Crim. 5 juin 1996 n° 94-85.365
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le cinq juin mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller GRAPINET, les observations de la société civile professionnelle Le BRET et LAUGIER et de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PERFETTI;
Statuant sur les pourvois formés par : - PERRIN X...,
- PERRIN Z...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BOURGES, chambre correctionnelle, du 27 octobre 1994, qui, sur renvoi après cassation, les a condamnés, pour chasse sur le terrain d'autrui sans le consentement du propriétaire ou du détenteur du droit de chasse, chacun, à une amende de 100 francs et a prononcé sur les réparations civiles;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur l'action publique ;
Attendu que la contravention reprochée, commise avant le 18 mai 1995, est amnistiée par application de l'article 1er de la loi du 3 août 1995 portant amnistie; que, cependant, l'amnistie ne pouvant préjudicier aux droits des tiers, conformément à l'article 21 de la loi précitée, il y a lieu de statuer sur le pourvoi du seul point de vue des intérêts civils;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 222-6, L. 222-9, R. 222-21, R. 228-1 alinéa 1 du Code rural, 2 et 3 de la loi du 10 juillet 1964, 7 et 12 du décret du 6 octobre 1966, 4 du Code pénal, 1382 du Code civil, 427 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
violation des droits de la défense;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré X... et Philippe Y... coupables d'actes de chasse sur le terrain d'autrui et sans avoir obtenu le consentement du propriétaire ou du détenteur du droit de chasse, prononcé à l'encontre de chacun d'eux une peine d'amende de 100 francs, les condamnant, en outre, au paiement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts envers l'ACCA de Louroux-de-Bouble et la fédération départementale des chasseurs de l'Allier;
"aux motifs que le motif essentiel allégué par les prévenus à l'appui de leur contestation de la légalité de l'arrêté ministériel du 20 mai 1970 est l'absence de proposition antérieure du préfet de l'Allier; qu'il résulte des pièces produites devant la Cour et qui ne peuvent faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, sauf à affirmer que le document est un faux... que, contrairement à l'avis du tribunal administratif, le préfet de l'Allier a formulé une proposition par une lettre du 8 juillet 1969, après consultation régulière des diverses autorités; que ce document, qui ne saurait être démenti par les seules affirmations tardives et discutables d'un ancien préfet, au demeurant n'exerçant pas ses fonctions dans le département lors de la rédaction du courrier, permet à la Cour, chargée d'apprécier la légalité de l'acte administratif servant de fondement aux poursuites, que cet acte respecte sur le point querellé les exigences légales; que les demandeurs mettent de plus en cause la légalité de l'arrêté préfectoral ayant délivré l'agrément de l'ACCA de Louroux-de-Bouble au motif que cet arrêté ne respecte pas les dispositions de l'article 7 du décret du 6 octobre 1966; mais que cette argumentation ne résiste pas à l'examen des textes applicables en l'espèces; que pour s'en tenir aux textes antérieurs à la dernière codification, la lecture de l'article 3 permet de constater que l'Association est constituée sur tous les terrains de la commune sauf ceux, ..., que ce simple rappel, alors que les prévenus n'établissent en aucune manière que des oppositions aient été formulées démontre que l'existence d'une liste positive est tout à fait abusive et ne peut s'appuyer sur aucun fondement légal;
"alors, d'une part, que le juge correctionnel ne peut fonder sa décision que sur des preuves qui sont contradictoirement discutées devant lui; que méconnaît ensemble les dispositions de l'article 427 du Code de procédure pénale et les droits de la défense, la cour d'appel qui, pour rejeter l'exception d'illégalité de l'arrêté ministériel du 20 mars 1970 soulevée par X... et Philippe Y... en l'absence de demande du préfet afin de voir inscrire le département de l'Allier sur la liste de ceux où devront être créées des associations communales de chasse agréées, retient qu'il résulte des pièces produites devant la Cour, mais sans constater qu'elles aient été soumises à un débat contradictoire, comme l'ont fait valoir les deux prévenus par la voie de leur conseil, et en ajoutant qu'elles ne peuvent faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, que, contrairement à l'avis du tribunal administratif, le préfet de l'Allier a formulé une proposition par une lettre du 8 juillet 1969, après consultation régulière de diverses autorités;
"alors, d'autre part, que les dispositions des articles 7 et 12 du décret du 6 octobre 1966, pris pour l'application de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1964, ont prévu l'établissement d'une liste positive où sont figurés tout autant les terrains pouvant être soumis à l'action de l'association communale de chasse agréée, que ceux ayant fait l'objet d'une opposition; que, dès lors, la cour d'appel n'a pu écarter l'exception d'illégalité de l'arrêté préfectoral du 5 mars 1972, faute de mise au point de la liste susvisée, en retenant, par le biais d'une interprétation erronée de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1964, que l'exigence d'une liste positive était tout à fait abusive et ne pouvait s'appuyer sur aucun fondement légal";
Attendu que X... et Philippe Y..., poursuivis pour avoir chassé sur le terrain d'autrui sans le consentement du propriétaire ou du détenteur du droit de chasse, ont régulièrement invoqué devant les juges d'appel l'exception d'illégalité tant de l'arrêté ministériel du 20 mars 1970 ayant étendu au département de l'Allier, notamment, la liste des départements où des associations communales de chasse agréées (ACCA) devront être créées dans toutes les communes, en méconnaissance des dispositions des articles L. 222-6 et R. 222-7 du Code rural prévoyant que cette liste est arrêtée par le Ministre chargé de la chasse sur proposition du préfet du département concerné, inexistante en l'espèce, que de l'arrêté préfectoral du 6 septembre 1972 portant agrément de l'ACCA de Louroux-de-Bouble, en l'absence prétendue d'une liste "positive" mentionnant à la fois les terrains pouvant être soumis à l'action de l'ACCA et ayant fait l'objet d'une opposition;
Attendu que pour rejeter ces exceptions, et mettre à la charge des prévenus l'infraction reprochée, l'arrêt attaqué énonce "qu'il résulte des pièces produites devant la Cour... que le préfet de l'Allier a formulé une proposition par une lettre du 8 juillet 1969, après consultation régulière des diverses autorités"; que ce document, qui ne peut faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, permet à la cour d'appel de s'assurer que "cet acte respecte sur le point querellé les exigences légales";
Que les juges ajoutent, s'agissant de l'illégalité invoquée de l'arrêté préfectoral du 6 septembre 1972, que les dispositions de l'article 3, alinéa 6, de la loi du 10 juillet 1964, devenu l'article L. 222-10 du Code rural, qu'ils rappellent, excluent toute exigence de liste "positive", et que les prévenus, "qui n'établissent en aucune manière que ses oppositions aient été formulées", sont irrecevables à le faire, compte-tenu de la date de leur bail;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, dépourvus d'insuffisance ou de contradiction, la cour d'appel, qui a fait l'exacte application des articles 427 du Code de procédure pénale et de l'article L. 222-10 du Code rural définissant la liste des terrains constituant le territoire de chasse d'une association communale de chasse agréée, a justifié sa décision;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs,
DECLARE l'action publique ETEINTE ;
REJETTE les pourvois pour le surplus ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Jean Simon conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Grapinet conseiller rapporteur, MM. Blin, Aldebert conseillers de la chambre, Mme Ferrari conseiller référendaire appelé à compléter la chambre , Mme Verdun conseiller référendaire;
Avocat général : M. Perfetti ;
Greffier de chambre : Mme Arnoult ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 5 juin 1996 n° 95-84.066 B n° 233
REJET des pourvois formés par :
- X... Maxime,
- Y... Emile,
- Z... André,
- A... Bernard,
contre l'arrêt de la cour d'assises de Paris, spécialement composée, en date du 3 juillet 1995, qui les a condamnés à 30 ans de réclusion criminelle, le premier pour détériorations d'objets mobiliers et de biens immobiliers appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, tentative de ce crime, destruction aggravée d'objets mobiliers et de biens immobiliers appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, fabrication et détention sans autorisation de machines ou engins meurtriers ou incendiaires agissant par explosion, détention sans motifs légitimes de substances explosives et vol, le deuxième et le troisième, pour destruction d'objets mobiliers et de biens immobiliers appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, complicité de tentative de ce crime, destruction aggravée d'objets mobiliers et de biens immobiliers appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, fabrication et détention sans autorisation de machines ou engins meurtriers, et, en outre, en ce qui concerne le troisième, pour détention sans motifs légitimes de substances explosives, enfin, le quatrième, pour destructions volontaires d'objets mobiliers et de biens immobiliers appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, tentative de ce crime, complicité de ce crime aggravé, fabrication et détention sans autorisation de machines ou engins meurtriers ou incendiaires agissant par explosion et détention sans motifs légitimes de substances explosives, et, en ce qui concerne X... Maxime, contre l'arrêt du 4 juillet 1995 par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits ;
Sur le premier moyen de cassation proposé pour les 4 demandeurs et pris de la violation des articles 34, 39 et 241 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué n'indique pas la qualité du représentant du ministère public aux audiences des débats des 20 juin 1995 (arrêt, pages 5, 6 et 7), 21 juin 1995 (pages 8 et 9), 22 juin 1995 (page 11), 23 juin 1995 (page 12), 26 juin 1995 (pages 15 et 16), 27 juin 1995 (page 19), 28 juin 1995 (page 21), 29 juin 1995 (pages 22 et 24), 30 juin 1995 (page 24), et à l'audience de lecture de l'arrêt, en date du 3 juillet 1995 (pages 25 et 27) ;
" alors que si, dans une même affaire, les fonctions du ministère public peuvent, au cours de plusieurs audiences, être exercées par des magistrats différents, lesquels peuvent recevoir à cette fin délégation du procureur général, encore faut-il que l'identité et la qualité de ceux-ci soient précisées, les fonctions du ministère public ne pouvant être exercées que par un magistrat du ministère public du ressort de la cour d'appel dans lequel est instituée la cour d'assises ;
" qu'en l'espèce, ne répondent pas aux exigences légales les mentions de l'arrêt qui ne permettent pas de s'assurer que le représentant du ministère public présent aux audiences précitées avait qualité pour occuper ces fonctions devant la cour d'assises de Paris, spécialement composée " ;
Attendu qu'il n'appartient pas à l'accusé de contester la régularité de la délégation du magistrat occupant les fonctions du ministère public ;
D'où il suit que le moyen n'est pas recevable ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé pour les 4 demandeurs : (sans intérêt) ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé pour les 4 demandeurs : (sans intérêt) ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé pour les 4 demandeurs (sans intérêt) ;
Sur le cinquième moyen de cassation proposé pour les 4 demandeurs : (sans intérêt) ;
Sur le sixième moyen de cassation proposé pour les 4 demandeurs : (sans intérêt) ;
Sur le septième moyen de cassation proposé pour X... Maxime et pris de la violation des articles 279, 280, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 § 3. b de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" en ce que l'arrêt incident du 20 juin 1995 (procès-verbal des débats, pages 5 et 6) a rejeté la demande de renvoi présentée par l'accusé X... Maxime ;
" aux motifs que l'accusé X... Maxime allègue avoir fait l'objet, le 19 juin 1995, dès son retour en maison d'arrêt et jusqu'à ce matin, d'une mesure disciplinaire ayant eu pour conséquence de l'empêcher de consulter son dossier ;
" que la copie du dossier de la procédure lui a été remise le 11 avril 1995 ;
" qu'ainsi l'accusé a disposé d'un temps suffisant pour préparer sa défense nonobstant les conséquences de la mesure alléguée (page 6) ;
" alors que devant, en application des articles 279 et 280 du Code de procédure pénale et 6 § 3. b de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, disposer, à chaque phase du procès pénal, du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, l'accusé doit nécessairement recevoir communication du dossier de procédure non seulement pendant la phase d'instruction préparatoire, qui en l'espèce s'est achevée par l'arrêt de renvoi du 2 novembre 1994, mais également au cours de l'instruction définitive qui a lieu à l'audience des débats devant la cour d'assises, seule cette communication permettant à l'accusé de répondre utilement aux chefs d'accusations et aux questions posées par la Cour ;
" que, dès lors, en se bornant à énoncer que la communication du dossier de procédure à l'accusé, effectuée le 11 avril 1995, avait permis à celui-ci de préparer sa défense, la cour d'assises a privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés " ;
Et sur le neuvième moyen de cassation proposé pour X... Maxime et pris de la violation des articles 279, 280, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 § 3. b de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
" en ce que l'arrêt incident du 21 juin 1995 (procès-verbal des débats, pages 9 et 10) a rejeté la demande de renvoi présentée par l'accusé X... Maxime ;
" aux motifs que l'accusé X... Maxime allègue avoir fait l'objet, le 20 juin 1995, dès son retour en maison d'arrêt et jusqu'à ce matin, d'une mesure disciplinaire ayant eu pour conséquence de l'empêcher de consulter son dossier et de disposer de quoi écrire ;
" que la copie du dossier de la procédure lui a été remise le 11 avril 1995, conformément à la loi ;
" qu'ainsi l'accusé a disposé d'un temps suffisant pour préparer sa défense nonobstant les conséquences de la mesure alléguée (page 10) ;
" alors que devant, en application des articles 279 et 280 du Code de procédure pénale et 6 § 3. b de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, disposer, à chaque phase du procès pénal, du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, l'accusé doit nécessairement recevoir communication du dossier de procédure non seulement pendant la phase d'instruction préparatoire, qui en l'espèce s'est achevée par l'arrêt de renvoi du 2 novembre 1994, mais également au cours de l'instruction définitive qui a lieu à l'audience des débats devant la cour d'assises, seule cette communication permettant à l'accusé de répondre utilement aux chefs d'accusations et aux questions posées par la Cour ;
" que, dès lors, en se bornant à énoncer que la communication du dossier de procédure à l'accusé, effectuée le 11 avril 1995, avait permis à celui-ci de préparer sa défense, la cour d'assises a privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu que le procès-verbal des débats constate qu'à l'issue de la première audience, en date du 19 juin 1995, X... Maxime a été reconduit à la maison d'arrêt où, en raison de son comportement, il a dû être placé en quartier d'isolement ; que le 20 juin, à la reprise des débats, il a par son conseil déposé des conclusions tendant au renvoi de l'affaire, au motif allégué qu'il avait ainsi été privé du droit d'accéder à son dossier ;
Attendu que, par arrêt incident rendu dans les formes de droit, la Cour a rejeté sa demande ; qu'à l'appui de son refus, elle relève que copie de la procédure lui a été remise le 11 avril 1995 et qu'il a ainsi disposé d'un temps suffisant pour préparer sa défense nonobstant les conséquences de la mesure alléguée ;
Attendu que, le même jour, à son retour à la maison d'arrêt, X... Maxime a dû à nouveau être placé en quartier d'isolement ; que le 21 juin, à la reprise des débats, il a, une nouvelle fois sollicité le renvoi de l'affaire ; qu'à nouveau, la Cour a rejeté sa demande, rappelant, comme dans son arrêt précédent, que la copie du dossier lui avait été remise dès le 11 avril 1995 ;
Attendu qu'en prononçant ainsi par les 2 arrêts critiqués, la Cour a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ; que, si tout accusé a droit de disposer du temps et des facilités nécessaires pour préparer sa défense, il ne saurait tirer argument d'une situation qu'il a délibérément provoquée pour prétendre que ce droit lui a été refusé et tenter de la sorte d'entraver le cours de la justice ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent être accueillis ;
Sur le huitième moyen de cassation proposé pour X... Maxime : (sans intérêt) ;
Sur le dixième moyen de cassation proposé pour les 4 demandeurs : (sans intérêt) ;
Sur le onzième moyen de cassation proposé pour les 4 demandeurs :
(sans intérêt) ;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour ;
REJETTE les pourvois.
Crim. 30 mai 1996 n° 96-81.207
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller A..., les observations de la société civile professionnelle de CHAISEMANTIN et COURJON, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL;
Statuant sur le pourvoi formé par : - B... Gianfranco,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de BESANCON, en date du 20 décembre 1995, qui, dans la procédure suivie contre Louis Z... du chef de faux en écriture publique par une personne dépositaire de l'autorité publique agissant dans l'exercice de ses fonctions, usage, ingérence, établisement et usage de fausses attestations, l'a renvoyé devant la cour d'assises de la Haute-Saône et du Territoire de BELFORT, sous la prévention de délits connexes aux crimes de faux commis par Louis Z...;
Vu les arrêts de la chambre criminelle de la Cour de Cassation portant désignation de juridiction en dates des 16 juillet, 2 octobre 1991, 16 juillet, 16 septembre 1992 et 13 mai 1993;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 191, alinéa 4 et 591 du Code de procédure pénale;
"en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que la chambre d'accusation était composée de M. Pontonnier, président de chambre, président titulaire, M. Garrabos, conseiller titulaire et M. Valtat, conseiller suppléant, désignés par ordonnance du premier président en date du 28 novembre 1995,
"alors qu'aux termes de l'article 191, alinéa 4 du Code de procédure pénale, "les conseillers composant la chambre d'accusation sont désignés chaque année, pour la durée de l'année judiciaire suivante, par l'assemblée générale de la Cour"; qu'il s'ensuit qu'un conseiller, en cas d'empêchement, ne peut être remplacé que par un conseiller désigné par ladite assemblée générale; qu'il résulte dès lors des mentions de l'arrêt attaqué selon lesquelles MM. Y... et D... ont été désignés par ordonnance du premier président de la chambre d'accusation n'était pas composée conformément aux dispositions de l'article 191 précitées";
Attendu qu'il résulte des pièces versées au dossier que M. Garrabos, conseiller titulaire, a été désigné par l'assemblée générale des magistrats du siège de la cour d'appel de Besançon du 29 mai 1995 pour former la chambre d'accusation;
Attendu que M. Valtat, déjà désigné comme conseiller suppléant à la chambre d'accusation par l'assemblée générale de la Cour du 11 septembre 1995, l'a été à nouveau, pour siéger à l'audience du 29 novembre 1995, en raison de l'empêchement de M. Waulthier , conseiller titulaire;
Attendu qu'en cet état, la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer de la régularité de la composition de la chambre d'accusation;
Qu'en effet, il résulte des dispositions combinées des alinéas 3 et 4 de l'article 191 du Code de procédure pénale que, si les conseillers de la chambre d'accusation doivent être désignés par l'assemblée générale de la cour d'appel, le premier président a qualité, en cas d'absence ou d'empêchement de l'un d'eux, pour désigner, par ordonnance, un remplaçant à titre temporaire;
D'où il suit que le moyen doit être rejeté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 197 et 591 du Code de procédure pénale;
"en ce qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Gianfranco B..., détenu pour autre cause en Allemagne, ait reçu notification d'un avis d'audience;
"alors qu'il résulte des dispositions de l'article 197 du Code de procédure pénale que la date à laquelle l'affaire sera appelée devant la chambre d'accusation doit être notifiée à l'inculpé détenu par les soins du chef de l'établissement pénitentiaire qui adresse, sans délai, au procureur général l'original ou la copie du récépissé signé par l'inculpé; que ces prescriptions sont essentielles aux droits de ce dernier et doivent être observées à peine de nullité; que si selon les énonciations de l'arrêt attaqué des avis d'audience ont été notifiés aux parties et à leurs avocats le 16 octobre 1995, il n'existe au dossier (qui ne comporte aucune pièce sur ce plan) aucun récépissé de notification signé par l'inculpé; qu'il s'ensuit que les formalités prescrites par l'article 197 du Code de procédure pénale n'ont pas été respectées";
Attendu que l'arrêt attaqué énonce que, conformément à l'article 197 du Code de procédure pénale, les parties et leur avocat ont été régulièrement avisés que la cause serait appelée à l'audience du 29 novembre 1995;
Attendu qu'en l'état de ces mentions, qui font foi jusqu'à inscription de faux, le moyen ne peut qu'être écarté;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 paragraphes 1 et 3 d. de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 591 et 593 du Code de procédure pénale, violation des droits de la défense;
"en ce qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué et du dossier de la procédure que Gianfranco B... n'a jamais, au cours de l'instruction précédant le renvoi en cour d'assises, été confronté avec les co-prévenus Louis Z... et Lydia C...;
"alors que l'arrêt de renvoi attaqué étant essentiellement fondé sur les déclarations et accusations de Louis Z..., la chambre d'accusation était tenue d'ordonner l'audition contradictoire de celui-ci, qui n'a, à aucun stade de la procédure, été confronté avec Gianfranco B..., et ce bien que le conseiller chargé de l'instruction ait lui-même jugé cette confrontation "indispensable au vu des déclarations contradictoires de chacun" dans un courrier figurant au dossier (D 638)";
Attendu que le demandeur ne saurait faire grief à la chambre d'accusation de n'avoir pas ordonné un supplément d'information dès lors qu'il résulte ni de l'arrêt attaqué ni d'aucune pièce de la procédure que, devant celle-ci, Gianfranco B..., alors détenu pour autre cause à l'étranger et sous le coup d'un mandat d'arrêt suivi d'une demande d'extradition, ait sollicité un complément d'information ou une confrontation avec les autres personnes mises en examen; qu'en tout état de cause les droits de l'intéressé demeurent entiers devant la juridiction de jugement;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 116, 2O2, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné le renvoi de Gianfranco B... devant la cour d'assises du département de la Haute-Saône sous l'accusation notamment :
"1 - d'avoir à Auxon-les-Vesoul, département de la Haute-Saône, dans le délai de la prescription, de concert avec Louis Z... et avec Lydia C..., commis des faux par altération frauduleuse de la vérité de nature à causer un préjudice, dans des écritures publiques ou dans des enregistrements ordonnés par l'autorité publique, à savoir :
"...
