Civ.1 12 mai 1993 n° 91-14.549
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Etiennette, Joséphine, Andrée Y..., épouse X..., demeurant à Peymeinade (Alpes-maritimes), Quartier Saint-Marc,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 mars 1991 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1ère chambre, section B), au profit du Crédit lyonnais, société anonyme, dont le siège social est sis ... à Paris (2ème), ..., pris en la personne de ses Président-directeur général, administrateurs et représentants légaux en exercice, domiciliés audit siège, ainsi que de M. Jacques A...
Z..., directeur régional des agences de la Côte d'Azur,
défendeur à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt :
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 17 mars 1993, où étaient présents :
M. de Bouillane de Lacoste, président, M. Renard-Payen, conseiller rapporteur, M. Viennois, conseiller, M. Lupi, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Renard-Payen, les observations de Me Choucroy, avocat de Mme X..., de la SCP Vier et Barthélémy, avocat du Crédit lyonnais, les conclusions de M. Lupi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du Code de procédure pénale ; Attendu, selon la procédure, que Mme X... s'est constituée en 1979 et 1981, caution solidaire des engagements contractés par son mari à l'égard du Crédit Lyonnais, pour une somme totale de 2 500 000 francs ; que M. X... ayant été déclaré en règlement judiciaire le 1er juillet 1983, le Crédit Lyonnais a assigné son épouse en paiement de cette somme devant le tribunal de grande instance derasse ; Attendu que, par jugement du 21 avril 1988, le tribunal, relevant qu'il résultait du rapport d'un expert désigné par le tribunal de commerce derasse que le Crédit Lyonnais avait accordé d'importantes facilités de caisse à M.
X...
, alors qu'il ne pouvait ignorer l'existence de traites croisées émises entre son débiteur et d'autres sociétés dont il était également le banquier, et constatant que, par arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 24 septembre 1987, M. B..., directeur de l'agence du Crédit Lyonnais à Grasse, avait été condamné pour complicité de banqueroute, a débouté le demandeur,
au motif que la faute commise par lui, préjudiciable à la caution, lui interdisait de se prévaloir des actes de cautionnement litigieux ; Attendu que, pour rejeter la demande, formée par Mme X..., de sursis à statuer jusqu'à décision de la juridiction pénale saisie sur renvoi après cassation de l'arrêt du 24 septembre 1987, la cour d'appel, saisie par le Crédit Lyonnais, a énoncé que les conditions d'application de l'article 4 du Code de procédure pénale n'étaient pas réunies, dès lors que les poursuites pénales engagées contre l'un des préposés du Crédit Lyonnais pour complicité de la banqueroute frauduleuse du débiteur principal n'étaient pas de nature à exercer une influence directe sur la présente instance qui met en cause la responsabilité de la banque du chef d'un ensemble d'agissements extérieurs à la qualification pénale retenue Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que les faits invoqués par Mme X... comme constituant des agissements fautifs du Crédit Lyonnais étaient ceux ayant fondé la condamnation pénale du préposé de cette banque et dont se trouvait saisie la cour de renvoi à la suite de la cassation de l'arrêt de condamnation, de sorte que la décision à intervenir dans l'instance pénale était de nature à influer sur l'issue de l'instance civile, la cour d'appel a violé le texte susvisé par refus d'application ;
Crim. 12 mai 1993 n° 92-82.695 B n° 174
REJET du pourvoi formé par :
- X... Henri,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz, chambre correctionnelle, du 6 février 1992, qui, pour infraction aux clauses communes du cahier des charges des chasses en forêt domaniale, l'a condamné à une amende de 4 000 francs, l'a privé du droit de conserver son permis de chasser pendant 2 ans et a prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 6. 2 du cahier des charges, R. 228-2 du Code rural, 4 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement par lequel le tribunal correctionnel a déclaré X... coupable d'avoir contrevenu aux clauses et conditions du cahier des charges relatives à la chasse, en l'espèce l'article 6. 2 des clauses communes aux termes duquel il était tenu de présenter son tableau de chasse aux réquisitions des agents de l'Office national de la chasse ;
" aux motifs que l'article 6 des clauses communes du cahier des charges afférent à l'adjudication relatives à la chasse, prévoit que le locataire doit se soumettre aux contrôles inopinés des agents de l'Office, lesquels peuvent toujours comporter l'obligation de présenter le tableau de chasse ; que les gardes-chasse dépendant de l'Office national de la chasse ont compétence pour constater les infractions à la police de la chasse dans l'étendue des circonscriptions pour lesquels ils sont assermentés ; qu'en l'espèce, le refus par le prévenu de se soumettre au contrôle des agents de l'Office national de la chasse concernant le plan de chasse, constitue une contravention aux clauses et conditions du cahier des charges imposé à l'adjudicataire ;
" alors que les infractions visées à l'article R. 228-2 du Code rural, ne sont caractérisées que lorsque les fermiers de la chasse ont contrevenu aux clauses et conditions de leur cahier des charges relatives à la chasse ; qu'en l'espèce, les stipulations de l'article 6. 2 de cet acte réglementaire relatif à la chasse, dont X... s'est rendu adjudicataire, n'emportent l'obligation pour les locataires de se soumettre à des contrôles inopinés, et notamment de présenter le tableau de chasse, qu'aux agents de l'Office national des forêts ; que, dès lors, c'est au prix d'une erreur de droit, que la Cour a pu considérer que le refus de X... de présenter ce tableau aux agents de l'Office national de la Chasse, constituait une contravention aux stipulations du cahier des charges " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme, que Henri X..., adjudicataire et président d'une société de chasse soumise au régime forestier, a refusé, alors qu'il en était requis, de présenter le tableau de chasse à cinq gardes nationaux de la chasse et de la faune sauvage, commissionnés par décision du ministre chargé de la Chasse et affectés au service départemental de garderie placé auprès de la fédération départementale des chasseurs de la Moselle ; que procès-verbal ayant été dressé, l'intéressé a été poursuivi en application de l'article R. 228-2 du Code rural pour avoir contrevenu aux clauses et conditions du cahier des charges des chasses en forêt domaniale ;
Attendu que pour déclarer coupable de cette infraction le prévenu, qui concluait à sa relaxe aux motifs que le refus de présenter le tableau de chasse avait été opposé à des gardes de l'Office national de la chasse, et non à des agents de l'Office national des forêts, seuls habilités à procéder aux contrôles inopinés prévus par le cahier des charges précité, et que l'infraction reprochée n'était, en conséquence, pas caractérisée, l'arrêt attaqué énonce que " les gardes-chasse dépendant de l'Office national de la chasse ont compétence pour constater les infractions à la police de la chasse dans l'étendue des circonscriptions pour lesquelles ils sont assermentés " ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas encouru les griefs du moyen ;
Qu'en effet, il résulte des dispositions des articles L. 228-31 et L. 228-27 du Code rural, applicables au département de la Moselle selon l'article L. 229-1 du même Code, que les gardes de l'Office national de la chasse sont habilités à exercer les fonctions de préposés des Eaux et Forêts chargés spécialement de la police de la chasse dès lors qu'ils sont commissionnés à cet effet par le ministre chargé de la Chasse ; qu'à ce titre, ils ont qualité pour opérer les contrôles prévus par l'article 6. 2 des clauses et conditions du cahier des charges des chasses en forêt domaniale, dont l'inexécution est sanctionnée par l'article R. 228-2 du Code précité ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation : (sans intérêt) ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.
Crim. 12 mai 1993 n° 92-83.521
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller JORDA, les observations de Me X... et de Me Le PRADO, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- C... Laurent, contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, du 20 mai 1992, qui, après sa relaxe définitive du chef de blessures involontaires sur le personne de Cécile A..., a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ; Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 4 et 5 de la loi du 5 juillet 1985, R. 6 et R. 24 du Code de la route, ensemble violation de l'article 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a laissé à la charge de C... l'entière responsabilité de la collision de sa voiture et de celle de Melle A... qui la précédait ;
"aux motifs que les parties étaient contraires en fait sur le point de savoir si Melle A... qui "roulait à très faible allure" avait ou non actionné son indicateur de changement de direction avant de se déporter sur la gauche pour traverser la chaussée ;
"alors que, pour n'avoir pas recherché si l'intention de changer de direction de Melle A..., perturbatrice de la circulation normale, avait pu être pressentie à l'avance par C..., fondé à dépasser un véhicule qui circulait très lentement devant lui et si, notamment, Mlle A... avait esquissé en temps utile une manoeuvre de rapprochement progressif de l'axe médian qui eut été révélatrice de son intention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la voiture conduite par Cécile A..., qui ralentissait en se portant vers la partie gauche de la chaussée, a été heurtée par celle de Laurent C... qui avait entrepris de la dépasser ; que Cécile A... a été blessée et Laurent C..., poursuivi pour blessures involontaires, relaxé par le tribunal de police ;
Attendu que, pour dire, en application des articles 470-1 du Code de procédure pénale et 4 de la loi du 5 juillet 1985, Laurent C... tenu à indemniser la victime, la juridiction du second degré rappelle que le véhicule dudit Laurent C... est impliqué dans l'accident et retient que Cécile A..., dont la voiture roulait très lentement, n'a pas changé brusquement de direction et qu'il n'est pas établi que la victime n'ait pas signalé ce changement de direction ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs procédant de l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause et desquels il résulte qu'aucune faute de nature à limiter ou exclure son indemnisation n'est établie à la charge de la victime, la cour d'appel qui n'avait pas à s'expliquer mieux qu'elle l'a fait, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Souppe conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Jorda conseiller rapporteur, MM. Jean B..., Blin, Carlioz conseillers de la chambre, M. Z..., Mmes Y..., Verdun conseillers référendaires, M. Libouban avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 12 mai 1993 n° 92-84.342
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller Jean SIMON, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Michel, contre l'arrêt de la cour d'appel de COLMAR, chambre correctionnelle, en date du 4 juin 1992, qui, pour défaut de permis de construire, l'a condamné à 40 000 francs d'amende, a ordonné sous astreinte, la remise en état des lieux et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 421-1, L. 480-4 s, R. 422-2 du Code de l'urbanisme, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré X... coupable du délit de construction sans permis et porté à la somme de 40 000 francs l'amende initialement fixée par les premiers juges à celle de 20 000 francs ;
"aux motifs que, le bâtiment en cause qui servait d'abri à une buvette l'été constitue désormais une salle de restauration ; que la destination du bâtiment a été changée, l'abri d'une buvette d'été ne pouvant être assimilé à une salle de restaurant dont l'exploitation peut être autonome et permanente ; qu'en outre il n'est pas démontré que la surface nouvellement créée soit inférieure à 20 m2 ; que dès lors X... ne saurait invoquer l'application de l'article R. 422-2 du Code de l'urbanisme relatif aux exemptions du permis de construire ;
"alors, d'une part, que, ayant constaté que le bâtiment litigieux servait, avant son aménagement, de buvette l'été et qu'il constituait après les travaux une salle de restaurant, la Cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations d'où résultait que les travaux exécutés n'avaient pas changé la destination de la construction existante au sens des textes susvisés du Code de l'urbanisme ;
"alors d'autre part, que, les juges d'appel relèvent qu'il n'était pas en l'état démontré que la surface de la nouvelle construction était inférieure à 20 m2, la Cour ne pouvait écarter l'application du texte dérogatoire susvisé aux travaux engagés par X... sans avoir au préalable constaté que la surface nouvellement créée serait supérieure à 20 m2" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Michel X... a souscrit une déclaration de travaux en vue de transformer un hangar d'une superficie inférieure à 20 m2 ; que l'autorité administrative, faute de renseignements suffisants, n'a pu instruire sa demande dans les délais prescrits mais ne lui a notifié, vainement, que le 3 juillet 1989 qu'il devait interrompre les travaux ; que Michel X... est poursuivi, sur le fondement de l'article L. 421-1 du Code de l'urbanisme, pour défaut de permis de construire, aux motifs que les travaux réalisés auraient entraîné une argumentation de la superficie de la construction et un changement de destination des lieux ;
Attendu que, pour déclarer le prévenu, coupable de cette infraction, la juridiction du second degré retient que les travaux quelles qu'aient été les dimensions de la nouvelle construction ne pouvaient être réalisés sans permis de construire dès lors qu'ils ont eu pour effet de transformer un hangar ne comportant que deux murs et une charpente couverte de matériau ondulé et utilisé, l'hiver comme garage et l'été comme "abri de buvette", en une salle de restaurant entièrement fermée, construite sur un sol bétonné et recouverte d'une toiture en tuiles, à laquelle est adjointe une dépendance à usage de cuisine ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir le grief allégué par la 1ère branche du moyen lequel, inopérant en sa seconde branche, doit, dès lors, être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Crim. 11 mai 1993 n° 92-84.524
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller X..., les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... Raymond, contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 6ème chambre correctionnelle, en date du 26 mai 1992, l'ayant condamné, pour excès de vitesse, à 800 francs d'amende, et à la suspension de son permis de conduire pendant 8 jours avec sursis ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 66 de la Constitution, 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 21, R. 10, R. 232-2° et R. 266-4° du Code de la route, 591 à 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation de la présomption d'innoncence et des droits de la défense ;
"en ce que l'arrêt confirmatif a condamné le demandeur à 800 francs d'amende et à huit jours de suspension du permis de conduire avec sursis pour une contravention de dépassement hors agglomération de la vitesse maximale autorisée ;
"aux motifs que "selon le procès-verbal établi le 10 octobre 1990 par les agents de police judiciaire du service central des CRS de Lille (Nord), ce jour à 23 heures 15 minutes sur l'autoroute A1 dans le sens Paris Lille, à Vendeville (Nord), le conducteur du véhicule automobile de marque Mercedes immatriculé 1711 SF 59 a circulé à la vitesse de 142 kilomètres heure au lieu de 110 kilomètres heure, vitesse maximale autorisée en application de l'arrêté préfectoral du 19 août 1985. Ce véhicule est la propriété de Raymond Y..., titulaire de la carte grise, domicilié ... (Nord). Raymond Y... dont la comparution personnelle a été ordonnée par cette Cour le 30 janvier 1992 n'a pas été en mesure, le 9 avril 1992, de préciser l'identité de la personne à laquelle il aurait prêté son véhicule ; par ailleurs, la photographie établie le jour des faits par les enquêteurs comporte des ressemblances avec la personne du prévenu. La Cour est donc en mesure d'affirmer que Raymond Y... était le conducteur de son véhicule automobile 1711 SF 59 le 10 octobre 1990 à 23 heures 15 minutes à Vendeville. Il convient dès lors de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu Raymond Y... dans les liens de la prévention" (arrêt p. 2) ;
"alors qu'aucune présomption de culpabilité ne pèse sur le propriétaire d'un véhicule dont, seul, le conducteur demeure pénalement responsable d'un excès de vitesse ; qu'ainsi, la Cour n'a pu légalement retenir la culpabilité de Y... à la faveur d'une présomption de responsabilité en se bornant à énoncer que le propriétaire n'avait pas désigné le conducteur et que la
photographie -illisible- du contrevenant présenterait "des ressemblances" avec lui" ;
Attendu que, pour déclarer Raymond Y... coupable de la contravention d'excès de vitesse, et confirmer la décision du premier juge, la cour d'appel ne s'est pas fondée sur une "présomption de responsabilité" pesant sur le propriétaire du véhicule contrôlé, mais par des motifs reproduits au moyen, retient que celui-ci n'a pas été en mesure de préciser l'identité de la personne à laquelle il aurait prêté sa voiture automobile, et énonce que "la photographie établie le jour des faits comporte des ressemblances avec la personne du prévenu" ; qu'elle estime "qu'elle est donc en mesure d'affirmer que Raymond Y... était le conducteur de son véhicule lors du contrôle" ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, le moyen, qui se borne à remettre en cause l'appréciation souveraine des juges du fond quant aux faits de la cause et aux éléments de preuve soumis aux débats contradictoires, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Dumont conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Fontaine conseiller rapporteur, MM. Milleville, Alphand, Guerder, Pinsseau, Roman conseillers de la chambre, Mme Batut conseiller référendaire, M. Libouban avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 10 mai 1993 n° 92-84.882
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller HECQUARD, les observations de la société civile professionnelle Jean-Jacques GATINEAU et de Me ODENT, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- A... Louis, contre l'arrêt de la cour d'appel d'AMIENS, chambre correctionnelle, en date du 7 avril 1992, qui, pour escroqueries, abus de biens sociaux, présentation de comptes annuels ne donnant pas une image fidèle de la situation financière de la société, abus de confiance, l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement et 10 ans d'interdiction des droits prévus à l'article 42 du Code pénal et qui a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 405 et 408 du Code pénal, 437-3°, 460, 463, 464 de la loi du 24 juillet 1966, 5 du Code civil, 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Louis A... à une peine de deux ans d'emprisonnement et à la privation des droits civiques, en application de l'article 42 du Code pénal, pour une durée de dix ans, ainsi qu'à diverses réparations civiles ;
"aux motifs propres que, par des motifs pertinents que la Cour adopte, les premiers juges ont clairement exposé les faits, les ont déclarés établis, et leur ont donné leur juste qualification ; qu'il échet de confirmer le jugement sur le principe de la culpabilité ; sur la peine : attendu que Louis A... a profité de ses fonctions pour s'enrichir avec les subventions obtenues par le comité du bassin d'emploi du Val d'Authie et du Val de la Nièvre ; qu'une telle malhonnêteté mérite d'être sanctionnée avec rigueur ; qu'il échet de condamner le prévenu à deux ans d'emprisonnement tout en confirmant la privation des droits civiques pendant dix ans ;
"alors qu'en affirmant que, par principe, et abstraction faite des circonstances propres à l'espèce ou au comportement du prévenu, l'enrichissement personnel sur des fonds destinés à favoriser l'emploi constituait un délit qui méritait d'être sanctionné avec rigueur, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article 5 du Code civil ;
