouvelles obligations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a décidé que l'injonction faite à la société Bee Design ne se limitait pas à s'abstenir d'utiliser les quatre expressions" visées dans les dispositifs des décisions rendues au fond, mais s'étendait au-delà à toute autre expression consistant en une pratique commerciale trompeuse sur son site internet ou tout autre support de communication" ; qu'en conséquence, la cour d'appel ne s'en est pas tenue à la vérification de l'exécution de l'obligation assortie de l'astreinte, mais a été conduite à apprécier de nouveaux faits comme un juge du fond pour déterminer si l'usage des expressions incriminées constituait ou non des pratiques commerciales trompeuses ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs de juge de l'exécution et violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
5°/ que le juge de l'exécution ne peut modifier ni l'obligation assortie de l'astreinte ni le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a décidé que l'injonction faite à la société Bee Design ne se limitait pas à s'abstenir d'utiliser les quatre expressions" visées dans les dispositifs des décisions rendues au fond, mais s'étendait au-delà à toute autre expression consistant en une pratique commerciale trompeuse sur son site internet ou tout autre support de communication" ; que cette lecture de l'injonction litigieuse a conduit la cour d'appel à devoir elle-même qualifier de nouvelles pratiques mises en oeuvre par la société Bee Design pour déterminer si celles-ci pouvaient ou non être sanctionnables au titre des pratiques commerciales trompeuses et, par voie de conséquence, à modifier le dispositif des décisions ayant prononcé la condamnation, ces décisions n'ayant pas tranché la question du caractère trompeur ou non de l'utilisation des expressions litigieuses, telles que modifiées par la société Bee Design ; qu'en liquidant néanmoins l'astreinte, cependant que cette liquidation ne pouvait se faire sans modifier le dispositif des décisions de justice servant de fondement aux poursuites, la cour d'appel a violé l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
6°/ que le juge de l'exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ; qu'en l'espèce, tandis que les décisions ayant prononcé l'astreinte litigieuse visaient exclusivement, au titre des pratiques commerciales trompeuses imputées à la société Bee Design, les articles L. 120-1, L. 121-1, L. 121-1-1 et suivants du code de la consommation, la cour d'appel, par motifs adoptés du premier juge, a retenu que cette pratique commerciale trompeuse judiciairement sanctionnée au sens de l'article L. 121-2 du code de la consommation, (?) constitue le c?ur de l'interdiction qui lui est faite" et, par motifs propres, a fait application de ce dernier texte pour déterminer si l'expression Boutique officielle de la marque Laguiole" caractérisait une pratique commerciale trompeuse ; qu'en appréciant au regard de ce texte, n'ayant pas servi de fondement aux décisions rendues au fond, l'existence et l'exécution des obligations mises à la charge de la société Bee Design, la cour d'appel a violé les articles L. 131-4 et R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
8°/ qu'il appartient au créancier de l'injonction prononcée sous astreinte d'apporter la preuve de l'inexécution de l'injonction judiciaire ; qu'en énonçant en l'espèce, par motifs adoptés du premier juge, que la société Bee Design, sur qui pèse désormais la charge de la preuve, n'est pas convaincante à démontrer qu'elle a exécuté les décisions du tribunal de commerce et de la cour d'appel" et qu'elle ne démontre pas que les indications figurant sur son site internet ne caractérisent plus une pratique commerciale trompeuse qui induit en erreur le public sur les qualités substantielles de ses produits, leur origine et leur mode de fabrication, ainsi que sur les droits et aptitudes du professionnel", la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 1353 du code civil. »
Réponse de la Cour
9. Il résulte de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution que le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.
10. Si, en application de l'article R. 121-1, alinéa 1er, du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, il lui appartient d'en fixer le sens.
11. Après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que la société Bee Design utilisait sur son site internet et sur des supports de communication des expressions correspondant partiellement ou totalement à celles qu'elle devait cesser d'utiliser, l'arrêt retient que la condamnation à cesser les actes litigieux était plus large que l'utilisation des quatre expressions « boutique officielle Laguiole », « site officiel Laguiole », « protège de la contrefaçon » et « boutique en ligne officielle de la marque Laguiole », précisément visées dans le dispositif du jugement. Il ajoute que l'utilisation de l'adverbe « notamment » signifie que cette énumération d'expressions illustre la prohibition générale et n'est pas limitative et qu'ainsi d'autres expressions sont également interdites si celles-ci caractérisent aussi des pratiques commerciales trompeuses.
12. Par motifs propres et adoptés, l'arrêt retient encore qu'en utilisant sur son site internet les expressions « Laguiole attitude. Boutique en ligne officielle de la marque Laguiole » et « Laguiole-Attitude.com, site officiel de vente en ligne des produits de la marque Laguiole », la société Bee Design a poursuivi une pratique commerciale trompeuse de nature à induire en erreur le public sur les qualités substantielles de ses produits, leur origine et leur mode de fabrication, ainsi que sur les droits et aptitudes du professionnel.
13. En l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'a pas modifié le dispositif de la décision dont l'exécution était poursuivie mais a souverainement déterminé l'étendue de l'obligation mise à la charge de la société Bee Design au regard des motifs de cette décision a, sans inverser la charge de la preuve, retenu à bon droit que la société Bee Design avait poursuivi les pratiques commerciales trompeuses que la cour d'appel de Montpellier avaient interdites.
14. Inopérant en sa sixième branche, qui critique des motifs surabondants, le moyen n'est donc pas fondé pour le surplus.




Civ.2 13 février 2025 n° 23-17.389

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LC12


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Désistement

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 154 F-D
Pourvoi n° B 23-17.389





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

M. [G] [I], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° B 23-17.389 contre l'arrêt rendu le 29 mars 2023 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 2), dans le litige l'opposant à M. [G] [H], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de M. [I], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [H], après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
LA COUR,
1. Par acte déposé au greffe de la Cour de cassation le 26 décembre 2024, Me Haas, avocat à la Cour de cassation, a déclaré, au nom de M. [I], se désister du pourvoi formé par lui contre un arrêt rendu le 29 mars 2023 par la cour d'appel de Bastia dans une instance l'opposant à M. [H].
2. En application de l'article 1026 du code de procédure civile, ce désistement, intervenu après le dépôt du rapport, doit être constaté par arrêt.




Civ.2 13 février 2025 n° 23-11.795

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LC12


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Désistement

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 153 F-D
Pourvoi n° W 23-11.795



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
La Société anonyme de défense et d'assurance, société anonyme à directoire, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° W 23-11.795 contre l'arrêt rendu le 7 décembre 2022 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la société JDK, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Cassignard, conseiller, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la Société anonyme de défense et d'assurance, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de la société JDK, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Cassignard, conseiller rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
LA COUR,
1. Par acte déposé au greffe de la Cour de cassation le 25 novembre 2024, la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat à la Cour de cassation, a déclaré, au nom de la Société anonyme de défense et d'assurance, se désister du pourvoi formé par elle contre un arrêt rendu le 7 décembre 2022 par la cour d'appel de Nîmes dans une instance l'opposant à la société JDK.
2. En application de l'article 1026 du code de procédure civile, ce désistement, intervenu après le dépôt du rapport, doit être constaté par arrêt.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-15.972

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
CC


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Interruption d'instance (avec reprise) par arrêt

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 101 F-D
Pourvoi n° M 23-15.972



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
La société RCR Artotec architectes, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 23-15.972 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (2eme chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Belsito, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Foucher-Gros, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société RCR Artotec architectes, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de la société Belsito, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Foucher-Gros, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La société RCR Artotec architectes s'est pourvue en cassation, le 19 mai 2023, contre une arrêt rendu le 6 avril 2023, par la cour d'appel de Bordeaux dans une instance l'opposant à la société Belsito.
Vu les articles 370 et 376 du code de procédure civile :
2. Il est justifié par un extrait du registre du commerce et des sociétés que la société RCR Artotec architectes a été dissoute et radiée de ce registre à compter du 20 mars 2024, date de la clôture de la liquidation.
3. L'instance est donc interrompue et il convient d'inviter la société RCR Artotec architectes à reprendre celle-ci, par la mise en cause d'un administrateur ad hoc aux fins de la représenter.




Civ.2 13 février 2025 n° 22-11.777

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Rejet

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 151 F-D
Pourvoi n° F 22-11.777


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
1°/ la société Bee Design, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4],
2°/ la société MJS Partners, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], représentée par M. [C] [U], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Bee Design,
3°/ la société BMA administrateurs judiciaires, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], représentée par M. [B] [T], agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Bee Design,
ont formé le pourvoi n° F 22-11.777 contre l'arrêt n° RG : 21/01104 rendu le 18 novembre 2021 par la cour d'appel de Montpellier (2e chambre civile), dans le litige les opposant à la société Forge de [Localité 3], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5], défenderesse à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Riuné, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société Bee Design, en redressement judiciaire, de la société MJS Partners, représentée par M. [C] [U], agissant en qualité de liquidateur judicaire de la société Bee Design, de la société BMA administrateurs judiciaires, représentée par M. [B] [T], agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Bee Design, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Forge de [Localité 3], et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Riuné, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Reprise d'instance
1. Il est donné acte à la société BMA administrateurs judiciaires, prise en la personne de M. [T], de sa reprise d'instance en qualité de commissaire à l'exé
2. Il est donné acte à la société MJS Partners, représentée par M. [U], de sa reprise d'instance en qualité de liquidateur judiciaire de la société Bee Design.
Faits et procédure
3. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 18 novembre 2021) et les productions, sur demande de la société Forge de [Localité 3], un arrêt du 15 mai 2020 de la cour d'appel de Montpellier a condamné la société Bee Design à cesser, sous astreinte, « toute pratique commerciale trompeuse sur son site internet ou sur tout autre support de communication (blog, brochure, etc.) », et notamment, d'utiliser les expressions « boutique officielle Laguiole », « site officiel Laguiole », « protège de la contrefaçon », « boutique en ligne officielle de la marque Laguiole », et de se présenter sous l'expression générique « Laguiole ».
4. Saisi par la société Forge de [Localité 3], un juge de l'exécution a prononcé la liquidation de l'astreinte provisoire, a condamné la société Bee Design à lui payer la somme de 92 000 euros assortie d'intérêts de retard et a ordonné la reconduction de l'astreinte provisoire.
5. La société Bee Design a été placée en redressement judiciaire puis a bénéficié d'un plan de redressement par voie de continuation. La société MJS Partners, prise en la personne de M. [U], et la société BMA administrateurs judiciaires, prise en la personne de M. [T], ont été désignées respectivement mandataire judiciaire et commissaire à l'exécution du plan de la société Bee Design.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa neuvième branche
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses première, deuxième, troisième et septième branches
La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a délibéré sur ce moyen, après débats à l'audience publique du 3 septembre 2024, où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre.
7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses quatrième, cinquième, sixième et huitième branches
La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation a délibéré sur ce moyen, après débats à l'audience publique du 3 septembre 2024, où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre.
Enoncé du moyen
8. La société Bee Design fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné la liquidation de l'astreinte provisoire fixée par l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 15 mai 2020 à la somme de 92 000 euros pour une période d'inexécution de 92 jours consécutifs, du 31 août 2020 au 30 novembre 2020 inclus, condamné en conséquence la société Bee Design à payer à la société Forge de [Localité 3] la somme de 92 000 euros, majorée des intérêts de retard au taux légal et ordonné la reconduction de l'astreinte provisoire à hauteur de 2 500 euros par jour de retard, sans condition de durée, pour assurer le strict respect de l'injonction judiciaire, telle que fixée par les dispositifs combinés du jugement du tribunal de commerce de Rodez du 21 mars 2017 et de l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 15 mai 2020, et ce, à compter du lendemain de la signification du jugement, alors :
« 4°/ que si le juge statuant sur la liquidation de l'astreinte doit déterminer l'étendue exacte de l'obligation assortie de celle-ci et dire si cette obligation a été ou non remplie, il doit cependant s'en tenir à cette vérification, sans pouvoir porter une nouvelle appréciation sur les faits ni mettre à la charge du débiteur de l'astreinte de nouvelles obligations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a décidé que l'injonction faite à la société Bee Design ne se limitait pas à s'abstenir d'utiliser les quatre expressions" visées dans les dispositifs des décisions rendues au fond, mais s'étendait au-delà à toute autre expression consistant en une pratique commerciale trompeuse sur son site internet ou tout autre support de communication" ; qu'en conséquence, la cour d'appel ne s'en est pas tenue à la vérification de l'exécution de l'obligation assortie de l'astreinte, mais a été conduite à apprécier de nouveaux faits comme un juge du fond pour déterminer si l'usage des expressions incriminées constituait ou non des pratiques commerciales trompeuses ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs de juge de l'exécution et violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution ;
5°/ que le juge de l'exécution ne peut modifier ni l'obligation assortie de l'astreinte ni le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a décidé que l'injonction faite à la société Bee Design ne se limitait pas à s'abstenir d'utiliser les quatre expressions" visées dans les dispositifs des décisions rendues au fond, mais s'étendait au-delà à toute autre expression consistant en une pratique commerciale trompeuse sur son site internet ou tout autre support de communication" ; que cette lecture de l'injonction litigieuse a conduit la cour d'appel à devoir elle-même qualifier de nouvelles pratiques mises en oeuvre par la société Bee Design pour déterminer si celles-ci pouvaient ou non être sanctionnables au titre des pratiques commerciales trompeuses et, par voie de conséquence, à modifier le dispositif des décisions ayant prononcé la condamnation, ces décisions n'ayant pas tranché la question du caractère trompeur ou non de l'utilisation des expressions litigieuses, telles que modifiées par la société Bee Design ; qu'en liquidant néanmoins l'astreinte, cependant que cette liquidation ne pouvait se faire sans modifier le dispositif des décisions de justice servant de fondement aux poursuites, la cour d'appel a violé l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
6°/ que le juge de l'exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ; qu'en l'espèce, tandis que les décisions ayant prononcé l'astreinte litigieuse visaient exclusivement, au titre des pratiques commerciales trompeuses imputées à la société Bee Design, les articles L. 120-1, L. 121-1, L. 121-1-1 et suivants du code de la consommation, la cour d'appel, par motifs adoptés du premier juge, a retenu que cette pratique commerciale trompeuse judiciairement sanctionnée au sens de l'article L. 121-2 du code de la consommation, (?) constitue le c?ur de l'interdiction qui lui est faite" et, par motifs propres, a fait application de ce dernier texte pour déterminer si l'expression Boutique officielle de la marque Laguiole" caractérisait une pratique commerciale trompeuse ; qu'en appréciant au regard de ce texte, n'ayant pas servi de fondement aux décisions rendues au fond, l'existence et l'exécution des obligations mises à la charge de la société Bee Design, la cour d'appel a violé les articles L. 131-4 et R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution ;
8°/ qu'il appartient au créancier de l'injonction prononcée sous astreinte d'apporter la preuve de l'inexécution de l'injonction judiciaire ; qu'en énonçant en l'espèce, par motifs adoptés du premier juge, que la société Bee Design, sur qui pèse désormais la charge de la preuve, n'est pas convaincante à démontrer qu'elle a exécuté les décisions du tribunal de commerce et de la cour d'appel" et qu'elle ne démontre pas que les indications figurant sur son site internet ne caractérisent plus une pratique commerciale trompeuse qui induit en erreur le public sur les qualités substantielles de ses produits, leur origine et leur mode de fabrication, ainsi que sur les droits et aptitudes du professionnel", la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution, ensemble l'article 1353 du code civil. »
Réponse de la Cour
9. Il résulte de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution que le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.
10. Si, en application de l'article R. 121-1, alinéa 1er, du code des procédures civiles d'exécution, le juge de l'exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, il lui appartient d'en fixer le sens.
11. Après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que la société Bee Design utilisait sur son site internet et sur des supports de communication des expressions correspondant partiellement ou totalement à celles qu'elle devait cesser d'utiliser, l'arrêt retient que la condamnation à cesser les actes litigieux était plus large que l'utilisation des quatre expressions « boutique officielle [Localité 3] », « site officiel [Localité 3] », « protège de la contrefaçon » et « boutique en ligne officielle de la marque [Localité 3] », précisément visées dans le dispositif du jugement. Il ajoute que l'utilisation de l'adverbe « notamment » signifie que cette énumération d'expressions illustre la prohibition générale et n'est pas limitative et qu'ainsi d'autres expressions sont également interdites si celles-ci caractérisent aussi des pratiques commerciales trompeuses.
12. Par motifs propres et adoptés, l'arrêt retient encore que la société Bee Design n'a pas réagi à l'injonction qui lui était faite de ne plus employer l'expression « site officiel [Localité 3] » et n'a pas mis fin à l'utilisation d'expressions totalement et expressément prohibées, dont la plus emblématique était « boutique officielle de la marque [Localité 3] ». Il ajoute que pour tenter de contourner l'injonction judiciaire mise à sa charge, elle a introduit la notion de marque au sein même de l'expression interdite et prétendait être autorisée à se prévaloir de l'expression « Boutique officielle de la marque [Localité 3] » qui était, à l'instar de l'expression interdite « boutique officielle [Localité 3] », de nature à induire en erreur le public sur les qualités substantielles de ses produits, leur origine et leur mode de fabrication, ainsi que sur les droits et aptitudes du professionnel au sens de l'arrêt du 15 mai 2020, ce qui caractérise une pratique commerciale trompeuse.
13. En l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'a pas modifié le dispositif de la décision dont l'exécution était poursuivie mais a souverainement déterminé l'étendue de l'obligation mise à la charge de la société Bee Design au regard des motifs de cette décision a, sans inverser la charge de la preuve, retenu à bon droit que la société Bee Design avait poursuivi les pratiques commerciales trompeuses que la cour d'appel de Montpellier avaient interdites.
14. Inopérant en sa sixième branche, qui critique des motifs surabondants, le moyen n'est donc pas fondé pour le surplus.