" - le 24 août 1990, délibération du conseil municipal décidant la pose d'un téléphone;
" - le 19 octobre 1990, délibération du conseil municipal décidant l'extension du réseau d'eau potable;
" - le 19 octobre 1990, délibération du conseil municipal décidant l'installation d'un miroir de signalisation;
" - le 20 décembre 1991, délibération du conseil municipal décidant l'extension du réseau d'lélectricité;
" - le 20 décembre 1991, mention au procès-verbal des délibérations du conseil municipal de la remise d'un pouvoir au maire par un conseiller municipal absent;
"2 - d'avoir à Auxonles-Vesoul, département de la Haute-Saône, courant 1989, 1990, 1991, dans le délai de la prescription, de concert avec Louis Z... et avec Lydia C..., fait usage des faux ci-dessus énoncés";
"aux motifs que Louis Z... a poursuivi en 1990-1991 sa pratique de faire passer en force au conseil municipal les décisions qu'il voulait voir prises et, au besoin, de fabriquer de fausses déclarations; qu'ainsi, le préfet de la Haute-Saône a-t-il, par lettres du 14 mai et du 9 juin 1992, signalé au soussigné la vraisemblable fausseté, que l'information a confirmée, des délibérations suivantes et d'une mention figurant sur une délibération :
"- délibaration du 24 août 1990 : le conseil d'école de Bougnon-Auxon souhaitait la pose d'un téléphone à l'école d'Auxon ;
devant les tergiversations et même l'opposition du conseil municipal, le maire pris seul la décision mais établit une délibération parfaitement mensongère : "Après en avoir délibéré, le conseil municipal donne son accord pour la pose téléphone... Le téléphone sera acheté par la commune pour la somme de 540,00 francs TTC" et en adressa un extrait à la préfecture pour visa. Il omit, bien entendu, de faire signer ce texte par les conseillers mais n'hésita pas à faire inscrire : "Ont signé au registre tous les membres présents";
"- délibération du 19 octobre 1990 : il s'agissait de réaliser une extension du réseau d'eau potable en vue d'alimenter les futures usines du projet Gianfranco B..., pour un prix estimé à 590 000 francs HT, avec demande de subvention adressée au préfet.
Cette décision avait été régulièrement prise le 15 décembre 1989 mais aucune subvention n'ayant été obtenue, il fallait la renouveler. Le maire préféra se passer de l'avis de ses conseillers devenus réticents, mais il n'en fit pas moins établir une fausse délibération;
"- autre délibération du 19 octobre 1990 : il en fut de même pour la décision de placer un miroir de signalisation routière à une intersection, comme le demandaient les parents d'élèves de l'école communale; il fut question de cela à la réunion du conseil municipal mais les conseillers s'y opposèrent; le maire passa outre et fabriqua une délibération conforme à ses voeux;
"- délibérations du 20 décembre 1991 : par suite de l'achat de terrains en vue de l'aménagement de la zone offerte à Gianfranco B..., il avait été entendu le 14 avril 1989 par un vote unanime que, sous certaines conditions, la commune financerait l'électrification d'un hangar appartenant à un cultivateur qui avait cédé des terrains; par une délibération détaillée du 20 décembre 1991, préparée par les services de la DDA et complétée par une seconde du même jour portant demande de subvention, il fut décidé d'engager ces travaux. Or, la question n'avait pas été tranchée, les conseillers voulant d'abord être sûrs que le terrain apporté à la SIFA serait aménagé; que, de surcroît, les mêmes procès-verbaux mentionnaient qu'un conseiller, Valère X..., excusé, avait donné pouvoir à Louis Z...; ce n'était pas moins faux. Il en était de même pour le budget supplémentaire de 1991, voté à la même séance; le fait que Valère X... ait ensuite signé cette délibaration montre l'inutilité de cette dernière falsification puisque ce conseiller a ainsi voté deux fois ;
que Louis Z... a, en conséquence de ces faits, été mis supplétivement en examen des chefs criminels de faux en écritures publiques par personne qualifiée et usage des actes faux;
"alors, d'une part, que la chambre d'accusation informant sur les chefs de poursuite résultant du dossier de la procédure, ne peut statuer, sans ordonner un complément d'information, sur des chefs de poursuite non compris dans les inculpations faites; qu'il ressort des pièces du dossier (D 577, 578 et 587) que Gianfranco B... a été inculpé par un juge du tribunal d'instance de Stuttgart sur les seuls chefs de faux et usage de faux sur les documents "énoncés" dans une commission rogatoire du 23 avril 1993, soit une lettre du 6 octobre 1989 portant commande de travaux, une délibération du conseil municipal datée du 11 août 1989, un extrait de cette délibération adressé à la préfecture et des lettres adressées à des établissements bancaires suisse et allemand; que la chambre d'accusation n'a pu ordonner le renvoi de Gianfranco B... pour faux et usage de faux sur les autres documents susvisés, sans ordonner un supplément d'information aux fins de mise en examen sur ces chefs de poursuite ;
qu'à défaut, elle a violé les textes susvisés;
"alors, d'autre part, et subisidiairement, qu'en omettant de préciser de quels éléments elle a déduit l'existence de charges suffisantes de culpabilité justifiant la saisine de la juridiction de jugement, sur les différents chefs susvisés, à propos desquels la chambre d'accusation n'évoque même pas la participation à l'élaboration ou à l'usage des documents argués de faux, de Gianfranco B..., l'arrêt attaqué est dépourvu de base légale";
Sur le moyen pris en sa seconde branche ;
Attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que, de 1989 à 1991, Gianfranco B... a imaginé un montage d'entreprises fictives dont l'objet apparent était la création et l'équipement de zones industrielles et la création d'usines, en particulier à Auxon-les-Vesoul, aux fins d'obtenir des crédits bancaires; qu'il a présenté à des organismes bancaires notamment de fausses délibérations du conseil municipal de ladite commune et de fausses lettres du maire garantissant le paiement de travaux, qu'il avait réalisées au domicile de ce dernier, d'un second cachet de la mairie et au vu du registre des délibérations du conseil municipal;
Attendu que la chambre d'accusation a souverainement relevé l'ensemble des faits sur lesquels repose l'accusation; que la Cour de Cassation n'a d'autre pouvoir que de vérifier si la qualification qui leur a été donnée justifie le renvoi devant la cour d'assises ;q u'il ne lui appartient pas d'apprécier la valeur des charges dont l'arrêt constate l'existence;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Mais sur le moyen pris en sa première branche :
Vu lesdits articles ;
Attendu que la chambre d'accusation ne peut, sans supplément d'information, ordonner le renvoi devant la juridiction de jugement, d'une personne mise en examen pour des chefs de poursuite non compris dans les inculpations notifiées par le juge d'instruction;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Gianfranco B... a été renvoyé devant la cour d'assises pour les délits de faux en écritures publiques et usage desdits faux, et notamment dans trois délibérations du conseil municipal des 24 août 1990, 19 octobre 1990 et 20 décembre 1991;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi alors que ces faits étaient étrangers aux inculpations notifiées à Gianfranco B..., la chambre d'accusation a méconnu les textes susvisés;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs,
CASSE et ANNULE l'arrêt de la chambre d'accusation de Besançon, en date du 20 décembre 1995, mais en ses seules dispositions ayant ordonné le renvoi de Gianfranco B... devant la cour d'assises pour les faux en écritures publiques commis dans les délibérations du conseil municipal d'Auxon-les-Vesoul des 24 août 1990, 19 octobre 1990 et 20 décembre 1991, toutes autres dispositions dudit arrêt étant expressément maintenues;
Et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi, dans la limite de la cassation ainsi prononcée,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Colmar, à ce désignée par délibérabion spéciale prise en chambre du conseil;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Besançon, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au déliéré : M. Milleville conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Mistral conseiller rapporteur, MM. Guerder, Pinsseau, Joly, Pibouleau, Mme Françoise Simon, MM. Challe, conseillers de la chambre, Mme Fossaert-Sabatier conseiller référendaire;
Avocat général : M. Amiel ;
Greffier de chambre : Mme Arnoult ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Civ.2 29 mai 1996 n° 94-15.460 B n° 118
Sur le moyen unique :
Vu les articles 4 du Code de procédure pénale et 1384, alinéa 5 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que MM. Dominique et Georges Costa, soutenant avoir effectué des placements en bons anonymes auprès de la banque Paribas sur les conseils et par l'entremise de M. X..., sous-directeur de l'agence de Marseille et s'être vus opposer par la banque une fin de non recevoir à leur demande de réalisation de ces bons l'ont assignée, sur le fondement de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil ; qu'une décision d'une juridiction pénale a déclaré M. X... coupable d'avoir détourné ou dissipé au préjudice, notamment, de MM. Costa des sommes qui ne lui avaient été remises qu'à titre de mandat, d'avoir commis des faux en écriture privée de commerce ou de banque, en créant de fausses situations de comptes bancaires et d'avoir fait usage desdits faux ;
Attendu que, pour débouter MM. Costa de leur demande, l'arrêt retient que M. X... n'a pas été condamné pour avoir détourné des fonds au préjudice de la banque Paribas mais pour avoir commis ces faits au dépens de clients de la banque dans le cadre d'un mandat de ces derniers et énonce que cette qualification pénale retenue par le tribunal correctionnel dans son jugement définitif auquel est attachée l'autorité de la chose jugée exclut que M. X... ait agi dans le cadre de ses fonctions pour le compte de la banque mais implique, au contraire, qu'il ait agi à titre personnel en vertu du mandat donné par ses clients, MM. Costa, au détriment desquels il a opéré les détournements considérés ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que le délit d'abus de confiance n'impliquait pas nécessairement que M. X... ait agi hors du cadre de ses fonctions, au sens de l'article 1384, alinéa 5, du Code civil, les consorts Costa ayant pu être fondés à croire qu'ils avaient traité avec ce dernier en sa qualité de préposé de la banque, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Crim. 29 mai 1996 n° 95-82.761
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire VERDUN, les observations de la société civile professionnelle BORE et XAVIER et de la société civile professionnelle GUIGUET, BACHELLIER et POTIER de la VARDE, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL;
Statuant sur les pourvois formés par : - Y... Gérard,
- La MATMUT, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BORDEAUX, chambre correctionnelle, en date du 12 avril 1995, qui, dans les poursuites exercées contre le premier pour homicide involontaire et changement de direction sans précaution, l'a condamné à 8 mois d'emprisonnement avec sursis et à une suspension de son permis de conduire pour une durée de 8 mois pour le délit, et à une amende de 2 000 francs pour la contravention, et a prononcé sur les intérêts civils;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire ampliatif produit, commun aux demandeurs, et le mémoire en défense;
I) Sur la contravention ;
Attendu que la contravention de changement de direction sans précaution reprochée au prévenu a été commise avant le 18 mai 1995 ;
qu'elle n'est pas visée à l'article R. 256, 2 du Code de la route; qu'elle est, en conséquence, amnistiée par application de l'article 1er de la loi du 3 août 1995;
Qu'il n'y a, dès lors, pas lieu de statuer sur les moyens en ce qu'ils concernent cette contravention;
II) Sur le délit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 319 du Code pénal (ancien), 221-6 alinéa 1, 221-8, 221-10, 131-27, 131-35 du Code pénal (nouveau), L. 14, L. 15 et L. 16, R. 6, R.
4-1 et R. 233 du Code de la route, 593 du Code de procédure pénale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Gérard Y... coupable d'homicide involontaire;
"aux motifs propres que le tribunal, en des motifs que la Cour adopte, a justement apprécié les faits servant de base aux poursuites en retenant Gérard Y... dans les liens de la prévention;
"et aux motifs adoptés qu'il résulte des constatations des agents et des témoignages fournis que c'est au cours du dépassement de la camionnette conduite par le prévenu, entrepris par Bernard A..., que s'est produit le choc fatal; que le dépassement s'effectuait régulièrement, tous les témoignages faisant apparaître que Bernard A... avait allumé le feu clignotant; que, contrairement à la thèse du prévenu, qui conclut au principal à la relaxe, la manoeuvre avait été entreprise sans danger par le motocycliste, puisqu'il n'est pas contesté que Gérard Y... roulait à petite vitesse ;
que, selon Paul X... qui roulait en sens inverse, était ouverte une distance d'environ cent mètres avant son passage, permettant aisément à un véhicule preste comme une motocyclette d'effectuer le dépassement, et que selon Jean-Louis Z... qui suivait immédiatement la moto, c'est au moment où le motocycliste entamait sa manoeuvre que Gérard Y..., qui d'après ses dires cherchait à retourner en arrière pour prendre une route sur sa droite qu'il avait laissée passer, a mis en action son clignotant; qu'ainsi c'est bien à la suite d'une faute de conduite de Gérard Y..., qui ne pouvait apporter de changement de direction à la conduite de son véhicule sans s'assurer que cela pouvait être fait sans danger, que c'est produit le heurt; qu'il importe peu que le point de choc soit situé sur la voie de droite, puisque l'accident s'est produit précisément au terme de la manoeuvre de dépassement, au moment où le motocycliste se rabattait normalement sur cette voie;
"alors que, en constatant d'une part que le choc s'était produit sur la voie de droite, c'est-à-dire dans le couloir de circulation de Gérard Y... et en décidant cependant que c'était à la suite d'une faute de conduite de Gérard Y..., qui ne pouvait apporter de changement de direction à la conduite de son véhicule sans s'assurer que cela pouvait être fait sans danger, que s'était produit le heurt, la Cour a entaché sa décision d'une contradiction de motifs";
Et sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 4 et 6 de la loi du 5 juillet 1985 et 593 du Code de procédure pénale;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit que Gérard Y... était tenu de réparer la totalité des dommages subis par les ayants droit de la victime de l'accident du 2 décembre 1993;
"aux motifs adoptés que la manoeuvre de dépassement avait été entreprise sans danger par le motocycliste puisqu'il n'est pas contesté que Gérard Y... roulait à petite vitesse; que selon Paul X... qui roulait en sens inverse était ouverte une distance d'environ cent mètres avant son passage, permettant aisément à un véhicule preste comme une motocyclette d'effectuer le dépassement ;
"alors que la Cour constate que le choc a eu lieu dans le couloir de circulation de Gérard Y...; qu'en s'abstenant de répondre aux conclusions d'appel des exposants qui soutenaient qu'en toute hypothèse, Bernard A... n'avait pas respecté la distance de sécurité suffisante avec le véhicule dépassé ce qui avait entraîné l'accrochage, la cour d'appel n'a pas motivé sa décision et a violé les textes susvisés";
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que les juges du second degré ont, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction, d'une part, caractérisé en tous ses éléments le délit dont ils ont déclaré le prévenu coupable, et, d'autre part, estimé que la victime n'avait commis aucune faute à l'origine de son dommage, et que l'indemnisation de ses ayants droit devait, en conséquence, être totale;
Que les moyens ne sauraient, dès lors, être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs,
DECLARE l'action publique ETEINTE pour la contravention ;
REJETTE les pourvois pour le surplus ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Jean Simon conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Verdun conseiller rapporteur, MM. Blin, Aldebert, Grapinet, Challe, Mistral conseillers de la chambre, Mmes Ferrari, de la Lance, Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Amiel ;
Greffier de chambre : Mme Mazard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 29 mai 1996 n° 95-85.107
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller GRAPINET, les observations de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS et de Me RICARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- BUREAU Jean-Baptiste, partie civile, contre l'arrêt de la cour d'appel de POITIERS, chambre correctionnelle, du 15 septembre 1995, qui, dans la procédure suivie contre Patrick Y... pour blessures involontaires, a prononcé sur les réparations civiles;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, R. 25, R. 28-1, R. 232-4°, R. 266-7° du Code de la route, 4 de la loi du 5 juillet 1985, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt infirmatif a déclaré Patrick Y... tenu de réparer, mais seulement dans la proportion d'un tiers, le préjudice subi par Jean-Baptiste Bureau à la suite de l'accident survenu le 7 novembre 1992;
"aux motifs que (...) "le procès-verbal mentionne qu'une haie implantée au carrefour masquait, pour Patrick Y..., la visibilité à droite vers le chemin et, pour Jean-Baptiste Bureau, la visibilité à gauche vers la route départementale; qu'il apparaît ainsi que Jean-Baptiste Bureau, bien que bénéficiaire de la priorité, a effectué une manoeuvre très dangereuse en s'engageant sans aucune précaution sur une voie plus importante que celle d'où il venait alors qu'il n'état pas en mesure, au moment où il a tourné, de voir si un ou plusieurs véhicules arrivaient sur sa gauche et alors même qu'en serrant à gauche pour effectuer son virage au ras de la haie, coupant ainsi de biais le CD 29, il ne permettait pas à un usager venant de sa gauche de le voir à temps; qu'il s'est littéralement jeté sur un véhicule que, dans ces conditions, il ne pouvait voir et dont le conducteur ne pouvait le voir; qu'il est constant, par ailleurs, que Jean-Baptiste Bureau ne portait pas le casque dont le port était pour lui obligatoire; que la gravité des conséquences de l'accident tient essentiellement au traumatisme crânien, suivi d'un coma prolongé, subi par la victime, dont la tête a heurté le pare-brise du véhicule BMW" ;
"- 1°) alors que la cour d'appel a expressément relevé, d'une part, que Jean-Baptiste bureau était bénéficiaire de la priorité, d'autre part, que Patrick Y... n'avait aucune visibilité à droite ;
qu'il résultait de ces constatations que l'automobiliste, qui devait ralentir pour céder le passage à un éventuel usager venant de sa droite, avait ouvertement méconnu les règles de priorité dans des circonstances qui lui imposaient pourtant d'aborder le croisement - signalé - avec une prudence et une vigilance particulière; qu'ainsi, en se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les textes visés au moyen;
"- 2°) alors que, de surcroît, en s'abstenant de rechercher comme l'y invitaient les conclusions d'appel du demandeur si compte tenu de la configuration des lieux, de la position de la voiture et de la vitesse à laquelle circulait Patrick Y..., la collision ne se serait pas nécessairement produite, nonobstant la manoeuvre du cyclomotoriste, la cour d'appel a derechef violé les textes visés au moyen";
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, contrairement à ce qui est allégué par le demandeur, les juges du second degré, qui n'avaient pas à répondre mieux qu'ils l'ont fait aux conclusions dont ils étaient saisis, ont exposé sans insuffisance ni contradiction les éléments de preuve dont ils ont déduit que la victime avait contribué par sa faute, dans une proportion qu'ils ont déterminée, à la réalisation de son propre dommage;
D'où il suit que le moyen, qui remet en discussion l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Jean Simon conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Grapinet conseiller rapporteur, MM. Blin, Aldebert, Challe, Mistral conseillers de la chambre, Mmes X..., Verdun, de la Lance, Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Amiel ;
Greffier de chambre : Mme Mazard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 29 mai 1996 n° 95-82.306
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller CHALLE, les observations de la société civile professionnelle NICOLAY et de LANOUVELLE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général AMIEL;
Statuant sur le pourvoi formé par : - X... Emile,
contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANCON, chambre correctionnelle, du 23 mars 1995, qui, pour infraction à l'article L. 232-5 du Code rural, l'a condamné à une amende de 5 000 francs et a prononcé sur les réparations civiles;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 232-5, L. 232-7 et L. 232-8 du Code rural, 132-59 du Code pénal, 469-1 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué, statuant après ajournement du prononcé de la peine, a condamné l'exploitant d'un barrage au paiement d'une amende de 5 000 francs;
"aux motifs que, faute d'avoir réparé le préjudice résultant des faits visés à la prévention, l'exploitant du barrage ne saurait bénéficier d'une dispense de peine;
"alors que le jugement entrepris, dont l'exploitant du barrage, Emile X..., demandait expressément la confirmation, avait constaté que selon le rapport de la direction départementale de l'Agriculture du 13 juin 1984, le débit du ruisseau "le Raddon" mesuré en huit points, représentait une vitesse d'écoulement de 0,86 m à la seconde, que le débit réservé était de 167,7 litres à la seconde, alors que le minimum à respecter était de 125 litres à la seconde, qu'en conséquence, dans l'intervalle de la poursuite et du jugement, Emile X... avait mis la centrale en conformité avec les exigences de l'article L. 232-5 du Code rural, que l'infraction avait cessé, que le préjudice n'existait plus et que la réinsertion de Emile X... ne posait pas de problème; qu'en s'abstenant de toute explication sur ces motifs essentiels qu' Emile X... avait repris à son compte, la cour d'appel, qui n'indique nullement en quoi le préjudice résultant des faits visés à la prévention n'aurait pas été réparé, a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs et a violé les textes susvisés" ;
Attendu que, pour infirmer la décision des premiers juges qui, après avoir déclaré le prévenu coupable de l'infraction reprochée, l'ont dispensé de peine, et pour le condamner à une amende, les juges du second degré énoncent que "faute d'avoir réparé le préjudice résultant des faits visés à la prévention, Emile X... ne saurait bénéficier d'une dispense de peine";
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision dès lors que, même dans les cas où les conditions des articles 469-1 du Code de procédure pénale et 132-59 du Code pénal sont réunies, l'application de la dispense de peine est une faculté laissée à la libre appréciation des juges du fond, dont ils ne doivent aucun compte;
D'où il suit que le moyen doit être écarté
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 238-9 du Code rural, 2, 429 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a condamné Emile X... à payer à la fédération de Haute-Saône pour la pêche et la protection du milieu aquatique, partie civile, la somme de 10 000 francs à titre de dommages et intérêts;
"aux motifs qu'il résulte du procès-verbal d'enquête, faisant foi jusqu'à inscription de faux (article L. 237-4 du Code rural), que l'infraction a provoqué la mort de poissons et plus particulièrement des truites; que si la fédération, partie civile, ne peut se prévaloir d'un préjudice d'agrément qui n'est pas distinct de celui subi par chaque pêcheur à la ligne, elle justifie d'un dommage matériel et d'une atteinte aux droit collectifs des pêcheurs qu'elle représente; que les pièces régulièrement communiquées -notamment l'état des pertes subies et des frais nécessités par le réempoissonnement et l'alevinage- permettent à la Cour d'évaluer à la somme de 10 000 francs le préjudice subi, toutes causes confondues;
"alors que, d'une part, en l'état de ce motif, qui ne caractérise pas un préjudice personnel distinct de celui éprouvé par la collectivité publique et dont la réparation a été assurée par la peine prononcée contre le prévenu à la requête du ministère public, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés;
"alors que, d'autre part, en fondant sa décision sur un procès-verbal d'enquête dont elle n'indique ni la date, ni l'auteur, ni les conditions dans lesquelles il a été établi, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 237-4 du Code rural et 429 du Code de procédure pénale";
Attendu, d'une part, que le moyen, en ce qu'il conteste la validité du procès-verbal de constatation de l'infraction, n'est pas recevable en application de l'article 385 du Code de procédure pénale;
Attendu, d'autre part, qu'en allouant par les motifs repris au moyen des dommages-intérêts à la fédération départementale de la pêche, la cour d'appel a justifié sa décision au regard de l'article L. 238-9 du Code rural;
Que dès lors le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Jean Simon conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Challe conseiller rapporteur, MM. Blin, Aldebert, Grapinet, Mistral conseillers de la chambre, Mmes Y..., Verdun, de la Lance, Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Amiel ;
Greffier de chambre : Mme Mazard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Ass. plen. 24 mai 1996 n° 95-80.666 B n° 216
Assemblée plénière.
