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Crim. 26 octobre 1995 n° 94-85.345

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-six octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MARTIN, les observations de Me Le PRADO, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Henri, contre l'arrêt n 935 de cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, du 27 octobre 1994 qui, pour infraction à la règle du repos dominical, l'a condamné à 2 amendes de 3 000 francs chacune, après avoir rejeté les exceptions soulevées, et a prononcé sur les intérêts civils ;
I - Sur l'action publique ;
Attendu que les faits poursuivis constituent des contraventions ;
qu'ayant été commis avant le 18 mai 1995 et n'étant pas exclus du bénéfice de la loi du 3 août 1995, ils sont amnistiés par application de l'article 1er de ladite loi ;
Attendu cependant que selon l'article 21 de la loi précitée, la juridiction de jugement saisie de l'action publique reste compétente pour statuer sur les intérêts civils ;
II - Sur l'action civile ;
Vu le mémoire produit ;
sur le moyen unique de cassation pris de la violation de l'article L. 221-17du Code du travail, de l'arrêté du préfet des Vosges du 4 juin 1992, des articles 384 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Henri X... coupable d'avoir ouvert son magasin le dimanche en méconnaissance de l'arrêté préfectoral pris le 4 juin 1992 par le préfet des Vosges, confirmant la décision du tribunal de police ayant rejeté l'exception d'illégalité dudit arrêté ;
"aux motifs adoptés que l'exception soulevée par le prévenu ne saurait être admissible aux termes de l'article 386 du Code de procédure pénale que si elle s'appuie sur des faits ou des titres donnant un fondement à la prétention du prévenu ;
que le prévenu ne produit pas de document fondant son allégation d'illégalité, et ne verse pas aux débats la décision du tribunal administratif qui aurait rejeté son recours, ni ne justifie avoir saisi la Cour administrative d'appel ;
"alors qu'il entre dans les attributions de la juridiction répressive de statuer sur la légalité d'un règlement assorti d'une sanction pénale qu'il lui est demandé de prononcer et que les dispositions de l'article 386 du Code de procédure pénale étaient donc inapplicables en l'espèce ;
qu'il appartenait, au contraire, à la cour d'appel de vérifier elle-même, quelque soit les éléments de preuve rapportés par le prévenu, si l'arrêté préfectoral du 4 juin 1992 avait été adopté conformément aux dispsotions de l'article L. 221-17 du Code du travail et notamment si le préfet avait entériné un accord exprimant la volonté de la majorité des professionnels concernés dans le département" ;
Attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt attaqué ni des conclusions du prévenu que celui-ci ait repris devant la cour d'appel l'exception d'illégalité de l'arrêté du préfet des Vosges du 4 juin 1992 qu'il avait présentée devant le tribunal de police et que ce dernier avait déclarée non fondée ;
Que dès lors le moyen est irrecevable par application des articles 386 et 512 du code de procédure pénale, les juges du second degré n'étant pas tenus de contrôler d'office la légalité de l'arrêté préfectoral, non contestée devant eux ;
I - Sur l'action publique :
LA DECLARE éteinte ;
II - Sur l'action civile :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Gondre conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Martin conseiller rapporteur, MM.
Culié, Roman, Schumacher, Mmes B..., Chevallier, M.
Farge conseillers de la chambre, M. de Z... de Massiac, Mme A..., M. de Y... de Champfeu conseillers référendaires, M. Perfetti avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 26 octobre 1995 n° 94-85.713

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt six octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ROMAN, les observations de la société civile professionnelle JEAN-PIERRE GHESTIN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Fernande, épouse B..., contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 28 octobre 1994, qui, pour abus de confiance, l'a condamnée à 2 ans d'emprisonnement avec sursis et 30 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 460, 513 et 593 du Code de procédure pénale et de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
"en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que, lors de l'audience des débats, la défense de Fernande B... a été présentée avant les réquisitions du ministère public et avant la plaidoirie du conseil de la partie civile ;
"alors qu'aux termes de l'article 513 du Code de procédure la défense du prévenu doit être présentée après la demande de la partie civile et les réquisitions du ministère public ;
qu'en astreignant Fernande B..., prévenue, à présenter sa défense en premier, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;
Attendu que, si l'arrêt mentionne que Fernande X..., épouse B..., a présenté sa défense avant les réquisitions du ministère public, dans l'ordre prévu par les dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale, en leur rédaction antérieure à la loi du 4 janvier 1993, il précise encore que la prévenue a eu la parole en dernier ;
Qu'en cet état, et dès lors que l'article 513 précité a été rétabli en sa rédaction initiale par la loi du 8 février 1995, l'irrégularité invoquée n'a pas porté atteinte aux intérêts de la demanderesse ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 313-1, 314-1 et 441-1 du nouveau code pénal, des articles 150, 151, 405 et 408 du Code pénal et de l'article 593 du Code de procédure pénale ; défaut de motif et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Fernande B... coupable des délits d'abus de confiance, d'escroquerie, de faux et d'usage de faux visés à la prévention et l'a en conséquence condamnée à payer des dommages intérêts à la partie civile ;
"aux motifs que l'information a établi, malgré les dénégations constantes de Fernande B..., les faits analysés avec précision par le tribunal aux termes de motifs que la Cour reprend à son compte ;
que Fernande B..., tout en se posant victime de l'association ne peut justifier ses actes (arrêt attaqué p. 4 alinéa 1 et 2) ;
que l'expert comptable a établi qu'elle a reçu au titre des salaires et de différents remboursements de frais : 420 292,53 francs en 1986, 456 376,76 francs en 1987 et 143 436,55 francs en 1988 pour 6 mois ; qu'elle a prétendu qu'elle avait droit à ces sommes mais qu'il apparaît, aux termes de la convention collective, qu'elle avait droit au coefficient de 570 et à une augmentation pour ancienneté de 21 %, alors qu'elle a appliqué un coefficient de 525 et une augmentation d'ancienneté de 36 % ;
qu'elle a perçu des sommes exorbitantes au titre des remboursements de frais ; qu'elle paraît avoir minoré sur ses salaires les parts salariales de cotisation sociales alors qu'elles ont été intégralement payées par son employeur, ce qui lui a rapporté indûment 9 000 francs ;
qu'elle a encaissé plusieurs chèques dont le président a contesté la signature, et notamment deux chèques de 32 745,47 francs et 7 244,34 francs ;
que Fernande B... a prétendu qu'il s'agissait de son salaire et de remboursement de frais, alors qu'à cette date elle s'était vue interdire d'émettre tous chèques pour le compte de la BPFA ;
que le président de l'association a annulé les deux chèques, et que cependant ce sont bien les deux chèques initiaux qui ont été encaissés par Fernande B... et que ceux-ci portent une signature qui n'est pas, selon l'expertise graphologique, celle du président ;
que Fernande B... a encaissé des chèques destinés au BPFA ;
qu'il s'agit d'une facture de 5 387 francs établie au nom de Marc Y..., portant curieusement la mention annulée, mais payée sous forme de mandat postal ;
que Fernande B... a reconnu être allée chercher cette somme, sans pouvoir expliquer où était passé l'argent (jugement entrepris p. 3 alinéa 3, 4, p. 4 alinéa 1 à 4) ;
qu'il s'agit également d'une facture de 2 016,70 francs, payée par M. A... par chèque qui n'a jamais été encaissé ;
que Fernande B... a ensuite demandé à M. A... d'établir un nouveau chèque au nom de la CECOFIA ;
qu'il est établi que Fernande B... a encaissé sur son compte personnel deux chèques de 15 000 francs et 5 581 francs établis sur le chéquier du BPFA, mais dont le talon avait été faussement renseigné ;
que ces paiements ont assuré le règlement de dépenses personnelles de Fernande B... ; qu'aux questions précises et aux pièces montrées par les enquêteurs ou le juge d'instruction, elle ne répond rien de précis et fait état de serments de bonne foi, de véhémentes protestations ou de versions non corroborées par le moindre élément de preuve ;
qu'elle prétend seulement que tout l'argent qu'elle s'est attribué n'est que la juste rémunération de son travail (jugement entrepris p. 4 alinéa 5, 6, 7, p. 6 alinéa 1, 2) ;
"1 ) alors que le délit de faux n'est constitué qu'en cas d'altération frauduleuse de la vérité, imputable au prévenu, et de nature à causer un préjudice ;
que l'arrêt attaqué se borne, par adoption des motifs du jugement, à relever que Fernande B... a encaissé deux chèques établis sur le chéquier de l'association, dont la signature était contestée par le président et dont l'expertise graphologique a établi qu'il n'en était pas le signataire ;
qu'en s'abstenant de rechercher si Fernande B... était l'auteur des signatures apposées sur les chèques litigieux, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la participation de Fernande B... au délit de faux qui lui était reproché, n'a pas légalement justifié sa décision ;
"2 ) alors que, le délit d'usage de faux suppose la connaissance par son auteur de l'altération de la vérité dont l'écrit est affecté ;
que l'arrêt attaqué ne constate pas que Fernande B... avait connaissance de ce que la signature apposée sur les chèques litigieux n'était pas de la main du président de l'association et ne caractérise donc pas l'élément intentionnel du délit en violation des textes susvisés ;
"3 ) alors que le délit d'escroquerie n'est caractérisé que lorsque son auteur a obtenu la remise de fonds indus en usant de manoeuvres frauduleuses ou en usant d'un faux nom, d'une fausse qualité ou en abusant d'une qualité vraie ;
que l'arrêt attaqué se borne a relever que Fernande B... s'est attribuée un coefficient hiérarchique supérieur à celui auquel elle pouvait prétendre en application de la convention collective et qu'elle s'est attribuée une majoration pour ancienneté de 36 % au lieu des 21 % auxquels elle avait droit ;
qu'en retenant le délit d'escroquerie en l'état de ces motifs ne faisant état d'aucune manoeuvre frauduleuse tendant à persuader son employeur de la payer à un niveau supérieur à celui résultant de la convention collective, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"4 ) alors que la cour d'appel s'est également bornée à affirmer que Fernande B... s'était attribuée des sommes exorbitantes au titre de ses remboursements de frais ;
qu'en omettant de rechercher si ces remboursements, même s'ils pouvaient a posteriori paraître exorbitants, n'étaient pas justifiés par des frais réellement exposés par Fernande B... pour les besoins de son activité professionnelle, la cour d'appel n'a pas caractérisé le délit d'abus de confiance, violant de ce chef encore les textes susvisés" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance et de contradiction et répondant aux articulations essentielles des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le seul délit d'abus de confiance dont elle a déclaré la prévenue coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice découlant de cette infraction ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en ce qu'il critique une prétendue déclaration de culpabilité des chefs de faux et usage de faux et d'escroquerie et qui, pour le surplus, se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus devant eux, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Gondre conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Roman conseiller rapporteur, MM.
Culié, Schumacher, Martin, Mmes E..., Chevallier, M.
Farge conseillers de la chambre, M. de C... de Massiac, Mme D..., M. de Z... de Champfeu conseillers référendaires, M. Perfetti avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 26 octobre 1995 n° 94-83.780 B n° 324


REJET ET CASSATION PARTIELLE sur les pourvois formés par :
- X... Alain, T... Samir, F... Charbel, P... Robert,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 9e chambre, en date du 6 juillet 1994, qui a condamné, pour délit d'initié, Alain X... à 2 ans d'emprisonnement dont 1 an avec sursis et Samir T... à 2 ans d'emprisonnement dont 1 an avec sursis et 20 000 000 francs d'amende, ainsi que, pour recel de ce délit, Charbel F... à 18 mois d'emprisonnement dont 1 an avec sursis et 5 000 000 francs d'amende, et Robert P... à 15 mois d'emprisonnement avec sursis et 2 000 000 francs d'amende.

LA COUR,

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits ;

Sur les faits et la procédure :

Attendu qu'il résulte de l'arrêt et du jugement qu'en conséquence de l'offre publique d'achat, par la société française nationalisée
N...
, des titres de la société américaine Triangle, rendue publique le 21 novembre 1988, le cours de cette valeur sur le marché hors cote de New York est passé d'environ 10 à 56 $ ;

Qu'avertie par les autorités américaines d'opérations suspectes, à l'époque des négociations entre les dirigeants des deux sociétés en vue du rachat des actions de la seconde par la première, la Commission des opérations de bourse (COB) a entrepris une enquête, à l'issue de laquelle elle a transmis au procureur de la République de Paris, qui a requis l'ouverture d'une information contre personne non dénommée, un rapport concluant à l'existence de délits d'initié ;

Qu'une plus-value de 21 millions de francs a notamment été réalisée par une société IDB ayant son siège à Anguilla, à la faveur d'achats effectués pour son compte par une société suisse dirigée par Charbel F..., lequel avait été renseigné à Paris par Samir T..., conseil des dirigeants de la société Triangle ;

Que, grâce à des informations privilégiées communiquées par Alain X..., directeur de cabinet du ministre de l'Économie et des Finances, à Roger-Patrice L..., décédé depuis ces faits, une plus-value globale d'environ 16 millions de francs a été obtenue par celui-ci, par la Compagnie parisienne de placements (CPP), dont l'un des associés est Robert P..., et par ce dernier personnellement ;

Qu'après requalification partielle des faits, l'arrêt attaqué a notamment déclaré Samir T... et Alain X... coupables de délit d'initié, Charbel F... et Robert P... coupables de recel de délit d'initié ;

En cet état :

I. Sur le troisième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation des articles 10-1 et 12-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, modifiée par la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988, 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 591 et 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception tirée de l'irrégularité de la procédure engagée en matière de délit d'initié en dépit de l'absence d'un avis de la commission des opérations de bourse ;

" aux motifs que, d'une part, l'enquête de la Commission des opérations de bourse, ainsi que l'avis qu'elle donne et que le parquet n'est d'ailleurs jamais tenu de suivre, ne conditionne pas l'engagement des poursuites et n'est nullement indissociable de la procédure pénale ;

" aux motifs propres et adoptés des premiers juges, que, d'autre part, la Commission des opérations de bourse avait, dès l'origine de la procédure, donné à l'autorité judiciaire par sa dénonciation l'avis prévu à l'article 12-1 de l'ordonnance précitée ; que l'omission supposée de la délibération particulière n'est étayée par aucun élément du dossier et est démentie par les mentions figurant dans le rapport de l'enquête de la Commission des opérations de bourse en date du 30 janvier 1989 et annexé à la lettre de dénonciation datée et signée par le président de cet organisme, ce qui atteste de la réalité de cette délibération ;

" alors que, d'une part, l'avis de la Commission des opérations de bourse est obligatoire en cas de poursuites diligentées du chef de l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, constitue un acte non détachable et indissociable de la procédure pénale et représente, pour le prévenu, une garantie essentielle des droits de la défense ;

" alors que, d'autre part, la Commission des opérations de bourse doit obligatoirement donner un avis sur l'infraction lorsque l'action publique a déjà été mise en mouvement du chef du délit d'initié ; que la dénonciation faite aux autorités judiciaires d'un éventuel délit d'initié ne peut caractériser l'avis exigé par l'article 12-1 de l'ordonnance précitée, faute de mise en mouvement des poursuites au moment de cette révélation ; qu'en l'espèce, la formalité de l'avis exigé par l'article 12-1 précité n'a pas été respectée, la décision de la Commission des opérations de bourse de transmettre au ministère public les résultats de son enquête ne pouvant caractériser l'avis susvisé, de sorte qu'en validant, dans de telles conditions, les poursuites dont elle était saisie, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

" alors qu'enfin, la délibération de la Commission des opérations de bourse ayant pour objet de transmettre le dossier établi par ses services sur l'existence d'un délit d'initié ne figure pas au dossier de la procédure, seule étant jointe la lettre du président de la Commission des opérations de bourse datée du 31 janvier 1989 et annexée au rapport de la Commission ; qu'à supposer que la décision de transmission formulée par la Commission des opérations de bourse puisse caractériser l'avis prévu par l'article 12-1 précité, l'absence de cette pièce au dossier de la procédure rend nulle la procédure engagée du chef de l'article 10-1 susvisé " ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Ryziger et Bouzidi en faveur de Robert P... et pris de la violation de l'article 12-1 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967, violation des articles 485, 593 du Code de procédure pénale en tant que de besoin, de l'article 5 bis de l'ordonnance tel qu'introduit par la loi n° 89-531 du 2 août 1989, de l'article 2 du Code civil :

" en ce que la décision attaquée a estimé que les premiers juges avaient rappelé à juste titre que la Commission des opérations de bourse avait, dès l'origine de la procédure, donné à l'autorité judiciaire, et ce par sa dénonciation, l'avis prévu par l'article 12-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 ; que le reproche de l'omission supposée de la délibération particulière n'est en l'espèce étayé par aucun élément du dossier, qu'il est, au contraire, démenti par les mentions figurant dans le rapport d'enquête de la Commission des opérations de bourse en date du 30 janvier 1989 et annexé à la lettre de dénonciation, datée et signée par le président de cet organisme, ce qui permet de déduire que cette formalité a bien été accomplie et pour des faits relevant de sa compétence ;

" et aux motifs adoptés des premiers juges que les investigations ont été conduites conformément aux règles de l'article 5 de l'ordonnance susvisée ; qu'en toute hypothèse, le tribunal n'a pas compétence pour apprécier la validité d'une enquête antérieure à l'engagement des poursuites, qui ne s'intègre pas et qui ne peut pas s'intégrer dans la procédure pénale ; qu'il en est de même du rapport établi sur le fondement de ses investigations ;

" alors, d'une part, que l'avis exigé par l'article 12-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 doit obligatoirement être demandé par une autorité saisie de poursuites pour délit d'initié ou divulgation d'informations privilégiées ; que la transmission d'un rapport d'enquête au parquet par la Commission des opérations de bourse, en vue de l'engagement éventuel de poursuites, ne peut constituer l'avis obligatoirement demandé à la Commission des opérations de bourse, en vertu de l'article 12-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, " par une autorité saisie de poursuites ", le parquet n'étant pas " saisi de poursuites ", mais devant, à la suite de la transmission qui lui est faite, décider s'il exercera l'action publique, déclenchant ainsi des poursuites ;

" alors, d'autre part, que, si la Commission des opérations de bourse est une autorité administrative indépendante, le contrôle de sa décision décidant la transmission du dossier à l'autorité judiciaire, comme aussi des avis qu'elle est amenée à formuler en vertu de l'article 12-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, relève, au même titre que les décisions prises par elle d'infliger des sanctions, du contrôle de l'autorité judiciaire ; qu'à supposer que la délibération du collège de la Commission des opérations de bourse de transmettre le dossier à l'autorité judiciaire puisse constituer l'avis prévu par l'article 12-1, les juges du fond devaient impérativement rechercher si l'avis avait été rendu régulièrement, et en particulier si la Commission des opérations de bourse avait compétence pour ouvrir l'enquête ; que, sur ce point, il avait été soutenu par les conseils des parties que la Commission des opérations de bourse, qui ne pouvait se saisir d'office, n'avait pas, avant la modification de l'ordonnance du 28 septembre 1967 par la loi du 2 août 1989, compétence pour effectuer une enquête à la demande d'une autorité étrangère exerçant une compétence analogue, et qu'au surplus, il n'entrait pas dans sa compétence de procéder à une enquête sur des opérations qui s'étaient passées aux Etats-Unis ; qu'en refusant de se prononcer sur ces points, sous prétexte d'incompétence de l'autorité judiciaire pour exercer un contrôle sur les avis de la Commission des opérations de bourse, les juges du fond ont méconnu la compétence qui était la leur ;

" alors, de troisième part, et en tout cas, que la Commission ne pouvait se saisir d'office en l'absence de réclamations, pétitions, plaintes d'intéressés et était à l'époque des faits incompétente pour conduire des enquêtes à la demande d'autorités étrangères exerçant des compétences analogues ; qu'elle n'était, d'autre part, pas compétente pour faire porter ses investigations sur des transactions effectuées sur une place étrangère, de telle sorte que la décision de la Commission de transmettre le dossier à l'autorité judiciaire, à supposer qu'elle soit constitutive de l'avis prévu par l'article 12-1, a été rendue par une autorité incompétente saisie et, au surplus, incompétente sur le fond " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour écarter les exceptions de nullité, présentées par les demandeurs avant toute défense au fond et tirées du défaut d'avis de la COB régulièrement sollicité par l'autorité judiciaire saisie des poursuites, de l'incompétence de cette Commission et de l'absence au dossier de la délibération par laquelle elle a décidé de transmettre les résultats de son enquête au procureur de la République, les juges, par motifs propres et adoptés, relèvent " qu'au travers des éléments figurant dans son rapport et de la lettre de son président concluant à l'existence de délits d'initiés, la Commission des opérations de bourse a donné l'avis prévu par l'article 12-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 ", qui n'est soumis à aucune forme particulière ;

Qu'ils retiennent en outre qu'il se déduit des mentions du rapport et de la lettre de transmission qu'une délibération particulière a été prise à cet effet ;

Qu'ils ajoutent que, " des opérations financières pouvant être initiées à partir de la France sur des marchés du monde entier, la loi n'a pas limité aux seules bourses françaises la mission de protection de l'épargne et des investisseurs dévolue à la COB ", qui " se devait de faire procéder à une enquête sur les faits portés à sa connaissance " par son homologue américain ;

Attendu qu'en cet état, et abstraction faite de motifs surabondants, voire erronés, critiqués par les moyens, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

Qu'en effet, selon les dispositions combinées des articles 1er, 5 et 5- A de l'ordonnance du 28 septembre 1967, dans sa rédaction antérieure à la loi du 2 août 1989, la COB a le pouvoir de décider elle-même de faire procéder, par des agents habilités, à des enquêtes afin d'assurer l'exécution de sa mission de protection de l'épargne et d'information des investisseurs ;

Que, lorsqu'elle transmet au procureur de la République, en vue de poursuites judiciaires du chef de délit d'initié, le dossier établi par ses services, les conclusions de son rapport constituent l'avis exigé par l'article 12-1 de ladite ordonnance ;

D'où il suit que les moyens ne peuvent être admis ;

II. Sur le premier moyen de cassation proposé par Me Choucroy en faveur d'Alain X... et pris de la violation des articles 105, 170, 172, 802 et 593 anciens du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, défaut de réponse aux conclusions, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté l'exception de nullité de l'information invoquée par le demandeur et tirée de son inculpation tardive ;

" aux motifs que le rapport de la COB annexé au réquisitoire introductif et qui mettait, il est vrai, certains des prévenus en cause, indiquait toutefois qu'il n'avait pas été révélé d'éléments décisifs permettant l'identification des personnes ayant donné des informations privilégiées ; que ce document, ainsi que les articles de presse qui y étaient joints, lesquels ont été présentés par Alain X..., dans ses conclusions, comme une campagne de presse injustifiée à son égard, ne pouvaient constituer, lors de l'ouverture de l'information, des indices graves, précis et concordants de culpabilité pouvant, en l'absence d'investigations complémentaires, entraîner des inculpations immédiates ;

" que le juge d'instruction se devait, dès lors, de procéder à toutes investigations qu'il estimait utiles, tant sur le territoire national qu'à l'étranger ;

" que l'erreur des autorités judiciaires helvétiques quant à l'indicationqu'Alain X... faisait, selon elles, l'objet de poursuites, ne liait évidemment pas le juge d'instruction, qui avait seul qualité pour apprécier l'importance des charges réunies à ce stade de la procédure à l'encontre de celui-ci ;

" qu'enfin il ne résulte, en tout état de cause, d'aucune des pièces du dossier que le magistrat instructeur, même si l'inculpation de certains des prévenus a pu leur paraître tardive, ait eu pour autant le dessein, compte tenu de la complexité de l'affaire qu'il avait à charge d'élucider, de faire échec aux droits de la défense ;

" alors que, d'une part, si le contenu du rapport de la COB, ainsi que des articles de presse dénonçant Alain X... comme étant l'un des auteurs des informations boursières litigieuses, ne pouvaient pas justifier une inculpation immédiate du demandeur, dès lors que ces éléments n'avaient encore fait l'objet d'aucune vérification, il n'en reste pas moins que, comme le demandeur le soulignait dans ses conclusions d'appel, et comme la Cour l'a d'ailleurs reconnu, le juge d'instruction genevois, saisi par une commission rogatoire internationale délivrée par le magistrat instructeur, mentionnait, plusieurs années avant son inculpation, que le demandeur faisait l'objet d'une procédure pénale ouverte du chef de délit d'initié, et que cette mention, reprise par la chambre d'accusation de Genève, n'avait pas été corrigée par le juge d'instruction français, ce qui démontrait que dans l'esprit de ce dernier, il existait déjà contre Alain X... des indices suffisamment graves, précis et concordants pour aboutir à son inculpation ; qu'en omettant de s'expliquer sur cette absence de rectification, par le magistrat instructeur, de la prétendue erreur des autorités judiciaires suisses, la Cour a laissé sans réponse un moyen péremptoire de défense ;

" alors, d'autre part, qu'Alain X... ayant souligné, dans ses conclusions d'appel, qu'aucune des nombreuses investigations diligentées à son égard par le magistrat instructeur, telles que les recherches effectuées sur ses comptes bancaires, sur son dossier fiscal et les résultats de la commission rogatoire internationale décernée aux autorités suisses, n'avait apporté des indices nouveaux susceptibles de justifier son inculpation au mois de novembre 1991, après sa dernière audition en qualité de témoin le 3 octobre 1989, soit plus de 2 ans auparavant, en sorte que la tardiveté de son inculpation avait eu pour dessein de faire échec aux droits de la défense, les juges du fond, qui n'ont pas expliqué quels indices, découverts entre le 3 octobre 1989 et le mois de novembre 1991, auraient pu justifier l'inculpation d'Alain X... à cette dernière date seulement, ont, ce faisant, privé leur décision de motifs " ;

Sur le quatrième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 dans sa rédaction issue de la loi du 22 janvier 1988, 105 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation des principes relatifs à l'application de la loi pénale dans le temps, violation des droits de la défense et de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Samir T... à une peine d'emprisonnement de 2 ans dont 1 an avec sursis, ainsi qu'à une amende de 20 millions de francs, du chef de délit d'initié, après avoir écarté l'exception de nullité de procédure tirée de la violation de l'article 105 du Code de procédure pénale ;

" aux motifs que les éléments annexés au réquisitoire introductif ne constituaient pas des indices graves, précis et concordants de culpabilité à l'encontre des prévenus ; que le juge d'instruction devait donc procéder à des investigations complémentaires ; qu'il ne résulte d'aucune pièce du dossier que le magistrat instructeur ait eu le dessein de faire échec aux droits de la défense, condition requise par l'article 105 du Code de procédure pénale applicable à l'époque des faits ;

" alors que, d'une part, les dispositions combinées des articles 105 et 171 du Code de procédure pénale, résultant de la loi du 24 août 1993 applicable à compter du 2 septembre 1993, qui exigent de la personne dénonçant une violation de l'article 105 du Code de procédure pénale la seule preuve d'une atteinte à ses intérêts, sont plus favorables que celles de l'article 105 du Code de procédure pénale applicable au moment des auditions litigieuses, qui exigeaient la preuve que les enquêteurs agissant sur commission rogatoire avaient procédé à l'audition dans le dessein de faire échec aux droits de la défense ; que, dès lors, les nouvelles dispositions, touchant fondamentalement aux droits de la défense et à l'étendue de la charge de la preuve, et dès lors assimilables aux lois de fond, devaient s'appliquer rétroactivement aux auditions incriminées ; qu'en refusant d'annuler les procès-verbaux d'audition de Samir T... et la procédure subséquente, au motif que les auditions n'avaient pas été accomplies dans le dessein de faire échec aux droits de la défense, l'arrêt attaqué a violé le principe de la rétroactivité in mitius, le principe de l'égalité devant la loi pénale, les droits de la défense, ainsi que les articles 105 (ancien) du Code de procédure pénale, par fausse application, et 105 et 171 du même Code, issus de la loi du 24 août 1993, par refus d'application ;

" alors que, d'autre part, l'exigence imposée par l'article 105 du Code de procédure pénale, dans sa rédaction antérieure au 4 janvier 1993, de prouver le dessein de faire échec aux droits de la défense, était contraire aux dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, applicable aux juridictions d'instruction, lesquelles imposent de faire connaître à tout accusé le plus rapidement possible la nature des charges pesant sur lui, et exigent du juge une impartialité appréciée objectivement, ce qui exclut toute obligation par l'accusé ou le mis en examen de prouver le dessein subjectif de celui-ci ; que l'obligation de prouver le dessein spécifique du magistrat instructeur de faire échec aux droits de la défense en cas d'audition comme témoin d'une personne sur qui pèsent des indices de culpabilité, contraire à ces textes supérieurs, devait donc être réputée non écrite ;

" alors que, de surcroît, l'existence d'indices graves, précis et concordants de culpabilité doit s'apprécier non pas au moment du réquisitoire introductif, mais au moment de l'audition comme témoin de la personne concernée ; qu'en s'abstenant de rechercher si, lors des six auditions de Samir T... en qualité de témoin, qui se sont étalées pendant plus d'un an après l'ouverture de l'information, le dossier réuni à chacune de ces dates comportait à son encontre des indices susceptibles d'être considérés comme graves, précis et concordants sur sa culpabilité, la cour d'appel a totalement privé sa décision de base légale ;

" alors qu'enfin ces auditions, longues, précises et répétées, destinées à faire révéler par le témoin l'ensemble des éléments en sa possession, en l'absence de tout conseil, ont nécessairement eu pour but et pour effet de porter atteinte aux droits de la défense et devaient donc être annulées avec la procédure subséquente " ;

Sur le premier moyen de cassation proposé par Me Choucroy en faveur de Charbel F... et pris de la violation des articles 105 ancien du Code de procédure pénale, 170, 802 et 593 du même Code, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense :

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté l'exception de nullité invoquée par le demandeur et tirée de son inculpation tardive ;

" aux motifs que le rapport de la COB annexé au réquisitoire introductif et qui mettait, il est vrai, certains des prévenus en cause, indiquait toutefois qu'il n'avait pas été révélé d'éléments décisifs permettant l'identification des personnes ayant donné des informations privilégiées ; que ce document, ainsi que les articles de presse qui y étaient joints, ne pouvaient constituer, lors de l'ouverture de l'information, des indices graves, précis et concordants de culpabilité à l'encontre des prévenus, pouvant, en l'absence d'investigations complémentaires, entraîner leur inculpation immédiate ;

" que le juge d'instruction se devait, dès lors, de procéder à toutes investigations qu'il estimait utiles, tant sur le territoire national qu'à l'étranger ; qu'il ne saurait donc lui être fait grief d'avoir, compte tenu de l'extrême complexité de l'affaire, attendu, notamment pour Samir T..., le résultat des recherches relatives aux entretiens téléphoniques passés par l'intéressé et le retour des procès-verbaux d'audition des témoins par lui demandés pour éclaircir l'affaire ;

" que Charbel F..., résidant à l'étranger, ne saurait imputer au juge d'instruction son refus délibéré de répondre à ses convocations, au seul motif du caractère exorbitant à ses yeux du montant de la caution qui aurait été envisagé à son égard, et, partant, d'une quelconque violation des droits de la défense dont il se prétend victime, alors qu'en se présentant devant le juge d'instruction, il aurait pu tout à loisir s'expliquer tant sur les faits que sur ses possibilités financières en matière de cautionnement ;

" qu'il ne résulte, en tout état de cause, d'aucune des pièces du dossier que le magistrat instructeur, même si l'inculpation de certains prévenus a pu leur paraître tardive, ait eu pour dessein, compte tenu de la complexité de l'affaire qu'il aurait la charge d'élucider, de faire échec aux droits de la défense ;

" alors que, d'une part, il résulte de l'examen du dossier de la COB annexé au réquisitoire introductif et des différents articles de presse auxquels se référait ce document, que tous les éléments de fait qui ont entraîné la condamnation de Charbel F... pour recel de délit d'initié étaient parfaitement connus dès l'ouverture de l'information, le magistrat instructeur, qui n'a procédé à l'inculpation du demandeur que 3 ans et 9 mois après avoir été saisi, n'ayant pendant cette durée que recherché vainement des preuves décisives de la culpabilité de ce prévenu, et ayant d'ailleurs affirmé dans une commission rogatoire internationale délivrée le 31 mai 1991, soit plus d'1 an et 4 mois avant son inculpation, que, compte tenu de l'évolution du dossier et de l'information, Charbel F... avait recelé des informations privilégiées qui lui avaient été transmises par Samir T..., ce qui constituait exactement les charges qui ont justifié l'inculpation du demandeur ;