"et aux motifs adoptés d'une part que, s'agissant de l'escroquerie, Louis A... faisait effectuer par des prestataires extérieurs, pour le compte du comité du bassin de l'emploi, des études financées par des subventions accordées au Comité du bassin de l'emploi par l'Etat, le Conseil général et le Conseil régional ; il en surévaluait le coût, dans un cas au moins à l'aide de la production d'un faux certificat d'avancement des travaux, dans les autres grâce à l'absence de contrôle dont il bénéficiait ; les conventions de subventionnement ainsi majorées étaient signées avec les administrations par le président du comité du bassin de l'emploi et la différence avec le coût réel des études au total 324 600 francs, était ensuite versée par Louis A... au compte de Douflor, société en formation, sans activité, dont Louis A... était aussi salarié, mais qui n'avait pas à intervenir dans les études concernées, pour le suivi desquelles Louis A... était mandaté, rémunéré et défrayé par le comité du bassin de l'emploi ; en conséquence, il s'agit bien d'escroquerie au préjudice des subventionneurs, commise par Louis A... en fournissant des éléments mensongers, voire des faux, auxquels la signature du président du comité du bassin de l'emploi conférait force et crédit ;
"1°) alors que le délit d'escroquerie suppose que les manoeuvres frauduleuses aient été commises dans le but de persuader de l'existence de fausses entreprises, d'un pouvoir ou d'un crédit imaginaire, ou pour faire naître l'espérance ou la crainte d'un succès ; que le prévenu faisait valoir dans ses écritures que l'augmentation des subventions d'études avait été décidée, en accord avec le CBE, afin d'y inclure les subventions de fonctionnement et les frais forfaitaires de mission que le CBE, selon l'application des règles du droit administratif arrêtées entre le CBE et l'Etat, ne pouvait mobiliser lui-même ; qu'en se bornant à constater que les subventions litigieuses avaient été majorées, sans constater que ces manoeuvres étaient destinées à persuader l'Etat de l'existence d'entreprises fausses ou chimériques, et que les fonds en cause n'auraient pas été accordés, fût-ce par d'autres moyens, en l'absence desdites manoeuvres, la cour d'appel n'a pas caractérisé les éléments légaux du délit d'escroquerie et violé les textes susvisés ;
2°) alors qu'en déclarant que la société Douflor n'avait pas à intervenir dans les études concernées pour le suivi desquelles A... était mandaté, rémunéré et défrayé exclusivement par le CBE, sans s'expliquer sur les conclusions de A... qui faisaient valoir que cette société agissait officiellement au lieu et place du CBE et que le président de ce comité, suivant un avenant à son contrat de travail qu'il produisait aux débats, l'avait expressément autorisé à percevoir directement une rémunération de la part des partenaires industriels du CBE, et notamment de la société Douflor, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motif et violé encore les textes visés au moyen ;
"3°) alors qu'en déclarant que la société Douflor n'avait pas à intervenir dans les études concernées pour le suivi desquelles A... était mandaté, rémunéré et défrayé exclusivement par le CBE, sans s'expliquer sur la note de service produite aux débats, du président du CBE, M. Y..., en date du 28 janvier 1985, où il est fait expressément mention qu'il ne pouvait être question pour le comité de rémunérer A... des frais de déplacement pour le suivi des contrats d'étude signés avec les entreprises, la cour d'appel a entaché encore sa décision d'un défaut de motifs et violé les textes susvisés ;
"et aux motifs d'autre part, s'agissant de l'abus de biens sociaux, que Louis Z... n'a jamais fourni aucun justificatif sérieux à l'appui de ses déclarations selon lesquelles les sommes virées sur ses comptes personnels ou utilisées pour payer des dépenses personnelles correspondaient à des remboursements de frais engagés par lui ; en conséquence, il convient de retenir sa culpabilité pour les abus de biens sociaux visés par la prévention, soit pour 321 613,20 francs ;
"1°) alors qu'en mettant à la charge du prévenu la preuve que les fonds litigieux correspondaient à des dépenses professionnelles, quand il appartenait au ministère public de rapporter la preuve que ces fonds avaient été utilisés par A... à des fins personnelles, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé les textes susvisés ;
"2°) alors que le délit d'abus de biens sociaux suppose que les fonds détournés aient appartenu à la personne morale victime de ce délit ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt que la société Douflor n'a subi aucun préjudice du fait des agissements de A..., les sommes détournées par ce dernier ne correspondant à aucune prestation de cette société, qui n'avait aucune activité réelle ; qu'en déclarant que la dissipation de ces fonds étaient constitutive d'abus de biens sociaux par A... au préjudice de cette société, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
"3°) alors que la détention frauduleuse par la personne morale des fonds ultérieurement détournés par l'un de ses dirigeants est exclusive de la commission à son détriment d'abus de biens sociaux ; qu'en l'espèce, l'arrêt relève que les fonds inscrits au compte de la société Douflor avaient préalablement été détournés par ce dernier au préjudice de l'Etat ; qu'en déclarant que l'utilisation de ces fonds par Rouvert était constitutive d'abus de biens sociaux au préjudice de la société Douflor, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"et aux motifs encore que s'agissant de la présentation de faux bilan, A... ne conteste pas que les opérations du compte 46682 n'ont fait l'objet d'aucun enregistrement comptable ; ce compte était destiné à recevoir les fonds provenant de la libération du capital et avait été soldé comme tel par transfert de son crédit au compte d'exploitation ; que l'intention frauduleuse de A... ressort du fait qu'il a fait postérieurement à la clôture du compte une demande de chéquier et qu'il a utilisé ce chéquier sans que jamais aucune pièce concernant ce compte ni aucun relevé n'ait été transmis au comptable ;
"alors qu'il résulte des éléments de preuve fournis par la banque et produits aux débats que le chéquier avait été délivré par la banque à A... le 12 septembre 1987, et que le compte correspondant avait été crédité 3 mois après, le 1er décembre 1987 d'une somme de 187 500 francs, ce qui démontrait de façon irréfutable que la demande de chéquier n'avait pas été postérieure à la clôture du compte ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a dénaturé ces éléments de preuve, et violé les textes visés au moyen ;
"et aux motifs encore, s'agissant de l'escroquerie au préjudice de M. X..., que ce dernier, entrepreneur cocontractant de la société FL Technologies, déclare que les 60 000 francs qu'il a versés et qui ont été perçus personnellement par Louis A... sur son compte lui avaient été présentés par ce dernier comme "un dépôt de garantie" et rien ne vient étayer la thèse de Louis A... selon laquelle il s'agirait de la rémunération de services rendus par lui dont on ne voit pas, au surplus, à quel titre il les aurait rendus ;
"1°) alors qu'en se fondant sur les seules affirmations de la victime pour déduire l'existence de l'infraction, sans constater qu'elles étaient corroborées par des éléments de preuve résultant de l'instruction, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
"2°) alors que A... produisait aux débats le marché conclu avec l'entreprise de M.
X...
le 13 février 1988 avec la société Douflor en vue d'une assistance technique pour un projet de serres ; que le demandeur faisait valoir encore qu'aux termes de son contrat, il avait reçu de son employeur l'autorisation de percevoir directement des entreprises qu'il assistait la rémunération de ses frais de mission ; qu'en déclarant que "l'on ne voit pas à quel titre A... aurait reçu les fonds litigieux de l'entreprise de M.
X...
", sans même s'expliquer sur ces éléments de preuve produits aux débats, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"3°) alors qu'en déclarant que la perception par A... des fonds que lui avait remis M. X... était constitutive d'une escroquerie au préjudice de ce dernier, sans relever l'existence de manoeuvres destinées à persuader M. X... de l'existence d'une fausse entreprise, et ayant directement déterminé la remise des fonds par celui-ci, la cour d'appel n'a pas caractériser les éléments légaux que requiert cette infraction, et violé encore les textes visés au moyen ;
"et aux motifs enfin, quant à l'abus de confiance, la culpabilité de Louis A... ressort du fait que le chèque de 12 500 francs a été versé sur son compte personnel et que cette destination n'est conforme ni à ce qu'il a lui-même porté sur son talon, ni à son enregistrement comptable ;
"1°) alors qu'en se bornant à constater que la destination de la somme litigieuse n'était pas conforme aux mentions figurant sur le talon du chèque, ni à l'enregistrement comptable de cette somme, sans faire état de la destination qu'indiquaient ces documents, ni constater que cette absence de conformité était exclusive d'une simple erreur, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure de constater la réalité des éléments à la fois matériel et moral de l'infraction, et violé les textes susvisés ;
"2°) alors qu'en se bornant à constater que la destination de la somme litigieuse n'était pas conforme aux mentions figurant sur le talon du chèque, ni à son enregistrement comptable, sans constater que la somme perçue par A... ne lui était pas due, la cour d'appel a violé encore les textes visés au moyen"" ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 408 du Code pénal, 4 et 593 du ° Code de procédure pénale, 1382 et suivants du Code civil, insuffisance de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné A... à payer au CBE la somme de 321 600 correspondant au montant des détournements effectués à son préjudice ;
"aux motifs qu'ainsi que le constate le tribunal, les sommes escroquées par Louis A... au profit de la société Douflor et finalement de lui-même étaient intégralement compensées par l'Etat et les collectivités publiques ; qu'il n'en demeure pas moins que ces sommes ont été détournées de leur finalité première au bénéfice du seul Louis A... qui n'en était pas le destinataire ; qu'il y a lieu en conséquence de lui accorder la somme de 321 600 francs correspondant au montant des détournements effectués à son préjudice ;
"1°) alors que la partie civile n'est fondée à réclamer réparation que du dommage que lui a directement causé l'infraction ; qu'en condamnant A... à rembourser au CBE la somme de 321 600 francs détournée par ce dernier, tout en constatant que cette somme avait été intégralement et exclusivement supportée par l'Etat, ce dont il résultait que le délit n'avait causé au CBE aucun préjudice matériel direct, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
"2°) alors que la légèreté ou l'imprudence de la victime constitue une cause d'exonération partielle de la responsabilité civile de l'inculpé ; qu'en énonçant que la réalisation du délit commis par Louis A... trouvait son origine dans l'incurie ou à tout le moins dans l'absence de contrôle des dirigeants du CBE, sans rechercher si cette circonstance n'était pas de nature à entraîner un partage de responsabilité dans la réalisation du dommage subi par ce dernier, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
x Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué, et du jugement qu'il confirme, que Louis A... est poursuivi pour escroquerie au préjudice du Comité du bassin de l'emploi du Val d'Authie et du Val de Nièvre CBE au moyen de manoeuvres frauduleuses, pour escroquerie au préjudice de Daniel X... en ayant fait usage de la fausse qualité de mandataire, pour abus de biens sociaux au préjudice de la société Douflor, pour présentation aux actionnaires de la société Douflor de comptes annuels ne donnant pas de la situation financière de la société une image fidèle, et pour abus de confiance au préjudice du CBE ;
Attendu que pour le déclarer coupable de ces infractions dans les termes de la prévention, la cour d'appel relève, par adoption des motifs des premiers juges, que Louis A..., au service du CBE, a obtenu des subventions de l'Etat, du Conseil régional et du Conseil général en produisant des conventions de "subventionnement" majorées signées sans contrôle par le président du CBE et un faux certificat d'avancement de travaux ; que les sommes ainsi obtenues ont transité sur les comptes de la société Douflor en formation et qu'elles ont pour partie bénéficié personnellement à A..., sans aucune justification ; que des fonds versés sur un compte bancaire de la société Douflor pour la libération du capital social n'a fait l'objet d'aucun enregistrement comptable ; qu'enfin A..., qui n'avait aucun titre pour la recevoir, a perçu de Daniel X..., au nom de la société FL Technologies, une somme de 60 000 francs et qu'il a détourné, au préjudice du CBE, par encaissement sur son compte personnel, un chèque de 12 500 francs qui ne lui était pas destiné ;
Attendu qu'en l'état de ces constatations et énonciations, et dès lors que la loi ne permet pas de réduire, en raison d'une négligence alléguée de la victime, le montant des réparations dues à celle-ci par l'auteur d'une infraction intentionnelle contre les biens, la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance, a caractérisé en tous leurs éléments constitutifs les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable et ainsi justifié l'allocation, au profit du CBE, de l'indemnité propre à réparer le préjudice subi par lui ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en question, d'une part, l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause ainsi que la valeur des éléments de preuve contradictoirement débattus devant eux et, d'autre part, la faculté discrétionnaire qui appartient aux juges de déterminer le quantum de la peine, ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Crim. 5 mai 1993 n° 92-81.612
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le cinq mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire FERRARI, les observations de Me Y... et la société civile professionnelle BORE et XAVIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MONESTIE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Gilles, partie civile, contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, du 14 février 1992, qui, dans les poursuites exercées contre Jean-Pierre B... des chefs d'homicides et blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1382, 1383 et 1384 du Code civil, 4 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Voisin à payer à Casse une somme limitée à 222 360 francs à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice professionnel éprouvé à la suite du décès accidentel de sa soeur dans un accident dont Voisin était entièrement responsable ;
"au motif que, s'il n'avait pas repris ses études au bout de deux ans, comme l'aurait fait une personne normalement constituée, c'est en raison d'un état pathologique antérieur et qu'il y avait lieu, en conséquence, de ne réparer que la perte de deux ans d'études ;
"alors que, si l'accident, dont la réparation est demandée, a agi comme révélateur d'un état pathologique, existant antérieurement mais demeuré sans conséquence dommageable, de sorte que le préjudice est, dans sa totalité, dû à cet accident, la réparation doit en être intégrale ; qu'il suit de là que les juges du fond ne pouvaient limiter la réparation du préjudice résultant de l'abandon de ses études par Casse à la seule perte de deux ans de scolarité, en se fondant sur son état antérieur prédisposant, sans constater que cet état s'était déjà manifesté et avait engendré un préjudice, de sorte que le dommage éprouvé n'était pas dû, dans sa totalité, à l'accident ; que, faute de cette constatation, la limitation de la réparation n'est pas légalement justifiée et l'arrêt attaqué dépourvu de base légale" ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'Anne-Marie et Hélène X... ont été, la première tuée, la seconde grièvement blessée dans l'accident de la circulation dont Jean-Pierre B... a été déclaré entièrement responsable ; qu'il s'en est suivi pour leur frère aîné, Gilles Casse, alors âgé de 21 ans, un syndrome anxio-dépressif réactionnel intense ;
Attendu que, se prononçant sur la réparation de ce chef de dommage, la cour d'appel, pour écarter la demande de 1 774 400 francs formée par lui au titre du préjudice professionnel, et ne lui allouer qu'une indemnité de 160 000 francs "pour la perte de deux années d'études supérieures", énonce, par motifs adoptés, que si Gilles X... n'a pas, après une période de réaction émotionnelle légitime, repris les études par lui interrompues après le décès de sa soeur, la cause réside dans "l'anxiété naturelle et les blocages psychologiques liés à un état antérieur à l'accident" ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a tenu compte, à bon droit, de l'état de santé de la victime antérieur à l'accident dès lors que cet état n'avait été ni provoqué, ni révélé par celui-ci, n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans les limites des conclusions des parties, l'étendue du dommage découlant de l'infraction et l'indemnité propre à le réparer ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Souppe conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Ferrari conseiller rapporteur, MM. Jean A..., Blin, Carlioz, Mme Baillot conseillers de la chambre, Mmes Z..., Verdun conseillers référendaires, M. Monestié avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Civ.2 5 mai 1993 n° 91-21.863
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jean-Claude X..., demeurant 5, place duiron à BouxièresauxDames (Meurthe-et-Moselle),
en cassation d'un jugement rendu le 18 octobre 1990 par le tribunal d'instance de Nancy, au profit :
18) de la Caisse d'épargne de Nancy, dont le siège est ... (Meurthe-et-Moselle),
28) de Mme X..., demeurant 5, place duiron à BouxièresauxDames (Meurthe-et-Moselle) et actuellement à Nancy (Meurthe-et-Moselle), ...,
défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 mars 1993, où étaient présents : M. Dutheillet-Lamonthézie, président, M. Burgelin, conseiller rapporteur, MM. Delattre, Laplace, Chartier, Mme Vigroux, M. Buffet, conseillers, M. Bonnet, conseiller référendaire, M. Monnet, avocat général, Mme Lagardère, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Burgelin, les observations de Me Foussard, avocat de M. X..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la Caisse d'épargne de Nancy, les conclusions de M. Monnet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
! Donne défaut contre Mme X... ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Nancy, 18 octobre 1990), rendu en dernier ressort, que les époux X..., après avoir fait opposition à une ordonnance d'injonction de payer rendue en faveur de la Caisse d'épargne de Nancy (la caisse), ont sollicité un sursis à statuer ;
Attendu qu'il est fait grief au jugement d'avoir rejeté cette demande et condamné M. et Mme X... à verser une certaine somme à la caisse, alors qu'en refusant de surseoir à statuer bien que Mme X... fût poursuivie devant une juridiction répressive, notamment pour avoir contrefait la signature de son époux dans l'engagement de cautionnement d'un prêt consenti par la caisse, le tribunal aurait violé les articles 4 du Code de procédure pénale, 378, 379 et 380-1 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que le tribunal retient, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que les époux X... ne justifiaient pas qu'une action publique fût exercée à leur encontre ;
Qu'ainsi, le moyen n'est pas fondé ;
Crim. 5 mai 1993 n° 92-85.236
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le cinq mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller Jean SIMON, les observations de la société civile professionnelle LESOURD et BAUDIN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MONESTIE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... José, contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 13ème chambre, en date du 16 septembre 1992, qui, pour exécution de travaux de construction immobilière en méconnaissance des obligations du permis de construire, l'a condamné à 4 000 francs d'amende et a ordonné, sous astreinte, la mise en conformité de la construction ;
Vu le mémoire produit ; Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que José Y... a, au mépris des prescriptions du permis de construire qui lui avait été délivré, aménagé en local d'habitation un édifice annexe qui devait être démoli pour faire place à un garage et construit sans autorisation un bâtiment reliant cet édifice à un pavillon donnant sur la rue ; qu'il a sollicité un permis de construire modificatif qui lui a été refusé ; qu'il est poursuivi pour exécution de travaux en méconnaissance des prescriptions du permis de construire ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 480-4 du Code de l'urbanisme, 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation du principe de la personnalité pénale des peines, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'exécution de travaux de construction immobilière en méconnaissance du permis de construire qui lui avait été délivré ;
"aux motifs que, à supposer que son locataire ait réalisé les travaux, il n'avait pu le faire qu'avec l'accord du propriétaire, d'ailleurs seul titulaire du permis de construire ; qu'ainsi, le prévenu ne saurait s'exonérer de sa responsabilité pénale ;