Civ.2 13 février 2025 n° 23-10.039

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 144 F-D
Pourvoi n° N 23-10.039



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

La société GMF assurances, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 23-10.039 contre l'arrêt rendu le 29 septembre 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-6), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [G] [Y], domiciliée [Adresse 4],
2°/ à Mme [S] [Y], domiciliée [Adresse 3],
3°/ à M. [K] [Y], domicilié chez [Adresse 5],
4°/ à M. [T] [Y], domicilié [Adresse 4],
5°/ à la caisse primaire d'assurance maladie du Var, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Chauve, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société GMF assurances, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [G] [Y], Mme [S] [Y], M. [K] [Y], M. [T] [Y], et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Chauve, conseiller rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 29 septembre 2022), Mme [Y] a été blessée le 4 juillet 2011, à la suite d'un accident impliquant son seul véhicule qu'elle venait de stationner et qui a reculé sur elle. Elle a recherché, avec ses enfants, Mme [S] [Y], M. [K] [Y] et M. [T] [Y], (les consorts [Y]) la garantie de la société GMF assurances (l'assureur) auprès de laquelle elle avait souscrit un contrat d'assurance comportant une garantie conducteur.
2. Des provisions ont été versées par l'assureur à Mme [Y] sur le fondement de la garantie contractuelle du conducteur à hauteur de 1 million d'euros, correspondant au plafond de garantie revendiqué par l'assureur.
3. Les consorts [Y] ont saisi un tribunal aux fins d'obtenir une provision supplémentaire et l'instauration d'une mesure d'expertise, en se fondant sur l'application de la loi du 5 juillet 1985.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en sa première branche, réunis
Enoncé des moyens
4. Par un premier moyen, l'assureur fait grief à l'arrêt de dire que les conditions particulières et générales du contrat « garantie conducteur » ne sont pas opposables à Mme [Y], de dire qu'il est tenu d'indemniser la victime directe et les victimes indirectes de l'intégralité de leurs préjudices selon les règles du droit commun, d'allouer à Mme [Y] une indemnité provisionnelle de 100 000 euros à valoir sur la liquidation définitive de son préjudice corporel, de déclarer recevables les demandes formulées par les consorts [Y], d'allouer aux consorts [Y], chacun, une indemnité provisionnelle de 10 000 euros à valoir sur l'indemnisation de leur préjudice moral et d'affection, outre à chacun une indemnité provisionnelle de 5 000 euros à valoir sur l'indemnisation de leur préjudice extrapatrimonial exceptionnel, de le condamner à payer à Mme [Y] la somme de 100 000 euros à titre provisionnel à valoir sur l'indemnisation de son préjudice corporel global, de le condamner à payer aux consorts [Y], chacun, une indemnité provisionnelle de 15 000 euros et de diligenter une expertise médicale qu'elle a confiée au docteur [D] et au docteur [O], alors « que, même en cas d'inopposabilité des conditions générales et particulières d'assurances reste délimitée par la définition du risque garanti par cette police ; qu'en affirmant qu'en l'absence d'opposabilité à Mme [Y] des conditions particulières et générales de la police d'assurance « Auto pass » souscrite auprès de lui, l'assurée était fondée à solliciter l'indemnisation de l'intégralité de ses préjudices sans limitation d'un plafond de garantie et selon les règles de droit commun, sans rechercher quel était le périmètre contractuel de garantie, lequel délimitait son droit à indemnisation, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134, devenu 1103, du code civil. »
5. Par un second moyen, l'assureur fait le même grief à l'arrêt, alors « que le contrat forme la loi des parties et s'impose aux juges ; qu'en l'espèce, le contrat « auto pass » souscrit auprès de la société GMF stipule : « 2.4 La garantie du conducteur : Cette garantie intervient en cas d'accident de la circulation impliquant le véhicule assuré et engageant la responsabilité totale ou partielle du conducteur. Elle permet d'indemniser : les atteintes corporelles subies par le conducteur blessé, ou, en cas de décès du conducteur, le préjudice économique subi par : son conjoint non séparé de corps ou de fait ou son partenaire lié par un pacte de solidarité ou son concubin, les autres personnes à charge » ; qu'il en résulte qu'en cas de blessures, seul l'assuré peut prétendre à une indemnisation ; qu'en indemnisant dès lors les enfants de Mme [Y], assurée blessée non décédée, la cour d'appel a méconnu le contrat et violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil. »
Réponse de la Cour
Recevabilité des moyens
6. Mme [Y] et les consorts [Y] contestent la recevabilité des moyens. Ils soutiennent que les moyens sont nouveaux et mélangés de fait et de droit.
7. Cependant, les moyens ne se réfèrent à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond.
8. Les moyens, de pur droit, sont, dès lors, recevables.
Bien-fondé des moyens
Vu l'article 1134, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
9. Aux termes de ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
10. L'arrêt, après avoir relevé que les conditions générales et particulières n'avaient pas été signées par Mme [Y], retient que la clause stipulant un plafond de garantie et les conditions prévoyant les postes indemnisables ne lui sont pas opposables et que, dès lors, cette dernière est fondée à solliciter l'indemnisation de l'intégralité de ses préjudices, au titre de la garantie conducteur, selon les règles du droit commun.
11. Il retient également le droit à indemnisation des enfants de Mme [Y], en qualité de victimes par ricochet, selon les règles du droit commun.
12. En se déterminant ainsi, sans rechercher quel était le périmètre contractuel de la garantie, laquelle délimitait le droit à indemnisation de l'assurée et des victimes par ricochet, au titre de cette assurance des dommages corporels du conducteur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.




Civ.2 13 février 2025 n° 23-13.925

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 149 F-D
Pourvoi n° M 23-13.925




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

M. [M] [R], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 23-13.925 contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2023 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-6), dans le litige l'opposant à la société Allianz IARD, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [R], de la SCP Duhamel, avocat de la société Allianz IARD, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 janvier 2023), rendu sur renvoi après annulation (2e Civ., 3 février 2022, pourvoi n° 20-19.753), le 20 septembre 1996, M. [R] a été victime d'un accident de la circulation.
2. Invoquant un contrat d'assurance comprenant une garantie contre les accidents corporels souscrit auprès de la société AGF, aux droits de laquelle est venue la société Allianz IARD (l'assureur), M. [R] l'a assignée à fin de mise en oeuvre du contrat.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
4. M. [R] fait grief à l'arrêt d'assortir la condamnation de l'assureur à lui payer la somme de 228 632 euros, sauf à déduire les provisions versées à hauteur de 114 273 euros, d'intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt et d'ordonner la capitalisation des intérêts dus pour une année entière, alors « que le jugement doit être motivé ; qu'en retenant que la somme allouée à M. [R] serait « augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt », sans énoncer le moindre motif sur la demande de M. [R] tendant à ce que les intérêts au taux légal, avec capitalisation, sur la totalité de l'indemnité indexée, soit la somme de 228 632 euros, commencent à courir à compter du 25 juillet 1997, date de la lettre qu'il avait adressée à l'assureur pour solliciter le règlement de l'indemnité, et, en tout état de cause, du 6 avril 1998, date de l'assignation en référé initiale, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
5. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
6. Pour faire courir les intérêts moratoires de la somme due par l'assureur à compter de sa décision, l'arrêt retient que cette somme sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt.
7. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. [R], qui faisait valoir que le point de départ des intérêts moratoires devait être fixé au 25 juillet 1997, ou subsidiairement au 6 avril 1998, dates auxquelles il soutenait avoir sollicité de l'assureur le règlement de la somme due en exécution du contrat, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
8. La cassation du chef de dispositif portant sur les intérêts moratoires n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'assureur aux dépens et le déboutant de sa demande formée en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.




Civ.3 13 février 2025 n° 22-21.592

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL

COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Rejet

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 93 F-D
Pourvoi n° Z 22-21.592


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

1°/ M. [V] [M],
2°/ Mme [D] [E], épouse [M],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
ont formé un pourvoi principal n° Z 22-21.592 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2022 par la cour d'appel de Rouen (1re chambre civile) et un pourvoi additionnel contre l'arrêt rendu le 10 novembre 2021 par la même cour, dans le litige les opposant à la commune de Martot, représentée par son maire en exercice, domicilié en cette qualité en [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leurs pourvois principal et additionnel, respectivement, deux et un moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Rat, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de M. et Mme [M], de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la commune de Martot, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Rat, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. L'arrêt attaqué (Rouen, 6 juillet 2022) fixe les indemnités revenant à M. et Mme [M], par suite de l'expropriation, au profit de la commune de Martot, de parcelles leur appartenant.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi additionnel, et sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, et sur le troisième moyen du pourvoi principal
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. M. et Mme [M] font grief à l'arrêt de fixer comme il le fait l'indemnité principale de dépossession, alors « que si les orientations d'aménagement et de programmation d'un plan local d'urbanisme peuvent comprendre un document graphique, tout élément graphique qui n'est pas repris dans la partie écrite du document constitue une illustration dépourvue de caractère contraignant ; que le périmètre des secteurs auxquels les orientations d'aménagement et de programmation sont applicables doit être délimité dans la partie graphique du règlement du plan local d'urbanisme ; qu'en jugeant, pour écarter la qualification de terrain à bâtir des parcelles expropriées, que le plan local d'urbanisme de la commune de Martot du 24 mars 2016 contenait des orientations d'aménagement et de programmation opposables aux époux [M] prévoyant dans la zone la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, quand les orientations ainsi qualifiées résultaient exclusivement d'un document graphique intitulé schéma d'aménagement, figurant dans la note de présentation et le projet d'aménagement de la commune, et dont le périmètre n'était pas repris dans le plan de zonage du règlement du plan local d'urbanisme, ce dont il se déduisait que le schéma d'aménagement en cause ne pouvait constituer une orientation d'aménagement et de programmation opposable aux époux [M], la cour d'appel a violé les article R. 151-6 et R. 151-11 du code de l'urbanisme. »
Réponse de la Cour
4. La cour d'appel a relevé que la note de présentation de la modification du PLU, intervenue le 24 mars 2016, comportait une modification du zonage avec création d'une zone AUc et un schéma d'aménagement portant sur la réalisation d'un projet d'ensemble, intégré à la notice et au dossier devant servir de base au projet opérationnel de la commune, et précisait que le projet, portant sur la réalisation d'un quartier d'habitat de quarante logements environ dont six logements sociaux, devait être réalisé par la commune.
5. Ayant retenu que ce schéma d'aménagement constituait une orientation d'aménagement et de programmation visée à l'article R. 151-8 du code de l'urbanisme, elle a pu en déduire que, la zone considérée étant réservée à une opération d'aménagement d'ensemble, la dimension des réseaux devait être appréciée au regard de l'ensemble de cette zone, et souverainement retenu qu'étant insuffisante, les terrains ne pouvaient être qualifiés de terrains à bâtir.
6. Le moyen, en ce qu'il vise les article R. 151-6 et R. 151-11 du code de l'urbanisme, est inopérant.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-18.749

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Rejet

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 100 F-D
Pourvoi n° E 23-18.749



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
M. [T] [Z], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° E 23-18.749 contre l'arrêt rendu le 23 juin 2023 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 2), dans le litige l'opposant à Mme [D] [W], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Cassou de Saint-Mathurin, conseiller référendaire, les observations de la SCP Françoise Fabiani-François Pinatel, avocat de M. [Z], de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de Mme [W], après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 23 juin 2023), par jugement du 15 février 2012, la convention réglant les effets du divorce de M. [Z] et Mme [W], se référant à une convention d'indivision du 24 mai 2011, a été homologuée.
2. La convention de divorce prévoyait une prestation compensatoire au profit de l'épouse sous la forme, notamment, d'un droit d'usage et d'habitation sur un immeuble maintenu en indivision, converti, selon la convention d'indivision, en capital de 66 000 euros en cas de vente de l'immeuble indivis dans le délai de cinq ans.
3. Le 16 décembre 2016, M. [Z] et Mme [W] ont conclu une promesse unilatérale de vente portant sur cet immeuble.
4. Après la vente, reçue le 10 mars 2017, le notaire a versé à Mme [W], outre la part du prix correspondant à ses droits indivis, la somme de 66 000 euros correspondant à la prestation prévue par la convention de divorce.
5. M. [Z] a assigné Mme [W] en restitution de cette somme.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. M. [Z] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de restitution, alors :
« 1°/ que l'obligation devient pure et simple à compter de l'accomplissement de la condition suspensive ; qu'en considérant que Mme [W] était en droit de percevoir le capital de 66 000 euros prévu à la convention d'indivision en date du 24 mai 2011 aux motifs que la vente immobilière aurait été définitivement conclue dès la conclusion de la promesse unilatérale de vente en date du 16 décembre 2016, soit dans le délai de cinq ans prévu par la convention d'indivision, sans prendre en compte la clause 9.9 d'« obtention d'un ou plusieurs prêts » assortissant la promesse d'une condition suspensive qui n'avait donc pu se réaliser que postérieurement au 16 décembre 2016, la cour d'appel a dénaturé, par omission, le sens pourtant clair et précis de la promesse unilatérale de vente en méconnaissance des articles 1306-4 et 1103 du code civil ;
2°/ qu'en considérant que Mme [W] était en droit de percevoir le capital de 66 000 euros prévu à la convention d'indivision en date du 24 mai 2011 aux motifs que la promesse de vente aurait valu vente dès le 16 décembre 2016, soit dans le délai de cinq ans prévu par la convention d'indivision, sans prendre en compte la clause 8 de la promesse unilatérale de vente précisant, au titre de la « date de levée de l'option », que le bénéficiaire devait « soit signer, avec le promettant, l'acte authentique de vente en payant le prix et les frais dans les termes convenus aux présentes ; soit faire savoir au promettant ou à son notaire par lettre recommandée avec avis de réception ou par exploit d'huissier, qu'il lève l'option », la cour d'appel a dénaturé, par omission, le sens pourtant clair et précis de la promesse unilatérale de vente en litige en méconnaissance de l'article 1103 du code civil. »
Réponse de la Cour
7. La cour d'appel, qui n'a pas énoncé que la vente avait été définitivement conclue dès le 16 décembre 2016, ni que la promesse valait vente à cette date, a, par une interprétation souveraine des termes de la promesse et de la convention de divorce, retenu que la promesse valait engagement ferme et irrévocable de M. [Z] et Mme [W] de vendre l'immeuble indivis et que, cet engagement étant intervenu dans les cinq ans de l'homologation de la convention de divorce, les conditions de la conversion en capital du droit d'usage et d'habitation de Mme [W] étaient réunies.
8. Dès lors, le moyen n'est pas fondé.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-17.978