" alors que, d'autre part, en fixant à 40 millions de francs, soit à une somme égale au montant total des plus-values réalisées à l'occasion de l'OPA des actions Triangle, le montant de la caution qu'il envisageait de réclamer au demandeur s'il comparaissait pour se voir notifier son inculpation, le magistrat instructeur a manifesté sa volonté délibérée de violer les droits de la défense de ce dernier, en le plaçant dans l'impossibilité matérielle de se présenter devant lui pour lui demander d'effectuer les diligences nécessaires à l'établissement de son innocence " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour rejeter les exceptions de nullité, régulièrement soulevées par les demandeurs et tirées de leur inculpation tardive, l'arrêt attaqué énonce que les documents joints au réquisitoire introductif ne constituaient pas, lors de l'ouverture de l'information, " des indices graves, précis et concordants de culpabilité pouvant, en l'absence d'investigations complémentaires, entraîner l'inculpation immédiate " des prévenus, et " que le juge d'instruction se devait, dès lors, de procéder à toutes investigations utiles, tant sur le territoire national qu'à l'étranger " ;

Qu'il ajoute " qu'il ne résulte d'aucune des pièces du dossier que le magistrat instructeur, même si l'inculpation de certains des prévenus a pu leur paraître tardive, ait eu le dessein, compte tenu de la complexité de l'affaire qu'il avait à charge d'élucider, de faire échec aux droits de la défense " ;

Qu'il observe encore que Charbel F... n'a déféré ni aux convocations du juge d'instruction, ni au mandat de comparution délivré par ce magistrat, et " qu'en se présentant devant lui, il aurait pu s'expliquer tant sur les faits que sur ses possibilités financières en matière de cautionnement " ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors qu'en vertu de l'article 105 du Code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable aux faits de la cause, non contraire aux dispositions de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartient au juge d'instruction, saisi de réquisitions contre personne non dénommée, de n'inculper une personne déterminée qu'après s'être éclairé, notamment par son audition préalable, en qualité de témoin, sur sa participation aux agissements incriminés dans des conditions pouvant engager sa responsabilité pénale, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

D'où il suit que les moyens, inopérants en ce qu'ils se fondent soit sur des énonciations erronées émanant de magistrats étrangers chargés d'exécuter une commission rogatoire, soit sur le montant d'un cautionnement qui n'était qu'envisagé, doivent être écartés ;

III. Sur le cinquième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation des articles 6, paragraphe 3 d, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense et de la présomption d'innocence, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Samir T... à une peine d'emprisonnement de 2 ans dont 1 an avec sursis, ainsi qu'à une amende de 20 millions de francs, du chef de délit d'initié relativement aux opérations effectuées par Charbel F..., en rejetant une demande de complément d'information, tendant à l'audition de MM. G... et Z... et à leur confrontation avec les prévenus ;

" aux motifs que la cour d'appel ne dispose pas d'un quelconque moyen de coercition pour les faire comparaître au titre de l'entraide répressive internationale ; que les dernières auditions de ces deux témoins ont été versées au dossier de la procédure et soumises au débat contradictoire ;

" alors que, d'une part, tout prévenu a le droit d'obtenir de la juridiction de jugement la comparution personnelle d'un témoin, avec lequel il n'a pas encore été confronté au cours de la procédure, lorsqu'il en fait régulièrement la demande ; que cette demande de confrontation ne peut être écartée que si les juges constatent l'impossibilité d'obtenir la comparution des témoins et justifient de cette impossibilité ; que ne caractérisent une telle impossibilité ni le motif inopérant selon lequel la cour d'appel n'aurait pas le pouvoir de contraindre un témoin libanais à comparaître, dès lors que le refus de celui-ci n'est pas constaté, ni le motif erroné en droit que la cour d'appel pouvait se contenter d'apprécier la portée de la déposition écrite du témoin, un tel motif étant précisément contraire aux dispositions de l'article 6, paragraphe 3 d, de la Convention précitée ;

" alors que, d'autre part, et en toute hypothèse, la confrontation avec un témoin à décharge ne peut être légalement refusée pour des motifs tenant à la crédibilité de ce témoin, à ses témoignages, ou pour la raison que celui-ci remettrait en cause la thèse de l'accusation, dès lors que la crédibilité du témoin doit être appréciée précisément au travers de sa comparution et de sa confrontation, et que la simple raison que son témoignage ne conforte pas la thèse de l'accusation constitue une violation du texte précité, outre une violation du principe de la présomption d'innocence et des droits de la défense ; que l'arrêt attaqué se trouve privé de tout fondement légal " ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé par Me Choucroy en faveur de Charbel F... et pris de la violation des articles 6, paragraphe 3 d, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 101, 463 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté la demande de supplément d'information formée par Charbel F... aux fins d'audition de MM. G..., Samia et Z... ;

" aux motifs qu'une telle mesure tend essentiellement à entendre MM. G... et Z..., déjà auditionnés en cours d'instruction puis le 22 avril 1994 sur procédure dite de référé en vigueur au Liban, et qui ont par ailleurs été cités à la requête de F... pour l'audience de la Cour du 26 avril 1994, mais n'ont pas comparu ;

" que, contrairement à ce qu'ont soutenu les conseils des prévenus, la Cour ne dispose pas, en l'occurrence et s'agissant de témoins résidant à l'étranger, d'un quelconque moyen de coercition pour les faire comparaître au titre de l'entraide répressive internationale ;

" qu'en conséquence, et alors que de surcroît M. Z... a fait connaître à la Cour qu'il n'avait, selon lui, pas d'autres renseignements à donner par rapport à son audition du 22 avril 1994, la Cour estime devoir rejeter cette demande de complément d'information, de même que toute autre mesure d'instruction, dès lors que les dernières auditions de ces deux témoins ont été versées au dossier de la procédure et soumises au débat contradictoire ;

" alors qu'aux termes de l'article 6, paragraphe 3 d, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, tout accusé a le droit d'obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge ; qu'en l'espèce où le prévenu avait demandé aux juges du fond d'ordonner un supplément d'information pour que MM. Z..., G... et Samia, dont les déclarations étaient susceptibles d'établir son innocence, soient entendus par la Cour, les juges du fond, qui ont par ailleurs écarté les déclarations de ces témoins faites au Liban parce qu'ils ne les ont pas considérées comme suffisamment crédibles, ont violé le texte précité en prétendant, contre toute évidence, que ces témoins ne pouvaient pas être entendus dès lors qu'ils refusaient de comparaître devant eux " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour refuser de faire droit à la demande de supplément d'information, aux fins d'audition de témoins demeurant à l'étranger, présentée par Samir T... et Charbel F..., les juges, après avoir relevé que ces témoins, cités devant le tribunal, puis à nouveau devant la cour d'appel, n'ont pas comparu, énoncent qu'en l'absence " d'un quelconque moyen de coercition pour les faire comparaître ", il n'y a lieu d'ordonner aucune mesure d'instruction complémentaire, mais qu'il convient d'apprécier leurs déclarations antérieures, versées au dossier ;

Attendu que, par ces motifs exempts d'insuffisance, et ne méconnaissant pas les dispositions de l'article 6, paragraphe 3 d, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la cour d'appel, qui a souverainement apprécié l'inutilité d'un supplément d'information, a justifié l'impossibilité de l'audition de témoins sollicitée ;

Que, dès lors, les moyens, qui manquent en fait en ce qu'ils soutiennent que les juges auraient fondé leur décision sur le manque de crédibilité des témoins, ou sur le sens de leur déposition, ne peuvent qu'être écartés ;

IV. Sur le premier moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation de l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 pris en sa rédaction issue de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988, des articles 5 et 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, 111-3 et 111-4 du Code pénal, 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Samir T... à une peine d'emprisonnement de 2 ans dont 1 an avec sursis ainsi qu'à une amende de 20 millions de francs du chef de délit d'initié relativement aux opérations effectuées par Charbel F... ;

" alors que le délit prévu par l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 modifiée est subordonné à l'existence d'une opération affectant un marché français fût-elle réalisée sur une place étrangère, de sorte que l'arrêt attaqué, qui a constaté que seul un marché étranger avait été concerné par les opérations litigieuses, n'a pas caractérisé d'infraction punissable par la loi française et a violé les textes susvisés " ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation des articles 113-2 du nouveau Code pénal, 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 pris en sa rédaction issue de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988, 693 ancien du Code de procédure pénale, 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception d'incompétence territoriale soulevée par le prévenu ;

" alors que, d'une part, à supposer que le délit de l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 puisse concerner les opérations réalisées par un étranger sur une place étrangère, la compétence des juridictions répressives françaises suppose que l'un de ses éléments constitutifs a été commis sur le territoire français ; que la transmission des informations réalisée par une personne ayant la qualité d'initié à un tiers ne consomme pas l'infraction et n'était pas pénalement répréhensible jusqu'à la loi n° 89-531 du 2 août 1989, le seul élément constitutif étant la réalisation de l'opération faite par un tiers sur le marché ; que, dès lors, en retenant la communication des informations relatives au titre Triangle comme l'un des faits constitutifs justifiant la compétence des juridictions françaises, la cour d'appel a faussement appliqué l'article 113-2 du nouveau Code pénal ;

" alors que, d'autre part, il résulte de l'arrêt attaqué lui-même que Samir T... aurait rencontré Charbel F... le 8 septembre 1988, soit le " lendemain d'achat massif de titres " représentant 88 % des opérations litigieuses ; que le délit d'initié suppose nécessairement que la transmission de l'information privilégiée est préalable à la réalisation des opérations ; que, dès lors, une éventuelle transmission d'information à Paris le 8 septembre 1988 ne pouvait être considérée comme un élément constitutif du délit, faute d'être préalable aux opérations, et que la cour d'appel a ainsi violé les textes précités ;

" alors qu'en tout état de cause, la cour d'appel devait constater de manière concrète et précise que l'objet des conversations téléphoniques échangées entre Samir T... et Charbel F..., ainsi que celui des rencontres effectives à Paris entre les deux hommes, portait sur l'évolution des négociations auxquelles participait le prévenu concernant le titre Triangle, et ne pouvait se borner à présumer qu'il en était ainsi après avoir rappelé que les deux financiers étaient en relations d'affaires constantes depuis de nombreuses années dans le cadre de la société Socofinance, de sorte que l'arrêt n'est pas légalement justifié " ;

Sur le troisième moyen de cassation proposé par Me Choucroy en faveur de Charbel F... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, 460 de l'ancien Code pénal, 113-2 du nouveau Code pénal, 693 ancien et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a rejeté l'exception d'incompétence des juridictions françaises soulevée par le prévenu ;

" aux motifs qu'outre les nombreux appels téléphoniques échangés entre Charbel F... et Samir T... il a été établi par l'information que Charbel F... a séjourné à Paris du 10 au 11 août 1988, du 23 au 24 août 1988, du 7 au 10 septembre 1988, le 30 septembre 1988, du 2 au 4 octobre 1988, du 24 au 26 septembre 1988 et du 8 au 9 novembre 1988, que, s'il a affirmé qu'il se rendait souvent à Paris pour affaires, force est de constater qu'il était présent sur le territoire national à des phases clefs des négociations, étant relevé que l'instruction aurait révélé qu'il avait rencontré Samir T... notamment les 8 septembre et 3 octobre 1988, date à laquelle il était invité à la remise, à ce dernier, de sa légion d'honneur ;

" qu'il apparaît en l'occurrence que Samir T..., ayant participé aux négociations et étant en possession d'informations certaines, significatives et précises relativement au titre " Triangle ", les a sciemment communiquées, notamment, et comme la Cour l'a relevé, de la France à Charbel F... ;

" que les opérations ainsi effectuées par ce dernier, même si elles ont été parachevées sur une place étrangère, ont fait l'objet d'une mise en oeuvre initiale à partir du territoire national, ce qui détermine la compétence de la juridiction pénale française, tant à l'égard de Charbel F... que de Samir T... ;

" alors que, d'une part, si, aux termes de l'article 693 de l'ancien Code de procédure pénale applicable aux faits de l'espèce, est réputée commise sur le territoire de la République toute infraction dont un acte caractérisant un de ses éléments constitutifs matériel a été accompli en France, le demandeur, qui est étranger et auquel il était reproché d'avoir commis un recel de délit d'initié en achetant des actions américaines sur le marché de New-York en passant des ordres depuis la Suisse pour le compte d'une société sise à Anguilla, soutenait, dans ses conclusions d'appel laissées sans réponse, que rien ne démontrait qu'il ait reçu des informations privilégiées concernant ces actions en France, dès lors que le contenu des communications téléphoniques qu'il avait échangées avec Samir T... était inconnu, et que les témoins de ses rencontres en France avec ce coprévenu avaient formellement exclu la transmission d'informations privilégiées au cours de ces entrevues ; que, dès lors, les juges du fond, qui se sont bornés à affirmer, sans le justifier aucunement, que les informations privilégiées détenues par Samir T... avaient été transmises au demandeur à partir du territoire français, ont privé leur décision de motifs au regard des articles 693 ancien et 593 du Code de procédure pénale ;

" alors que, d'autre part, Arie D... ayant été relaxé des poursuites exercées à son encontre du chef de recel de délit d'initié pour des faits absolument identiques à ceux qui étaient reprochés à Charbel F..., s'agissant d'un étranger qui avait fait acquérir à la bourse de New-York des actions de la société Triangle par une société luxembourgeoise alors qu'il se trouvait à Paris où il avait rencontré Samir T..., aux motifs que les communications téléphoniques échangées avec ce dernier et sa rencontre avec lui chez un coiffeur parisien ne permettaient pas d'établir la transmission d'informations privilégiées, les juges du fond se sont mis en contradiction flagrante avec eux-mêmes en retenant la compétence des tribunaux français pour statuer sur les poursuites exercées contre le demandeur en se fondant sur l'existence de conversations téléphoniques d'un contenu inconnu échangées entre lui et Samir T... et sur les rencontres qu'il avait eues à Paris avec ce coprévenu pour en déduire que ce dernier lui avait transmis des informations privilégiées à partir du territoire français " ;

Sur le troisième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Ryziger et Bouzidi en faveur de Robert P... et pris de la violation de l'article 10-1 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 dans la rédaction que lui a donnée la loi n° 83-1 du 3 janvier 1983, modifiée par la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988, des articles 1er à 5 de la directive 89 / 592 / CEE du 13 novembre 1989, de l'article 189 du Traité instituant la Communauté économique européenne, violation des articles 485, 593 du Code de procédure pénale :

" en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable d'un délit de recel d'initié ;

" aux motifs, en substance, que Nelson M... et Peter J... avaient acquis, par l'intermédiaire d'une société Triangle Industries, devenue Triangle Holding, et d'une société Centrale Jersey Industries, devenue Triangle Industrie, le contrôle de deux sociétés de boîtes métalliques en aluminium devenues, par suite d'une fusion, le principal producteur d'emballages sous le nom d'American National Can ; que les titres du Triangle étaient cotés sur le marché hors cote (OTC) de New-York (jugement p. 13) ; que des négociations entamées en juillet et août 1988, poursuivies, puis rompues en septembre, pour reprendre en octobre, ont abouti à un accord définitif le 20 novembre 1988 ; que l'acquisition du leader mondial de l'emballage American National Can par la société N... a été annoncée publiquement en France et aux Etats-Unis le lundi 21 novembre à 15 heures pour un prix de 7, 5 milliards de francs ; que, sur cette somme, 5 milliards de francs ont été versés à Nelson M... et Peter J... en échange de 66, 3 % des titres de la Holding Triangle Industries qu'ils détenaient ; que 2, 5 milliards de francs ont été consacrés à l'offre publique d'achat obligatoire au regard de la législation américaine du reste du capital au prix de 56 dollars par action ; qu'ainsi, une cotation du titre Triangle est passée en quelques jours de 10 à 56 dollars, soit une augmentation de 160 % ; que des opérations suspectes sur cette valeur dans les jours qui ont précédé l'offre publique d'achat ont conduit la Securities Exchange Commission (SEC), puis la COB, à entreprendre des investigations ayant débouché sur l'ouverture d'une information au cours de laquelle ont été retenues diverses opérations, ayant globalement engendré une plus-value supérieure à 45 millions et demi de francs, dont les 16 et 17 novembre par Roger-Patrice L... de 30 000 titres, du 15 au 17 novembre par la Compagnie parisienne de placement de 32 300 titres, et, le 18 novembre par Robert P... de 2 000 titres, soit des négociations portant en tout sur 64 300 actions qui auraient engendré une plus-value globale de près de 16 millions de francs ; qu'une information a été ouverte, mettant en cause d'une part Alain X..., à l'époque directeur du cabinet du ministre du Budget, de l'Economie et des Finances, renvoyé du chef de délit d'initié, d'autre part, l'action publique étant éteinte à l'égard de Roger-Patrice L... décédé, le 7 mars 1989, Max S... et Robert P... renvoyés du chef de recel de délit d'initié ;


" alors, d'une part, qu'il résulte de l'article 1er de l'ordonnance du 28 septembre 1967 modifiée (qui a pour objet à la fois l'institution d'une COB et l'information des porteurs de valeurs mobilières, en même temps que la publicité de certaines opérations de bourse), que la COB est chargée, notamment, de veiller au bon fonctionnement des marchés de valeurs mobilières, de produits financiers cotés et de contrats à terme négociables ; que le délit de divulgation d'informations d'initiés créé par les lois des 3 janvier 1983 et 22 janvier 1988 introduisant dans l'ordonnance un article 10-1 qui a subi plusieurs modifications successives, suppose que des personnes disposant à l'occasion de leur profession ou de leur fonction d'information privilégiée aient sciemment permis de réaliser sur le marché, soit directement, soit par personnes interposées, une ou plusieurs opérations sur une valeur mobilière ou un contrat à terme négociable ; que le " marché " visé par l'article 10-1 de l'ordonnance ne pouvait, à l'époque des faits, être qu'un des marchés contrôlés par la COB ; qu'il en est d'autant plus ainsi que l'obligation faite aux autorités judiciaires, par l'article 12-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, de consulter la COB implique que celle-ci soit compétente pour surveiller le marché sur lequel la transaction a eu lieu ;

" alors, d'autre part, que, si la divulgation d'informations concernant des valeurs mobilières ou des produits financiers cotés sur un marché autre qu'un marché surveillé par la COB avait été susceptible de constituer le délit de divulgation d'informations privilégiées, ou le délit d'initié, il ne pourrait en être ainsi, en vertu de la directive 89 / 592 / CEE du 13 novembre 1989 à la lueur de laquelle un texte national même antérieur à savoir, en l'espèce actuelle, l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 doit obligatoirement être interprété, que le délit d'initié ou de divulgation d'informations privilégiées par un initié ne peut être considéré que si les opérations susceptibles d'être réalisées au moyen de ces informations sont susceptibles d'être réalisées sur un marché réglementé et surveillé par des autorités reconnues par les pouvoirs publics, de fonctionnement régulier et accessible directement ou indirectement au public ; que le demandeur avait fait valoir, dans ses conclusions, que le marché hors cote de New-York ne répondait pas à la définition du marché, tel que défini par la directive communautaire, nécessairement applicable pour l'interprétation des textes français ; qu'en ne s'expliquant pas sur ce point, la décision attaquée a omis de répondre à un chef péremptoire des conclusions du demandeur ;

" alors, de troisième part, que les juges du fond étaient d'autant plus tenus de s'expliquer sur ce point qu'une juridiction d'un État membre de l'Union européenne ne saurait prononcer une condamnation en vertu d'une législation qui serait contraire à une directive communautaire, de telle sorte qu'à supposer que les juges du fond aient considéré que la notion de marché dans la législation française et la notion de marché dans la directive européenne du 13 novembre 1989 ne coïncidaient pas, ils auraient été tenus de refuser d'appliquer le texte de droit interne, la directive communautaire s'imposant à l'État français et étant applicable même à des faits antérieurs " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour écarter les conclusions des prévenus, selon lesquelles les faits poursuivis, concernant des titres d'une société étrangère négociés sur un marché non surveillé par la COB, n'entrent pas dans les prévisions de l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 et échappent à la compétence des juridictions pénales françaises, l'arrêt attaqué, par motifs propres et adoptés, après avoir énoncé que " la loi n'a pas limité aux seules bourses françaises la mission de protection de l'épargne et des investisseurs dévolue à la COB, qui n'a de sens que si elle a une portée internationale ", relève que les informations privilégiées ont été communiquées téléphoniquement par Samir T... à Charbel F..., à partir de son domicile situé en France ;

Qu'il retient, par ailleurs, que les mêmes informations ont été divulguées à Paris par Alain X... à Roger-Patrice L..., puis par ce dernier à Max S..., qui, de même que son associé Robert P..., les a exploitées en donnant des ordres d'achat depuis le territoire français ;

Qu'il en déduit que les opérations ainsi effectuées, " même si elles ont été parachevées sur une place étrangère, ont fait l'objet d'une mise en oeuvre initiale à partir du territoire national, ce qui détermine la compétence de la juridiction française " ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié, sans encourir les griefs allégués, l'application aux faits poursuivis de la loi pénale française et la compétence des juridictions françaises pour en connaître ;

Qu'en effet, dans leur rédaction applicable aux faits de la cause, les dispositions de l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 modifiée, non contraires à la directive 89 / 592 / CEE du 13 novembre 1989 qui se borne à prescrire, dans tous les États membres de l'Union Européenne, un degré minimal d'incrimination du délit d'initié, n'exigent pas que l'opération réalisée grâce aux informations privilégiées l'ait été sur le marché boursier français, ni qu'elle porte sur des titres cotés en France, le terme de " marché " s'appliquant à tout lieu où s'effectue le rapprochement d'une offre et d'une demande portant sur des valeurs mobilières ;

Que, selon l'article 693 du Code de procédure pénale, dont les dispositions, reprises dans l'article 113-2, alinéa 2, du Code pénal, ne font aucune référence à la loi étrangère, il suffit, pour que l'infraction soit réputée commise sur le territoire de la République et soit punissable en vertu de la loi française, qu'un de ses faits constitutifs ait eu lieu sur ce territoire ;

Que, dès lors, les moyens, qui, pour le surplus, reviennent à remettre en question l'appréciation souveraine des faits par les juges du fond, ne peuvent être admis ;

V. Sur le sixième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Samir T... coupable d'avoir transmis sciemment des informations privilégiées sur le titre Triangle à un tiers qui a réalisé des opérations sur le titre et l'a condamné de ce chef ;

" aux motifs que l'argumentation à décharge développée par le prévenu, selon laquelle la société Socofinance connaissait de longue date ce titre Triangle, dont elle se serait rendue acquéreur en 1987, ne saurait être retenue, dès lors que la réalité des achats n'a pas été confirmée par l'information ;

" alors que, d'une part, la cour d'appel, pour écarter l'analyse selon laquelle Samir T... n'était pas le maillon indispensable entre la société IDB et la société Triangle, étant donné que la société IDB détenait environ 63 000 titres Triangle en janvier 1988, ne pouvait, sans se contredire, énoncer que la réalité de ces achats n'avait pas été confirmée par l'information, sachant qu'au contraire il résultait tant du procès-verbal dressé par l'inspecteur M. O... dans le cadre de la commission rogatoire américaine (cote D 1864) que du rapport du commissaire divisionnaire M. I..., chef de la brigade financière (cote D 1833), et de la commission rogatoire helvétique du 29 juin 1990 (sous-chapitre 7), que de la lettre adressée par le magistrat instructeur le 22 novembre 1989 (cote D 273) à M. H... appartenant à la SEC, que la société IDB, chiffres à l'appui, possédait bien 63 000 titres Triangle au début du mois de janvier 1988, de sorte que sa décision n'est pas légalement justifiée ;

" alors que, d'autre part, dans un mémoire régulièrement déposé le 18 mai 1994, le prévenu dénonçait l'absence de corrélation entre les dates d'achat et de vente des titres Triangle et l'évolution des négociations auxquelles participait Samir T..., d'une part, et l'absence de corrélation entre les achats et les contacts avec Charbel F..., d'autre part, en se référant aux dates des 18 août, 8 et 27 septembre et 8 et 11 octobre 1988, ce qui mettait à néant la thèse de l'accusation ; qu'aucune réponse n'a été donnée à ce chef péremptoire des conclusions, de sorte que la décision attaquée est privée de motifs " ;

Sur le septième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 prise en sa rédaction issue de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988, 111-3 et 111-4 du nouveau Code pénal, 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des principes de la légalité des délits et des peines et de l'interprétation stricte de la loi pénale :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'avoir, tandis qu'il disposait d'informations privilégiées sur le titre Triangle, sciemment permis à Charbel F... de réaliser des opérations sur le marché avant que le public ait eu connaissance de celles-ci ;

" aux motifs que le prévenu, homme d'affaires confirmé, en sa qualité de conseil du dirigeant de la société Triangle, a eu dès l'origine connaissance de la mise en chantier des négociations relatives à cette société et de leurs différentes phases, de sorte qu'il a eu en sa possession des informations particulières et précises au sens de la loi ; qu'il les a sciemment transmises à Charbel F... afin de lui permettre de réaliser des opérations sur le titre Triangle ; que le délit d'initié reproché à Samir T... était parfaitement constitué en ses éléments tant matériels qu'intentionnels ;

" 1o) alors que, d'une part, le délit d'initié, pris en sa seconde modalité issue de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988, est une infraction matérielle pour laquelle le résultat est un élément constitutif, de sorte qu'elle n'est caractérisée que si le tiers, dans son propre intérêt, a réalisé une opération sur le fondement de l'information qui lui a été transmise par l'initié ; qu'en conséquence, cette qualification ne peut être retenue si le tiers possède la qualité d'initié, puisque l'opération qu'il réalise est alors directement incriminée par l'article 10-1 précité pris en sa première modalité, qui sanctionne le fait pour un initié d'avoir réalisé une ou plusieurs opérations sur le marché ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que Charbel F..., en relations d'affaires avec le prévenu, aurait eu connaissance des négociations concernant la société Triangle dans le cadre de ses fonctions, ce qui lui aurait, ainsi, conféré la qualité d'initié ; que, dès lors, en déclarant Samir T... coupable d'avoir sciemment permis à une personne, qui aurait la qualité d'initié, de réaliser, sur le marché, des opérations en lui communiquant préalablement des informations sur l'évolution des négociations sur le titre Triangle, la cour d'appel a violé par fausse application le texte susvisé et porté atteinte au principe de l'interprétation stricte de la loi pénale ;

" 2o) alors que, d'autre part, à l'époque des faits, soumis à la loi n. 88-70 du 22 janvier 1988 modifiant l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, la seule transmission de l'information privilégiée faite par l'initié à un tiers n'est pas pénalement répréhensible ; que la loi n° 89-531 du 2 août 1989, qui incrimine la divulgation de l'information faite par l'initié même si aucune opération n'a eu lieu sur le marché, est postérieure aux faits et donc non applicable ; que, dès lors qu'en l'espèce aucune opération n'a été réalisée sur le fondement des informations prétendument communiquées par le prévenu, la seule transmission desdites informations par Samir T... échappe à la loi pénale, de sorte qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a prononcé une déclaration de culpabilité illégale ;

" 3o) alors que, de surcroît, nul ne peut être à la fois déclaré coupable d'une infraction principale et receleur de fruits de cette infraction principale ; que la cour d'appel considère Samir T... comme auteur principal de délit d'initié parce que des opérations ont été réalisées et Charbel F... comme receleur pour avoir réalisé lesdites opérations ;

" qu'en déclarant Samir T... coupable d'avoir sciemment permis la réalisation de ces opérations et Charbel F... receleur à raison des mêmes opérations, la cour d'appel a violé les textes et principes susvisés ;

" 4o) alors qu'enfin la seule transmission d'une information privilégiée par un initié n'était pas, selon l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 modifiée par la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988 applicable à la date des faits, pénalement répréhensible ; que dès lors, en condamnant Samir T... du chef de l'opération réalisée par Charbel F..., qualifié de receleur, tandis que l'utilisation de cette information ne peut constituer un recel faute d'infraction principale punissable, la cour d'appel, qui a nécessairement déduit l'existence de l'infraction principale de celle du recel, a violé les textes susvisés " ;

Sur le huitième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 prise en sa rédaction issue de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988, 121-3 du nouveau Code pénal, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'avoir sciemment permis à un tiers de réaliser des opérations privilégiées à partir d'informations préalablement transmises et l'a condamné de ce chef ;

" aux motifs qu'il a sciemment transmis l'information concernant l'évolution des titres Triangle à Charbel F... afin de lui permettre de réaliser des opérations sur le marché ;

" alors que le délit d'initié, pris en sa seconde modalité issue de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988, est une infraction intentionnelle qui exige, lorsque le tiers n'a pas directement réalisé l'opération sur le marché, mais l'a fait réaliser par l'intermédiaire d'une personne morale étrangère à l'initié, que celui-ci ait eu connaissance, au moment où il transmettait l'information à la personne physique, que celle-ci utiliserait une personne morale pour réaliser, sur le fondement des informations transmises, l'opération prohibée au bénéfice du patrimoine du tiers ; qu'en se bornant à affirmer que le prévenu avait sciemment transmis les informations relatives à la société Triangle à Charbel F..., sans constater que Samir T... savait, au moment précis de la communication à la supposer réalisée, que ce serait la société IDB dans laquelle il n'a aucun intérêt qui ferait réaliser les achats et les ventes des titres et serait le donneur d'ordre réel sur le marché, l'arrêt attaqué n'a pas caractérisé de manière concrète et précise l'intention requise pour l'application de l'article susvisé et n'a pas légalement justifié sa décision " ;

Sur le quatrième moyen de cassation proposé par Me Choucroy en faveur de Charbel F... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 dans sa rédaction antérieure à la loi du 2 août 1989, 460 de l'ancien Code pénal et 593 du Code de procédure pénale :

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Charbel F... coupable de recel de délit d'initié ;

" aux motifs adoptés des premiers juges que la jurisprudence a de longue date estimé que l'article 460 du Code pénal, rédigé en termes généraux et absolus, ne comporte pas de distinction entre les divers crimes et délits à l'aide desquels la chose recélée a été enlevée, détournée ou obtenue ; qu'elle en a déduit que le recel était caractérisé à l'égard de celui qui accueillait et utilisait des renseignements obtenus grâce à la communication frauduleuse d'un secret de fabrique ; que, sans cette dématérialisation du recel, la protection que le législateur a entendu assurer au fil de l'évolution des techniques contre l'appropriation frauduleuse des produits de l'esprit dépourvus de support matériel aurait été partiellement réduite à néant ;

" que, dès lors, le fait, par Charbel F..., d'avoir sciemment recueilli des informations privilégiées détournées par un initié qui connaissait l'usage qui en serait fait sur le marché, constitue le recel qui lui est reproché ; qu'il est indifférent que le prévenu n'ait pas appréhendé, directement ou indirectement, les produits de son recel ;

" alors que, d'une part, si le délit de recel peut, selon la jurisprudence de la Cour de Cassation, s'appliquer à une information qui a fait l'objet d'une appropriation indue, encore faut-il que cette information soit matérialisée et ait un titulaire légitime, que tel ne peut être le cas d'une information boursière privilégiée qui n'appartient à personne et qui ne peut pas faire l'objet d'une appréhension par le receleur lorsque le destinataire d'une telle information se borne à la recueillir par la voie de son informateur ; que dès lors, l'infraction de recel d'information privilégiée étant inconnue du droit français, elle ne pouvait pas être retenue à l'encontre du prévenu ;

" alors que, d'autre part, pour que le délit de recel soit constitué, il faut que l'auteur de cette infraction ait connu l'origine délictueuse du bien au moment où il en a acquis la détention ; qu'en l'espèce où les juges du fond n'ont aucunement constaté que Charbel F... ait pu savoir, au moment où Samir T... lui aurait transmis des informations sur les négociations en cours au sujet du rachat du groupe Triangle par le groupe N..., que lesdites informations avaient une origine frauduleuse parce que ce coprévenu en disposait à l'occasion de l'exercice de sa profession ou de ses fonctions, l'élément intentionnel du délit de recel n'a pas été caractérisé à la charge du demandeur " ;

