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Crim. 9 octobre 2024 n° 23-84.481

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° C 23-84.481 F-D
N° 01207

ODVS 9 OCTOBRE 2024

CASSATION

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 9 OCTOBRE 2024


MM. [F] [U], [K] [U], [E] [U], et Mme [R] [U], parties civiles, ont formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Amiens, en date du 4 juillet 2023, qui a déclaré pénalement irresponsable M. [S] [H] des faits de meurtre aggravé, a prononcé sur une admission en soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète ainsi que sur des mesures de sûreté.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Guerrini, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de MM. [F] [U], [K] [U], [E] [U], et Mme [R] [U], et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Guerrini, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le [Date décès 2] 2020, le corps sans vie de [N] [U] a été découvert dans son appartement par les pompiers et la police. M. [S] [H] était présent et a déclaré de façon confuse qu'il avait poignardé sa compagne à trois ou quatre reprises, trois jours auparavant.
3. Une information a été ouverte et M. [H] a été mis en examen pour meurtre aggravé.
4. Par ordonnance du 1er mars 2023, le juge d'instruction a transmis la procédure d'information au procureur général aux fins de saisine de la chambre de l'instruction en application du premier alinéa de l'article 706-120 du code de procédure pénale.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches
5. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [H] pénalement irresponsable du fait d'avoir, entre les [Date décès 1] 2020 et le [Date décès 2] 2020, donné la mort à [N] [U], en lui portant plusieurs coups de couteau, à raison d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes et a rejeté les demandes de renvoi des parties civiles aux fins de statuer sur les intérêts civils, alors :
« 3°/ que, lorsque la chambre de l'instruction est saisie en application de l'article 706-120 du code de procédure pénale, elle entend au cours des débats la partie civile si celle-ci le demande ; qu'en n'ayant pas invité M. [F] [U], le père de la victime, à s'exprimer au cours des débats, quand il était présent à l'audience et avait, dans son mémoire, régulièrement déposé plus d'un mois avant l'audience et visé par le greffe, « sollicit(é) », le cas échéant, « d'être entendu », comme elle l'a expressément constaté la chambre de l'instruction a méconnu l'article 706-122 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 706-122 du code de procédure pénale :
7. Selon ce texte, lorsque la chambre de l'instruction est saisie en application de l'article 706-120 du même code, elle entend la partie civile si celle-ci le demande.
8. Il ressort des notes de l'audience du 30 mai 2023 que M. [F] [U], partie civile présente qui avait sollicité son audition par mémoire présenté devant la chambre de l'instruction par son avocat, n'a pas été entendu.
9. En statuant sur la responsabilité pénale de M. [H], sans procéder à l'audition de la partie civile, qui est de droit lorsqu'elle l'a demandée, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé.
10. La cassation est par conséquent encourue.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 23-18.454

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 550 F-D
Pourvoi n° J 23-18.454