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 88 F-D
Pourvoi n° S 23-17.978



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

La société Sogwac, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° S 23-17.978 contre l'arrêt rendu le 30 mars 2023 par la cour d'appel de Basse-Terre (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [N] [R], domiciliée [Adresse 2],
2°/ à Mme [W] [K], domiciliée [Adresse 1],
3°/ à M. [I] [B], domicilié [Adresse 4],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pety, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Sogwac, de la SCP Foussard et Froger, avocat de Mmes [R] et [K] et de M. [B], après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Pety, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 30 mars 2023), par acte sous seing privé du 26 janvier 2006, [Z] [K]-[V] a donné à bail à la société Sogwac (le preneur) un local à usage commercial, moyennant le paiement d'un loyer mensuel de 488 euros net de charges.
2. Cet acte, enregistré à l'administration fiscale, comprenait une promesse unilatérale de vente consentie au bénéfice du preneur pour la durée de la location.
3. [Z] [K]-[V] est décédée le 27 avril 2011, laissant pour lui succéder ses trois enfants, M. [I] [B] et Mmes [N] [R] et [W] [K] (les bailleurs).
4. La société Sogwac a assigné ces derniers en réitération authentique de la vente, répétition des charges indûment versées et compensation du solde avec le prix de vente.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
6. Le preneur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de répétition des charges versées aux bailleurs et de le condamner à leur payer une certaine somme au titre des loyers échus du 20 janvier 2015 au 31 août 2022, alors « que les charges dues par le preneur sont énumérées de façon limitative, celles dont le bailleur demande le remboursement et non comprises dans la liste ne sont pas dues par le locataire ; qu'en condamnant la société Sogwac au paiement d'une somme de 44 408 euros au titre des loyers impayés sans déduire la somme payée indûment par la société Sogwac au titre des charges aux motifs erronés que la société Sogwac avait exécuté ledit contrat de bail pendant 9 ans, et ne pouvait soutenir désormais que ces dernières n'étaient pas dues, au regard d'une éventuelle imprécision terminologique du contrat, la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1134, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
7. Aux termes de ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
8. Il en résulte que, dans l'état du droit antérieur à la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, si les parties à un contrat de bail commercial sont libres de convenir de la répartition entre elles des charges, impôts, taxes et redevances liés à ce bail, seules les stipulations contractuelles déterminent celles d'entre elles qui pèsent sur le preneur.
9. Pour rejeter la demande en répétition de l'indu formée par le preneur, l'arrêt retient que ce dernier s'est acquitté pendant neuf années d'une certaine somme au titre du paiement des charges ou charges locatives, ce locataire ne pouvant désormais soutenir que celles-ci n'étaient pas dues compte tenu d'une imprécision terminologique du bail.
10. En se déterminant ainsi, sans rechercher comme il lui incombait, à quels paiements correspondaient les charges dont le preneur sollicitait la répétition et si celles-ci lui avaient été imputées par une stipulation du contrat, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas donné de base légale à sa décision.




Civ.3 13 février 2025 n° 22-22.393

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 84 FS-D
Pourvoi n° V 22-22.393



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
L'association Fédération patrimoine environnement, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 22-22.393 contre l'arrêt rendu le 24 août 2022 par la cour d'appel de Lyon (8e chambre), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société IF Allondon, dont le siège est [Adresse 5],
2°/ à l'association France nature environnement Ain, dont le siège est [Adresse 1],
3°/ à l'association Pro Natura [Localité 4], dont le siège est [Adresse 3] (Suisse),
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Guillaudier, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de l'association Fédération patrimoine environnement, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société IF Allondon, et l'avis de Mme Delpey-Corbaux, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Guillaudier, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, Mme Abgrall, MM. Pety, Brillet, Mme Foucher-Gros, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, Mme Delpey-Corbaux, avocat général, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à l'association Fédération patrimoine environnement du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'association France nature environnement Ain et l'association Pro Natura [Localité 4].
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 24 août 2022), rendu en référé, par arrêté du 22 décembre 2017, un permis de construire un ensemble immobilier valant autorisation d'exploitation commerciale sur le territoire de la commune de [Localité 6] a été délivré à la société IF Allondon.
3. Soutenant notamment que la réalisation des premiers travaux aurait provoqué des atteintes à l'environnement, l'association Fédération patrimoine environnement, l'association France nature environnement Ain et l'association Pro Natura [Localité 4] ont assigné la société IF Allondon en référé-expertise.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. L'association Fédération patrimoine environnement fait grief à l'arrêt de rejeter la demande d'expertise, alors « que pour justifier d'un motif légitime à conserver ou à établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, le demandeur doit simplement établir l'existence d'un litige potentiel mais n'a pas à établir le bien-fondé de l'action envisagée ; qu'en relevant, pour dire que la demande d'expertise n'était pas fondée sur un motif légitime, que les appelantes ne justifiaient d'aucun élément permettant de faire le lien entre le préjudice écologique qu'elles invoquaient et les travaux effectués par la société IF Allondon, la cour d'appel s'est prononcée sur le bien-fondé de l'action en réparation au titre d'un préjudice écologique que les appelantes envisageaient d'intenter à l'encontre de cette société, et a violé l'article 145 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 145 du code de procédure civile :
5. Aux termes de ce texte, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
6. Pour rejeter la demande d'expertise, l'arrêt retient que les associations ne justifient d'aucun élément scientifique ou technique objectif permettant de faire un lien non contestable entre les constats dont elles font état et les travaux et qu'il ne ressort aucunement du rapport de la société Hydro géo environnement qu'il existe des éléments factuels précis permettant de considérer que la construction du centre commercial est à l'origine d'un préjudice écologique.
7. Il ajoute que si les différentes études et notes produites par les associations tendent à démontrer que leurs inquiétudes quant à l'impact écologique du projet sont légitimes, elles ne sont pas suffisantes pour établir que le préjudice écologique allégué est réel et susceptible de justifier une procédure au fond en réparation.
8. En statuant ainsi, alors que l'article 145 du code de procédure civile n'exige pas que le demandeur établisse le bien-fondé de l'action en vue de laquelle la mesure d'instruction est sollicitée, la cour d'appel a violé le texte susvisé.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-13.761

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
CC


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 87 F-D
Pourvoi n° G 23-13.761



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

La société Caisse d'épargne et de prévoyance de Midi-Pyrénées, société anonyme à directoire et conseil de surveillance, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 23-13.761 contre l'arrêt rendu le 24 janvier 2023 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, 1re section), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société AD promotion, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société Albert et fils bâtiment, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 6],
3°/ à la société A2DE, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4],
4°/ à la société AI3C - atelier d'ingénieurs conseil concepteurs coordinateurs, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 7],
5°/ à la société Socotec construction, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 5], venant aux droits de la société Socotec France,
6°/ à la Mutuelle des architectes français, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
La société AD promotion a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi provoqué éventuel contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, quatre moyens de cassation.
La demanderesse au pourvoi provoqué éventuel invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Abgrall, conseiller, les observations de la SAS Boucard-Capron-Maman, avocat de la société Caisse d'épargne et de prévoyance de Midi-Pyrénées, de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société AD promotion, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Albert et fils bâtiment, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société A2DE et de la Mutuelle des architectes français, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Abgrall, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société Caisse d'épargne et de prévoyance de Midi-Pyrénées (la Caisse d'épargne) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre les sociétés Albert et fils bâtiment, A2DE, AI3C, Socotec construction et contre la Mutuelle des architectes français.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse , 24 janvier 2023), par acte authentique du 7 août 2014, la Caisse d'épargne a acquis de la société AD promotion, un local à usage commercial en l'état futur d'achèvement, au prix de 381 264,90 euros.


3. Le procès-verbal de livraison a été signé le 8 décembre 2014, avec réserves.
4. La réserve relative à la hauteur sous plafond sous poutre n'ayant pas été levée, la Caisse d'épargne, invoquant la non-conformité du bien aux dispositions sur le handicap, a assigné la société AD promotion en résolution de la vente et paiement de dommages-intérêts.
Examen des moyens
Sur les premier, deuxième et quatrième moyens du pourvoi principal
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal
Enoncé du moyen
6. La Caisse d'épargne fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société AD promotion la somme de 11 437,94 euros au titre du solde du prix de vente, alors :
« 1°/ que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que pour condamner la Caisse à payer à la venderesse une somme de 11 437,94 euros à titre de solde du prix de vente, la cour d'appel a relevé que ce montant représentait 3 % du prix payable à la levée des réserves ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant que la réserve relative à la hauteur des poutres en béton n'avait pas été levée, la cour d'appel a méconnu la loi des parties, violant ainsi l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°/ que les exceptions tendant au rejet au fond de la demande adverse ne sont susceptibles ni de prescription ni de forclusion ; que pour condamner la Caisse à payer à la venderesse une somme de 11 437,94 euros à titre de solde du prix de vente, la cour d'appel a relevé que ce montant représentait 3 % du prix payable à la levée des réserves, sauf en ce qui concernait la hauteur des poutres en béton, l'action en résolution de la vente étant forclose sur ce point ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a soumis à la forclusion prévue par l'article 1648, alinéa 2, du code civil l'exception tirée de la non-levée de la réserve relative à la hauteur des poutres en béton, qui tendait au rejet de la demande en paiement, la cour d'appel a violé ce texte par fausse application. »




Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen
7. La société AD promotion conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient qu'il est nouveau.
8. Cependant, le moyen, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations des juges du fond, est de pur droit.
9. Il est donc recevable.
Bien-fondé du moyen
Vu les articles 1134, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1648, alinéa 2, du code civil :
10. Aux termes du premier de ces textes, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
11. Aux termes du second, dans le cas prévu à l'article 1642-1, l'action doit être introduite, à peine de forclusion, dans l'année qui suit la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices ou des défauts de conformité apparents.
12. Pour condamner la Caisse d'épargne à payer la somme de 11 437,95 euros à la société AD promotion, l'arrêt relève que 3 % du prix était payable à la levée des réserves, que, selon le procès-verbal du 14 janvier 2015, celles-ci ont été levées, sauf celle concernant la hauteur des poutres béton, et que l'action en résolution de la vente sur ce fondement est forclose.
13. En statuant ainsi, après avoir constaté que, contrairement aux stipulations contractuelles, une réserve n'avait pas été levée et alors que la forclusion de l'action en résolution de la vente pour vices apparents fondée sur les articles 1642-1 et 1648 du code civil n'a pas d'incidence sur une exception au paiement du solde du prix tirée d'une stipulation du contrat de vente, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Sur le moyen du pourvoi provoqué
Enoncé du moyen
14. La société AD promotion fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il met hors de cause les sociétés A2DE, MAF, Socotec France, AI3C et Albert et fils bâtiment, alors « que la cour d'appel a confirmé le jugement en ce qu'il a mis hors de cause les sociétés appelées en garantie par la société AD promotion motif pris de l'absence de condamnation prononcée contre cette dernière ; qu'en cas de cassation sur le fondement du pourvoi

principal, il y aura lieu de casser également ce chef par voie de conséquence et en application de l'article 625 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
15. La société AD promotion n'ayant sollicité, dans ses conclusions d'appel, la garantie de ces sociétés qu'en cas de résolution du contrat ou de condamnation à paiement de dommages-intérêts à la Caisse d'épargne et non pas en cas de rejet de sa demande de paiement du solde du prix, le chef de dispositif critiqué est sans lien de dépendance nécessaire avec la cassation prononcée sur le troisième moyen du pourvoi principal.
16. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mise hors de cause
17. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause les sociétés A2DE, Albert et fils bâtiment et la MAF, dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-16.780

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Rejet

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 90 F-D
Pourvoi n° Q 23-16.780


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

M. [D] [S], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Q 23-16.780 contre l'arrêt rendu le 11 mai 2023 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [F] [G],
2°/ à Mme [Y] [X], épouse [G],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Foucher-Gros, conseiller, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. [S], après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Foucher-Gros, conseiller rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 11 mai 2023), le 6 mai 2015, M. et Mme [G] ont conclu avec M. [S], architecte, un contrat de maîtrise d'oeuvre avec mission complète pour l'extension et la réhabilitation d'une maison individuelle.
2. Invoquant l'augmentation du coût des travaux, les maîtres de l'ouvrage ont résilié le contrat.
3. L'architecte a assigné les maîtres de l'ouvrage en paiement et ces derniers ont sollicité l'allocation de dommages-intérêts.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. M. [S] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'honoraires et de le condamner à payer la somme de 8 750 euros à M. et Mme [G] au titre du manquement à son obligation de conseil, alors :
« 1°/ que le juge ne doit pas dénaturer les termes clairs et précis des actes qui lui sont soumis ; qu'en retenant que « le contrat d'architecte mentionnait expressément que les maîtres d'ouvrage disposaient d'une enveloppe financière de 378 000 ¿ HT » pour juger que M. [S] a manqué à son obligation de conseil quant au surcoût engendré par les modifications sollicitées par les clients, alors pourtant qu'aux termes du contrat, les parties avaient coché la case indiquant qu'au jour de la signature du contrat « Le maî
2°/ que le manquement du professionnel à son obligation de conseil et d'information ne dispense pas le client de tout devoir de prudence et de diligence ; qu'en retenant que « les maîtres d'ouvrages ne pouvaient ignorer que les modifications étaient de nature à entraîner un surcoût » tout en jugeant que seule la responsabilité de M. [S], architecte et exposant, pouvait être retenue au titre du dépassement du coût des travaux, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a ainsi violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ;
3°/ que le juge qui, sans prononcer la résolution du contrat, répare le préjudice causé par son exécution ne peut rejeter la demande de paiement des prestations contractuelles ; qu'aux termes du contrat d'architecte qui les liait à M. [S], les époux [G] se sont engagés à le rémunérer à hauteur de 12 % du montant hors taxe des travaux ; qu'en rejetant la demande de M. [S] tendant au paiement des honoraires contractuellement dus sans prononcer la résolution du contrat et alors qu'elle réparait par ailleurs son manquement à l'obligation contractuelle d'information et de conseil au moyen de l'octroi de dommages et intérêts, la cour d'appel a méconnu la force obligatoire du contrat et violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ;
4°/ que les conséquences d'un manquement à une obligation d'information et de conseil ne peuvent s'analyser qu'en une perte de chance dès lors qu'il n'est pas certain que, mieux informé, le créancier de l'obligation d'information se serait trouvé dans une situation plus avantageuse ; qu'en jugeant que le manquement de M. [S] à son obligation de conseil quant au surcoût engendré par les modifications sollicitées par les clients a « entraîné un préjudice pour les époux [G] dès lors qu'ils se sont investis dans un projet pour lequel ils ont déménagé pendant sept mois en pure perte pour permettre la réalisation de travaux qui n'ont pu être entrepris » sans constater que, mieux informés, ceux-ci auraient totalement renoncé à leur projet et n'auraient ainsi pas déménagé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause. »
Réponse de la Cour
5. En premier lieu, ayant constaté que le contrat prévoyait que les travaux étaient d'un montant estimé de 350 000 euros, auxquels s'ajoutaient les honoraires de l'architecte, c'est sans en dénaturer les termes que la cour d'appel a souverainement retenu, nonobstant l'expression « enveloppe financière », que la commune volonté des parties était d'estimer à la somme de 378 000 euros le coût de l'opération.
6. En deuxième lieu, ayant relevé, d'une part, que la demande de permis de construire faisait état d'une surface à construire ou rénover de cinquante mètres carrés de plus que ce qui avait été contractuellement convenu, sans qu'il fût démontré que M. [S] ait informé les maîtres de l'ouvrage d'une augmentation significative du coût de leur projet, d'autre part, qu'après consultation des entreprises, l'évaluation du coût de l'opération était supérieure de 55,11 % à celle initialement convenue, alors que le surcoût engendré par les demandes de M. et Mme [G] relevait d'éléments techniques que ces derniers, profanes dans le domaine de la construction, ne maîtrisaient pas, et enfin que M. [S] ne justifiait pas les avoir informés pour leur permettre d'apprécier de façon éclairée les conséquences de leur choix, la cour d'appel a pu en déduire que l'architecte avait manqué à son obligation de conseil.
7. En troisième lieu, ayant constaté que M. et Mme [G] avaient unilatéralement résilié le contrat, la cour d'appel, qui n'é
8. En quatrième lieu, elle a retenu, sans être tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, que le manquement de M. [S] à son devoir de conseil et d'information avait causé un préjudice à M. et Mme [G], dont elle a souverainement apprécié le montant.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.