"alors, d'une part, que seul peut être pénalement sanctionné l'auteur d'une infraction au Code de l'urbanisme ; que le titulaire d'un permis de construire, qui, après l'avoir obtenu, ne prend l'initiative de faire exécuter aucune construction ni directement, ni par personne interposée, ne peut être tenu pour responsable des infractions commises par ceux qui, à son insu, ont effectué des constructions en méconnaissance de ce permis de construire et être pénalement sanctionné à leur place ; qu'en retenant la responsabilité pénale du prévenu et en le sanctionnant pour les seuls motifs susénoncés, qui, non seulement ne caractérisent aucun élément établissant que les travaux litigieux eussent été entrepris avec son accord, mais ont, de surcroît, un caractère manifestement hypothétique, la cour d'appel a porté atteinte au principe de la responsabilité personnelle en droit pénal et prononcé une condamnation illégale ;
"alors, d'autre part, que le locataire, M. X..., ayant reconnu avoir exécuté, sous sa seule responsabilité, les travaux litigieux, la cour d'appel ne pouvait entrer en voie de condamnation à l'encontre du prévenu sans s'expliquer sur ce moyen péremptoire de défense développé dans ses conclusions" ;
Attendu que, pour écarter les conclusions du prévenu soutenant que les travaux avaient été réalisés par son locataire et le déclarer coupable du délit réproché, la juridiction du second degré énonce que lesdits travaux ne pouvaient être réalisés qu'avec l'accord du propriétaire titulaire du permis de construire ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'une demande de permis modificatif a été présentée par José Y... lui-même, qui était titulaire du permis de construire initial et bénéficiaire des travaux, la cour d'appel, loin de méconnaître les dispositions de l'article L. 480-4 du Code de l'urbanisme, en a fait l'exacte application ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 480-5, 7, 4 alinéa 1 du Code de l'urbanisme, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'exécution de travaux de construction immobilière en méconnaissance du permis de construire qui lui avait été délivré ;
"aux motifs qu'il n'était pas contesté que les annexes, dont la démolition avait été autorisée pour être remplacées par un garage, n'ont pas été détruites mais aménagées en habitation comportant des vues directes sur une parcelle voisine ; que le prévenu reconnaissait que ce bâtiment en fond de parcelle était à l'usage de salle de jeux et que le porche situé au rez-de-chaussée du pavillon sur rue servait en réalité de garage ; qu'il y avait donc eu un changement de destination de la construction projetée ;
"alors, d'une part, que le prévenu avait fait valoir que les annexes dont la démolition avait été demandée et autorisée n'avaient pas été aménagées mais avaient été laissées en l'état ; qu'ainsi, c'est en contradiction avec les conclusions d'appel du prévenu (p. 3 V § 3 et 4, VI § 3 et 4) que la cour d'appel a affirmé que celui-ci ne contestait pas avoir aménagé ces annexes en habitation comportant des vues directes sur une parcelle voisine ; que cette contradiction prive l'arrêt attaqué de base légale ;
"alors, d'autre part, que l'infraction d'exécution de travaux de construction en méconnaissance du permis de construire n'est constituée que si des travaux sont effectivement effectués ; qu'il ne résulte d'aucune des énonciations de l'arrêt attaqué que les ouvertures des annexes aient été réalisées postérieurement à la délivrance du permis de construire ; que, dès lors, l'infraction reprochée au prévenu n'est pas légalement caractérisée et la déclaration de culpabilité manque de base légale ;
"alors, enfin, que, dans ses conclusions demeurées sans réponse, le prévenu avait fait valoir que le porche de la maison avait toujours été utilisé comme garage, ainsi que cela apparaissait des photographies accompagnant la demande de permis de construire, et que rien n'interdisait d'utiliser un garage déjà existant comme une salle de jeux ; qu'en affirmant qu'il y avait eu changement de destination de la construction projetée, sans s'expliquer sur ces moyens des conclusions qui étaient de nature à établir l'absence de toute infraction, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Et sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 422-1 et suivants, R. 422-2 m), L. 480-5, 7, 4, alinéa 1, du Code de l'urbanisme, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'exécution de travaux de construction immobilière en méconnaissance du permis de construire qui lui avait été délivré ;
"aux motifs qu'avait été construit, sans aucune autorisation administrative, un bâtiment en parpaings totalement couvert et fermé sur les côtés reliant le pavillon sur rue au bâtiment en fond de parcelle, ce qui a pour effet d'accroître la surface habitable et de réduire celle du jardin ;
"alors, d'une part, que les constructions de faible importance ne sont pas subordonnées à l'exigence d'un permis de construire ; que, dans ses conclusions, le prévenu faisait valoir que la construction en parpaings qui lui était reprochée était de petite dimension et n'était donc pas subordonnée à l'exigence d'un permis de construire ; qu'en ne s'expliquant pas sur les caractéristiques physiques de cette construction, et notamment sur ses dimensions, la cour d'appel n'a pas légalement justifié la déclaration de culpabilité ;
"alors, d'autre part, que, dans ses conclusions, le prévenu avait fait valoir que seul est applicable à l'espèce l'article UD 9/3, page 45 du plan d'occupation des sols, lequel, en ce qui concerne l'extension ou l'aménagement des constructions édifiées antérieurement au 11 juillet 1979, autorise les extensions n'excédant pas une emprise au sol de 10 m et que la construction de parpaings avait été ajoutée à une construction antérieure au 11 juillet 1979 et ne dépassait pas, en outre, 10 m ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce moyen péremptoire des conclusions, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à la déclaration de culpabilité ;
"alors, enfin, que, en relevant, comme élément de culpabilité, que l'emprise au sol des bâtiments était de 68 % de l'unité foncière alors qu'elle ne devait pas excéder un taux de 50 % selon l'article UD 9 du POS, que le coefficient d'occupation des sols, du fait de constructions réalisées, atteignait 1,4 % au lieu de 0,8 %, ce qui était contraire aux articles UD 13, UD 14 et UD 15 du POS, sans répondre aux conclusions du prévenu qui faisait valoir que cette réglementation ne s'appliquait pas aux constructions antérieures au 11 juillet 1979 et qu'en tout état de cause, en raison des démolitions intervenues, l'emprise au sol du bâtiment qui, dans le dossier de peris de démolir, était de 157,83 m n'était plus, même avec les nouvelles constructions, que de 153,94 m, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à la déclaration de culpabilité" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que ce n'est pas seulement l'affectation d'un local annexe à usage d'habitation qui a été retenu à la charge du prévenu mais un ensemble de travaux non conformes aux prescriptions du permis de construire en date du 28 décembre 1988 et réalisés en grande partie postérieurement à celui-ci ;
Qu'il n'importe que les énonciations de l'arrêt ne permettent pas de connaître la superficie du local reliant le bâtiment annexe au pavillon donnant sur la rue dès lors que les travaux irrégulièrement exécutés portaient sur un ensemble de constructions reliées entre elles dont la superficie totale excédait 10 m ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Crim. 5 mai 1993 n° 91-81.182
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire VERDUN, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MONESTIE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... Marc, contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, du 16 novembre 1990 qui, pour complicité d'outrage à magistrat, l'a condamné à une amende de 2 000 francs avec sursis ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 6 et 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 8 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 34 et 37 de la constitution, 4, 59, 60, 222 alinéa 1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a reconnu le prévenu coupable de complicité d'outrage à magistrat de l'ordre judiciaire et l'a condamné, en répression, à une amende de 2 000 francs avec sursis ;
"aux motifs que la matérialité et les termes de la lettre incriminée, et notamment son post-scriptum, ne sont pas contestés ; qu'il y a lieu d'approuver les premiers juges d'avoir dit que les termes employés, tels qu'exactement rapportés par eux, mettaient nettement en cause l'impartialité du magistrat instructeur et qu'ils étaient dès lors constitutifs d'outrages (adde ; jugement entrepris p. 3, §§ 4 à 7) ; attendu cependant que s'il est certain que Renard a été le rédacteur matériel de ces termes et leur inspirateur, il n'en reste pas moins vrai que le courrier dont s'agit a été signé et expédié par M. X..., qui se l'est approprié, Renard l'ayant établi pour son compte et à sa demande ; attendu encore que s'il n'est pas contesté par Renard qu'il se sente mal perçu et en butte à des tracasseries de la part de l'institution judiciaire dans son ensemble et dudit premier juge d'instruction en particulier, il n'est pas pour autant prouvé que Renard ait utilisé ce courrier précis pour régler un contentieux personnel, ainsi que l'ont retenu les premiers juges ; que c'est à tort en conséquence que le tribunal correctionnel de Reims a qualifié Renard d'auteur principal ; qu'il y a lieu d'infirmer le jugement critiqué et de requalifier l'infraction poursuivie à l'égard de Renard en complicité d'outrage à magistrat (arrêt p. 2 et 3) ;
"alors que, d'une part, l'éventuelle mise en cause de l'impartialité d'un magistrat relève du strict exercice des droits de la défense dans le cadre d'un procès équitable et ne saurait, en aucune manière, constituer un outrage susceptible d'être pénalement incriminé ;
"alors que, d'autre part, la cour d'appel n'a pas recherché si et en quoi le reproche de partialité qu'elle a cru découvrir dans la prévention tendait à inculper l'honneur ou la délicatesse du juge d'instruction ;
"alors que, de troisième part, le simple souci exprimé par un plaignant d'obtenir une prompte justice en l'état de la qualité de son conseil qui n'était pas un avocat inscrit et malgré les manoeuvres dilatoires habituelles de la personne poursuivie, ne constituait pas, dans les circonstances de la cause, un outrage à magistrat ;
"alors enfin que la Cour n'a pas recherché si en quoi la maladresse du propos du plaignant reflétait de sa part une quelconque intention d'inculper l'honneur ou la délicatesse du juge d'instruction entre les mains duquel il déposait une plainte avec constitution de partie civile" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit de complicité d'outrage à magistrat dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus devant eux, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Crim. 4 mai 1993 n° 93-80.731
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire NIVOSE et les conclusions de M. l'avocat général MONESTIE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Pierre, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 13 octobre 1992 qui, dans la procédure suivie contre lui du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, a rejeté sa demande de mise en liberté ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le moyen de cassation, pris de la violation de l'article 197 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Pierre X... a formé une demande directe de mise en liberté, en application de l'article 148-4 du Code de procédure pénale ;
Que son conseil, Me Y..., a régulièrement déposé un mémoire au greffe de la chambre d'accusation, la veille de l'audience du 13 octobre 1992 ; qu'à cette dernière date, des observations ont été présentées par celui-ci pour l'inculpé ;
Attendu qu'en cet état la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer que la méconnaissance alléguée des dispositions de l'article 197 du Code de procédure pénale n'a pas eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ;
Que, dès lors, le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des articles 144, 145 et 148 du Code de procédure pénale ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Nivôse conseiller rapporteur, MM. Dumont, Malibert, Milleville, Guerder, conseillers de la chambre, Mme Batut conseiller référendaire, M. Monestié avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Com. 4 mai 1993 n° 91-17.236
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
M. Bernard Y..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 26 avril 1991 par la cour d'appel de Besançon (2e chambre civile), au profit :
18/ de la société Télé diffusion commerciale FRANCE-TEDICOM, dont le siège social est 14, rueorge du Loup à Lyon (Rhône),
28/ de M. Jean-François X..., demeurant ..., pris en qualité de mandataire liquidateur de la société TEDICOM FRANCE,
défendeur à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 2 mars 1993, où étaient présents :
M. Bézard, président, M. Gomez, conseiller rapporteur, M. Hatoux, conseiller, M. Curti, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. le conseiller Gomez, les observations de la SCP Rouvière et Boutet, avocat de M. Y..., les conclusions de M. Curti, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne défaut à l'encontre de la société Télé diffusion commerciale France et de M. X..., ès qualités ; Sur le moyen unique pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du Code de procédure pénale ; Attendu que l'identité d'objet et de cause n'est pas une condition d'application du second alinéa de ce texte, qui exige seulement que la décision à intervenir sur l'action publique soit susceptible d'influer sur celle qui doit être rendue par la juridiction civile ; Attendu que, pour rejeter la demande présentée par M. Y... tendant à ce qu'il soit sursis à statuer en raison de l'existence d'une mesure d'instruction pendante devant la juridiction répressive, l'arrêt se borne à énoncer qu'il n'y a aucune identité entre les deux procédures en cours, "celles-ci ayant des objets distincts et des fondements différents" ; de base légale à sa décision ; Et sur le moyen unique pris en sa seconde branche :
Vu les articles 779 et 910 du nouveau Code de procédure civile ; Attendu que l'affaire est renvoyée devant la cour d'appel pour être plaidée lorsque l'état de l'instruction le permet ; Attendu que pour condamner M. Y... au paiement de dommages-intérêts, la cour d'appel se borne à constater qu'il a demandé le rejet de la demande sans fournir aucun moyen à l'appui de son appel ; Attendu qu'en statuant ainsi sans constater que M. Y..., qui avait présenté à la cour d'appel une demande de sursis à statuer en raison de l'existence d'une instruction devant la juridiction répressive, avait reçu une injonction de conclure sur le fond, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Crim. 4 mai 1993 n° 92-81.465
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre mai mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller DUMONT, les observations de la société civile professionnelle BORE et XAVIER, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MONESTIE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... René, contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 14 février 1992, qui, sur renvoi après cassation, l'a condamné, pour défaut d'affichage des horaires de travail, à neuf amendes de mille francs, pour inobservation du repos hebdomadaire, à six amendes de mille francs, pour dépassement de la durée maximale quotidienne du travail, à cinq amendes de mille francs, et, pour dépassement de la durée maximale hebdomadaire du travail, à cinq amendes de mille francs et qui a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 593 du Code de procédure pénale, L. 221-4, R. 262-1, L. 212-1, R. 261-3, L. 212-7, R. 261-4 du Code du travail et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable d'infractions aux dispositions concernant le repos hebdomadaire minimum et la durée quotidienne et hebdomadaire du travail ;
"aux motifs, il est vrai, que "les mentions du procès-verbal d'infraction procèdent des dires des salariés tels que recueillis par le contrôleur du travail et qu'il pouvait en déduire, en l'état des divagations du prévenu, que la preuve des infractions reprochées n'est pas rapportée contre lui ; que d'une part, il résulte du procès-verbal d'infraction que le contrôleur du travail a personnellement constaté, les 17 et 23 janvier 1988, des manquements certains quant aux horaires de travail des salariés de l'entreprise et qu'enfin le manquement des mesures d'affichage en infraction à l'article R. 221-10 du Code du travail, établit suffisamment et objectivement la volonté de l'employeur de ne pas satisfaire à ses obligations quant aux droits des salariés de ce que la non-tenue du registre du personnel, infraction pour laquelle X... est définitivement condamné ; qu'enfin celui-ci (cote 4) a reconnu qu'en période de surcroît de travail (fêtes légales, notamment) les dispositions légales en l'espèce n'étaient pas observées" (recopie de l'arrêt tel que rédigéé ;
"1°) alors qu'il résulte de la "note complémentaire" du procès-verbal établi par le contrôleur du travail le 18 septembre 1987, que deux contrôles de nuit ont été effectués les 17 et 23 janvier 1988 et que lors du premier d'entre eux, M. Y... a déclaré qu'il travaillait de 2 H 30 à 12 H 30, alors qu'au cours du second il a été constaté qu'il se trouvait à son poste de travail à 2 H 10 ; qu'en décidant qu'il résultait du procès-verbal susvisé que ledit contrôleur a personnellement constaté les 18 et 23 janvier 1988 des manquements certains quant aux horaires de travail, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs ;
"2°) alors que le juge ne peut prononcer de condamnations pénales pour infraction à la législation sur la durée du travail et le repos hebdomadaire, sans constater les faits constitutifs desdites infractions ;
qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué s'est borné à déclarer que le contrôleur du travail avait personnellement constaté, les 17 et 23 janvier 1988, des manquements certains quant aux horaires de travail et aux mesures d'affichage qui établissaient la volonté de l'employeur de se soustraire à ses obligations et que ce dernier avait reconnu qu'en période de surcroît de travail, les dispositions légales n'étaient pas respectées ; qu'en statuant ainsi, sans constater l'élément matériel des infractions dont elle a déclaré coupable X..., la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la qualification des faits incriminés, a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du procès-verbal du contrôleur du travail, base de la poursuite, que ce fonctionnaire s'est rendu dans la pâtisserie exploitée par René X... le 18 septembre 1987 et a rédigé un procès-verbal dans lequel il relève plusieurs infractions au Code du travail ; que, notamment, et selon les indications fournies par des salariés et se trouvant en annexe au procès-verbal, il a noté le dépassement de la durée maximale quotidienne et hebdomadaire du travail et l'inobservation du repos hebdomadaire ;
Attendu que, pour confirmer la déclaration de culpabilité des premiers juges, la juridiction du second degré énonce que si les mentions du procès-verbal procèdent des déclarations des salariés, il résulte de visites complémentaires faites les 17 et 23 janvier 1988 que le contrôleur du travail a constaté des manquements aux horaires de travail de certains salariés ; qu'elle observe en outre que les infraction aux obligations d'affichage et de tenue de registre du personnel, démontrent l'intention du prévenu de ne pas satisfaire à ses obligations envers les salariés ; qu'elle relève enfin que X... a lui-même reconnu qu'en période de surcroît de travail, les dispositions légales n'étaient pas observées ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs exempts de contradiction, la cour d'appel qui, en se fondant sur les divers éléments soumis au débat contradictoire, a souverainement apprécié la valeur probante des mentions du procès-verbal, a légalement justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
H Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Dumont conseiller rapporteur, MM. Malibert, Milleville, Guerder conseillers de la chambre, M. Nivôse, Mme Batut conseillers référendaires, M. Monestié avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 3 mai 1993 n° 92-81.728 B n° 162
REJET du pourvoi formé par :
- X... Marie-Claude, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bordeaux, du 3 mars 1992, qui, dans l'information suivie contre X des chefs de faux et usage de faux, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction disant n'y avoir lieu à suivre, notamment pour cause de prescription de l'action publique et qui a déclaré irrecevable sa constitution de partie civile.