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° J 23-18.454 contre l'arrêt rendu le 4 mai 2023 par la cour d'appel de Douai (chambre 8, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [C] [D],
2°/ à Mme [J] [M], épouse [D],
tous deux domiciliés [Adresse 2],
3°/ à la société S21y, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], représentée par Mme [L] [X], prise en qualité de liquidateur judiciaire dela société France Pac Environnement ,
4°/ à la société France Pac environnement, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, de la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre et Rameix, avocat de M. et Mme [D], après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société Cofidis du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société S21y, représentée par Mme [X], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société France Pac Environnement.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 mai 2023), le 24 janvier 2017, par contrat conclu hors établissement, M. et Mme [D] (les emprunteurs) ont commandé auprès de la société France Pac environnement (le vendeur) la fourniture et l'installation de panneaux photovoltaïques ainsi que la réalisation de travaux d'isolation, dont le prix a été financé par un crédit souscrit le même jour auprès de la société Cofidis (la banque).
3. Invoquant des irrégularités du bon de commande, les emprunteurs ont assigné le vendeur et la banque en annulation du contrat principal et du crédit affecté. Devant la cour d'appel, la société S21y, prise en sa qualité de mandataire liquidateur de la société France Pac environnement, a été appelée en cause.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses quatre premières branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses cinquième à septième branches
Enoncé du moyen
5. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à payer aux emprunteurs une certaine somme en remboursement des échéances du crédit affecté et de rejeter sa demande en remboursement du capital emprunté, déduction faite des échéances impayées, alors :
« 5°/ que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de service emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute ; qu'en retentant que de telles fautes (i. e, celle de celle de la banque et celle du fournisseur) en l'espèce ont causé aux emprunteurs un préjudice incontestable qui doit être justement arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution" sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'installation photovoltaïque fonctionnait, et si les travaux exécutés au profit des époux [D] étaient satisfaisants quand il n'était pas allégué de surcroît par les emprunteurs que l'installation photovoltaïque ne fonctionnait pas, mais avait seulement une rentabilité ne permettant pas de financier l'installation, et qu'elle constatait que les emprunteurs avaient utilisé le matériel, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 312-54 du code de la consommation et 1231-1 du code civil ;
6°/ que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de service emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute ; que l'impécuniosité du contractant principal n'est pas en lien de cause à effet avec la faute du prêteur consistant en l'absence de vérification de la conformité du bon de commande aux exigences légales à l'époque où le fournisseur était in bonis ; qu'en décidant néanmoins le contraire en énonçant que la faillite du vendeur survenue dans le cours de la présente procédure contentieuse doit être considérée comme générant un préjudice suffisant pour priver le prêteur de sa créance de restitution" et que du fait de cette déconfiture les emprunteurs se verront incontestablement selon toute vraisemblance dans l'impossibilité de récupérer le prix de vente auprès du vendeur placé en liquidation judiciaire - alors même que cette restitution du prix aurait été la conséquence juridique normale et automatique résultant de l'annulation du contrat de vente", la cour d'appel a violé l'article 1231-1 du code civil ;
7°/ que la rentabilité économique ne constitue une caractéristique essentielle d'une installation photovoltaïque au sens de l'article L. 111-1 du code de la consommation, qu'à la condition que les parties l'aient fait entrer dans le champ contractuel ; qu'en affirmant que les emprunteurs ont également subi un préjudice lié au fait qu'ils ont utilisé un matériel qui n'était pas en parfaite adéquation avec leurs souhaits", sans constater que les souhaits" des emprunteurs, notamment de rentabilité et d'autofinancement de l'installation qu'ils invoquaient, étaient entrés dans le champ contractuel, la banque contestant qu'il en fut ainsi, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 312-54 du code de la consommation et 1231-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
6. En cas de résolution ou d'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, la faute du prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, ne dispense l'emprunteur de restituer le capital emprunté que si celui-ci justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
7. Lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, le consommateur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal.
8. Après avoir annulé la vente en raison des irrégularités qui affectaient le bon de commande, l'arrêt retient, d'une part, qu'en libérant le capital emprunté sans vérifier la régularité du contrat principal, la banque avait manqué à ses obligations, d'autre part, que les emprunteurs avaient subi un préjudice consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès d'un vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente du matériel.
9. En l'état de ces constations et appréciations, dès lors que ce préjudice n'aurait pas été subi sans la faute de la banque, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder aux recherches inopérantes invoquées aux cinquième et septième branches du moyen, a condamné celle-ci à payer aux emprunteurs, à titre de dommages et intérêts, une somme correspondant au capital emprunté.
10. Partiellement inopérant, le moyen n'est pas fondé pour le surplus.




Crim. 9 octobre 2024 n° 23-86.770 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 23-86.770 F-B
N° 01215