Civ.2 13 février 2025 n° 23-17.739

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 141 F-D
Pourvoi n° H 23-17.739



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
1°/ M. [X] [M], domicilié [Adresse 3],
2°/ Mme [G] [M], domiciliée [Adresse 5],
3°/ M. [P] [M], domicilié [Adresse 4],
4°/ Mme [Z] [T],
5°/ Mme [R] [M],
toutes deux domiciliées [Adresse 2],
ont formé le pourvoi n° H 23-17.739 contre l'arrêt rendu le 25 avril 2023 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige les opposant à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Salomon, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Briard, Bonichot et Associés, avocat de M. [X] [M], Mme [G] [M], M. [P] [M], Mme [T] et Mme [R] [M], de la SCP Duhamel, avocat de la société Allianz IARD, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Salomon, conseiller rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 25 avril 2023), M. [X] [M], victime d'un accident de la circulation survenu le 24 novembre 1993, a sollicité la réparation de son préjudice corporel auprès de son assureur, la société Préservatrice foncière assurances (PFA). Par jugement du 28 octobre 1999, un tribunal de grande instance lui a alloué une indemnité à ce titre.
2. À la suite de la détérioration de son état de santé, M. [X] [M], ainsi que Mme [T], M. [P] [M], Mmes [R] et [G] [M] (les consorts [M]) ont sollicité des dommages et intérêts complémentaires. La société Allianz IARD, venant aux droits de la société PFA, leur a opposé un plafond de garantie.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
3. Les consorts [M] font grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré les demandes présentées par eux irrecevables en application du principe de l'estoppel, alors « que tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une absence de motifs ; que dans ses motifs, l'arrêt retient que le moyen d'irrecevabilité tiré d'une contradiction avec soi-même n'est pas fondé car, en l'absence de débat sur l'applicabilité du plafond de garantie, les consorts [M] ne peuvent pas être considérés comme en ayant accepté l'applicabilité, peu important que l'existence de ce plafond ait été mentionnée et peu important l'identité de la partie qui a pu en mentionner l'existence dans ses écritures d'alors, de sorte que les intéressés ne se contredisent pas aujourd'hui au dépens de la société Allianz Iard SA ; que l'arrêt a nonobstant confirmé le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, y compris celle ayant déclaré les demandes des consorts [M] irrecevables en vertu du principe de l'estoppel ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif et méconnu les exigences des articles 455 et 458 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
4. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé à peine de nullité. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
5. Après avoir, dans les motifs de sa décision, retenu que le moyen d'irrecevabilité tiré d'une contradiction avec soi-même n'était pas fondé, la cour d'appel a, dans le dispositif, confirmé le jugement en toutes ses dispositions.
6. En statuant ainsi, alors que le jugement avait déclaré les demandes des consorts [M] irrecevables en application du principe de l'estoppel, la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Et sur le second moyen
Enoncé du moyen
7. Les consorts [M] font grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de l'ensemble de leurs demandes, alors « qu'une clause de limitation de garantie doit avoir été portée à la connaissance de l'assuré au moment de son adhésion à la police ou, tout au moins, antérieurement à la réalisation du sinistre, pour lui être opposable ; qu'après avoir relevé que les conditions particulières de la police versées au débats indiquent avoir été éditées le lendemain de l'accident survenu le 24 novembre 1993, que ce document mentionne l'existence du plafond de garantie de 1 000 000 francs au titre de la garantie due au conducteur responsable, que même non signée par M. [X] [M], cette pièce qui n'est pas arguée de faux demeure probante de l'existence de cette limitation contractuelle, que ni les conditions générales du contrat d'assurance, ni la fiche contenant les clauses particulières propres à l'assuré souscripteur ne sont signées par ce dernier et que ces documents initiaux ne suffisent donc pas à démontrer que ce plafond a été porté à la connaissance du souscripteur et donc de toute personne pouvant avoir aussi la qualité d'assuré, l'arrêt retient toutefois, pour débouter les intéressés de leurs demandes, qu'à supposer que le plafond de garantie ait été ignoré de M. [X] [M] lors de la souscription du contrat, la teneur du jugement de 1999 prouve que l'existence de ce plafond a bien été évoquée par voie de conclusions échangées entre parties comparantes et que, M. [X] [M] en ayant donc eu connaissance à cette occasion, les consorts [M] ne peuvent plus, depuis la procédure de 1999, faire valoir que la limitation contractuelle n'a pas été portée à leur connaissance, de sorte que la société d'assurance Allianz Iard SA est fondée à opposer ce plafond de garantie tant au souscripteur qu'à toutes les personnes ayant la qualité d'assuré selon le contrat ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que l'assureur rapportait la preuve, lui incombant, que M. [X] [M] avait eu connaissance, avant l'accident dont il a été victime, du montant du plafond dont cet assureur se prévalait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1134, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, devenu l'article 1103 du même code, et les articles L. 112-2, L. 112-3 et L. 112-4 du code des assurances. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1134, alinéa 1er, du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 et les articles L. 112-2, L. 112-3 et L. 112-4 du code des assurances :
8. Il résulte de ces textes qu'une clause de limitation de garantie doit avoir été portée à la connaissance de l'assuré au moment de son adhésion à la police ou, tout au moins, antérieurement à la réalisation du sinistre, pour lui être opposable.
9. Pour dire le plafond de garantie contractuel opposable aux consorts [M] et les débouter de leurs demandes, l'arrêt relève que ni les conditions générales du contrat d'assurance, ni la fiche contenant les conditions particulières propres à l'assuré souscripteur ne sont signées par ce dernier. Il en déduit que ces documents initiaux ne suffisent pas à démontrer que ce plafond a été porté à la connaissance du souscripteur et, par conséquent, de toute personne pouvant avoir aussi la qualité d'assuré.
10. L'arrêt retient ensuite qu'à supposer que le plafond de garantie n'ait pas été porté à la connaissance de l'assuré lors de la souscription du contrat, la teneur du jugement de 1999 prouve que l'existence de ce plafond a bien été évoquée par voie de conclusions échangées entre parties comparantes et que l'assuré en a eu connaissance à cette occasion. Il ajoute que, depuis la procédure de 1999, les consorts [M] ne peuvent plus faire valoir que la limitation contractuelle n'a pas été portée à leur connaissance et que l'assureur est fondé à opposer ce plafond de garantie tant au souscripteur qu'à toutes les personnes ayant la qualité d'assurés selon le contrat.
11. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir que l'assureur rapportait la preuve, lui incombant, que M. [M] avait eu connaissance, avant l'accident dont il a été victime, du montant du plafond dont cet assureur se prévalait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-21.136

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL

COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 92 F-D
Pourvoi n° Z 23-21.136



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
La société Mengue, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], agissant en la personne de son liquidateur M. [K] [R], a formé le pourvoi n° Z 23-21.136 contre l'arrêt rendu le 15 mai 2023 par la cour d'appel de Nouméa (chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé [Adresse 6], dont le siège est [Adresse 3], représenté par son syndic la société [Localité 5] immobilier, dont le siège est [Adresse 4],
2°/ à M. [V] [I], domicilié [Adresse 1],
3°/ à la société Alpha Insurance A/S, société étrangère, dont le siège est [Adresse 7] (Danemark), prise en la personne de son liquidateur judiciaire M. [D] [H], domicilié chez Advokatfirmaet Poul Schmith, Kammeradvocaten I/S à [Adresse 8] (Danemark),
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de la société Mengue, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société Mengue du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Alpha Insurance, prise en la personne de son liquidateur judiciaire, M. [H].
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 15 mai 2023), en 2008, la société Mengue, assurée auprès de la société Alpha Insurance, a confié à M. [I], architecte, la maîtrise d'oeuvre de la construction, en Nouvelle-Calédonie, d'un immeuble d'habitation dénommé « [Adresse 6] », qu'elle a vendu par lots et qui a été soumis au régime de la copropriété.
3. Le syndicat des copropriétaires de la [Adresse 6] (le syndicat des copropriétaires) a déposé une requête aux fins de condamnation de la société Mengue, de M. [I] et de la société Alpha Insurance à l'indemniser de dommages causés par des infiltrations d'eau.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. La société Mengue fait grief à l'arrêt de dire que les désordres présentent un caractère décennal, de retenir sa responsabilité et celle de M. [I] au visa des articles 1791 [lire 1792] et 2070 du code civil applicables en Nouvelle-Calédonie et de la condamner in solidum avec M. [I] à payer une certaine somme au syndicat des copropriétaires, alors :
« 1°/ que les désordres futurs ou évolutifs ne relèvent de la garantie décennale que lorsqu'il peut être constaté que l'atteinte à la destination de l'ouvrage interviendra avec certitude dans le délai de la garantie décennale ; qu'en se bornant à relever, pour dire que les désordres présentaient un caractère décennal et condamner in solidum M. [I] et la SARL Mengue au paiement de la somme de 17 736 265 FCFP sur le fondement de la garantie décennale, que l'expert judiciaire estime que les infiltrations conduiront à une dégradation accélérée du béton entraînant la corrosion des armatures de renfort et l'affaiblissement des propriétés mécaniques du matériau, sans constater que les désordres devaient atteindre, de manière certaine, dans les dix ans après la réception de l'ouvrage, la gravité requise pour la mise en oeuvre de la garantie, la cour d'appel a violé l'article 1792 du code civil applicable en Nouvelle-Calédonie dans sa rédaction applicable au litige ;
2°/ que la garantie décennale s'applique pendant un délai de dix ans à compter de la réception des travaux lorsque surviennent des dommages qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipements, le rendent impropre à sa destination ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire que les désordres présentaient un caractère décennal et condamner in solidum M. [I] et la SARL Mengue au paiement de la somme de 17 736 265 FCFP, que les désordres portent atteinte à la destination de l'ouvrage dans la mesure où le local commercial ne peut tolérer l'existence d'infiltrations, sans relever leur importance, leur persistance ou leur étendue, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser la gravité que doit revêtir le désordre pour rendre l'ouvrage impropre à sa destination et engager la responsabilité décennale des constructeurs et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du civil applicable en Nouvelle-Calédonie dans sa rédaction applicable au litige. »
Réponse de la Cour
5. La cour d'appel, qui a constaté, au vu du rapport d'expertise judiciaire déposé avant l'expiration du délai d'épreuve, que des eaux pluviales s'infiltraient dans le bâtiment et se répandaient dans le local commercial, en a souverainement déduit que les désordres ainsi constatés dans le délai légal rendaient l'ouvrage impropre à sa destination et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. La société Mengue fait grief à l'arrêt de dire que dans leurs rapports entre eux, la responsabilité sera partagée à hauteur de 55 % pour M. [I] et à hauteur de 45 % pour elle-même et de la condamner, en conséquence, à relever indemne M. [I] à hauteur de 45 % des condamnations prononcées à son encontre, alors « que le promoteur immobilier condamné à réparation au titre d'une responsabilité de plein droit ne peut, dans ses recours contre les constructeurs, conserver à sa charge une part de la dette de réparation que si une faute, une immixtion ou une prise délibérée du risque est caractérisée à
Réponse de la Cour
Vu l'article 1792 du code civil, dans sa rédaction applicable en Nouvelle-Calédonie :
7. Il résulte de ce texte que le maître de l'ouvrage, condamné à réparation au profit de l'acquéreur au titre d'une responsabilité de plein droit, ne peut, dans ses recours contre les constructeurs, conserver à sa charge une part de la dette de réparation que si une faute, une immixtion ou une prise délibérée du risque est caractérisée à son encontre. L'immixtion du maître de l'ouvrage n'est fautive que si celui-ci est notoirement compétent.
8. Pour condamner la société Mengue à garantir M. [I] à hauteur de 45 % des condamnations prononcées, l'arrêt énonce, d'abord, que l'architecte peut être déchargé de sa responsabilité en tout ou partie en cas d'immixtion fautive du maître de l'ouvrage, lorsque celui-ci est notoirement compétent.
9. Il retient, ensuite, que la société Mengue avait déjà procédé à deux opérations de promotion immobilière sur le territoire et connaissait l'influence du climat océanien sur le devenir des bétons utilisés en extérieur, que la désagrégation prématurée des bétons en raison de la médiocre qualité de ce matériau est connue de tous les professionnels de l'immobilier sur le territoire et qu'en sa qualité de promoteur, la société Mengue ne pouvait ignorer l'importance de la mise en oeuvre d'un processus d'étanchéité pour protéger l'ouvrage réalisé.
10. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser, d'une part, une immixtion du maître de l'ouvrage dans la conception ou l'exécution des travaux, d'autre part, la compétence notoire de ce dernier, précédemment qualifié de « profane en la matière », la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-17.425

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
JL



COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Rejet

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 97 F-D
Pourvoi n° R 23-17.425