LA COUR,
Vu l'article 575, alinéa 2, du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation du principe selon lequel la prescription ne court pas quand un obstacle de droit ou de fait empêche les parties poursuivantes d'agir, des articles 4 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que la Cour a déclaré l'action publique éteinte par la prescription ;
" aux motifs que, ainsi que l'a exactement énoncé le juge d'instruction, l'action publique se trouve éteinte par la prescription ;
" et ceux ainsi adoptés que, même si un certificat a été établi portant des mentions critiquables, il l'a été en 1981 alors que la plainte avec constitution de partie civile date de 1987, force est donc de constater que l'action publique est prescrite dans l'éventualité où ce délit de faux et usage de faux serait caractérisé ;
" alors, d'une part, que la prescription ne court pas quand un obstacle, de droit ou de fait, empêche les parties poursuivantes d'agir ; qu'en l'espèce les entraves que l'Administration a apportées à la révélation des faits délictueux et qui ont nécessité la saisine de la Commission d'accès aux documents administratifs, ont eu pour effet de suspendre le délai de prescription triennale jusqu'à la date de la communication du dossier administratif du docteur X... à Marie-Claude X..., et partant de la découverte du faux et de son usage, soit le 3 mai 1985 ; que, dès lors, c'est au prix de la violation du principe susvisé que la chambre d'accusation a décidé que l'action publique était éteinte ;
" alors, d'autre part, que le délit de faux certificat médical est un délit continu par nature qui se perpétue tant qu'il est fait usage de ce document ; qu'il résulte du dossier que, si le certificat a été établi le 10 janvier 1981, il a en a été fait usage non seulement auprès de la Caisse des dépôts et consignations au cours de l'année 1982 mais aussi, après le 30 mars 1984, à l'occasion de l'instruction par le Conseil d'Etat d'un recours introduit par Marie-Claude X... qui a donné lieu à un arrêt de rejet le 16 avril 1986 ; qu'ainsi, le délai de prescription ne pouvait courir qu'à compter de la date à laquelle le document faux a été produit devant la haute assemblée ; que cette date étant postérieure au 30 mars 1984, la chambre d'accusation ne pouvait pas, sans violer les textes visés au moyen, décider que ce délai était prescrit, et qu'en conséquence l'action publique était éteinte au regard tant du délit de faux que de celui d'usage à la date du dépôt de la plainte, soit le 9 mars 1987 ;
" alors qu'en outre la Cour, en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire des conclusions de Marie-Claude X..., la chambre d'accusation a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation " ;
Attendu qu'en déclarant par les motifs repris au moyen, l'action publique prescrite, la chambre d'accusation, loin d'encourir les griefs qui lui sont faits, a fait l'exacte application des articles 7 et 8 du Code de procédure pénale ;
Que, d'une part, les délits de faux et usage de faux sont des infractions instantanées ; que, d'autre part, il n'était justifié d'aucun obstacle de droit, survenu après la mise en mouvement de l'action publique, et seul de nature à suspendre le délai de prescription de celle-ci ; que, par ailleurs, il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt, ni d'aucune articulation du mémoire déposé par la partie civile devant les juges du second degré, que cette dernière ait fait état devant eux des considérations qu'elle développe présentement en faveur d'une telle suspension et que celles-ci, mélangées de droit et de fait, et invoquées pour la première fois devant la Cour de Cassation sont irrecevables ;
Qu'il s'ensuit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 731, 732 et 1382 du Code civil, des articles 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la constitution de partie civile de Marie-Claude X... irrecevable ;
" aux motifs que toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut, en portant plainte, se porter partie civile devant le juge d'instruction ; que l'article 2 du Code de procédure pénale dispose que l'action civile en réparation du dommage causé par un crime ou un délit... appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ; que la partie civile fait valoir qu'elle a porté plainte pour faire reconnaître le bon droit de sa soeur dont elle a recueilli les charges en héritage, précisant ensuite que sa démarche ne tient qu'à réhabiliter la mémoire de sa soeur, faussement accusée de maladie mentale ; que, à supposer les faits établis, il n'en résulterait pour elle-même aucun préjudice découlant directement des infractions dénoncées ;
" alors, d'une part, que toute personne victime d'un dommage, quelle qu'en soit la nature, a droit d'en obtenir la réparation de celui qui l'a causé par sa faute ; que le droit à réparation du dommage résultant de la souffrance morale éprouvée par le docteur X... avant son décès en raison des accusations injustement portées à son encontre, étant né dans son patrimoine, s'est transmis à son unique héritière, Marie-Claude X... ; qu'ainsi, en déclarant irrecevable la constitution de partie civile de l'héritière du docteur X... au motif que Marie-Claude X... ne justifie d'aucun préjudice personnel découlant directement des infractions dénoncées, la Cour a violé les dispositions des textes visés au moyen ;
" alors, d'autre part, que la Cour ne pouvait, sans entacher sa décision du vice de contradiction, considérer que Marie-Claude X... ne justifiait d'aucun préjudice personnel découlant directement des faits dénoncés, dès lors qu'elle avait préalablement constaté que Marie-Claude X... avait " porté plainte pour faire reconnaître le bon droit de sa soeur dont elle a recueilli les charges en héritage ", et partant qu'elle se prévalait, non pas d'un dommage qui lui aurait été personnel, mais du dommage moral dont avait personnellement souffert sa soeur jumelle avant son décès, et dont le droit à réparation lui avait été transmis en sa qualité d'unique héritière " ;
Attendu que l'action publique étant prescrite, le premier moyen de cassation proposé est devenu sans objet ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.
Civ.1 28 avril 1993 n° 91-17.698
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Alain A..., notaire, domicilié ..., àassin (Var),
en cassation d'un arrêt rendu le 9 juillet 1991 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre, section B), au profit de M. le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence,
défendeur à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; LA COUR, en l'audience publique du 4 mars 1993, où étaient présents :
M. de Bouillane de Lacoste, président, Mme Delaroche, conseiller rapporteur, MM. F..., Z..., D..., C...
B..., MM. Jean-Pierre X..., Sargos, conseillers, Mme Y..., M. Charruault, conseillers référendaires, M. Lesec, avocat général, Mlle Ydrac, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme le conseiller Delaroche, les observations de la SCP Lemaitre et Monod, avocat de M. A..., les conclusions de M. Lesec, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le premier moyen :
Attendu que M. A..., notaire, fait grief à l'arrêt attaqué, (Aix-en-Provence, 9 juillet 1991) d'avoir prononcé contre lui la sanction de l'interdiction temporaire alors, selon le moyen, qu'il ne résulte pas de cette décision que le président de la chambre de discipline des notaires ait présenté ses observations ni même qu'il ait été présent à l'audience bien que l'article 16 du décret n8 1202 du 28 décembre 1973 le prévoie expressément ; qu'en omettant de veiller à l'accomplissement de cette formalité substantielle, la cour d'appel a violé ce texte ; Mais attendu qu'il résulte de l'article 38 du décret du 28 décembre 1973 relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels, qu'il est procédé en matière disciplinaire comme en matière civile sauf disposition spéciale ; qu'en application de l'article 459 du nouveau Code de procédure civile la preuve de l'observation des prescriptions légales peut résulter des productions ou du dossier de procédure ; qu'en l'espèce la production de la copie de la feuille d'audience établit que Me E..., qui était le président de la chambre des notaires à l'époque des faits reprochés, a été entendu en ses explications ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ; Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. A... qui, poursuivi pour abus de confiance à l'occasion des irrégularités commises, a fait l'objet d'une décision de relaxe au motif que son intention frauduleuse n'était pas établie, reproche à la cour d'appel de s'être prononcée ainsi qu'elle l'a fait alors, selon le moyen, d'une part, que l'absence d'intention frauduleuse, constatée par le juge pénal s'impose au juge civil et exclut toute condamnation sur le fondement d'un manquement à la probité ; qu'ainsi l'arrêt a violé l'article 2 de
l'ordonnance du 28 juin 1945 et l'article 4 du Code de procédure pénale ; et alors, d'autre part, que l'arrêt qui reconnaît l'absence d'intention frauduleuse résultant de l'autorité de la chose jugée au pénal et se borne à relever l'extrême gravité des faits retenus contre M. A..., laquelle ne pourrait suffire à caractériser une infraction particulière aux règles professionnelles et moins encore un fait contraire à la probité, manque de base légale au regard de l'article 2 précité ; Mais attendu que la cour d'appel avait à se prononcer dans une instance disciplinaire pour des paiements irréguliers effectués par le notaire lors de deux ventes de fonds de commerce ; que, sans méconnaître l'autorité de la chose jugée au pénal, elle a retenu que M. A... avait procédé lui-même à de multiples paiements en violation des clauses de séquestre, malgré l'opposition de la comptable de l'étude constituée séquestre pour l'une des ventes, et au mépris des droits des créanciers inscrits ; qu'ayant relevé la gravité de ces faits et leur répétition, la cour d'appel a ainsi caractérisé, à la charge de l'officier public, des manquements réitérés à ses devoirs professionnels et à la probité ; que sa décision est légalement justifiée et n'encourt aucune des critiques du moyen ; Et attendu que le pourvoi revêt un caractère abusif ;
Crim. 28 avril 1993 n° 92-85.420
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MASSE, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
X... Stéphane, contre l'arrêt de la cour d'assises de l'Aude, en date du 18 septembre 1992, qui, pour viol, l'a condamné à 6 ans de réclusion criminelle ;
Vu le mémoire produit ;
( Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 305-1, 591, 593 et 599 alinéa 2, du Code de procédure pénale, ensemble violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"en ce que le président n'a pas interpellé les parties à l'issue de la constitution du jury du jugement sur la forclusion par elles encourue relativement aux vices de la procédure antérieure ;
"alors que la forclusion prévue par l'article 305-1 ayant notamment pour but et pour objet de rendre irréprochable la constitution même irrégulière du jury du jugement, le président, lors même qu'aucun texte de droit interne ne l'y oblige expressément, est tenu de mettre spécialement les partie en garde sur les risques alors encourus" ;
Attendu que les articles 305-1 et 599 second alinéa du Code de procédure pénale, dont les dispositions ne sont pas incompatibles avec l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, n'imposent pas au président de la cour d'assises d'avertir l'accusé et son conseil que l'exception tirée d'une nullité entachant la procédure qui précède l'ouverture des débats doit, à peine de forclusion, être soulevée dès que le jury de jugement est définitivement constitué ;
Qu'ainsi le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 4 du Code pénal, des articles 86 et 227 de la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale, 328, 591 à 593 du Code de procédure pénale ensemble violation des droits de la défense ;
"en ce que l'interrogatoire de l'accusé a porté en premier lieu sur son curriculum vitae et non sur les faits P.V. p. 5 § 10) ;
"alors que l'interrogatoire de l'accusé porte en premier lieu sur les faits suivant la loi nouvelle immédiatement applicable, en l'absence de précision législative contraire, aux procédures en cours n'ayant pas donné lieu à une décision définitive" ;
Attendu que le moyen est inopérant dès lors qu'il se fonde sur un texte qui n'était pas promulgué au moment où a été jugé l'accusé ; Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 306, 378 et 592 du Code de procédure pénale ;
"en ce que le procès-verbal s'est borné à énoncer que l'audience suspendue à 11 heures 45 "a été reprise à 12 heures dans les mêmes conditions qu'auparavant" (P.V. p. 6 § 3) ;
"alors que faute de constatation expresse par le procès-verbal du caractère public de l'audience ainsi reprise, l'exigence de publicité est réputée n'avoir pas été satisfaite" ;
Attendu que, le procès-verbal des débats de l'audience du 18 septembre 1992, en constate la publicité ; qu'il précise qu'après la suspension de l'audience à 11 heures, elle a été reprise à 12 heures, "dans les mêmes conditions qu'auparavant" ;
Qu'en l'état de ces constatations expresses, le moyen qui repose sur un fait manifestement inexact, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Massé conseiller rapporteur, MM. Fontaine, Malibert, Guerder conseillers de la chambre, M. Nivôse, Mme Batut conseillers référendaires, M. Amiel avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 27 avril 1993 n° 92-83.620 B n° 157
CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X... Jean-Claude,
- la société Echirolles Distribution, civilement responsable,
- la compagnie d'assurances La Concorde, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, du 10 juin 1992, qui, pour blessures involontaires, a condamné Jean-Claude X..., à 3 mois d'emprisonnement avec sursis, a déclaré la société Echirolles Distribution civilement responsable et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit commun aux demandeurs et le mémoire en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 2, 3, 509, 515 et 593 du Code de procédure pénale, 1382 et 1384, alinéa 4, du Code civil, omission de statuer, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a, sur les intérêts civils, confirmé le jugement entrepris ayant ordonné une expertise médicale avec une provision de 300 000 francs à verser aux époux Y..., père et mère du jeune William, et a prononcé le renvoi de la procédure devant le Tribunal ;
" au motif qu'étant donné acte à la SA Echirolles Distribution et à la compagnie La Concorde qu'elles se reconnaissent civilement responsables, il convenait de retenir que le Tribunal avait sursis à statuer sur la totalité des demandes des parties civiles et qu'il y avait lieu, pour respecter la règle du double degré de juridiction, de renvoyer la procédure devant le premier juge pour qu'il soit statué en premier ressort sur les intérêts civils ;
" alors que loin de prononcer un sursis à statuer sur les intérêts civils, le jugement entrepris a ordonné une expertise médicale pour la victime avec une provision de 300 000 francs à verser à ses parents, dispositions du reste confirmées par l'arrêt attaqué ; qu'ainsi le Tribunal avait nécessairement consacré le principe de la réparation, contesté en appel par le civilement responsable et l'assureur qui réclamaient un partage de responsabilité fondé sur le fait fautif de l'enfant, quel qu'ait été son discernement, et sur le défaut de surveillance de ses parents ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ce partage de responsabilité, l'arrêt attaqué a méconnu les pouvoirs qui lui étaient dévolus par l'instance d'appel et entaché sa décision d'une omission de statuer au regard de la contestation utilement soulevée par la société Echirolles Distribution et la compagnie La Concorde, répondants du prévenu " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que, selon l'article 593 du Code de procédure pénale, les arrêts ou jugements en dernier ressort sont déclarés nuls lorsqu'il a été omis de statuer sur une ou plusieurs demandes des parties ;
Attendu que se prononçant sur la réparation du préjudice résultant pour la victime, âgée de 8 ans, et pour ses parents, du délit de blessures involontaires dont Jean-Claude X...a été déclaré coupable, les premiers juges ont ordonné une expertise médicale, alloué une indemnité provisionnelle, et sursis à statuer sur les autres demandes des parties civiles ;
Attendu que, sur appel de toutes les parties, les juges du second degré, saisis par le civilement responsable et son assureur, intervenants pour la première fois en cause d'appel, de conclusions tendant à voir mettre une part de responsabilité à la charge de la victime, en raison de la faute commise par elle et par ses parents, ne se prononcent pas sur cette demande, et, après confirmation du jugement sur les intérêts civils, ordonnent le renvoi de la procédure devant les premiers juges ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que l'expertise jusqu'aux résultats de laquelle le Tribunal avait sursis à statuer, ne portait que sur la détermination du préjudice, et qu'il appartenait en conséquence à la juridiction du second degré de statuer sur les conclusions tendant à un partage de responsabilité, la cour d'appel a méconnu le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions civiles l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, en date du 10 juin 1992 ;
Et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi :
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon.