ODVS 9 OCTOBRE 2024

CASSATION PAR VOIE DE RETRANCHEMENT

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 9 OCTOBRE 2024


M. [H] [D] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'assises des Bouches-du-Rhône, en date du 10 novembre 2023, qui, pour viol aggravé, en récidive, l'a condamné à vingt-cinq ans de réclusion criminelle, quinze ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation, dix ans d'inéligibilité et à l'interdiction définitive du territoire français.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Diop-Simon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [H] [D], et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Diop-Simon, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par ordonnance du juge d'instruction, en date du 13 mars 2020, M. [H] [D] a été renvoyé devant la cour d'assises pour viol aggravé.
3. Par arrêt du 10 décembre 2021, la cour d'assises l'a déclaré coupable, a constaté l'état de récidive légale, et l'a condamné à vingt-cinq ans de réclusion criminelle, quinze ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation et à l'interdiction définitive du territoire français.
4. L'accusé a relevé appel de cette décision et le ministère public a formé appel incident.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a constaté l'état de récidive légale de M. [D] pour avoir été définitivement condamné par le tribunal de Bacau (Roumanie) le 29 juin 2001 à la peine de vingt-cinq ans d'emprisonnement pour des faits de tentative de viol et meurtre aggravé commis le 18 août 2000 à [Localité 1] (Italie) et l'a notamment condamné à vingt-cinq ans ans de réclusion criminelle, alors « qu'une condamnation pénale prononcée par une juridiction pénale d'un Etat qui, comme en l'espèce, au moment du prononcé, ne faisait pas partie de l'Union européenne, ne saurait constituer le premier terme de la récidive légale ; que la cour d'assises a violé les articles 132-8 et 132-23-1 du code pénal, ensemble la décision-cadre n° 2008/675/JAI du 24 juillet 2008. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 132-8 et 132-23-1 du code pénal :
6. Selon le premier de ces textes, lorsqu'une personne déjà condamnée définitivement pour un crime ou pour un délit puni de dix ans d'emprisonnement par la loi commet un crime, le maximum de la peine de la réclusion criminelle ou de la détention criminelle est la perpétuité si le maximum fixé par la loi pour ce crime est de vingt ou trente ans.
7. Il résulte du second que les condamnations prononcées par les juridictions pénales d'un Etat membre de l'Union européenne sont prises en compte dans les mêmes conditions que les condamnations prononcées par les juridictions pénales françaises et produisent les mêmes effets juridiques.
8. Constitue une condamnation prononcée par la juridiction pénale d'un Etat membre de l'Union européenne, au sens de ce texte, celle décidée par une juridiction d'un Etat qui était membre de l'Union européenne lors de son prononcé.
9. Pour déclarer le demandeur coupable de viol aggravé en récidive, l'arrêt attaqué énonce qu'il a été condamné définitivement par le tribunal de Bacau (Roumanie), le 29 juin 2001, à la peine de vingt-cinq ans d'emprisonnement pour des faits de tentative de viol et meurtre aggravé, commis le 18 août 2000 en Italie.
10. En se déterminant ainsi, alors que, lors du prononcé de la décision précitée, la Roumanie n'était pas encore membre de l'Union européenne, la cour d'assises a méconnu les textes et principes susvisés.
11. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
12. La cassation sera prononcée par voie de retranchement en ce qui concerne les dispositions ayant retenu la circonstance aggravante de récidive à l'encontre de M. [D].
13. La cassation sera prononcée par voie de conséquence sur les peines prononcées à l'encontre de M. [D].
14. Les autres dispositions, dont la déclaration de culpabilité de M. [D], seront donc maintenues.




Soc. 9 octobre 2024 n° 22-19.389

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 989 F-D
Pourvoi n° E 22-19.389



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
M. [F] [H] [E], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 22-19.389 contre l'arrêt rendu le 24 mai 2022 par la cour d'appel de Nîmes (5e chambre sociale PH), dans le litige l'opposant à la société Transport Chabas fraicheur, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], venant aux droits de la société REC Cavaillon, défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Seguy, conseiller, les observations de la SARL Gury & Maitre, avocat de M. [H] [E], après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Seguy, conseiller rapporteur, M. Pietton, conseiller, Mme Grivel, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 24 mai 2022), M. [H] [E] a été engagé en qualité de responsable d'exploitation, statut cadre, le 1er mars 2016, par la société REC Cavaillon, aux droits de laquelle est venue la société Transports Chabas fraîcheur (la société).
2. Licencié pour faute grave par lettre du 22 décembre 2016, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le second moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
4. Le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de condamnation de la société au paiement de diverses sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, des congés payés afférents, ainsi qu'en réparation de ses préjudices matériel et moral et de le débouter de sa demande subsidiaire de condamnation de la société au paiement de sommes au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, alors « que la faute grave est celle qui rend immédiatement impossible la poursuite du contrat de travail ; que la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de sa constatation d'une poursuite de la relation de travail après la décision de licenciement, a violé les articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9 et L. 1235-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1234-1, L. 1235-1 du code du travail :
5. La faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.
6. Pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis, la cour d'appel a retenu que ses erreurs de facturation, répétées pendant plusieurs mois, avaient eu des conséquences négatives sur la gestion comptable de l'entreprise et les relations de l'employeur avec ses clients et, par leur multiplicité, qu'elles avaient constitué une violation par le salarié de ses obligations résultant de son contrat de travail d'une importance telle qu'elle empêchait son maintien dans l'entreprise.
7. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que le salarié, licencié pour faute grave par lettre du 22 décembre 2016, avait poursuivi son travail dans l'entreprise jusqu'au 31 décembre 2016, ce dont il résultait que l'employeur considérait que les faits invoqués n'excluaient pas son maintien dans l'entreprise et n'étaient donc pas constitutifs d'une faute grave, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes sus-visés.
Portée et conséquences de la cassation
8. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt qui déboute le salarié de ses demandes d'indemnités compensatrices de préavis et des congés payés afférents entraîne la cassation des chefs de dispositif qui jugent le licenciement fondé sur une faute grave et déboutent le salarié de ses demandes en réparation de ses préjudices matériel et moral, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire.