Sur le deuxième moyen de cassation proposé par Me Choucroy en faveur d'Alain X... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, 459 et 593 du Code de procédure pénale, 6, paragraphe 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense :

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Alain X... coupable de délit d'initié ;

" aux motifs qu'il convient de relever l'existence de relations étroites d'amitié entre Samir T... et Alain X... depuis 1980 ;

" que, par ailleurs, de l'aveu même de Samir T..., il apparaît que le rapprochement de la société Triangle, qu'il représentait en France, et de N..., ainsi que la concrétisation d'un accord éventuel entre ces deux groupes, lui tenait particulièrement à coeur ;

" que les relations nouées entre Samir T... et Alain X... sont devenues familières pour se traduire ultérieurement par une croisière en Méditerranée du 11 au 15 août 1988, où, en dépit de ses fonctions officielles de directeur de cabinet du ministre des Finances et nonobstant la retenue qu'elles commandaient, Alain X... a cru devoir rester à bord lorsque furent menées des négociations entre Nelson M... et deux représentants du groupe N... ;

" qu'Alain X..., qui a, sur ce point, concédé avoir manqué de prudence, sinon de délicatesse, a toutefois affirmé qu'à l'époque des faits, il se devait, de par ses fonctions, d'être particulièrement bien informé de la situation et des perspectives du groupe N..., ressortissant du secteur public ;

" que Jean-Louis U... a indiqué que, le 25 juin 1988, Alain X... passait outre au rejet de son intervention auprès du représentant de M. M... en France par la direction générale de N..., qui n'avait pas encore pris de décision sur une éventuelle acquisition d'American National Can ; qu'il s'empressait au contraire de prendre immédiatement contact avec Samir T... ;

" qu'il est, par ailleurs, établi qu'alors qu'aucune négociation entre les groupes Triangle et N... n'avait officiellement été entreprise le 18 juillet 1988, Alain X..., usant de son autorité, a cru devoir faire mentionner faussement par Pierre B..., dans une note destinée au ministère des Finances, l'existence de pourparlers déjà en cours, alors que ceux-ci n'étaient pas commencés ; qu'il n'a, en définitive, admis sa responsabilité qu'après plusieurs auditions et confrontations ;

" que, pour ce qui est des faits survenus postérieurement, la Cour relève que Samir T... et Alain X... sont restés, au-delà d'appels téléphoniques que pouvait expliquer la remise officielle de la Légion d'honneur audit T... par le ministre de l'Economie, en contact étroit, notamment pour ce qui est du déroulement des négociations, ce qui lui a permis d'obtenir régulièrement des renseignements ;

" que ces divers éléments démontrent qu'Alain X..., nonobstant ses dénégations, a outrepassé ses fonctions de directeur de cabinet, faisant ainsi montre de complaisance coupable envers Samir T... ;

" que, pour ce qui a trait à la divulgation de l'information privilégiée que Max S... a, en cause d'appel, reconnu lui avoir été donnée par Roger-Patrice L..., décédé, il est à cet égard observé que la communication en était déjà faite par Roger-Patrice L... à Max S... le 14 novembre à 15 heures au plus tard ;

" qu'il convient donc de rechercher qui, alors en possession du renseignement privilégié, l'a communiqué à Roger-Patrice L... ;

" qu'il est établi qu'aucun des négociateurs ne connaissait ce dernier, à l'exception de Samir T... qui ne faisait pas partie de ses relations habituelles, et de Jean E... qui ne l'avait rencontré qu'une fois, lors du cocktail donné à l'occasion de sa remise de la Légion d'honneur ;

" qu'Antoine Q..., administrateur de N..., a été mis au courant par Jean E..., le 14 novembre vers midi, des derniers développements des négociations afin qu'il en informe le Premier ministre, avec qui il devait déjeuner le même jour ; que ce dernier et Antoine Q... sont restés ensemble jusqu'à 15 heures, heure à laquelle ils ont prévenu de l'existence des négociations en cours Jean-François V..., conseiller technique à Matignon, qui n'a été informé du détail de l'opération qu'au cours d'un rendez-vous avec M. E..., qui s'est déroulé ce même 14 novembre de 16 heures à 17 heures 30 environ ;

" que, le 14 novembre à 10 heures, Jean E... a, semble-t-il, fait, au cours d'une réunion de responsables des " clubs pays ", un très bref exposé au ministre de l'Industrie, sans toutefois lui remettre de documents écrits, les collaborateurs de celui-ci étant unanimes à déclarer n'avoir été informés que le 15 novembre vers 17 heures ;

" que c'est le mercredi 15 novembre seulement, entre 19 et 20 heures, que Didier K..., chargé des affaires industrielles au secrétariat général de la Présidence de la République, a reçu de Jean Martin C..., directeur général de N..., une note codée sur l'opération en cours ;

" que Jean E... n'a que le 16 novembre, à partir de 12 heures 30, entretenu de la question du financement du projet René R..., président-directeur général de la BNP, qui a indiqué avoir eu conscience du caractère secret de l'entrevue ;

" qu'il est établi que ces personnes n'entretenaient pas de rapport avec Roger-Patrice L... ; que Samir T... connaissait, il est vrai, l'intéressé, mais sans avoir avec lui de relations suivies ;

" qu'il est en revanche non dénié par Alain X... que celui-ci cultivait avec Roger-Patrice L... et sa famille des liens d'étroite amitié ;

" que, dans ces conditions, c'est à juste titre que l'enquête s'est orientée, pour ce qui est de la divulgation de l'information, sur Alain X... ;

" que, d'autre part, les circonstances dans lesquelles elle a été divulguée font ressortir qu'à la date où celle-ci a été transmise à Roger-Patrice L..., seul Alain X..., prévenu de l'accord en vue entre le 9 novembre et le 14 novembre à 8 heures 30 au plus tard dans les circonstances décrites par le tribunal, était en mesure de connaître, en substance et d'une façon suffisamment précise, les renseignements dont s'agit pour qu'ils puissent être, comme cela a été le cas, immédiatement exploités sur le marché ; qu'il est dès lors acquis qu'Alain X... a été ainsi, et nonobstant ses dénégations, l'informateur de Roger-Patrice L..., et ce dans le seul but de lui permettre de réaliser des opérations ayant consisté à acheter successivement le 16 novembre 10 000, puis 20 000 actions Triangle Industries ;


" alors que, d'une part, s'agissant d'un prévenu qui, au moment où le groupe N..., appartenant au secteur public, cherchait à étendre son activité dans le secteur de l'emballage, exerçait les fonctions de directeur de cabinet du ministre de l'Economie et des Finances et avait mis à profit ses relations amicales avec l'un des responsables de ce groupe comme avec le représentant en France d'un groupe américain propriétaire du leader mondial de l'emballage, pour se tenir informé des pourparlers en cours entre ces deux entités économiques, puis qui, par la suite, s'était tenu au courant du déroulement des négociations qui devaient finalement aboutir, avec l'accord de son ministre comme avec celui du ministre de l'Industrie, du Premier ministre et de la Présidence de la République, à l'achat du groupe américain par le groupe N..., la Cour n'a aucunement caractérisé ni l'abus de fonctions dont elle a accusé ce prévenu, ni l'existence de complaisances envers Samir T... dont elle l'a également déclaré coupable, dès lors que les juges du fond n'ont pas relevé que le demandeur ait communiqué des informations à cet intermédiaire, mais qu'au contraire il résulte de leurs constatations que c'était ce dernier qui avait tenu le demandeur au courant de l'évolution des négociations afin qu'il puisse suivre le dossier relatif à cette opération auquel il est personnellement intéressé pour le soumettre à son ministre ;

" alors que, d'autre part, et en supposant que Roger-Patrice L... ait bénéficié d'une information privilégiée qui lui aurait été communiquée au plus tard le 14 novembre 1988 à 15 heures, les constatations des juges du fond relatives aux personnes qui ont eu connaissance de l'opération litigieuse postérieurement à ce moment ne pouvaient, à l'évidence, permettre d'identifier l'informateur de Roger-Patrice L..., en sorte que c'est au prix d'une contradiction flagrante que la Cour a cru pouvoir faire état de l'absence de toute relation entre ces personnes et Roger-Patrice L... pour retenir, par élimination, la culpabilité du demandeur ;

" qu'en outre, s'il est incontestable qu'Alain X... a été effectivement l'ami de Roger-Patrice L..., et s'il est vrai qu'il pouvait être l'auteur des informations privilégiées exploitées par ce dernier, il n'en reste pas moins que, comme les premiers juges l'avaient souligné pour prononcer la relaxe du demandeur, celui-ci était loin d'être la seule personne au courant du préaccord du 11 novembre à connaître Roger-Patrice L... ; que dès lors, en déduisant la culpabilité du demandeur du fait que ses liens d'amitié avec Roger-Patrice L... étaient plus suivis que ceux noués par ce dernier avec les autres initiés, les juges d'appel se sont fondés sur un motif totalement inopérant, la communication d'une information privilégiée pouvant être totalement indépendante de relations d'amitié entre l'initié et le bénéficiaire de l'information dès lors qu'elle peut à l'évidence être motivée par des raisons d'intérêt autant que par des raisons affectives ou même s'expliquer par une indiscrétion involontaire ;

" qu'au surplus, en faisant totalement abstraction des relations amicales ayant lié Pierre Y..., alors ministre de l'Economie et des Finances à Roger-Patrice L... et Max S..., tous deux bénéficiaires du délit d'initié, alors que ces relations amicales avaient été mises en évidence par les premiers juges, les juges d'appel, qui n'ont pas cru devoir faire la moindre allusion au rôle de Pierre Y... afin de mieux pouvoir déduire la culpabilité de son ancien directeur de cabinet, par élimination des autres initiés, moins proches que lui de Roger-Patrice L..., ont entaché leur décision d'un défaut de motifs flagrant ;

" et qu'enfin, les juges du fond n'ont pas caractérisé l'intention coupable de l'exposant en affirmant, sans même chercher à le justifier, qu'il avait communiqué l'information privilégiée à Roger-Patrice L... dans le but de lui permettre de réaliser des opérations particulièrement profitables sur le marché des actions, rien dans la personnalité d'Alain X..., ni dans la nature de ses relations avec Roger-Patrice L..., telles qu'elles résultent du dossier, ne permettant de soupçonner un tel dessein, et rien a priori ne pouvant permettre au demandeur de suspecter l'honnêteté de Roger-Patrice L..., dont les relations amicales avec le Président de la République étaient au contraire de nature à lui apparaître comme constituant un gage de civisme et d'honnêteté, comme la position qu'il occupait dans de nombreux et prestigieux conseils d'administration comme celui d'Air France " ;

Sur le troisième moyen de cassation proposé par Me Choucroy en faveur d'Alain X... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, 459 et 593 du Code de procédure pénale, 6, paragraphe 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense :

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Alain X... coupable de délit d'initié ;

" aux motifs qu'il convient de relever l'existence de relations étroites d'amitié entre Samir T... et Alain X... depuis 1980 ;

" que, par ailleurs, de l'aveu même de Samir T..., il apparaît que le rapprochement de la société Triangle, qu'il représentait en France, et de N..., ainsi que la concrétisation d'un accord éventuel entre ces deux groupes, lui tenait particulièrement à coeur ;

" que les relations nouées entre Samir T... et Alain X... sont devenues familières pour se traduire ultérieurement par une croisière en Méditerranée du 11 au 15 août 1988, où, en dépit de ses fonctions officielles de directeur de cabinet du ministre des Finances et nonobstant la retenue qu'elles commandaient, Alain X... a cru devoir rester à bord lorsque furent menées des négociations entre Nelson M... et deux représentants du groupe N... ;

" qu'Alain X..., qui a, sur ce point, concédé avoir manqué de prudence, sinon de délicatesse, a toutefois affirmé qu'à l'époque des faits, il se devait, de par ses fonctions, d'être particulièrement bien informé de la situation et des perspectives du groupe N..., ressortissant du secteur public ;

" que Jean-Louis U... a indiqué que, le 25 juin 1988, Alain X... passait outre au rejet de son intervention auprès du représentant de M. M... en France par la direction générale de N..., qui n'avait pas encore pris de décision sur une éventuelle acquisition d'American National Can ; qu'il s'empressait au contraire de prendre immédiatement contact avec Samir T... ;

" qu'il est, par ailleurs, établi qu'alors qu'aucune négociation entre les groupes Triangle et N... n'avait officiellement été entreprise le 18 juillet 1988, Alain X..., usant de son autorité, a cru devoir faire mentionner faussement par Pierre B..., dans une note destinée au ministère des Finances, l'existence de pourparlers déjà en cours, alors que ceux-ci n'étaient pas commencés ; qu'il n'a, en définitive, admis sa responsabilité qu'après plusieurs auditions et confrontations ;

" que, pour ce qui est des faits survenus postérieurement, la Cour relève que Samir T... et Alain X... sont restés, au-delà d'appels téléphoniques que pouvait expliquer la remise officielle de la Légion d'honneur audit T... par le ministre de l'Economie, en contact étroit, notamment pour ce qui est du déroulement des négociations, ce qui lui a permis d'obtenir régulièrement des renseignements ;

" que ces divers éléments démontrent qu'Alain X..., nonobstant ses dénégations, a outrepassé ses fonctions de directeur de cabinet, faisant ainsi montre de complaisance coupable envers Samir T... ;

" que, pour ce qui a trait à la divulgation de l'information privilégiée que Max S... a, en cause d'appel, reconnu lui avoir été donnée par Roger-Patrice L..., décédé, il est à cet égard observé que la communication en était déjà faite par Roger-Patrice L... à Max S... le 14 novembre à 15 heures au plus tard ;

" qu'il convient donc de rechercher qui, alors en possession du renseignement privilégié, l'a communiqué à Roger-Patrice L... ;

" qu'il est établi qu'aucun des négociateurs ne connaissait ce dernier, à l'exception de Samir T... qui ne faisait pas partie de ses relations habituelles, et de Jean E... qui ne l'avait rencontré qu'une fois, lors du cocktail donné à l'occasion de sa remise de la Légion d'honneur ;

" qu'Antoine Q..., administrateur de N..., a été mis au courant par Jean E..., le 14 novembre vers midi, des derniers développements des négociations afin qu'il en informe le Premier ministre, avec qui il devait déjeuner le même jour ; que ce dernier et Antoine Q... sont restés ensemble jusqu'à 15 heures, heure à laquelle ils ont prévenu de l'existence des négociations en cours Jean-François V..., conseiller technique à Matignon, qui n'a été informé du détail de l'opération qu'au cours d'un rendez-vous avec M. E..., qui s'est déroulé ce même 14 novembre de 16 heures à 17 heures 30 environ ;

" que le 14 novembre à 10 heures, Jean E... a, semble-t-il, fait, au cours d'une réunion de responsables des " clubs pays ", un très bref exposé au ministre de l'Industrie, sans toutefois lui remettre de documents écrits, les collaborateurs de celui-ci étant unanimes à déclarer n'avoir été informés que le 15 novembre vers 17 heures ;

" que c'est le mercredi 15 novembre seulement, entre 19 et 20 heures, que Didier K..., chargé des affaires industrielles au secrétariat général de la Présidence de la République, a reçu de Jean Martin C..., directeur général de N..., une note codée sur l'opération en cours ;

" que Jean E... n'a que le 16 novembre, à partir de 12 heures 30, entretenu de la question du financement du projet René R..., président-directeur général de la BNP, qui a indiqué avoir eu conscience du caractère secret de l'entrevue ;

" qu'il est établi que ces personnes n'entretenaient pas de rapport avec Roger-Patrice L... ; que Samir T... connaissait, il est vrai, l'intéressé, mais sans avoir avec lui de relations suivies ;

" qu'il est en revanche non dénié par Alain X... que celui-ci cultivait avec Roger-Patrice L... et sa famille des liens d'étroite amitié ;

" que, dans ces conditions, c'est à juste titre que l'enquête s'est orientée, pour ce qui est de la divulgation de l'information, sur Alain X... ;

" que, d'autre part, les circonstances dans lesquelles elle a été divulguée font ressortir qu'à la date où celle-ci a été transmise à Roger-Patrice L..., seul Alain X..., prévenu de l'accord en vue entre le 9 novembre et le 14 novembre à 8 heures 30 au plus tard dans les circonstances décrites par le tribunal, était en mesure de connaître, en substance et d'une façon suffisamment précise, les renseignements dont s'agit pour qu'ils puissent être, comme cela a été le cas, immédiatement exploités sur le marché ; qu'il est dès lors acquis qu'Alain X... a été ainsi, et nonobstant ses dénégations, l'informateur de Roger-Patrice L..., et ce dans le seul but de lui permettre de réaliser des opérations ayant consisté à acheter successivement le 16 novembre 10 000, puis 20 000 actions Triangle Industries ;

" alors que la cour d'appel, qui sans préciser les circonstances dans lesquelles, selon elle, le directeur du cabinet du ministre d'État aurait pris connaissance des informations privilégiées dans le cadre de ses fonctions a, au contraire, constaté à plusieurs reprises l'existence de relations amicales entre Alain X... et Samir T..., et relevé qu'Alain X... avait " régulièrement obtenu des renseignements " non de Jean-Louis U..., qui s'était borné, " à de rares occasions, à répondre à ses investigations ", mais de Samir T..., n'a pas ainsi justifié en quoi Alain X... aurait disposé des informations privilégiées " à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ", privant sa décision de tout fondement légal au regard des textes susvisés " ;

Sur le premier moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Ryziger et Bouzidi en faveur de Robert P... et pris de la violation de l'article 460 de l'ancien Code pénal, de l'article 10-1 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale :

" en ce que la décision attaquée a déclaré l'exposant coupable de recel de délit d'initié ;

" aux motifs que c'est en vain qu'il fait soutenir qu'il manquerait un des éléments légaux du délit de recel, dès lors que l'information privilégiée résultant du délit d'initié servant d'infraction originaire au recel reproché porterait sur un bien immatériel insusceptible en l'occurrence d'appropriation ; que les premiers juges, par des motifs pertinents que la Cour adopte, ont rejeté un tel moyen de droit, dès lors qu'en vertu des termes généraux d'incrimination du recel n'est exclu aucun crime ni délit pour ce qui est de la provenance de l'objet recelé, de telle sorte que celui-ci peut se trouver comme en l'occurrence, et contrairement à ce qui est soutenu, dématérialisé ;

" et aux motifs adoptés des premiers juges que la jurisprudence a de longue date estimé que l'article 460 du Code pénal, rédigé en termes généraux et absolus, ne comporte pas de distinction entre les divers crimes et délits à l'égard desquels la chose recelée a été enlevée, détournée ou obtenue (Cass. Crim. 4 décembre 1875 ; 3 décembre 1892 ; 11 janvier 1945 ; 10 juillet 1969) ; qu'elle a ainsi déduit de la généralité des prévisions de la loi que le recel était caractérisé à l'égard de celui qui accueillait et utilisait des renseignements obtenus grâce à la communication frauduleuse d'un secret de fabrique (Cass. Crim. 7 novembre 1974) ; que cette décision procède non pas d'un raisonnement analogique, mais de la mission naturelle du juge, auquel il appartient, comme l'a rappelé la Cour de Cassation (Cass. Crim. 21 janvier 1969), " de rechercher l'objet de la loi et son domaine d'application " pour mieux interpréter les termes employés par celle-ci ; qu'en effet, sans cette dématérialisation du recel procédant d'une détention seulement intellectuelle, la protection pénale que le législateur a entendu assurer, au fil de l'évolution des techniques, contre la violation du secret professionnel, (loi du 21 février 1944), le détournement d'informations nominatives, (loi du 6 janvier 1978), la captation d'un système d'automatisation des données, (loi du 5 janvier 1988), et plus généralement contre l'appropriation frauduleuse des produits de l'esprit dépourvus de support matériel, aurait été partiellement réduite à néant (cf p. 44) ;

" alors que seul un bien corporel ou incorporel, ou au moins un droit susceptible d'appropriation privative ou qui peut faire l'objet de convention, est susceptible de faire l'objet d'un recel ; que tel n'est pas le cas d'une information privilégiée détenue par un initié et que celui-ci aurait divulguée en violation des dispositions de l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, une telle information, par définition même n'étant pas dans le commerce, n'était pas susceptible d'une appropriation au sens du droit privé (et ne constitue pas, contrairement à ce qu'ont admis les juges du fond, un bien dématérialisé) " ;

Sur le quatrième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Ryziger et Bouzidi pour Robert P... pris de la violation de l'article 10-1 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967 modifiée, des articles 485, 593 du Code de procédure pénale :

" en ce que la décision attaquée a déclaré Alain X... coupable du délit de divulgation de secret d'initié (dont le demandeur a été déclaré receleur) ;

" aux motifs que, s'il a soutenu s'être cantonné dans ses attributions de directeur de cabinet du ministre des Finances et avoir été victime d'une machination quant aux accusations portées à son endroit, il convient de relever, ce qui au demeurant n'est pas dénié, l'existence de relations étroites d'amitié entre Samir T... et Alain X... depuis 1980 ; que, par ailleurs, de l'aveu même de Samir T..., il apparaît que le rapprochement de la société Triangle qu'il représentait en France et de N... qui s'insérait, aux dires d'Alain X..., dans la perspective d'une nouvelle politique industrielle, ainsi que la concrétisation d'un accord éventuel entre ces deux groupes, lui tenait particulièrement à coeur ; que les relations nouées entre Samir T... et Alain X... sont devenues familières pour se traduire ultérieurement, et pour ce qui concerne plus directement les faits de la cause, par une croisière en Méditerrannée du 11 au 15 août 1988 où, en dépit de ses fonctions officielles de directeur de cabinet du ministre des Finances et nonobstant la retenue qu'elle commandait, dans sa vie privée, Alain X... a cru devoir rester à bord lorsque furent menées, dans des conditions décrites par le tribunal, des négociations entre Nelson M... et deux représentants du groupe N... ; que cependant, Alain X..., qui a, sur ce point, concédé avoir en l'occurrence manqué de prudence sinon de délicatesse, a affirmé, comme il a déjà été mentionné, qu'à l'époque des faits il se devait cependant, de par ses fonctions, d'être particulièrement bien informé sur la situation et les perspectives financières et industrielles du groupe N... appartenant au secteur public ; que Jean-Louis U..., à cet égard, tout en convenant qu'il était du rôle du prévenu de se renseigner sur ces questions, a indiqué néanmoins que le 25 juin 1988 X... passait outre au rejet de son offre d'intervention auprès du représentant de Nelson M... en France par la direction générale de N..., qui n'avait pas encore pris de décision sur une éventuelle acquisition, entre autres projets, d'Américan National Can, et s'empressait au contraire de prendre immédiatement contact avec T... ; que c'est donc dans ces conditions qu'a été fixé, à l'initiative de Samir T..., le rendez-vous du 12 juillet 1988 au ministère des Finances entre Nelson M..., Samir T... et Alain X... qui en a informé Jean-Louis U... seulement le 11 juillet dans l'après-midi alors que ce dernier se trouvait au ministère des Finances pour une tout autre raison ; qu'il est ailleurs établi par les éléments du dossier qu'alors qu'aucune négociation entre les groupes Triangle et N... n'avait officiellement été entreprise le 18 juillet 1988, Alain X..., usant de son autorité, a cru devoir faire mentionner faussement par Pierre B..., personnellement chargé de suivre les opérations N... au ministère des Finances, dans une note destinée au ministre, l'existence de pourparlers déjà en cours, alors que ceux-ci n'étaient pas commencés ; que, pour ce qui est des faits survenus postérieurement, la Cour relève que Samir T... et Alain X... sont restés au-delà d'appels téléphoniques que pouvait expliquer la remise officielle de la Légion d'honneur audit T... par le ministre de l'Economie en contact étroit, notamment pour ce qui est du déroulement des négociations ; qu'après avoir, en effet, soutenu que les renseignements qu'il avait pu obtenir émanent de Jean-Louis U..., il a dû admettre, au fur et à mesure de l'information et des débats, et à la suite des investigations du magistrat instructeur, qu'il avait régulièrement obtenu des renseignements non de ce dernier, qui s'est borné à de rares occasions à répondre à ses interrogations, mais de Samir T... ; que ces divers éléments démontrent qu'Alain X..., nonobstant ses dénégations, a outrepassé ses fonctions de directeur de cabinet, faisant ainsi montre de complaisance coupable envers Samir T... ; que l'arrêt s'efforce ensuite d'établir que c'est T... qui aurait communiqué l'information à L..., ce qui serait constitutif du délit d'initié ;

" alors que les délits prévus et réprimés par l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 supposent que la personne qui a utilisé ou divulgué l'information ait disposé de celle-ci à l'occasion de sa profession ou de ses fonctions ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué qu'Alain X..., s'il a voulu, en raison de ses fonctions, tenter de s'informer et s'il a tenté de jouer un rôle d'intermédiaire dans les négociations entre MM. M... et N..., n'a été informé du déroulement des négociations qu'en raison de ses relations personnelles avec Samir T... ; qu'il ne détenait donc pas une information privilégiée de par ses fonctions ou sa profession, mais exclusivement en raison des relations personnelles qu'il entretenait avec T... ; que la cour d'appel n'a pu, sans omettre de tirer les conséquences légales de ses propres constatations, considérer que X... s'était rendu coupable d'une divulgation d'informations privilégiées obtenues en raison de sa profession ou de ses fonctions ; que le demandeur n'a donc pu être receleur de semblables informations " ;

Sur le cinquième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Ryziger et Bouzidi en faveur de Robert P... et pris de la violation de l'article 10-1 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967, de l'article 460 du Code pénal, des articles 485 et 593 du Code de procédure pénale :

" en ce que la décision attaquée a déclaré le demandeur coupable de recel de délit d'initié ;

" aux motifs qu'il y a lieu de relever, en ce qui concerne l'infraction de recel de délit d'initié reprochée notamment à Robert P... et à Max S..., que, contrairement à ce qu'ont fait soutenir ces derniers, il n'est nullement exigé par le législateur que soit démontré, au niveau de l'infraction d'origine, que l'initié soit, au cas d'espèce et selon la poursuite, Alain X... ait connu l'identité des tiers susceptibles de réaliser indirectement des opérations à l'aide de renseignements qu'il donnait ; qu'il suffit, en effet, que l'initié ait eu conscience, au préalable, de ce que les informations qu'il livrait étaient destinées à être utilisées par des opérateurs sur le marché ; qu'il convient en conséquence de tenir comme sans incidence toute l'argumentation contraire développée relativement à ce point et selon laquelle il y aurait lieu de démontrer un dol spécial pour les recels dits du deuxième degré, tels que reprochés au prévenu ; qu'il suffit, en effet, au vu du texte légal ci-dessus rappelé servant de fondement à la poursuite, que soit rapportée la preuve, dès lors que serait établi le délit d'initié, que les receleurs attraits en la cause, et qui tous sont intervenus sur le marché munis de ces renseignements, aient su, quant à eux, l'origine frauduleuse des informations qu'ils ont ainsi utilisées ;

" et aux motifs qu'Alain X... aurait transmis l'information à Roger-Patrice L... ; que Max S... a reçu de Roger-Patrice L... les informations relatives aux titres Triangle ; qu'abstraction faite de l'argumentation concernant la nécessité de prouver un dol spécial vis-à-vis du recel reproché au prévenu et que la Cour a écartée, Max S... serait mal venu à soutenir que l'information reçue de Roger-Patrice L... n'aurait pas été précise, significative et qu'elle aurait été publique ; que le caractère massif de l'ordre d'achat donné par le prévenu, dont la passation démontre qu'au départ le titre Triangle était inconnu de lui, infirme à l'évidence la thèse de l'intéressé selon laquelle il n'aurait bénéficié que d'un " tuyau ", étant de surcroît observé que Max S... n'a eu pour seule tâche, avant de mettre à exécution son ordre d'achat, que de s'assurer de l'identification du titre par recherche du code de cotation ; qu'apparaît controuvée l'argumentation de Robert P... selon laquelle l'achat personnel de 2 000 actions effectué pour son compte aurait obéi à la seule observation du cours du titre, dès lors qu'il est constant que le prévenu était, antérieurement à cette opération à lui reprochée, intervenu dans celles passées par son intermédiaire à partir du 15 novembre dans l'après-midi dans le cadre de la Compagnie parisienne de placements dont il animait la codirection avec S... ; que c'est ainsi à juste titre que le prévenu a, en toute connaissance, utilisé, tant à son profit personnel qu'à celui de la CPP, des informations qu'il savait privilégiées et ayant été frauduleusement exploitées sur le marché ;

" alors, d'une part, que le délit de divulgation d'informations privilégiées, tel que défini par l'article 10-1 de l'ordonnance n° 67-833 du 28 septembre 1967, dans la rédaction qui résultait de la loi du 3 janvier 1983 modifiée par la loi n° 88-70 du 23 janvier 1988, impliquait que le détenteur d'une action privilégiée ne se rendait coupable du délit de divulgation de cette information qu'à condition qu'il ait sciemment permis de réaliser sur le marché, soit directement, soit par personnes interposées, une ou plusieurs opérations avant que le public n'en ait connaissance ; que l'intention coupable exigée par ce texte suppose nécessairement que l'auteur de la divulgation ait connu le bénéficiaire de la divulgation, faute de quoi il n'aurait pu être assuré de lui permettre de réaliser, soit directement, soit par personnes interposées, une ou plusieurs opérations ; qu'en effet, seule la connaissance du bénéficiaire de la divulgation est susceptible de permettre à son auteur de s'assurer que le bénéficiaire est en mesure d'opérer avant que le public n'ait eu connaissance de l'information ; que le délit de divulgation d'informations privilégiées impliquait donc bien un dol spécial, contrairement à ce qu'a décidé la Cour ;

" alors, d'autre part, que le recel est un délit intentionnel ; que l'intention coupable réside dans la connaissance de l'origine frauduleuse de la chose recelée, en l'espèce actuelle, une information privilégiée ; que le demandeur avait fait valoir dans ses conclusions devant la cour d'appel, et que la Cour a admis, que c'est S... qui avait reçu de L... un conseil boursier ; qu'ayant appris seulement le 15 novembre 1988 dans l'après-midi, à l'occasion d'un entretien téléphonique, que S... avait passé un ordre pour 6 millions de francs sur le titre Triangle, il avait, ignorant tout de ce titre, tenté d'avoir eu des informations, et qu'il s'était efforcé pendant toute la période de limiter le cours auquel les titres Triangle devaient être achetés par la Compagnie parisienne de placements ; que rien dans son attitude ne révélait la connaissance par lui d'une quelconque information privilégiée ; que, si Robert P... avait disposé à l'époque d'une telle information, il est évident que, loin de limiter la quantité des titres à acheter et le cours limite auquel les titres pouvaient être achetés, il aurait donné des instructions en vue d'acheter un maximum de titres, et n'aurait pas imposé des limites de cours aussi strictes que celles imposées, en accord du reste avec S..., l'accord de ce dernier pour limiter tant la quantité des achats que le cours auquel les titres devaient être achetés ne pouvant que le conforter dans l'idée de la régularité de l'opération ; qu'en se contentant d'affirmer que Max S... avait eu des informations privilégiées et que ne pouvait être retenue sa thèse selon laquelle il n'aurait bénéficié que d'un tuyau et qu'il est constant que le prévenu P... était, antérieurement à l'opération qu'il avait réalisée pour son compte portant sur 2 000 actions en Suisse, intervenu en toute connaissance de cause en utilisant, tant à son profit personnel qu'à celui de la CPP, des informations qu'il savait privilégiées, sans énoncer aucun fait précis d'où résulterait la connaissance que le demandeur aurait eue du caractère privilégié de l'information, la cour d'appel n'a pas suffisamment motivé sa décision " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour déclarer Samir T... coupable de délit d'initié et Charbel F... coupable de recel de ce même délit, les juges retiennent que les achats et ventes de titres de la société Triangle, effectués par la société Socofinance dirigée par Charbel F..., ont coïncidé avec les phases successives de développement, puis de rupture, de reprise et enfin de conclusion des négociations auxquelles participait Samir T..., qui a sciemment transmis à Charbel F... les informations dont il disposait, " afin de lui permettre de réaliser des opérations sur le titre Triangle " ;