Crim. 27 avril 1993 n° 91-82.363
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-sept avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le Conseiller référendaire de Z... de MASSIAC, les observations de la société civile professionnelle GUIGUET, BACHELLIER et POTIER de la VARDE, de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ et de la société civile professionnelle LE BRET et LAUGIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'Avocat Général AMIEL ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- B... Guy,
- D... Claude, contre l'arrêt de la cour d'appel de RENNES, chambre correctionnelle, en date du 13 mars 1991, qui, dans les poursuites exercées contre eux des chefs d'abus de biens sociaux, de banqueroute, d'abus de pouvoirs et de complicité de ce délit, les a condamnés à 8 mois d'emprisonnement avec sursis, 200 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils;
Joignant les pourvois en raison de leur connexité ;
Vu les mémoires produits en demande et en defense ;
Sur le premier moyen de cassation présenté par B... et pris de la violation de l'article 437-4° de la loi du 24 juillet 1966, des articles 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale et de l'article 1382 du Code civil ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable d'abus de pouvoir et l'a condamné à 8 mois d'emprisonnement avec sursis, 200 000 francs d'amende ainsi qu'à payer à Me Y... une somme 3 236 800 francs à titre de dommages et intérêts ;
"au motif qu'il résulte clairement du dossier et des débats et singulièrement des nombreuses pièces versées par la défense de Guy B..., que ce dernier a pris le contrôle de la société Les Maisons de l'Avenir pour le compte et essentiellement avec les fonds obtenus de Claude D..., que, devenu président-directeur général le 10 mai 1983, c'est à cette date que le conseil d'administration lui confiait tous pouvoirs pour négocier un nouveau bail, que le 8 novembre 1983, Guy B... renonçait unilatéralement, en signant un nouveau bail, au bénéfice des dispositions de l'article 10, alors que le bail en cours ayant pris effet au 1er janvier 1980 prévoyait une garantie de renouvellement à son terme du 1er janvier 1990, sauf indemnité d'éviction et paiement des impenses exigibles en vertu de l'article 10, que le loyer initialement fixé en 1979 à 212 600 francs, était porté à 296 400 francs pour le nouveau bail soit une somme très voisine de celle donnée par le calcul de l'indexation originairement prévue (296 425 francs), que les constructions ainsi abandonnées à la famille C... représentaient une réelle valeur lors de la signature de ce contrat lorsqu'on sait par les documents fournis par le mandataire liquidateur, Me Y... que l'ensemble immobilier sera cédé par la société civile immobilière famille C... à la ville de Vitre en 1988 pour la somme de 8 300 000 francs, la valeur des seules impenses représentant les constructions édifiées par les Maisons de l'Avenir en particulier les deux pavillons de démonstration étant mesurées lors de la revente par lots effectuées par la ville à 3 236 800 francs ; que les déclarations de Claude C..., maintenues lors d'une
confrontation avec Guy B..., établissent que ce dernier a agi sciemment, qu'en effet, Claude C... reconnaît qu'il avait exigé la modification de l'article 10 du bail en cours et que la contrepartie avait été une diminution du prix de cession de ses actions à Guy B... ; qu'il est à observer d'une part que la prise de contrôle des Maisons de l'Avenir, entreprise certes en difficulté a été obtenu par le versement d'une somme globale de 1 722 000 francs dont 322 000 francs apportés par Guy B... et 1 400 000 francs par Claude D..., que Guy B... après avoir affirmé au cours de l'enquête avoir tout ignoré des dispositions du bail de 1979 modifiera sa version devant les premiers juges pour prétendre que la modification de l'article 10 lui paraissait avantageuse par la société Les Maisons de l'Avenir ; qu'en renonçant sans nécessité, sans aucune contrepartie pour sa société, et au seul bénéfice de la société civile immobilière la famille C... à d'importants droits immobiliers afin de pouvoir obtenir un avantage personnel lui permettant d'acquérir à meilleur compte des actions Guy B... s'est bien rendu coupable d'abus de pouvoirs ;
"alors que, d'une part, l'existence de l'élément intentionnel du délit d'abus de pouvoir s'apprécie au jour où est passé l'acte litigieux ; qu'en se fondant pour déterminer si l'acceptation dans le nouveau bail conclu par Guy B... en novembre 1983, d'une clause excluant toute indemnisation des constructions édifiées sur le terrain à l'issue du bail, était préjudiciable à ladite société, sur la valeur mesurée de ces constructions lors d'une revente par lots du terrain par un sous-acquéreur en 1988, sans rechercher si, ainsi que l'avait relevé le tribunal, Guy B... n'était pas fondé à considérer qu'à la date où il signait la convention litigieuse, la valeur de reprise des constructions était négligeable, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
"alors que, d'autre part, le préjudice subi par la société Les Maisons de l'Avenir du fait de l'acceptation de la clause litigieuse ne peut être constitué que par le montant de l'indemnité qu'elle aurait perçue du bailleur à l'issue du bail pour la valeur des constructions ; qu'en allouant à ladite société à titre de dommages et intérêts une somme représentant la valeur mesurée des constructions, lors d'une opération de revente du terrain par lots par un sous-acquéreur, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen" ;
Sur le deuxième moyen de cassation présenté par B... et pris de la violation des articles 196 et 197-2° de la loi du 25 janvier 1985, des articles 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'abus de biens sociaux et l'a condamné à 8 mois d'emprisonnement avec sursis et 200 000 francs d'amende ainsi qu'au paiement d'une somme de 1 550 900,40 francs à Me Y... à titre de dommages et intérêts ;
"aux motifs que Guy B... ne conteste pas être à l'origine de la prise de participation majoritaire pour le comptes des Maisons de l'Avenir dans la SARL "Les prisons Saint-Michel" dont l'objet social,
exploitation d'un bar discothèque, n'avait aucun rapport avec celui des Maisons de l'Avenir que les statuts (article 3) définissent comme "la construction, l'abattage, le sciage et la vente de bois et le négoce des dérivés du bois et des produits en matière palstique intéressant le bâtiment" ; qu'il a par la suite alors qu'il était à la fois le dirigeant des deux sociétés en 1986 et 1987 et qu'il n'ignorait pas la situation catastrophique des Maisons de l'Avenir, en état de cessation de paiements au 20 janvier 1986 ainsi que cela résulte également du jugement du tribunal de commerce en date du 17 juillet 1987, situation caractérisée notamment par une perte de 8 000 000 de francs sur le premier semestre 1986 comprenant une perte de 1,9 millions sur le compte courant des Maisons de l'Avenir dans les "Prisons Saint-Michel", par un découvert des Maisons de l'Avenir à la banque de Bretagne de 7 millions de francs fin 1986, il a poursuivi un véritable détournement de l'actif des Maisons de l'Avenir en fournissant une trésorerie permanente sans aucune contrepartie à la SARL "Les Prisons Saint-Michel", en payant ses factures, en abandonnant loyers et honoraires pour une somme totale supérieure à 1 500 000 francs, que ce détournement d'actif se trouve au surplus caractérisé par la créance chirographaire des Maisons de l'Avenir sur la SARL "Prisons Saint-Michel" au moment du dépôt de bilan de celle-ci, soit 1 590 942,05 francs sur un passif de 2 655 889,78 francs l'actif étant essentiellement représenté par le fonds de commerce évalué à 910 000 francs, qu'il résulte bien de ce qui précède qu'aucune justification de rentabilité même à long terme ne saurait prospérer ; qu'entendu par la police, Guy B... ne conteste pas que les besoins en trésorerie de la SARL Prisons Saint-Michel ont été entièrement couverts par les Maisons de l'Avenir ; qu'il admet que cette société n'aurait jamais dû s'engager à une telle hauteur, pour attribuer ensuite cette situation successivement à la négligence puis à la malchance, qu'il apparaît cependant à la lecture du compte rendu de l'assemblée générale des Prisons Saint-Michel du 17 juillet 1986 qu'il jouait un rôle prépondérant dans le transfert de trésorerie à partir des Maisons de l'Avenir ;
"alors que le délit de banqueroute par détournement d'actif n'est constitué que si le prévenu a tiré un profit personnel direct ou indirect des détournements ; qu'ainsi, décidant que relevaient de cette incrimination les transferts de trésorerie opérés d'une société mère vers une filiale dans laquelle le prévenu n'avait aucune participation, et pour la gestion de laquelle il n'a pas été constaté qu'il ait été rémunéré, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen" ;
Sur le troisième moyen de cassation présenté par B... et pris de la violation des articles 196 et 197-2° de la loi du 25 janvier 1985, des articles 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'abus de bien sociaux et l'a condamné à 8 mois d'emprisonnement avec sursis et 200 000 francs d'amende ainsi qu'au paiement d'une somme de 1 550 900,40 francs à Me Y... à titre de dommages et intérêts
;
"aux motifs que les faits, établis par la déclaration de Michel X..., confirmée par les attestations de Michel A... produites par la défense de Guy B..., ne sont pas contestés, qu'il apparaît que c'est bien à la demande de Guy B... que ces travaux, qui n'ont donné lieu à aucune facturation, sont intervenus dans le seul intérêt personnel du président-directeur général de la société Les Maisons de l'Avenir qu'il était à l'époque, qu'il y a lieu en conséquence de confirmer la déclaration de culpabilité sur ce premier chef de prévention ;
"alors qu'en se bornant à relever l'exécution de travaux non facturés sans répondre aux conclusions du prévenu qui soutenait qu'ainsi que le reconnaissait le comptable de la société dans une attestation, il avait réclamé à celui-ci d'établir une facture et que c'est par simple négligence dudit comptable que la facture n'avait pas été établie, circonstances qui étaient de nature à établir l'absence d'élément intentionnel, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de motif" ;
Sur le quatrième moyen de cassation présenté par B... et pris de la violation de l'article 437-4° de la loi du 24 juillet 1966, des articles 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale et de l'article 1382 du Code civil ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable d'abus de pouvoir et l'a condamné à 8 mois d'emprisonnement avec sursis, 200 000 francs d'amende ainsi qu'à payer à Me Y... une somme de 3 236 800 francs à titre de dommages et intérêts ;
"aux motifs que les déclarations de Claude C..., maintenues lors d'une confrontation avec Guy B..., établissent que ce dernier a agi sciemment, qu'en effet, Claude C... reconnaît qu'il avait éxigé la modification de l'article 10 du bail en cours et que la contrepartie avait été une diminution du prix de cession de ses actions à Guy B... ;
"alors qu'en déduisant la culpabilité de Guy B... des dépositions de M. C... déclarant qu'il aurait exigé la modification de l'article 10 du bail en contrepartie d'une diminution du prix d'achat des actions sans relever que Guy B... avait accepté un tel marché et que c'est en exécution de la promesse qu'il aurait ainsi faite que le nouveau bail avait été signé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes visés au moyen" ;
Sur le cinquième moyen de cassation présenté par B... et pris de la violation des articles 196 et 197-2° de la loi du 25 janvier 1985, des articles 2, 3 et 593 du Code de procédure pénale et de l'article 1134 du Code civil ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'abus de biens sociaux et l'a condamné à 8 mois d'emprisonnement avec sursis et 200 000 francs d'amende ainsi qu'au paiement d'une somme de 1 550 900,40 francs à Me Y... à titre de dommages et intérêts ;
"aux motifs que Guy B... ne conteste pas être à l'origine de la prise de participation majoritaire pour le compte des Maisons de l'Avenir dans la SARL "Les Prisons Saint-Michel" dont l'objet social, exploitation d'un bar discothèque, n'avait aucun rapport avec celui
des Maisons de l'Avenir que les statuts (article 3) définissent comme "la construction, l'abattage, le sciage et la vente de bois et le négoce des dérivés du bois et des produits en matière plastique intéressant le bâtiment" ;
"alors, d'une part, l'article 3 des statuts stipule que pour réaliser son objet la société pourra recourir, en tous lieux, à tous actes ou opérations, de quelque nature et importance qu'ils soient, dès lors qu'ils contribuent ou peuvent contribuer, facilitent ou peuvent faciliter la réalisation des activités ci-dessus définies ou qu'ils permettent de sauvegarder, directement ou indirectement, les intérêts commerciaux, industriels ou financiers de la société ou des entreprises avec lesquelles elle est en relation d'affaires ; qu'en s'en tenant strictement à la définition de l'objet pour apprécier la légitimité de l'opération litigieuse et en omettant de se référer aux moyens dont disposait la société pour réaliser même indirectement cet objet, la cour d'appel a dénaturé les statuts par omission ;
"alors que, d'autre part, en fixant le montant de l'indemnité mise à la charge de Guy B... au montant des avances consenties par la société Les Maisons de l'Avenir à la SARL Prison Saint-Michel, sans répondre aux conclusions de celui-ci qui soutenait qu'une partie de ces avances (224 662 francs) avait été consentie après qu'il eut abandonné ses fonctions de dirigeant de la société Les Maisons de l'Avenir, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de motif ;
"alors, qu'enfin, en condamnant Guy B... au paiement d'une indemnité représentant la totalité de la créance de la société Les Maisons de l'Avenir sur la SARL Prison Saint-Michel, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si une partie de cette créance n'avait pas été règlée au moyen des fonds retirés de la vente du fonds de commerce, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des textes susvisés" ;
Sur le premier moyen de cassation présenté par D... et pris de la violation des articles 437-4 de la loi du 29 juillet 1966, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que, l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré constitué le délit d'abus de pouvoir résultant de la conclusion d'un nouveau bail commercial ;
"aux motifs que, le 8 novembre 1983, Guy B... renonçait unilatéralement, en signant un nouveau bail, au bénéfice des dispositions de l'article 10 du bail en cours qui, ayant pris effet au 1er janvier 1980, prévoyait une garantie de renouvellement à son terme au 1er janvier 1990, sauf indemnité d'éviction et paiement des impenses exigibles en vertu de l'article 10 ; que le loyer initialement fixé en 1979 à 212 600 francs était porté à 296 400 francs pour le nouveau bail, soit une somme très voisine de celle donnée par le calcul de l'indexation, originairement prévue ; que les constructions ainsi abandonnées à la famille C... représentaient une réelle valeur lors de la signature de ce contrat, lorsqu'on sait par les documents fournis par le mandataire liquidateur, Me Y..., que l'ensemble immobilier sera cédé par la société civile immobilière famille C... à la ville de Vitre en 1988
pour la somme de 8 300 000 francs, la valeur des seules impenses représentant les constructions édifiées par les Maisons de l'Avenir en particulier les deux pavillons de démonstration étant mesurée lors de la revente par lots effectuée par la ville à 3 236 800 francs ; que les déclarations de Claude C..., maintenues lors d'une confrontation avec Guy B..., établissent que ce dernier a agi sciemment ; qu'en effet, Claude C... reconnaît qu'il avait exigé la modification de l'article 10 du bail en cours et que la contrepartie avait été une diminution du prix de cession de ses actions à Guy B... ; qu'en renonçant sans nécessité, sans aucune contrepartie pour sa société, et au seul bénéfice de la société civile immobilière famille C... à d'importants droits immobiliers afin de pouvoir obtenir un avantage personnel lui permettant d'acquérir à meilleur compte des actions, Guy B... s'est bien rendu coupable d'abus de pouvoir ;
"alors que, d'une part, en l'état de ces seuls motifs, la Cour s'est abstenue d'examiner l'argument péremptoire des conclusions des prévenus, faisant expressément état de l'avantage retiré par la société Les Maisons de l'Avenir du nouveau bail, à savoir une certitude de maintien dans les lieux pour les 10 années à venir, c'est-à-dire jusqu'en 1993 -l'ancien bail venant à expiration en 1988- et ce, pour un loyer quasi-identique, avec des clauses qui, conformément au statut légal des baux commerciaux, comportaient les mêmes prérogatives que le précédent, à savoir le droit au renouvellement ou à défaut, au paiement d'une indemnité d'éviction ; qu'en l'état de ce défaut de réponse à conclusions, la Cour n'a caractérisé ni l'existence d'un acte contraire à l'intérêt de la société Les Maisons de l'Avenir, ni l'élément intentionnel du délit d'abus de pouvoir ainsi poursuivi ;
"alors que, d'autre part, en l'état des énonciations de fait de l'arrêt, dont il ressort que la négociation du nouveau bail est intervenue postérieurement à l'acquisition et au paiement par Guy B... des parts lui donnant le contrôle de la société Les Maisons de l'Avenir, la Cour, en l'absence de tout autre motif, n'a pas établi que l'abandon des dispositions de l'article 10 de l'ancien bail ait été le corollaire de la recherche d'un intérêt personnel, par définition déjà réalisé" ;
Sur le second moyen de cassation, présenté par D... et pris de la violation des articles 437-4 de la loi du 29 juillet 1966, 59 et 60 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Claude D... coupable de complicité du délit d'abus de pouvoir reproché à Guy B... ;
"aux motifs que Guy B..., employé de longue date par Claude D..., a toujours agi pour le compte de celui-ci, qui était le véritable repreneur des Maisons de l'Avenir ; qu'agissant sur ses instructions et avec les fonds qu'il avait mis à sa disposition, Guy B... tenait informé Claude D..., qui ne conteste pas avoir connu tous les détails de l'opération et notamment
la modification de l'article 10 à laquelle, selon lui, il n'avait donné son accord qu'avec réticence, alors qu'il reconnaît dans la même déclaration que la renégociation du bail était une des conditions de la cession des actions au prix convenu, se déclarant même en plein accord avec les propos de Claude C... ; qu'il apparaît donc de ce qui précède que Claude D..., sans contester la matérialité des faits, minimise sa participation en rejetant contre l'évidence toute la responsabilité sur son prête-nom, Guy B..., qui n'a agi que sur ses instructions et avec les moyens qu'il avait mis à sa disposition ;
"alors que, d'une part, Claude D... ayant amplement démontré dans ses écritures que Guy B... avait acquis les actions de la société Les Maisons de l'Avenir au moyen d'un prêt consenti par la banque Sudameris France, la Cour, qui a ainsi affirmé sans la moindre justification que ces fonds avaient été prêtés par Claude D..., n'a pas, en l'état de cette décision entachée tout autant d'insuffisance que de défaut de réponse à conclusion, établi l'existence d'une complicité par fourniture de moyens ;
"alors que, d'autre part et en tout état de cause, le fait de prêter des fonds pour permettre une opération d'achat d'actions parfaitement licite est dépourvu de toute causalité avec l'abus de pouvoir pouvant être commis à l'occasion de cette opération et ne saurait dès lors être considéré comme une fourniture de moyens au sens de l'article 60 du Code pénal l'éventuelle valorisation des titres de participation que la société détenait sur celle-ci ;
Que les juges ajoutent qu'en réparation des préjudices directement causés à la société par leurs agissements, Guy B... et Claude D..., d'une part, et Guy B..., seul, d'autre part, devaient être respectivement condamnés à payer 3 236 800 francs et 1 550 900,40 francs au liquidateur ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a caractérisé en tous leurs éléments constitutifs les délits dont elle a reconnu les prévenus coupables et a fixé, dans la limite des conclusions des parties, l'indemnité qu'elle a estimé propre à réparer le préjudice qui en résultait ;
Que les moyens, qui se bornent à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges des faits et circonstances de la cause ou cette évaluation, ne peuvent qu'être écartés; ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Tacchella conseiller doyen faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. de Mordant de Massiac conseiller rapporteur, MM. Souppe, Pinsseau, Mme Baillot conseillers de la chambre, M. Bayet, Mme Ferrari conseillers référendaires, M. Amiel avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 21 avril 1993 n° 92-84.314
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-et-un avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller HEBRARD, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... Daniel, contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 19 juin 1992, qui l'a condamné pour infraction à l'article 5 de la loi du 11 octobre 1985 relative au règlement des dettes, à 50 000 francs d'amende ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 4 et 5 de la loi du 11 octobre 1985, 388 et 593 du Code de la procédure pénale, 6-3a et b de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs et manque de base légale, ensemble, excès de pouvoir et violation des droits de la défense ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Welte coupable d'avoir examiné en qualité d'intermédiaire la situation d'un débiteur en vue d'établir un plan de remboursement échelonné de la dette et perçu, à l'occasion de cette opération, une somme d'argent à titre de rémunération ;
"aux motifs, qu'après avoir fait signer à Mme X... un échéancier en vue du remboursement d'une somme de 5 275,45 francs comprenant la dette de cette dernière envers le Crédit Agricole pour 4 055 francs et des frais et honoraires pour le surplus, le Cabinet
Y...