Soc. 9 octobre 2024 n° 23-18.343

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC. / ELECT
JL10


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Irrecevabilité (appel possible)

M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 1009 F-D
Pourvoi n° P 23-18.343

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
Le syndicat UNSA commerces et services, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 23-18.343 contre le jugement rendu le 27 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Bobigny (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Tessi chèque Ile-de-France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ au syndicat CGT, dont le siège est [Adresse 4],
3°/ à l'union locale CGT [Localité 5], dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ott, conseiller, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat UNSA commerces et services, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Tessi chèque Ile-de-France, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ott, conseiller rapporteur, Mme Sommé, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Recevabilité du pourvoi examinée d'office
Vu les articles 40 et 605 du code de procédure civile :
1. Après avis donné aux parties conformément à l'article 16 du code de procédure civile, il est fait application de ces textes.
2. Selon le premier de ces textes, le jugement qui statue sur une demande indéterminée est, sauf disposition contraire, susceptible d'appel. Selon le second, le pourvoi en cassation n'est ouvert qu'à l'encontre des jugements rendus en dernier ressort.
3. Le syndicat UNSA commerces et services s'est pourvu en cassation contre un jugement statuant sur une demande en annulation d'un accord collectif.
4. Cette demande présente un caractère indéterminé et le jugement attaqué, inexactement qualifié en dernier ressort, était donc susceptible d'appel.
5. En conséquence, le pourvoi est irrecevable.




Crim. 9 octobre 2024 n° 24-90.012

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° K 24-90.012 F-D
N° 01355



9 OCTOBRE 2024
LR




QPC PRINCIPALE : NON LIEU À RENVOI AU CC











M. BONNAL président,






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 9 OCTOBRE 2024


Le juge de l'application des peines du tribunal judiciaire d'Angers, par ordonnance en date du 19 juillet 2024, reçue le 29 juillet 2024 à la Cour de cassation, a transmis une question prioritaire de constitutionnalité dans la procédure de retrait de réduction de peine suivie à l'égard de M. [I] [P].
Sur le rapport de M. Mallard, conseiller référendaire, et les conclusions de Mme Bellone, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 9 octobre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Mallard, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Le Roch, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :
« Les dispositions du dixième alinéa de l'article 721 du code de procédure pénale portent-elles atteintes aux droits et libertés que la Constitution garantit, spécialement à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789, en ne prévoyant pas, lorsque le condamné est une personne majeure faisant l'objet, conformément à l'article 706-112 du code de procédure pénale, d'une mesure de protection juridique que :
- son curateur, son tuteur ou la personne désignée en application des articles 706-114 ou 706-117 soit avisé de la date de la commission d'application des peines et puisse faire des observations écrites ou être entendu comme témoin par la commission de l'application des peines ;
- le condamné doit être assisté d'un avocat, désigné par lui ou son curateur, son tuteur ou la personne désignée en application des articles 706-114 ou 706-117 ou, à la demande du juge de l'application des peines, par le bâtonnier, conformément à l'article 706-116. »
2. Selon l'article 61-1 de la Constitution, lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'Etat ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé.
3. M. [P], incarcéré pour exécuter une peine d'emprisonnement, a fait l'objet d'une procédure de retrait de réduction de peine. Dans le cadre de cette procédure, il a posé une question prioritaire de constitutionnalité devant le juge de l'application des peines. Celui-ci a décidé de transmettre la question à la Cour de cassation, par ordonnance du 19 juillet 2024.
4. M. [P] étant détenu et l'instance ayant pour objet de déterminer la longueur de la peine restant à accomplir, le juge de l'application des peines n'a pas sursis à statuer, conformément aux dispositions de l'article 23-3 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958. Il n'a pas été fait appel de l'ordonnance rendue par le juge de l'application des peines, le 19 juillet 2024.
5. Pendant l'instruction de la question prioritaire de constitutionnalité par la Cour de cassation, M. [P] a été mis en liberté, le 22 juillet 2024.
6. Il en résulte que, l'instance relative au retrait de la réduction de peine étant éteinte par la mise en liberté de l'intéressé à l'issue de l'exécution de sa peine, la question prioritaire de constitutionnalité posée à l'occasion de cette instance est, elle-même, devenue sans objet.
7. Il n'y a donc pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.