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

1°/ M. [D] [X],
2°/ Mme [S] [F], épouse [X],
tous deux domiciliés [Adresse 2], [Localité 5],
3°/ M. [W] [E], domicilié [Adresse 6], [Localité 4],
ont formé le pourvoi n° R 23-17.425 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2023 par la cour d'appel de Nîmes (2e chambre, section A), dans le litige les opposant :
1°/ à la société MMA IARD assurances mutuelles, société d'assurance mutuelle,
2°/ à la société MMA IARD, société anonyme,
ayant toutes deux leur siège [Adresse 1], [Localité 10], et venant aux droits de la société Azur assurance IARD,
3°/ à Mme [Z] [P], épouse [I], domiciliée [Adresse 7], [Localité 8], prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'héritière de [R] [I], son époux décédé le 27 janvier 2022,
4°/ à M. [U] [N], domicilié [Adresse 9], [Localité 3],
défendeurs à la cassation.
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bironneau, conseiller référendaire, les observations de la SARL Gury & Maitre, avocat de M. et Mme [X] et de M. [E], de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat des sociétés MMA IARD assurances mutuelles et MMA IARD, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Bironneau, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. et Mme [X] et M. [E] du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme [I] et M. [N].
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 6 avril 2023), [R] [I] et Mme [I] ont confié les travaux de gros-oeuvre, charpente et couverture de leur maison d'habitation à M. [N], assuré auprès de la société Azur.
3. Le 30 mars 2007, [R] [I] et Mme [I] (les vendeurs) ont vendu la parcelle sur laquelle se trouvait le bâtiment toujours en cours de construction à M. et Mme [X] et à M. [E] (les acquéreurs).
4. Le 16 septembre 2016, se plaignant de désordres, les acquéreurs ont assigné en référé-expertise les vendeurs et M. [N], et ce dernier a appelé en expertise commune, son assureur, les sociétés MMA IARD et MMA IARD assurances mutuelles (les sociétés MMA), venant aux droits de la société Azur assurances IARD.
5. Les acquéreurs ont, ensuite, assigné ces mêmes parties en indemnisation sur le fondement de la garantie décennale. Les sociétés MMA ont opposé à leurs demandes la forclusion de dix ans à compter de la réception tacite de l'ouvrage.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. M. et Mme [X] et M. [E] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur action à l'encontre des sociétés MMA pour être forclose, alors :
« 1°/ que le fait de donner à un agent immobilier un mandat de vendre une parcelle de terrain sur lequel se trouve un ouvrage en construction ne caractérise pas la prise de possession dudit ouvrage ; qu'en retenant que les consorts [I] avaient pris possession de l'ouvrage inachevé en donnant mandat de vente de leur parcelle de terrain, sur lequel se trouvait l'ouvrage en construction, à l'agence BV Immobilier, et que la réception tacite dudit ouvrage devait être fixée à la date de ce mandat soit le 8 août 2006, la cour a violé l'article 1792-6 du code civil ;
2°/ que le juge doit motiver sa décision, ce qui implique qu'il ne la fonde pas sur des motifs hypothétiques ; qu'en retenant que la réception tacite était établie pour cela que les consorts [I] avaient pris possession de l'ouvrage inachevé en donnant mandat de vente à l'agence BV Immobilier le 8 août 2006 et que l'on pouvait retenir que la ?dernière? facture de l'entreprise [N] du 15 décembre 2005 avait été payée au vu de l'absence de demande en paiement formulée depuis dix-huit ans, la cour, qui s'est ainsi fondée sur un motif hypothétique, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que le juge doit motiver sa décision, ce qui implique qu'il ne la fonde pas sur de simples affirmations ; qu'en retenant que l'on pouvait retenir que la dernière facture de l'entreprise [N] du 15 décembre 2005 avait été payée ?au vu de l'absence de demande en paiement formulée depuis dix-huit ans? sans préciser de quels éléments du débat serait résultée cette absence de demande de paiement pendant dix-huit ans, la cour, qui a statué par voie de simple affirmation, a derechef violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que le juge doit motiver sa décision, ce qui implique qu'il ne la fonde pas sur de simples affirmations ; qu'en retenant que l'on pouvait retenir que la ?dernière? facture de l'entreprise [N] du 15 décembre 2005 avait été payée au vu de l'absence de demande en paiement formulée depuis dix-huit ans, sans préciser de quels éléments du débat il serait résulté que cette facture afférente à la mise ?hors d'eau? de l'ouvrage (dont elle relevait au demeurant qu'il était ?hors d'eau et hors d'air?), était la ?dernière? émise par l'entreprise [N], la cour a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que lorsque la prise de possession diffère dans le temps du paiement intégral du montant des travaux, la date de la réception tacite correspond à celle du dernier événement ; que les consorts [X]-[E] faisaient valoir qu'il incombait à l'assureur de prouver le paiement et sa ?date effective? ; qu'en laissant inconnue la date du prétendu paiement qu'elle retenait, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, dès lors qu'elle demeure dans l'ignorance de la concomitance ou non de la prétendue prise de possession et du prétendu paiement et, en l'absence de concomitance, dans l'ignorance de la date du dernier de ces deux évènements ; que la cour d'appel a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792-6 du code civil ;
6°/ qu'en ne répondant pas au moyen pris de ce qu'il incombait à l'assureur, qui se prévalait d'une réception tacite résultant de la prise de possession de l'ouvrage et de leur paiement intégral, de prouver la « date effective » du prétendu paiement dont il se prévalait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
7°/ que le juge doit motiver sa décision, ce qui implique que les motifs de sa décision ne soient pas contradictoires ; qu'en relevant que le fait que les acheteurs se soient comportés par la suite en castor ne peut utilement être invoqué pour retarder de manière potestative la date de réception de l'ouvrage dont ils avaient ?au demeurant reçu l'attestation de garantie décennale? pour un ouvrage ?terminé en décembre 2005? quand elle constatait par ailleurs que les travaux de M. [N] s'étaient poursuivis jusqu'en juin 2006, la cour, qui s'est contredite, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
8°/ que le juge doit motiver sa décision, ce qui implique qu'il ne la fonde pas sur de simples affirmations ; qu'en affirmant que les acheteurs se seraient vu remettre une attestation de garantie décennale ?pour un ouvrage terminé en décembre 2005? sans préciser de quels éléments du débat il serait résulté que cette attestation aurait comporté une telle précision sur la date à laquelle l'ouvrage aurait été terminé, la cour a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
9°/ que l'attestation de garantie décennale remise aux acquéreurs, en date du 1er juillet 2003, ne comportait aucunement la précision ?pour un ouvrage terminé en décembre 2005? et qu'en statuant ainsi, la cour a dénaturé ce document et violé l'article 1103 du code civil ;
10°/ que le fait pour un acquéreur de se faire remettre, à l'occasion de l'achat d'un bien, l'attestation de garantie décennale d'un entrepreneur intervenu sur ce bien n'enseigne rien sur la volonté du vendeur, maître de l'ouvrage, de recevoir les travaux de cet entrepreneur, une telle remise étant systématique, puisque le notaire instrumentaire commettrait une faute en ne remettant pas ces documents à l'acquéreur, que l'ouvrage ait été reçu ou non, de sorte qu'il ne saurait en être tiré aucun enseignement ; qu'en indiquant que le fait que les acheteurs se soient comportés par la suite en castor ne peut utilement être invoqué pour retarder de manière potestative la date de réception de l'ouvrage dont ils avaient ?au demeurant reçu l'attestation de garantie décennale pour un ouvrage teminé en décembre 2005?, la cour, à supposer qu'elle se soit fondée sur cette considération inopérante, aurait alors violé l'article 1792-6 du code civil. »
Réponse de la Cour
7. La cour d'appel a relevé que les vendeurs avaient donné à un agent immobilier mandat de vendre l'immeuble le 8 août 2006, faisant ainsi ressortir qu'au plus tard à cette date, ils avaient accepté l'ouvrage en l'état où il se trouvait pour le revendre.
8. Elle a pu déduire de ce seul motif, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les neuf dernières branches, que les maîtres de l'ouvrage avaient ainsi manifesté le 8 août 2006 leur volonté non équivoque de recevoir l'ouvrage, de sorte que, la réception tacite devant être fixée à cette date, l'action des acquéreurs était forclose.
9. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision.




Civ.2 13 février 2025 n° 22-12.452

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 140 F-D

Pourvois n° A 22-11.082 Q 22-12.452 JONCTION





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

I. 1°/ la société [M] et associés, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 3], représentée par son mandataire, la société BTSG, dont le siège est [Adresse 1], agissant en la personne de M. [B] [D],
2°/ M. [Y] [M], domicilié [Adresse 3],
3°/ M. [L] [J], domicilié [Adresse 8],
4°/ la société [X] [R], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 9], agissant en la personne de son mandataire ad hoc, M. [H] [T],
5°/ M. [X] [R], domicilié [Adresse 9],
ont formé le pourvoi n° A 22-11.082 contre un arrêt rendu le 30 novembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 13), dans le litige les opposant :
1°/ à la société de gestion commerciale privée, société anonyme,
2°/ à la société Échiquier développement, société en nom collectif,
3°/ à la société Sodipierre finance, société à responsabilité limitée,
ayant toutes trois leur siège [Adresse 10],
4°/ à la société Hanafa, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 5],
5°/ à la société Crédit du Nord, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],
6°/ à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Ile-de-France, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
7°/ à M. [P] [K], domicilié [Adresse 7], pris en qualité de mandataire judiciaire de la société Gannets,
défendeurs à la cassation.
II. 1°/ la société de gestion commerciale privée, société anonyme,
2°/ la société Échiquier développement, société en nom collectif,
3°/ la société Hanafa, société civile immobilière,
4°/ La société Sodipierre finance, représentée par la société Athena, prise en la personne de son mandataire ad hoc, Mme [G] [A], domiciliée [Adresse 6],
ont formé le pourvoi n° Q 22-12.452 contre le même arrêt rendu, dans le litige les opposant à M. [X] [R],
défendeur à la cassation.
Les demandeurs aux pourvois n° A 22-11.082 et Q 22-12.452 invoquent, à l'appui de leurs recours, un moyen unique de cassation.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société [M] et associés, représentée par son mandataire la société BTSG, agissant en la personne de Me [B] [D], de M. [M], de M. [J], de la société [N] [R], agissant en la personne de son mandataire ad hoc M. [H] [T], et de M. [R], de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de la Société de gestion commerciale privée, et des sociétés Échiquier développement, Hanafa et Sodipierre finance, représentée par la société Athena, prise en la personne de son mandataire ad hoc Mme [G] [A], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° A 22-11.082 et Q 22-12.452 sont joints.
Désistement partiel
2. Il est donné acte à la société [M] et associés, représentée par la société BTSG prise en la personne de M. [D], M. [M], M. [J], la société [X] [R], représentée par son mandataire ad hoc M. [T], et M. [R] du désistement de leur pourvoi en tant qu'il est dirigé contre M. [K], la société Crédit du Nord et la société Caisse d'épargne et de prévoyance d'Ile-de-France.
Faits et procédure
3. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 novembre 2021), par acte authentique reçu le 3 mars 1999 par M. [M] et M. [J], notaires, la société Montim'Immo a vendu un immeuble à la société Gannets, qui l'a revendu par lots, le premier, par acte reçu par M. [M] au profit de la société Hanafa, le deuxième, par acte reçu par M. [M] au profit de la société Jan Van Gent, puis revendu à la société Sodipierre finance, et le troisième, par acte reçu par M. [M] et M. [R] au profit de la société Échiquier développement, aux droits de laquelle se trouve la Société de gestion commerciale privée (la SGCP).
4. La nullité de l'acte de vente du 3 mars 1999 et des trois actes de vente subséquents a été prononcée par une décision irrévocable.
5. Après expertise, les sociétés SGCP, Échiquier développement, Sodipierre finance et Hanafa (les sociétés) ont assigné la société [M] et associés, M. [M], M. [J], la société [X] [R] et M. [R] (les notaires), ainsi que la société Jan Van Gent et M. [K], en qualité de liquidateur de la société Gannets, en indemnisation de leur préjudice. La société Caisse d'épargne et de prévoyance d'Ile-de-France et la société Crédit du Nord (les banques) sont intervenus volontairement à l'instance afin de solliciter l'indemnisation de leurs préjudices par les notaires et les sociétés.
6. Le jugement rendu le 6 janvier 2010, frappé d'appel, a donné lieu à trois arrêts de cour d'appel, le premier en date du 13 septembre 2011, partiellement cassé par un arrêt du 30 janvier 2013 (3e Civ., 30 janvier 2013, pourvois n° 11-27.970, 11-26.648, 11-26.074, Bull. 2013, III, n° 16), le deuxième du 26 novembre 2014, partiellement cassé par un arrêt du 19 mai 2016 (3e Civ., 19 mai 2016, pourvois n° 15-11.441, 15-11.444, 15-13.468, Bull. 2016, III, n° 67) et le troisième du 16 novembre 2017, le pourvoi formé contre ce dernier ayant été rejeté par un arrêt du 23 mai 2019 (3e Civ., 23 mai 2019, pourvois n° 18-10.687, 18-13.749).
7. Par actes des 22 et 28 décembre 2017, les sociétés ont assigné les notaires à fin de condamnation in solidum à leur payer les sommes qu'elles ont été condamnées à verser aux banques au titre du remboursement des emprunts immobiliers ainsi qu'au paiement des frais de procédure engagés.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi n° Q 22-12.452, formé par les sociétés
8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi n° A 22-11.082, formé par les notaires
Enoncé du moyen
9. Les notaires font grief à l'arrêt de dire recevable l'action des sociétés en réparation de leur préjudice résultant des frais de procédure engagés et de les condamner in solidum à leur payer la somme de 2 077 572,20 euros TTC, alors « qu'en toute hypothèse, en retenant, pour écarter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 13 septembre 2011, qu'aucune "décision n'a[vait] statué sur la demande d'indemnisation des frais et honoraires engagés du fait de la faute des notaires", quand cet arrêt avait, dans son dispositif, "débout[é] les sociétés SGCP, Échiquier développement, Sodipierre Finance et Hanafa de leur demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile", en sorte qu'il avait statué sur les frais exposés par ces sociétés et non compris dans les dépens, la cour d'appel, qui a dénaturé de document, a méconnu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis. »
Réponse de la Cour
Recevabilité du moyen contestée par la défense :
10. Les sociétés contestent la recevabilité du moyen. Elles font valoir que le moyen n'est recevable que de la part de M. [R] et de la société [X] [R], MM. [M] et [J] et la société [M] et associés, qui ne se sont pas prévalus de la fin de non-recevoir déduite de l'autorité de la chose jugée, n'étant pas recevables à faire grief à la cour d'appel d'avoir rejeté une fin de non-recevoir qu'ils n'avaient pas soulevée, ni à se prévaloir pour la première fois de l'autorité de chose jugée.
11. Cependant, le moyen, tiré de la dénaturation de l'arrêt du 13 septembre 2011, est né de la décision attaquée.
12. Le moyen est, dès lors, recevable.
Bien-fondé du moyen :
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :
13. Pour dire recevable l'action des sociétés en réparation de leur préjudice au titre des frais de procédure engagés et condamner in solidum les notaires à payer aux sociétés la somme de 2 077 572,20 euros, l'arrêt retient qu'aucune décision n'ayant statué sur la demande d'indemnisation des frais et honoraires engagés du fait de la faute des notaires, cette demande ne se heurte à aucune autorité de la chose jugée et est donc recevable.
14. En statuant ainsi, alors que l'arrêt du 13 septembre 2011 avait statué sur les demandes d'indemnités formées par les sociétés sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, lesquelles concernaient ceux des honoraires d'avocat exposés à l'occasion de cette instance, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de cet arrêt, a violé le principe susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
15. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif de l'arrêt disant recevable l'action des sociétés en réparation de leur préjudice au titre des frais de procédure engagés et condamnant in solidum les notaires à payer aux sociétés la somme de 2 077 572,20 euros entraîne la cassation du chef de dispositif disant que cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la décision, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.