Que, pour déclarer Alain X... coupable de délit d'initié, l'arrêt attaqué, par motifs propres et adoptés des premiers juges, relève qu'en sa qualité de directeur de cabinet du ministre de l'Économie et des Finances, ce prévenu, après avoir lui-même organisé l'une des premières réunions entre les dirigeants des 2 sociétés, " a été informé très régulièrement des pourparlers entre Triangle et N... ", qu'il a eu, le 9 novembre 1988, son attention appelée sur leur issue imminente par un des proches collaborateurs du président du conseil d'administration de N..., et que ce dernier, le 14 novembre vers 8 h 30, lui a personnellement demandé un rendez-vous avec le ministre ;

Que la cour d'appel ajoute qu'Alain X..., qui " cultivait avec Roger-Patrice L... des liens d'étroite amitié ", alors que Samir T... ne faisait pas partie des relations habituelles de celui-ci, est la seule personne qui ait pu lui transmettre le 14 novembre 1988 avant 15 h moment où Roger-Patrice L... a communiqué l'information privilégiée à Max S... des renseignements suffisamment précis pour pouvoir être immédiatement exploités sur le marché ; qu'elle en déduit qu'il a été " l'informateur de Roger-Patrice L..., et ce, dans le seul but de lui permettre de réaliser des opérations sur le marché " ;

Que, si elle relève qu'il a obtenu des renseignements plus facilement de Samir T..., à la faveur des relations amicales existant entre eux, que des dirigeants de N..., elle souligne néanmoins qu'à ses propres dires, il " se devait, de par ses fonctions, d'être particulièrement bien informé sur la situation et les perspectives financières et industrielles du groupe N..., ressortissant au secteur public " ;

Que, pour déclarer Robert P... coupable de recel du délit d'initié commis par Alain X..., la juridiction du second degré énonce, par motifs adoptés, que " la précipitation avec laquelle Max S... et Robert P... ont lancé, pour un montant de 6 millions de francs, des ordres d'achat " sur un titre qu'ils ne connaissaient pas auparavant " ne peut s'expliquer que par leur connaissance de l'origine frauduleuse des informations détenues et transmises par Roger-Patrice L... " ; qu'elle écarte, dès lors, son argumentation selon laquelle son achat personnel de 2 000 actions obéissait à la seule observation du cours du titre, et retient " que le prévenu a, en toute connaissance de cause, utilisé, tant à son profit personnel qu'à celui de la CPP, des informations qu'il savait privilégiées " ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, déduites de son appréciation souveraine des faits de la cause et échappant au contrôle de la Cour de Cassation, la cour d'appel, qui a répondu sans insuffisance aux articulations essentielles des conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision sans encourir la censure ;

Qu'en effet, d'une part, le délit d'initié est caractérisé, à l'égard de toute personne qui, disposant, à l'occasion de l'exercice de sa profession ou de ses fonctions, d'informations privilégiées sur les perspectives d'évolution d'une valeur mobilière, permet sciemment à des tiers de réaliser des opérations sur le marché avant que le public ait connaissance de ces informations, sans qu'il soit nécessaire qu'elle connaisse l'identité des opérateurs, ni les modalités des opérations réalisées ;

Que, d'autre part, si le recel ne peut résulter de la simple détention d'informations privilégiées, il est caractérisé à l'égard de celui qui, réalisant, en connaissance de cause, des opérations sur le marché avant que ces informations soient connues du public, bénéficie du produit du délit d'initié ainsi consommé ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

VI. Sur le neuvième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 prise en sa rédaction issue de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988, 132-19 du nouveau Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable du délit d'initié et l'a condamné à une peine d'emprisonnement de 2 ans dont 1 avec sursis ainsi qu'à une amende de 20 000 francs ;

" aux motifs que Samir T... et Alain X... doivent être regardés comme ayant permis l'ensemble des opérations frauduleuses en tant qu'initiés ; que compte tenu de l'ampleur des opérations illicitement réalisées à partir des renseignements privilégiés communiqués, la Cour estime devoir les sanctionner tous 2, en raison de la gravité des faits retenus à leur charge et nonobstant leur absence d'antécédents judiciaires, d'une même peine d'emprisonnement assortie seulement pour partie d'un sursis ;

" alors qu'aux termes des dispositions de l'article 132-19 du nouveau Code pénal, constitutives d'une loi de procédure immédiatement applicable selon l'article 112-2- 2o du même Code, toute peine d'emprisonnement prononcée sans sursis par une juridiction correctionnelle doit être spécialement motivée ; que ne répond pas à cette exigence l'arrêt qui se borne à relever la gravité des faits retenus à la charge du prévenu, cette énonciation ne précisant ni les éléments de la personnalité du prévenu, ni les circonstances de l'infraction explicitant le choix d'une peine d'emprisonnement ferme, de sorte que la décision n'est pas légalement justifiée " ;

Sur le dixième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967 prise en sa rédaction issue de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988, 8 de la Déclaration des droits de l'homme, 121-1 du nouveau Code pénal, du principe de la personnalité des peines, 591 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué après avoir déclaré le prévenu coupable du délit d'initié, l'a condamné à la peine d'amende de 20 000 000 de francs ;

" aux motifs qu'il doit être condamné à une peine d'amende proportionnée au profit réalisé résultant des opérations qu'il a permises par la divulgation des informations privilégiées qu'il détenait ;

" alors que, d'une part, seul un profit personnellement réalisé par l'initié peut autoriser le tribunal à prononcer une peine d'amende supérieure au maximum de 5 000 000 francs dans la limite du quadruple du montant du profit éventuellement réalisé ; que tel n'est pas le cas lorsque l'initié est déclaré coupable pour avoir permis à un tiers de réaliser sur le marché des opérations qui ne bénéficient qu'au patrimoine du donneur d'ordre ; qu'aucune des énonciations de l'arrêt attaqué ne constate que Samir T... a tiré profit des opérations réalisées sur le titre Triangle, de sorte qu'en le condamnant à une peine d'amende proportionnée à un profit qui lui demeure étranger, l'arrêt attaqué a faussement appliqué l'article susvisé et porté atteinte au principe de la personnalité des peines ;

" alors que, d'autre part et en tout état de cause, la peine d'amende proportionnelle au profit est arbitraire si les opérations réalisées sur le titre sont évaluées de manière globale sans élément concret et précis ; qu'en s'abstenant de chiffrer le nombre d'opérations réalisées aux différentes dates comprises entre le 18 août 1988 et le 11 novembre 1988 et de préciser le bénéfice exact procuré par chaque opération en relation directe avec une information privilégiée qui aurait été communiquée par le prévenu, l'arrêt attaqué a prononcé une peine d'amende dépourvue de base légale " ;

Sur le onzième moyen de cassation proposé par la société civile professionnelle Waquet, Farge et Hazan et par la société civile professionnelle Piwnica et Molinié en faveur de Samir T... et pris de la violation des articles 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, 460 du Code pénal, 132-19 et 612-1 (nouveaux) du Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que la nullité de l'arrêt en ce qui concerne la déclaration de culpabilité de Charbel F... devra entraîner la cassation au profit de Samir T... ;

" alors que seule la réalisation d'une opération sur le marché par Charbel F... est de nature à rendre punissable, à la supposer établie, la prétendue communication d'informations privilégiées par Samir T... ; que par suite la cassation à intervenir sur le pourvoi de Charbel F... :

" à l'encontre duquel aucun délit de recel ne peut être légalement caractérisé ;

" qui a été condamné à une peine d'amende supérieure au maximum légal ;

" pour lequel une peine de prison ferme est prononcée dans le dispositif en complète contradiction avec les motifs de l'arrêt qui excluent toute peine de prison ferme et sans la motivation spéciale exigée par l'article 132-19 (nouveau) du Code pénal ;

" entraînera l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt attaqué à l'égard de Samir T... " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu, d'une part, que, pour condamner Samir T... à la peine de 2 ans d'emprisonnement, dont 1 an avec sursis, la cour d'appel se réfère à " l'ampleur des opérations illicitement réalisées à partir des renseignements privilégiés communiqués " par lui, et à " la gravité des faits retenus à sa charge " ;

Qu'en l'état de ces énonciations, qui répondent aux exigences de l'article 132-19 du Code pénal, les juges du second degré ont justifié le prononcé d'une peine d'emprisonnement assortie seulement pour partie du sursis ;

Attendu, d'autre part, que, les juges ayant constaté que les opérations réalisées par Charbel F... grâce aux informations privilégiées que lui a communiquées Samir T... ont entraîné un profit de 21 millions de francs, et dès lors que, selon l'article 10-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, l'auteur d'un délit d'initié peut être puni d'une amende proportionnelle au profit obtenu, même s'il n'a pas réalisé lui-même les opérations sur le marché, la peine de 20 millions de francs d'amende qu'ils ont prononcée contre le demandeur est justifiée ;

Attendu, enfin, que Samir T... est sans qualité pour se prévaloir de causes de nullité de l'arrêt concernant uniquement un autre prévenu ;

D'où il suit que les moyens ne peuvent qu'être écartés ;

VII. Mais sur le cinquième moyen de cassation proposé par Me Choucroy en faveur de Charbel F... et pris de la violation des articles 460 de l'ancien Code pénal et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a condamné Charbel F..., déclaré coupable de recel de délit d'initié, à la peine de 18 mois d'emprisonnement dont 12 mois avec sursis et à une amende de 5 000 000 francs ;

" aux motifs que la Cour estime devoir sanctionner par une peine d'emprisonnement assortie du sursis ainsi que d'une peine d'amende chacun des prévenus autres que Samir T... et Alain X... condamnés à une peine d'emprisonnement assortie seulement pour partie du sursis, à l'exception de Jean-Pierre A... qui ne sera condamné qu'à une peine d'amende ; qu'en ce qui concerne Charbel F..., la Cour dépassera dans la mesure spécifiée au dispositif de l'arrêt, en raison du montant du profit réalisé, le taux de l'amende fixé par l'article 460 de l'ancien Code pénal ;

" alors que, d'une part, après avoir déclaré dans les motifs de sa décision que, contrairement à Samir T... et Alain X..., condamnés à des peines d'emprisonnement assorties seulement pour partie du sursis, les autres prévenus, à l'exception de Jean-Pierre A..., seraient condamnés à des peines d'emprisonnement assorties du sursis, la Cour s'est mise en contradiction avec elle-même en prononçant, dans le dispositif de son arrêt, une peine d'emprisonnement partiellement ferme à l'encontre de Charbel F... ;

" alors que, d'autre part, si l'article 460 de l'ancien Code pénal applicable aux faits de la cause, qui sanctionnait le recel par une peine d'emprisonnement et une amende de 10 000 à 2 500 000 francs, prévoyait que le maximum de cette amende pouvait être élevée jusqu'à la moitié de la valeur des objets recélés, la Cour, qui n'a pas précisé la valeur du délit d'initié qui aurait été recelé par Charbel F..., mais a seulement invoqué le montant du profit réalisé pour infliger à ce prévenu une amende égale au double du maximum prévu par cet article, sans même avoir évalué le montant de ce profit ni précisé qu'il avait été réalisé par Charbel F... ou par l'ensemble des prévenus, a privé de toute base légale le chef de son arrêt condamnant le demandeur au paiement d'une amende de 5 000 000 francs " ;



Vu lesdits articles ;

Attendu que, selon l'article 132-19 du Code pénal, en matière correctionnelle, la juridiction ne peut prononcer une peine d'emprisonnement sans sursis qu'après avoir spécialement motivé le choix de cette peine ;

Attendu que le dispositif de l'arrêt attaqué porte notamment condamnation de Charbel F... à 18 mois d'emprisonnement dont 12 mois avec sursis ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi une peine d'emprisonnement pour partie sans sursis, sans s'expliquer sur le choix de celle-ci, les juges ont méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;

Et attendu qu'en imposant une motivation spéciale relative à l'emprisonnement, l'article 132-19 conduit à écarter l'indivisibilité entre la peine irrégulièrement prononcée et la déclaration de culpabilité, lorsque cette dernière n'encourt pas elle-même la censure ;

D'où il suit que la cassation est encourue, et qu'elle sera limitée aux peines prononcées contre ce demandeur ;

Par ces motifs :

Sur les pourvois d'Alain X..., de Samir T... et de Robert P... :

Les REJETTE ;

Sur le pourvoi de Charbel F... :

CASSE ET ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 6 juillet 1994, en ses seules dispositions concernant les peines d'emprisonnement et d'amende prononcées contre ce prévenu, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.





Civ.2 25 octobre 1995 n° 92-21.352

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Pierre X..., demeurant ..., en cassation d'un jugement rendu le 3 juillet 1992 par le tribunal d'instance de Tours, au profit de la société Esthétic Auto, dont le siège est ..., défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 juin 1995, où étaient présents : M. Zakine, président, M. Chardon, conseiller rapporteur, MM. Chevreau, Delattre, Laplace, Pierre, Buffet, Dorly, Séné, Colcombet, Mme Solange Gautier, conseillers, MM. Bonnet, Mucchielli, conseillers référendaires, M. Tatu, avocat général, Mme Laumône, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Chardon, les observations de la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat de M. X..., les conclusions de M. Tatu, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Tours, 3 juillet 1992), que M. X..., sur opposition d'une ordonnance d'injonction de payer, a été condamné à verser une certaine somme à la société Esthétic Auto (la société) en règlement d'une facture de réparations effectuées sur son automobile ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief au jugement d'avoir rejeté la demande de sursis à statuer de M. X... alors, selon le moyen, que la juridiction civile était tenue de surseoir à statuer puisqu'avant que le jugement ne soit rendu, une information avait été ouverte sur réquisitoire introductif du Parquet et que le juge n'avait pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 4 du Code de procédure pénale, en ne recherchant pas si sa plainte n'avait pas donné lieu à une information ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni du jugement ni des productions que M. X... ait soutenu qu'une information avait été ouverte ;
Que, dès lors, c'est à bon droit que le Tribunal retient que le dépôt d'une plainte au Parquet est insuffisante et qu'il a ainsi justifié sa décision ;
D'où il suit que ce moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir condamné M. X... au paiement d'un complément de facture alors, selon le moyen, que, d'une part, la facture vise la "peinture complète", que le Tribunal a donc dénaturé les termes de la facture et violé l'article 1134 du Code civil, que, d'autre part, il appartenait au garagiste de prouver que ces travaux de "peinture complète du véhicule" excluaient la peinture intérieure et que le juge a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du Code civil, alors que, subsidiairement, en ne s'expliquant pas sur les mentions de la facture visant la "peinture complète", le juge a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil et enfin, d'avoir dit que M. X... n'apportait aucun élément qui permette de déterminer l'ampleur d'un éventuel défaut tenant à un voile au tiers avant et le coût de sa reprise, alors qu'il appartenait au juge d'évaluer le préjudice en résultant pour M. X... et qu'en se refusant à procéder à cette évaluation, le juge n'avait pas rempli son office et violé l'article 4 du Code civil ;
Mais attendu que c'est sans inverser la charge de la preuve, sans modifier l'objet du litige, et hors de toute dénaturation que le Tribunal a retenu dans l'exercice de son pouvoir souverain d'apprécier la valeur et la portée des documents de la cause que M. X..., au soutien de l'exception d'inexécution soulevée par lui, ne rapportait pas la preuve de cette inexécution ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X..., envers la société Esthétic Auto, aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, prononcé et signé par M. le conseiller Chevreau, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du nouveau Code de procédure civile, en remplacement de M. le président empêché en son audience publique du vingt-cinq octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze.
1385




Crim. 25 octobre 1995 n° 94-85.489

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-cinq octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ALDEBERT, les observations de Me BALAT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... François, contre l'arrêt de cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, du 21 octobre 1994, qui, pour stationnement irrégulier d'une caravane, l'a condamné à 4 000 francs d'amende ;
Vu mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles L. 146-l, L. 146-6, R. 443-9 et R.
443-9-1 du Code de l'urbanisme, 111-4 du nouveau Code pénal et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré François Y... coupable d'infraction aux dispositions du plan d'occupation des sols de Longeville-sur-Mer et à celles de la loi n 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, pour avoir stationné une caravane sur un terrain lui appartenant en méconnaissance de ces dispositons ;
"aux motifs que le terrain sur lequel a été constaté le stationnement de caravane est situé dans une zone de protection de l'environnement au sens des dispositions des articles L. 146-4 à L. 146-9 du Code de l'urbanisme ;
que la forêt de Longeville-sur-Mer, où se trouve situé le terrain en cause, constitue l'un des massifs les plus importants du littoral régional ;
que c'est dès lors à bon droit que le POS a interdit dans la zone concernée, classée NDe L. 146-6, tout stationnement de caravane quelle qu'en soit la durée ;
que cette interdiction est conforme à l'article L. 146-6 et ne porte pas une atteinte irrégulière ou excessive au droit de propriété ;
que le classement de la zone considérée en catégorie NDe L. 146-6 n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
que le prévenu ne précise pas en quoi résiderait la rupture du principe d'égalité qu'il invoque, aucune démonstration n'étant apportée du fait que certains terrains présentant des caractéristiques comparables au sien au regard de l'objectif poursuivi de protection de l'environement ne seraient pas soumis à l'interdiction de stationner une caravane ;
qu'il s'ensuit que l'exception d'illégalité soulevée par le prévenu doit être écartée ;
"alors que, d'une part, si les dispositons de la loi n 86-2 du 3 janvier 1986 dite "loi littoral" permettent d'interdire l'ouverture d'un terrain de camping ou de stationnement de caravanes, elles n'interdisent pas la pratique isolée du camping ou du caravaning, en particulier à son domicile ;
que, selon les dispositions des articles R. 443-9 et R. 443-9-1 du Code de l'urbanisme, le stationnement des caravanes pratiqué isolément est simplement interdit sur les rivages de la mer ou dans un site classé ou inscrit, ce qui n'était pas le cas en l'occurrence, ou dans les bois, forêts et parcs classés par un plan d'occupation des sols comme espaces boisés à conserver ;
qu'il appartenait donc aux juges du fond de rechercher si le terrain de François Y... était situé dans une zone classée espace boisé à conserver, le simple constat que la forêt de Longeville-sur-Mer "constitue l'un des massifs les plus importants du littoral régional" étant insuffisant à cet égard ;
"alors que, d'autre part, les juges du fond devaient rechercer si la séparation de la forêt de Longeville-sur-Mer en deux zones distinctes, l'une classée NDr L. 146-6 constructible et l'autre classée NDe L. 146-6 où tout mode d'occupation du sol, notamment le stationnement d'une caravane, est interdit, n'était pas constitutive d'une rupture du principe d'égalité entre les propriétaires de parcelles situées dans cette forêt, entachant la légalité du plan d'occupation des sols" ;
Attendu qu'il ne ressort ni du jugement ni d'aucunes conclusions que le prévenu ait présenté avant toute défense au fond une exception prise de l'illégalité de l'interdiction de stationnement de caravane contenue dans le plan d'occupation des sols ;
Attendu que, si la cour d'appel a cru à tort devoir y répondre au lieu de lui opposer la forclusion édictée par l'article 386 du Code de procédure pénale, le moyen, qui, en sa seconde branche, reprend ladite exception et invoque, en outre, à l'appui de celle-ci, pour la première fois devant la Cour de Cassation, la violation de l'article R. 443-9-1 du Code de l'urbanisme, doit être déclarée irrecevable ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Simon conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Aldebert conseiller rapporteur, MM. Blin, Carlioz, Grapinet, Mme Chevallier conseillers de la chambre, Mmes X..., Verdun conseillers référendaires, M. Perfetti avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 24 octobre 1995 n° 94-85.993

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-quatre octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller SIMON, les observations de Me ROUE-VILLENEUVE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Christian, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'AIX-en-PROVENCE, en date du 13 octobre 1994 qui a prononcé sur un incident contentieux relatif à l'exécution d'une condamnation infligée par la cour d'assises des BOUCHES-du-RHONE le 17 février 1994 ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 716-4, 592, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, violation de la loi ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit que sera déduite de la peine prononcée par la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, le 17 février 1994 à l'encontre de Christian X..., la détention subie par ce dernier en Espagne à compter du 21 septembre 1989 ;
"aux motifs qu'il résulte d'une note émanant des autorités judiciaires espagnoles que si X... a fait l'objet d'une procédure d'extradition, il avait été, dès son interpellation le 19 septembre 1987, poursuivi par les autorités judiciaires espagnoles pour délit de détention d'armes et condamné à ce titre à une peine subie du 19 septembre 1987 au 20 octobre 1989, en sorte qu'il ne pouvait se prévaloir de l'article 716-4 du Code de procédure pénale pour la durée de ladite détention, l'imputation ne devant être précomptée que le 21 septembre 1989 ;
"alors que, d'une part, l'article 716-4 du Code de procédure pénale dispose que doit être déduite de la durée de la peine prononcée, la période de détention subie hors de France en exécution d'une demande d'extradition, que ce texte d'une portée générale ne comporte aucune exception ;
qu'en refusant l'imputation de la durée de cette détention, en relevant la circonstance que l'intéressé avait, par ailleurs, fait l'objet d'une détention au titre de poursuites espagnoles, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
"alors que, d'autre part, et en toute hypothèse, en se fondant sur une simple note, sans indiquer, en vertu de quel titre Christian X... avait été détenu en Espagne, à compter du 19 septembre 1987, la chambre d'accusation n'a pas donné de base légale à sa décision ;
"alors qu'enfin, la cour d'appel, qui avait constaté que la peine avait été subie au titre d'une sentence espagnole entre le 19 septembre 1987 et le 20 octobre 1989, ne pouvait, sans entacher sa décision de motifs, énoncer que l'imputation légale devait être précomptée le 21 septembre 1989" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le 28 septembre 1987, alors qu'il était incarcéré en Espagne au titre d'une poursuite exercée contre lui dans ce pays pour détention d'armes, Christian X... a reçu notification d'une amende d'extradition présentée par les autorités françaises pour l'exécution d'un mandat d'arrêt international délivré du chef de recel de vols aggravés ;
que l'extradition a été accordée, la remise de l'intéressé à la France étant toutefois ajournée jusqu'à l'expiration de la peine qui lui serait infligée en Espagne ;
que X... a été ensuite condamné et a subi sa peine jusqu'au 20 septembre 1989 ;
que, le 26 septembre 1989, il a été remis aux autorités judiciaires françaises ;
Attendu que, par requête du 4 mars 1994, Christian X... a demandé à la chambre d'accusation de dire qu'en application de l'article 716-4 du Code de procédure pénale, la détention qu'il avait subie en Espagne à compter du 28 septembre 1987, date de la notification de la demande d'extradition, serait intégralement déduite de la peine de 8 ans de réclusion criminelle prononcée contre lui par la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, le 17 février 1994 ;
Attendu qu'à bon droit, la chambre d'accusation a, par l'arrêt attaqué, rejeté cette prétention et limité la réduction sollicitée à la période d'incarcération postérieure à l'expiration de la peine prononcée par les autorités judiciaires espagnoles, soit à compter du 21 septembre 1989 ;
qu'en effet, pour l'application de l'article 716-4, alinéa 2 du Code de procédure pénale, seule doit s'imputer sur la peine prononcée, la détention subie hors de France en exécution de la demande d'extradition, à l'exclusion de l'incarcération qui pourrait être subie en vertu d'une condamnation prononcée par les autorités judiciaires étrangères ;
Attendu que, par ailleurs, contrairement à ce que soutient la deuxième branche du moyen, la note sur laquelle s'est fondée la chambre d'accusation indique que X... a purgé sa peine en exécution d'une condamnation prononcée le 29 août 1988 par la Cour provinciale de Cordoue ;
qu'enfin, il résulte des pièces de la procédure que la peine a expiré le 20 septembre 1989 ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Milleville conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Simon conseiller rapporteur, MM. Guerder, Pinsseau, Joly, Pibouleau, Mme Chevallier, M. Farge conseillers de la chambre, Mmes Batut, Fossaert-Sabatier conseillers référendaires, M. Perfetti avocat général, Mme Arnoult greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 24 octobre 1995 n° 94-85.994

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-quatre octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller SIMON, les observations de Me ROUE-VILLENEUVE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Stéphane, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 13 octobre 1994 qui a prononcé sur un incident contentieux relatif à l'exécution d'une condamnation infligée par la cour d'assises des BOUCHE-DU-RHONE, le 17 février 1994 ;
Vu les mémoires personnel et ampliatif produits ;
Attendu que le mémoire personnel, établi par le demandeur non condamné pénalement dans la présente procédure, n'a pas été déposé au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée mais a été transmis directement à la Cour de Cassation ;
Que, dès lors, ne répondant pas aux exigences des articles 584 et 585 du Code de procédure pénale, il ne saisit pas la Cour de Cassation des moyens qu'il pourrait contenir ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour le demandeur et pris de la violation des articles 716-4, 592, 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale, violation de la loi ;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit que sera déduite de la peine prononcée par la Cour d'Assises des BOUCHE-DU-RHONE le 17 février 1994 à l'encontre de Stéphane X..., la détention subie par ce dernier en Espagne à compter du 27 octobre 1989 ;
"aux motifs qu'il résulte d'une note émanant des autorités judiciaires espagnoles que si Stéphane X... a fait l'objet d'une procédure d'extradition, il avait été, dès son interpellation le 19 septembre 1987, poursuivi par les autoritaires judiciaires espagnoles pour délit de détention d'armes et condamné à ce titre à une peine subie du 19 septembre 1987 au 26 octobre 1989, en sorte qu'il ne pouvait se prévaloir de l'article 716-4 du Code de procédure pénale pour la durée de ladite détention ;
l'imputation ne devant être précomptée que le 27 octobre 1989 ;
"alors que, d'une part, l'article 716-4 du Code de procédure pénale dispose que doit être déduite de la durée de la peine prononcée, la période de détention subie hors de France en exécution d'une demande d'extradition, que ce texte d'une portée générale ne comporte aucune exception ;
qu'en refusant l'imputation de la durée de cette détention, en relevant la circonstance que l'intéressé avait par ailleurs fait l'objet d'une détention au titre de poursuites espagnoles, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
"alors que, d'autre part, et en toute hypothèse, en se fondant sur une simple note, sans indiquer en vertu de quel titre Stéphane X... avait été détenu en Espagne, à compter du 19 septembre 1987, la chambre d'accusation n'a pas donné de base légale à sa décision" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que le 28 septembre 1987, alors qu'il était incarcéré en Espagne au titre d'une poursuite exercée contre lui dans ce pays pour détention d'armes, Stéphane X... a reçu notification d'une demande d'extradition présentée par les autorités françaises pour l'exécution d'un mandat d'arrêt international délivré du chef de recel de vols aggravés ;
que l'extradition a été accordée, la remise de l'intéressé à la France étant toutefois ajournée jusqu'à l'expiration de la peine qui lui serait infligée en Espagne ;
que Stéphane X... a été ensuite condamné et a subi sa peine jusqu'au 26 octobre 1989 ;
que, le 31 octobre 1989, il a été remis aux autorités judiciaires françaises ;
Attendu que, par requête du 4 mars 1994, Stéphane X... a demandé à la chambre d'accusation de dire qu'en application de l'article 716-4 du Code de procédure pénale, la détention qu'il avait subie en espagne à compter du 28 septembre 1987, date de la notification de la demande d'extradition, serait intégralement déduite de la peine de 8 ans de réclusion criminelle prononcée contre lui par la cour d'assises des Bouches-du-Rhône le 17 février 1994 ;
Attendu qu'à bon droit la chambre d'accusation a, par l'arrêt attaqué, rejeté cette prétention et limité la réduction sollicitée à la période d'incarcération postérieure à l'expiration de la peine prononcée par les autorités judiciaires espagnoles soit à compter du 27 octobre 1989 ;
qu'en effet, pour l'application de l'article 716-4, alinéa 2 du Code de procédure pénale, seule doit s'imputer sur la peine prononcée, la détention subie hors de France en exécution de la demande d'extradition, à l'exclusion de l'incarcération qui pourrait être subie en vertu d'une condamnation prononcée par les autorités judiciaires étrangères ;
Attendu que, par ailleurs, contrairement à ce que soutient la seconde branche du moyen, la note sur laquelle s'est fondée la chambre d'accusation indique que Stéphane X... a purgé sa peine en exécution d'une condamnation prononcée le 29 août 1988 par la cour provinciale de Cordoue ;
D'où il suit que le moyen qui, en sa seconde branche, manque en fait, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Milleville conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Simon conseiller rapporteur, MM. Guerder, Pinsseau, Joly, Pibouleau, Mme Chevallier, M. Farge conseillers de la chambre, Mmes Batut, Fossaert-Sabatier conseillers référendaires, M. Perfetti avocat général, Mme Arnoult greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Soc. 24 octobre 1995 n° 94-42.872

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
I - Sur le pourvoi n S 94-42.872 formé par la société Paravision International, dont le siège est ..., défenderesse au pourvoi n U 94-42.966 ;
II - Sur le pourvoi n U 94-42.966 formé par Mme Laure Y..., demeurant ..., défenderesse au pourvoi n S 94-42.872 ;
en cassation d'un arrêt rendu le 27 avril 1994 par la cour d'appel de Paris (22ème chambre, section A),
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 11 juillet 1995, où étaient présents : M. Lecante, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Carmet, conseiller rapporteur, M. Brissier, conseiller, Mme Brouard, conseiller référendaire, M. Kessous, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Carmet, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la société Paravision International, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mlle Y..., les conclusions de M. Kessous, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu leur connexité, joint les pourvois n S 94-42.872 et U 94-42.966 ;
Attendu que Mme Y... a été engagée le 18 mars 1986 par la société compagnie d'entreprise et de gestion ;
qu'elle a eu la qualité de chef des services administratifs et financiers, puis celle de secrétaire générale ;
qu'en mai 1988 la société CDG a changé d'actionnariat la totalité de ses actions ayant été acquise par la société Paravision ;
que le 29 août 1988 la situation de Mme Y... aurait fait l'objet d'un avenant à son contrat de travail selon lequel son nouveau titre était celui de "directeur des comptables et adjoint à la direction financière, cadre supérieur", l'indemnité de licenciement à laquelle elle pourrait prétendre serait calculée sur une ancienneté de 17 ans en 1988 et enfin elle aurait droit à un préavis de 10 mois et n'aurait à en effectuer que trois ;
qu'après le licenciement de Mme Y..., intervenu le 9 juillet 1990, estimant que ce document avait été fabriqué après coup, la société Paravision a déposé une plainte pour faux, usage de faux et escroquerie actuellement en cours d'instruction ;
que par arrêt du 20 octobre 1993 faisant l'objet du pourvoi n Y 93-46.485 la cour d'appel de Paris a décidé que Mme Y... n'avait pas commis de faute grave et a ordonné la réouverture des débats pour statuer sur le caractère fondé du licenciement ainsi que sur le montant des indenmités de licenciement et de préavis ;
que par l'arrêt attaqué en date du 27 avril 1994, la cour d'appel, statuant après réouverture des débats, a décidé que le licenciement procédait d'une cause réelle et sérieuse ;
que s'agissant de l'indemnité de licenciement et de préavis, elle a à nouveau sursis à statuer sur leur détermination en ce qu'elles étaient fondées sur l'avenant du 29 août 1988, jusqu'à décision définitive sur la procédure pénale mais a condamné la société à payer à la salariée sur la base d'une ancienneté de 10 ans et de la qualification d'un cadre de catégorie A, en exécution de la convention collective applicable ;
Sur le moyen unique du pourvoi n U 94-42.966 formé par la salariée :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse ;
alors, selon le moyen, que d'une part, le manquement à l'obligation de loyauté à l'égard d'un employeur se caractérise par la dissimulation volontaire d'un fait ou d'un acte en rapport avec l'exécution du contrat de travail ou ayant une incidence sur celle-ci ;
qu'en se bornant à relever que Mme Y... aurait continué de tenir la comptabilité de son employeur à l'insu de celui-ci sans rechercher s'il s'agissait là d'une attitude volontaire ou d'une circonstance fortuite, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;
alors que, d'autre part, constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement le manquement du salarié à l'obligation de loyauté à l'égard du seul employeur ;
qu'en se fondant sur l'existence d'un conflit entre actionnaires de la société employeur, sur les déclarations de M. X..., la sentence Leguide ou encore l'attitude de la société Ariès après le licenciement de la salariée, la cour d'appel a statué par une motivation inopérante et, partant, privé derechef sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 122-4-3 du Code du travail ;
alors qu'enfin, en énonçant que la tenue de la comptabilité de la société Ariès constituait un manquement à l'obligation de loyauté à l'égard de son employeur sans caractériser en quoi cette activité avait une incidence sur l'exécution de son contrat de travail ou sur la confiance de l'employeur, l'arrêt est dépourvu de base légale au regard de l'article L. 122-14-3 du Code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel exerçant le pouvoir d'appréciation qu'elle tient de l'article L. 122-14-3 du Code du travail a décidé que le licenciement procédait d'une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le moyen unique du pourvoi n S 94-42.872 formé par l'employeur :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la salariée les indemnités de licenciement et de préavis calculées sur la base d'une ancienneté de 10 ans et la qualification de cadre A, ainsi que les congés payés afférents avec intérêts, au taux légal, alors, selon le moyen, que d'une part, lorsque le juge pénal est saisi de la question de la licéité du droit à l'indemnité de licenciement déduit du contrat, ce droit même envisagé sur une autre fondement reste indéterminé tant qu'il n'est pas statué sur la validité de l'indemnité contractuelle ;
que tout autre solution aboutit à un cumul potentiel et prohibé des indemnités contractuelles, légales ou conventionnelles ; qu'en l'espèce, la cour d'appel pouvait dès lors surseoir à statuer en raison de l'instance pénale concernant l'avenant tout en condamnant l'employeur sur le fondement de la convention collective ;
qu'aussi bien en refusant de surseoir à statuer sur le droit à l'indemnité quel que soit le fondement envisagé, ce dernier restant indéterminé tant que la décision pénale n'était pas rendue, la cour d'appel a violé les articles 1134 du Code civil et 4 du Code de procédure pénale ;
alors que d'autre part, aux termes de l'article 1150 du Code civil, le débiteur n'est tenu que des dommages et intérêts qui ont été prévus ou qu'on a pu prévoir lors du contrat, lorsque ce n'est point par son dol que l'obligation n'est point exécutée ;
que la faute intentionnelle qui prive du bénéfice de tout droit qui pourrait résulter de l'engagement obtenu grâce à cette faute, est celle qui se caractérise par la volonté de causer un préjudice ou par une intention frauduleuse caractérisée ;
qu'en l'espèce, s'il apparaissait, à l'issue de l'instruction de la plainte pénale, que la caractère frauduleux de l'acte avéré, l'avenant du 29 août 1988 révèlerait donc l'intention frauduleuse de Mme Y... d'obtenir une indemnité à laquelle la société Paravision n'avait pas consenti ;
que cette faute lourde était par l'effet du droit commun privative du droit invoqué par son auteur, à savoir le droit à l'indemnité de licenciement ;
que dès lors, en octroyant une indemnité de licenciement à Mme Y... alors qu'un doute subsistait sur le caractère frauduleux de l'avenant qu'elle invoquait, la cour d'appel n'a pas légalement fondé sa décision au regard de l'article 1150 du Code civil ;
Mais attendu d'une part, que le licenciement de la salariée ne se fondait pas sur la faute lourde ayant consisté à avoir falsifié l'avenant litigieux ;
Attendu d'autre part, qu'en se fondant sur la convention collective applicable et non pas sur l'avenant argué de faux, la cour d'appel a procédé à une exacte appréciation des indemnités dues à Mme Y... ;
que le moyen n'est pas fondé ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que l'employeur sollicite sur le fondement de ce texte l'allocation d'une somme de 15 000 francs ;
Mais attendu qu'il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande ;