a effectivement perçu des sommes d'argent de la débitrice, environ 3 100 francs, dont il a remis la moitié au créancier, conservant le solde comme rémunération de son intervention ; que la perception de ces sommes d'argent, dont il n'est pas contesté qu'elle a été volontaire, constitue le délit prévu à l'article 5 de la loi du 11 octobre 1985 sans que l'ignorance de la loi ne puisse être invoquée comme fait justificatif ;
"alors, d'une part, que le simple établissement d'un plan de remboursement par un intermédiaire rémunéré n'est, aux termes de l'article 4 de la loi du 11 octobre 1985, sanctionné que par la nullité de la convention, seule la perception effective des fonds étant susceptible d'être pénalement réprimée ; qu'en l'espèce, la prévention ne reprochant à
Y...
que le fait d'avoir "établi une convention par laquelle il s'est chargé, moyennant rémunération, d'examiner la situation d'un débiteur en vue de l'établissement d'un plan de remboursement", la cour d'appel, en se fondant sur la perception effective de sommes d'argent, faits non visés par la citation sans demander au prévenu s'il acceptait d'être jugé pour des faits excédant les limites de cette saisine, a outrepassé ses pouvoirs et violé les articles 388 du Code de procédure pénale et 5 de la loi du 11 octobre 1985 ;
"alors, d'autre part, que
Y...
agissait en qualité de mandataire du créancier, chargé par celui-ci de recouvrer la créance, au besoin, en prévoyant un échelonnement du remboursement pour s'adapter à la situation financière du débiteur ;
qu'en statuant ainsi, sans que le prévenu puisse être considéré comme un intermédiaire au sens des articles 4 et 5 de la loi du 11 octobre 1985, la cour d'appel a violé, par fausse application, lesdites dispositions" ;
"alors enfin que l'intermédiaire auteur de l'infraction en matière de règlement des dettes doit percevoir de mauvaise foi une somme d'argent à l'occasion de l'établissement d'un plan de remboursement ; qu'en refusant au prévenu sa bonne foi et de démontrer qu'en oeuvrant dans l'intérêt mutuel des créancier et débiteur, il n'avait pas eu conscience d'enfreindre la loi pénale, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Attendu qu'en l'état des motifs reproduits au moyen, la cour d'appel, qui n'avait pas à s'expliquer mieux qu'elle ne l'a fait en réponse aux conclusions du prévenu, a, sans insuffisance, caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle l'a déclaré coupable, sans encourir les griefs allégués ;
Qu'ainsi le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Gondre conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Hébrard conseiller rapporteur, MM. Hecquard, Guilloux, Fabre, Jorda conseillers de la chambre, M. Louise conseiller référendaire, M. Perfetti avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre
Crim. 15 avril 1993 n° 89-85.203
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice, à PARIS, le quinze avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MILLEVILLE et les conclusions de M. l'avocat général ROBERT ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- DIETRICH Z..., partie civile, contre l'arrêt du 10 juillet 1989 par lequel la chambre d'accusation de la cour d'appel de PARIS s'est déclarée incompétente pour statuer sur sa plainte déposée du chef de diverses infractions contre un maire et des magistrats de l'ordre judiciaire ;
Vu l'article 575, alinéa 2, 4° du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Ce mémoire faisant grief aux juges d'avoir méconnu "les principes d'égalité et de fraternité posés par la Constitution" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 15 mars 1989, la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris a été saisie, par Peter X..., d'une plainte avec constitution de partie civile mettant en cause un maire et des magistrats de l'ordre judiciaire ; Attendu qu'en cet état, c'est à bon droit que ladite juridiction s'est déclarée incompétente, dès lors qu'elle n'avait pas été désignée par la chambre criminelle de la Cour de Cassation pour informer selon la procédure prévue par les articles 679 et suivants du Code de procédure pénale, alors en vigueur ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Dumont conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Milleville conseiller rapporteur, MM. Guilloux, Alphand, Fabre, Roman conseillers de la chambre, Mmes Y..., Verdun conseillers référendaires, M. Robert avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 15 avril 1993 n° 92-86.692
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quinze avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MILLEVILLE et les conclusions de M. l'avocat général ROBERT ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- BERTIN X..., partie civile, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de LYON, en date du 15 septembre 1992, qui, dans l'information suivie sur sa plainte déposée contre X... des chefs, notamment, d'usurpation de fonctions et menaces d'atteinte aux biens, a dit n'y avoir lieu à suivre ;
Vu l'article 575 alinéa 2, 6° du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 197 alinéas 3 et 4 du Code de procédure pénale et 6-1 et 6-3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en ce que le demandeur n'a pu obtenir la copie du dossier avant l'audience ;
Attendu qu'il ne résulte d'aucune énonciation de l'arrêt attaqué ni d'aucune pièce de la procédure qu'Albert Y... ait invoqué, devant la chambre d'accusation, une violation des articles visés au moyen ;
Qu'il ne saurait le faire pour la première fois devant la Cour de Cassation ;
Qu'ainsi le moyen est irrecevable ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Dumont conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Milleville conseiller rapporteur, MM. Guilloux, Alphand, Fabre, Roman conseillers de la chambre, Mmes Z..., Verdun conseillers référendaires, M. Robert avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 15 avril 1993 n° 92-81.171
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quinze avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ALPHAND, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général ROBERT ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Roger, contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 13ème chambre, en date du 14 janvier 1992, qui l'a condamné pour vol, à huit mois d'emprisonnement avec sursis et 40 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen relevé d'office pris de la violation des articles 4 et 381 du Code pénal 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aucune peine autre que celle appliquée par la loi à la nature de l'infraction ne peut être prononcée ;
Attendu que l'article 381 du Code pénal punit le vol d'une peine d'emprisonnement de trois mois à trois ans et d'une amende de 1 000 francs à 20 000 francs ou de l'une de ces deux peines seulement ;
Attendu que l'arrêt attaqué, faisant application de ce texte à Roger Y... reconnu coupable du délit de vol, l'a condamné de ce chef, en l'absence de toute constatation d'un état de récidive légale, à huit mois d'emprisonnement avec sursis et 40 000 francs d'amende ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, une peine supérieure au maximum prévu par la loi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Que la cassation est encourue et qu'en raison de l'indivisibilité existant entre la déclaration de culpabilité, les peines et les condamnations civiles, cette cassation doit s'étendre à toutes les dispositions de l'arrêt ;
Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu d'examiner les moyens proposés par le demandeur ;
CASSE et ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de PARIS, en date du 14 janvier 1992, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de PARIS, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Dumont conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Alphand conseiller rapporteur, MM. Milleville, Guilloux, Fabre, Roman conseillers de la chambre, Mmes Z..., Verdun conseillers référendaires, M. Robert avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 7 avril 1993 n° 92-83.805
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller CARLIOZ et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
-LA FEDERATION DEPARTEMENTALE DES CHASSEURS DE LA MANCHE, partie civile, contre l'arrêt de la cour d'appel de CAEN, chambre correctionnelle, du 12 juin 1992, qui, dans la procédure suivie contre Jean-Luc X... et Cyrille Y... du chef de chasse dans une réserve naturelle, après relaxe des prévenus par le premier juge, l'a déboutée de ses demandes ;
Vu le mémoire personnel régulièrement produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 242-11, L. 242-12, R. 242-29 et R. 242-43 du Code rural, 2, 3, 4, 593 du Code de procédure pénale, 1382 du Code civil, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que l'action publique et l'action civile sont indépendantes ; que, par suite, les juges du second degré, saisis du seul appel de la partie civile, ne sont nullement liés, en ce qui concerne les intérêts civils, par une décision de relaxe des premiers juges ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les prévenus ont été poursuivis pour avoir, le 21 juillet 1991, chassé dans une réserve naturelle ; qu'ils ont été relaxés par le premier juge, qui a débouté la Fédération départementale des chasseurs de la Manche, partie civile, de ses demandes ;
Attendu que pour rejeter, sur son seul appel, les demandes de la partie civile, l'arrêt attaqué énonce que cette dernière "ne peut valablement faire conclure que le vanneau avait été tiré alors qu'il survolait nécessairement le territoire de la réserve puisque le premier juge a dit, par une disposition définitive quant à l'action publique, "qu'il ne ressort pas clairement du dossier que le gibier a été tiré alors qu'il survolait la réserve" ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que si la décision intervenue sur l'action publique, en l'absence d'appel du ministère public, a acquis l'autorité de la chose jugée, les juges du second degré n'en sont pas moins tenus d'apprécier les faits, de les qualifier et de prononcer sur l'action civile, la cour d'appel a méconnu les textes visés au moyen et le principe susénoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs,
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Caen, du 12 juin 1992, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rennes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
Crim. 7 avril 1993 n° 92-85.155
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MALIBERT, les observations de Me FOUSSARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Yacouba, contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 12ème chambre, en date du 13 janvier 1992, qui, pour infraction à arrêté préfectoral de reconduite à la frontière, l'a condamné à 4 mois d'emprisonnement et lui a fait interdiction du territoire français pour une durée de trois ans ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 4 du Code pénal, 485, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Dicko à des peines d'emprisonnement ainsi qu'à une peine d'interdiction du territoire français ;
"alors que, premièrement, la cour d'appel ne pouvait condamner pénalement Dicko sur le fondement d'un arrêté de reconduite à la frontière qui n'était pas motivé ;
"alors que, deuxièmement, la nullité de l'acte administratif, dans la mesure où elle prive les poursuites pénales de leur fondement juridique, est un moyen d'ordre public que la Cour de Cassation doit soulever d'office" ;
Attendu que le moyen, en ce qu'il se borne à soulever, pour la première fois devant la Cour de Cassation, une exception tirée d'une illégalité de l'arrêté préfectoral, base des poursuites, est nouveau et comme tel irrecevable en application de l'article 386 du Code de procédure pénale ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Malibert conseiller rapporteur, MM. Guilloux, Massé, Fabre, Mme Baillot, M. Roman conseillers de la chambre, M. Nivôse conseiller référendaire, M. Galand avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 7 avril 1993 n° 92-84.423
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller Jean SIMON, les observations de la société civile professionnelle BORE et XAVIER, et de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN, GEORGES et THOUVENIN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Z... Denise, épouse GAILHAC, contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 3 juillet 1992, qui, dans la procédure suivie contre elle des chefs d'homicides involontaires, blessures involontaires et contravention de refus de priorité, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 2, 3, 485 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Denise Y... et France Télécom à payer diverses indemnités aux consorts X... en exécution d'un arrêt du 17 avril 1992 ;
"alors que ce dernier arrêt du 17 avril 1992 a été frappé d'un pourvoi et que l'admission éventuelle de ce pourvoi devra avoir pour conséquence la cassation de l'arrêt du 3 juillet 1992, actuellement attaqué" ;
Attendu qu'en l'état de l'arrêt de cette Cour en date de ce jour qui a substitué la responsabilité de France Télécom à celle de la prévenue, ce moyen est sans objet ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 4 et 6 de la loi du 5 juillet 1985, 585 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Denise Y... et France Télécom à payer aux époux X... la somme de 2 600 francs en remboursement des frais de gardiennage et d'évacuation de la mobylette ;
"aux motifs que, au vu des justificatifs produits, sera allouée en remboursement des frais d'évacuation de la motocyclette et de gardiennage la somme de 2 600 francs ;
"alors que les consorts X... ont vu leur droit à réparation réduit de moitié en raison de la faute commise par leur ayant cause M. Thierry X... ; qu'en allouant aux consorts X... la somme de 2 600 francs au titre de frais de gardiennage et d'évacuation du véhicule sans préciser si cette somme tenait compte du partage de responsabilité et était donc divisée de moitié, la Cour a entaché sa décision d'un défaut de motifs" ;
Et sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382 du Code civil, 4 et 6 de la loi du 5 juillet 1985, 585 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Denise Y... et France Télécom à payer à la succession de Thierry X... la somme de 1 500 francs en réparation du préjudice vestimentaire ;
"aux motifs que, au vu des justificatifs produits, sera allouée en réparation du préjudice vestimentaire la somme forfaitaire de
1 500 francs (casque, blouson et montre) ;
"alors que les consorts X... ont vu leur droit à réparation réduit de moitié en raison de la faute commise par leur ayant cause M. Thierry X... ; qu'en allouant aux consorts X... la somme de 1 500 francs au titre du préjudice vestimentaire sans préciser si cette somme tenait compte du partage de responsabilité, la Cour a entaché sa décision d'un défaut de motifs" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la cour d'appel a, contrairement aux allégations de la demanderesse, tenu compte du partage de responsabilité pour évaluer le préjudice vestimentaire de Thierry X... et celui résultant des frais d'évacuation et de gardiennage de sa motocyclette ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957 ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Denise Y... et France Télécom à payer diverses indemnités aux consorts X... ;
"alors que l'agent d'un service public, qui a commis une infraction dans l'exercice de ses fonctions, doit répondre des conséquences pénales de ses fautes mais la charge des réparations civiles incombe exclusivement à la personne morale de droit public dont la responsabilité en matière d'accident causé par un véhicule est, à l'égard des tiers, substituée à celle de son agent ; qu'en l'espèce, Denise Y..., agent de France Télécom, ne pouvait être condamnée à réparer les conséquences dommageables de l'accident ; qu'en décidant le contraire, la Cour a violé le texte susvisé" ;
Vu ledit article ;
Attendu qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957, la responsabilité de la personne morale de droit public est, à l'égard des tiers, substituée à celle de son agent, auteur des dommages causés par un véhicule, dans l'exercice de ses fonctions ;
Attendu que, par l'arrêt attaqué, la juridiction du second degré a condamné solidairement Denise Y... et France Télécom à payer les dommages-intérêts alloués aux parties civiles ainsi qu'aux dépens ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs ;
CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Grenoble du 3 juillet 1992 mais seulement en ce qu'il a condamné Denise Z..., épouse Y..., à payer solidairement avec France Télécom les dommages-intérêts alloués aux parties civiles ainsi qu'aux dépens, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Vu l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;
DIT que France Télécom, dont la responsabilité est substituée à celle de Denise Z..., est seule condamnée à payer les dommages-intérêts alloués aux parties civiles et à supporter les dépens ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Crim. 7 avril 1993 n° 92-83.416
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller JORDA, les observations de Me X... et Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... Eric, partie civile, contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-en-PROVENCE, 7ème chambre, du 3 avril 1992 qui, après condamnation définitive de Didier B... pour blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 4 de la loi du 5 juillet 1985 et 591 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a limité le droit à indemnisation de Y..., dont la motocyclette, à un carrefour, est entrée en collision avec la voiture de B... ;
"aux motifs que si Y... avait avancé avec prudence dans le carrefour où il devait la priorité de passage à Manaudier, il aurait aperçu de loin la voiture de celui-ci et ne se serait pas engagé plus avant ;
"alors que la cour d'appel a constaté que B..., qui allumait une cigarette, n'était pas attentif aux obstacles de la circulation ; qu'il roulait pour le moins à 90 km/h et que s'il avait circulé à la vitesse maximale autorisée de 60 km/h, il aurait pu immobiliser son véhicule plus de 5 mètres avant l'endroit de la collision ; que, d'ailleurs, pour tenir compte de l'intersection, en agglomération, il aurait dû rouler à 50 km/h ; qu'il résultait de ces constatations que B... aurait pu prévoir et éviter l'accident ; qu'ainsi, la faute commise par Y... n'était pas de nature à limiter son droit à indemnisation" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'Eric Y... qui, à motocyclette, s'engageait dans un carrefour signalé par un panneau "stop", a été heurté par la voiture de Didier B... lequel a été définitivement condamné pour blessures involontaires sur la personne du motocycliste, partie civile ;
Attendu que, pour laisser à la charge de celui-ci les trois cinquièmes de la responsabilité, la juridiction du second degré relève que la victime a omis de marquer un temps d'arrêt avant de s'engager dans le carrefour ce qui l'a empêchée d'apercevoir la voiture qui survenait ; qu'elle ajoute que cette faute "non exclusive de la victime est de nature à limiter l'indemnisation de son préjudice" ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, desquels il résulte qu'Eric Y... avait commis une faute qui avait concouru à la production de son dommage, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Souppe conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Jorda conseiller rapporteur, MM. Jean D..., Blin, Carlioz, Roman conseillers de la chambre, M. A..., Mmes Z..., C..., Verdun conseillers référendaires, M. Galand avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 7 avril 1993 n° 92-82.661 B n° 149
REJET et CASSATION PARTIELLE sans renvoi sur le pourvoi formé par :
- X... Denise, épouse Y...,
- l'Agent judiciaire du Trésor public, civilement responsable,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble, chambre correctionnelle, en date du 17 avril 1992, qui, après avoir relaxé la première nommée des chefs d'homicides involontaires, blessures involontaires et contravention de refus de priorité, a prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Sur le pourvoi en ce qu'il est formé par l'Agent judiciaire du Trésor public :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit à l'appui du pourvoi ;