Civ.2 13 février 2025 n° 23-16.750

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 146 F-D
Pourvoi n° H 23-16.750


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
La société Chubb european group SE, société d'assurance de droit anglais, dont le siège est [Adresse 1] (Royaume-Uni), ayant une succursale [Adresse 5], a formé le pourvoi n° H 23-16.750 contre l'arrêt rendu le 12 avril 2023 par la cour d'appel de Nîmes (chambre civile - 4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Le Palais des pains, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la société RGR, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],
3°/ à la société ADJE, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, prise en la personne de M. [I] [F], en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société RGR,
4°/ à la société [N] & associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, prise en la personne de Mme [O] [N], en qualité de mandataire judiciaire de la société RGR,
ayant toutes deux leur siège [Adresse 4],
5°/ au procureur général près la cour d'appel de Nîmes, domicilié en son parquet général, boulevard de la Libération, 30000 Nîmes,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Chubb european group SE, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Le Palais des pains, de la SCP Françoise Fabiani - François Pinatel , avocat de la société RGR, de la société ADJE, prise en la personne de M. [F], en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société RGR, de la société [N] & associés, prise en la personne de Mme [N], en qualité de mandataire judiciaire de la société RGR, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 12 avril 2023), par un contrat du 25 mars 2015, la société Le Palais des pains a confié la réalisation et la pose de vitrines réfrigérées à la société RGR, assurée auprès de la société Ace european group limited, devenue la société Chubb european group SE (l'assureur).
2. La société Le Palais des pains, se plaignant de retard et de malfaçons dans l'exécution du contrat, a assigné directement l'assureur à fin d'indemnisation de ses préjudices, en présence des sociétés ADJE et [N] & associés, en leur qualité de commissaire à l'exécution du plan et de mandataire judiciaire de la société RGR, placée en redressement judiciaire.
Examen des moyens
Sur le second moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. L'assureur fait grief à l'arrêt de dire que les clauses d'exclusion de garantie contenues dans les conditions générales et les conventions spéciales dont il se prévaut sont inopposables à la société RGR et donc à la société Le Palais des pains et de le condamner en conséquence à garantir le paiement de la somme de 321 259,13 euros due par la société RGR à la société Le Palais des pains, alors « que l'assureur peut opposer à l'assuré les clauses des conditions générales du contrat qui ont été portées à sa connaissance au moment de son adhésion à celui-ci ; que cette connaissance est établie par la mention, dans les conditions particulières signées par l'assuré, que celui-ci reconnaît avoir reçu les conditions générales ; qu'en l'espèce, l'assureur se prévalait d'exclusions de garantie stipulées dans les conditions générales et les conventions spéciales du contrat d'assurance ; que la cour d'appel a affirmé que l'assureur doit démontrer qu'il a remis les documents contractuels à l'assuré, que celui-ci en a pris connaissance et qu'il les a acceptés ; que la cour d'appel a constaté que les conditions particulières du contrat d'assurance avaient été signées par la société RGR le 29 janvier 2007, ce qui suffisait à établir que celle-ci en avait pris connaissance et les avait acceptées ; qu'en revanche, la cour d'appel a estimé que la formulation des conditions particulières, selon laquelle « l'assuré reconnaît avoir reçu un exemplaire [des] conditions générales [et des] convention spéciales responsabilité civile », ne permettait pas de retenir que la société RGR avait non seulement reçu ces documents, mais qu'elle en avait également pris connaissance et les avait acceptées ; que la cour d'appel en a déduit qu'à défaut de signature sur les conventions spéciales et les conditions générales, celles-ci n'étaient pas opposables à la société RGR, ni a fortiori à la société Le Palais des pains ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait de ses constatations que l'assuré avait signé les conditions particulières, qui portaient mention de ce qu'il reconnaissait avoir reçu les conditions générales et les conventions spéciales du contrat, de sorte que celles ci lui étaient opposables, la cour d'appel a violé les articles L. 112-2 et R. 112-3 du code des assurances, dans leur rédaction applicable au litige, et l'article 1134, devenu 1103, du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 112-2 et R. 112-3 du code des assurances, le premier dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2015-1033 du 20 août 2015 et le second dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2018-229 du 30 mars 2018 :
5. Il résulte de ces textes qu'une clause d'exclusion de garantie doit avoir été portée à la connaissance de l'assuré au moment de son adhésion à la police ou, tout au moins, antérieurement à la réalisation du sinistre, pour lui être opposable.
6. Pour dire que les clauses d'exclusion de garantie invoquées par l'assureur sont inopposables à l'assuré, et par conséquent au tiers lésé, l'arrêt constate que le document constituant les conditions particulières de la police de responsabilité civile comporte le tampon de la société RGR et une signature dont il n'est pas contesté qu'elle est celle du représentant de cette société, avec la date de conclusion du contrat, le 29 janvier 2007.
7. Il énonce que cette signature suffit à établir que la société RGR a eu connaissance de ces conditions particulières et les a acceptées.
8. L'arrêt relève ensuite qu'en première page de ces conditions particulières, il est mentionné que le contrat comporte plusieurs imprimés, précisément énumérés, dont l'assuré reconnaît avoir reçu un exemplaire.
9. Il ajoute que cette formulation, utilisée dans les conditions particulières, ne permet pas de retenir que l'assuré a non seulement reçu ces autres documents, ainsi listés, mais en a également pris connaissance et en a accepté les dispositions contractuelles.
10. Il retient, enfin, que ni les conventions spéciales ni les conditions générales dont se prévaut l'assureur ne portent la signature ou le tampon de la société RGR, de sorte que rien ne démontre que celle-ci y ait acquiescé.
11. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que l'assuré avait reconnu, par une mention expresse des conditions particulières revêtues de sa signature, que les conditions générales et les conventions spéciales, comportant les clauses d'exclusion litigieuses, lui avaient été remises lors de la signature du contrat, la cour d'appel a violé les textes susvisés.




Civ.3 13 février 2025 n° 23-17.636 B

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 3
CC


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation

Mme TEILLER, président


Arrêt n° 83 FS-B
Pourvoi n° V 23-17.636


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

Mme [R] [K], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° V 23-17.636 contre l'arrêt rendu le 22 mars 2023 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [V] [X],
2°/ à M. [H] [N],
3°/ à Mme [A] [D], épouse [N],
tous trois domiciliés [Adresse 2],
4°/ à Mme [U] [W], domiciliée [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
M. [X] et M. et Mme [N] ont formé, par mémoire déposé au greffe, un pourvoi provoqué éventuel contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.
Les demandeurs au pourvoi provoqué éventuel invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Pety, conseiller, les observations de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de Mme [K], de Me Balat, avocat de Mme [W], de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [X], et M. et Mme [N], et l'avis de Mme Delpey-Corbaux, avocat général, après débats en l'audience publique du 14 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Pety, conseiller rapporteur, M. Boyer conseiller doyen, Mme Abgrall, M. Brillet, Mmes Foucher-Gros, Guillaudier, conseillers, M. Zedda, Mmes Vernimmen, Rat, Bironneau, M. Cassou de Saint-Mathurin, conseillers référendaires, Mme Delpey-Corbaux, avocat général, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 22 mars 2023), par acte authentique du 27 avril 2015, Mme [W] a vendu une maison d'habitation à M. et Mme [N] en qualité de nus-propriétaires et à M. [X] en qualité d'usufruitier.
2. Par acte authentique du 4 juillet 2017, M. et Mme [N] et M. [X] (les vendeurs) ont revendu cet immeuble à Mme [K] (l'acquéreure).
3. Ayant découvert, sous l'habitation, la présence d'un réseau d'évacuation des eaux usées non signalé dans l'acte de vente, l'acquéreure, après dépôt d'un rapport d'expertise judiciaire, a assigné les vendeurs en résolution de la vente et paiement de dommages-intérêts au titre de la garantie des charges non déclarées.
4. Les vendeurs ont assigné Mme [W] en garantie.
Examen du moyen
Sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. L'acquéreure fait grief à l'arrêt de rejeter l'action en garantie qu'elle exerce à l'encontre des vendeurs, alors « que si l'héritage vendu se trouve grevé, sans qu'il en ait été fait de déclaration, de servitudes non apparentes, et qu'elles soient de telle importance qu'il y ait lieu de présumer que l'acquéreur n'aurait pas acheté s'il en avait été instruit, il peut demander la résiliation du contrat, si mieux il n'aime se contenter d'une indemnité ; que la garantie contre les charges occultes est une application du principe général de la garantie contre l'éviction, dont l'obligation légale est d'assurer à l'acquéreur la possession paisible de la chose vendue ; qu'en l'espèce, l'acte de vente du 4 juillet 2017 stipulait « Etat du bien : l'acquéreur prendra le bien dans l'état où il se trouve à ce jour, tel qu'il l'a vu et visité, le vendeur s'interdisant formellement d'y apporter des modifications matérielles ou juridiques. Il déclare que la désignation du bien figurant aux présentes correspond à ce qu'il a pu constater lors de ses visites. Il n'aura aucun recours contre le vendeur pour quelque cause que ce soit, notamment en raison : des vices apparents, des vices cachés » ; qu'en décidant que cette clause exonérait M. et Mme [N] et M. [X] de la garantie de l'article 1638 du code civil parce qu'elle s'appliquait « pour quelque cause que ce soit », quand la garantie de cet article vise à protéger l'acquéreur contre les droits que des tiers peuvent avoir ou revendiquer sur le bien cédé, et ne porte pas sur son état intrinsèque, de sorte que la clause de non-garantie de l'état du bien ne dispensait pas les vendeurs de garantir Mme [K] contre l'existence d'une servitude non apparente grevant le bien, la cour d'appel a violé l'article 1638 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1638 et 1627 du code civil :
6. Aux termes du premier de ces textes, si l'héritage vendu se trouve grevé, sans qu'il en ait été fait la déclaration, de servitudes non apparentes, et qu'elles soient de telle importance qu'il y ait lieu de présumer que l'acquéreur n'aurait pas acheté s'il en avait été instruit, il peut demander la résiliation du contrat, si mieux il n'aime se contenter d'une indemnité.
7. Cette disposition, qui figure au nombre des articles régissant la garantie en cas d'éviction, est une application du principe général posé par l'article 1626 du même code selon lequel le vendeur, dont l'obligation légale est d'assurer à l'acquéreur la possession paisible de la chose vendue, est obligé de droit à le garantir de l'éviction qu'il souffre dans la totalité ou partie de l'objet vendu ou des charges prétendues sur cet objet et non déclarées lors de la vente (3e Civ., 6 juillet 2023, pourvoi n° 22-13.179, publié).
8. Selon le second, les parties peuvent, par des conventions particulières, ajouter à la garantie d'éviction à laquelle le vendeur est tenu envers l'acquéreur ou en diminuer l'effet ; elles peuvent même convenir que le vendeur ne sera soumis à aucune garantie.
9. Il s'ensuit qu'à défaut de clause expresse contraire, le vendeur est tenu de la garantie des servitudes non apparentes non déclarées lors de la vente.
10. Pour rejeter l'action en garantie des charges non déclarées exercée par l'acquéreure contre les vendeurs, l'arrêt, relevant que l'expert judiciaire a mis en évidence la présence sous l'immeuble acquis d'un réseau d'évacuation d'eaux usées/eaux vannes non connu des vendeurs, retient que l'acte de vente du 4 juillet 2017 comporte une clause stipulant, au titre de l'état du bien, que l'acquéreur prendra celui-ci dans l'état où il se trouve au jour de la vente et n'aura aucun recours contre les vendeurs pour quelque cause que ce soit, notamment en raison des vices apparents ou des vices cachés.
11. En statuant ainsi, alors que cette clause, propre à l'état du bien, n'excluait pas expressément la garantie des servitudes non apparentes non déclarées, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
12. En application de l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif rejetant la demande en garantie formée par Mme [K] à l'encontre de M. et Mme [N] et de M. [X] entraîne, par voie de conséquence, celle de la disposition de l'arrêt disant n'y avoir lieu, faute d'objet, à statuer sur l'action en garantie de ces derniers contre Mme [W], qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.
13. Il n'y a pas lieu, en conséquence, de statuer sur le moyen du pourvoi provoqué éventuel.




Civ.2 13 février 2025 n° 22-23.003

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
FD


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle sans renvoi

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 148 F-D
Pourvoi n° G 22-23.003



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
M. [D] [U], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 22-23.003 contre l'arrêt rendu le 15 septembre 2022 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [B] [W],
2°/ à Mme [F] [S], épouse [W],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Riuné, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [U], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme [W], et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Riuné, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 15 septembre 2022), par jugement du 10 octobre 2016, signifié le 20 novembre 2019 et confirmé par arrêt du 12 septembre 2019, un tribunal de grande instance a condamné M. et Mme [W], en contemplation du relevé effectué par la société Boye le 1er août 2012, à supprimer l'empiétement créé par le mur de soutènement sur le fonds de M. [U], à enlever les gravats accumulés sur celui-ci et à rétablir la clôture en limite de propriété dans les six mois de la signification de la décision et ce, passé ce délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard pendant deux mois.
2. M. [U] a saisi un juge de l'exécution en liquidation de l'astreinte et en prononcé d'une nouvelle astreinte.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen
Enoncé du moyen
4. M. [U] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à M. et Mme [W] une somme de 2 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive, alors « que la défense à une action en justice ne peut, sauf circonstances particulières qu'il appartient au juge de spécifier, dégénérer en abus lorsque sa légitimité a été reconnue par le premier juge, malgré l'infirmation dont sa décision a été l'objet ; qu'en considérant que la procédure d'exécution engagée par M. [U] était abusive car les époux [W] s'étaient, au moment où la procédure avait été initiée, déjà en grande partie exécutés et avaient sollicité vainement son autorisation de pénétrer sur son terrain pour faciliter l'achèvement du rétablissement de la clôture, de sorte que M. [U] avait agi avec une légèreté blâmable, tout en constatant cependant que les demandes de M. [U] avaient été accueillies en première instance, la cour d'appel a violé l'article 1240 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1240 du code civil :
5. Une action en justice ne peut, sauf circonstances particulières qu'il appartient alors au juge de spécifier, constituer un abus de droit, lorsque sa légitimité a été reconnue par la juridiction du premier degré, malgré l'infirmation dont sa décision a été l'objet en appel.
6. Pour condamner M. [U] au paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive, l'arrêt relève qu'il a entrepris une procédure de liquidation d'une astreinte alors que M. et Mme [W] s'étaient déjà en grande partie exécutés et avaient sollicité l'autorisation de pénétrer sur son terrain pour faciliter l'achèvement du rétablissement de la clôture, autorisation qu'il avait refusée sans aucun juste motif ni aucune logique.
7. L'arrêt retient que M. [U] a agi avec une légèreté blâmable.
8. En statuant ainsi, sans caractériser l'existence de circonstances particulières justifiant que l'action de celui-ci, qui avait été reconnue légitime par la juridiction de premier degré, soit constitutive d'un abus de droit, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
9. D'une part, la cassation des chefs de dispositif infirmant le jugement en toutes ses dispositions et condamnant M. [U] à payer à M. et Mme [W], ensemble, une somme de 2 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive n'emporte pas celle du chef de dispositif de l'arrêt condamnant M. [U] aux dépens, justifié par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.
10. D'autre part, après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
11. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
12. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 5 à 8 qu'il y a lieu de rejeter la demande de M. et Mme [W] de condamner M. [U] à leur payer une somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts.