Crim. 24 octobre 1995 n° 94-82.515

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-quatre octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller PIBOULEAU, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ et la société civile professionnelleWAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Z... Roger, contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 13ème chambre, du 8 avril 1994, qui, pour vol, l'a condamné, sur renvoi après cassation, à 8 mois d'emprisonnement avec sursis ainsi qu'à 15 000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et du jugement entrepris que, le 6 décembre 1968, Roger Z..., Jane X..., alors son épouse, et Denise Y..., veuve X..., ont acheté les 2 000 actions représentant le capital social de la société "Restaurant Le Florence" ;
que cette cession a été matérialisée par la remise de "certificats d'actions au porteur", qui ont été confiés à Roger Z... ;
Qu'en avril 1978, Denise Y... a fait délivrer à son gendre une sommation de lui délivrer le bordereau des actions dont elle était propriétaire ;
qu'en réponse, Roger Z... lui a fait connaître, le 3 mai 1978, qu'il était le seul propriétaire de l'ensemble des actions ;
Que, le 13 mars 1979, Jane X... et sa mère ont alors déposé plainte avec constitution de partie civile contre Roger Z... pour vol de deux actions de garantie au préjudice de l'une ou l'autre d'entre elles ; que l'information s'est terminée par une ordonnance de non-lieu confirmée par arrêt de la chambre d'accusation du 17 novembre 1983 ;
Attendu que le 23 août 1985, Jane X..., et sa mère ont déposé une seconde plainte avec constitution de partie civile contre Roger Z... pour vol de "la moitié des actions acquises en 1968" ;
qu'à l'issue de l'information, Roger Z... a été renvoyé devant le tribunal correctionnel sous la prévention de "vol de 500 actions au préjudice de Denise Y...", les faits commis au préjudice de Jane X... étant déclarés couverts par l'immunité de l'article 380,1 du Code pénal alors en vigueur ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 2, 4, 6, 8, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception invoquée par le prévenu, tirée de l'irrecevabilité de la poursuite et de l'action civile ;
"aux motifs qu'il est reproché au prévenu d'avoir commis, le 3 mai 1978, le vol de 500 actions de la société anonyme du restaurant Le Florence au préjudice de Mme Y..., veuve X... ;
que l'action a été valablement interrompue le 13 mars 1979 par le dépôt d'une première plainte visant des faits connexes, en l'occurrence le vol de deux actions ayant fait l'objet d'une plainte du 13 mars 1979 ;
quant à l'autorité de la chose jugée consécutive à cette plainte, les premiers juges ont, à juste titre, répondu que, s'il y avait identité entre les parties, ce n'était pas le cas des faits objet de la première plainte ;
"et aux motifs adoptés des premiers juges qu'il est vrai que la date de la commission des faits ne peut être que le 3 mai 1978, jour où Roger Z... a publiquement manifesté son intention de s'attribuer la propriété des cinq cents actions de Mme Y... et non le 24 septembre 1982, qui correspond à la mise au nominatif des actions, rendue obligatoire par la loi du 30 décembre 1981 ;
"alors que, d'une part, en énonçant que, par sa déclaration, énonçant qu'il était propriétaire de toutes les actions et que la partie civile n'était propriétaire d'aucune d'entre elles, le prévenu s'était rendu coupable, le 3 mai 1978, du vol de cinq cents actions au préjudice de Mme Y... qui, le 13 mars 1979, l'avait alors poursuivi pour le vol de deux actions seulement, à la suite de quoi un non-lieu était intervenu, la cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences qui s'en évinçaient, à savoir que la nouvelle plainte du 29 août 1985, relative à ce même vol portant cette fois sur 500 actions, devait être déclarée irrecevable, l'action étant prescrite ;
"alors que, de deuxième part et en toute hypothèse, cette deuxième plainte visant le même fait de vol se heurtait à la règle non bis in idem, le fait que Mme Y... eut "limité" la première fois ses poursuites au vol de deux actions seulement important peu ;
"alors que, de troisième part, en considérant que le prévenu s'était rendu coupable le 3 mai 1978 du vol de cinq cents actions au préjudice de Mme Y... qui, en 1979, n'avait poursuivi que le vol de deux actions, ce dont il résultait que le vol des cinq cents actions n'avait pas été commis à cette date et sans expliquer pourquoi, sinon, elle n'avait entamé de poursuites contre le vol des cinq cents actions que le 29 août 1985, l'arrêt n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le point de départ de la prescription ;
"alors que, de quatrième part, en ne répondant pas aux conclusions du prévenu faisant valoir que si les faits de vol étaient établis, ils ne pouvaient avoir été commis que le 6 décembre 1968 et que l'action était prescrite dès avant le 13 mars 1979, date de la première plainte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;
Attendu que pour écarter l'exception de prescription invoquée par le prévenu et tirée de ce que la plainte avec constitution de partie civile n'avait été déposée que le 23 août 1985, soit plus de trois ans après les faits reprochés, les juges énoncent que "s'il est vrai que la date de commission des faits ne peut être que le 3 mai 1978", la prescription a été valablement interrompue le 13 mars 1979, par le dépôt d'une première plainte visant des faits "connexes", cette plainte ayant notamment pour objet d'établir la qualité d'actionnaires des parties civiles ;
qu'ensuite la prescription a été suspendue jusqu'à l'arrêt du 17 novembre 1983 confirmant le non-lieu ;
Que, pour écarter également l'exception de chose jugée résultant, selon le prévenu, de cette décision de non-lieu, les juges énoncent que "l'examen des deux plaintes montre que s'il y a bien identité entre les parties en cause, il n'en est pas de même des faits, objet de ces plaintes" ;
qu'à cet égard ils précisent que l'arrêt de non-lieu concernait le vol de "deux actions de garantie" au préjudice de "Jane X... ou de Denise Y..." et que les faits étaient couverts par l'immunité de l'article 380 alors que la présente procédure vise le vol de "500 actions au porteur" au préjudice de la seule Denise Y..., "hors du champ d'application des dispositions de l'article 380,3 du Code pénal" ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, qui a nécessairement répondu aux conclusions du prévenu contestant la date des faits reprochés, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 379 du Code pénal (311-1 du nouveau Code pénal), 1321, 1984, 2279 du Code civil, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'avoir commis le vol de cinq cents actions appartenant à Mme Y... ;
"aux motifs qu'en s'attribuant publiquement, le 3 mai 1978, la propriété de ces actions ;
il s'était rendu coupable de vol ;
que Mme Y... était propriétaire de ces actions dès le 6 décembre 1968 ;
que la preuve en était rapportée par un ensemble de présomptions concordantes, peu important qu'elle n'ait pas recouru à la faculté d'opposition prévue par le décret du 11 janvier 1956 en cas de dépossession de titres au porteur ;
qu'il avait eu la détention des actions "sans que leur possession ne lui ait pas (sic) autant été transmise" ;
"alors que, d'une part, en se contentant de déclarer que le prévenu, qui s'était, par sa déclaration selon laquelle il en était seul propriétaire, attribué la propriété des actions qu'il détenait, avait commis un vol, sans caractériser à son encontre ni une quelconque soustraction, ni le caractère frauduleux de celle-ci, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"alors que, d'autre part, en s'abstenant de répondre au moyen du prévenu faisant valoir qu'il avait lui-même acquis et payé les actions sur son compte personnel, qu'il ne lui avait été donné aucun mandat de les acquérir pour le compte d'autrui, qu'il les avait gardées dans son coffre personnel et qu'il en avait toujours eu la propriété, conformément à l'article 2279 du Code civil, la cour d'appel a méconnu les textes précités ;
"alors que, de troisième part, en ne précisant pas dans quelle condition la détention matérielle des actions avait été confiée au prévenu, ce qui impliquait, s'il n'en était pas propriétaire, l'existence d'un mandat d'acquérir ces actions, non constaté par l'arrêt, celui-ci a privé sa décision de base légale ;
"alors qu'enfin, en s'abstenant de répondre au moyen du prévenu invoquant la qualité de prête-nom de la plaignante aux fins de permettre à la société de fonctionner, la simulation ayant effet entre les parties, l'arrêt a méconnu l'article 1321 du Code civil" ;
Attendu que pour déclarer Roger Z... coupable de l'infraction visée par la prévention, les juges énoncent qu'il résulte de l'ensemble des éléments de la procédure que "Denise Y... était bien, depuis le 6 décembre 1968, propriétaire de cinq cents actions au porteur de la société Restaurant Le Florence" et qu'en s'attribuant la propriété de ces actions le 3 mai 1978, Roger Z..., à qui la simple détention matérielle des certificats correspondant à ces titres avait été confiée, a frauduleusement soustrait lesdites actions ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a caractérisé, en tous ses éléments, le délit de vol dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
Que le moyen, qui ne tend qu'à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Milleville conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Pibouleau conseiller rapporteur, MM. Guerder, Pinsseau, Joly, Mme Simon, M. Farge conseillers de la chambre, Mmes Batut, Fossaert-Sabatier conseillers référendaires, M. Perfetti avocat général, Mme Arnoult greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 18 octobre 1995 n° 94-83.234

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-huit octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire VERDUN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Y... Jean-François, contre l'arrêt de la cour d'appel d'AMIENS, chambre correctionnelle, du 31 mai 1994, qui, pour homicide involontaire, délit de fuite, tentative d'escroquerie et outrage à agent de la force publique, l'a condamné à 2 ans d'emprisonnement, a constaté l'annulation de son permis de conduire et fixé à 3 ans le délai à l'expiration duquel il pourrait en solliciter un nouveau, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires ampliatif et complémentaire produits ;
Sur le moyen unique de cassation du mémoire complémentaire, pris de la violation des articles 460, 513 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation des droits de la défense ;
"en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le prévenu et son conseil ont été entendus avant les réquisitions de l'avocat général, en violation des dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale telles que entrées en vigueur à la suite de l'article 49-1 de la loi du 24 août 1993, et de l'ordre impératif de parole prévu par ce texte et par l'article 460 du Code de procédure pénale ;
que les droits de la défense ont été méconnus" ;
Attendu que si l'arrêt mentionne que Jean- François Y... appelant a présenté sa défense avant le ministère public, dans l'ordre de parole prévu par les dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale dans leur rédaction antérieure à la loi du 4 janvier 1993, il précise encore que le prévenu a eu la parole le dernier ;
Qu'en cet état, et dès lors que l'article 513 précité a été rétabli en sa rédaction initiale par la loi du 8 février 1995, l'irrégularité commise n'a pas été de nature à porter atteinte aux intérêts du demandeur ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le premier moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 105, 114, 171, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, violation des droits de la défense ;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la procédure soulevée par Jean- François Y... ;
"aux motifs qu'"en effet, Jean-François Y... a toujours nié dès son premier interrogatoire être l'auteur des faits ;
qu'aussi bien il n'existait pas d'indices suffisamment graves et concordants de culpabilité à son encontre lorsqu'il a été entendu, comme témoin, mais seulement des éléments encore incertains au sujet desquels ses explications s'avéraient nécessaires ; qu'en tout état de cause, il n'existe à son encontre aucune violation des droits de la défense" ;
"alors que le juge d'instruction ou les magistrats et officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire, ne peuvent dans le dessein de faire échec aux droits de la défense, entendre comme témoins des personnes contre lesquelles il existe des indices graves et concordants de culpabilité ;
qu'en l'espèce, les éléments de fait qui motiveront la mise en examen de Jean-François Y... étaient connus bien avant la date du 23 juin 1992 ;
que, d'ailleurs, dès le 26 janvier 1991, le procureur de la République demandait, dans son réquisitoire supplétif, l'inculpation de Jean-François Y... ;
que, cependant, divers interrogatoires et investigations ont continué d'être diligentés contre le demandeur sans que celui-ci ne puisse avoir accès au dossier ni bénéficier des droits élémentaires de la défense, notamment de l'assistance d'un défenseur ;
qu'ainsi, en continuant d'entendre Jean-François Y... comme simple témoin dans une affaire où, dès le début, il était considéré comme sérieusement impliqué, le juge d'instruction a violé les textes susvisés et la cour d'appel ne pouvait refuser d'accueillir l'exception de nullité de la procédure soulevée par Jean-François Y..." ;
Attendu qu'il ne résulte ni du jugement, ni d'aucune pièce de procédure en première instance que le prévenu ait proposé avant toute défense au fond, l'exception de nullité prise d'une prétendue inobservation des dispositions de l'article 105 du Code de procédure pénale ;
Que si la cour d'appel a cru à tort devoir répondre à cette exception, présentée pour la première fois devant elle, au lieu de lui opposer l'irrecevabilité édictée par l'article 385 du Code précité, le moyen qui fait grief aux juges du second degré de l'avoir rejetée, est irrecevable ;
Sur le deuxième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 319, 3, 405, 224 du Code pénal, L. 2, L. 14, L. 15, L. 16, L. 17, L. 1-1 et L. 1-2 du Code de la route, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-François Y... coupable d'homicide involontaire, délit de fuite, tentative d'escroquerie et outrage aux agents de la force publique ;
"aux motifs que le prévenu critique l'expertise qui a été diligentée et a consisté à comparer le fil objet du scellé n 11 (fragment végétal) avec les fils objet du scellé n 3 (chemise de la victime) ;
que la démonstration à laquelle se livre le prévenu n'est assortie d'aucun avis de technicien qui permettrait de critiquer l'analyse des fibres ;
que force est de constater que le rapport de M. X..., expert du laboratoire interrégional de police scientifique de Lille, est formel, pour affirmer que le fragment de feuille prélevé sous le joint d'étanchéité (scellé n 11) renferme le fil de couleur violette identique au fil constituant en partie la chemise de la victime, fil dont la couleur, le diamètre, la composition et le système de filature sont similaires ;
"alors que Jean-François Y... se fondait sur les constatations mêmes de l'expert pour faire valoir que le fil se trouvant sous le fragment végétal trouvé sous le joint d'étanchéité de sa voiture et celui prélevé sur la chemise de la victime ne présentaient pas le même nombre de fibres et que les spectres des deux filtres n'étaient pas identiques, les indications référentielles n'étant pas les mêmes dans l'un et l'autre cas et les mesures étant elles-mêmes différentes ;
qu'ainsi, la Cour ne pouvait se borner à fonder sa conviction sur les similitudes relevées par l'expert pour déclarer les deux fils identiques sans rechercher, comme l'y invitait le prévenu, si, en raison des différences mises en lumière dans ses conclusions et tirées des propres constatations de l'expert, il pouvait bien s'agir du même fil ;
qu'en s'abstenant de se livrer à une telle recherche, au prétexte que la démonstration du prévenu n'était assortie d'aucun "avis de technicien", la cour d'appel n'a pu donner une base légale à sa décision" ;
Et sur le troisième moyen de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 319, 3, 405, 224 du Code pénal, L. 2, L. 14, L. 15, L. 16, L. 17, L. 1-1 et L. 1-2 du Code de la route, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean- François Y... coupable d'homicide involontaire, délit de fuite, tentative d'escroquerie et outrage aux agents de la force publique ;
"aux motifs que le prévenu fait état également de ce que l'examen des fragments de peinture du véhicule ne sont pas constitués des mêmes couches de peinture que la particule de peinture prélevée sur le morceau de peau prélevé sur la victime ;
qu'il ajoute qu'aucun débris de verre n'a été trouvé près de la victime ou sur la victime ;
que l'absence de fragments de peinture ou de verre ne saurait être un élément de nature à exclure la possibilité d'un choc avec le véhicule du prévenu ;
"alors que Jean-François Y... faisait valoir dans ses conclusions que le prélèvement d'une particule de peinture effectuée sur la peau de la victime et les fragments de peintures provenant de son véhicule n'étaient pas identiques ;
que cet élément de fait, qui n'était pas contesté, était de nature à établir que le véhicule qui avait renversé la victime n'était pas celui de Jean-François Y... puisque les fragments de peinture retrouvés sur elle provenaient à l'évidence d'une autre automobile de couleur différente ;
qu'en se bornant à indiquer que "l'absence de trace de peinture" n'était pas de nature à exclure un choc avec le véhicule du prévenu, alors même que la discussion portait, non point sur l'absence, mais sur l'existence même de particules de peinture sur le corps de la victime, différentes de celles prélevées sur le véhicule du prévenu, ce qui, par conséquent excluait que le choc mortel ait été causé par ce véhicule, la cour d'appel n'a pas répondu aux conclusions qui lui étaient régulièrement soumises" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que les juges du second degré ont, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, caractérisé en tous leurs éléments constitutifs les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
Que les moyens, qui reviennent à remettre en discussion l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Simon conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Verdun conseiller rapporteur, MM. Blin, Aldebert, Grapinet conseillers de la chambre, Mme Ferrari conseiller référendaire, M. le Foyer de Costil avocat général, Mme Arnoult greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 18 octobre 1995 n° 94-82.445

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-huit octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller BLIN, les observations de Me RICARD, de Me THOMAS-RAQUIN et de Me VUITTON, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général le FOYER de COSTIL ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- A...
D... Felipe,- C... Fabrice,- LA SOCIETE PROGEPARC, parties civiles,- LA SOCIETE SEC GESTION, civilement responsable, contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 11ème chambre, du 8 avril 1994, qui, dans les poursuites exercées contre B...
X... prévenu du délit de coups ou violences volontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;
Et sur les pourvois formés par les seules parties civiles ;
contre l'arrêt de la même juridiction du 20 mai 1994, qui, dans les mêmes poursuites, a condamné le prévenu à effectuer 100 heures de travail d'intérêt général dans un délai de 18 mois et a constaté la mise hors de cause des sociétés OISE PROTECTION et SEC GESTION, citées comme civilement responsables ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur les faits et la procédure ;
Attendu qu'il résulte des deux arrêt attaqués, des jugements entrepris et des pièces de procédure que B...
X... a été cité devant le tribunal correctionnel sous la prévention de coups ou violences volontaires ; que par jugement du 10 décembre 1992 il a été condamné par défaut à 4 mois d'emprisonnement et la société Oise Protection contradictoirement déclarée civilement responsable ;
que statuant sur l'action des victimes Felipe A...
D..., Fabrice C... et la société Progeparc, le tribunal a ordonné une expertise et condamné le prévenu et le civilement responsable, in solidum, à leur verser une indemnité provisionnelle ;
que devant la cour d'appel, saisie du seul appel de la société Oise Protection, les parties civiles ont assigné, en qualité de civilement responsable, la société Sec Gestion ;
que, par arrêt du 8 avril 1994, les juges du second degré ont, d'une part, rejeté l'exception de nullité de la citation délivrée à la société Sec Gestion et, d'autre part, mis hors de cause la société Oise Protection en la déchargeant de la condamnation in solidum prononcée à son encontre par le jugement entrepris ;
Attendu qu'auparavant, par jugement du 7 octobre 1993 le tribunal avait déclaré non avenue l'opposition formée par le prévenu au jugement du 10 décembre 1992 ;
que sur appel du seul B...
X... les juges du second degré, par arrêt du 20 mai 1994, ont confirmé le jugement entrepris sur la déclaration de culpabilité et l'ont réformé sur la peine ;
que statuant sur les intérêts civils, ils ont constaté que la mise hors de cause de la société Oise Protection était définitivement acquise par l'arrêt du 8 avril 1994 et qu'à défaut d'appel des parties civiles, le jugement du 10 décembre 1992, qui avait mis hors de cause la société Sec Gestion était devenu définitif ;
En cet état :
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
I-Sur les pourvois contre l'arrêt du 8 avril 1994 :
Sur le moyen unique de cassation proposé par la société Progeparc, Fabrice C... et Felipe A...
D..., parties civiles, et pris de la violation des articles 1384, alinéa 5, du Code civil et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a réformé le jugement déféré en ce que la société Oise Protection a été déclarée civilement responsable et a, ainsi mis hors de cause la société Oise Protection, et exclu la condamnation in solidum prononcée à l'encontre de cette dernière ;
" aux motifs qu'il échet de rechercher, en l'espèce, si lors de la commission des violences reprochées à B...
X..., celui-ci se trouvait sous les directives de son employeur habituel, la société Oise Protection ou sous la dépendance des responsables de la société Sec Gestion ;
qu'il est constant que la société Oise Protection détache, auprès de sa clientèle en fonction de la demande qui lui en est faite, des agents de surveillance ;
que tel avait été le cas à l'égard de la société Sec Gestion en ce qui concerne B...
X... ; que B...
X... a déclaré : " Dimanche 8 avril, vers 16 heures, j'ai été appelé ainsi qu'un collègue au PC sécurité du centre. C'est notre chef, M. G..., qui nous demandait... J'ai demandé quel était l'objet de notre mission... M. G... m'a répondu " on va chercher quelqu'un ;
s'il refuse de venir de son plein gré, on l'emmènera de force " ;
considérant que M. Sébastien G..., chef de sécurité à la Sec Gestion, a déclaré que M. Y..., directeur de la société qui l'emploie, lui avait demandé d'aller immédiatement chercher M. F..., qui refusait de venir de lui-même ;
que pour ce faire, il s'était fait accompagner de trois agents de sécurité, dont B...
X..., et qu'il s'était adressé à eux en présence de M. F... en leur disant " emmenez-le de force " ;
que M. Y... a confirmé s'être exprimé à voix haute et d'un ton énervé en disant à M. G... : " Allez me chercher M. F... " ;
qu'il ressort des déclarations susénoncées que B...
X..., lorsqu'il a commis les violences qui lui sont reprochées, se trouvait sous les ordres d'un responsable de la société Sec Gestion, pour l'accomplissement d'une tâche déterminée ;
qu'il n'est pas douteux qu'au moment de ces faits, M. Sébastien G..., chef de sécurité de la société Sec Gestion, était investi d'une autorité réelle sur la personne de B...
X... ;
" alors que, lorsqu'un préposé mis par son employeur habituel à la disposition d'une autre entreprise pour exercer une activité professionnelle a commis une infraction, le seul fait que cette dernière ait pu donner des indications au salarié ne suffit pas à justifier d'un transfert d'autorité qui autorise le juge à la déclarer civilement responsable dudit préposé ; qu'en l'espèce, le fait pour la société Sec Gestion d'avoir donné des ordres, par l'intermédiaire de son responsable, M. G..., à B...
X..., au moment de l'incident, ne lui conférait pas, pour autant, un pouvoir de direction sur le préposé de la société Oise Protection qui demeurait civilement responsable de son salarié ; qu'en en décidant le contraire, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés " ;
Attendu que, pour mettre hors de cause la société Oise Protection, attraite aux poursuites en qualité de civilement responsable, la cour d'appel relève que, B...
X..., agent de surveillance, ayant été détaché par son employeur auprès de la société Sec Gestion, se trouvait sous les ordres d'un responsable de cette dernière pour l'accomplissement d'une tâche déterminée et qu'au moment des faits le chef de sécurité de la société Sec Gestion était investi d'une autorité réelle sur la personne du prévenu ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs procédant de son appréciation souveraine de la situation de fait dans laquelle se trouvait le prévenu vis-à-vis des deux sociétés en cause, la cour d'appel a justifié sa décision, sans encourir le grief allégué ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le moyen unique de cassation proposé par la société Sec Gestion et pris de la violation des articles 550, 551, 565 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué déclare valable les citations délivrées les 22 octobre 1993 et 15 février 1994 à la société Sec Gestion et écarte en conséquence le moyen de cette société tendant à voir prononcer l'irrecevabilité de toute action publique ou civile dirigée contre elle ;
" aux motifs que " si la citation en date du 22 octobre 1993, qui a été délivrée à la société Sec Gestion en vue de sa comparution devant la Cour le 5 novembre 1993, suivie de celle en date du 15 février 1994, intervenue après renvoi, ne comportent pas les mentions du fait poursuivi et du texte de loi qui le réprime, ni la qualité en laquelle elle est citée à comparaître, il ressort des pièces versées aux débats que le conseil des parties civiles a adressé le 9 novembre 1993 à la société Sec Gestion, par lettre recommandée avec avis de réception qui a été signé, un courrier relatant les faits de la cause, faisant expressément référence à la citation délivrée en vue de l'audience du 5 novembre 1993, et indiquant que Sec Gestion était mise en cause en qualité de civilement responsable ;
que dans ces conditions, l'absence de certaines des mentions prévues par l'article 51 du Code de procédure pénale sur la citation délivrée pour l'audience de la Cour du 4 mars 1993 ne porte pas préjudice aux intérêts de la société Sec Gestion et ne saurait donner lieu à l'annulation de cette citation ; qu'en conséquence, les moyens de nullité et d'irrecevabilité soulevés par la société Sec Gestion doivent être rejetés " (cf. arrêt p. 9 et 10) ;
" alors qu'aux termes de l'article 550 précité " les citations et significations, sauf dispositions contraires des lois et règlements, sont faites par exploit d'huissier de justice " ;
qu'ayant constaté que les citations délivrées à la société Sec Gestion ne comportaient ni la mention du fait poursuivi, ni celle du texte de loi réprimant un tel fait, ni la mention de la qualité en laquelle ladite société était citée à comparaître, en sorte que lesdites citations ne satisfaisaient pas ainsi aux conditions essentielles de leur validité et ne permettaient pas d'organiser une défense, la Cour ne pouvait, comme elle le fait, décider qu'il était suppléé à ses carences par les indications données dans une lettre recommandée adressée à la même société par le conseil des parties civiles " ;
Attendu que devant les juges du second degré, saisis du seul appel de la société Oise Protection contre le jugement qui l'avait déclarée civilement responsable du prévenu B...
X..., la société Sec Gestion a conclu à la nullité de l'assignation à elle délivrée à la requête de l'appelante, en faisant valoir que cet acte ne comportait pas les mentions requises par l'article 551 du Code de procédure pénale et spécialement l'indication de la qualité en laquelle elle était citée à comparaître devant la cour d'appel ;
Attendu qu'il est vainement fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir écarté cette exception-fût-ce par des motifs erronés-dès lors que les juges d'appel relèvent par ailleurs qu'en l'absence d'appel des parties civiles ou du prévenu " leur saisine est limitée aux seuls intérêts de l'appelante à savoir sa mise hors de cause " ; qu'en l'état de cette énonciation, dont il résulte que l'assignation critiquée était inopérante, comme laissant hors de cause la demanderesse au pourvoi, cette dernière est sans intérêt à critiquer la disposition de l'arrêt attaqué qui en a reconnu la validité en la forme ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
II-Sur les pourvois formés contre l'arrêt du 20 mai 1994 :
Sur le moyen unique de cassation proposé par la société Progeparc, Fabrice C... et Felipe A...
D..., parties civiles, et pris de la violation des articles 1384, alinéa 5, du Code civil et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué, sur l'action civile, a constaté que par arrêt du 8 avril 1994, la cour d'appel de Paris a mis hors de cause la société Oise Protection, citée devant les premiers juges en qualité de civilement responsable ;
" aux motifs que par arrêt du 8 avril 1994, statuant sur le seul appel de la société Oise Protection, citée en première instance en qualité de civilement responsable, la cour d'appel de Paris, 11ème chambre, a mis hors de cause cette société, qu'il convient de tirer les conséquences de cet arrêt et de constater que la société Oise Protection n'est plus en cause ;
" alors que la cassation de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 8 avril 1994 qui sera prononcée emportera l'annulation par voie de conséquence du présent arrêt qui est dans son entière dépendance " ;
Attendu qu'en l'état du rejet du moyen de cassation proposé par les demandeurs contre l'arrêt du 8 avril 1994, le moyen tendant à l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt du 20 mai 1994 doit être écarté ;
Et attendu que les arrêts sont réguliers en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Blin conseiller rapporteur, MM. Aldebert, Grapinet, Mme Simon, M. Farge conseillers de la chambre, Mmes Ferrari, Verdun conseillers référendaires, M. le Foyer de Costil, avocat général, Mme Arnoult greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Com. 17 octobre 1995 n° 93-15.160

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi n Z 93-15.160 formé par :
1 / M. Henri X..., demeurant ...,
2 / Mme Adrienne Y..., épouse X..., demeurant ...,
Sur le pourvoi n F 93-17.167 formé par M. Daniel Z..., demeurant immeuble "Le Palladioé, rue Beau de Rochas, 04000 Digne-Les-Bains, en cassation d'un arrêt rendu le 9 avril 1993 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre civile section B), au profit :
1 / de la Banque hypothécaire européenne, dont le siège social est ...,
2 / de M. Alain A..., demeurant ... et actuellement ..., défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs aux pourvois n s Z 93-15.160 invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
Le demandeur au pourvoi n F 93-17.167 invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 4 juillet 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Dumas, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Dumas, les observations de la SCP Monod, avocat des époux X..., de la SCP Célice et Blancpain, avocat de la Banque hypothécaire européenne, de la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen, avocat de M. Z..., les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu leur connexité, joint les pourvois n s Z 93-15.160 et F 93-17.167 ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi n Z 93-15.160 et sur le moyen unique du pourvoi n F 93-17.167 :
Vu l'article 4 du Code de procédure pénale ;
Attendu, selon l'arrêt critiqué, que, le 17 septembre 1980, Mme Adrienne Y..., épouse X..., ainsi que MM. Henri X..., Daniel Z... et Alain A..., ces trois derniers étant co-gérants de la société civile immobilière Les Gentianes, se sont constitués cautions solidaires des engagements de cette société à l'égard de la banque Hypothécaire Européenne (la BHE), au titre, notamment, du solde débiteur de son compte courant et des concours destinés au financement d'un ensemble d'immeubles ;
que la BHE les a assignés en paiement ;
Attendu que, pour rejeter la demande de sursis à statuer présentée par les époux X... et par M. Z..., l'arrêt retient que les conditions d'application de l'article 4, alinéa 2, du Code de procédure pénale ne sont pas réunies, l'action pénale en cours contre le promoteur Blohorn et l'action civile en paiement exercée contre les cautions de la société civile de construction ne procédant pas du même fait ni de la même cause juridique ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la décision à intervenir sur l'action publique était susceptible d'influer sur celle qu'elle devait prendre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé ;