Les moyens étant réunis :
Vu les articles 171, 174, 206, 591, 593 et 595 du Code de procédure pénale dans leur rédaction antérieure au 1er mars 1993 ;
Attendu que, lorsqu'elle statue sur le règlement d'une procédure, la chambre d'accusation est tenue d'examiner les moyens pris de nullités de l'information qui lui sont proposés par les parties ;
Attendu qu'après avoir admis la recevabilité de l'appel des inculpés contre une ordonnance les renvoyant devant le tribunal correctionnel en raison du caractère complexe de ladite ordonnance, qui avait implicitement rejeté leurs demandes d'irrecevabilité des constitutions de partie civile, la chambre d'accusation, pour déclarer néanmoins irrecevables les demandes des appelants tendant à l'annulation de certains actes de l'information, énonce que, les personnes mises en examen n'ayant pu faire appel de l'ordonnance de renvoi qu'en raison de sa complexité, cette particularité n'a pas eu pour effet d'étendre l'objet de l'appel à la décision de renvoi proprement dite et, qu'en conséquence, la chambre d'accusation n'est pas dans l'obligation de statuer sur les éventuelles nullités, le tribunal correctionnel demeurant compétent pour le faire ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle devait se prononcer, en raison de la nature même de l'ordonnance entreprise, sur le règlement de la procédure et qu'en application des articles 174, alinéa 2, et 595 du Code de procédure pénale alors en vigueur, les parties ne seraient plus ensuite admises à invoquer des moyens de nullité de l'information, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée des textes ci-dessus rappelés ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 janvier 1995, entre les parties, par la chambre d'accusation de la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris ;
MOYENS ANNEXES :
Moyen déposé par la SCP Waquet, Farge et Hazan ;
MOYEN DE CASSATION :
Violation des articles 206, 174 (tel que rédigé avant l'entrée en vigueur de la loi du 4 janvier 1993), 385 (dans sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993), 593 et 595 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevables les demandes de nullités d'actes d'information ;
" aux motifs que, si la chambre d'accusation est tenue d'examiner les moyens pris des nullités de l'information qui pourraient lui être proposées par les parties lorsqu'elle statue sur le règlement de la procédure, elle n'est pas tenue, dans le cas contraire, en l'état des textes applicables à l'époque, d'examiner la régularité de la procédure ; que seul l'appel interjeté par le ministère public saisit la chambre d'accusation de l'entier dossier, celui des personnes mises en examen, droit exceptionnel accordé par l'article 186-1 du Code de procédure pénale, ne comportant aucune extension ; qu'il s'ensuit que la chambre d'accusation n'était pas dans l'obligation de statuer sur les éventuelles nullités, le tribunal correctionnel demeurant compétent pour ce faire par application de l'article 174 du Code de procédure pénale en vigueur en 1992 ;
" alors que, lorsque la chambre d'accusation statue sur le règlement d'une procédure, ce qui est le cas lorsqu'elle est valablement saisie, comme en l'espèce, d'un appel du prévenu contre une ordonnance de renvoi devant la juridiction correctionnelle, elle est tenue d'examiner les moyens pris de nullités de l'information qui pourraient lui être proposés par les parties, les parties n'étant plus, ensuite, admises à invoquer des moyens de nullité de l'information devant le tribunal correctionnel ; qu'en refusant d'examiner les demandes de nullités présentées par les 2 personnes mises en examen, la chambre d'accusation a méconnu ses propres pouvoirs et violé les textes susvisés " ;
Moyen déposé par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez ;
MOYEN UNIQUE DE CASSATION :
Violation des articles 171, 174 dans leur rédaction antérieure à la loi n° 93-2 du 4 janvier 1993, 206, 591, 593 et 595 du Code de procédure pénale ; violation de la loi et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevables les demandes de nullité d'actes d'information présentées par François Y... et William X... ;
" aux motifs que les personnes mises en examen n'ont pu faire appel de l'ordonnance de renvoi qu'en raison de sa complexité mais que cette particularité n'a pas eu pour effet d'étendre l'objet de l'appel de la décision de renvoi proprement dite, et en conséquence, de mettre la chambre d'accusation dans l'obligation de statuer sur des éventuelles nullités, le tribunal correctionnel demeurant compétent pour ce faire par application de l'article 174 du Code de procédure pénale en vigueur en 1992 ;
" alors que l'appel interjeté par une personne mise en examen contre une ordonnance de règlement présentant un caractère complexe est non seulement recevable mais a pour effet de saisir la chambre d'accusation de l'ensemble de la procédure dont elle a alors l'obligation d'examiner la régularité, tout moyen de nullité devant dès lors, à peine de forclusion, être soulevé devant elle, conformément aux dispositions tant de l'article 595 du Code de procédure pénale, demeuré inchangé dans sa dernière rédaction, que de l'article 174 dans sa rédaction antérieure à la loi du 4 janvier 1993 interdisant toute possibilité pour les juridictions correctionnelles de prononcer l'annulation de procédures d'instruction renvoyées devant elle par la chambre d'accusation ;
" que dès lors, en considérant que l'appel des personnes mises en examen contestant la recevabilité des constitutions de partie civile n'avait pas eu pour effet de déférer à la chambre d'accusation l'intégralité de la décision de renvoi ayant implicitement admis cette recevabilité et que, par conséquent, elle n'avait pas à examiner les exceptions de nullité soulevées par ces mêmes personnes, la chambre d'accusation a violé le principe susvisé ".
Ass. plen. 24 mai 1996 n° 95-80.666 B n° 4
Les moyens étant réunis :
Vu les articles 171, 174, 206, 591, 593 et 595 du Code de procédure pénale dans leur rédaction antérieure au 1er mars 1993 ;
Attendu que, lorsqu'elle statue sur le règlement d'une procédure, la chambre d'accusation est tenue d'examiner les moyens pris de nullités de l'information qui lui sont proposés par les parties ;
Attendu qu'après avoir admis la recevabilité de l'appel des inculpés contre une ordonnance les renvoyant devant le tribunal correctionnel en raison du caractère complexe de ladite ordonnance qui avait implicitement rejeté leurs demandes d'irrecevabilité des constitutions de partie civile, la chambre d'accusation, pour déclarer néanmoins irrecevables les demandes des appelants tendant à l'annulation de certains actes de l'information, énonce que les personnes mises en examen n'ayant pu faire appel de l'ordonnance de renvoi qu'en raison de sa complexité, cette particularité n'a pas eu pour effet d'étendre l'objet de l'appel à la décision de renvoi proprement dite et, qu'en conséquence, la chambre d'accusation n'est pas dans l'obligation de statuer sur les éventuelles nullités, le tribunal correctionnel demeurant compétent pour le faire ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle devait se prononcer, en raison de la nature même de l'ordonnance entreprise, sur le règlement de la procédure et qu'en application des articles 174, alinéa 2, et 595 du Code de procédure pénale alors en vigueur, les parties ne seraient plus ensuite admises à invoquer des moyens de nullité de l'information, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée des textes ci-dessus rappelés ;
Soc. 23 mai 1996 n° 94-17.877
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Raymond X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 11 janvier 1994 par la cour d'appel de Limoges (chambre sociale), au profit :
1°/ de la société des Etablissements Mazière, salaison Corrèze Limousin, dont le siège est Le Bois du Roy, 19240 Allassac,
2°/ de la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales (DRASS) de la Vienne, dont le siège est ...,
3°/ de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Corrèze, dont le siège est ...,
défenderesses à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt;
LA COUR, en l'audience publique du 28 mars 1996, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Ollier, conseiller rapporteur, MM. Favard, Gougé, Thavaud, Mme Ramoff, conseillers, Mme Kermina, MM. Choppin Haudry de Janvry, Petit, conseillers référendaires, M. Chauvy, avocat général, M. Richard, greffier de chambre;
Sur le rapport de M. le conseiller Ollier, les observations de la SCP Peignot et Garreau, avocat de M. X..., les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du Code de procédure pénale, ensemble l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale;
Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que les juges civils ne peuvent méconnaître ce qui a été jugé par une juridiction répressive, soit quant à l'existence du fait qui forme la base de l'action publique, soit quant à la participation du prévenu à l'infraction;
Attendu que, le 29 avril 1985, M. X..., employé comme chauffeur par la société Mazière, a été blessé alors qu'il chargeait un camion; que le dirigeant de l'entreprise a été condamné pénalement pour blessures involontaires et infraction à l'obligation de sécurité prévue à l'article L. 233-1 du Code du travail; que la cour d'appel a débouté M. X... de sa demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur;
Attendu que, pour statuer ainsi, l'arrêt attaqué retient, d'une part, que l'accident apparaît davantage comme la conséquence d'une utilisation mal adaptée des dispositifs en usage dans l'entreprise que comme résultant de l'utilisation de moyens en eux-mêmes dangereux, et, d'autre part, que si M. X... avait placé le camion à la première porte d'embarquement, il se serait trouvé pratiquement au même niveau que le quai;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'employeur avait été condamné pour ne pas avoir aménagé ses locaux de manière à garantir la sécurité des travailleurs, ce qui impliquait que les moyens mis à la disposition des salariés étaient de nature à compromettre leur sécurité, et sans caractériser une faute d'imprudence ou de désobéissance de la victime susceptible de priver celle de l'employeur de tout caractère déterminant, la cour d'appel a violé le premier des textes susvisés et privé sa décision de base légale à l'égard du second;
Crim. 22 mai 1996 n° 94-83.501
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller BAILLOT et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN;
Statuant sur le pourvoi formé par : - X... Raymond,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 20ème chambre, du 17 juin 1994, qui, pour non-respect de l'arrêt absolu devant un feu de signalisation rouge, fixe ou clignotant, l'a condamné à une amende de 1 400 francs et a prononcé la suspension de son permis de conduire pendant 8 jours, avec exécution provisoire;
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation de l'article 513, alinéa 4 du Code de procédure pénale et dans leur ensemble des droits de la défense;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'ont été successivement entendus lors des débats le président en son rapport, l'avocat général en ses réquisitions et Me de Y..., représentant Raymond X..., en ses conclusions et plaidoiries;
Qu'ainsi, l'ordre chronologique établi par l'article 513 alinéa 4 du Code de procédure pénale a été respecté sans qu'il soit nécessaire d'énoncer expressément que "le prévenu ou son conseil a eu la parole le dernier";
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 593, alinéa 1er et 485 alinéa 2 du Code de procédure pénale, L. 13 du Code de la route et dans leur ensemble des droits de la défense;
Attendu que les juges disposent, quant à l'application d'une peine complémentaire, dans les limites fixées par la loi, d'une faculté dont ils ne doivent aucun compte;
Que, dès lors, le demandeur ne saurait se faire un grief de ce que la cour d'appel n'a pas spécialement motivé sa décision relative à l'exécution provisoire de la suspension du permis de conduire;
Qu'il s'ensuit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 485, alinéa 3 du Code de procédure pénale, 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et dans leur ensemble des droits de la défense;
Attendu que, s'il est exact, comme le soutient Raymond X..., que les juges ne précisent pas dans le dispositif de leur décision les textes appliqués, il n'en demeure pas moins que cette omission, ne saurait donner ouverture à cassation, dès lors qu'il n'existe aucune incertitude sur la nature de l'infraction retenue ni sur les textes dont il a été fait application, lesquels figurent dans le corps de l'arrêt et qu'en conséquence aucune nullité ne peut en découler au sens de l'article 802 du Code de procédure pénale;
Qu'ainsi le moyen est sans portée ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Guilloux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Baillot conseiller rapporteur, MM. Masse, Fabre, MM. Le Gall, Farge conseillers de la chambre, Mme Batut, M. Poisot, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Libouban ;
Greffier de chambre : Mme Nicolas ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Civ.2 22 mai 1996 n° 95-50.012 B n° 101
Sur le moyen unique :
Vu l'article 66 de la Constitution du 4 octobre 1958 ensemble l'article 136 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'il appartient au juge, saisi par le préfet en application de l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, de se prononcer, comme gardien de la liberté individuelle et sans que sa décision préjuge la validité de l'arrêté de reconduite à la frontière, sur l'irrégularité, invoquée par l'étranger, de l'interpellation ;
Attendu que l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel sur le fondement de l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 a assigné à résidence M. X..., de nationalité turque, sans se prononcer sur l'irrégularité, invoquée par M. X..., du contrôle d'identité dont il avait été fait l'objet ;
En quoi, le premier président a violé les textes susvisés ;
Crim. 22 mai 1996 n° 95-84.132
AU NOM DU PEUPLE FRANC
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ALDEBERT, les observations de la société civile professionnelle ANCEL et COUTURIER-HELLER, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN;
Statuant sur le pourvoi formé par : - ABID D...,
- KEBICHE Oumessad, épouse ABID,
- ABID A...,
- ABID E...,
- ABID Z...,
- ABID X...,
- ABID C...,
parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 20ème chambre, du 22 juin 1995, qui les a déboutées de leurs demandes après relaxe d'Alain B... du chef d'homicide involontaire;
Vu le mémoire personnel et le mémoire en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1 à 6 de la loi du 5 juillet 1985;
Attendu que, pour écarter les demandes d'indemnisation fondées sur les articles 470-1 du Code de procédure pénale, 4 et 6 de la loi du 5 juillet 1985, la cour d'appel, après avoir relevé qu'aucune faute ne pouvait être retenue à la charge d'Alain B..., définitivement relaxé du chef d'homicide involontaire, énonce que la cause unique de l'accident et des dommages se trouvait dans le seul comportement fautif de la victime, conducteur d'une motocyclette, "qui s'était lancée dans une manoeuvre dangereuse devant se révéler mortelle pour forcer le passage devant un véhicule de police formant barrage"; que les juges ajoutent que la victime avait conservé la qualité de conducteur, malgré quelques pas accomplis après sa chute de moto;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance et procédant de l'appréciation souveraine, la cour d'appel a justifié sa décision;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Jean Simon conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Aldebert conseiller rapporteur, MM. Blin, Grapinet, Mistral conseillers de la chambre, Mmes Y..., Verdun, de la Lance, M. Desportes conseillers référendaires;
Avocat général : M. Libouban ;
Greffier de chambre : Mme Arnoult ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 22 mai 1996 n° 95-83.800
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DESPORTES, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN;
Statuant sur le pourvoi formé par : - Y... Alain,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, du 30 mai 1995 qui, pour construction sans permis et poursuite des travaux au mépris de l'arrêté du maire en ordonnant l'interruption, l'a condamné à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et à 500 000 francs d'amende;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 421-1, R. 422-2, L. 480-2, L. 480-3 et L. 480-4 du Code de l'urbanisme, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable de construction d'appartements sans permis de construire et de poursuite de ces travaux en dépit d'un arrêté municipal d'interruption;
"aux motifs qu'il est constant que le prévenu a transformé un entrepôt en quatre appartements créant ainsi une surface hors oeuvre nette de 368 m2 sans avoir obtenu de permis de construire;
"qu'il a poursuivi les travaux en violation de l'arrêté d'interruption pris par le maire puis a vendu chaque appartement;
"alors qu'en application de l'article 421-1 alinéa 2 du Code de la construction, le permis de construire n'est pas exigé pour les travaux exécutés sur les constructions existantes lorsque ces travaux n'ont pas pour effet d'en changer la destination, de modifier leur aspect extérieur ou leur volume ni de créer des niveaux supplémentaires; que dès lors, en l'espèce, où les juges du fond ont constaté que le prévenu n'avait pas fait édifier une construction nouvelle mais s'était borné à faire transformer en appartements un bâtiment déjà existant utilisé comme entrepôt, ils n'ont pas caractérisé l'infraction de construction sans permis dont ils l'ont déclaré coupable dès lors qu'ils n'ont pas prétendu que ces travaux avaient changé l'aspect extérieur de l'immeuble, son volume ou avaient entraîné la création de niveaux supplémentaires, la modification de l'affectation donnée à un local n'ayant pas nécessairement pour effet de modifier la destination de l'immeuble";
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'Alain Y... est poursuivi pour construction sans permis et poursuite des travaux au mépris de l'arrêté du maire en ordonnant l'interruption;
Attendu que, pour le déclarer coupable de ces infractions la juridiction du second degré retient que le prévenu a exécuté des travaux consistant à transformer un bâtiment à usage d'entrepôt en immeuble d'habitation comportant quatre appartements d'une superficie hors oeuvre nette totale de 368 m2 et qu'il a poursuivi et mené à leur terme ces travaux bien qu'un arrêté du maire en ait ordonné l'interruption;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors que la transformation d'un entrepôt en immeuble d'habitation caractérise un changement de destination des lieux, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir le grief allégué;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Jean Simon conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Desportes conseiller rapporteur, MM. Blin, Aldebert, Grapinet, Mistral conseillers de la chambre, Mmes X..., Verdun, de la Lance conseillers référendaires;
Avocat général : M. Libouban ;
Greffier de chambre : Mme Arnoult ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 21 mai 1996 n° 91-80.017
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt et un mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MILLEVILLE, les observations de la société civile professionnelle DEFRENOIS et LEVIS et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LIBOUBAN;
Statuant sur les pourvois formés par : - D... Roland,
- D... Marc,
contre les arrêts de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'ANGERS qui, dans l'information suivie contre eux des chefs de faux en écriture publique, usage et complicité ainsi que du délit d'ingérence ont :
1°) le premier, en date du 19 décembre 1990, infirmé l'ordonnance de non-lieu partiel rendue par le juge d'instruction et ordonné un supplément d'information;