Civ.2 13 février 2025 n° 23-19.136 B

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 145 F-B

Pourvois n° A 23-19.136 N 23-17.606 JONCTION




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

I. La société Dindar autos, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 23-19.136 contre l'arrêt n° RG : 21/00196 rendu le 15 septembre 2021 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre civile TGI/JEX) et l'arrêt n° RG : 18/01157 rendu le 21 avril 2023 par la même cour d'appel (chambre civile TGI), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à la société Prudence créole, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4],
3°/ à la société Holdar, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3],
défenderesses à la cassation.
II. La société Allianz IARD, société anonyme, a formé le pourvoi n° N 23-17.606 contre l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion rendu le 21 avril 2023, dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Prudence créole, société anonyme,
2°/ à la société Dindar autos, société par actions simplifiée,
3°/ à la société Administrateurs judiciaires partenaires, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 6], prise en qualité d'administrateur judiciaire de la société Dindar autos,
4°/ à la société Holdar, société anonyme,
5°/ à la société Michel Chavaux-Julie Lavoir, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 6],
6°/ à la société Hirou, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5],
défenderesses à la cassation.
La société Prudence créole a formé un pourvoi incident contre l'arrêt attaqué par le pourvoi principal n° N 23-17.606.
La société Dindar autos, demanderesse au pourvoi n° A 23-19.136, invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
La société Allianz IARD, demanderesse au pourvoi principal n° N 23-17.606, invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.
La société Prudence créole, demanderesse au pourvoi incident n° N 23-17.606, invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.
Les dossiers ont été communiqués au procureur général.
Sur le rapport de M. Ittah, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Dindar autos, de la SCP Duhamel, avocat de la société Allianz IARD, de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Holdar, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Prudence créole, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Ittah, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Jonction
1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 23-19.136 et 23-17.606 sont joints.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 21 avril 2023), la société Latour (la SCI), assurée par la société Prudence créole, a loué des locaux commerciaux à la société Dindar autos, assurée par la société AGF IART, aux droits de laquelle est venue la société Allianz IARD.
3. Dans la nuit du 11 au 12 octobre 2007, un incendie a détruit les locaux.
4. Un expert a évalué à une certaine somme le coût de la démolition-reconstruction du bâtiment appartenant à la SCI.
5. Après avoir indemnisé son assurée, la société Prudence créole a assigné la société Dindar autos devant un tribunal de grande instance à fin, notamment, de remboursement de l'indemnité versée.
6. La société Dindar autos a été placée sous sauvegarde par un jugement rendu le 30 mars 2010 par un tribunal mixte de commerce.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi n° 23-19.136 formé par la société Dindar autos, le moyen unique du pourvoi principal n° 23-17.606 formé par la société Allianz IARD et le pourvoi incident formé par la société Prudence créole
7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi n° 23-19.136
Enoncé du moyen
8. La société Dindar autos fait grief à l'arrêt du 15 septembre 2021 de déclarer bien fondés les déférés formés par l'assureur et la société Prudence créole, d'infirmer en conséquence l'ordonnance sur incident rendue le 2 février 2021 par le conseiller de la mise en état ayant déclaré caduques les déclarations d'appel de ces sociétés et de rejeter les exceptions de caducité qu'elle soulevait, alors « que l'ordonnance du conseiller de la mise en état, qui prononce l'irrecevabilité de la déclaration d'appel est revêtue dès son prononcé de l'autorité de la chose jugée, de sorte qu'elle met immédiatement fin à l'instance d'appel, le déféré n'étant pas suspensif ; que l'appelant qui a conclu au fond avant que le conseiller de la mise en état ne prononce l'irrecevabilité de son appel doit, à peine de caducité de celui-ci lorsque, sur déféré, la cour d'appel déclare son appel recevable, conclure à nouveau au fond dans le délai de trois mois courant à compter de l'arrêt rendu sur déféré ; qu'en l'espèce, l'appelant a conclu au fond et son appel a ensuite été déclaré irrecevable par ordonnance du conseiller de la mise en état ; que statuant sur déféré, la cour d'appel a infirmé l'ordonnance du conseiller de la mise en état et a déclaré l'appel recevable ; que l'appelant n'a pas conclu à nouveau au fond ; qu'en retenant, pour infirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état qui avait déclaré l'appel caduc, que la mesure qui tend à faire courir un nouveau délai de trois mois à compter de l'arrêt statuant sur déféré et déclarant l'appel recevable « ne saurait, pour autant, porter préjudice à la partie ayant pris soin de conclure dans le délai de trois mois de son acte d'appel et ne pouvant être contrainte de devoir, sous peine de caducité de son appel, renouveler ses conclusions d'appel », la cour d'appel a violé les articles 914 et 916 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
9. Aux termes de l'article 908 du code de procédure civile, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel pour conclure.
10. Selon l'article 914, dernier alinéa, du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, les ordonnances du conseiller de la mise en état statuant sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel, sur la caducité de celui-ci ou sur l'irrecevabilité des conclusions en application des articles 909 et 910 ont autorité de la chose jugée au principal.
11. Selon l'article 916, alinéa 2, du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, les ordonnances du conseiller de la mise en état peuvent être déférées par requête à la cour dans les quinze jours de leur date lorsqu'elles ont pour effet, notamment, de mettre fin à l'instance.
12. Lorsque l'appelant n'a pas encore conclu au jour où le conseiller de la mise en état prononce l'irrecevabilité de la déclaration d'appel, la Cour de cassation juge que l'ordonnance de ce conseiller, revêtue dès son prononcé de l'autorité de la chose jugée, a immédiatement mis fin à l'instance d'appel, de sorte que l'arrêt infirmatif de la cour d'appel, rendu à l'issue d'une procédure de déféré dénuée d'effet suspensif, s'il a anéanti l'ordonnance infirmée, n'a pu, sans porter atteinte au principe de sécurité juridique découlant de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que faire à nouveau courir le délai pour conclure de l'article 908 du code de procédure civile, qui avait pris fin avec l'ordonnance déférée (2e Civ., 14 novembre 2019, pourvoi n° 18-23.631, publié au Bulletin).
13. Toutefois, si l'appelant a déjà conclu avant la décision du conseiller de la mise en état prononçant l'irrecevabilité de la déclaration d'appel, il n'est pas tenu de conclure de nouveau après le prononcé de l'arrêt qui, à l'issue d'une procédure de déféré, infirme cette décision.
14. Ayant relevé que la société Allianz IARD avait déposé ses conclusions au fond moins de trois mois après la date de sa déclaration d'appel et que la société Prudence créole avait également déposé ses conclusions d'appel incident dans le délai imparti, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que ces écritures n'avaient pas à être renouvelées dans le délai de trois mois suivant le prononcé des arrêts, statuant sur déféré, ayant déclaré leurs appels respectifs recevables.
15. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.
Mais sur le second moyen du pourvoi n° 23-19.136, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
16. La société Dindar autos fait grief à l'arrêt du 21 avril 2023 de confirmer le jugement en ce qu'il a fixé la créance de la société Prudence créole à son encontre à la somme de 5 357 713,28 euros, alors « que le juge doit respecter et faire respecter en toutes circonstances le principe du contradictoire ; qu'il ne peut fonder sa décision sur un moyen qu'il a relevé d'office sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur celui-ci ; qu'en se fondant sur l'arrêt rendu le 7 février 2012 par la Cour de cassation (Com., 7 février 2012, pourvoi n° 10-27.304, Bull. 2012, IV, n° 26) pour confirmer le jugement qui avait fixé à une certaine somme la créance de l'assureur au passif de la société Dindar autos, tandis qu'aucune des parties ne l'invoquait, la cour d'appel s'est prononcée par un moyen relevé d'office sans avoir invité les parties à présenter leurs observations, violant ainsi l'article 16 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
17. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
18. Pour confirmer le jugement en ce qu'il a admis à hauteur d'une certaine somme la créance de la société Prudence créole au passif de la société Dindar autos, l'arrêt relève que celle-là ne peut se prévaloir de sa déclaration de créance adressée le 18 novembre 2010 à l'administrateur judiciaire, à défaut d'établir qu'elle a bénéficié d'un relevé de forclusion.
19. L'arrêt énonce encore qu'aux termes de l'article L. 121-12 du code des assurances, l'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé, jusqu'à concurrence de cette indemnité, dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur.
20. Il constate que la société Prudence créole produit cinq quittances subrogatives établies entre le 8 février et le 26 août 2008 et deux lettres-chèques du 26 mai 2009 et énonce qu'elle justifie, ainsi, de sa subrogation dans les droits de la SCI, son assurée, à hauteur de la somme admise au passif de la société Dindar autos, par le premier juge.
21. L'arrêt retient, enfin, que le jugement frappé d'appel doit être confirmé sur le principe de l'admission de cette créance détenue par l'assureur subrogé, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation (Com., 7 février 2012, pourvoi n° 10-27.304, Bull. 2012, IV, n° 26).
22. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, tiré de l'application, à l'affaire dont elle était saisie, de l'arrêt précité, qui juge que l'assureur, subrogé dans les droits et actions de son assuré qu'il a indemnisé, peut se prévaloir de la déclaration de créance faite par ce dernier, avant le versement de l'indemnité d'assurance, à la procédure collective de l'auteur du dommage, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
23. La cassation du chef de dispositif confirmant le jugement en tant qu'il fixe la créance de la société Prudence créole à l'encontre de la société Dindar autos à hauteur de 5 764 808 euros n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant la société Allianz IARD aux dépens ainsi qu'au paiement de diverses sommes en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celle-ci.




Civ.2 13 février 2025 n° 23-13.527

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 147 F-D
Pourvoi n° D 23-13.527

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
Mme [G] [N], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 23-13.527 contre l'arrêt rendu le 28 juillet 2022 par la cour d'appel de Versailles (3e chambre), dans le litige l'opposant à la société The Onelife company, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2] (Luxembourg), venant aux droits de la succursale française Apicil France, [Adresse 3], anciennement dénommée Skandia life, défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de Mme [N], de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société The Onelife company, venant aux droits de la succursale française Apicil France, anciennement dénommée Skandia life, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 28 juillet 2022), en 2005, Mme [N] a souscrit, par l'intermédiaire de [H] [E], un contrat d'assurance sur la vie « Archipel plus » auprès de la société Skandia life, aux droits de laquelle est venue la société Apicil life, puis la société The Onelife company (l'assureur).
2. En 2008, elle a confié des fonds à ce même intermédiaire à fin de souscription d'un contrat de capitalisation « Archipel capi » auprès de l'assureur.
3. Le 6 octobre 2016, faisant valoir que [H] [E] avait détourné à son profit la somme de 200 000 euros retirée du contrat « Archipel plus » et la somme de 221 000 euros qui devait être placée sur le contrat « Archipel capi », qui n'avait en réalité jamais été souscrit, Mme [N] a assigné l'assureur en responsabilité et indemnisation de ses préjudices.
Examen des moyens
Sur les deux moyens, réunis
Enoncé des moyens
4. Par un premier moyen, Mme [N] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en tant qu'il déclare irrecevable car prescrite son action indemnitaire initiée le 6 octobre 2016 à l'encontre de l'assureur, fondée sur le détournement par [H] [E] des fonds de son contrat d'assurance sur la vie Archipel plus, alors « que c'est à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans ; que pour fixer le point de départ de la prescription quinquennale à la fin juillet 2011, l'arrêt retient que l'entretien téléphonique du 17 juin 2011 suivi de la lettre du 7 juillet 2011 de la société Skandia ont confirmé à Mme [N] qu'elle avait bien reçu une demande d'avance en son nom et que les fonds qu'elle avait versés n'avaient pas été recrédités sur son contrat Archipel plus, ce qui aurait dû immédiatement la conduire à demander des explications à [H] [E] et à solliciter sa banque pour obtenir le chèque litigieux, auquel cas elle aurait appris dans la quinzaine de jours qui suivaient le détournement commis par [H] [E] ; qu'il en déduit qu'au plus tard en juillet 2011, Mme [N] ne pouvait légitimement ignorer les faits lui permettant d'agir tant contre [H] [E] que contre la société Skandia life en sa qualité prétendue de mandante puisqu'elle était alors en mesure de connaître le détournement de la somme de 200 000 euros commis à son préjudice par [H] [E] ; qu'en se prononçant par de tels motifs, dont il résulte uniquement que Mme [N] avait été en mesure d'entreprendre des démarches utiles en juillet 2011 qui, si elles avaient été réalisées, lui auraient éventuellement permis de prendre connaissance des détournements réalisés par [H] [E], mais aucunement qu'elle disposait à cette date des informations lui permettant de prendre conscience du détournement des sommes dont elle avait été victime, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil. »
5. Par un second moyen, Mme [N] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en tant qu'il déclare irrecevable car prescrite son action indemnitaire initiée le 6 octobre 2016 à l'encontre de l'assureur en raison du détournement par [H] [E] des fonds destinés à être crédités sur son contrat d'assurance sur la vie Archipel capi, lequel était inexistant, alors :
« 1°/ que c'est à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans ; que pour fixer au mois d'août 2009 le point de départ de l'action en responsabilité intentée par Mme [N], l'arrêt retient que la synthèse du contrat qui lui a été adressée en août 2009 comportait une erreur grossière sur le montant du capital investi, minorant celui-ci de près de 20 000 euros de sorte qu'elle pouvait, dès cette date, s'enquérir de la réalité du contrat Archipel capi et des mouvements enregistrés par l'assureur ce qu'elle n'a pas fait avant d'apprendre le suicide de [H] [E] ; qu'en se prononçant par ces motifs, dont il résulte uniquement que Mme [N] avait été en mesure d'entreprendre des démarches utiles qui, si elles avaient été réalisées, lui auraient éventuellement permis de prendre connaissance des détournements réalisés par [H] [E], mais en aucune manière qu'elle disposait à cette date des informations lui permettant de prendre conscience de l'inexistence du contrat Archipel capi et du détournement de ses fonds, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ;
2°/ que pour fixer en tout état de cause le point de départ de la prescription en juillet 2011, l'arrêt relève qu'ayant été en mesure de connaître le détournement de la somme de 200 000 euros commis à son préjudice par [H] [E] au plus tard en juillet 2011, Mme [N] aurait dû s'enquérir en même temps du sort de ses autres placements souscrits par le biais de [H] [E] auprès de Skankia life, laquelle aurait pu immédiatement l'avertir que le contrat Archipel capi était inexistant ; qu'en se prononçant par de tels motifs, dont il résulte uniquement que Mme [N] avait été en mesure d'entreprendre des démarches utiles en juillet 2011 qui, si elles avaient été réalisées, lui auraient éventuellement permis de prendre connaissance des détournements réalisés par [H] [E] relativement à un autre placement, mais aucunement qu'elle disposait à cette date des informations lui permettant de prendre conscience de l'inexistence du contrat Archipel capi pour lequel elle avait confié des sommes à [H] [E], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 2224 du code civil :
6. Aux termes de ce texte, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
7. Il s'en déduit que le délai de prescription de l'action en responsabilité civile court à compter du jour où celui qui se prétend victime a connu ou aurait dû connaître le dommage, le fait générateur de responsabilité et son auteur, ainsi que le lien de causalité entre le dommage et le fait générateur.
8. Pour déclarer l'action prescrite, l'arrêt retient, s'agissant du contrat Archipel plus, que le 17 juin 2011, Mme [N] a appelé l'assureur pour lui faire part de ce qu'en 2009, une avance de 200 000 euros avait été virée de son contrat d'assurance sur la vie vers son compte courant, alors qu'elle n'en avait pas fait la demande, qu'elle avait remis à [H] [E] un chèque du même montant qui devait servir à rembourser l'avance, qu'elle s'étonnait du fait qu'il soit toujours indiqué qu'elle devait la somme de 200 000 euros à l'assureur alors que cela faisait deux ans qu'elle demandait à [H] [E] de faire le nécessaire pour que cela soit effacé. Elle demandait une confirmation écrite de l'assureur, disant qu'elle ne devait aucune somme et qu'il s'agissait d'une erreur.
9. Il constate que, par lettre du 7 juillet 2011, l'assureur a précisé à Mme [N] que c'était conformément à sa demande qu'il avait procédé à l'avance de 200 000 euros en mars 2009 et lui a demandé de lui adresser une copie de son relevé de compte où figure la reprise de ce paiement de 200 000 euros, lui indiquant que dans cette attente, l'avance consentie restait en cours.
10. L'arrêt relève que cet entretien téléphonique et cette lettre ont confirmé à Mme [N] que l'assureur avait bien reçu une demande d'avance en son nom et que les fonds n'avaient pas été recrédités sur son contrat d'assurance sur la vie, ce qui aurait dû immédiatement la conduire à demander des explications à [H] [E] et à solliciter sa banque pour obtenir le chèque litigieux, auquel cas elle aurait appris dans la quinzaine de jours qui suivaient le détournement commis par [H] [E].
11. L'arrêt en déduit qu'au plus tard en juillet 2011, Mme [N] ne pouvait légitimement ignorer les faits lui permettant d'agir tant contre [H] [E] que contre la société Skandia life en sa qualité prétendue de mandante, puisqu'elle était alors en mesure de connaître le détournement de la somme de 200 000 euros commis à son préjudice par [H] [E].
12. S'agissant du contrat Archipel capi, l'arrêt constate que Mme [N] a reçu, en août 2009, une synthèse du contrat qui comportait une erreur grossière sur le montant du capital investi, minorant celle-ci de près de 20 000 euros, de sorte qu'elle pouvait dès cette date s'enquérir de la réalité de ce contrat et des mouvements enregistrés par l'assureur.
13. Il ajoute qu'étant en mesure, en juillet 2011, de connaître le détournement de la somme de 200 000 euros commis à son préjudice par [H] [E], Mme [N] aurait dû s'enquérir en même temps du sort de ses autres placements souscrits par le biais du même intermédiaire auprès de l'assureur, lequel aurait pu immédiatement l'avertir que le contrat Archipel capi était inexistant.
14. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir qu'au plus tard en juillet 2011, Mme [N] aurait dû connaître tous les éléments lui permettant d'exercer son action en responsabilité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.