Soc. 9 octobre 2024 n° 23-11.678

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 1003 F-D
Pourvoi n° U 23-11.678



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société Le Théâtre des quartiers d'[Localité 3], société coopérative ouvrière de production, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 23-11.678 contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige l'opposant à M. [P] [R], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Maitral, conseiller référendaire, les observations de la SCP Françoise Fabiani-François Pinatel, avocat de la société Le Théâtre des quartiers d'[Localité 3], de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [R], après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Maitral, conseiller référendaire rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 30 novembre 2022), M. [R], engagé en qualité de chef comptable par la société coopérative ouvrière de production le Théâtre des quartiers d'[Localité 3] (la SCOP) le 25 juin 2012, a démissionné le 5 novembre 2016.
2. Il a saisi la juridiction prud'homale à l'effet d'obtenir que sa démission soit requalifiée en prise d'acte de la rupture du contrat de travail produisant les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et de la rupture de son contrat de travail.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié la somme de 1 529 euros au titre de la part travail pour les exercices 2013 et 2015, alors :
« 1°/ qu'en se bornant à relever d'une part que l'excédent net de gestion s'élève à 6 930,72 euros pour l'année 2013 et 5 674,08 euros pour l'année 2015, d'autre part qu'en application des dispositions statutaires, 40 % de ces excédents auraient dû être distribués aux salariés, pour en déduire qu'il convient, en cet état, de faire droit à la demande de M. [R] à hauteur de la somme de 1 529 euros, sans mieux préciser les bases de calcul qu'elle retenait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que dans ses conclusions d'appel, l'employeur, qui contestait les bases de calcul retenues par M. [R], faisait expressément valoir que conformément aux dispositions des statuts du Théâtre des quartiers d'[Localité 3], 40 % de l'excédent net de gestion total étaient distribués aux ouvriers ou employés et que la somme revenant à chacun d'entre eux devait être calculée au prorata des salaires et appointements perçus par l'intéressé pendant l'exercice écoulé, de sorte qu'en ce qui concerne l'année 2013, seule la somme de 2 272 euros, soit 40 % de l'excédent net de gestion de 6 930,72 euros devait être distribuée à ce titre, et que la part revenant à M. [R] devait être fixée à la somme de 84 euros, au prorata de sa rémunération, égale à 3,03 % de la masse salariale annuelle, et que pour l'année 2015, seule la somme de 2 278 euros, soit 40 % de l'excédent net de gestion de 5 674,08 euros, devait être distribuée à ce titre, et que la part revenant de ce chef à M. [R] devait être fixée à la somme de 83 euros, soit 3,63 % de la masse salariale annuelle ; que, dès lors, en se bornant à relever d'une part que l'excédent net de gestion s'élève à 6 930,72 euros pour l'année 2013 et 5 674,08 euros pour l'année 2015, d'autre part qu'en application des dispositions statutaires, 40 % de ces excédents auraient dû être distribués aux salariés, pour en déduire qu'il convient, en cet état, de faire droit à la demande de M. [R] à hauteur de la somme de 1 529 euros, sans répondre à ce chef péremptoire des conclusions d'appel de [l'employeur], qui contestait les bases de calcul retenues par l'appelant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
5. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
6. Pour condamner l'employeur à verser au salarié une somme de 1 529 euros au titre de la part travail, l'arrêt retient que les excédents nets de gestion se ventilaient à hauteur de 6 930,72 euros pour l'année 2013 et de 5 674,08 euros pour l'année 2015. Il ajoute que, compte tenu des dispositions statutaires, 40 % des excédents auraient dû être distribués aux salariés.
7. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de l'employeur, qui soutenait que la part de la rémunération annuelle du salarié dans la masse salariale représentait 3,03 % pour l'année 2013 et 3,63 % pour l'année 2014 et que sa part travail devait être calculée en appliquant ces taux aux sommes représentant 40 % des excédents nets de gestion, ni précisé les bases de son calcul, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.
Et sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
8. L'employeur fait grief à l'arrêt de requalifier la démission du salarié en prise d'acte de la rupture de son contrat de travail à ses torts exclusifs et de le condamner en conséquence à lui payer diverses sommes au titre des indemnités de rupture et à titre de dommages-intérêts en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, alors « que la prise d'acte, par le salarié, de la rupture de son contrat de travail ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse que lorsque les griefs établis à la charge de l'employeur et ayant motivé cette décision constituent des manquements suffisamment graves pour justifier la rupture du contrat de travail ; qu'il appartient dès lors aux juges du fond de vérifier si les manquements ainsi dénoncés par le salarié sont établis puis, dans l'affirmative, de rechercher s'ils sont de nature à justifier la rupture de la relation de travail ; qu'en se bornant, en l'espèce, à relever que la démission de l'intéressé a été décidée de manière contrainte en raison d'un désaccord de fond entre l'employeur et son chef comptable sur l'application de la loi et des statuts relatifs aux particularités des SCOP, pour en déduire qu'elle doit être requalifiée en prise d'acte intervenue aux torts exclusifs de l'employeur, sans rechercher si le désaccord litigieux était véritablement établi ni, dans l'affirmative, s'il constituait un manquement suffisamment grave, imputable à l'employeur, pour justifier la rupture du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1231-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article L. 1231-1 du code du travail :
9. Il résulte de ce texte que la prise d'acte, par le salarié, de la rupture de son contrat de travail ne produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse que lorsque les griefs établis à la charge de l'employeur constituent des manquements suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
10. Pour condamner l'employeur à payer diverses sommes au titre des indemnités de rupture et à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que, si la volonté du salarié de quitter la SCOP était claire, cette démission a été décidée de manière contrainte en raison d'un désaccord de fond entre l'employeur et son chef comptable sur l'application de la loi et des statuts relatifs aux particularités des SCOP et en déduit qu'il convient de requalifier la démission en prise d'acte et de juger que la prise d'acte est intervenue aux torts exclusifs de l'employeur.
11. En se déterminant ainsi, sans rechercher si les faits imputés à l'employeur qu'elle considérait comme établis, constituaient un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 23-19.461