2°) le deuxième, en date du 20 avril 1994, ordonné le dépôt, au greffe, du dossier de la procédure, après avoir annulé une ordonnance de non-lieu rendue par le magistrat chargé du supplément d'information;
3°) le troisième, en date du 21 juin 1995, confirmé le renvoi devant le tribunal correctionnel du chef d'ingérence et prononcé le même renvoi sous la prévention d'usage de faux en écriture publique;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur les faits et la procédure :
Attendu qu'il résulte des arrêts attaqués et des pièces de la procédure que, le 19 juillet 1988, les époux A... ont porté plainte avec constitution de partie civile des chefs de faux en écriture publique, usage et complicité, à raison de faits qu'ils imputaient à C... Vielle et B... Vielle, notaires associés; que ces derniers ont été inculpés des infractions dénoncées puis, sur réquisitions supplétives, du délit d'ingérence;
Attendu qu'à l'issue de l'information, le juge d'instruction a, le 27 septembre 1990, rendu une ordonnance portant renvoi devant le tribunal correctionnel du chef d'ingérence et non-lieu des autres chefs; que, les parties civiles ayant relevé appel des dispositions de l'ordonnance prononçant non-lieu partiel, la chambre d'accusation a, par arrêt du 19 décembre 1990, infirmé, sur ce point, l'ordonnance entreprise et ordonné un supplément d'information qu'elle a confié au juge d'instruction initialement saisi;
Attendu qu'après exécution de sa mission, ce magistrat a, le 26 juillet 1993, rendu une "ordonnance de non-lieu", dont les parties civiles ont relevé appel; que, par arrêt du 20 avril 1994, la chambre d'accusation a annulé, comme ayant été prise par un magistrat incompétent, la décision déférée et a ordonné le dépôt de la procédure au greffe, conformément aux dispositions de l'article 208 du Code de procédure pénale;
Attendu que, par arrêt du 21 juin 1995, la chambre d'accusation a confirmé les dispositions de l'ordonnance initiale, du 27 septembre 1990, renvoyant C... Vielle et B... Vielle devant le tribunal correctionnel pour ingérence et a ordonné leur renvoi devant le même tribunal sous la prévention d'usage de faux en écriture publique;
Attendu que les prévenus se sont régulièrement pourvus contre les trois arrêts, le président de la chambre criminelle ayant, par ordonnances des 26 mars 1991 et 27 juin 1994, dit qu'il n'y avait pas lieu à examen immédiat des pourvois formés contre les deux premières décisions;
En cet état :
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
I Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 19 décembre 1990 ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 186 alinéa 5 et 197 alinéas 2 et 3 du Code de procédure pénale;
"en ce qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que le dossier de l'information n'a été déposé au greffe de la chambre d'accusation et mis à la disposition du conseil des prévenus que trois jour avant l'audience;
"alors que le dossier de la procédure doit être mis à la disposition du conseil du prévenu cinq jours au minimum avant le jour de l'audience, conformément aux dispositions des alinéas 2 et 3 de l'article 197 du Code de procédure pénale, dont l'inobservation a pour effet de porter atteinte aux droits de la défense; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que le dossier de la procédure n'a été déposé et tenu la disposition du conseil des prévenus que trois jours seulement avant l'audience, de sorte qu'il a été porté atteinte aux droits de la défense par violation des textes visés au moyen";
Attendu que les demandeurs ne sauraient se faire un grief de ce que, selon certaines mentions de l'arrêt attaqué, le dossier de la procédure n'aurait été déposé au greffe de la chambre d'accusation que le "19 novembre 1990", soit l'avant-veille de l'audience, dès lors que leur avocat a déposé un mémoire contenant les moyens de défense et a été entendu à l'audience en ses observations;
Qu'ainsi, aucune atteinte n'ayant été portée aux intérêts des demandeurs, le moyen doit être écarté;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 8, 186 alinéa 4, 502 et 593 du Code de procédure pénale;
"en ce que l'arrêt attaqué a, en déclarant irrecevable le moyen articulé par Roland D... et Marc D... tendant à infirmer l'ordonnance du 27 septembre 1990 portant leur renvoi devant le tribunal correctionnel d'Angers du chef d'ingérence, refusé par là même implicitement d'examiner l'exception de prescription de l'action publique invoqué par les prévenus;
"aux motifs que les inculpés étant irrecevables à interjeter appel de l'ordonnance rendue par le juge d'instruction prononçant leur renvoi devant le tribunal correctionnel, la demande contenue dans un mémoire déposé devant la chambre d'accusation par le conseil des inculpés, tendant à l'infirmation des dispositions renvoyant ces derniers devant le tribunal correctionnel, est elle-même irrecevable;
"1°) alors que le prévenu qui interjette appel d'une ordonnance du juge d'instruction dépose, dans les dix jours de sa signification, une déclaration expresse en ce sens auprès du greffier du tribunal auquel appartient le magistrat instructeur, la déclaration devant être signée par le greffier et par l'appelant ou par son avocat ;
qu'aucune déclaration d'appel n'ayant été déposée par Me C... Vielle et Me B... Vielle auprès du greffier du tribunal auquel appartient le juge d'instruction d'Angers qui a rendu l'ordonnance du 27 septembre 1990, aucun appel n'avait donc été régularisé par les prévenus, de sorte qu'en se fondant sur l'irrecevabilité de ces derniers à interjeter appel de cette ordonnance pour écarter l'exception de prescription soulevée par ces derniers, la chambre d'accusation a violé les textes visés au moyen;
"2°) alors que la prescription de l'action publique est une exception d'ordre public qui doit être relevée d'office par le juge, lorsque, en matière correctionnelle, plus de trois années ont couru entre le fait poursuivi et l'acte de poursuite; que la vente matérialisant l'ingérence éventuelle reprochée aux prévenus étant intervenue le 31 décembre 1986, et le réquisitoire supplétif retenant ce délit, plus de trois ans après cette date (le 17 avril 1990), la chambre d'accusation, en s'abstenant de se prononcer sur la prescription de l'action publique relative au délit d'ingérence reproché aux prévenus, prescription qu'elle devait le cas échéant relever d'office, a violé les textes visés au moyen";
Attendu que, dans le mémoire qu'ils ont déposé devant la chambre d'accusation, Roland D... et Marc D... ont demandé l'infirmation des dispositions de l'ordonnance prononçant leur renvoi devant le tribunal pour ingérence, en invoquant notamment la prescription de l'action publique ;
Attendu qu'en déclarant irrecevable ce chef du mémoire, la chambre d'accusation a justifié sa décision, dès lors qu'elle n'était saisie que de l'appel, par les parties civiles, des dispositions portant non-lieu pour faux en écriture publique et que n'était invoquée aucune nullité de procédure pour les inculpés;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 2, 85 et 593 du Code de procédure pénale, violation de la loi, défaut de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré recevable la plainte avec constitution de partie civile et par conséquent l'appel des époux A...;
"aux motifs qu'une partie civile peut faire valoir sa prétention dès lors que l'existence du préjudice allégué est possible ;
que la vente de l'immeuble appartenant au département ayant été consentie par ce dernier à la SCI ROMA et régularisée à l'aide d'un extrait tronqué de la délibération de l'assemblée départementale prise en faveur de M. A..., celui-ci est fondé à soutenir qu'il a subi un préjudice lié à l'impossibilité de réaliser l'opération immobilière qu'il avait envisagée, en relation directe avec le faux et l'usage de faux allégués; que l'ordonnance critiquée renvoyant les inculpés devant le juge du fond du seul chef d'ingérence, cette décision fait grief aux intérêts civils des époux A..., dont l'appel doit donc être déclaré recevable au fond;
"1°) alors que la constitution de partie civile n'est recevable devant la juridiction d'instruction que si elle s'appuie sur des circonstances permettant au juge d'admettre comme possible l'existence du préjudice allégué et la relation directe de celui-ci avec une infraction à la loi pénale; que l'offre d'achat signée par les époux A... ayant expiré le 15 mai 1986 et étant caduque à cette date, l'impossibilité pour ces derniers de réaliser la vente immobilière litigieuse ne pouvait résulter des infractions alléguées concernant la délibération du Conseil général intervenue le 28 mai 1986, soit postérieurement à la caducité du compromis signé par les parties civiles, les infractions reprochées étant également postérieures à cette caducité; qu'en décidant cependant que le préjudice allégué par les parties civiles et résultant de l'impossibilité de réalisation de l'opération immobilière était en relation directe avec les infractions de faux alléguées, la chambre d'accusation a méconnu les textes visés au moyen;
"2°) alors que la vente immobilière consentie aux époux A... n'ayant pas eu lieu faute par ces derniers d'avoir réalisé avant le 15 juillet 1986 la condition suspensive relative à l'obtention d'un ou plusieurs prêts, l'impossibilité pour les époux A... de réaliser cette opération immobilière n'était donc pas liée aux infractions reprochées, postérieures à l'anéantissement rétroactif de la vente consentie aux parties civiles; qu'en déclarant cependant que le préjudice allégué par les parties civiles et résultant de l'impossibilité de réalisation de la vente immobilière à elles consentie était en relation directe avec les infractions de faux et usage de faux alléguées, la chambre d'accusation a méconnu les textes visés au moyen";
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, par délibération du 28 mai 1986, le Conseil général du Maine-et-Loire a autorisé la vente d'un immeuble lui appartenant, "aux époux A..."; que, cependant, ces derniers n'ont pu réaliser l'opération;
Que, le 31 décembre 1986, l'immeuble a été vendu a la "SCI ROMA", créée entre C... Vielle et B... Vielle; que ces derniers, pour parvenir à la réalisation de la vente, ont produit un extrait de la délibération du 28 mai 1986, délivré le 17 décembre 1986 par le directeur des finances départementales mais ne mentionnant pas de nom d'acquéreur;
Attendu que, pour déclarer recevable la constitution de partie civile des époux A..., la chambre d'accusation relève que l'extrait de la délibération, qui en dénaturait le sens, a "permis à la SCI ROMA, donc à C... Vielle et B... Vielle, d'évincer, dans des conditions irrégulières, les époux A... et de contracter avec le département pour l'acquisition de l'immeuble"; qu'elle se prononce ensuite par les motifs repris au moyen;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, les juges ont justifié leur décision sans encourir les griefs allégués;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le quatrième moyen de cassation, pris de la violation des articles 112-1 et suivants et 441-1 et suivants du Code pénal;
"en ce que l'arrêt attaqué a infirmé l'ordonnance du 27 septembre 1990 en ce qu'elle a dit n'y avoir lieu de suivre contre B... Vielle et C... Vielle du chef d'usage de faux en écritures publiques;
"aux motifs que ces faux constituent des crimes et qu'en l'état de l'information, il existe des charges suffisantes justifiant le maintien des inculpations;
"alors qu'une loi nouvelle édictant des pénalités moins sévère doit être appliquée aux faits commis antérieurement et ayant donné lieu à des poursuites non encore terminées par une décision passée en force de chose jugée au moment de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle; que la loi du 22 juillet 1992 entrée en vigueur le 20 mars 1994, ayant retiré le caractère de crime aux infractions de faux et usage de faux en écriture publique reprochées à maîtres Vielle, lesquelles donnant désormais lieu à des peines délictuelles, l'arrêt attaqué doit être annulé pour un nouvel examen de l'affaire au regard des dispositions nouvelles plus favorables précitées";
Attendu qu'il n'importe que les motifs de l'arrêt fassent état d'une qualification "criminelle" à donner aux faits poursuivis, dès lors que le dispositif dudit arrêt se borne à constater qu'en l'état, il existe, contre C... Vielle et B... Vielle, des charges suffisantes "d'usage de faux en écriture publique" et que, au terme de la procédure d'instruction, les intéressés sont renvoyés devant le tribunal correctionnel, du chef de l'article 441-4 du Code pénal entré en vigueur le 1er mars 1994, postérieurement à l'arrêt ici attaqué;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
II Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 20 avril 1994 ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 80, 201, 205, 207 et 593 du Code de procédure pénale, des principes généraux de l'organisation judiciaire;
"en ce que l'arrêt attaqué a annulé l'ordonnance de non-lieu du 26 juillet 1993, ainsi que l'ordonnance de même date communiquant au parquet la procédure aux fins de règlement;
"aux motifs que le fait de prescrire un supplément d'information établit que la chambre d'accusation a implicitement entendu évoquer l'affaire; qu'en l'espèce et a fortiori, la chambre d'accusation ayant été saisie de l'appel des parties civiles formé contre l'ordonnance de non-lieu du 27 septembre 1990 sur les faits de faux et usage de faux, et le magistrat instructeur étant dessaisi par l'effet de l'ordonnance critiquée, la chambre d'accusation dans son arrêt du 19 décembre 1990 n'avait pas à user de son pouvoir d'évocation; qu'il est sans effet que le dispositif de l'arrêt porte ou non la mention de ce que la Cour a ou non entendu évoquer, dans la mesure où elle a ordonné un complément d'information; que le renvoi de la procédure au juge initialement saisi afin qu'il poursuive l'information ne pouvait s'accompagner de la prescription, dans le dispositif de l'arrêt, de procéder à l'exécution de mesures d'instruction nouvelles limitativement énumérées en contradiction avec l'ordonnance de règlement rendue par ce magistrat et infirmée, sans violer les principes généraux de l'organisation judiciaire; que la chambre d'accusation ayant expressément énoncé dans le dispositif de son arrêt du 21 novembre 1990 qu'elle ordonnait un "complément d'information" et qu'elle renvoyait la procédure à Melle Riomet, juge d'instruction à Angers afin qu'elle procède à des actes précis et limitativement énumérés, l'exécution de ces actes ne pouvait se faire que par le moyen d'un supplément ou d'un complément d'information tel que prévu par les articles 201 et 205 du Code de procédure pénale et par un magistrat ayant reçu une délégation de compétence limitée à leur accomplissement;
"alors que la chambre d'accusation qui ordonne par évocation un supplément d'information délègue nécessairement l'un de ses membres ou un juge d'instruction, lequel ne procède donc dans ces conditions qu'en vertu d'une délégation de la chambre d'accusation; que, dans son arrêt du 19 décembre 1990, la chambre d'accusation s'étant bornée à effectuer un renvoi pur et simple du dossier, sans déléguer ni un de ses membres, ni le juge d'instruction, celui-ci demeurait donc saisi du dossier, de sorte qu'en déclarant cependant que le juge d'instruction n'avait pu être saisi que d'une délégation de compétence et que son ordonnance de non-lieu du 26 juillet 1993 devait être annulée, la chambre d'accusation a violé les textes et les principes visés au moyen";
Attendu qu'en prescrivant, par son arrêt du 19 décembre 1990, un supplément d'information après avoir infirmé l'ordonnance entreprise, la chambre d'accusation a agi en vertu du pouvoir d'évocation qu'elle tient de l'article 207 alinéa 2 du Code de procédure pénale; que, dès lors, en ordonnant ensuite que la procédure serait "renvoyée" au juge d'instruction initialement saisi, elle a entendu déléguer ce magistrat pour procéder au supplément d'information, conformément aux exigences de l'article 205 ;
qu'ainsi, la chambre d'accusation étant, selon l'article 208 du Code de procédure pénale, seule compétente pour apprécier si l'information complémentaire était terminée, c'est à bon droit qu'a été annulée l'ordonnance qualifiée de "non-lieu", rendue par le magistrat délégué;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
III Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 21 juin 1995 ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 8 et 593 du Code de procédure pénale;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu de retenir la prescription de l'action publique du chef du délit d'ingérence;
"aux motifs que, s'il est exact que le magistrat instructeur n'a été saisi des faits d'ingérence que par un réquisitoire supplétif en date du 17 avril 1990, ces faits se trouvent liés par un rapport étroit de connexité avec ceux de faux et d'usage de faux en écritures publiques et authentiques dénoncés par la plainte avec constitution de partie civile déposée le 29 juillet 1988 par les époux A... puisque l'acte de vente du 31 décembre 1986 par lequel le délit d'ingérence ou de prise illégale d'intérêt a été constitué ne pouvait être dressé sans l'extrait de la délibération argué de faux;
"alors que les actes d'instruction et de poursuite accomplis dans une procédure d'information déterminée ne sont interruptifs de prescription qu'à l'égard des infractions, objet de cette information; que la plainte avec constitution de partie civile déposée le 29 juillet 1988 par les époux A... visant des faits exclusivement rattachables aux infractions de faux, usage de faux ou complicité et étant étrangers au délit d'ingérence, cette plainte ne pouvait interrompre la prescription de trois ans au regard des faits, objet du délit d'ingérence, de sorte qu'en décidant le contraire, la chambre d'accusation a violé les textes visés au moyen";
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 148 ancien du Code pénal et 441-4 nouveau du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé Me C... Vielle et Me B... Vielle devant le tribunal correctionnel d'Angers du chef d'usage de faux en écritures publiques;
"aux motifs que l'acte de vente dressé par Me Y... le 31 décembre 1986, qui fait foi jusqu'à inscription de faux, mentionne que le président du Conseil général de Maine-et-Loire intervient au présent acte "en exécution d'une délibération de ce Conseil général de ce département, en date du 28 mai 1986 dont un extrait certifié conforme est demeuré joint et annexé aux présentes après mention" ;
que cette mention n'ayant pas fait l'objet d'une procédure d'inscription de faux, la déclaration de M. X... selon laquelle il aurait annexé l'extrait à l'acte de vente après signature par le président du Conseil général n'est donc pas conforme à la vérité; pour le surplus, il résulte des déclarations faites par Mme Marie-France Z..., chef du bureau de la gestion du patrimoine départemental, et par M. Denis X..., que Roland et Marc D... ont eu connaissance de l'extrait falsifié avant la signature de l'acte de vente; l'objection faite par C... et B... Vielle selon laquelle l'envoi de l'extrait de la délibération par Mme Marie-France Z... aurait été fait au mois de juin 1986 dans le contexte de la vente consentie à Guerrier, ne résiste à l'observation de Marie-France Z... qui a déclaré avoir été surprise de recevoir un acte de vente dressé non par l'étude Vielle mais par Me Y... ce qui signifie qu'elle ignorait l'intervention de ce dernier et qu'elle n'avait pu lui adresser l'extrait daté du 17 décembre 1986; que cet extrait a donc bien été adressé par Mme Marie-France Z... à Roland et Marc D... qui l'ont joint à leur "projet" d'acte pour les faire parvenir à Me Y...; que Marc et Roland D... qui, selon leur aveu, ont eu connaissance du premier extrait régulier de la délibération du 28 mai 1986, ne pouvaient donc ignorer que ce second extrait daté du 17 décembre 1986 était un faux, et c'est sciemment qu'ils l'ont adressé à Me Y...;