Sur le pourvoi en ce qu'il est formé par Denise X..., épouse Y... :
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'une collision s'est produite dans un carrefour entre la voiture automobile conduite par Denise X... qui achevait une manoeuvre afin de s'engager sur une voie située sur sa gauche et la motocyclette pilotée par Thierry Z... circulant en sens inverse à très vive allure ; que ce dernier a été mortellement blessé de même qu'André A..., passager du véhicule conduit par Denise X..., deux autres passagers étant blessés ;
Attendu que la juridiction du second degré a relaxé au bénéfice du doute Denise X... qui était poursuivie pour homicides involontaires, blessures involontaires et contravention de refus de priorité, et, statuant en application des règles de droit civil, a déclaré la prévenue tenue de réparer entièrement les dommages subis par les ayants droit d'André A... et, à concurrence de moitié, ceux subis par les ayants droit de Thierry Z... ;
En cet état :
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 4 de la loi du 5 juillet 1985, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Denise X..., épouse Y..., pour partie responsable des conséquences dommageables de l'accident ;
" aux motifs qu'on reste donc dans l'ignorance de la vitesse exacte de la moto antérieurement au choc et, en conséquence, de la distance à laquelle elle se trouvait de l'intersection au moment où la prévenue a entrepris sa manoeuvre ; que les déclarations de cette dernière ont été confirmées par son passager Michel B... qui a précisé qu'au moment où la conductrice avait viré sur sa gauche il n'avait vu aucun phare de véhicule et que ce n'était qu'au moment où la 305 était perpendiculaire à la chaussée qu'il avait vu " un phare foncer sur eux comme une torpille " ; qu'il ne peut être sérieusement contesté que Thierry Z... a commis une faute au sens de l'article 4 de la loi précitée qui a contribué à la réalisation de son dommage ; qu'en effet, sa vitesse qui excédait notoirement celle maximale autorisée a eu pour effet, alors même qu'il disposait d'une bonne visibilité et que la manoeuvre de Denise X..., épouse Y..., était quasiment terminée, de réduire sa possibilité d'éviter l'obstacle et d'aggraver la violence du choc ; que cette faute n'a pas été la cause exclusive de l'accident, la prévenue ayant été à l'origine d'une manoeuvre perturbatrice ; qu'elle ne sera donc tenue d'indemniser que pour moitié les conséquences dommageables de l'accident " ;
" 1° alors que la Cour a reconnu tout d'abord que Denise X..., épouse Y..., n'avait pas refusé la priorité aux véhicules venant sur sa droite et n'avait commis à l'occasion de sa conduite aucune maladresse, imprudence, inattention, négligence ou inobservation des règlements ; qu'en considérant par ailleurs que Denise X..., épouse Y... avait commis une manoeuvre perturbatrice ayant été à l'origine du dommage, la Cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les textes susvisés ;
" 2° alors qu'une manoeuvre de changement de direction ne saurait être fautive dès lors que son auteur l'a accomplie en s'assurant qu'il pouvait la faire sans danger ; qu'en l'espèce, Denise X..., épouse Y... avait entrepris de tourner sur sa gauche en s'assurant qu'aucun véhicule ne venait en sens inverse ; qu'en se bornant à dire que Denise X..., épouse Y... était pour partie responsable de l'accident au seul motif qu'elle aurait été à l'origine d'une manoeuvre perturbatrice, sans rechercher en quoi cette manoeuvre aurait été fautive, la Cour a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Attendu que pour déclarer que la prévenue est tenue d'indemniser la victime à concurrence de moitié, la juridiction du second degré retient que le motocycliste qui circulait à très vive allure et dont la vitesse excessive avait seulement eu pour effet de réduire " la possibilité pour Denise X... d'éviter l'obstacle et d'aggraver la violence du choc ", n'a pas été la cause exclusive de l'accident ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts de contradiction, la cour d'appel abstraction faite d'un motif surabondant, a justifié sa décision ;
Qu'en effet, d'une part, il résulte de l'article 4 de la loi du 5 juillet 1985, seul applicable en cas de collision de véhicules terrestres à moteur, que chaque conducteur, même non fautif, est tenu d'indemniser l'autre, sauf limitation ou exclusion de cette indemnisation par suite des fautes commises par ce dernier ; que, d'autre part, le fait de n'avoir pas prévu ou évité un accident n'est pas, par lui-même, constitutif d'une faute ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 4, 6 de la loi du 5 juillet 1985 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Denise X..., épouse Y... entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident en ce qui concerne André A... ;
" aux motifs que " le véhicule de la prévenue est à l'évidence impliqué dans l'accident au sens de l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985 ; qu'en conséquence, les ayants droit d'André A..., passager transporté, ont droit à la réparation intégrale de leur préjudice " ;
" alors que, si le conducteur d'un véhicule impliqué dans l'accident peut être tenu de réparer intégralement le préjudice subi par un passager transporté, il ne saurait pour autant être déclaré entièrement responsable vis-à-vis de cette victime dès lors que la Cour a retenu la responsabilité d'un autre conducteur ; qu'en l'espèce, la Cour a admis que la responsabilité de l'accident était partagée entre Denise X..., épouse Y... et Thierry Z... ; que la Cour ne pouvait donc, sous peine de priver la demanderesse de son action récursoire contre l'autre coauteur, la déclarer entièrement responsable vis-à-vis de la victime, des conséquences dommageables de l'accident ; qu'en statuant ainsi, la Cour a violé les textes susvisés " ;
Attendu que, pour décider que les ayants droit d'André A..., passager du véhicule conduit par la prévenue, sont fondés à poursuivre à l'encontre de celle-ci l'entière indemnisation de leur préjudice, la juridiction du second degré énonce que le véhicule conduit par Denise X..., épouse Y..., est à l'évidence impliqué dans l'accident survenu ;
Attendu qu'en cet état la cour d'appel a fait l'exacte application de l'article 2 de la loi du 5 juillet 1985 ;
Qu'en effet, selon ce texte, les victimes d'un accident de la circulation ne peuvent se voir opposer la force majeure ou le fait d'un tiers par le conducteur d'un véhicule terrestre à moteur impliqué dans l'accident ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Mais sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957 :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Denise X..., épouse Y... responsable des conséquences dommageables de l'accident ;
" alors que l'agent d'un service public qui a commis une infraction dans l'exercice de ses fonctions, doit répondre des conséquences pénales de ses fautes mais la charge des réparations civiles incombe exclusivement à la personne morale de droit public dont la responsabilité en matière d'accidents causés par un véhicule est, à l'égard des tiers, substituée à celle de l'agent ; qu'en l'espèce, Denise X..., épouse Y..., agent de France Télécom, ne pouvait être déclarée, sur le plan civil, responsable des conséquences dommageables de l'accident ; qu'en décidant le contraire la Cour a violé le texte susvisé " ;
Vu ledit article ;
Attendu qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1957, la responsabilité de la personne morale de droit public est, à l'égard des tiers, substituée à celle de son agent, auteur des dommages causés, au moyen d'un véhicule, dans l'exercice de ses fonctions ;
Attendu qu'il résulte des pièces de procédure et de l'arrêt attaqué que Denise X..., épouse Y..., conduisait au moment de l'accident pour les besoins du service un véhicule appartenant à l'Administration et que les parties civiles ont demandé que la réparation de leur préjudice soit mise à la charge de l'Agent judiciaire du Trésor public qui avait été cité par le ministère public pour répondre des conséquences civiles de l'accident et intervenait aux débats, la responsabilité de l'Administration étant substituée à celle de son agent ;
Mais attendu qu'en déclarant, en cet état, Denise X..., épouse Y... tenue de réparer entièrement les conséquences de l'accident à l'égard d'André A... et pour moitié à l'égard de Thierry Z... et en la condamnant aux dépens de l'action civile, la cour d'appel a méconnu le principe ci-dessus énoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
Sur le pourvoi de l'Agent judiciaire du Trésor public ;
Le REJETTE ;
Sur le pourvoi de Denise X..., épouse Y... :
CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Grenoble, en date du 17 avril 1992, mais seulement en ce qu'il a déclaré Denise X... tenue de réparer les conséquences de l'accident et en ce qu'il l'a condamnée aux dépens, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Vu l'article L. 131-5 du Code de l'organisation judiciaire ;
DIT que la responsabilité de France-Télécom se substitue à celle de Denise X... ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.
Crim. 7 avril 1993 n° 92-85.406
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller Jean SIMON, les observations de Me RICARD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... René, contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 7ème chambre, en date du 16 septembre 1992, qui, pour obtention de document administratif à l'aide de fausses déclarations et défaut de permis de construire, l'a condamné à 50 000 francs d'amende, a ordonné la démolition de la construction irrégulièrement édifiée sous astreinte et la publication de la décision ;
Vu l'arrêt de la chambre criminelle, en date du 13 décembre 1989, portant désignation de juridiction ;
Vu le mémoire produit ;
0 Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 153 et 154 du Code pénal, L. 421-1, L. 480-4 et L. 480-5 du Code de l'urbanisme, 463 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable des délits d'obtention indue, par fausse déclaration et fourniture de faux documents, d'un document établi par les administrations publiques en vue de constater un droit, et d'exécution de travaux de construction sans permis de construire et en violation des dispositions du plan d'occupation des sols, et l'a condamné à la peine de 50 000 francs d'amende ;
"aux motifs que "lors des débats le prévenu ne conteste pas la matérialité des infractions qui lui sont reprochées, telles que visées aux poursuites, mais sollicite l'indulgence de la Cour, notamment aux fins d'être dispensé de peine ; que l'examen de la déclaration de travaux signée par le prévenu le 21 février 1989 révèle que n'y est cochée dans la partie "nature des travaux" que la case "ravalement" et que la description des travaux projetés ne consiste qu'en l'aménagement d'une villa sinistrée par le feu" ; que de surcroît les croquis des façades sud et ouest remis avec cette déclaration sont certes ceux de la nouvelle construction envisagée, mais hâchurés au niveau de la partie supérieure desdites façades et de la toiture, pour représenter les parties prétendument sinistrées par l'incendie ; que Bennefoux, qui ne rapporte pas la preuve au demeurant de la connaissance par l'administration de la destruction complète de l'ouvrage antérieur, ne saurait critiquer l'avis émis par celle-ci au vu d'une déclaration comportant des informations dont il ne pouvait ignorer qu'elles étaient inexactes, en employant le terme "aménagement" et en laissant croire qu'il ne souhaitait effectuer qu'un simple ravalement ; que de même la localisation des travaux à effectuer, qu'il a limitée par des hâchures sur les plans de coupe, justifie la réponse qui lui a été faite sur les prescriptions à respecter en matière de tuiles de couverture et de couleur de l'enduit de façade ; que la décision des premiers juges, qui ont à juste titre déclaré René X... coupable des délits d'obtention indue, par fausse déclaration et fourniture de faux documents, d'un document établi par les administrations publiques en
vue de constater un droit, et l'exécution de travaux de construction sans permis de construire et en violation des dispositions du plan d'occupation des sols, mérite d'être confirmée" (cf. arrêt p. 5) ;
"alors que le prévenu se prévalait, dans ses conclusions d'appel, de l'arrêté visé par la sous-préfecture de Montbrison le 13 mars 1989 qui se référait à une déclaration de travaux "pour reconstruire partie brûlée habitation" et qui précisait que "le pétitionnaire devra prévoir des tuiles creuses rouges en terre cuite et un enduit couleur sable de pays" ; qu'en décidant que X... ne rapporte pas la preuve de la connaissance par l'administration de la destruction complète de l'ouvrage antérieur, lorsqu'il résulte de cet arrêté du 13 mars 1989 que l'administration avait reconnu la nécessité d'une "reconstruction" de la villa, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux articulations essentielles des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous leurs éléments constitutifs les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen qui, sous le couvert d'une insuffisance de motifs ou d'un défaut de réponse à conclusions, se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus devant eux, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Souppe conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Jean Simon conseiller rapporteur, MM. Blin, Carlioz, Jorda conseillers de la chambre, M. Z..., Mmes Y..., A..., Verdun conseillers référendaires, M. Galand avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 6 avril 1993 n° 92-84.567
aAU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le six avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller DUMONT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Georges, contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 3 juillet 1992, qui l'a condamné, pour faux et usage de faux en écritures de commerce et escroqueries, à un an d'emprisonnement avec sursis, pour un premier chef d'entrave au fonctionnement régulier du comité d'entreprise, à six amendes de mille francs et, pour un second chef d'entrave, à une amende de quatre mille francs, et qui a prononcé sur les réparations civiles ;
Vu le mémoire produit ; Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 5 du Code pénal, L. 321-3, L. 321-7, L. 432-1, L. 432-4 et L. 483-1 du Code du travail et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné X... à un an d'emprisonnement avec sursis pour faux, usage de faux et escroquerie, à six amendes de 1 000 francs chacune pour avoir procédé à six licenciements pour motif économique de salariés sans consultation du comité d'entreprise, délit d'entrave prévu par les articles L. 321-3 et L. 321-7 du Code du travail, et à une amende de 4 000 francs pour non-consultation du comité d'entreprise à l'occasion d'une mesure de compression de personnel, infraction prévue par l'article L. 432-1 du Code du travail ;
"alors, d'une part, qu'en cas de conviction de plusieurs crimes ou délits, la peine la plus forte est seule prononcée ; qu'en prononçant plusieurs peines distinctes après avoir retenu la culpabilité du prévenu à l'égard de plusieurs infractions de nature délictuelle, la cour d'appel a méconnu les textes et principes ci-dessus rappelés ; qu'en raison de l'indivisibilité existant entre la déclaration de culpabilité et la peine, l'annulation doit s'étendre à toutes les dispositions de l'arrêt ;
"alors, d'autre part, que le délit d'entrave au fonctionnement du comité d'entreprise prévu par l'article L. 483-1 du Code du travail, est puni d'un emprisonnement de deux mois à un an et d'une amende de 2 000 francs à 20 000 francs ou de l'une de ces deux peines seulement ; que ce texte ne prévoit aucune exception à la règle du non-cumul des peines édictée en matière de crimes et délits par l'article 5 du Code pénal ; qu'après avoir déclaré le prévenu coupable d'avoir procédé à six licenciements en violation des dispositions de l'article L. 321-3 du Code du travail, la cour d'appel, qui le condamne à six amendes de ce chef, a méconnu les principes et textes susvisés" ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'aux termes de l'article 5 du Code pénal, en cas de conviction de plusieurs crimes ou délits, la peine la plus forte est seule prononcée ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme que Georges X... a été poursuivi en premier lieu pour faux en écritures de commerce et usage de faux, en deuxième lieu pour escroqueries, en troisième lieu pour deux délits d'entrave au fonctionnement régulier du comité d'entreprise résultant de l'absence de consultation de cet organisme, d'une part, sur une décision de licenciement économique de six salariés et, d'autre part, sur une mesure de compression de personnel ;
Attendu que l'arrêt attaqué l'a déclaré coupable et a prononcé les peines précitées ; Mais attendu qu'en statuant ainsi la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens proposés ;
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, en date du 3 juillet 1992, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de NIMES, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Zambeaux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Dumont conseiller rapporteur, MM. Fontaine, Milleville, Alphand, Guerder, Roman conseillers de la chambre, Mme Batut conseiller référendaire, M. Galand avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 6 avril 1993 n° 93-80.185
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le six avril mil neuf cent quatre vingt treize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ROMAN, les observations de Me COSSA, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GALAND ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... Jean-Claude, dit "Julien", contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE du 4 novembre 1992 qui l'a renvoyé devant la cour d'assises des ALPES-MARITIMES sous l'accusation de viol ;
Vu le mémoire produit ;
( Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 20, 21, 59, 181, 206, 591 et 593 du Code de procédure pénale, du principe fondamental de la garantie de la liberté individuelle et de l'inviolabilité du domicile tel qu'il est posé par l'article 66 de la Constitution du 4 octobre 1958, par les lois de la République et par l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation du principe de la présomption d'innocence, renversement de la charge de la preuve, défaut de réponse à chef péremptoire de mémoire, défaut de motifs et manque de base légale ; "en ce que la chambre d'accusation a refusé de prononcer la nullité du procès-verbal d'interpellation de Y... du 3 juillet 1991 à 3 h 45 ainsi que de toute la procédure subséquente ;
"aux motifs qu'à la suite de la plainte pour viol déposée le 3 juillet 1991 à 2 h 30 du matin par Céline X... au commissariat de police de Nice, l'officier de police judiciaire de permanence mandatait les fonctionnaires de la brigade de surveillance de se rendre à l'hôtel Mercure à Nice où l'auteur des faits occupait la chambre n° 310 et de vérifier sa présence ; que le veilleur de nuit ayant confirmé la présence de Jean-Claude Y..., l'un des brigadiers de police téléphonait du hall de l'hôtel à Y..., déclinait sa qualité et l'invitait à descendre dans le hall pour "affaire le concernant" ; que Y... ne faisait aucune difficulté pour rejoindre les policiers dans le hall de l'hôtel et les suivre au commissariat ; que l'intervention des services de police, telle qu'elle a été pratiquée en l'espèce, ne peut s'analyser en une perquisition ou une visite domiciliaire dont les règles de l'article 59 du Code de procédure pénale imposent le respect des heures légales entre 6 heures et 21 heures, et ce, alors même que c'est de son plein gré que Y..., informé par les policiers eux-mêmes, a consenti à les suivre sans qu'aucune perquisition n'ait été effectuée dans sa chambre ;
"alors d'une part que toute introduction au domicile d'une personne, fût-ce un hôtel, en vue d'y constater une infraction constitue une visite domiciliaire ; qu'une visite de cette nature ne peut, à peine de nullité, être commencée avant 6 h et après 21 h, fût-ce avec l'assentiment de l'intéressé ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces de la procédure D4) que Y...