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 551 F-D
Pourvoi n° D 23-19.461






R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° D 23-19.461 contre l'arrêt rendu le 4 mai 2023 par la cour d'appel de Douai (chambre 8, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [N] [D],
2°/ à Mme [J] [G],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
3°/ à la société The First Energie (TFE), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, six moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [D] et de Mme [G], et après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 4 mai 2023), le 27 février 2019, par contrat conclu hors établissement, M. [D] a commandé auprès de la société The First Energy (le vendeur) la fourniture et l'installation d'une centrale photovoltaïque, d'une unité centrale de gestion et d'un kit batterie, dont le prix a été financé par un crédit souscrit le même jour, avec Mme [G], auprès de la société Cofidis (la banque).
2. Invoquant des irrégularités du bon de commande, M. [D] et Mme [G] (les emprunteurs) ont assigné le vendeur et la banque en annulation du contrat principal et du crédit affecté.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
4. La banque fait grief à l'arrêt de déclarer que la banque ne pourra se prévaloir des effets de l'annulation à l'égard des emprunteurs et de la condamner à payer à ceux-ci la somme de 42 813,72 euros, alors « que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de service emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute, de sorte qu'en se déterminant pour la raison que la privation de la banque de sa créance de restitution s'analyse objectivement comme la sanction tant des fautes commises par la banque elle-même que de la faute commise par le professionnel dans le cadre du contrat principal", la cour d'appel a violé les articles L. 312-48 et L. 312-55 du code de la consommation et l'article 1231-1, du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 312-55 du code de la consommation et 1231-1 du code civil :
5. En cas de résolution ou d'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, la faute du prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, ne dispense l'emprunteur de restituer le capital emprunté que si celui-ci justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
6. Pour condamner la banque à restituer aux emprunteurs une certaine somme, versée en exécution du crédit affecté, l'arrêt retient que la faute de la banque, qui n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal avant de verser les fonds empruntés, a incontestablement occasionné un préjudice dont l'exacte étendue doit être appréciée souverainement par le juge du fond et que ce préjudice ne saurait être réduit à la seule perte de chance de ne pas contracter.
7. En statuant ainsi, sans caractériser le préjudice en lien causal avec la faute de la banque lors de la délivrance des fonds, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
8. La banque fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande subsidiaire de condamnation du vendeur à lui payer la somme de 34 906,38 euros au taux légal à compter de l'arrêt, alors « que, dans ses conclusions d'appel, la société Cofidis faisait valoir qu'elle versait aux débats la convention de crédit vendeur conclue avec la société venderesse et sollicitait son application pour demander la condamnation de celle-ci au remboursement des fonds et à l'allocation d'une somme équivalente aux intérêts qu'elle aurait perçus si le contrat de crédit s'était poursuivi jusqu'à son terme ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
9. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
10. Pour rejeter le recours formé par la banque à l'encontre du vendeur, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que la demande est sans objet compte tenu de la solution donnée au litige.
11. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la banque qui invoquait, en appel, l'exécution d'une convention, conclue avec le vendeur, stipulant que celui-ci était responsable de la bonne exécution des obligations mises à sa charge lors de l'accord de crédit, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 23-12.452