Crim. 12 octobre 1995 n° 94-85.553

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire de LAROSIERE de CHAMPFEU, les observations de Me FOUSSARD et de Me de NERVO, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- C... Yvon, - D... Gérard, contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, en date du 3 novembre 1994, qui, pour complicité d'escroqueries et recel d'escroqueries, a condamné Yvon C... à 2 ans d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende, pour complicité d'escroqueries, a condamné Gérard D..., à 1 an d'emprisonnement avec sursis et 5 000 francs d'amende et qui a prononcé sur les réparations civiles ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation présenté pour Gérard D... et pris de la violation des articles 460, 513, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a été rendu alors que le demandeur, prévenu, a été entendu avant le ministère public, peu important qu'il ait pu reprendre la parole en dernier ;
"alors que le prévenu ne peut présenter sa défense avant l'audition de la partie civile et les réquisitions du ministère public ;
que Gérard D... a été entendu en ses moyens et explications (arrêt p. 8, dernier alinéa) avant que les conseils des parties civiles et le ministère public n'aient été entendus ;
que la cour d'appel, en violant les textes susvisés, a porté une atteinte à ses intérêts qui ne peut être réparée par la mention qu'il a eu la parole le dernier" ;
Attendu que, si l'arrêt mentionne que Gérard D... a présenté sa défense avant le ministère public, dans l'ordre prévu par les dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale en leur rédaction antérieure à la loi du 4 janvier 1993, il précise que le prévenu a eu la parole en dernier ;
Qu'en cet état, et dès lors que l'article 513 précité a été rétabli en sa rédaction initiale par la loi du 8 février 1995, l'irrégularité invoquée n'a pas porté atteinte aux intérêts du demandeur ;
Que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le premier moyen de cassation présenté pour Yvon C... et pris de la violation des articles 485, 512, 591 à 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué mentionne simplement, en ce qui concerne sa lecture, qu'il a été "lu à l'audience par M. le conseiller Hovaere" et mentionne par ailleurs que la Cour était "composé lors des débats de M. E... (président), Mme X... et M.
Hovaere "(conseillers), M. A... (représentant du ministère public) et M. B... (greffier)" ;
"alors que la présence du ministère public lors de la lecture s'impose, non seulement lorsque la décision est rendue par la formation de jugement qui a débattu de l'affaire, mais encore lorsque la décision est lue par l'un des membres de ladite formation ;
que si les mentions de l'arrêt attaqué permettent de savoir qu'un représentant du ministère public était présent lors des débats, de même que les trois juges du siège et le greffier, elles ne permettent pas, en revanche, de s'assurer qu'il était présent au moment de la lecture, effectuée par l'un seulement des magistrats du siège ayant délibéré de la cause" ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt que le ministère public était représenté aux audiences par M. A... ;
Que, dès lors, le moyen, qui manque en fait, doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation présenté pour Yvon C... pris de la violation des articles 59, 60, 405 et 460 de l'ancien Code pénal, des articles 121-7, 313-1, 321-1 et suivants du nouveau Code pénal, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Yvon C... coupable de complicité et de recel d'escroquerie ;
"aux motifs qu'Yvon C... avait reconnu qu'il avait connaissance des escroqueries commises par Denis Z... ;
que diverses personnes avaient indiqué qu'il était "impliqué" dans ces escroqueries ;
qu'Yvon C... mettait en permanence à la disposition de Denis Z... les terres et les bâtiments nécessaires pour parquer et proposer à la vente le bétail obtenu frauduleusement par ce dernier ;
"que divers témoins avaient affirmé que le prévenu tirait parti des escroqueries de Denis Z..., qui lui remettait gratuitement du bétail en remboursement de dettes anciennes ;
qu'Yvon C... connaissait l'origine frauduleuse de ces bêtes, le délit de recel étant de ce fait caractérisé à son encontre ;
"1 ) alors que, si les qualités de receleur et de complice peuvent se cumuler, un seul et même fait matériel de détention ne peut caractériser à la fois ces deux délits ;
qu'il est constant que Yvon C... a été inquiété parce qu'il détenait matériellement des bêtes obtenues frauduleusement par Denis Z..., aucun fait d'émission d'effets de commerce sans provision n'ayant été relevé contre lui ;
que ce fait matériel unique de détention ne pouvait caractériser à la fois les deux délits mis à la charge d'Yvon C... ;
"2 ) alors que la complicité est caractérisée par l'aide ou l'assistance pour faciliter la préparation ou la consommation d'une infraction ;
que la cour d'appel a elle-même énoncé que la manoeuvre frauduleuse caractérisant le délit principal d'escroquerie, commis par Denis Z..., consistait dans le fait d'avoir payé divers vendeurs de bétail avec des effets de commerce confiés par diverses personnes, tout en sachant pertinemment que les comptes bancaires de certaines de ces personnes n'étaient pas provisionnés ;
que, contrairement à d'autres prévenus, C... n'a jamais été convaincu d'avoir fourni des effets de commerce sans provision ;
que le fait de mettre des terres et bâtiments à la disposition de l'auteur de l'infraction principale, fait nécessairement postérieur à la consommation de celle-ci, ne saurait en aucun cas caractériser la complicité d'escroquerie ;
"3 ) alors que le simple fait que Denis Z... ait remis gratuitement quelques bêtes à Yvon C..., en remboursement de dettes anciennes, ne saurait caractériser le délit de recel d'escroquerie ;
que la cour d'appel n'a nullement expliqué d'où elle pouvait tenir que le prévenu connaissait l'origine frauduleuse des bêtes litigieuses et n'a même pas précisé si cette connaissance existait au moment de la remise des bêtes" ;
Sur le second moyen de cassation présenté pour Gérard D... et pris de la violation des articles 121-7 et 313-1 du Code pénal, de même que des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que Gérard D... a été retenu coupable de complicité de délits d'escroquerie commis par Denis Z... et a été condamné, sur l'action publique, à 1 an d'emprisonnement assorti du sursis simple et à une amende de 5 000 francs et, sur l'action civile, à payer diverses sommes à Lucas ;
"aux motifs que Gérard D... était exploitant agricole et commissionnaire dans la vente de bestiaux à Chemille ;
que durant l'état 1989, il a fait la connaissance de Denis Z... ;
qu'à cette occasion il reconnaît que M. Y... l'a averti que Denis Z... allait acheter régulièrement les premières bêtes mais qu'ensuite les vendeurs ne seraient plus payés ou seraient payés avec des chèques sans provision ;
que Gérard D... reconnaît qu'informé des pratiques frauduleuses de Denis Z..., il a cependant favorisé les achats de celui-ci en le présentant à diverses victimes, et ce afin de percevoir une commission payée à chaque fois en espèces par Denis Z... ;
qu'il a aidé ce dernier à accomplir des escroqueries en lui permettant de rassembler sur ses terres le bétail frauduleusement acquis au préjudice de Lucas et des autres éleveurs de sa région ;
"alors que la complicité suppose que la personne a sciemment facilité la préparation ou la commission d'un délit ;
que Gérard D... a reconnu avoir été informé de ce que Denis Z... n'était pas en mesure de payer tous les vendeurs de bestiaux avec qui il traitait ;
que cet élément ne caractérise pas la connaissance de la commission d'une escroquerie, qui postule des manoeuvres tendant à tromper une personne physique ou morale ;
que par ces seuls motifs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous leurs éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnels, les délits dont elle a déclaré les prévenus coupables et ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, des indemnités qu'elle a estimées propres à réparer les préjudices découlant de ces infractions ;
D'où il suit que les moyens, qui remettent en discussion devant la Cour de Cassation l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause ainsi que la valeur et la portée des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. de Larosière de Champfeu conseiller rapporteur, MM.
Culié, Roman, Schumacher, Martin, Mmes G..., Chevallier conseillers de la chambre, M. de F... de Massiac, Mme Mouillard conseillers référendaires, M. Amiel avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 12 octobre 1995 n° 94-85.144

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ROMAN, les observations de Me C... et de la société civile professionnelle CELICE et BLANCPAIN, avocats en la Cour et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- VIC A..., épouse X..., contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, 3ème chambre, en date du 7 septembre 1994, qui, pour escroquerie, l'a condamnée à 4 mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 francs d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 460, 513 et 591 du Code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"en ce que l'arrêt attaqué mentionne que le conseil de la demanderesse a présenté ses moyens de défense avant que le ministère public ne soit entendu en ses réquisitions ;
"alors que les parties en cause ont la parole dans l'ordre prévu par l'article 460 du Code de procédure pénale, en vertu duquel le ministère public prend ses réquisitions avant que le prévenu ne soit entendu" ;
Attendu que, s'il résulte de l'arrêt que l'avocat de Monique B..., veuve X..., a présenté ses moyens de défense avant les réquisitions du ministère public, comme le prévoyaient les dispositions de l'article 513, alinéa 3, du Code de procédure pénale antérieures à leur modification par la loi du 4 janvier 1993, aucune atteinte n'a été portée aux intérêts de la prévenue, dès lors qu'elle a eu la parole en dernier, ainsi que son conseil, et que l'article 513 du Code de procédure pénale a été rétabli dans sa rédaction antérieure par la loi du 8 février 1995 ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 405 du Code pénal, 1291 du Code civil, 107,4 de la loi du 25 janvier 1985, 1er de la loi du 2 janvier 1981, 591 et 593 du Code de procédure pénale et 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Monique B..., épouse X..., coupable d'escroquerie commise au préjudice de la société Marseillaise de Crédit ;
"aux motifs que Monique B... ne saurait exciper de sa bonne foi, alors qu'elle a établi deux factures pour les mêmes travaux de l'OPHLM de Béziers, en soutenant qu'il s'agit pour la première d'une erreur, et qu'elle n'a présenté au maître de l'ouvrage que la seconde facture, et après la mobilisation de la première facture n'a pas informé la société Marseillaise de Crédit ;
qu'elle ne saurait tirer argument de l'absence de notification prévue à l'article 5 de la loi du 2 janvier 1981, notification qui est une faculté offerte au cessionnaire, qui a pour seule fin d'informer le débiteur cédé et de lui interdire de payer le cédant, la cession restant opposable à la date portée sur le bordereau ;
qu'il résulte des déclarations de Robert Y..., gérant de la SCI "les Terrasses du Parc", et de Julien Z..., gérant de la société Serit, que Monique B..., veuve X..., ne pouvait ignorer que les créances qu'elle cédait à la société Marseillaise de Crédit ne correspondaient pas à sa part de marché de travaux, soit 50 %, et qu'elle s'était ainsi procuré illégalement une trésorerie à une époque où son entreprise était déjà en état de cessation de paiement, ainsi que cela résulte des constatations opérées au greffe du tribunal de commerce ; qu'il apparaît ainsi que la cession à la société Marseillaise de Crédit des factures concernant des tiers, et dont le montant n'était pas entièrement dû à l'entreprise X..., constitue les manoeuvres frauduleuses qui ont déterminé la banque à accepter la mobilisation de la totalité des sommes indûment facturées, sans que la récupération d'une partie desdites sommes alléguées puisse exonérer Monique B... de sa responsabilité pénale ;
"alors que, d'une part, la compensation s'opère de plein droit en matière de compte courant ;
qu'en l'espèce la demanderesse avait fait valoir dans ses écritures d'appel que la différence entre le montant des factures mobilisées et la somme versée à la société Marseillaise de Crédit par le débiteur cédé était inscrite au débit du compte courant de l'entreprise X... ;
qu'en s'abstenant dès lors de constater l'existence d'un préjudice qu'aurait subi l'établissement de crédit, élément constitutif du délit d'escroquerie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1291 du Code civil et 405 du Code pénal ;
"alors que, d'autre part, peuvent être cédées non seulement les créances liquides ou exigibles ou à terme, mais aussi celles résultant d'un acte déjà intervenu ou à intervenir, et dont le montant ou l'exigibilité ne sont pas encore déterminés ;
qu'en se bornant à relever en l'espèce que les créances cédées à la société Marseillaise de Crédit ne correspondaient pas à la part de marché attribuée à l'entreprise X..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1er de la loi du 2 janvier 1981 et 405 du Code pénal, en ne recherchant pas si le montant ou l'exigibilité des créances litigieuses étaient déterminées au moment de leur cession ;
"alors que, par surcroît, sont valables les paiements pour dettes échues faits en période suspecte par bordereaux de cessions de la loi du 2 janvier 1981 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé que les cessions litigieuses avaient été effectuées à une époque où l'entreprise X... était déjà en état de cessation des paiements, tout en constatant par ailleurs que le jugement déclaratif avait été prononcé le 28 novembre 1990, soit postérieurement auxdites cessions ;
qu'en statuant ainsi, sans tirer les conséquences d'après lesquelles il résultait que les cessions litigieuses avaient eu lieu pendant la période suspecte, la cour d'appel a violé l'article 107, 4 de la loi du 25 janvier 1985 ;
"alors que, en toute hypothèse, le simple mensonge ne constitue pas une escroquerie lorsqu'il n'est pas étayé par des éléments extérieurs ;
qu'en l'espèce, à supposer même que la demanderesse ait menti par omission en ne précisant pas qu'elle n'était créancière que de la moitié des factures mobilisées, ce simple mensonge n'était pas de nature à caractériser l'escroquerie qui lui est imputée, ni même un faux en écriture privée, susceptible de justifier la condamnation prononcée contre elle, dès lors que lesdits titres ne contenaient aucune altération de la vérité" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance et de contradiction et répondant aux articulations essentielles des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit d'escroquerie dont elle a déclaré la prévenue coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit de la partie civile, de l'indemnité propre à réparer le préjudice découlant de cette infraction ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus devant eux, ne saurait être admis ;
Et attendu que la décision est justifiée tant au regard de l'article 405 du Code pénal alors applicable qu'au regard de l'article 313-1 du Code pénal en vigueur depuis le 1er mars 1994, et que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Roman conseiller rapporteur, MM. Culié, Schumacher, Martin, Mmes Simon, Chevallier conseillers de la chambre, M. de Mordant de Massiac, Mme Mouillard, M. de Larosière de Champfeu conseillers référendaires, M. Amiel avocat général, Mme Mazard greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 11 octobre 1995 n° 94-85.325

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire FERRARI, les observations de Me HEMERY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Michel, partie civile, contre l'arrêt de la cour d'appel de BOURGES, 2ème chambre, du 13 octobre 1994 qui, dans les poursuites exercées contre Marcel Y... pour coups ou violences volontaires, l'a débouté de ses demandes après relaxe du prévenu ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 319, 320 et R. 40-4 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a débouté Michel X... de ses demandes ;
"aux motifs que "les violences alléguées par Michel X... n'ont pas eu de témoin, et n'ont été dénoncées aux services de police de Châteauroux que le 5 novembre 1993 ;
que le certificat médical établi le 8 novembre 1993 ne constate pas de traces de violences, et ne fait état que d'une rupture du ligament rotulien du genou droit ;
que les circonstances exactes de la chute de Michel X... sont donc ignorées, le coup de téléphone donné à Mme X... étant simplement rapporté par elle ;
que la thèse de Marcel Y... quant à l'origine accidentelle de la chute ne peut être formellement rejetée, en l'absence de preuve de la volonté de ce dernier de porter des violences à Michel X... ;
que les éléments de la culpabilité de Marcel Y... n'étant pas réunis, il convient de relaxer celui-ci des fins de la poursuite et de réformer le jugement déféré en ce sens ;
que compte tenu de cette relaxe, Michel X... et la caisse primaire d'assurance maladie de l'Indre doivent être déboutés de leurs demandes" (arrêt p. 3) ;
"alors que le juge a le devoir de prononcer une condamnation lorsque les faits dont il est saisi caractérisent une infraction relevant d'une disposition légale autre que celle visée par la prévention ;
que la Cour, qui a relevé que Marcel Y... admettait avoir, en reculant, occasionné la chute de Michel X..., ne pouvait le relaxer du chef de violences volontaires sans rechercher si les faits qu'elle constatait ne caractérisaient pas le délit de violences involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail personnel de plus de trois mois ou, à défaut, la contravention de blessures, coups ou maladies n'ayant pas entraîné une incapacité totale de travail personnel supérieure à trois mois" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a exposé sans insuffisance ni contradiction les motifs dont elle a déduit que le délit de coups ou violences volontaires reproché au prévenu n'était pas caractérisé et a ainsi justifié sa décision de débouté de la partie civile ;
D'où il suit que le moyen, qui remet en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Simon conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Ferrari conseiller rapporteur, MM. Blin, Carlioz, Aldebert, Grapinet, Mme Simon, M. Farge conseillers de la chambre, Mme Verdun conseiller référendaire, M. Amiel avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 11 octobre 1995 n° 95-80.589

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire POISOT et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Michel, contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 8ème chambre, en date du 15 décembre 1994, qui, pour délit de violences volontaires, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, avec dispense d'inscription de cette condamnation au bulletin n 2 de son casier judiciaire, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article 6, paragraphe, 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation des droits de la défense ;
Attendu que les ordonnances rendues par le président de la chambre des appels correctionnels, en application de l'article 508, alinéa 3, du Code de procédure pénale, n'étant susceptibles, selon l'alinéa 4 du même article, d'aucune voie de recours, le moyen dirigé contre une telle ordonnance est, dès lors, irrecevable ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 40 et 62 du Code de procédure pénale ;
Attendu que le moyen, fondé sur une exception tirée de la nullité des procès-verbaux d'audition du demandeur qui n'a pas été soulevée, avant toute défense au fond, devant les premiers juges, n'est pas recevable ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 508 et 593 du Code de procédure pénale, insuffisance de motifs et défaut de réponse à conclusions ;
Attendu que le prévenu ne saurait reprocher aux juges du second degré de n'avoir pas statué sur les appels interjetés contre les jugements avant dire droit ayant ordonné l'expertise médicale de la victime et rejeté une demande d'audition d'un témoin, dès lors qu'en cause d'appel, il s'est expliqué au fond sans contester l'opportunité de l'expertise ni renouveler sa demande d'audition ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 167, 168 et 513, alinéa 2, du Code de procédure pénale ;
Attendu que la cour d'appel ne saurait se voir reprocher de n'avoir pas entendu l'expert et plusieurs témoins, ni ordonné une nouvelle expertise, dès lors qu'elle n'a été saisie d'aucune demande à cette fin ;
Qu'ainsi le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Poisot conseiller rapporteur, MM. Guilloux, Massé, Fabre, Mme Baillot, M. Le Gall, Mme Chevallier, conseillers de la chambre, M. Nivôse conseiller référendaire, M. Amiel avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 11 octobre 1995 n° 94-86.028

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire POISOT, les observations de Me GOUTET, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... André, contre l'arrêt de la cour d'appel de DOUAI, 6ème chambre, du 20 septembre 1994, qui, pour dépassement de la vitesse maximale autorisée d'au moins 40 km/h, l'a condamné à 1 500 francs d'amende et à la suspension de son permis de conduire pour une durée de 2 mois assortie du sursis ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles R. 232, alinéa 1,2 et R. 266 4 du Code de la route, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... coupable d'excès de vitesse sur autoroute, le condamnant à 1 500 francs d'amende et à la suspension de son permis de conduire pour une durée de 2 mois avec sursis ;
"aux motifs qu'il n'a nullement indiqué que son véhicule n'avait pas été clairement identifié, ainsi qu'il le soutient dans ses conclusions d'appel ; qu'aucune preuve de la méconnaissance du numéro d'immatriculation par l'opérateur du cinémomètre ou par l'agent intercepteur n'est apportée ;
"alors que le prévenu, en contestant dès le départ avoir circulé avec son véhicule à la vitesse reprochée, alléguait implicitement mais nécessairement qu'une confusion avait pu se produire entre son véhicule et un autre véhicule de même type et de la même couleur qui circulait en même temps que lui et à la place duquel il avait été intercepté ;
que la preuve de la méconnaissance du numéro d'immatriculation par l'opérateur du cinémomètre est apportée par le fait que le procès-verbal ne fait pas expressément mention de ce que le policier opérateur du cinémomètre a bien lui-même relevé le numéro d'immatriculation du véhicule en infraction ;
que dès lors qu'il subsistait un doute important sur l'identité entre le véhicule contrôlé et celui intercepté plus loin, ce doute devait bénéficier au prévenu" ;
Attendu qu'André X... n'a pas soulevé devant le premier juge et avant toute défense au fond, conformément à l'article 385 du Code de procédure pénale, la nullité du procès-verbal relatant son interception ; qu'en application de ce texte, le moyen n'est, dès lors, pas recevable ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Poisot conseiller rapporteur, MM. Guilloux, Massé, Fabre, Mme Baillot, M. Le Gall, Mme Chevallier conseillers de la chambre, M. Nivôse conseiller référendaire, M. Amiel avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 11 octobre 1995 n° 94-85.413 B n° 303


CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- la commune de Viarmes, partie civile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, du 5 octobre 1994 qui, après avoir relaxé Jacques X... du chef de défaut de permis de construire, l'a déboutée de sa demande.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 421-1, L. 480-4 du Code de l'urbanisme, 427, 428, 434, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé X... poursuivi du chef de construction sans permis de construire ;
" aux motifs que l'avocat du prévenu expose à la Cour que le dossier qui avait été produit devant le tribunal où figurait la justification des moyens de défense développés a disparu et n'a pu être retrouvé en dépit de ses demandes auprès des services compétents, qu'il soutient ainsi que l'a jugé le tribunal, qu'en l'espèce son client n'a pas construit une bâtisse nouvelle, mais n'a fait que changer les matériaux et homogénéiser les différentes ouvertures ; que par ailleurs, une clôture de même hauteur que celle rénovée par le prévenu existait auparavant ; qu'il précise que ces éléments de fait étaient établis par les photographies aujourd'hui disparues ; qu'il résulte des motifs du jugement déféré que le premier juge a notamment fondé sa décision sur l'examen des photographies tant de la bâtisse que de la clôture existant antérieurement à la construction litigieuse ; qu'il est établi que l'intégralité de ces documents ne peuvent être produits devant la Cour mettant celle-ci dans l'impossibilité de toute critique éventuelle et rigoureuse des motifs développés par le tribunal ; qu'en outre, il est de principe général que le prévenu ne peut être condamné qu'après avoir été en mesure de faire valoir librement ses moyens de défense contre les accusations portées à son encontre, ce qui à l'évidence n'est pas le cas en l'espèce, et serait de nature, au cas où la Cour ne respecterait pas cette règle essentielle, à porter atteinte au caractère contradictoire de la procédure de jugement ;
" alors, d'une part, qu'il appartient aux juges du fond, s'ils constatent qu'ils sont insuffisamment informés, d'ordonner toute mesure d'instruction opportune qui sera ensuite contradictoirement débattue ;
" alors, d'autre part, que l'aveu est un mode de preuve légalement admissible ; qu'il appartenait à la cour d'appel de dire si en reconnaissant par procès-verbal avoir " démoli une ancienne maison " et " construit une nouvelle construction en dur ", le prévenu n'avouait pas les éléments constitutifs du délit qui lui était reproché ;
" alors, encore que le prévenu reconnaissait à l'audience avoir " changé les matériaux " et " homogénéisé les différentes ouvertures " (par rapport à l'ancienne construction) ; que la Cour devait rechercher, au besoin par tout mode d'instruction admissible, s'il n'en résultait pas une " modification de l'aspect extérieur " de la construction existante, constitutive du délit poursuivi ;
" alors, enfin que la cour d'appel ne pouvait refuser d'examiner la prévention au prétexte que les éléments de défense dont comptait se servir le prévenu " ne pouvaient être produits ", sans justifier que cette " disparition " résultait d'un événement imprévisible, insurmontable, et non imputable au prévenu " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que les juges sont tenus de répondre aux chefs péremptoires des conclusions dont ils sont saisis ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu, en outre, que l'édification d'un bâtiment nouveau, fût-ce à l'identique, après démolition de celui préexistant ne peut être assimilée aux constructions et travaux faits sur une construction existante ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Jacques X... est poursuivi pour avoir édifié, sans permis de construire, une maison d'habitation, au lieu et place d'un ancien bâtiment, et un mur de clôture ;
Attendu que le tribunal correctionnel a relaxé le prévenu en retenant, au vu des photographies que celui-ci produisait, qu'il n'avait changé ni la destination, ni le volume, ni l'aspect extérieur de l'immeuble préexistant et qu'il n'avait fait que reconstruire une clôture ;
Attendu que, pour confirmer cette décision, la juridiction du second degré se borne à énoncer que les premiers juges se sont fondés sur des photographies qui ont depuis disparu, le prévenu n'étant plus en état de présenter ses moyens de défense ;
Mais attendu qu'il résulte des motifs du jugement, adoptés par l'arrêt attaqué, que Jacques X... a reconnu avoir démoli une ancienne bâtisse pour édifier à sa place une nouvelle maison ; que la partie civile, qui se prévalait desdites déclarations dans ses conclusions, soutenait que la configuration de la construction, son aspect extérieur et son volume avaient été modifiés ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait sans répondre aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et alors, de surcroît, qu'il lui appartenait, sans méconnaître les droits de la défense, d'ordonner éventuellement les mesures complémentaires d'instruction que, selon ses propres constatations, la perte des documents saisis aurait rendues nécessaires, la cour d'appel a méconnu les principes ci-dessus énoncés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, mais en ses seules dispositions civiles, l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, du 5 octobre 1994, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
Et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Orléans.




Crim. 11 octobre 1995 n° 94-85.792

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ALDEBERT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- MAURIN A..., contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANCON, chambre correctionnelle, du 20 septembre 1994 qui, pour établissement d'attestations faisant état de faits matériellement inexacts et complicité de tentative d'escroquerie, l'a condamné à 4 mois d'emprisonnement assortis du sursis simple et a prononcé l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant 3 ans ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 161 alinéa 4 du Code pénal, devenu article 441-7 nouveau du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Pierre Z... pour "avoir établi sciemment une attestation ou un certificat faisant état de faits matériellement inexacts, à savoir l'existence d'une décision prise ou autorisée par le tribunal de commerce de Dole, le 27 septembre 1987, de céder, dans le cadre d'une procédure de liquidation judiciaire de Robert X..., le fonds de commerce de ce dernier à Mme Geneviève B..." ;
"aux motifs qu'il est constant que les attestations délivrées les 2 janvier, 20 mai et 13 juin 1992 font état de faits matériellement inexacts ; qu'il en a été fait usage par remise à B... et à son conseil puis utilisées par ces derniers dans le cadre d'une procédure commerciale devant la cour d'appel ;
que l'intention coupable résulte suffisamment de la connaissance qu'avaient nécessairement les prévenus de la fausseté des faits attestés, peu important le mobile ou l'absence de tout intérêt personnel ;
"alors que l'existence de "faits matériellement inexacts" au sens de la loi, suppose que les faits attestés constituent des éléments objectifs, susceptibles de constatations, de vérification et de preuve contraire et non point une appréciation personnelle de l'auteur de l'attestation ;
qu'en l'espèce, le prévenu n'a fait état que d'accords conclus entre les parties en chambre du conseil du tribunal de commerce, en précisant qu'aucun jugement n'a été rédigé, ni aucune mention portée au plumitif d'audience, même s'il a attribué à ces accords une certaine portée en estimant qu'ils auraient dû faire l'objet d'une décision du tribunal ;
que, dans la mesure où il est constant que les accords dont s'agit n'ont jamais été authentifiés ni rendus publics et où le prévenu a expressément attesté qu'aucun jugement les entérinant n'avait été rendu, on ne pouvait reprocher au prévenu d'avoir fait état d'une "décision" du tribunal de commerce comme l'ont retenu à tort les juges du fond pour condamner Pierre Z..., mais seulement d'avoir estimé qu'il y aurait dû y avoir un jugement sur ce point ; qu'ainsi, d'une part, le fait visé à la prévention n'était pas établi et était contraire aux termes mêmes des attestations critiquées, d'autre part, l'appréciation, même erronée, donnée par Pierre Z... aux faits de l'espèce ne saurait constituer un "fait matériellement inexact" au sens de l'article 161 alinéa 4 (441-7) du Code pénal, et n'était donc pas légalement punissable" ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 405, 59 et suivants du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Pierre Z... coupable de s'être rendu complice, par fourniture de moyens, à savoir par fourniture d'attestations faisant état de faits inexacts, sachant que celles-ci devaient servir à l'action, de la tentative d'escroquerie au jugement reprochée à Mme B... ;
"alors, d'une part, qu'en raison de l'absence du caractère frauduleux des attestations produites en justice par Mme B..., résultant de la cassation prononcée sur le premier moyen, le délit de complicité d'escroquerie au jugement ne peut être caractérisé et, par voie de conséquence, la cassation est également encourue sur la seconde condamnation prononcée contre Pierre Z... qui se trouve en lien de dépendance nécessaire avec la première ;
"alors, d'autre part, que la production en justice de simples "attestations", par nature soumises à la libre discussion des parties et à l'appréciation du juge compétent, ne saurait à elle seule constituer une manoeuvre frauduleuse constitutive d'une escroquerie au jugement, ni bien entendu de la complicité de ce délit par fourniture de moyens qui est reprochée à Pierre Z..., lesdits documents dépourvus de tout caractère authentique étant sans valeur et donc absolument pas de nature à surprendre la religion du juge, ni même à influer avec certitude sur sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, a caractérisé en tous leurs éléments constitutifs les délits dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que les moyens, qui se bornent à remettre en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Simon conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Aldebert conseiller rapporteur, MM. Blin, Carlioz, Grapinet, Mme Simon, M.
Farge conseillers de la chambre, Mmes Y..., Verdun conseillers référendaires, M. Amiel avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Civ.1 10 octobre 1995 n° 94-12.554

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 ) M. Pierre Y...,
2 ) Mme Marie, Gisèle Y..., domiciliés ensemble place de la Mairie, à Barsac (Gironde), en cassation d'un arrêt rendu le 3 mars 1994 par la cour d'appel de Bordeaux (1ère chambre - section C), au profit de la Société des bois Charles et fils, dont le siège social est ... (Seine-Maritime), défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 21 juin 1995, où étaient présents : M. de Bouillane de Lacoste, président, M. Laurent-Atthalin, conseiller référendaire rapporteur, M. Renard-Payen, conseiller, Mme Le Foyer de Costil, avocat général, Mlle Barault, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire Laurent-Atthalin, les observations de Me Vuitton, avocat des époux Y..., de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la Société des bois Charles et fils, les conclusions de Mme Le Foyer de Costil, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi et arrêté la décision au 30 juin 1995 ;
Sur le moyen unique tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe au présent arrêt :
Attendu que l'article 4 du Code de procédure pénale ne trouve application que si la décision est susceptible d'influer sur celle qui sera rendue par la juridiction civile ;
qu'il ne saurait en être ainsi lorsque l'instance civile tend, non pas à l'obtention d'un titre de condamnation contre les débiteurs, mais seulement à l'exécution d'un jugement passé en force de chose jugée ;
que la cour d'appel a relevé que le commandement litigieux avait été délivré aux époux Y... en vertu d'une décision passé en force de chose jugée ;
qu'il en résultait que ceux-ci n'étaient pas fondés à se prévaloir des dispositions de l'article 4 du Code procédure pénale ;
que par ce motif de pur droit, la décision déférée se trouve légalement justifiée ;
Et sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que la Société des bois Charles et fils, sollicite sur le fondement de ce texte l'allocation d'une somme de 15 000 francs ;
Attendu qu'il y a lieu d'accueillir partiellement cette demande ;