a été interpellé le 3 juillet 1991 à 3 h 45 par M. Robert Bertaina, brigadier de police, dans le hall de l'hôtel Mercure de Nice après avoir été contacté téléphoniquement dans sa chambre, et conduit aussitôt au commissariat central ; qu'une telle procédure, diligentée dans le cadre d'une enquête de flagrance, constitue une visite domiciliaire effectuée illégalement ; que, dès lors, en refusant d'annuler le procès-verbal de cette interpellation totalement irrégulière, et la procédure subséquente, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés ;
"alors d'autre part que les agents de police judiciaire, chargés de seconder les officiers de police judiciaire dans le cadre d'une procédure de crime ou de délit flagrant, n'ont qualité que pour entendre les personnes susceptibles de fournir les renseignements sur les faits en cause, et ce, dans la limite des ordres qu'ils ont reçus à cet effet ; qu'en l'espèce, il résulte du procès-verbal d'interpellation de Y... (D4), que ce dernier, contacté téléphoniquement dans sa chambre d'hôtel, a été incité à se présenter aux services de police qui se trouvaient dans le hall de l'hôtel par le brigadier Robert Bertaina, agent de police judiciaire qui n'avait reçu aucun ordre à cet effet et qui n'avait donc pas qualité pour appréhender l'exposant ; que, dès lors, la procédure d'interpellation de Y... était entachée d'une irrégularité flagrante qu'il appartenait à la chambre d'accusation de constater ;
"alors en outre que, dans un chef péremptoire de son mémoire, l'exposant faisant valoir que si l'officier de police judiciaire peut appeler ou entendre toutes personnes susceptibles de fournir des renseignements sur les faits, les agents de police judiciaire ne sont qualifiés, dans la limite des ordres reçus, que pour entendre les personnes précitées ; qu'en l'espèce, le brigadier Bertaina, agent de police judiciaire, qui n'avait reçu aucun ordre à l'effet d'entendre et encore moins "d'appeler" Y..., avait utilisé, par le recours du téléphone intérieur de l'hôtel, un stratagème inacceptable et une manoeuvre déloyale pour contourner le respect du principe essentiel des heures légales, et ce, en outrepassant au surplus les pouvoirs d'un agent de police judiciaire ; que ce chef péremptoire de mémoire était déterminant, dans la mesure où il attestait d'une nouvelle irrégularité flagrante de la procédure d'interpellation de Y..., de nature à faire annuler le procès-verbal qui la reconstituait ainsi que toute la procédure subséquente ; qu'en s'abstenant néanmoins d'y répondre, la chambre d'accusation a privé sa décision de motifs ;
"alors au surplus que l'inviolabilité nocturne du domicile constitue l'un des aspects fondamentaux de la liberté individuelle ; qu'en s'abstenant de veiller au respect de ce principe en tant qu'autorité judiciaire gardienne des libertés individuelles, la chambre d'accusation a de nouveau violé les textes susvisés ;
"alors enfin que, en statuant comme elle l'a fait, la chambre d'accusation a renversé la charge de la preuve et méconnu le principe
fondamental de la présomption d'innocence" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'à la suite de la plainte de Céline X..., qui déclarait avoir été victime d'un viol de la part de Jean-Claude Y... le 2 juillet 1991 vers 23 h 30 dans sa chambre d'hôtel, des agents de police judiciaire mandatés par l'officier de police judiciaire de permanence se sont rendus le 3 juillet 1991 à 3 h 45 à l'hôtel où demeurait Y..., ont pris contact avec lui par téléphone en faisant état de leur qualité et en l'invitant à les rejoindre dans le hall pour affaire le concernant et l'ont, avec son assentiment, accompagné au commissariat pour audition ;
Attendu que pour rejeter l'exception de nullité du procès-verbal constatant ces opérations et de la procédure subséquente, la chambre d'accusation relève que l'intervention des services de police, telle qu'elle a été pratiquée en l'espèce, ne peut s'analyser en une visite domiciliaire soumise aux dispositions de l'article 59 du Code de procédure pénale ; qu'elle ajoute que Y..., informé par les policiers eux-mêmes, a consenti à les suivre sans qu'aucune perquisition ait été effectuée dans sa chambre ;
Attendu qu'en cet état l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués au moyen dès lors que, d'une part, les agents de police judiciaire n'ayant procédé à aucune constatation dans la chambre d'hôtel du demandeur, où ils ne sont pas entrés, et s'étant contentés d'inviter ce dernier à les suivre au commissariat afin d'y être entendu, leur intervention ne saurait être considérée comme constituant une visite domiciliaire au sens de l'article 59 du Code de procédure pénale et que, d'autre part, ils ont agi en exécution des ordres de l'officier de police judiciaire saisi de l'enquête, lequel disposait en vertu de l'article 62 du même Code du pouvoir d'appeler toute personne susceptible de fournir des renseignements sur les faits ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 97, alinéa 4, 99, 181, 206, 591 et 593 du Code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation des droits de la défense, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué n'a pas cru devoir annuler le procès-verbal du 16 septembre 1991 constatant la destruction -sur ordre téléphonique du magistrat instructeur- du scellé n° 3 contenant des prélèvements vaginaux et sanguins opérés sur Céline X... et celle des scellés contenant les sous-vêtements, ainsi que toute la procédure subséquente, voire la procédure en son entier ;
"aux motifs que lors de l'enquête préliminaire, la victime a remis des sous-vêtements aux services de police qui les ont placés sous scellés n° 1 et 2 ; que des prélèvements ont été effectués au niveau vaginal et sanguin par le docteur Macario expert, requis par les services de police (scellé n° 3) ; qu'au cours de l'information, sur instruction du magistrat instructeur, l'officier de police judiciaire de Nice a détruit le
scellé n° 3, puis les deux autres scellés, les parents de la victime ayant refusé de les reprendre ;
que selon le rapport d'expertise du docteur Macario, aucune trace ni déchirure n'a été constatée au niveau vestimentaire et la conservation sous main de justice des vêtements était inutile, aucune conséquence préjudiciable aux droits de la défense ne pouvant en résulter ; qu'il en est de même des prélèvements vaginaux et sanguins (alcoolémie, sérologie syphilitique, H.I.V., hépatique) pratiqués dans le seul intérêt de la victime ; que la réalité des relations sexuelles n'a pas été contestée par l'inculpé et l'absence des prélèvements effectués ne peut, en aucune façon, faire obstacle à un procès équitable ; que les formalités de la restitution des objets, placés sous main de justice, telles qu'elles sont édictées par l'article 99 du Code de procédure pénale, ne concernent pas la destruction d'objets dont le magistrat instructeur a estimé qu'il n'y avait pas lieu de les conserver sous main de justice en l'absence des nécessités de l'information ; que la procédure suivie par le magistrat instructeur ayant été régulière et les intérêts de la défense ayant été sauvegardés, il n'y a pas lieu d'annuler les pièces mentionnées par Y... dans son mémoire ;
"alors d'une part que, si le juge d'instruction ne peut maintenir que la saisie des objets et documents utiles à la manifestation de la vérité, il n'en demeure pas moins que lorsque les scellés sont fermés, ils ne peuvent être ouverts et les documents dépouillés qu'en présence de l'inculpé assisté de son conseil ou eux dûment appelés ; que cette règle est prescrite à peine de nullité ; qu'en l'espèce, il ne résulte ni du procès-verbal du 11 septembre 1991, attestant d'une part de la destruction du scellé n° 3 contenant les prélèvements vaginaux et sanguins effectués par le médecin légiste sur la personne de Céline X..., d'autre part de la destruction des scellés contenant les sous-vêtements de la partie civile -que le père de celle-ci avait refusé de reprendre comme le lui demandait le juge d'instruction-, ni de l'arrêt attaqué aucune certitude sur le point de savoir lesdits scellés ouverts ou fermés, de sorte que la Cour de Cassation ne se trouve être en mesure d'exercer son contrôle, ni sur la régularité de la procédure qui s'impose en matière d'ouverture de scellés fermés, ni sur le point de savoir si les droits de la défense ont été respectés ;
"alors d'autre part que, et en tout état de cause, les résultats négatifs des prélèvements effectués dans l'intérêt de la victime étant nécessairement un élément favorable à la défense de l'inculpé, la destruction desdits scellés ordonnée par le magistrat instructeur était de nature à nuire indiscutablement aux droits de la défense et a privé l'inculpé d'un procès équitable au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"alors enfin que dans un chef péremptoire de son mémoire régulièrement déposé, l'exposant faisait valoir que dans la mesure où
il apparaissait que plusieurs semaines après la commission des faits, c'est-à-dire en l'espèce le 16 septembre 1991, le magistrat instructeur n'avait toujours pas cru utile de solliciter une expertise de ces prélèvements, il déduisait que, de ce fait, le magistrat avait manqué à son obligation d'instruire simultanément à charge ou à décharge ; que ce moyen était déterminant, dans la mesure où, venant après la critique portant sur la décision unilatérale du juge d'instruction de faire procéder à la destruction des scellés contenant lesdits prélèvements, il était de nature à mettre en lumière la tournure subjective et préjudiciable qu'avait empruntée l'instruction à l'encontre de l'exposant et par suite une atteinte intolérable portée aux droits de la défense ; qu'en s'abstenant d'y répondre, la chambre d'accusation a entaché sa décision d'un défaut de motifs" ;
Attendu que l'officier de police judiciaire ayant reçu la plainte de Céline X... a procédé à la saisie des sous-vêtements de la victime, qu'il a placés sous scellés numéros 1 et 2, et a fait procéder par un médecin légiste à des prélèvements vaginaux et sanguin, qu'il a placés sous scellé n° 3 ; que par la suite, sur instructions téléphoniques du juge d'instruction, il a été procédé à leur destruction ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation du procès-verbal constatant cette destruction et de la procédure subséquente, la chambre d'accusation relève qu'en l'absence constatée de trace ou de déchirure, la conservation sous main de justice des vêtements était inutile, aucune conséquence préjudiciable aux droits de la défense ne pouvant en résulter, et qu'il en est de même des prélèvements pratiqués dans le seul intérêt de la victime, dès lors que la réalité des relations sexuelles n'a pas été contestée par l'inculpé et que l'absence de prélèvements effectués ne peut en aucune façon faire obstacle à un procès équitable ;
Attendu que par ces motifs exempts d'insuffisance la chambre d'accusation, qui n'était pas tenue de suivre le demandeur dans le détail de son argumentation, a répondu aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie et a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article 332 du Code pénal, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense, violation de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dénaturation des documents de la cause, défaut et contradiction de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Y... devant la cour d'assises sous l'accusation de viol sur la personne de Melle X... ;
"aux motifs que l'information a établi que Céline X... a déclaré qu'elle a été violée après avoir reçu des coups ; que Y... a nié ces faits, prétendant n'avoir en aucune façon brutalisé la jeune fille ; qu'il a indiqué qu'elle était consentante pour se déshabiller et lui pratiquer une fellation ;
que par contre, il reconnaissait que lorsqu'il avait voulu la pénétrer, Céline avait refusé, plaçant ses mains devant son sexe ; qu'il avait passé outre, écartant les mains de sa partenaire pour consommer l'acte sexuel ; que les aveux ci-dessus de Y... et les investigations des enquêteurs et du magistrat instructeur ont permis de penser que Céline X... n'était pas consentante ; qu'en effet la victime portait des traces de violence correspondant à ses déclarations ; que le médecin expert qui l'a examinée le 3 juillet 1991, a relevé une ecchymose temporale droite, des douleurs du cuir chevelu, deux ecchymoses au bras droit, une abrasion au sein droit, des douleurs au ventre, aux fesses et à la cuisse ; que selon le médecin, certaines de ces lésions pouvaient correspondre à des morsures ; que lors de ses premières déclarations la victime avait fait état de morsures ; qu'en outre, les parents et le frère de la victime, ainsi que son ami C... ont attesté de l'état de choc dans lequel elle se trouvait après avoir quitté Y... ; qu'enfin une expertise psychologique ne mettait en valeur aucune tendance suspecte telle la mythomanie ; "que les déclarations de l'inculpé et les traces de violence relevées sur le corps de la victime constituent des présomptions graves qui justifient le renvoi de l'inculpé devant la juridiction criminelle ;
"alors de première part que le médecin expert a seulement indiqué dans son rapport que la palpation du cuir chevelu est "dite douloureuse", que le sein droit présente "une très légère abrasion épidermique non systématisée, sans ecchymose" et, à propos des ecchymoses au bras droit, "ces empreintes sont peu marquées et l'on peut penser à une morsure légère accompagnée d'une succion assez prolongée" ; que dès lors, en travestissant les conclusions de ce rapport, et en passant totalement sous silence le fait que le médecin n'a constaté aucune lésion lors de l'examen gynécologique et qu'en particulier le toucher vaginal bidigital était possible et indolore, la chambre d'accusation a dénaturé cette pièce de la procédure ;
"alors de deuxième part que, dans son mémoire régulièrement déposé, Y... faisait valoir que Melle X... ne présentait aucune trace de coups à la tempe lorsqu'elle a retrouvé ses parents puis son frère qui n'auraient pas manqué de constater l'ecchymose qui n'est apparue que lorsqu'elle s'est rendue aux services de police, après avoir vu son "petit ami" à qui elle venait d'avouer son infidélité ; qu'en laissant sans réponse cette articulation péremptoire du mémoire de l'inculpé, la chambre d'accusation a entaché sa décision d'un défaut de motifs ;
"alors de troisième part que, dans son mémoire régulièrement déposé, Y... faisait valoir que l'expertise psychologique de Melle X... avait relevé : "On repère une tendance à la dramatisation des affects pouvant
prendre une allure morbide" et "la composante agressive, sadique, est importante" et avait conclu à "une forte tendance à la dramatisation des faits" ;
qu'il avait également souligné les contradictions, incohérences et invraisemblances des déclarations successives de Melle X... ;
qu'en ne retenant des faits qu'une version édulcorée, faisant totalement abstraction de ces contradictions, incohérences et invraisemblances et en affirmant que l'expertise psychologique n'avait mis en valeur aucune tendance suspecte telle la mythomanie, la chambre d'accusation a dénaturé ledit rapport dont il résultait au contraire une tendance suspecte à la dramatisation sadique des faits ;
"alors de quatrième part que, en laissant sans réponse l'articulation du mémoire de l'inculpé contestant la crédibilité des déclarations de Melle X... au regard des constatations de l'expertise psychologique, la chambre d'accusation a privé sa décision de motifs ;
"alors de cinquième part que, Y..., sur le lit duquel Melle X... était allongée entièrement nue après lui avoir pratiqué une fellation, a seulement déclaré : "j'étais sur elle mais elle avait sa main sur son sexe pour faire écran. Je lui ai retiré sa main sans violence et l'ai pénétrée" ; qu'il n'a jamais reconnu qu'elle n'était pas consentante au moment de la pénétration dont l'examen gynécologique a établi qu'elle n'avait pas été forcée ; que, dès lors, en affirmant qu'il résultait de cette déclaration une présomption grave permettant de penser que Melle X... n'était pas consentante au moment de la pénétration, la chambre d'accusation a dénaturé les propos de Y... ;
"alors de sixième part que, en considérant que le fait de retirer la main que sa partenaire avait posée devant son sexe caractérisait une présomption grave du viol, sans avoir relevé aucun autre indice d'un refus de l'intéressée au moment de la pénétration, la chambre d'accusation a entaché sa décision d'une erreur de qualification des faits au regard de l'article 332 du Code pénal" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt, partiellement reproduites au moyen, mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre d'accusation, par des motifs exempts d'insuffisance et de contradiction, a répondu aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie et a justifié le renvoi de Y... devant la cour d'assises du chef de viol ; que la chambre d'accusation, en statuant sur les charges de culpabilité, apprécie souverainement au point de vue des faits les éléments constitutifs des crimes, et que la Cour de Cassation n'a d'autre pouvoir que de vérifier si la qualification qui leur est donnée par elle justifie le renvoi de l'accusé devant la cour d'assises ;
Attendu que, dès lors, le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente ; qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle Y... a été renvoyé ; que la procédure est régulière et que les faits, objet de
l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Zambeaux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Roman conseiller rapporteur, MM. Dumont, Fontaine, Milleville, Alphand, Guerder conseillers de la chambre, Mme Batut conseiller référendaire, M. Galand avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
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