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 548 F-D
Pourvoi n° K 23-12.452



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° K 23-12.452 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre 8, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [D] [V], domicilié [Adresse 1],
2°/ à Mme [Z] [N], domiciliée [Adresse 2], prise en qualité de liquidateur de la société Solution éco énergie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],
3°/ à la société Solution éco énergie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, de Me Bardoul, avocat de M. [V], après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société Cofidis du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme [N], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Solution éco énergie.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 24 novembre 2022), le 17 janvier 2017, par contrat conclu hors établissement, M. [V] (l'emprunteur) a commandé auprès de la société Solution éco énergie (le vendeur) la fourniture et l'installation de panneaux photovoltaïques, d'un onduleur et d'un compteur, dont le prix a été financé par un crédit souscrit le même jour auprès de la société Cofidis (la banque).
3. Invoquant des irrégularités du bon de commande, l'emprunteur a assigné le vendeur et la banque en annulation du contrat principal et du crédit affecté. Devant la cour d'appel, Mme [N], prise en sa qualité de liquidateur judiciaire du vendeur, a été appelée en cause.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le moyen, pris en ses troisième, quatrième et cinquième branches
Enoncé du moyen
5. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à restituer à l'emprunteur l'ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit et de rejeter sa demande en remboursement du capital emprunté avec intérêts au taux légal, déduction à faire des échéances payées, alors :
« 3°/ que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de service emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute, de sorte qu'en se déterminant, par motifs propres, pour la raison que la privation de la banque de sa créance de restitution s'analyse objectivement comme la sanction tant des fautes commises par la banque elle-même que de la faute commise par le professionnel dans le cadre du contrat principal" et, par motifs à les supposer adoptés, que la privation de la banque de sa créance de restitution s'analyse comme une sanction de la faute commise par le professionnel ?" ; que l'ordre public de protection du consommateur s'impose en la matière indépendamment de toute notion d'indemnisation du consommateur et par conséquent de toute démonstration d'un quelconque préjudice de celui-ci", la cour d'appel a violé les articles L. 312-48 et L. 312-55 du code de la consommation et l'article 1231-1, du code civil ;
4°/ que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de service emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute ; qu'en retentant que ces fautes [i.e de Cofidis] ont incontestablement occasionné un préjudice à l'emprunteur? qui doit être justement et exactement arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution", sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'installation photovoltaïque fonctionnait, de sorte que l'emprunteur n'établissait pas avoir subi de préjudice consécutif à la faute de la banque résultant de l'omission de vérifier la conformité du bon de commande litigieux aux dispositions d'ordre public du code de la consommation lorsqu'elle avait débloqué les fonds, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 312-54 du code de la consommation et 1231-1 du code civil ;
5°/ qu'en énonçant que l'emprunteur a subi un préjudice lié au fait qu'il a dû, faute d'informations préalables suffisantes, utiliser un matériel qui pouvait n'être pas en parfaite conformité avec ses souhaits", sans constater que les souhaits" de l'emprunteur qu'elle ne précisait pas étaient entrés dans le champ contractuel et après avoir pourtant retenu qu'il avait dû utiliser le matériel, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 312-54 du code de la consommation et 1147, devenu 1231-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
6. En cas de résolution ou d'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, la faute du prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, ne dispense l'emprunteur de restituer le capital emprunté que si celui-ci justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
7. Lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, l'emprunteur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal.
8. Après avoir annulé la vente en raison des irrégularités qui affectaient le bon de commande et constaté que le vendeur avait été placé en liquidation judiciaire, l'arrêt retient qu'en libérant le capital emprunté sans vérifier la régularité du contrat principal, la banque avait manqué à ses obligations et que ce manquement avait causé à l'emprunteur un préjudice égal au montant de la créance en restitution de la banque.
9. En l'état de ces constatations et appréciations, desquelles il résultait que l'emprunteur, privé de la possibilité d'obtenir du vendeur insolvable la restitution du prix de vente d'un matériel dont il n'était plus propriétaire, avait subi un préjudice qui ne l'aurait pas été sans la faute de la banque, c'est à bon droit que la cour d'appel, sans être tenue de procéder aux recherches inopérantes invoquées aux quatrième et cinquième branches du moyen, a condamné celle-ci à payer à l'emprunteur, à titre de dommages et intérêts, une somme correspondant au capital emprunté.
10. Partiellement inopérant, le moyen n'est pas fondé pour le surplus.