Civ.2 13 février 2025 n° 24-11.206 B

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 2 / EXPTS
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Annulation partielle

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 139 FS-B+R
Recours n° B 24-11.206


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025
M. [R] [L], domicilié [Adresse 1], a formé le recours n° B 24-11.206 en annulation de la décision rendue le 10 novembre 2023 par l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel de Chambéry.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Philippart, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de M. [L], et l'avis écrit de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présents Mme Martinel, président, Mme Philippart, conseiller référendaire rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, Mmes Cassignard, Chauve, Salomon, conseillers, MM. Ittah, Riuné, conseillers référendaires, M. Grignon Dumoulin, avocat général, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Le demandeur invoque, à l'appui de son recours, sept griefs d'annulation ;
Faits et procédure
1. M. [L] a sollicité son inscription sur la liste des experts judiciaires de la cour d'appel de Chambéry dans les rubriques « masseurs kinésithérapeutes » (F.8.6) ; « experts en matière de sécurité sociale - professionnels de santé non médecins » (F.9.2) et « experts en matière d'interprétation des actes et prestations - professionnels de santé non médecins » (F.10.2).
2. Par décision du 10 novembre 2023, contre laquelle M. [L] a formé un recours, l'assemblée générale des magistrats du siège de cette cour d'appel a rejeté sa demande au motif qu'il a été l'auteur de faits ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou administrative de destitution, radiation, révocation, de retrait d'agrément ou d'autorisation.
Examen des griefs
Sur les deux premiers griefs
Exposé des griefs
3. M. [L] fait valoir :
1°/ que l'assemblée générale s'est tenue sous la présidence d'une présidente de chambre, qui a signé la décision attaquée, sans qu'il ressorte des pièces du dossier que cette dernière ait été régulièrement désignée pour suppléer la première présidente de la cour d'appel de Chambéry pour présider l'assemblée générale et signer la décision ; que, dans ces conditions, cette dernière a été prise en violation des articles L. 121-3, R. 121-3, R. 312-2 et R. 312-39 du code de l'organisation judiciaire et de l'article 8, alinéa 3, du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 relatif aux experts judiciaires ;
2°/ que la décision a été signée par une adjointe administrative, sans qu'il ressorte des pièces du dossier que cette dernière ait été désignée dans les conditions prévues à l'article R. 123-7 du code de l'organisation judiciaire pour exercer les fonctions dévolues au directeur de greffe ; que, dans ces conditions, la décision a été prise en violation des articles R. 312-38 et R. 123-7 du code de l'organisation judiciaire.
Réponse de la Cour
4. Si l'article R. 312-39 du code de l'organisation judiciaire énonce que le premier président de la cour d'appel préside l'assemblée générale des magistrats du siège, l'article R. 312-2 du même code dispose que le premier président, en cas d'absence ou d'empêchement, est suppléé dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées, par le président de chambre qu'il aura désigné.
5. Si les articles R. 123-13, R. 212-33 et R. 312-38 du code de l'organisation judiciaire énoncent qu'à la cour d'appel, le directeur de greffe assiste aux assemblées générales, l'article R. 123-7 du même code dispose que, pour l'exercice des attributions qui lui sont dévolues, le directeur de greffe de la juridiction peut donner délégation à un directeur des services de greffe judiciaire de la même juridiction et que, selon les besoins du service, il peut désigner sous sa responsabilité un ou plusieurs agents du greffe pour exercer partie des fonctions qui lui sont attribuées à l'article R. 123-5 du même code.
6. Dès lors que les mentions du procès-verbal de l'assemblée générale du 10 novembre 2023 font apparaître qu'elle s'est tenue sous la présidence d'une présidente de chambre, avec l'assistance d'une adjointe administrative, la première est présumée avoir été désignée par le premier président de la cour d'appel et la seconde est présumée avoir été désignée sous la responsabilité du directeur de greffe de la cour d'appel.
7. Les griefs ne peuvent, dès lors, être accueillis.
Sur le troisième grief
Exposé du grief
8. M. [L] fait valoir qu'il n'apparaît pas que chacune des juridictions appelée à participer, avec voix consultative, à l'examen de sa demande d'inscription, en l'occurrence les tribunaux judiciaires, les tribunaux de commerce et les conseils de prud'hommes du ressort, ait été dûment représentée par l'un de ses membres, lors de l'assemblée générale des magistrats du siège qui s'est tenue le 10 novembre 2023 ; que, dans ces conditions, la décision a été prise en violation de l'article 8, alinéa 4, du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 relatif aux experts judiciaires.
Réponse de la Cour
9. Selon l'article 8, alinéa 4, du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004, dans sa rédaction issue du décret n° 2022-1258 du 26 septembre 2022, les tribunaux judiciaires, les tribunaux de commerce et les conseils de prud'hommes du ressort de la cour d'appel sont représentés à l'assemblée générale, même si celle-ci siège en commission restreinte ou en formation restreinte, par un de leurs membres qui participe avec voix consultative à l'examen des demandes. Toutefois, le premier président peut dispenser certaines juridictions de se faire représenter, pourvu qu'un membre au moins de chacune des catégories de juridiction siège à l'assemblée générale.
10. Le procès-verbal de l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel de Chambéry du 10 novembre 2023 fait apparaître que chacune des catégories de juridiction appelée à participer, avec voix consultative, à l'examen de la demande formée par M. [L], a été représentée par un de ses membres.
11. Le grief, ne peut, dès lors, être accueilli.
Sur le quatrième grief
Exposé du grief
12. M. [L] fait valoir, dans une première branche, que les mentions du procès-verbal ne font pas apparaître si l'assemblée générale des magistrats du siège qui s'est tenue le 10 novembre 2023 s'est réunie en formation plénière, en formation restreinte ou en commission restreinte, de sorte qu'il n'est pas établi que les règles de composition aient été respectées ; que, dans ces conditions, la décision a été prise en violation de l'article 8 du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 relatif aux experts judiciaires.
13. Il soutient subsidiairement, dans une seconde branche, qu'il n'apparaît pas que la composition de l'assemblée générale des magistrats du siège, qui s'est réunie le 10 novembre 2023 en commission ou formation restreinte, ait été régulière ; que, dans ces conditions, la décision a été prise en violation de l'article 8, alinéas 2 et 3, du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 relatif aux experts judiciaires.
Réponse de la Cour
14. Selon l'article 8 du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004, dans sa rédaction issue du décret n° 2022-1258 du 26 septembre 2022, l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel qui dresse la liste des experts peut se tenir en commission restreinte, telle que prévue au dernier alinéa de l'article R. 312-27 du code de l'organisation judiciaire, si la cour d'appel comporte plus de trois chambres ou en formation restreinte si elle comporte plus de cinq chambres.
15. Dès lors que les mentions du procès-verbal du 10 novembre 2023 font apparaître que l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel de Chambéry s'est réunie afin d'établir la liste des experts judiciaires pour l'année 2024, elle est présumée s'être tenue en formation plénière.
16. Le grief ne peut, dès lors, être accueilli.
Sur le cinquième grief
Exposé du grief
17. M. [L] fait valoir que le procès-verbal mentionne que, pour la tenue de l'assemblée générale, plusieurs magistrats ont reçu les pouvoirs de conseillers ou présidents de chambre, sans qu'aucune procuration écrite correspondante n'ait été annexée au procès-verbal de l'assemblée qui s'est tenue le 10 novembre 2023 ; que, dans ces conditions, cette dernière s'est tenue en violation de l'article R. 312-33 du code de l'organisation judiciaire.
Réponse de la Cour
18. Un vice de forme, qui affecte le procès-verbal d'une assemblée générale statuant en matière d'inscription sur la liste des experts judiciaires, n'est de nature à entraîner l'annulation de la décision de refus d'inscription ou de réinscription sur cette liste que si le requérant justifie que cette irrégularité de forme lui a causé un grief.
19. Selon l'article R. 312-33 du code de l'organisation judiciaire, les membres de l'assemblée générale qui remplissent les conditions pour voter par procuration et qui souhaitent utiliser cette procédure doivent en informer le président de l'assemblée générale avant la tenue de la réunion. Chaque mandataire ne peut disposer de plus de deux procurations. La procuration doit être donnée par écrit et est annexée au procès-verbal.
20. Le procès-verbal de l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel de Chambéry du 10 novembre 2023, réunie afin d'établir la liste des experts judiciaires pour l'année 2024, mentionne que plusieurs magistrats du siège ont reçu des pouvoirs pour en représenter d'autres.
21. Il ressort des pièces de la procédure que les procurations écrites correspondantes ne sont pas annexées au procès-verbal.
22. Cependant, M. [L] n'allègue ni ne justifie que l'irrégularité tenant au défaut d'annexion des procurations écrites lui a causé un grief.
23. Le grief ne peut, dès lors, être accueilli.
Sur le sixième grief
Exposé du grief
24. M. [L] fait valoir que plusieurs membres de l'assemblée générale, ayant voix délibérative ou consultative, étaient présents en visioconférence alors qu'il n'apparaît pas que le règlement intérieur de l'assemblée plénière de la cour d'appel de Chambéry autorise ses membres à participer aux réunions d'assemblée générale à distance, par la voie de la visioconférence ; que, dans ces conditions, la décision a été prise en violation de l'article R. 312-28 du code de l'organisation judiciaire et du règlement intérieur.
Réponse de la Cour
25. M. [L] ne justifie pas de l'irrégularité alléguée.
26. Le grief, ne peut, dès lors, être accueilli.
Mais sur le septième grief, pris en sa première branche
Exposé du grief
27. M. [L] fait valoir qu'en se bornant à indiquer, pour rejeter sa demande, qu'il avait été l'auteur de faits ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou administrative de destitution, radiation, révocation, de retrait d'agrément ou d'autorisation, sans préciser les faits dont il aurait été l'auteur, l'assemblée générale, qui ne l'a pas mis en mesure de connaître les raisons pour lesquelles sa demande a été rejetée, a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 2, § IV, de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971, et de l'article 2 du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004.
Réponse de la Cour
Vu l'article 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 et l'article 2 du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 :
28. Selon le premier de ces textes, la décision de refus d'inscription ou de réinscription sur la liste des experts judiciaires dressée par une cour d'appel est motivée.
29. Pour rejeter la demande de M. [L], l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel se borne à indiquer qu'il a été l'auteur de faits ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou administrative de destitution, radiation, révocation, de retrait d'agrément ou d'autorisation.
30. En se déterminant ainsi, sans préciser les faits ayant donné lieu à une sanction disciplinaire ou administrative dont M. [L] aurait été l'auteur, l'assemblée générale des magistrats du siège, qui n'a pas mis l'intéressé en mesure de connaître les raisons pour lesquelles sa demande a été rejetée, n'a pas satisfait aux exigences des textes susvisés.
31. La décision de cette assemblée générale doit, dès lors, être annulée en ce qui concerne M. [L].




Civ.2 13 février 2025 n° 23-14.463

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
LM


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 13 février 2025



Cassation partielle

Mme MARTINEL, président


Arrêt n° 143 F-D
Pourvoi n° W 23-14.463



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 13 FÉVRIER 2025

La société JP Océan gestion, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], anciennement dénommée JP Océan, a formé le pourvoi n° W 23-14.463 contre l'arrêt rendu le 17 novembre 2022 par la cour d'appel de Caen (2e chambre civile et commerciale), dans le litige l'opposant à la société AIG Europe, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2] (Luxembourg), société de droit étranger ayant une succursale en France située [Adresse 3], défenderesse à la cassation.
La société AIG Europe a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Chauve, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société JP Océan gestion, de la SARL Ortscheidt, avocat de la société AIG Europe, et l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 janvier 2025 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Chauve, conseiller rapporteur, Mme Isola, conseiller doyen, et Mme Cathala, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 17 novembre 2022), MM. [G], [K], [Z] et [V] (les investisseurs) ont investi dans une opération de défiscalisation dite « Girardin industriel » dans la perspective de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2009, sur les conseils de la société JP Océan (l'assurée), laquelle avait pris l'engagement envers eux, au cas où pour une raison quelconque cet avantage fiscal serait définitivement remis en cause, de reverser à ses clients une somme égale au coût net total, pour eux, de cette remise en cause.
2. Le 31 octobre 2015, l'administration fiscale leur a adressé des avis d'imposition pour les revenus de l'année 2009 portant reprise de la réduction d'impôt initialement accordée et appel des majorations et pénalités de retard.
3. Les investisseurs ont assigné l'assurée et son assureur de responsabilité, la société AIG Europe Limited, aux droits de laquelle vient la société AIG Europe (l'assureur) aux fins d'obtenir la mise en oeuvre de la garantie de bonne fin fiscale et le remboursement des sommes réclamées par l'administration fiscale.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi incident, formé par l'assureur
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen du pourvoi principal, formé par l'assurée
Enoncé du moyen
5. L'assurée fait grief à l'arrêt de juger que la condamnation de l'assureur à la garantir de toutes condamnations en principal, intérêts, dépens et frais irrépétibles prononcées à son encontre envers MM. [G], [K] et [Z] donnerait lieu à l'application d'une franchise globale de 50 000 euros, alors « que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses écritures d'appel, pour dénier à son assureur, la société AIG Europe, le droit d'invoquer la franchise contractuelle, elle a fait valoir que les réclamations de ses clients constituaient, au sens de la police, « une seule et même réclamation », comme la cour d'appel en a exactement jugé, redevable de ladite franchise, laquelle avait déjà trouvé à s'appliquer, puisque « déduite des sommes remboursées au titre du redressement fiscal dont a fait l'objet M. [W] [E] », étant souligné que la société AIG ne le contestait pas ; qu'en statuant comme elle l'a fait, pour appliquer la franchise de 50 000 euros, sans se prononcer sur ce chef de conclusion dont il résultait que la société AIG Europe ne pouvait revendiquer la mise en oeuvre de la franchise stipulée par la police, déjà déduite au titre de la réclamation de M. [E], la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
6. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
7. Pour dire que l'assureur devra sa garantie et faire application d'une franchise globale de 50 000 euros, l'arrêt retient que les réclamations des investisseurs sont toutes fondées sur une même faute professionnelle imputée à l'assurée et commise lors de la même opération de défiscalisation et que seule une franchise globale d'un montant de 50 000 euros est applicable dans les rapports entre l'assurée et l'assureur.
8. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'assurée qui faisait valoir que la franchise globale avait déjà été déduite des sommes remboursées au titre du redressement fiscal, dont avait fait l'objet un autre investisseur de cette opération de défiscalisation, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
9. La cassation du chef de dispositif relatif à la franchise globale n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant M. [V] aux dépens et disant n'y avoir lieu à condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres dispositions de l'arrêt non remises en cause.




Copyright © 2019, IA Droit