Com. 10 octobre 1995 n° 93-15.553

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jacques Y..., demeurant ... (Finistère), en cassation d'un arrêt rendu le 14 avril 1993 par la cour d'appel de Rennes (2e chambre), au profit de :
1 ) M. Bernard X..., pris en sa qualité de représentant des créanciers du redressement judiciaire de M. Jacques Y..., demeurant ...,
2 ) la société à responsabilité limitée Raval'Ouest, actuellement en liquidation judiciaire, dont le siège est ... (Finistère), et prise en la personne de M. Bernard X..., son mandataire liquidateur, demeurant ..., défendeurs à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 juin 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Badi, conseiller référendaire, Mme Pasturel, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mlle Barault, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Badi, les observations de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de M. Y..., de la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat de M. X..., ès qualités et de la société Raval'Ouest, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., liquidateur de la société Raval'Ouest, a assigné M. Y..., directeur salarié des agences de Brest, Morlaix et Guingamp de ladite société, en redressement judiciaire, sur le fondement de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985, en lui imputant, en tant que dirigeant de fait, des actes de disposition et d'utilisation des biens de la société dans son intérêt personnel ;
que le Tribunal a accueilli cette demande ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur l'action publique, mise en mouvement du chef d'abus de confiance au préjudice de la société Raval'Ouest, et d'avoir ordonné l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire commune à celle ouverte à l'égard de la société, alors, selon le pourvoi, que le criminel tient le civil en l'état, ce qui impose, dans une procédure d'extension du redressement judiciaire d'une personne morale exercée contre un dirigeant de droit ou de fait, à la juridiction civile de surseoir à statuer lorsque cette qualité dépend de la décision à intervenir sur l'action publique, mise en mouvement et non encore close ;
que tel était le cas vu que M. Y..., poursuivi pour abus de confiance comme mandataire social de la société Raval'Ouest, soutenait qu'il était demeuré simple exécutant salarié sans avoir jamais exercé un rôle de dirigeant de fait de ladite entreprise ; qu'ainsi, cette qualité contestée de dirigeant de fait était nécessairement l'élément commun des deux procédures, dont résultait que la solution à intervenir de l'instance pénale aurait une influence sur l'affaire civile ;
qu'en refusant d'ordonner le sursis à statuer, qui lui était demandé, l'arrêt a violé, par refus d'application, l'article 4 du Code de procédure pénale ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'action fondée sur les dispositions de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ne tendait pas aux mêmes fins que l'instance pénale dans la mesure où la matérialité de l'existence des comptes bancaires personnels du dirigeant n'était pas discutée et où l'appréciation de son intention coupable n'avait pas d'incidence sur l'application du texte susvisé, la cour d'appel a pu en déduire, que la décision à intervenir sur l'action publique n'était pas de nature à influer sur l'ouverture du redressement judiciaire de M. Y... et qu'il n'y avait, dès lors, pas lieu de surseoir à statuer ;
que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Attendu que, pour confirmer le jugement qui a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de M. Y..., l'arrêt, après avoir relevé que celui-ci avait encaissé une somme de 9 453 781 francs, pour laquelle, à concurrence de 1 180 000 francs, il ne possédait pas de justifications de reversement aux artisans ou à la société Raval'Ouest, a retenu qu'il était sorti du cadre de ses fonctions salariées de chef d'agences et avait de fait accompli de véritables actes indépendants de direction dans son intérêt personnel, ou en tous cas contrairement à celui de la société ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir que M. Y... avait dirigé en fait la société Raval'Ouest, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;




Crim. 5 octobre 1995 n° 94-83.895

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller CULIE, les observations de la société civile professionnelle Alain MONOD et de la société civile professionnelle BORE et XAVIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- TAPI Edmond, contre l'arrêt de la cour d'appel de NOUMEA, chambre correctionnelle, en date du 7 juin 1994, qui, pour délit douanier réputé importation sans déclaration de marchandises prohibées, l'a condamné à 8 jours d'emprisonnement avec sursis, ainsi qu'à des pénalités douanières ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 486, 512, 592 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de base légale ;
"en ce que la signature figurant dans l'arrêt attaqué, sous la mention "le président", est illisible ;
"alors que l'arrêt signé par un magistrat absent lors des débats et du délibéré est nul ;
qu'en l'espèce, la cour d'appel était composée, lors des débats et du délibéré, de Mme Laurent, président et de M. C... et Mme Berkani, conseillers, et lors du prononcé de l'arrêt de M. Delahaye, président, et de Mmes Laurent et X..., conseillers ;
qu'ainsi, les mentions de l'arrêt attaqué qui ne permettent pas de déterminer si celui-ci a été signé par Mme Laurent, président à l'audience des débats du délibéré ou par M. Delahaye, président à l'audience du prononcé de l'arrêt, ne mettent pas la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle sur la régularité de cet arrêt ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les débats ont eu lieu le 24 mai 1994 sous la présidence de Mme Laurent, conseiller le plus ancien, assistée de M. C... et de Mme Berkani, conseillers ;
qu'après délibéré entre ces trois magistrats, la décision a été prononcée à l'audience publique du 7 juin 1994 par Mme Laurent ;
Attendu qu'en l'état de ces mentions, d'où il se déduit qu'il a été fait application des dispositions de l'article 485, alinéa 4, du Code de procédure pénale et que la signature du président figurant à la minute de l'arrêt est celle du magistrat qui a donné lecture de la décision, l'arrêt attaqué n'encourt pas le grief allégué ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 276-3 et 284 du Code des douanes de Nouvelle-Calédonie et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné l'exposant à une amende douanière de 2 878 800 FCFP tenant lieu de confiscation de la marchandise de fraude et à une amende douanière de 5 757 600 FCFP égale au double de la valeur des marchandises de fraude ;
"alors que les amendes prévues par les textes précités sont fixées en fonction de la valeur de l'objet de la fraude ;
qu'ainsi, en se fondant sur le prix de la totalité des marchandises facturées par la société Wing Siand Trading à l'exposant et non pas seulement sur la partie de ce prix excédant la valeur effectivement déclarée et ayant fait l'objet de la minoration retenue par les juges du fond, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué qu'en 1991 et 1993, Edmond D... a importé de Singapour et mis à la consommation en Nouvelle-Calédonie des produits textiles, au moyen de fausses déclarations de valeur en douane et à l'aide de factures minorées, qui lui ont permis d'éluder le paiement de droits à hauteur de 215 501 FCFP ;
Attendu que, statuant sur l'action fiscale, la cour d'appel a condamné Tapi au paiement de la somme de 2 878 800 FCFP pour tenir lieu de confiscation des marchandises de fraude, et à une amende douanière de 5 757 600 FCFP égale au double de la valeur de ces marchandises ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, qui n'avait pas à se déterminer d'après le montant des minorations constatées dans les déclarations, mais par référence à la valeur globale des marchandises importées en fraude, a donné une base légale à sa décision ;
Qu'en effet, l'article 267 du Code des douanes de la Nouvelle-Calédonie et dépendances punit de la confiscation de l'objet de fraude et d'une amende égale au double de la valeur de cet objet tout fait réputé importation ou exportation sans déclaration de marchandises prohibées ;
qu'aux termes de l'article 284 du même code, "lorsque les objets susceptibles de confiscation n'ont pu être saisis ou lorsque, ayant été saisis, la douane en fait la demande, le tribunal prononce, pour tenir lieu de la confiscation, la condamnation au paiement d'une somme égale à la valeur représentée par lesdits objets et calculée d'après le cours du marché intérieur à l'époque où la fraude a été commise" ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Gondre conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Culié conseiller rapporteur, MM.
Roman, Schumacher, Martin, Mmes B..., Chevallier, M.
Farge conseillers de la chambre, M. de Z... de Massiac, Mme A..., M. de Y... de Champfeu conseillers référendaires, M. Libouban avocat général, Mme Ely greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 4 octobre 1995 n° 94-85.678

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire NIVOSE, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X..., contre l'arrêt de la cour d'assises de la MARTINIQUE, en date du 22 octobre 1994, qui l'a condamné à 8 ans d'emprisonnement pour viols aggravés, ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires personnels et ampliatif produits ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par le demandeur et sur le troisième moyen de cassation proposé par l'avocat en la Cour et pris de la violation des articles 156, 157, 159 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation des droits de la défense, manque de base légale ;
"en ce que les mêmes experts ont été commis pour examiner la victime et l'accusé ;
"alors que les intérêts de la partie civile et de l'accusé sont opposés et que les droits de la défense n'ont pas été de ce fait préservés" ;
Et sur le deuxième moyen de cassation proposé par le demandeur et le quatrième moyen de cassation proposé par l'avocat en la Cour et pris de la violation des articles 272, 344 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation des droits de la défense, manque de base légale ;
"en ce que l'accusé n'a pas été assisté d'un interprète ;
"alors qu'il est établi que l'accusé ne parlait pas et ne comprenait pas suffisamment la langue française" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que l'accusé ne saurait se prévaloir de prétendues irrégularités résultant d'expertises antérieures à l'arrêt de renvoi ;
Qu'en effet, aux termes de l'article 594 du Code de procédure pénale, en matière criminelle, l'arrêt de renvoi de la chambre d'accusation devenu définitif couvre, s'il en existe, les vices de la procédure antérieure ;
Attendu qu'il ne saurait davantage faire état d'irrégularités affectant une expertise ordonnée par le président en application de l'article 283 du Code de procédure pénale et l'interrogatoire prescrit par l'article 272, lequel aurait été effectué sans l'assistance d'un interprète ;
Qu'en effet, en application de l'article 305-1 du même Code, l'exception résultant d'une nullité entachant la procédure qui précède l'ouverture des débats doit, à peine de forclusion, être soulevée dès que le jury de jugement est définitivement constitué ;
Qu'il n'appert, ni du procès-verbal des débats ni d'aucun donné-acte, qu'il appartenait à l'accusé de solliciter s'il l'estimait utile à sa défense que de telles nullités aient été invoquées dans les formes prescrites par la loi ;
Attendu qu'enfin, contrairement à ce qui est allégué, l'accusé était assisté d'un interprète durant tout le cours de l'instruction à l'audience, ainsi que le constate le procès-verbal des débats dont les énonciations font foi jusqu'à inscription de faux ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par l'avocat en la Cour et pris de la violation des articles 122-1 du Code pénal, 356 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale ;
"en ce que la feuille des questions, dont il résulte que la culpabilité de l'accusé a été reconnue, ne mentionne aucune question concernant chacun des faits pouvant constituer une cause légale d'exemption ou de diminution de la peine ;
"alors qu'aux termes de l'article 356 du Code de procédure pénale, la Cour et le jury délibèrent puis votent par bulletins écrits et par scrutins distincts et successifs, sur le fait principal d'abord et s'il y a lieu, sur chacune des circonstances aggravantes, sur les questions subsidiaires et sur chacun des faits constituant une cause légale d'exemption ou de diminution de la peine ;
qu'en l'espèce, par ordonnance du 21 septembre 1994 mentionnant qu'il apparaît utile à l'appréciation de l'éventuelle culpabilité de l'accusé qu'une nouvelle expertise mentale soit ordonnée, qui tienne compte des dispositions nouvelles de l'article 122-1 du Code pénal, le président de la cour d'assises a commis un expert ;
que celui-ci a conclu dans son rapport du 3 octobre 1994 qu'au moment des faits, l'accusé était atteint d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement et entravé le contrôle de ses actes ;
qu'en s'abstenant donc de délibérer et de voter sur chacun des faits constituant une cause légale de diminution de la peine, la Cour et le jury ont méconnu les exigences des dispositions des articles 122-1 du Code pénal et 356 du Code de procédure pénale" ;
Attendu qu'il ne résulte d'aucune mention du procès-verbal des débats ni d'aucune pièce de la procédure que l'accusé ou son conseil ait invoqué, conformément aux dispositions de l'article 349, alinéa 4, du Code de procédure pénale, une cause légale d'exemption ou de diminution de la peine ;
Que, dès lors, aucune question relative à l'existence d'une telle cause n'avait à être posée ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par l'avocat en la Cour et pris de la violation des articles 40 du Code pénal, 112-1 et 131-4 du nouveau Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale ;
"en ce que par l'arrêt attaqué la cour d'assises a condamné l'accusé à huit années d'emprisonnement du chef de viols aggravés ;
"alors que, en application de l'article 40 du Code pénal, la durée de la peine d'emprisonnement ne pouvait être supérieure à cinq ans, dès lors qu'il n'est pas constaté que l'accusé se trouvait dans un cas de récidive ou dans d'autres cas où la loi a déterminé d'autres limites ;
qu'ainsi la décision attaquée a violé les textes susvisés" ;
Attendu que selon l'article 131-4 du Code pénal, la durée de l'emprisonnement est de 10 ans au plus ;
Qu'ainsi, la peine prononcée a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
D'où il suit que le moyen est infondé ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par le demandeur et le cinquième moyen de cassation proposé par l'avocat en la Cour et pris de la violation des articles 2 et 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt civil a condamné l'accusé au paiement des sommes de 90 000 francs à titre de dommages-intérêts et 12 000 francs sur le fondement de l'article 375-1 du Code de procédure pénale ;
"aux motifs que la partie civile justifie d'un préjudice actuel et certain causé directement par les crimes de viols dont l'accusé a été déclaré coupable ;
"alors qu'il résulte du rapport d'expertise gynécologique de la partie civile du 10 janvier 1993 (cote D 52) qu'il n'existait pas de traces de violences sexuelles et que le rapport d'expertise psychiatrique et médico-psychologique de la partie civile mentionne que les faits reprochés à l'accusé n'ont entraîné de répercussion réelle, ni dans le présent, ni dans l'avenir sur la partie civile, celle-ci étant déjà malade mentale ayant un état résiduel d'une psychose chronique, sur fond de surdité majeure ;
que dès lors l'arrêt attaqué, en se bornant à une affirmation d'ordre général, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 2 du Code de procédure pénale" ;
Attendu que l'arrêt attaqué constate que l'accusé a été déclaré coupable de viols commis sur la personne de Jeanne Y... ;
que, dès lors, et sans que l'arrêt ait dû s'en expliquer autrement, cette constatation de l'existence du crime et l'affirmation d'un préjudice causé à la partie civile justifient les dommages-intérêts alloués ;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Et attendu que la procédure est régulière ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Guilloux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Nivôse conseiller rapporteur, MM. Massé, Fabre, Mme Baillot, M. Le Gall, Mmes Simon, Chevallier, M. Farge conseillers de la chambre, M. Poisot conseiller référendaire, M. Libouban avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 4 octobre 1995 n° 95-80.929

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MASSE, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- NAMFIO Gervais, contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle, en date du 12 janvier 1995 qui, pour vols en récidive, homicide involontaire, délit de fuite, défaut de permis de conduire et excès de vitesse, l'a condamné à 30 mois d'emprisonnement dont 6 mois avec sursis et mise à l'épreuve pendant 3 ans, a deux amendes de 2 000 francs et 1 000 francs et qui a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 4 du Code pénal, 111-3 et 132-24 du nouveau Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné le prévenu à 30 mois d'emprisonnement dont 6 mois avec sursis et mise à l'épreuve pendant une durée de 3 ans ;
"aux motifs que les premiers juges, après une analyse sérieuse et détaillée de la situation personnelle de l'intéressé, sur le plan familial et professionnel, de sa personnalité, ont fait une juste appréciation de la durée de la peine d'emprisonnement ferme, qui seule est susceptible d'assurer une juste répression à la mesure de la gravité des faits et du passé judiciaire de Gervais Namfio ;
qu'il apparaît toutefois nécessaire pour maintenir Gervais Namfio sur le droit chemin, qu'il affirme avoir décidé d'emprunter, d'assurer à sa sortie de prison un suivi et un contrôle assortis d'une menace réelle ;
qu'à la sanction prononcée, la Cour ajoutera une peine d'emprisonnement de six mois assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve pendant trois ans ;
"alors que, d'une part, il résulte des dispositions des articles 4 du Code pénal et 111-3 du nouveau Code pénal, que nul ne peut être condamné à une peine arbitraire ;
qu'en décidant d'ajouter à la peine prononcée à l'encontre du prévenu, une condamnation de 6 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, au seul motif qu'il convient de le maintenir sur le droit chemin qu'il afirme avoir, décidé d'emprunter, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"alors que, d'autre part, la cour d'appel a constaté que les premiers juges, après une analyse sérieuse et détaillée de la situation personnelle de l'intéressé sur le plan familial et professionnel, et de sa personnalité, ont fait une juste appréciation de la durée de la peine d'emprisonnement ferme, qui seule est susceptible d'assurer une juste répression à la mesure de la gravité des faits et du passé judiciaire de Gervais Namfio ;
qu'en ajoutant, cependant, à cette peine un emprisonnement de 6 mois assortie de sursis avec mise à l'épreuve pendant 3 ans , la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les textes susvisés" ;
Attendu qu'en prononçant une peine d'emprisonnement, l'arrêt attaqué statuant sur l'appel du prévenu et du ministère public, n'encourt pas le grief allégué dès lors que les juges qui ont motivé leur décision conformément aux dispositions de l'article 132-19 du Code pénal, n'ont pas pas excédé le maximum légal, disposent d'une faculté dont ils ne doivent aucun compte ;
Qu'ainsi le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 2 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu entièrement responsable du préjudice subi par les ayants- droit de la victime décédée et a alloué à ceux-ci des dommages-intérêts ;
"aux motifs que les premiers juges ont justement apprécié le préjudice subi par chacun des membres de la famille X..., en tenant compte des relations existant entre la victime, sa mère, le mari de celle-ci et les enfants du couple ;
que leur décision sera intégralement confirmée ;
"alors que, comme l'a constaté l'arrêt attaqué, le prévenu avait conclu à une réduction des indemnités allouées aux ayants-droit de la victime, en faisant valoir que celle-ci, co-auteur du vol, avait commis une faute ;
qu'en s'abstenant de toute explication sur ce point déterminant, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs et a violé les textes susvisés" ;
Attendu qu'après avoir déclaré coupable Gervais Namfio d'homicide involontaire sur la personne de Farid Y..., la cour d'appel pour rejeter la demande du prévenu sollicitant la diminution des dommages et intérêts alloués aux parties civiles, en raison de la faute de la victime qui aurait participé au vol du véhicule accidenté, énonce par motifs adoptés que Gervais Namfio est entièrement responsable des dommages en relation directe avec l'homicide ;
Qu'en l'état de cette motivation, d'ou se déduit nécessairement qu'il n'y a aucune relation de cause à effet entre la participation alléguée de la victime au vol du véhicule et l'homicide involontaire la cour d'appel a justifié sa décision ;
Que dans ces conditions, le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Guilloux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Masse conseiller rapporteur, M. Fabre , Mme Baillot, M. Le Gall, Mmes Simon, Chevallier, M. Farge conseillers de la chambre, MM. Nivôse, Poisot conseillers référendaires, M. Libouban avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 4 octobre 1995 n° 95-83.858

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatre octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire NIVOSE, les observations de la société civile professionnelle Alain MONOD, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Philippe, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de PARIS, en date du 31 mai 1995, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises de la SEINE-et-MARNE, sous l'accusation de viols aggravés et agressions sexuelles aggravées ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 106, 121, 206, 591, 593 et 802 du Code de procédure pénale ;
"en ce que la chambre d'accusation a omis d'annuler le procès-verbal d'audition de Prisca X... et de son administrateur ad Hoc, M. Y..., en date du 10 juin 1992 ;
"alors que, lorsque la personne entendue par le juge d'instruction ne sait pas lire, lecture lui est faite par le greffier de sa déposition telle qu'elle vient d'être transcrite ;
qu'ainsi, le procès-verbal d'audition de Prisca X..., qui mentionne que, celle-ci "ne sachant pas bien lire", sa déposition a été lue par M. Y..., est irrégulier" ;
Et sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 80-3, 82-1 (dans leur rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993 applicable en la cause), 106, 107, 121, 206, 591 et 593 du Code de procédure pénale et des droits de la défense ;
"en ce que la chambre d'accusation a omis de déclarer la procédure irrégulière du fait de la lettre adressée le 7 juillet 1993 par M. Y..., administrateur ad hoc de la partie civile, au juge d'instruction ;
"alors que, durant le délai de 20 jours compris entre l'avis de fin d'information prévu par l'article 80-3 du Code de procédure pénale et la communication du dossier au procureur de la République, le juge d'instruction ne peut recueillir les déclarations d'une partie ou d'un témoin que s'il est saisi d'une requête à cette fin conformément à l'article 82-1 du même Code ou s'il prend lui-même l'initiative de leur audition, et à condition que soient respectées les conditions de forme des articles 106 et 107 de ce Code ;
qu'en l'espèce, le juge d'instruction a fait figurer au dossier la lettre que lui a adressée l'administrateur ad hoc de la partie civile en réponse à l'avis de fin d'information qu'il avait reçu et par laquelle celui-ci a complété son témoignage sans solliciter son témoignage sans solliciter son audition, laquelle n'a pas été ordonnée par le juge d'instruction qui n'a pas non plus communiqué la lettre au mis en examen ;
qu'ainsi, la présence de cette lettre dans le dossier d'instruction a rendu la procédure irrégulière ;
"alors, en tout état de cause, que le fait pour le magistrat instructeur de conserver cette lettre au dossier constituait un acte rendant caducs les avis de fin d'information adressés aux parties ;
qu'ainsi, faute de réitération de ces avis, conformément à l'article 80-3 du Code de procédure pénale, postérieurement à la réception de la lettre de M. Y..., la procédure était entachée d'irrégularité" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il ne résulte ni de l'arrêt attaqué ni du mémoire produit devant la chambre d'accusation, que les nullités invoquées avaient été soulevées devant elle ;
D'où il suit que, par application de l'article 595 du Code de procédure pénale, les moyens sont irrecevables ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 331 et 332 du Code pénal, 222-23 et 222-27 du nouveau Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut, contradiction de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a renvoyé Philippe X... devant la cour d'assises sous l'accusation de viol et attentat à la pudeur sur mineure de 15 ans par ascendant légitime ;
"aux motifs qu'il existe des charges suffisantes contre le mis en examen au vu notamment de la constance des déclarations de Prisca X... tout au long de l'information, des déclarations des personnels spécialisés qui ont reçu les toutes premières confidences de l'enfant, des conclusions de l'expertise et de la contre-expertise médico-psychologique et de la mention du certificat médical indiquant que l'hymen de la victime était très souple avec possibilité d'introduire un doigt dans le vagin jusqu'à la troisième phalange ;
que, par ailleurs, plusieurs années après la commission des faits, la réalité de pénétration anales ne peut être exclue d'autant que cet acte apparaît, dans les dénonciations de la mineure, comme ayant été très peu pratiqué ;
"alors, d'une part, qu'en déduisant l'existence de charges à l'encontre du demandeur des déclarations des personnels spécialisés ayant reçu les premières confidences de l'enfant bien que, comme le soutenait Philippe X... dans des conclusions délaissées sur ce point, Mme P..., assistante sociale de la direction de l'action sociale de Seine-et-marne, ayant suivi l'enfant, en tant que référent extérieur, pendant la période de ses révélations, ait fait état, dans une note du 9 juillet 1991, "des doutes très importants existant dans l'équipe quant aux dires de l'enfant, étant donné la difficulté de Prisca à se repérer dans sa propre histoire" et de la contradiction "entre ses demandes initiales de reprise de relations surtout avec son beau-père et les accusations récentes portées contre lui", la chambre d'accusation a statué par motifs contradictoires ;
"alors, d'autre part, qu'en se fondant sur la crédibilité de l'enfant sans répondre à l'articulation essentielle des conclusions de Philippe X... qui, pour contester l'élément matériel des infractions qui lui étaient reprochées, faisait valoir qu'il ressortait des éléments de l'information que Prisca avait été en contact avec des enfants victimes d'abus sexuels, notamment d'actes de sodomie, la chambre d'accusation a privé sa décision de motifs ;
"alors, enfin, qu'en se fondant sur les expertises médico-psychologiques de l'enfant dont l'objet était d'évaluer son niveau de crédibilité sans répondre aux conclusions par lesquelles Philippe X... faisait valoir qu'en psychiatrie, le fait qu'un sujet soit reconnu crédible ne signifie aucunement qu'il dise la vérité, la chambre d'accusation a encore privé son arrêt de motifs" ;
Attendu que pour infirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise et renvoyer Philippe X... devant la cour d'assises sous l'accusation de viols aggravés, l'arrêt attaqué, après avoir exposé les circonstances de fait et analysé les témoignages recueillis, relève la constance des déclarations de la victime au cours de l'information, les dépositions des personnels spécialisés qui ont reçu les toutes premières confidences de l'enfant, la teneur des conclusions de l'expertise et de la contre-expertise médico-psychologique, les mentions du certificat médical indiquant que l'hymen était très souple avec possibilité d'introduire un doigt dans le vagin jusqu'à la troisième phalange ;
qu'il ajoute que plusieurs années après la commission des faits, la réalité des pénétrations anales ne peut être exclue, d'autant que cet acte apparaît, dans les dénonciations de la mineure, comme ayant été très peu pratiqué ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, les juges qui ont répondu, comme ils le devaient aux chefs péremptoires des conclusions dont ils étaient saisis, ont souverainement estimé que l'information était complète et qu'il existait des charges suffisantes permettant de renvoyer Philippe X... devant la juridiction de jugement ;
Qu'en effet, les chambres d'accusation, statuant sur les charges de culpabilité, apprécient souverainement tous les éléments constitutifs des infractions, la Cour de Cassation n'ayant d'autre pouvoir que de vérifier si la qualification qu'elles ont donnée aux faits justifie le renvoi de la personne poursuivie devant la juridiction de jugement ;
Qu'ainsi le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle Philippe X... a été renvoyé, que la procédure est régulière et que les faits, objet principal de l'accusation, sont qualifiés crimes et délits connexes par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Guilloux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Nivôse conseiller rapporteur, MM. Massé, Fabre, Mme Baillot, M. Le Gall, Mme Simon, M. Farge conseillers de la chambre, M. Poisot conseiller référendaire, M. Libouban avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Com. 3 octobre 1995 n° 93-19.121

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / Mme Françoise, Bernadette, Martha Y..., demeurant à Saint-Nicolas d'Acy, commune de Courteuil (Oise) -veuve de Denys A..., né le 6 juin 1939 à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine), décédé à Hondainville (Oise) le 4 juin 1993- agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'administrateur des biens et des intérêts de son enfant mineur, Benoît, Pierre, Bernard A..., né le 3 juillet 1978 à Senlis (Oise), demeurant de droit avec sa mère susnommée,
2 / Mlle Emmanuelle, Françoise A..., demeurant ... à Saint-Nicolas d'Acy, commune de Courteuil (Oise),
3 / M. Z..., Prosper, René, Henry A..., demeurant à Saint-Nicolas d'Acy, commune de Courteuil (Oise),
4 / de M. Grégoire, Denys, Philippe A..., demeurant ... à Saint-Nicolas d'Acy, commune de Courteuil (Oise), ces trois derniers agissant en leur qualité d'héritiers de feu Denys A..., en cassation d'un arrêt rendu le 2 juin 1993 par la cour d'appel d'Amiens (3e chambre commerciale), au profit de M. Albert X..., demeurant ... (16e), défendeur à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 6 juin 1995, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Canivet, conseiller rapporteur, M. Nicot, conseiller, M. de Gouttes, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Canivet, les observations de Me Choucroy, avocat des consorts A..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. X..., les conclusions de M. de Gouttes, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Amiens, 2 juin 1993), que Denys A... a, par convention du 31 octobre 1985, cédé à M. X... sa participation majoritaire dans la société anonyme J.M. Paillard (la société), mise en règlement judiciaire ;
qu'il était stipulé que le prix convenu de un franc serait révisable à l'avantage du vendeur, en fonction de l'excédant des comptes de passif sur les comptes d'actif résultant d'une situation comptable définitive à la date du 21 octobre 1985, dressée le 31 décembre 1987 ;
que Denys A... a assigné le cessionnaire en résolution de cette convention, l'instance ayant, après son décès, été reprise par ses ayants droit, les consorts A... ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les consorts A... font grief à l'arrêt d'avoir refusé de surseoir à statuer, alors, selon le pourvoi, que le sursis à statuer doit être ordonné dès lors que la décision à intervenir sur l'action publique est susceptible d'influer sur celle qui doit être rendue par la juridiction civile ;
que la cour d'appel constate que Denys A..., en cause d'appel, demandait la résolution de la cession litigieuse en raison de l'inexécution par M. X... du protocole d'accord - lequel mettait à la charge de ce dernier l'établissement de la situation comptable définitive au 21 octobre 1985 - notamment en raison des inexactitudes affectant les comptes ;
que la décision à intervenir sur la plainte avec constitution de partie civile déposée par Denys A... quant à la fausseté des avoirs pris en compte dans la situation comptable établie par M. X... en exécution du protocole d'accord étant susceptible d'influer sur la demande en résolution de celui-ci, la cour d'appel ne pouvait refuser de surseoir à statuer sans violer l'article 4 du Code de procédure pénale ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que M. X... avait reconnu que la somme de 322 785 francs représentait pour la société une créance impayée sur la société Deutsche Paillard et soutenu que cette créance avait été provisionnée par l'expert qui l'avait comprise dans les comptes et que, quel que soit le sort réservé à l'information pénale ouverte à propos de cet avoir, il n'était pas possible de voir dans cette difficulté une manoeuvre caractéristique de la volonté de dissimulation, l'arrêt retient que, même si cette somme n'est pas négligeable, elle devait être rapprochée du montant de l'excédent de passif de l'ordre de 14 000 000 de francs cité par M. X... ; qu'à partir de ces constatations et appréciations, dont il résultait que la décision à intervenir sur l'action publique n'était pas susceptible d'influer sur l'action résolutoire pour inexécution partielle de le convention de cession intentée par Denys A..., la cour d'appel a pu décider qu'il n'y avait pas lieu à surseoir à statuer ;
Et sur le second moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que les consorts A... reprochent encore à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de Denys A... tendant à la résolution de la vente à M. X..., par protocole d'accord du 31 octobre 1985, de 57 638 actions de la société, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la résolution pour inexécution d'une convention n'est pas subordonnée au caractère fautif de cette inexécution ;
qu'en affirmant que les erreurs affectant la situation comptable établie en exécution du protocole d'accord par M. X... ne pouvait être imputée à faute à celui-ci, la cour d'appel a violé l'article 1184 du Code civil, alors, d'autre part, que la résolution pour inexécution d'une convention n'est pas davantage subordonnée à l'existence d'un préjudice ;
qu'en relevant pourtant qu'il n'était pas nécessaire d'examiner certaines des critiques formulées par le vendeur quant à la situation comptable établie par l'acquéreur, dès lors que les conséquences chiffrées de ces critiques ne pouvaient aboutir à ce que le vendeur ait droit à un supplément de prix, la cour d'appel a fait d'un éventuel préjudice l'une des conditions de la résolution, en méconnaissance de l'article 1184 du Code civil, et alors enfin, qu'en toute hypothèse, Denys A... faisait valoir, dans ses conclusions en réponse, que M. X..., en prenant en compte l'abandon de créances consenti par les créanciers chirographaires dans la situation comptable adressée au vendeur et en attirant expressément l'attention de celui-ci sur ce point, par courrier du 29 février 1988, avait ainsi manifesté son acceptation à une telle prise en compte ;
qu'en affirmant dès lors qu'il convenait de s'en tenir aux termes du protocole d'accord, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si, par son comportement, M. X... n'avait pas accepté, postérieurement au protocole d'accord, de prendre en considération l'allégement de passif dû au concordat, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant retenu, par motifs adoptés, qu'il n'avait jamais été de la commune intention des parties, exprimée soit par des échanges de correspondances, soit par des conventions subséquentes, de faire bénéficier le vendeur de la remise consentie par les créanciers, la cour d'appel a procédé à la recherche prétendument omise par la troisième branche ;
Attendu, en second lieu, qu'il relève du pouvoir souverain du juge du fond d'apprécier si l'inexécution de certaines des obligations résultant d'un contrat synallagmatique présente une gravité suffisante pour en justifier la résolution ;
qu'en retenant, pour rejeter la demande en résolution de la cession des actions formée par Denys A..., que les critiques émises par celui-ci ne pouvaient aboutir à modifier sensiblement l'excédent de passif de l'ordre de 14 000 000 de francs chiffré par l'expert avant l'abandon chirographaire et lui permettre d'approcher le chiffre de 7 500 000 francs, mentionné dans le protocole d'accord, à partir duquel il aurait pu demander un supplément de prix, la cour d'appel, qui n'a fait qu'user du pouvoir qui lui est ainsi conféré, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;
Sur la demande présentée au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que M. X... sollicite, sur le fondement de ce texte, l'allocation d'une somme de 20 000 francs ;
Attendu qu'il y a lieu d'accueillir partiellement cette demande ;