"alors que dans leur mémoire déposé au greffe le 9 mai 1995, Me B... Vielle et Me Roland D... avaient soutenu que la présence de "blancs" dans le projet d'acte de vente par eux rédigé, se rapportant notamment à la date de la délibération du Conseil général, établissait que les notaires rédacteurs pensaient que celui-ci prendrait une nouvelle délibération et qu'ils n'avaient donc en leur possession ni à leur connaissance l'extrait argué de faux du 17 décembre 1986 concernant la délibération du 28 mai 1986, les "blancs" du projet d'acte de vente n'ayant pas au surplus été remplis par Mes C... et B... Vielle, mais par Me Y... qui a dressé cet acte; qu'en ne répondant à cette articulation essentielle du mémoire des prévenus dont il ressortait que ceux-ci n'avaient pas eu connaissance de l'extrait argué de faux, et n'en avaient donc pas fait usage lors de la rédaction du projet d'acte, la chambre d'accusation n'a pas motivé sa décision et a violé les textes visés au moyen";
Les moyens étant réunis ;
Attendu que les moyens se bornent à critiquer les énonciations de l'arrêt relatives à la prescription de l'action publique ainsi qu'aux charges que la chambre d'accusation a retenues contre les prévenus; que, ces énonciations ne contenant aucune disposition définitive que le tribunal n'aurait pas le pouvoir de modifier, les moyens sont irrecevables en application de l'article 574 du Code de procédure pénale;
Et attendu que les arrêts attaqués sont réguliers en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Le Gunehec président, M. Milleville conseiller rapporteur, MM. Guerder, Pinsseau, Joly, Pibouleau, Mme Françoise Simon, M. Challe conseillers de la chambre, Mmes Fossaert-Sabatier, de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Libouban ;
Greffier de chambre : Mme Mazard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 21 mai 1996 n° 94-85.029 B n° 208
CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Salomon,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 3 octobre 1994, qui l'a condamné, pour travail clandestin, à 10 000 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 460, 513, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble violation des droits de la défense :
" en ce que les mentions de l'arrêt attaqué établissent qu'à l'audience publique du 5 septembre 1994, les débats se sont déroulés comme suit :
" Ont été entendus :
" Mme le président Simon en son rapport, le prévenu en ses interrogatoire et moyens de défense,
" le ministère public en ses réquisitions,
" Me Benhamou, conseil du prévenu, en ses conclusions et sa plaidoirie,
" à nouveau, le prévenu et son conseil qui ont eu la parole en dernier,
" alors qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 513 du Code de procédure pénale, en sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993, entrée en vigueur en application de l'article 49-1 de la loi du 24 août 1993, les parties en cause ont la parole dans l'ordre prévu par l'article 460 ; qu'il en résulte que la défense du prévenu doit être présentée après la demande de la partie civile et les réquisitions du ministère public ; qu'en l'espèce, les mentions de l'arrêt établissent que le prévenu a présenté sa défense avant les réquisitions du ministère public ; que le fait que le prévenu et son conseil se soient vu donner la parole en dernier ne suffit pas à réparer l'atteinte portée aux intérêts du prévenu et résultant de l'obligation qui lui a été imposée en l'espèce de présenter sa défense le premier ; qu'il s'ensuit que les textes et principe susvisés ont été méconnus " ;
Attendu que l'arrêt attaqué mentionne que le prévenu et son conseil ont eu la parole en dernier ;
Qu'en cet état, et dès lors que l'article 513 du Code de procédure pénale a été rétabli en sa rédaction initiale par la loi du 8 février 1995, l'irrégularité commise n'a pas porté atteinte aux intérêts du demandeur ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 362-3, alinéa 1, L. 324-9, L. 324-10, L. 143-3, L. 143-5, L. 620-3 du Code du travail, 593 du Code de procédure pénale, de la directive européenne n° 91-533 du 14 octobre 1991, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'avoir employé 2 salariés sans avoir effectué de déclarations aux organismes de protection sociale et l'administration fiscale ;
" aux motifs qu'aucune attestation d'embauche n'avait été délivrée à ces 2 salariés lors de leur mise au travail ; que leur dissimulation était matériellement établie ; qu'il résultait des déclarations de Mohammet Y... que c'étaient Yusuf Z... et Salomon X... qui décidaient des salaires et que c'était Salomon X... qui s'occupait de la tenue des registres obligatoires et de la comptabilité ; qu'il avait reconnu s'occuper de toute l'administration, la correspondance et des relations avec les administrations, notamment des déclarations sociales et fiscales ; qu'il avait précisé au cours de l'enquête qu'il passait à l'atelier une fois par semaine et avait admis que c'était lui qui tenait le registre du personnel ; qu'il résultait suffisamment de ces éléments qu'il exerçait des fonctions de gestion et qu'il avait dissimulé ces 2 salariés, dont il avait nécessairement eu connaissance puisqu'ils travaillaient dans cet atelier depuis plus d'une semaine ;
" alors, d'une part, que la prévention reprochait au prévenu de n'avoir pas effectué de déclarations aux organismes de protection sociale et l'administration fiscale ; que le fait que les 2 salariés, à le supposer établi, n'aient pas été inscrits sur le registre unique du personnel et sur le registre des salaires, ne caractérise nullement l'omission de déclarations aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale, seule reprochée au prévenu ; qu'en se déterminant par ces motifs, la cour d'appel a excédé sa saisine et n'a pas légalement justifié la déclaration de culpabilité ;
" alors, d'autre part, qu'en vertu de la directive n° 91-533 du 14 octobre 1991 relative à l'obligation de l'employeur d'informer le travailleur des conditions applicables au contrat qui les unit, l'employeur est tenu de remettre au salarié, 2 mois au plus tard après le début du travail, un document constatant l'établissement du rapport contractuel et comportant certaines mentions ; qu'en l'espèce où le contrôle a eu lieu moins de 15 jours après l'embauche de Ali A... et moins de 1 mois après celle de B..., l'absence de délivrance de ce document ou d'une attestation d'embauche n'établit nullement l'élément matériel de l'infraction poursuivie, à savoir l'omission de déclarations aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale ; qu'il s'ensuit que cette énonciation inopérante ne donne aucune base légale à la déclaration de culpabilité ;
" alors, de troisième part, que seul peut être déclaré coupable d'une infraction à la réglementation du travail le gérant de droit ou de fait d'une personne morale ou les personnes auxquelles une délégation de pouvoirs a été expressément consentie ; que le fait d'exercer des fonctions de gestion dans une entreprise n'équivaut pas à assurer la gérance ni de droit ni de fait de la personne morale, c'est-à-dire, à définir les orientations destinées à la mise en oeuvre de la politique et de l'activité de l'entreprise ; que, faute d'avoir constaté que le prévenu exerçait au moins la gérance de fait de l'entreprise, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à la déclaration de culpabilité ;
" alors, enfin, que l'omission des déclarations aux organismes de protection sociale et à l'administration fiscale est un délit volontaire ; qu'en l'espèce, le gérant de droit, Mohammet Y..., avait déclaré, au cours de l'enquête, que le prévenu était absent au cours de la période correspondant au début du contrat de travail des 2 salariés (rapport de synthèse du 18 novembre 1992) ; qu'en affirmant, sans s'en expliquer autrement et contre les éléments établis par l'enquête, que Salomon X... avait nécessairement eu connaissance de leur présence dans l'entreprise où ils travaillaient depuis plus d'une semaine, la cour d'appel n'a pas caractérisé légalement l'infraction reprochée à celui-ci ; qu'il s'ensuit que la déclaration de culpabilité n'est pas légalement justifiée " ;
Sur la première branche ;
Vu lesdits articles, ensemble l'article 388 du Code de procédure pénale ;
Attendu que les juges ne peuvent légalement statuer que sur les faits dont ils sont saisis ;
Attendu que, pour déclarer Salomon X... coupable, les juges du second degré relèvent que 2 ouvriers travaillaient sans être inscrits sur le registre du personnel, qu'aucune attestation d'embauche ne leur avait été délivrée et que le registre de paye ne comportait pas les indications relatives aux salaires du mois d'avril 1992 ;
Mais attendu qu'en caractérisant ainsi les éléments constitutifs de l'infraction prévue par l'article L. 324-10. 3o, du Code du travail, alors qu'elle n'était saisie par la citation que de celle prévue par l'article L. 324-10. 2°, du même Code, la cour d'appel a prononcé sur des faits non visés à la prévention et excédé ses pouvoirs ;
Que dès lors la cassation est encourue ;
Par ces motifs et sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre moyen proposé :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Paris, en date du 3 octobre 1994, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris autrement composée.
Crim. 14 mai 1996 n° 96-81.045 B n° 203
CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X... Guy,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Amiens, en date du 30 janvier 1996, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de tentatives d'assassinat, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction ayant prolongé sa détention provisoire.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 114, 145 et 145-2 du Code de procédure pénale, ensemble de l'article 6-2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a refusé de prononcer la nullité de l'ordonnance prolongeant pour 1 an la détention provisoire de Guy X..., détenu depuis le 19 janvier 1993 ;
" aux motifs que il ressort de l'examen du procès-verbal de débat contradictoire du 10 janvier 1995 que Guy X..., qui était présent et assisté de son conseil à 10 h 15, avait dissimulé une lame de rasoir sur lui ; qu'il s'est pratiqué une légère coupure à l'avant-bras gauche, qui a nécessité son transfert temporaire à l'hôpital ; que le débat contradictoire a été suspendu alors que le magistrat instructeur et son greffier accompagnaient Guy X... à l'hôpital, son conseil prévenant le juge qu'elle ne pourrait assister à la suite de la procédure ; que Guy X..., qui a été examiné par le docteur Y... au service des urgences à l'hôpital, a constaté une plaie cutanée superficielle sans incapacité totale de travail personnel et a autorisé la sortie du plaignant ; que Guy X... a ainsi regagné le cabinet du magistrat instructeur où le débat contradictoire a été repris à 11 h 15 ; que Guy X... a refusé de signer le procès-verbal ; qu'il apparaît que le débat contradictoire, bien que perturbé par les agissements de Guy X..., a eu lieu régulièrement " ;
" alors que l'ordonnance prolongeant la détention provisoire pour une durée d'1 an doit être rendue après débat contradictoire, qui suppose que le conseil du mis en examen soit présent lors de la totalité du débat, sauf renonciation expresse et préalable par l'inculpé " ;
Attendu qu'en prononçant par les motifs reproduits au moyen, la chambre d'accusation a justifié sa décision au regard des articles 145-2 et 145, alinéa 1, et 4 du Code de procédure pénale, dont les dispositions n'exigent pas la présence aux débats contradictoires, de l'avocat de la personne mise en examen, dès lors que celui-ci a été convoqué conformément aux dispositions de l'article 114 du Code de procédure pénale ;
Que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 145-2 et 593 du Code de procédure pénale, ensemble de l'article 5 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance de prolongation pour un an de la détention provisoire de Guy X..., détenu depuis le 19 janvier 1993 ;
" alors que la chambre d'accusation ne pouvait s'abstenir de s'expliquer sur le moyen, invoqué par Guy X..., tiré de l'article 5, alinéa 3, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, fondé sur le droit d'être remis en liberté si l'affaire n'était pas jugée dans un délai raisonnable " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que pour confirmer l'ordonnance du juge d'instruction ayant prolongé, en application de l'article 145-2 du Code de procédure pénale, la détention provisoire de Guy X..., la chambre d'accusation énonce que son maintien en détention est nécessaire pour empêcher une pression sur les témoins, prévenir le renouvellement de l'infraction, s'assurer de sa représentation et préserver l'ordre public du trouble profond et durable causé par l'infraction ;
Mais attendu qu'en décidant ainsi, sans répondre au mémoire régulièrement déposé par l'intéressé, qui invoquait la violation des dispositions de l'article 5, paragraphe 3, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, selon lesquelles toute personne arrêtée ou détenue a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable ou libérée pendant la procédure, la chambre d'accusation a privé sa décision de base légale ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Amiens en date du 30 janvier 1996 et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Douai.
Com. 14 mai 1996 n° 94-17.297
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1°/ M. Z... Parent, demeurant ...,
2°/ la société civile immobilière (SCI) Batisolaire, dont le siège est ...,
3°/ la société civile immobilière (SCI) Virginie-Berengère, dont le siège est ...,
4°/ la société civile immobilière (SCI) ..., dont le siège est ...,
5°/ la société civile immobilière (SCI) Les Hameaux de Navarre, dont le siège est ...,
6°/ la société civile immobilière (SCI) GVB, dont le siège est Combray Est, Route de Saint-Romain, 42153 Riorges,
7°/ la société civile immobilière (SCI) Les Jardins d'Elodie, dont le siège est ...,
8°/ la société John X..., dont le siège est ...,
9°/ la société civile immobilière (SCI) Le Colombier, dont le siège est ...,
10°/ la société civile immobilière (SCI) Palavival, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 20 mai 1994 par la cour d'appel de Lyon (3e chambre), au profit de M. Philippe Y..., mandataire judiciaire, pris en sa qualité de mandataire des liquidations judiciaires des trois sociétés suivantes : la société anonyme Bâtir 2 000, la société à responsabilité limitée MDE, maisons de l'Ecureuil, de la société à responsabilité limitée Hameau du Marclet, demeurant 10, rue Mi-Carême, 42000 Saint-Etienne,
défendeur à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les dix moyens de cassation annexés au présent arrêt;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 mars 1996, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Badi, conseiller rapporteur, Mme Pasturel, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre;
Sur le rapport de M. le conseiller Badi, les observations de Me Thomas-Raquin, avocat de M. A..., de la société civile immobilière (SCI) Batisolaire, de la société civile immobilière (SCI) Virginie-Berengère, de la société civile immobilière (SCI) ..., de la société civile immobilière (SCI) Les Hameaux de Navarre, de la société civile immobilière (SCI) GVB, de la société civile immobilière (SCI) Les Jardins d'Elodie, de la société John X..., de la société civile immobilière (SCI) Le Colombier et de la société civile immobilière (SCI) Palavival, de Me Blondel, avocat de M. Y..., ès qualités, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après la mise en liquidation judiciaire de la société anonyme Bâtir 2000 et des sociétés à responsabilité limitée MDE et Hameau du Marclet, dont M. A... était respectivement le président du conseil d'administration et le gérant, le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire des SCI Batisolaire, Virginie-Bérengère, Darcin, les Hameaux de Navarre, GVB, les Jardins d'Elodie, John X..., le Colombier et Palavival, ainsi que, en application de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985, le redressement puis la liquidation judiciaires de M. A... ;
que les SCI et M. A... ont relevé appel de ce jugement;
Sur le premier moyen :
Vu les articles 1842, alinéa 1er, du Code civil et 7, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985;
Attendu que, pour étendre la liquidation judiciaire de la société Bâtir 2000 à la SCI les Hameaux de Navarre, l'arrêt retient qu'il a existé entre les sociétés une identité de sièges sociaux, de gérants et d'associés, que cette SCI a payé avec un délai d'environ 22 mois le solde de travaux que la société Bâtir 2000 avait effectués, ce qui démontre une confusion de patrimoines;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir la fictivité ou la confusion des patrimoines de ces deux personnes morales, qui pouvait seule permettre d'étendre à l'une la liquidation judiciaire prononcée à l'égard de l'autre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Sur le deuxième moyen :
Vu les articles 1842, alinéa 1er, du Code civil et 7, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985;
Attendu que pour étendre à la SCI Darcin la liquidation judiciaire de la société Bâtir 2000, l'arrêt retient que la première a la seconde pour associé à 80 %, qu'elles ont le même gérant, que dans le compte débiteurs divers "Lotissements Darcin" de Bâtir 2000 figure un chèque comptabilisé en décembre 1986 non régularisé au 31 août 1991, que ce compte n'a pas de correspondance à la SCI Darcin, que "certes la SCI Darcin soutient que le compte concerne un retrait effectué par Mme A... intitulé à l'époque Darcin, que quoiqu'il en soit il ressort qu'il existe une interpénétration entre la société Bâtir 2000 et la SCI Darcin";
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir la fictivité ou la confusion des patrimoines de ces deux personnes morales, qui pouvait seule permettre d'étendre à l'une la liquidation judiciaire prononcée à l'égard de l'autre, la cour d'appel n'a pas donné de case légale à sa décision;
Sur le troisième moyen :
Vu les articles 1842, alinéa 1er, du Code civil et 7, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985;
Attendu que pour étendre à la SCI Batisolaire la liquidation judiciaire de la société Bâtir 2000, l'arrêt retient que M. A..., gérant de cette dernière société qui a émis deux factures de prestations et une facture de vente, détient 95 % des parts de la SCI dont il est également le gérant, qu'il existe une interpénétration économique;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir la fictivité ou la confusion de patrimoines de ces deux personnes morales, qui pouvaie seule permettre d'étendre à l'une la liquidation prononcée à l'égard de l'autre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Sur le quatrième moyen :
Vu les articles 1842, alinéa 1er du Code civil et 7, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985;
Attendu que pour étendre à la SCI GVB la liquidation judiciaire de la société Bâtir 2000, l'arrêt retient que ces sociétés ont le même gérant, que la première a acquis de la seconde divers biens immobiliers, qu'un loyer a été versé à tort par Bâtir 2000 à GVB qui a été constituée "pour permettre la mobilisation en 1986 des trois pavillons, propriété de Bâtir 2000, qu'avec le produit de la revente en juillet 1990, GVB a pu faire une avance de 475 187 francs à Bâtir 2000 qui a été régularisée en septembre 1990 par la vente d'un lot de terrain pour 500 000 francs", qu'il apparaît qu'il existe une confusion de patrimoines;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir la fictivité ou la confusion des patrimoines de ces deux personnes morales, qui pouvait seule permettre d'étendre à l'une la liquidation judiciaire prononcée à l'égard de l'autre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Sur le cinquième moyen :
Vu les articles 1842, alinéa 1er, du Code civil et 7, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985;
Attendu que pour étendre à la SCI les Jardins d'Elodie la liquidation judiciaire de la société Bâtir 2000, l'arrêt retient que M. A..., gérant de la SCI dont le siège social est fixé à son domicile, en détient 95 % des parts, que des lots d'un terrain acquis par la SCI ont été vendus à des tiers et à des proches du groupe, que le solde du prix de deux lots vendus à Bâtir 2000 a été encaissé avec un décalage de 21 mois, qu'en tant que client une avance de 90 000 francs a été consentie par Bâtir 2000 en décembre 1988 et n'a été régularisée qu'en septembre 1990, qu'il apparaît qu'il s'agit d'une société satellite;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir la fictivité ou la confusion des patrimoines de ces deux personnes morales, qui pouvait seule permettre d'étendre à l'une la liquidation judiciaire prononcée à l'égard de l'autre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Sur le sixième moyen :
Vu les articles 1842, alinéa 1er, du Code civil et 7, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985;
Attendu que pour étendre à la SCI John X... la liquidation judiciaire de la société Bâtir 2000, l'arrêt retient que M. A... est associé à hauteur de 85 % et que son beau-père est gérant;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir la fictivité ou la confusion des patrimoines de ces deux personnes morales, qui pouvait seule permettre d'étendre à l'une la liquidation judiciaire prononcée à l'égard de l'autre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Sur le septième moyen :
Attendu que pour étendre à la SCI Virginie-Bérengère la liquidation judiciaire de la société Bâtir 2000, l'arrêt retient qu'il y a eu une première SCI qui s'appelait Virginie dont les associés étaient les époux A..., qu'une deuxième SCI dénommée Virginie-Bérengère a été constituée, que la société Bâtir 2000 a vendu à celle-ci un terrain à des conditions préférentielles qui ne pouvaient être accordées à une SCI dépendant directement de M. A..., qu'il a sans doute fallu créer une nouvelle SCI ad'hoc dont les associés n'étaient pas dirigeants de la société Bâtir 2000;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir la fictivité ou la confusion des patrimoines de ces deux personnes morales, qui pouvait seule permettre d'étendre à l'une la liquidation judiciaire prononcée à l'égard de l'autre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Sur le huitième moyen :
Attendu que pour étendre à la SCI Le Colombier la liquidation judiciaire de la société Bâtir 2000, l'arrêt retient que la première a pour associé à hauteur de 85 % M. A..., que son objet était d'acquérir un terrain pour y construire un immeuble, que les études du projet ont été réalisées par la société Bâtir 2000 qui les a facturées à la SCI John X...;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir la fictivité ou la confusion des patrimoines de ces deux personnes morales, qui pouvait seule permettre d'étendre à l'une la liquidation judiciaire prononcée à l'égard de l'autre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Sur le neuvième moyen :
Vu les articles 1842, alinéa 1er, du Code civil et 7, alinéa 1er, de la loi du 25 janvier 1985;
Attendu que pour étendre à la SCI Palavival la liquidation judiciaire de la société MDE, l'arrêt retient qu'elle a été constituée pour réaliser deux lotissements, que son gérant est M. A... et que la société MDE lui a facturé 100 000 francs d'honoraires qui n'ont pas été entièrement réglés, que l'enquête démontre l'existence d'un groupe économique solidaire entre les sociétés;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir la fictivité ou la confusion des patrimoines de ces deux personnes morales, qui pouvait seule permettre d'étendre à l'une la liquidation judiciaire prononcée à l'égard de l'autre, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Et sur le dixième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 4 du Code de procédure pénale ;
Attendu que pour rejeter la demande de sursis à statuer formée devant la cour d'appel par M. A... qui, appelant du jugement ayant prononcé sa liquidation judiciaire en application de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985, à raison de sa qualité de dirigeant de droit des sociétés Bâtir 2000, MDE et Hameau du Marclet et de gérant de droit ou de fait des SCI, faisait valoir qu'il avait été mis en examen le 27 mai 1993 du chef de banqueroute, l'arrêt énonce que "la cour dispose d'éléments d'appréciation suffisants indépendamment de l'enquête pénale en cours pour statuer";
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans constater que l'action tendant à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire en application de l'article 182 précité n'était pas sous l'influence de la décision du juge pénal, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision;
Crim. 14 mai 1996 n° 96-81.020
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BATUT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par : - Z... Marius,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de MONTPELLIER, du 16 novembre 1995, qui l'a renvoyé devant la cour d'assises de l'HERAULT, sous l'accusation de vol avec arme;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 379 et 384 du Code pénal abrogé, 121-4, 311-1 et 311-8 du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;
"aux motifs que la veille des faits, Marius Z... a invité Pierre X... et Richard Y... à abandonner leur projet; que le lendemain, il a néanmoins pris place dans le véhicule 305 conduit par Richard Y...; que pendant l'agression commise par Pierre X... et Richard Y..., Marius Z... est resté à bord de la 305; que la participation de Marius Z... à ce vol à main armée est cependant établie par la déclaration de Pierre X... selon laquelle il était prévu que Marius Z... accompagnerait ses deux amis sans participer au hold-up, ainsi que par le fait que Marius Z... s'est réuni, la veille des faits, dans un café avec Pierre X... et Richard Y..., qu'il les a accompagnés le jour des faits, sachant que le fourgon était volé et qu'après le vol à main armée, il ne s'est pas désolidarisé de ses deux compagnons;
"alors qu'est l'auteur de l'infraction la personne qui commet les faits incriminés; qu'en relevant que Marius Z... s'est réuni la veille des faits avec les deux auteurs du vol à main armée, qu'il les a accompagnés le jour des faits en prenant place dans le véhicule 305 dans lequel il est resté passif pendant la commission des faits, et qu'il est rentré avec ses compagnons après les faits, la chambre d'accusation n'a pas caractérisé la participation de Marius Z... à l'infraction commise par Pierre X... et Richard Y..., et n'a donc pas légalement justifié sa décision de mise en accusation";
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué, partiellement reproduits au moyen, mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre d'accusation, après avoir exposé les faits, a relevé l'existence de charges suffisantes contre Marius Z... pour ordonner son renvoi devant la cour d'assises sous l'accusation de vol arme;
Qu'en effet, il résulte des articles 213 et 214 du Code de procédure pénale que les chambres d'accusation apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction, et la Cour de Cassation n'a d'autre pouvoir que de vérifier, à supposer ces faits établis, si leur qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement;
Que, tel étant le cas en l'espèce, le moyen ne peut qu'être écarté;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente; qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle Marius Z... a été renvoyé; que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Le Gunehec président, Mme Batut conseiller rapporteur, MM. Guerder, Pinsseau, Joly, Pibouleau, Mme Françoise Simon, MM. Challe, Mistral conseillers de la chambre, Mmes Fossaert-Sabatier, de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Dintilhac ;
Greffier de chambre : Mme Arnoult ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 14 mai 1996 n° 94-85.616
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BATUT, les observations de la société civile professionnelle LESOURD et BAUDIN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par : - Z... Dominique,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-en-PROVENCE, 7ème chambre, du 6 octobre 1994, qui, pour diverses infractions au Code du travail, l'a condamné à 10 mois d'emprisonnement avec sursis, 74 amendes de 1000 francs et 68 amendes de 500 francs, et a ordonné la publication et l'affichage de la décision;
I - Sur les contraventions ;
Attendu qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 3 août 1995, sont amnistiées les contraventions de police lorsqu'elles ont été commises avant le 18 mai 1995; que tel est le cas en l'espèce en ce qui concerne les infractions d'absence de visite médicale d'embauche et de non-tenue de registre du personnel; qu'ainsi, l'action publique est éteinte de ces chefs;
II - Sur les délits ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 460, 513 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble manque de base légale et violation des droits de la défense;
"en ce que l'arrêt attaqué mentionne qu'à l'audience publique du 23 juin 1994, les débats se sont déroulés comme suit :
"le conseiller Zentar-Drillon a présenté le rapport de l'affaire,
"puis, le président a interrogé le prévenu qui a répondu aux diverses interpellations à lui adressées,
"Me Y... a été entendu en sa plaidoirie et a déposé des conclusions,
"Me X... a été entendu en sa plaidoirie,
"le ministère public a pris ses réquisitions,
"le prévenu ayant eu la parole en dernier,
"alors qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 513 du Code de procédure pénale, en sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993, entrée en vigueur en application de l'article 49-1 de la loi du 24 août 1993, les parties en cause ont la parole dans l'ordre prévu par l'article 460; qu'il en résulte que la défense du prévenu doit être présentée après la demande de la partie civile et les réquisitions du ministère public; qu'en l'espèce, les mentions de l'arrêt établissent que les avocats du prévenu ont présenté sa défense avant les réquisitions du ministère public; que le fait que le prévenu se soit vu donner la parole en dernier ne suffit pas à réparer l'atteinte portée à ses intérêts et résultant
de l'obligation qui lui a été imposée, en l'espèce, de présenter sa défense le premier; qu'il s'ensuit que les textes et principe susvisés ont été méconnus";
Attendu que, si l'arrêt mentionne que les avocats de Dominique Z... ont présenté sa défense avant les réquisitions du ministère public, en violation des dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale issues de la loi du 4 janvier 1993, il précise que le prévenu a eu la parole en dernier;
Qu'en cet état, et dès lors que l'article 513 précité a été rétabli en sa rédaction initiale par la loi du 8 février 1995, l'irrégularité commise n'a pas été de nature à porter atteinte aux intérêts du demandeur;
Qu'ainsi, le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 121-1 et 121-2 nouveaux du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable des infractions à la réglementation du travail commises dans l'agence de Cannes de la SARL Silco;
"alors que, en vertu des dispositions de l'article 121-1 nouveau du Code pénal, nul n'est responsable pénalement que de son propre fait; qu'en l'espèce, le prévenu avait fait valoir que la gérance de l'agence de Cannes était confiée à un chef d'agence entièrement responsable de sa gestion, qui avait procédé aux recrutements illicites et n'avait pas accompli les formalités légales; qu'ainsi, c'est à tort que la cour d'appel a déclaré le prévenu coupable de faits qu'il n'a pas commis personnellement";
Attendu que, pour déclarer imputables à Dominique Z..., gérant d'une société de travail temporaire, diverses infractions au Code du travail relevées à l'occasion de plusieurs contrôles dans une agence de cette société, la juridiction du second degré retient, par motifs adoptés, que la délégation de pouvoirs prétendument consentie au chef d'agence, postérieure à deux des contrôles effectués, avait pour seule fin d'épargner au prévenu d'être entendu par les enquêteurs sur les infractions constatées ;
qu'elle ajoute qu'au surplus, il n'est pas établi que l'intéressé ait mis à la disposition du prétendu délégataire les moyens d'assumer les pouvoirs qu'il entendait lui transférer;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il se déduit que le prévenu disposait seul, aux dates des faits poursuivis, des pouvoirs de direction, de contrôle et d'embauche dans l'établissement concerné, la cour d'appel n'a pas encouru les griefs allégués;
Que, dès lors, le moyen ne saurait être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 341-6, L. 364-2-1 du Code du travail, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'avoir directement ou par personne interposée, engagé, conservé à son service ou employé pour quelque durée que ce soit des étrangers non munis de titre les autorisant à exercer une activité salariée en France;
"alors, d'une part, que le fait d'engager ou de conserver à son service un étranger non muni de titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France est une infraction intentionnelle qui requiert, pour être constituée, la connaissance, par l'employeur, de la qualité d'étranger du salarié; qu'en l'espèce, il ne résulte ni de l'arrêt attaqué, ni du jugement qu'il confirme que le prévenu ait connu la qualité d'étrangers des ouvriers employés; que, faute d'avoir caractérisé l'élément intentionnel du délit poursuivi, la cour d'appel n'a pas légalement justifié la déclaration de culpabilité;
"alors, d'autre part, que le juge du fond qui déclare le prévenu coupable d'avoir conservé à son service un étranger non muni de titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France doit en outre indiquer l'identité et la nationalité de chacun des salariés employés en infraction aux dispositions légales; que, faute d'avoir précisé l'identité et la nationalité des salariés prétendument irrégulièrement employés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié la déclaration de culpabilité
"alors, enfin que la prévention ne permet nullement de déterminer le nombre de salariés étrangers prétendument irrégulièrement employés par le prévenu; qu'il n'est nullement établi que, compte tenu des dates auxquelles les faits poursuivis auraient été commis et qui se chevauchent, le nombre des salariés irrégulièrement employés puisse être obtenu par l'addition du nombre de salariés visés pour chacune des dates et qu'en réalité, il ne s'agisse pas, pour certains d'entre eux au moins, des mêmes personnes; que, faute d'avoir précisé le nombre de salariés irrégulièrement employés, la chambre criminelle est dans l'impossibilité de contrôler la légalité de la peine prononcée";
Attendu que, pour déclarer Dominique Z... coupable d'emploi de travailleurs étrangers démunis du titre exigé par l'article L. 341-6 du Code du travail, la cour d'appel relève notamment, par motifs adoptés des premiers juges, que, selon les constatations des contrôleurs du travail, l'agence de la société dirigée par le prévenu a embauché, courant 1989 et 1990, plusieurs ressortissants cap-verdiens dépourvus de titre de travail, ou en possession de documents à l'évidence falsifiés;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs qui, contrairement à ce qui est allégué, font état de la nationalité des salariés concernés, les juges ont caractérisé en tous ses éléments constitutifs, notamment intentionnel, le délit dont ils ont déclaré le prévenu coupable;
Que les dispositions de l'article L. 341-6 du Code du travail, qui interdisent de conserver à son service ou d'employer pour quelque durée que ce soit, un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France, impliquent nécessairement que l'employeur s'informe de la nationalité de celui qu'il embauche et vérifie, dans le cas où il s'agit d'un étranger, s'il est titulaire du titre précité; que commet sciemment l'infraction à l'article susvisé celui qui, comme en l'espèce, omet volontairement de remplir ces obligations;
Que par ailleurs, il n'importe que les juges n'aient pas précisé le nombre et l'identité des travailleurs étrangers irrégulièrement employés, dès lors qu'il ressort de l'arrêt attaqué qu'ils n'ont pas sanctionné le délit poursuivi d'une peine d'amende;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Attendu que la déclaration de culpabilité et les peines prononcées au titre des délits reprochés au prévenu étant ainsi justifiées, il n'y a pas lieu d'examiner le quatrième moyen de cassation, en ce qu'il concerne l'infraction prévue et réprimée par les articles L. 124-3, L. 124-4 et L. 152-2 du Code du travail;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs,
DECLARE l'action publique ETEINTE en ce qui concerne les contraventions d'absence de visite médicale d'embauche et de non-tenue de registre du personnel;
REJETTE le pourvoi pour le surplus ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Milleville conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Batut conseiller rapporteur, MM. Guerder, Pinsseau, Joly, Pibouleau, Mme Françoise Simon, MM. Challe, Mistral conseillers de la chambre, Mmes Fossaert-Sabatier, de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Dintilhac ;
Greffier de chambre :Mme Nicolas ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 14 mai 1996 n° 94-85.617
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire BATUT, les observations de la société civile professionnelle LESOURD et BAUDIN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par : - Z... Dominique,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 7ème chambre, du 13 octobre 1994, qui, pour exercice d'un travail clandestin, l'a condamné à une amende de 5 000 francs;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 460, 513 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble manque de base légale et violation des droits de la défense;
"en ce que l'arrêt attaqué mentionne qu'à l'audience publique du 23 juin 1994, les débats se sont déroulés comme suit :
"le conseiller Zentar-Drillon a présenté le rapport de l'affaire,
"puis le président a interrogé le prévenu qui a répondu aux diverses interpellations à lui adressées,
"Maître Y... a été entendu en sa plaidoirie et a déposé des conclusions,
"Maître X... a été entendu en sa plaidoirie,
"le ministère public a pris ses réquisitions,
"le prévenu ayant eu la parole en dernier",
"alors qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 513 du Code de procédure pénale, en sa rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993, entrée en vigueur en application de l'article 49-1 de la loi du 24 août 1993, les parties en cause ont la parole dans l'ordre prévu par l'article 460; qu'il en résulte que la défense du prévenu doit être présentée après la demande de la partie civile et les réquisitions du ministère public; qu'en l'espèce, les mentions de l'arrêt établissent que les avocats du prévenu ont présenté sa défense avant les réquisitions du ministère public; que le fait que le prévenu se soit vu donner la parole en dernier ne suffit pas à réparer l'atteinte portée à ses intérêts et résultant de l'obligation qui lui a été imposée, en l'espèce de présenter sa défense le premier; qu'il s'ensuit que les textes et principe susvisés ont été méconnus;
Attendu que, si l'arrêt mentionne que les avocats de Dominique Z... ont présenté sa défense avant les réquisitions du ministère public, en violation des dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale issues de la loi du 4 janvier 1993, il précise que le prévenu a eu la parole en dernier;
Qu'en cet état, et dès lors que l'article 513 précité a été rétabli en sa rédaction initiale par la loi du 8 février 1995, l'irrégularité commise n'a pas été de nature à porter atteinte aux intérêts du demandeur;
Qu'ainsi, le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles pris de la violation des articles 551, 591, 593 et 802 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, manque de base légale, ensemble violation des droits de la défense;
"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté l'exception de nullité de la citation présentée par le prévenu in limine litis;
"aux motifs que la citation délivrée au prévenu conformément aux dispositions de l'article 551 du Code de procédure pénale visait expressément le fait poursuivi et énonçait le texte de loi qui le réprimait; qu'il n'existait aucune incertitude sur la nature de l'infraction ni sur les textes dont il était fait application; qu'au surplus, le prévenu n'alléguait aucune atteinte aux droits de la défense;