Crim. 3 octobre 1995 n° 94-80.195

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller JOLY, les observations de Me BOUTHORS, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Nasera, contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBERY, chambre correctionnelle, en date du 2 décembre 1993, qui, dans la procédure suivie contre elle du chef d'infraction à la législation sur les stupéfiants, a prononcé sur une exception de nullité de la procédure d'instruction et ordonné un sursis indéterminé ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 4 du Code pénal ancien, 112-1 à 112-4 du nouveau Code pénal, 118, 170, 172, 174 et 385 du Code de procédure pénale ancien, 71 et suivants, 225 et suivants de la loi n 93-2 du 4 janvier 1993 portant réforme de la procédure pénale, 20 et suivants de la loi n 93-1013 du 24 août 1993 modifiant la loi susvisée, 385, 591 à 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué s'est refusé à prononcer l'annulation de la procédure subséquente au procès-verbal d'interrogatoire du 12 septembre 1991, notamment le réquisitoire définitif du parquet y faisant référence ;
"aux motifs que la procédure d'instruction s'est terminée le 30 octobre 1992 ;
que l'étendue de la nullité prévue par les dispositions de l'article 170 du Code de procédure pénale n'est plus reprise par les dispositions nouvelles de l'article 171 qui laisse aux juges un pouvoir d'appréciation qu'exclut l'ancien texte ;
qu'à cet égard, l'article 226 III, alinéa 5, de la loi n 93-2 du 4 janvier 1993 n'a prévu la survie des dispositions des articles 174 et 385 dans leur rédaction antérieure à ladite loi qu'au cas "où les parties n'auraient pas bénéficié des dispositions des trois premiers alinéas de l'article 80-3 du même Code" ;
que l'article 80-3 du Code de procédure pénale est actuellement inexistant puisqu'abrogé par les dispositions de l'article 7 III de la loi du 24 août 1993 ;
qu'en conséquence, sont applicables à la présente affaire les dispositions nouvelles résultant de la loi du 24 août 1993 ;
qu'aucune des diligences effectuées par le magistrat instructeur postérieurement au procès-verbal du 12 septembre 1991 n'a porté atteinte aux droits de la défense ;
qu'il y a donc lieu de rejeter la demande de Nasera X... tendant à faire prononcer l'annulation de la procédure ultérieure ;
"1 ) alors que, d'une part, l'annulation d'un acte de procédure entraîne en principe celle de tout acte subséquent faisant expressément référence à l'acte annulé ;
qu'en ne recherchant pas comme elle en était requise si l'annulation du procès-verbal litigieux n'affectait pas la procédure ultérieure, notamment le réquisitoire définitif qui se référait expressément à l'acte annulé, la Cour a méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;
"2 ) alors que, d'autre par, l'application immédiate de la loi nouvelle est sans effet sur l'invalidité des actes de procédure accomplis en violation de la loi ancienne ;
que les effets d'une nullité de l'instruction close avant l'entrée en vigueur de la loi nouvelle demeurent en conséquence gouvernés par la loi ancienne" ;
Attendu que, saisie de conclusions tendant à l'annulation d'une confrontation ainsi que de toute la procédure ultérieure pour défaut de convocation régulière de l'avocat de l'inculpée, la cour d'appel a cantonné le prononcé de la nullité à l'acte incriminé au motif "qu'aucune des diligences effectuées par le magistrat instructeur postérieurement au procès-verbal du 12 septembre 1991 n'a porté atteinte aux droits de la défense de Nasera X..." ;
Attendu qu'en statuant ainsi, les juges n'encourent pas les griefs allégués ;
Qu'en effet, l'article 174 du Code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993, immédiatement applicable, y compris devant les juridictions correctionnelles pour les procédures renvoyées devant elles avant l'entrée en vigueur de ladite loi, leur permet de décider si l'annulation doit être limitée à tout ou partie de l'acte vicié ou si elle doit s'étendre à tout ou partie de la procédure ultérieure ;
Que, par ailleurs, la cour d'appel a fait l'exacte application de l'article 171 dudit Code, dans sa rédaction résultant de la loi du 24 août 1993, dès lors qu'elle a constaté l'absence d'atteinte aux intérêts de l'inculpée dans les actes postérieurs à celui qu'elle annule ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 461, 512, 570, 571, 591 à 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué, statuant avant dire droit sur les nullités, a prononcé un sursis à statuer sur le fond à une date indéterminée ;
"alors que si les tribunaux correctionnels ont la faculté d'ordonner un renvoi à date déterminée, lorsqu'ils ne peuvent se prononcer en l'état sur le fond, ils ne sauraient en revanche sans interrompre le cours de la justice, surseoir à statuer pour un temps indéterminé, sur l'action dont ils sont saisis" ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que les juges ne sauraient, sans interrompre le cours de la justice, ordonner un sursis à statuer d'une durée indéterminée ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que Nasera X..., poursuivie pour infractions à la législation sur les stupéfiants, a déposé avant toute défense au fond des conclusions tendant à faire déclarer la nullité de la procédure ;
Attendu que la cour d'appel a statué sur ces conclusions et renvoyé l'affaire "sine die" ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans fixer le terme à l'issue duquel l'affaire serait à nouveau appelée, les juges ont méconnu le principe ci-dessus énoncé et interrompu le cours de la justice ;
Que dès lors la cassation est de ce chef encourue ;
Par ces motifs,
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry, en date du 2 décembre 1993, mais seulement en ce qu'il ordonne le renvoi de l'affaire à une date indéterminée et pour qu'il soit à nouveau jugé dans les limites de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Chambéry autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Chambéry, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. Joly conseiller rapporteur, MM. Guerder, Pinsseau, Pibouleau, Mmes Simon, Chevallier, M. Farge conseillers de la chambre, Mmes Batut, Fossaert-Sabatier conseillers référendaires, M. Libouban avocat général, Mme Arnoult greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 3 octobre 1995 n° 94-80.064

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois octobre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller GUERDER, les observations de la société civile professionnelle de CHAISEMARTIN et COURJON, de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE et de Me Le GRIEL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN ;
Statuant sur les pourvois formés par :
- X... Christian, - Y... Marek, contre l'arrêt de la cour d'appel d'ORLEANS, chambre correctionnelle, en date du 6 décembre 1993, qui dans la procédure suivie contre eux, sur renvoi après cassation, du chef de diffamation publique raciale et complicité, a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu l'article 21 de la loi du 3 août 1995 portant amnistie ;
Vu les mémoires ampliatifs et complémentaires produits en demande, et le mémoire en défense ;
Sur le moyen additionnel de cassation proposé au nom de Marek Y... et pris de la violation des articles 460, 513 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que le prévenu a présenté ses moyens de défense avant l'audition du ministère public ;
"alors que selon l'article 513 alinéa 3 du Code de procédure pénale dans sa rédaction résultant de la loi du 4 janvier 1993, les parties en cause ont la parole dans l'ordre prévu par l'article 460 du même Code ;
qu'il en résulte que la défense du prévenu doit être présenté après la demande de la partie civile et les réquisitions du ministère public ;
qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le prévenu a été astreint à présenter sa défense en premier, l'atteinte ainsi portée à ses intérêts ne pouvant être réparée par la mention qu'il a eu la parole en dernier, de sorte que la cassation est encourue ;
Sur le cinquième moyen de cassation proposé au nom de Christian X... et pris de la violation des articles 460, 513 et 593 du Code de procédure pénale 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que le prévenu a présenté ses moyens de défense avant l'audition du ministère public ;
"alors que, selon l'article 513 alinéa 3 du Code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant e la loi du 4 janvier 1993, les parties en cause ont la parole dans l'ordre prévu par l'article 460 du même Code ;
qu'il en résulte que la défense du prévenu doit être présentée après la demande de la partie civile et les réquisitions du ministère public ;
qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que les conseils du prévenu ont été astreints à présenter sa défense en premier, l'atteinte ainsi portée à ses intérêts ne pouvant être réparée par la mention que ses conseils ont eu la parole en dernier, de sorte que la cassation est encourue";
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que Marek Y... et Christian X... étaient représentés à l'audience par leurs avocats, qui ont pris la parole après l'avocat de la partie civile, et avant le ministère public ;
que ce dernier a requis la relaxe des prévenus et le débouté de la partie civile ;
que les avocats des prévenus ont eu la parole en dernier ;
Attendu qu'en cet état, et alors que le débat était limité aux intérêts civils, l'inobservation partielle des dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale, en sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993, entrée en vigueur en application de l'article 49-1 de la loi du 24 août 1993, et abrogée par la loi du 8 février 1995, n'a pu porter atteinte aux intérêts des prévenus ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;
Sur le premier moyen de cassation proposé au nom de Christian X... et pris de la violation des articles 29 alinéa 1, 32 alinéa 2 et 48-1 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du Code de procédure pénale" ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré, sur l'action civile de l'AGRIF, l'exposant coupable de diffamation publique, à raison de la publication dans "le Figaro" d'une interview de Marek Y... ;
"aux motifs notamment qu'en revanche, en qualifiant les parties de l'église catholique qui sont à l'est, de "souvent racistes et antisémites", Marek Y... a, par ces imputations, tenu des propos diffamatoires ;
qu'en effet, ces propos font suite à une phrase comportant des références au "nazisme" ;
que, dès lors, ces termes replacés dans le contexte de l'article se rattachent au comportement précis dénoncé par l'intéressé ;
qu'en prêtant aux églises de l'Est d'avoir eu, dans la conduite de leur action, au moins depuis la dernière guerre, des positions racistes et antisémites qui, à les supposer établies, seraient déshonorantes pour les personnes visées et condamnables , Marek Y... a formulé des allégations diffamatoires ;
qu'il semble considérer les églises qui sont à l'est comme des entités autonomes et qu'il veut les distinguer de celles qui sont en Occident ;
que de tels propos occultent complètement la nature de l'église catholique qui, d'après les termes du symbole de Nicée, est "une et universelle" et qui n'est pas un assemblage d'églises endocéphales ;
qu'en traitant ainsi une partie de l'église catholique, Marek Y... atteint l'ensemble de cette institution ;
que les dispositions de l'article 32 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881 répriment toute diffamation commise envers une personne physique ou morale ou un groupe de personnes quelle qu'en soit l'ampleur ;
qu'en tout état de cause, les communautés chrétiennes des pays de l'est étaient visées en raison de leur obédience catholique et du comportement prêté à leurs membres et ceci accessoirement à leur localisation ;
qu'en les traitant de racistes et d'antisémites, Marek Y... a allégé des faits qui sont déshonorants et que ces allégations présentent un caractère diffamatoire ;
"alors qu'en énonçant, d'une part, qu'en traitant de façon diffamatoire une partie de l'église catholique (les églises de l'est) considérée comme autonome, Marek Y... atteint l'ensemble de cette institution qui "d'après les termes du symbole de Nicée est "une et universelle", et d'autre part, qu'étaient visées les communautés chrétiennes des pays de l'est, accessoirement à leur localisation, la Cour s'est contredite, privant ainsi sa décision de motifs et de base légale au regard des textes susvisés ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé au nom de Christian X... et pris de la violation des articles 29 alinéa 1, 32 alinéa 2 et 48-1 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré, sur l'action civique de l'AGRIF, l'exposant coupable de diffamation publique, à raison de la publication dans "le figaro" d'une interview de Marek Y... ;
"aux motifs qu'en qualifiant les parties de l'église catholique qui sont à l'est, de "souvent racistes et antisémites", Marek Y... a, par ces imputations, tenu des propos diffamatoires ;
qu'en effet, ces propos font suite à une phrase comportant des références au "nazisme" ;
que dès lors, ces termes replacés dans le contexte de l'article se rattachent au comportement précis dénoncé par l'intéressé ;
qu'en prêtant aux églises de l'est d'avoir eu, dans la conduite de leur action, au moins depuis la dernière guerre, des positions racistes et antisémites qui, à les supposer établies, seraient déshonorantes pour les personnes visées et condamnables, Marek Y... a formulé des allégations diffamatoires ;
"alors que la diffamation est l'imputation d'un fait précis de nature à porter atteinte à l'honneur et à la considération d'une personne ou d'un groupe de personnes ;
que la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer, par l'examen de l'écrit incriminé seul pris en compte par la cour d'appel pour l'interprétation des propos de Marek Y..., que celui-ci, dont l'interview parue dans le Figaro sous le titre "Réflexions sur Auschwitz" parlant à bâtons rompus et répondant à une série de questions portant sur des événements distincts à partir de celui très controversé de l'installation d'un carmel sur le site du camp d'extermination d'Auschwitz critiquée par lui à partir de la parole du Christ "Laisse les morts enterrer leurs morts", après avoir rappelé liminairement l'amitié qu'il portait aux participants catholiques de la conférence de Genève et avant de réaffirmer la nécessité du dialogue judéo-chrétien, en réponse à la question du journaliste Bernard Bonilauri relative à la satisfaction du cardinal Lustiger face au rôle joué par l'église dans le mouvements de libération de pays communistes, a exprimé son pessimisme, émettant une appréciation générale sur les caractéristiques séculaires des églises de l'est et indiquant que ce sont des églises qui, n'ayant pas connu l'aggiornamento de l'église d'occident après la défaite du nazisme, c'est à dire après 1945, aggiornamento marqué notamment par Vatican II et la personnalité de Jean XXIII, sont restées archaïques, xénophobes, souvent racismes et antisémites ;
que, ce faisant, il a utilisé à l'encontre de ces églises locales des expressions qui ne peuvent être considérées comme diffamatoires faute de viser un fait ou un événement déterminé" ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé au nom de Christian X... et pris de la violation des articles 29 alinéa 1, 32 alinéa 2 et 48-1 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré, sur l'action civile de l'AGRIF, l'exposant coupable de diffamation publique, à raison de la publication dans "le Figaro" d'une interview de Marek Y... ;
"aux motifs que Marek Y... semble considérer les églises qui sont à l'est comme des entités autonomes et qu'il veut les distinguer de celles qui sont en Occident ;
que de tels propos occultent complètement la nature de l'église catholique qui, d'après les termes du symbole de Nicée, est "une et universelle" et qui n'est pas un assemblage d'églises endocéphales ;
qu'en traitant ainsi une partie de l'église catholique, Marek Y... atteint l'ensemble de cette institution ;
que les dispositions de l'article 32 alinéa 2 de la loi du 12 juillet 1881 répriment toute diffamation commise envers une personne physique ou morale ou un groupe de personnes qu'elle qu'en soit l'ampleur ;
qu'en tout état de cause, les communautés chrétiennes de pays de l'est étaient visées en raison de leur obédience catholique et du comportement prêté à leurs membres et ceci accessoirement à leur localisation ;
qu'en les traitant de racistes et antisémites, Marek Y... a allégué des faits qui sont déshonorants et que ces allégations présentent un caractère diffamatoire ;
"alors que si l'appréciation des juges du fond est souveraine lorsqu'ils déclarent, d'après les circonstances de la cause, quelles est la personne diffamée ou injuriée en s'appuyant sur des éléments de fait extrinsèques à l'écrit incriminé, c'est à condition que leurs énonciations soient suffisantes et qu'en se référant à la nature de l'église catholique qui, d'après les termes du symbole de Nicée est "une et universelle" sans s'expliquer sur le point essentiel de savoir s'il s'agissait de sa nature spirituelle ou temporelle, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;
Sur le premier moyen de cassation proposé au nom de Marek Y... et pris de la violation de l'article 29 alinéas 1 et 2 de la loi du 29 juillet 1881, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Marek Y... coupable de complicité de diffamation publique raciale ;
"aux motifs qu'en qualifiant les parties de l'église catholique qui sont à l'est, de "souvent racistes et antisémites", Marek Y... a, par ces imputations, tenu des propos diffamatoires ;
qu'en effet, ces propos font suite à une phrase comportant des références au "nazisme" ;
que dès lors, ces termes replacés dans le contexte de l'article se rattachent au comportement précis dénoncé par l'intéressé ;
qu'en prêtant aux églises de l'est d'avoir eu, dans la conduite de leur action, au moins depuis la dernière guerre, des positions racistes et antisémites qui, à les supposer établies, seraient déshonorantes pour les personnes visées et condamnables, Marek Y... a formulé des allégations diffamatoires ;
"alors que la diffamation est l'imputation d'un fait précis de nature à porter atteinte à l'honneur et à la considération d'une personne ou d'un groupe de personnes ;
que la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer, par l'examen de l'écrit incriminé seul pris en compte par la cour d'appel pour l'interprétation des propos de Marek Y..., que celui-ci , dont l'interview paru dans le Figaro sous le titre "Réflexions sur Auschwitz" parlant à bâtons rompus et répondant à une série de questions portant sur des événements distincts à partir de celui très controversé de l'installation d'un carmel sur le site du camp d'extermination d'Auschwitz critiquée par lui à partir de la parole du Christ "Laisse les morts enterrer leurs morts", après avoir rappelé liminairement l'amitié qu'il portait aux participants catholiques de la conférence de Genève et avant de réaffirmer la nécessité du dialogue judéo-chrétien, en réponse à la question du journaliste Bernard Bonilauri relative à la satisfaction du cardinal Lustiger face au rôle joué par l'église dans les mouvements de libération des pays communistes, a exprimé son pessimisme, émettant une appréciation générale sur les caractéristiques séculaires des églises de l'est et indiquant que ce sont des églises qui, n'ayant pas connu l'aggiornamento de l'église d'occident après la défaite du nazisme, c'est à dire après 1945, aggiornamento marqué notamment par Vatican II et la personnalité de Jean XXIII sont restées archaïques, xénophobes, souvent racistes et antisémites ;
que ce faisant, il a utilisé à l'encontre de ces églises locales des expressions qui ne peuvent être considérées comme diffamatoires faute de viser un fait ou un événement déterminé" ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé au nom de Marek Y... et pris de la violation des articles 29 et 32 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à conclusions ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Marek Y... coupable de complicité de diffamation publique raciale ;
"aux motifs que Marek Y... semble considérer les églises qui sont à l'est comme des entités autonomes et qu'il veut les distinguer de celles qui sont en Occident ;
que de tels propos occultent complètement la nature de l'église catholique qui, d'après les termes du symbole de Nicée, est "une et universelle" et qui n'est pas un assemblage d'églises endocéphales ;
qu'en traitant ainsi une partie de l'église catholique, Marek Y... atteint l'ensemble de cette institution ;
que les dispositions de l'article 32, alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881 répriment toute diffamation commise envers une personne physique ou morale ou un groupe de personnes qu'elle qu'en soit l'ampleur ;
qu'en tout état de cause, les communautés chrétiennes des pays de l'est étaient visées en raison de leur obédience catholique et du comportement prêté à leurs membres et ceci accessoirement à leur localisation ;
qu'en les traitant de racistes et antisémites, Marek Y... a allégué des faits qui sont déshonorants et que ces allégations présentant un caractère diffamatoire ;
"alors que d'une part, si l'appréciation des juges du fond est souveraine lorsqu'ils déclarent, d'après les circonstances de la cause, quelle est la personne diffamée ou injuriée en s'appuyant sur des éléments de fait extrinsèques à l'écrit incriminé, c'est à condition que leurs énonciations soient suffisantes et qu'en se référant à la nature de l'église catholique qui, d'après lest termes du symbole de Nicée est "une et universelle" sans s'expliquer sur le point essentiel de savoir s'il s'agissait de sa nature spirituelle ou temporelle, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;
"alors que, d'autre part, dans ses conclusions régulièrement déposées devant la Cour, Malek Y... faisait valoir que ses propos concernant les églises de l'est ne désignaient pas les chrétiens, ni a fortiori les catholiques envisagés comme des personnes déterminées individuellement et constituant un groupe auquel ils appartiennent, mais les "églises de l'est" avec un "E" majuscule, expression sans laquelle peuvent se reconnaître et s'identifier les épiscopats et organes représentatifs de l'institution qu'elles constituent et qu'en ne répondant pas à cet argument péremptoire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que la cour de renvoi, qui n'était pas tenue de suivre les prévenus dans le détail de leur argumentation, a statué en conformité de l'arrêt de cassation qui l'avait saisie ;
que les moyens, qui appellent la Cour de cassation à revenir sur la doctrine affirmée par son précédent arrêt, ne sont pas recevables ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé au nom de Marek Y... et pris de la violation des articles 29 alinéa 1 et 32 alinéa 2 de la loi du 29 juillet 1881, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à conclusions ;
"en ce que l'arrêt attaqué a omis d'examiner l'exception de bonne foi invoquée par Marek Y... ;
"alors que dans ses conclusions régulièrement déposées devant la Cour, Marek Y... protestait de ses bonnes intentions universelles à l'égard des chrétiens en général, de l'est comme de l'ouest ;
qu'il précisait qu'il n'avait cessé dans ses déclarations publiques, ses livres, ses articles de préconiser le rapprochement et la paix entre les chrétiens et les autres religions ;
qu'il s'était fait l'apôtre de ce rapprochement en allant à leur rencontre et en allant rendre visite au Pape et, se référant tant aux témoignages d'André Froissard qu'aux déclarations des témoins entendus à l'audience du tribunal -l'abbé Pierre, le directeur de la Vie Catholique (M. Petit), l'éditorialiste de la Croix (Noël Copin), l'abbé Jean Toulat- qui avaient tous confirmé que ses propos ne pouvaient procéder d'une intention malveillante mais d'un désir d'abolir toute trace de résurgence de l'antisémitisme qui a été pendant des siècles cultivé, entretenu et propagé par l'église qui en faisait même une doctrine et qu'en conséquence les éléments de sa bonne foi étaient réunis de sorte qu'en n'examinant pas ce moyen péremptoire de défense, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure pénale" ;
Sur le quatrième moyen de cassation de cassation proposé au nom de Christian X... et pris de la violation des articles 29 alinéa 1, 32 alinéa 2 et 48-1 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré, sur l'action civile de l'AGRIF, l'exposant coupable de diffamation publique, à raison de la publication dans "le Figaro" d'une interview de Marek Y... sans examiner l'exception de bonne foi invoquée par ce dernier ;
"alors que dans ses conclusions régulièrement déposées devant la Cour, Marek Y... protestait de ses bonnes intentions universelles à l'égard des chrétiens en général, de l'est comme de l'ouest ;
qu'il précisait qu'il n'avait cessé dans ses déclarations publiques, ses livres, ses articles, de préconiser le rapprochement et la paix entre les chrétiens et les autres religions ;
qu'il s'était fait l'apôtre de ce rapprochement en allant à leur rencontre et en allant rendre visite au Pape et, se référant tant aux témoignages d'André Frossard qu'aux déclarations des témoins entendus à l'audience du tribunal -l'abbé Pierre, le directeur de la Vie Catholique (M. Petit), l'éditorialiste de la Croix (Noël Copin), l'abbé Jean Toulat- qui avaient tous confirmé que ses propos ne pouvaient procéder d'une intention malveillante mais d'un désir d'abolir toute race de résurgence de l'antisémitisme qui a été pendant des siècles cultivé, entretenu et propagé par l'église qui en faisait même une doctrine et qu'en conséquence, les éléments de sa bonne foi étaient réunis de sorte qu'en n'examinant pas ce moyen péremptoire de défense, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure pénale" ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que l'arrêt attaqué énonce que Marek Y... prétend avoir agi avec bonne foi "car il avait l'intention de ne pas attiser les passions et le but poursuivi était de réunir juifs et chrétiens, d'appliquer les enseignements de l'Eglise et de lutter contre les guerres de religion" ;
que l'arrêt ajoute que le prévenu prétend avoir fait preuve de précautions dans l'expression, en déclarant "je ne tenais pas à attiser les passions, ...les rencontres entre juifs et chrétiens sont nécessaires,...il faut recourir aux rouages de la société civile", et en annonçant sa rencontre avec Monseigneur Glemp et avec Tadeusz Mazowiecki ;
Attendu qu'en retenant néanmoins à la charge des prévenus le délit de diffamation raciale, et la complicité de ce délit, la cour d'appel, qui a expressément écarté l'exception de bonne foi invoquée par Christian X..., a implicitement mais nécessairement écarté de même celle dont se prévalait Marek Y... dans ses conclusions ;
Que les juges ont pu prononcer ainsi sans encourir les griefs allégués, dès lors qu'en matière de diffamation, c'est à celui qui invoque la bonne foi d'en rapporter la preuve ;
que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que tel n'a pas été le cas en l'espèce ;
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Milleville conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Guerder conseiller rapporteur, MM. Pinsseau, Joly, Pibouleau, Mmes Simon, Chevallier, M. Farge conseillers de la chambre, Mmes Batut, Fossaert-Sabatier conseillers référendaires, M. Libouban avocat général, Mme Arnoult greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 27 septembre 1995 n° 94-84.147

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-sept septembre mil neuf cent quatre-vingt-quinze, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire NIVOSE, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, HARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Marc, contre l'arrêt de la cour d'assises des ALPES-MARITIMES, du 15 juin 1994, qui, pour tentative de meurtre, l'a condamné à 20 ans de réclusion criminelle, assortie d'une période de sûreté des deux tiers de cette peine ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de cassation pris de la violation des articles 362 du Code de procédure pénale, 121-4, 121-5, 221-1 (nouveau) du Code pénal ;
"en ce que l'accusé a été condamné à une peine de 20 ans de réclusion criminelle, assortie d'une période de sûreté des deux tiers, décidée à la majorité absolue ;
"alors que le maximum d'une peine privative de liberté ne peut-être prononcé par la cour d'assises qu'à la majorité de huit voix au moins ;
que le maximum de la période de sûreté ne peut être prononcé que s'il réunit cette majorité qualifiée ;
qu'en l'occurrence, cette majorité n'ayant pas été constatée, l'annulation de la sanction et de la déclaration de culpabilité doit s'ensuivre" ;
Attendu que la feuille de questions et l'arrêt de condamnation mentionnent que la Cour et le jury ont condamné Marc X... à la peine de 20 ans de réclusion criminelle et après décision spéciale, prise à la majorité absolue, ont fixé aux deux tiers de cette peine la durée de la période de sûreté dont elle est assortie ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'assises n'a violé aucun des textes visés au moyen ;
Qu'en effet, selon l'article 362 du Code de procédure pénale, la majorité qualifiée de 8 voix au moins n'est exigée que pour le prononcé du maximum des peines privatives de liberté ;
D'où il suit que le moyen est inopérant ;
Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury ;
REJETTE le pourvoi
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Où étaient présents : M. Milleville conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Nivôse conseiller rapporteur, MM. Massé, Guerder, Fabre, Pinsseau, Mme Baillot, MM. Joly, Pibouleau conseillers de la chambre, M. Dintilhac avocat général, Mme Nicolas greffier de chambre ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;




Crim. 26 septembre 1995 n° 95-83.071 B n° 283


CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... ou Y...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 4 mai 1995, qui, dans l'information suivie notamment contre lui du chef d'infraction à la législation sur les stupéfiants, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du Président de la chambre criminelle prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu le mémoire produit ;
Sur l'unique moyen de cassation pris de la violation des articles 67 bis du Code des douanes, 802 et 593 du Code de procédure pénale, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a refusé d'annuler l'ensemble de la procédure d'instruction suivie à l'encontre de Ermis du chef de trafic de stupéfiants, à partir de la cote D. 2 du dossier ;
" aux motifs que, s'il y a eu livraison surveillée au sens de l'article 67 bis du Code des douanes à l'origine de l'appréhension de la drogue et de l'ouverture de la procédure, et s'il est établi que le procureur de la République compétent n'a pas été informé du déroulement de ces opérations ni mis à même de les contrôler, la méconnaissance de ces dispositions, non prescrites à peine de nullité, et ne concernant que les relations Douane-Justice, n'a pas été de nature à porter atteinte aux droits de la défense ;
" alors, d'une part, qu'en l'absence d'autorisation régulière du procureur de la République pour procéder à une livraison surveillée, les agents des Douanes perdent toute compétence pour effectuer les opérations de constatation des infractions, identification de leur auteurs et saisies prévues à l'article 67 bis du Code des douanes ; qu'en conséquence, la nullité encourue à raison d'une livraison surveillée irrégulière, qui touche à la compétence, doit être prononcée, peu important l'atteinte portée aux droits de la défense ;
" alors, d'autre part, et en toute hypothèse, que les autorités qui participent à la procédure pénale doivent agir sans artifice ni stratagème ; qu'une livraison surveillée ne peut être réputée dépourvue de tels artifices que dans la mesure où elle est autorisée et contrôlée par le procureur de la République ; qu'à défaut, la provocation dont sont l'objet les éventuels auteurs des infractions porte nécessairement atteinte aux droits de la défense ; qu'ainsi, la nullité devait être en toute hypothèse prononcée ; "
Vu lesdits articles ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier le dispositif ; que l'insuffisance ou la contradiction dans les motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'article 67 bis du Code des douanes que les agents de l'Administration peuvent, afin de constater certaines infractions douanières et en identifier les auteurs, après en avoir informé le procureur de la République ou le juge d'instruction compétents et sans plus de formalité, procéder à la surveillance de l'acheminement de produits stupéfiants ; qu'il en va autrement, toutefois, lorsqu'aux mêmes fins ils sont amenés à mettre à la disposition de ces personnes des moyens de caractère juridique ainsi que des moyens de transport, de dépôt et de communication ; qu'en ce cas, ces agents ne peuvent procéder à de tels actes qu'avec l'autorisation formelle des autorités judiciaires ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que X..., Arthur Z... et Isa A..., tous trois de nationalités étrangères et résidents en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas, ont été inculpés, du chef d'infraction à la législation sur les stupéfiants, pour avoir importé sur le territoire national, à partir de la Hollande, de l'héroïne destinée à être vendue en Grande-Bretagne ;
Que cette importation ayant eu lieu, hors l'autorisation et le contrôle des autorités judiciaires, en présence de douaniers, antérieurement avisés par A..., en passant par un poste-frontière neutralisé par la Direction nationale de recherche et d'enquête douanière, à l'aide notamment d'un véhicule loué avec " la caution d'un agent des Douanes ", la chambre d'accusation a été saisie, à l'initiative d'un des inculpés, d'une requête tendant à l'annulation de pièces de la procédure ;
Attendu que, pour rejeter cette requête et dire n'y avoir lieu à annulation, les juges énoncent que la surveillance du véhicule servant au transport de la marchandise, ainsi que l'ouverture de la frontière pour permettre à la marchandise d'arriver à destination, constituaient bien une livraison surveillée au sens de l'article 67 bis du Code des douanes et qu'il est établi que celle-ci s'est effectuée, en méconnaissance des prescriptions de ce texte, à l'insu et hors du contrôle des autorités judiciaires compétentes ; que, toutefois, selon l'arrêt, ces dispositions ne concernant que " les relations Douanes-Justice ", leur méconnaissance n'a pas été de nature à affecter les droits de la défense ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'ayant relevé que l'opération mise en oeuvre par les agents des Douanes ne s'était pas limitée à la surveillance de l'acheminement de la marchandise mais avait donné lieu à la fourniture de moyens à l'un des auteurs de l'infraction, elle se devait de rechercher si les agents des Douanes, en agissant sans l'autorisation du procureur de la République et hors de son contrôle, n'avaient pas commis un excès de pouvoir viciant la procédure, la chambre d'accusation, qui a fait une lecture inexacte de l'article 67 bis précité, n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure de s'assurer de la légalité de la décision ;
Que dès lors la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 4 mai 1995 ;
DIT qu'en application de l'article 612-1 du Code de procédure pénale, l'annulation prononcée est étendue, dans l'intérêt de la justice, aux autres parties à la procédure qui ne se sont pas pourvues ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Douai.




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