"alors, d'une part, que la citation doit, à peine de nullité, énoncer très précisément et de manière détaillée les faits constitutifs de l'infraction poursuivie; qu'est nulle la citation libellée dans les termes généraux du texte qui définit et réprime l'infraction sans préciser le fait lui-même qui en est constitutif; qu'en l'espèce, la citation reprochait au prévenu, dans les termes généraux de l'article L. 324-10 du Code du travail, "d'avoir exercé un travail clandestin au sens de l'article L. 324-10 du Code du travail", sans autre précision sur les faits qui en auraient été constitutifs; que ces énonciations ne mettaient pas le prévenu en mesure de connaître les faits précis qui étaient prétendument constitutifs de l'infraction poursuivie et donc de préparer sa défense; qu'il s'ensuit que la citation était entachée d'une nullité que les juges d'appel devaient reconnaître;
"alors, d'autre part, que porte nécessairement atteinte aux droits de la défense la citation qui se borne à viser les termes généraux du textes qui définit l'infraction sans préciser aucun des éléments de fait propres à la cause susceptible de la constituer; qu'un tel exploit qui ne permet pas au prévenu de déterminer les faits qui lui sont reprochés ne met pas celui-ci en mesure d'organiser utilement sa défense; qu'en l'espèce, faute d'avoir spécifié les faits constitutifs de travail clandestin reprochés au prévenu, la citation du 1er juin 1993 du chef de travail clandestin n'a pas permis au prévenu de déterminer les faits qui lui étaient reprochés à ce titre et a porté atteinte aux droits de la défense";
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Dominique Z... a été cité devant le tribunal correctionnel pour avoir, "à Cannes, du 22 janvier 1988 au 6 mars 1991, exercé un travail clandestin au sens de l'article L. 324-10 du Code du travail", faits prévus et réprimés par les articles L. 324-9 et L. 362-3 du même Code;
Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de la citation régulièrement proposée par le prévenu, la cour d'appel se prononce par les motifs reproduits au moyen;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que l'intéressé n'a pas contesté avoir eu connaissance du procès-verbal du contrôleur du travail, base de la poursuite, avant toute déclaration sur les faits objet de la prévention, d'où il se déduit qu'il avait été mis en mesure de préparer sa défense, l'arrêt n'encourt pas les griefs allégués;
Que, dès lors, le moyen ne peut être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles L. 324-9, L. 324-10 et L. 362-3 du Code du travail, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable de travail clandestin;
"aux motifs que l'agence de Cannes, créée en 1984, était un établissement secondaire qui aurait dû, conformément aux articles 9 et 20 du décret n° 94-406 du 30 mai 1984 être immatriculé dans le ressort du tribunal de son établissement; qu'il appartenait au prévenu, en sa qualité de chef d'entreprise de s'informer du contenu exact de la réglementation et de procéder aux démarches administratives nécessaires; que faute d'avoir rempli les allégations (sic) lui incombant, le prévenu avait commis une faute personnelle;
"alors que le juge correctionnel ne peut prononcer de condamnation à raison d'un fait qualifié délit qu'à la condition de caractériser toutes les circonstances de fait prévues par la loi pour que le fait soit punissable; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué n'a caractérisé aucune circonstance de fait établissant l'élément matériel du travail clandestin poursuivi; qu'il n'a pas non plus constaté que ce travail clandestin était intentionnel; que, dès lors, la déclaration de culpabilité est privée de toute base légale";
Attendu que, pour déclarer Dominique Z..., gérant de la société de travail temporaire Silco, dont le siège social est à Nice, coupable de travail clandestin, en application de l'article L. 324-10, 1° du Code du travail, la juridiction du second degré relève que la société précitée a ouvert à Cannes une agence qui dispose d'un personnel propre et d'un registre unique du personnel, et qui entretient des relations commerciales avec les tiers; que les juges en déduisent que cette agence est un établissement secondaire au sens de l'article 9, dernier alinéa du décret du 30 mai 1984 et que, conformément aux dispositions de l'article 20 dudit décret, elle aurait dû être immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Cannes ;
qu'ils ajoutent qu'il appartenait au prévenu, en sa qualité de chef d'entreprise, de s'informer du contenu de la réglementation et de procéder aux démarches administratives nécessaires;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Milleville conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Batut conseiller rapporteur, MM. Guerder, Pinsseau, Joly, Pibouleau, Mme Françoise Simon, MM. Challe, Mistral conseillers de la chambre, Mmes Fossaert-Sabatier, de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Dintilhac ;
Greffier de chambre : Mme Nicolas ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 14 mai 1996 n° 94-83.588
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller GUERDER et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par : - X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 11ème chambre, en date du 22 juin 1994, qui l'a condamné, pour complicité de diffamations publiques envers des fonctionnaires publics, à 20 000 francs d'amende, et qui a prononcé sur les intérêts civils;
1) Sur l'action publique :
Attendu que selon l'article 2 alinéa 2-5 de la loi du 3 août 1995, sont amnistiés, lorsque, comme en l'espèce, ils sont antérieurs au 18 mai 1995, les délits prévus par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse;
qu'ainsi l'action publique s'est trouvée éteinte à l'égard du prévenu dès la publication de ce texte;
Attendu cependant que selon l'article 21 de la loi d'amnistie précitée, la juridiction de jugement saisie de l'action publique reste compétente pour statuer sur les intérêts civils;
2) Sur l'action civile :
Vu le mémoire personnel produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 80-3 et 179 du Code de procédure pénale, en leur rédaction issue de la loi du 4 janvier 1993, et 226 de la loi du 4 janvier 1993;
Attendu que pour écarter l'exception de nullité de l'ordonnance de présomption de charges en date du 2 avril 1993, prise par le prévenu de l'absence de notification préalable des charges et de l'inobservation du délai de vingt jours prévus par l'article 80-3 du Code de procédure pénale, les juges relèvent que la procédure a été communiquée au procureur de la République le 19 février 1993;
qu'ils en déduisent qu'en vertu des dispositions transitoires édictées par l'article 226 de la loi du 4 janvier 1993, l'ordonnance du 2 avril 1993, rendue à la suite d'un réquisitoire définitif de même date, équivaut à une ordonnance de règlement, ayant saisi de la procédure la juridiction correctionnelle, devant laquelle les articles 174 et 385 du Code de procédure pénale, en leur rédaction antérieure à ladite loi, sont demeurés applicables;
Attendu que par ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris d'un défaut de réponse à conclusions;
Attendu que pour écarter l'exception de nullité prise de l'absence de conformité de la citation à l'ordonnance de règlement, l'arrêt énonce que lorsque, comme en l'espèce, une information a été clôturée par une ordonnance de renvoi, le tribunal est saisi de la poursuite, même en matière de presse, par ladite ordonnance, et non par la citation ultérieure, qui étant simplement indicative de date, n'est pas soumise aux prescriptions de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881;
Que les juges observent, en outre, qu'une copie de l'ordonnance de présomption de charges ayant été jointe à ladite citation, aucune atteinte n'a été portée aux droits de la défense;
D'où il suit que le moyen ne peut être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation de l'article 30 de la loi du 29 juillet 1881;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que les juges ont statué sur les faits articulés par la plainte avec constitution de partie civile, et par le réquisitoire introductif, auxquels l'ordonnance de renvoi s'est conformée;
que ces imputations portant atteinte à l'honneur et à la considération des personnes physiques plaignantes, à raison de leur qualité et de leurs fonctions, ont été qualifiées à bon droit de diffamations publiques envers des fonctionnaires publics, et injure publique envers un fonctionnaire public, en application des articles 31 et 33 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881;
que l'arrêt précise que si l'auteur de l'ouvrage attaque à diverses reprises l'institution judiciaire dans son ensemble, la plupart des imputations retenues constituent des attaques dirigées personnellement contre le juge Gilbert Y...;
Attendu qu'en déduisant de ces énonciations que la diffamation prévue par l'article 30 de la loi précitée n'était pas caractérisée, les juges ont justifié leur décision, sans encourir le grief allégué;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs,
I - Sur l'action publique :
La DECLARE ETEINTE ;
II - Sur l'action civile :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Milleville conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Guerder conseiller rapporteur, MM. Pinsseau, Joly, Pibouleau, Challe, Mistral conseillers de la chambre, Mmes Fossaert-Sabatier, de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Dintilhac ;
Greffier de chambre : Mme Nicolas ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 14 mai 1996 n° 94-82.440 B n° 204
REJET du pourvoi formé par :
- X... Albert,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, 11e chambre, en date du 6 avril 1994, qui l'a condamné, pour infraction à la réglementation des sondages, à 10 000 francs d'amende, ainsi qu'à la publication d'un extrait de la décision dans le journal L'Evénement du Jeudi.
LA COUR,
Vu le mémoire ampliatif et le mémoire complémentaire produits ;
Sur la recevabilité des mémoires en ce qu'ils sont présentés au nom de la société L'Événement du Jeudi et de Me Serge Pinon :
Attendu que le pourvoi a été déclaré au nom d'Albert X..., en qualité de directeur de la publication de L'Evénement du Jeudi ; que selon cette déclaration, il vise l'arrêt " qui confirme le jugement sur la culpabilité, prononce amende, ordonne la publication aux frais du prévenu " ;
Qu'ainsi, la société éditrice, qui ne s'est pas pourvue, n'a pas qualité pour produire des mémoires, qui, en ce qui la concerne, sont irrecevables ;
Sur le moyen complémentaire de cassation pris de la violation des articles 460, 513 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, violation des droits de la défense :
" en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que le prévenu et son conseil ont été entendus avant les réquisitions de l'avocat général, en violation des dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale, telles qu'entrées en vigueur à la suite de l'article 49-1 de la loi du 24 août 1993, et de l'ordre impératif de parole prévu par ce texte et par l'article 460 du Code de procédure pénale ; que les droits de la défense ont été ainsi méconnus " ;
Attendu que si l'arrêt mentionne que le prévenu a présenté sa défense avant les réquisitions du ministère public, dans l'ordre de parole prévu par les dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale, en leur rédaction antérieure à la loi du 4 janvier 1993, il précise que le prévenu et son avocat ont eu la parole les derniers ;
Qu'en cet état, et dès lors que l'article 513 précité a été rétabli en sa rédaction initiale par la loi du 8 février 1995, l'irrégularité commise n'a pas été de nature à porter atteinte aux intérêts du demandeur ;
Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 1er, 11 et 12 de la loi du 19 juillet 1977, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Albert X... et déclaré la société L'Evénement du Jeudi civilement responsable, du chef d'infraction aux dispositions de l'article 11 de la loi du 19 juillet 1977, pour avoir publié, dans la semaine précédant le référendum sur l'adhésion de la France au traité de Maastricht, le résultat d'un sondage portant sur la question suivante : " Etes-vous personnellement très favorable, plutôt favorable, plutôt opposé ou très opposé à la construction de l'Europe ? " ;
" alors que ne sont interdits, dans la semaine précédant le scrutin, que les sondages d'opinion " ayant un rapport direct ou indirect avec un référendum ou une des élections " visées par le texte ; que ne constitue pas un sondage ayant un rapport " direct ou indirect " avec un référendum la question posée de savoir, dans le cadre d'une enquête générale sur le comportement politique des Français renfermant des questions extrêmement variées, s'ils sont plus ou moins favorables à la construction de l'Europe, l'article ayant au surplus pris soin de relever que, précisément, la réponse à cette question était sans rapport avec les intentions de vote sur le traité de Maastricht ; que la cour d'appel a ainsi faussement appliqué la loi pénale et violé les textes précités " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que durant la semaine précédant le référendum du 20 septembre 1992, sur la ratification du traité de l'Union européenne, le journal hebdomadaire L'Evénement du Jeudi daté du 17 au 23 septembre, a publié les résultats d'un sondage d'opinion réalisé par l'institut CSA, comportant notamment les réponses à la question " êtes-vous personnellement très favorable, plutôt favorable, plutôt opposé ou très opposé à la construction de l'Europe ? " ; que le sondage ayant dénombré 78 % de réponses favorables, contre 14 % de réponses opposées et 8 % d'abstentions, a été assorti d'un commentaire selon lequel " les Français sont à une énorme majorité favorables à la construction européenne, ce qui n'empêche pas la moitié d'entre eux de voter contre un traité qui favorise cette construction " ;
Attendu que pour déclarer Albert X... coupable d'infraction à la réglementation des sondages, l'arrêt attaqué relève que le prévenu, directeur de la publication du journal, n'a pas contesté que la décision de publier ce sondage et son commentaire relevait de sa responsabilité personnelle, et qu'il assumait cette responsabilité ; que les juges énoncent que le résultat du sondage portant sur la question précitée et son commentaire ont incontestablement un rapport direct avec le référendum sur la ratification du traité de l'Union européenne, et que leur publication entre dans les prévisions des articles 1er et 11 de la loi du 19 juillet 1977 ;
Attendu qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen ;
Que tout sondage d'opinion est régi par les dispositions de la loi du 19 juillet 1977 dès lors que l'une des questions posées aux personnes interrogées présente un rapport direct ou indirect avec un référendum ; que tel a été le cas en l'espèce ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation des articles 6, 9 et 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 30 et 36 du traité de Rome, de l'article 55 de la Constitution et de l'article 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Albert X... et déclaré la société L'Evénement du Jeudi civilement responsable, du chef d'infraction aux dispositions de l'article 11 de la loi du 19 juillet 1977 " ;
" alors, d'une part, que l'interdiction de publier des sondages relatifs à un scrutin dans la semaine précédant ce scrutin constitue une atteinte à la liberté d'opinion et d'expression dont l'objet, préserver la liberté ou la sincérité du vote, ne constitue pas l'un des intérêts qui seuls peuvent justifier, aux termes de l'article 10, § 2, de la Convention, une restriction à cette liberté ;
" que, de surcroît, cette mesure n'est pas nécessaire à la protection des intérêts ainsi énumérés, dans une société démocratique ;
" qu'en conséquence, aucune condamnation pénale ne pouvait être prononcée à raison de l'éventuelle transgression de cette mesure ;
" alors, d'autre part, que cette interdiction est également contraire aux articles 30 et 36 du traité sur l'Union européenne parce que constituant une mesure d'effet équivalant à l'importation de publications étrangères, non justifiée par la protection d'un des intérêts énoncés à l'article 36 du Traité ;
" que le souci de protéger la sincérité d'un scrutin ou la liberté d'un électeur ne constitue pas un objectif légitime d'intérêt général justifiant une restriction au principe de liberté d'importation ;
" que de surcroît cette mesure n'est pas nécessaire à la protection de la liberté des scrutins ;
" alors, enfin, et en toute hypothèse que, au regard des deux conventions précitées, d'éventuelles restrictions à la liberté d'expression ou à la liberté d'importation ne peuvent être considérées comme légitimes que si elles sont strictement proportionnelles aux nécessités des intérêts à protéger ; que tel n'est pas le cas de l'édiction d'une interdiction absolue de toute diffusion ou publication d'un sondage pendant 8 jours, le juge de l'élection et le juge répressif ayant par ailleurs les pouvoirs nécessaires pour contrôler d'éventuels abus des libertés en cause " ;
Attendu qu'en rejetant l'argumentation du prévenu prise de l'incompatibilité de l'article 11 de la loi du 19 juillet 1977 avec l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et avec les articles 30 et 36 du Traité instituant la Communauté économique européenne, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Que, d'une part, si l'article 10 de la Convention susvisée en son premier paragraphe, reconnaît à toute personne le droit à la liberté d'expression, ce texte prévoit en son second paragraphe que l'exercice de cette liberté comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions, prévues par la loi, qui constituent, dans une société démocratique, des mesures nécessaires notamment à la protection des droits d'autrui ; que tel est l'objet de l'article 11 de la loi précitée, qui protège la liberté des élections et la sincérité du scrutin, par ailleurs garanties par l'article 3 du premier protocole additionnel à la Convention ;
Que, d'autre part, les dispositions de ladite loi ne sauraient être interprétées comme régissant la publication et la diffusion en France de sondages réalisés hors de France au sujet d'opérations électorales intéressant un autre pays ; qu'en ce qui concerne le scrutin national, elles ne sauraient constituer une mesure d'effet équivalent à une restriction à l'importation, au sens de l'article 30 du Traité susvisé, dès lors qu'elles visent indistinctement les produits nationaux et importés, et que la durée de l'interdiction de publication qu'elles édictent est limitée à 8 jours ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 11 et 12 de la loi n° 77-807 du 19 juillet 1977, L. 90-1 du Code électoral, violation du principe de la légalité des peines et des articles 111-3 et 131-10 du Code pénal :
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné Albert X... à une peine de publication de sa décision pour infraction aux dispositions de l'article 11 de la loi du 19 juillet 1977 ;
" alors que toute infraction aux dispositions de ce texte est punie par les peines de l'article L. 90-1 du Code électoral, c'est-à-dire exclusivement une peine d'amende ; que, en prononçant une peine de publication non prévue par la loi, la cour d'appel a exposé sa décision à une censure qui ne peut être que totale, en vertu du principe d'indivisibilité entre la décision de culpabilité et le prononcé de la peine " ;
Attendu que le demandeur ne saurait se faire un grief de la mesure de publication ordonnée par l'arrêt attaqué, dès lors qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 12 de la loi du 19 juillet 1977, la décision de justice sera publiée ou diffusée par les mêmes moyens que ceux par lesquels il a été fait état du sondage publié ou diffusé en violation des dispositions de la présente loi ;
D'où il suit que le délit n'entre pas dans les prévisions de l'article 2, alinéa 1, de la loi du 3 août 1995 portant amnistie, et que le moyen manque par la circonstance sur laquelle il prétend se fonder ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.
Crim. 13 mai 1996 n° 95-82.763
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller MARTIN, les observations de la société civile professionnelle BORE et XAVIER, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Z... Isabelle, épouse X..., aux droits de Z... Albert, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de BASTIA, en date du 12 avril 1995, qui, dans la procédure suivie contre personne non dénommée du chef de faux et usage, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction;
Vu le mémoire produit;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 146 de l'ancien Code pénal, 441-1 et 441-4 du nouveau Code pénal, 593 du Code de procédure pénale;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre du chef de faux et usage;
"aux motifs qu'il ressort des pièces de la procédure et notamment des déclarations du président de la chambre des notaires de Haute-Corse que la rédaction du paragraphe "propriété, jouissance d'un acte de vente" est purement déclaratif de la part des parties, sauf titre dûment publié venant en modifier le contenu; que l'information n'a pas prouvé le caractère frauduleux de la mention litigieuse et la circonstance invoquée par l'appelante que le titre qu'elle revendique n'aurait pas été assujetti à publicité foncière, à la supposer établie, ne permet pas de considérer que le notaire Nicoli a sciemment altéré la vérité, en fraude des droits d'Isabelle Z...; que, faute de cet élément constitutif de l'infraction pénale, il convient de confirmer l'ordonnance déférée;
"alors que dans son mémoire déposé devant la Cour, l'exposante avait rappelé que, par un courrier recommandé du 16 août 1987, Albert Z... avait dûment informé le notaire de ce qu'il occupait la parcelle litigieuse et exerçait une possession animus domini plus que trentenaire lui conférant la propriété légitime du bien, ce qui interdisait la vente projetée au mépris de ses droits; que l'exposante avait soutenu que c'était dès lors en toute connaissance de cause que le notaire avait porté sur l'acte de vente et soumis à la signature des parties les mentions erronées suivant lesquelles le bien appartenait à M. Y... était libre de toute occupation et possession, conférant ainsi à M. Y... la qualité de propriétaire apparent; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen pertinent la chambre d'accusation n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés";
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que, pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre d'accusation, après avoir analysé les faits dénoncés dans la plainte et répondu aux articulations essentielles du mémoire de la partie civile, a énoncé les motifs par lesquels elle a estimé qu'il n'y avait pas lieu à suivre contre quiconque;
Attendu que la demanderesse se borne à discuter la valeur des motifs retenus par les juges, sans justifier d'aucun des griefs que l'article 575 du Code de procédure pénale autorise la partie civile à formuler à l'appui de son pourvoi contre un arrêt de la chambre d'accusation en l'absence de pourvoi du ministère public;
Que, dès lors, le moyen est irrecevable et qu'il en est de même du pourvoi par application du texte susvisé;
Par ces motifs,
DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Le Gunehec président, M. Martin conseiller rapporteur, MM. Culié, Roman, Schumacher conseillers de la chambre, MM. de Mordant de Massiac, de Larosière de Champfeu, Mme de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Dintilhac ;
Greffier de chambre : Mme Mazard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 13 mai 1996 n° 95-84.421
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ROMAN et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Joël, partie civile, contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de ROUEN, en date du 8 juin 1995, qui a déclaré irrecevable son appel de l' ordonnance d'incompétence rendue par le juge d'instruction dans l'information ouverte sur sa plainte contre personne non dénommée pour chantage, menaces de mort, complicité de crimes contre l'humanité, complicité d'assassinat;
Vu les mémoires personnels produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 185, 186, 197, 502, 503, 575, 577, 591, 593 du Code de procédure pénale, de l'article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du protocole annexe n 7 de cette Convention;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que, dans la procédure suivie sur plainte avec constitution de partie civile de Joël X... des chefs de chantage, menaces de mort, complicité de crimes contre l'humanité, complicité d'assassinat, le juge d'instruction a rendu le 17 mars 1995 une ordonnance d'incompétence, qui a été notifiée au demandeur par lettre recommandée adressée le même jour;
Que Joël X... en a relevé appel le 18 mars 1995 par lettres adressées au juge d'instruction et au greffe du tribunal de grande instance;
Attendu qu'aux termes des articles 186, alinéa 4, 502 et 503 du Code de procédure pénale, l'appel doit être formé par une déclaration faite au greffe de la juridiction qui a statué, ou, si l'appelant est détenu, auprès du chef de l'établissement pénitentiaire;
Qu'il ne peut être suppléé par aucun acte à ces formalités substantielles, sauf si la partie a été empêchée de les accomplir par un fait de force majeure;
Attendu, notamment, que le demandeur ne saurait se faire un grief de ce qu'il n'aurait pas obtenu, dès le samedi 18 mars 1995, l'enregistrement de sa déclaration d'appel au greffe de l'établissement où il est détenu, dès lors qu'il disposait d'un délai de dix jours pour exercer son recours dans les formes légales;
Et attendu que, l'arrêt ayant, à bon droit, déclaré l'appel irrecevable, le pourvoi l'est également;
Par ces motifs,
DECLARE le pourvoi IRRECEVABLE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Le Gunehec président, M. Roman conseiller rapporteur, MM. Culié, Schumacher, Martin conseillers de la chambre, MM. de Mordant de Massiac, de Larosière de Champfeu, Mme de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Dintilhac ;
Greffier de chambre : Mme Mazard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 13 mai 1996 n° 95-83.602
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire de LAROSIERE de CHAMPFEU , les observations de la société civile professionnelle GUIGUET, BACHELLIER, de La VARDE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par : - X... Robert,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5ème chambre, en date du 2 mars 1995 qui, pour exercice illégal de la profession de banquier, l'a condamné à 250 000 francs d'amende;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1, 3, 4, 10 et 75 de la loi du 24 janvier 1984; 485 du Code de procédure pénale;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Robert X... coupable du délit d'exercice illégal de la profession de banquier et l'a condamné à une amende de 250 000 francs;
"au motif qu'il avait prêté de l'argent à plusieurs personnes moyennant intérêt et ainsi effectué des opérations de crédit, et donc de banque, à titre habituel;
"alors que, selon l'article 10 de la loi du 24 janvier 1984, il est interdit à toute personne autre qu'un établissement de crédit d'effectuer des opérations de banque à titre habituel; que la seule réalisation de plusieurs prêts successifs ne suffit pas à caractériser le délit d'exercice illégal de la profession de banquier mais qu'il appartient aux juges du fond de rechercher si les prêts considérés constituaient des opérations de banque au sens des articles 1 et 4 de la loi; qu'il suit de là qu'en se bornant à relever que Robert X... avait consenti à plusieurs personnes des prêts à titre onéreux sans rechercher si ces prêts étaient assimilables, dans les circonstances de l'espèce, à des opérations de banque, l'arrêt attaqué n'a pas légalement justifié sa décision au regard des dispositions des articles 1, 3, 4 et 10 de la loi du 24 janvier 1984;
"et alors que, dans le cadre de leur pouvoir souverain d'appréciation, il appartient aux juges du fond de préciser les circonstances de fait susceptibles de caractériser l'habitude exigée par la loi; qu'en se bornant à relever qu'en plusieurs années trois ou quatre prêts avaient été consentis, l'arrêt attaqué n'a pas légalement justifié sa décision au regard des dispositions des articles 1, 4 et 10 de la loi du 24 janvier 1984";
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance ou de contradiction et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable;
D'où il suit que le moyen, qui remet en discussion devant la Cour de Cassation l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, et la valeur et la portée des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être accueilli;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Où étaient présents : M. Le Gunehec président, M. de Larosière de Champfeu conseiller rapporteur, MM. Culié, Roman, Schumacher, Martin conseillers de la chambre, M. de Mordant de Massiac, Mme de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires, M. Dintilhac avocat général, Mme Mazard greffier de chambre;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 13 mai 1996 n° 95-86.092
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire de Y... de MASSIAC, les observations de Me JACOUPY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- Z... Jeannine, épouse X...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de PARIS, en date du 27 octobre 1995, qui, dans l'information suivie contre elle du chef de fraude fiscale, a dit n'y avoir lieu à annulation d'actes de la procédure;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 7 février 1996, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi;
Vu le mémoire produit ;
Sur l'unique moyen de cassation, pris de la violation des articles 174, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt attaqué a dit n'y avoir lieu à annulation d'un acte ou d'une pièce de la procédure pour fraude fiscale suivie contre Jeannine Z..., épouse X...;
"aux motifs que l'ordonnance du 30 mars 1995 du juge d'instruction de Bobigny aux fins d'annulation de la procédure suivie contre Jeannine X... mentionne que la plainte du chef de fraude fiscale déposée le 21 mai 1990 a été largement étayée, pour ne pas dire essentiellement, par une procédure judiciaire instruite au tribunal de grande instance de Melun, procédure entièrement annulée par jugement du 26 mai 1993; que, dans le cadre d'une vérification approfondie de la situation fiscale du foyer X..., l'administration des Impôts avait régulièrement exercé son droit de communication d'une procédure judiciaire en cours d'information au tribunal de grande instance de Melun pour abus de biens sociaux; que la décision annulant postérieurement la procédure suivie à Melun ne s'étend pas aux pièces dont copie avait été antérieurement jointe à la procédure distincte instruite pour fraude fiscale; que l'interdiction édictée par l'article 174 du Code de procédure pénale ne concerne, aux termes mêmes de ce texte, que les parties aux débats; que la procédure pour fraude fiscale est différente de la procédure annulée à Melun et concerne des débats nécessairement distincts;
"alors que l'article 174 du Code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant des lois des 4 janvier 1993 et 24 août 1993, interdit, sans restriction aucune, "de tirer des actes et des pièces ou parties d'actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties"; que cette prohibition est générale et ne saurait être limitée à la procédure qui a fait l'objet de l'annulation; qu'ainsi, la chambre d'accusation ne pouvait, pour refuser d'annuler la procédure suivie contre Jeannine X... pour fraude fiscale, essentiellement fondée sur des actes de procédure déclarés nuls, retenir que la procédure pour fraude fiscale était différente de la procédure annulée à Melun et concernait des débats nécessairement distincts";
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que, dans l'information ouverte contre Jeannine Z... du chef de fraude fiscale, le juge d'instruction a saisi la chambre d'accusation en vue de l'annulation de tout ou partie des pièces de celle-ci, la plainte de l'Administration visant certaines pièces d'une procédure d'abus de biens sociaux annulée entre temps par une juridiction de jugement;
Attendu que, si c'est à tort que, pour dire n'y avoir lieu à annulation, la chambre d'accusation a cru devoir se référer à l'article 174 du Code de procédure pénale inapplicable en l'espèce, la décision n'en est pas moins justifiée, dès lors qu'il résulte des indications de l'arrêt que la procédure pour fraude fiscale reposait également sur d'autres éléments que ceux tirés de la procédure annulée - notamment sur les résultats d'une VASFE - et qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer qu'aucune atteinte n'a été ainsi portée aux droits de la défense;
D'où il suit que le moyen, qui critique des motifs erronés mais surabondants, doit être écarté;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Le Gunehec président, M. de Mordant de Massiac conseiller rapporteur, MM. Culié, Roman, Schumacher, Martin conseillers de la chambre, M. de Larosière de Champfeu, Mme de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Dintilhac ;
Greffier de chambre : Mme Mazard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Crim. 13 mai 1996 n° 95-81.792
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller SCHUMACHER, les observations de la société civile professionnelle RICHARD et MANDELKERN, et de la société civile professionnelle DELAPORTE et BRIARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DINTILHAC;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- CHARLET B..., contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 22 février 1995, qui, pour abus de confiance, l'a condamné à 6 mois d' emprisonnement avec sursis, à 10.000 francs d'amende et a prononcé sur les intérêts civils;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation pris de la violation des articles 406 et 408 du Code pénal, 314-1 à 314-4 du nouveau Code pénal, 427, 485, 512 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Georges X... coupable d'abus de confiance, l'a condamné pénalement à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende, et l'a condamné à régler 210 000 francs de dommages-intérêts au profit de Yves Y... et Florence E...;
"aux motifs que le contrat passé entre les parties civiles est un contrat complexe : contrat de dépôt du navire, avec mandat de le vendre pour un prix fixe et déterminé dès l'origine; que force est de constater qu'à la date de revendication, soit le 1er octobre 1993, et alors que les documents émanant de Georges X... lui-même font état d'un encaissement des fonds (contrepartie de la vente), ni ces fonds, ni le bateau si la vente n'est pas effective ne peuvent être restitués à Yves Y... et Florence E... pourtant en droit de les réclamer; qu'ainsi le détournement est bien constitué; que Georges X... soutient avoir agi de bonne foi : d'abord, parce qu'il n'a pas encaissé les 210 000 francs sur un compte personnel mais sur le compte de la société, ensuite parce que l'usage abusif ou le retard à restituer ne constituent pas de détournement répréhensible; mais attendu d'abord qu'il ne saurait invoquer un "retard" à restituer puisqu'aucune restitution n'est jamais intervenue; attendu ensuite que peu importe que le détournement ait été fait non à son profit exclusif, mais à celui de sa société; attendu surtout qu'il ressort des pièces mêmes que Georges X... produit que, contrairement à ses affirmations selon lesquelles son dépôt de bilan aurait été contraint par le refus de livraison intempestif de son principal fournisseur, bien au contraire, le refus de livrer n'est que la conséquence d'impayés importants et d'échéances de crédit non honorées depuis juin 1993 (cf. lettre du directeur général d'D... France du 1er septembre 1993) de la part de Charlet C...; que donc, dès juin et juillet 1993 (époque pourtant favorable dans la branche), Georges X... connaissait des difficultés de
trésorerie; qu'ainsi la mauvaise foi de l'intéressé est-elle établie quand, après avoir reçu mandat de vendre le bateau des consorts A... pour un prix donné, il fait virer les fonds provenant de cette vente au compte bancaire de la société dont il est gérant et dont il sait qu'elle est en état de cessation de paiements, mettant ainsi les propriétaires dans l'impossibilité d'exercer leurs droits (arrêt p. 4 et 5;
1°) "alors que dans ses conclusions d'appel, l'exposant a expressément fait valoir que, conformément aux dispositions de l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985, Georges X... était, à compter du jugement d'ouverture du 10 septembre 1993, dans l'impossibilité légale de régler ses créances, et donc de remettre aux consorts A... le prix de vente de leur bateau;
"que, dès lors, en se déterminant par la circonstance qu'à la date du 1er octobre 1993, les vendeurs étaient en droit de réclamer à Georges X... le prix de cette vente, pour en déduire que le détournement de fonds était constitué au sens des articles 408 du Code pénal et 314-1 du nouveau Code pénal, sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions du prévenu, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés;
2°) "alors que, dans ses conclusions d'appel, Georges X... a fait valoir que, conformément aux conventions faisant la loi des parties, la remise des fonds aux vendeurs était subordonnée à la remise, par ces derniers, des documents administratifs du bateau, lesquels n'ont pas été confiés à l'exposant avant le jugement d'ouverture, et ce malgré plusieurs relances, de sorte qu'en cet état Georges X... était fondé à exposer aux consorts Z... un droit de rétention, exclusif de toute intention frauduleuse;
"qu'en s'abstenant dès lors de répondre à cette argumentation péremptoire, la cour d'appel a violé les textes susvisés;
3°) "alors que les dispositions de l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985 relatif à l'arrêt des poursuites individuelles s'appliquent notamment à la victime d'une infraction qui doit déclarer sa créance et ne peut, dès lors, poursuivre l'action civile devant la juridiction pénale afin d'obtenir la condamnation du débiteur à des dommages-intérêts ;
"qu'ainsi, en condamnant, sur l'action civile, l'exposant à régler aux consorts A... la somme de 210 000 francs à titre de dommages-intérêts, tant en relevant qu'aux termes d'un jugement du 10 septembre 1993, le tribunal de commerce de Mont-de-Marsan avait ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de Georges X... et de sa société, la cour d'appel a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations et violé, par fausse application, l'article 47 de la loi du 25 janvier 1985";
Vu lesdits articles ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision; que les juges doivent répondre aux chefs péremptoires des conclusions dont ils sont saisis;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué que les consorts A... ont confié à la société Charlet C..., dont Georges X... était le gérant, la vente d'un bateau; que, selon la convention liant les parties, le prix devait être remis aux vendeurs dans les trente jours de son paiement par l'acheteur; que Georges X... n'a pas restitué aux vendeurs le prix de vente versé sur le compte de la société le 13 août 1993, malgré une mise en demeure délivrée le 1er octobre suivant ;
Attendu que, pour infirmer le jugement de relaxe, condamner Georges X... pour abus de confiance et allouer aux parties civiles des dommages-intérêts, les juges du second degré se prononcent par les motifs repris au moyen;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions du prévenu qui soutenait, d'une part, que, du fait de la procédure collective ouverte le 10 septembre 1993, tant à l'égard de la société qu'à son encontre, il s'était trouvé dans l'impossibilité légale de restituer le prix de vente, d'autre part, que le défaut de fourniture, par les vendeurs, des documents administratifs relatifs au bateau avait justifié de sa part la rétention du prix, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision et a méconnu le sens et la portée des principes susvisés;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs,
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d' appel de Pau, en date du 22 février 1995, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bordeaux, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Pau, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Le Gunehec président, M. Schumacher conseiller rapporteur, MM. Culié, Roman, Martin conseillers de la chambre, MM. de Mordant de Massiac, de Larosière de Champfeu, Mme de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Dintilhac ;
Greffier de chambre : Mme Mazard ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Soc. 7 mai 1996 n° 93-41.199
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Turquetil, société anonyme, dont le siège est 111, Grand'Rue, 59100 Roubaix,
en cassation d'un jugement rendu le 3 novembre 1992 par le conseil de prud'hommes de Roubaix (section industrie), au profit de M. Daniel X..., demeurant ... Beaumont,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 mars 1996, où étaient présents : M. Waquet, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Finance, conseiller rapporteur, M. Ferrieu, conseiller, MM. Frouin, Boinot, Richard de la Tour, Soury, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Barault, greffier de chambre;
Sur le rapport de M. le conseiller Finance, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu, selon le jugement attaqué (conseil de prud'hommes de Roubaix, 3 novembre 1992), que la société Nordécor, au sein de laquelle est employé M. X..., a été absorbée par la société Turquetil à effet du 1er janvier 1991; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'une prime de fin d'année;
Sur le premier moyen :
Attendu, que la société Turquetil, fait grief au jugement d'avoir rejeté sa demande de sursis à statuer, alors, selon le moyen, qu'elle avait déposé plainte avec constitution de partie civile du chef de faux aux motifs que la lettre datée du 29 décembre 1990 n'avait en réalité été établie et adressée à son destinataire que le 29 avril 1991, qu'en refusant de surseoir à statuer sur la demande dont elle était saisie dans l'attente de la décision à intervenir sur l'action publique, la juridiction prud'homale a violé les dispositions de l'article 4 du Code de procédure pénale;
Mais attendu, que le conseil de prud'hommes ne s'étant pas déterminé au vu de cette lettre, l'issue de la plainte pénale était sans influence sur l'instance civile; que le moyen est inopérant;
Sur le second moyen :
Attendu que, la société Turquetil, fait grief au conseil de prud'hommes d'avoir accueilli la demande du salarié, alors, selon le moyen, d'une part que le fait par la société Nordécor d'avoir inscrit à son bilan une provision pour dettes fiscales et sociales ne peut emporter engagement de paiement de cette dernière au profit de l'un de ses salariés; que, d'autre part, M. X... ne rapporte pas la preuve du caractère acquis de la prime réclamée, des conditions de constance, généralité et fixité; qu'en ne répondant pas aux moyens développés dans ses écritures, le conseil de prud'hommes n'a pas donné de base légale à sa décision;
Mais attendu, que par un motif non critiqué par le pourvoi, le conseil de prud'hommes a constaté que la société Turquetil ne contestait pas devoir la prime de fin d'année 1990; qu'il a ainsi légalement justifié sa décision;
Crim. 7 mai 1996 n° 95-85.104
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept mai mil neuf cent quatre-vingt-seize, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller Le GALL, les observations de Me CHOUCROY, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Le FOYER de COSTIL;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- BOUMEDIENNE Abdelhamid,
contre l'arrêt de la cour d'assises des HAUTS-de-SEINE, du 29 juin 1995, qui, pour tentatives de meurtre sur agents de la force publique et détention d'arme, l'a condamné à 15 ans de réclusion criminelle et a ordonné la confiscation de l'arme et des munitions saisies, et contre l'arrêt du même jour par lequel la Cour a prononcé sur les intérêts civils;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation pris de la violation des articles 222-1 et 221-4 du Code pénal, 349 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale;
"en ce que les questions n°2, 4 et 6 relatives à la circonstance aggravante du meurtre constituée par la qualité de fonctionnaire de police des victimes mentionnent à la fois cette qualité et le fait qu'elle était apparente;
"alors qu'est entachée d'une complexité prohibée la question qui interroge la Cour et le jury sur plusieurs faits ou circonstances pouvant donner lieu à des réponses distinctes qui, diversement appréciées, peuvent conduire à des conséquences différentes; que dès lors, en l'espèce, où l'existence de la circonstance aggravante du meurtre prévue par l'article 221-4-4° du Code pénal suppose que la victime ait eu à la fois la qualité de dépositaire de l'autorité publique et que cette qualité ait été apparente ou connue de l'auteur, les questions n°2, 4 et 6 qui englobent ces deux éléments devant être réunis cumulativement pour que la peine soit aggravée, sont entachées de complexité";
Attendu que, pour chacune des trois tentatives de meurtre reprochées à l'accusé, a été posée la question relative à la circonstance aggravante prévue par l'article 221-4, 4°, du Code pénal dans les termes suivants :"les faits ci-dessus spécifiés à la question n°... ont-ils été commis alors que Monsieur N... était fonctionnaire de police dans l'exercice de ses fonctions et que cette qualité de Monsieur N...était apparente?";
Attendu que les questions ainsi posées, qui réunissent les éléments constitutifs d'une même circonstance aggravante, ne sont entachées d'aucune complexité;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 362 et 593 du Code de procédure pénale, 132-18 et 132-24 du Code pénal;
"en ce que la feuille des questions de l'arrêt attaqué mentionne qu'il a été fait lecture par le président des dispositions des articles 222-23 et 222-24 du nouveau Code pénal, conformément aux prescriptions de l'article 362 modifié du Code de procédure pénale;
"alors qu'aux termes de l'article 362 du Code de procédure pénale dont les dispositions sont d'ordre public, en cas de réponse affirmative sur la culpabilité, le président donne lecture aux jurés des dispositions des articles 132-18 et 132-24 du Code pénal, avant que la cour d'assises ne délibère sur l'application de la peine; que dès lors, en l'espèce, où le président de la cour d'assises a, en application de ce texte, donné lecture de deux articles du Code pénal, différents de ceux qu'il vise et qui rappellent le principe fondamental d'abaisser les peines privatives de liberté et de l'individualisation de la peine pour remplacer la position d'une question sur les circonstances atténuantes, la formalité obligatoire, parce que substantielle aux droits de la défense, prévue par l'article 326 alinéa 1er du Code de procédure pénale, a été méconnue";
Attendu que la feuille de questions mentionne que le président a lu, conformément aux prescriptions de l'article 362 du Code de procédure pénale, les articles 222-23 et 222-24 du Code pénal;
Attendu qu'en dépit de l'erreur matérielle manifeste dans le visa des textes dont il a été donné lecture, lesquels sont étrangers à l'accusation portée contre Abdelhamid Boumedienne, la Cour de Cassation est en mesure de s'assurer que le président a lu les articles 132-18 et 132-24 du Code pénal qui sont ceux visés à l'article 362 du Code de procédure pénale;
Et attendu qu'aucun moyen n'est produit contre l'arrêt civil, que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la Cour et le jury;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Guilloux conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Le Gall conseiller rapporteur, MM. Massé, Fabre, Mme Baillot, M. Farge conseillers de la chambre, Mme Batut, M. Poisot, Mme de la Lance, M. Desportes, Mme Karsenty conseillers référendaires;
Avocat général : M. Le Foyer de Costil ;
Greffier de chambre : Mme Arnoult ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
Copyright © 2019, IA Droit