Com. 9 octobre 2024 n° 24-10.054

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
SB


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Rectification d'erreur matérielle

M. VIGNEAU, président


Arrêt n° 606 FS-D
Requête n° Z 24-10.054



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 9 OCTOBRE 2024

La chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation se saisit d'office, conformément à l'article 462 du code de procédure civile, en vue de la rectification des erreurs matérielles affectant l'arrêt n° 540 FS-B prononcé le10 juillet 2024, sur le pourvoi n° Z 24-10.054, dans une affaire opposant :
1°/ M. [Y] [R], domicilié [Adresse 2],
à
2°/ l'Autorité des marchés financiers (AMF), dont le siège est [Adresse 1],
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller, où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Ducloz, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, Mmes Graff-Daudret, Daubigney, M. Alt, Mme de Lacaussade, M. Thomas, M. Chazalette, Mme Gouarin, conseillers, Mmes Vigneras, Lefeuvre, Tostain, M. Maigret, Mme Buquant, conseillers référendaires, et Mme Bendjebbour, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Vu les avis donnés aux parties.
Vu l'article 462 du code de procédure civile :
1. Des erreurs matérielles ont été commises dans la rédaction de l'arrêt n° 540 FS-B, pourvoi n° Z 24-10.054, en ce qu'il n'est pas mentionné dans l'arrêt d'une part, le nom et l'avis écrit de M. Bonthoux, d'autre part, l'avis oral de M. Lecaroz, avocats généraux.
2. Il y a lieu de réparer ces erreurs.




Soc. 9 octobre 2024 n° 23-19.627

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC. / ELECT
ZB1

COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 1025 F-D
Pourvoi n° J 23-19.627

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
Le syndicat CGT Force Ouvrière des personnels de l'enseignement privé [5], dont le siège est [Adresse 6], a formé le pourvoi n° J 23-19.627 contre le jugement rendu le 31 juillet 2023 par le tribunal judiciaire de Lyon (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :
1°/ au syndicat SNEC-CFTC, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ au syndicat CFDT formation et enseignement privé du Ain-Rhône, dont le siège est [Adresse 3],
3°/ à l'association organisme de gestion de l'enseignement catholique [5] (l'OGEC), dont le siège est [Adresse 4],
4°/ au Syndicat professionnel de l'enseignement libre catholique (SPELC), dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Ollivier, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat du syndicat CGT Force Ouvrière des personnels de l'enseignement privé [5], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de l'association OGEC [5], de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du syndicat SNEC-CFTC et du syndicat CFDT formation et enseignement privé du Ain-Rhône, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Ollivier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Bouvier, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Lyon, 31 juillet 2023), l'organisme de gestion de l'enseignement catholique [5] (l'OGEC) gère un établissement d'enseignement privé composé notamment d'enseignants de droit privé et de droit public.
2. Le 23 mars 2023, l'OGEC, le syndicat SNEC-CFTC et le syndicat professionnel de l'enseignement libre catholique (le syndicat SPELC) ont signé un protocole d'accord préélectoral. Selon l'article 9 de ce protocole, pour le deuxième collège, quatre urnes sont prévues pour les titulaires de droit privé et les titulaires de droit public, suppléants de droit privé et suppléants de droit public.
3. Le premier tour des élections a eu lieu le 2 mai 2023.
4. Par requête reçue au greffe le 2 mai 2023, le syndicat CGT Force Ouvrière des personnels de l'enseignement privé [5] (le syndicat CGT Force Ouvrière) a saisi le tribunal judiciaire aux fins d'annulation de l'article 9 du protocole et d'annulation de l'élection du deuxième collège du comité social et économique.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le syndicat CGT Force Ouvrière fait grief au jugement de le débouter de ses demandes d'annulation, d'une part, de l'article 9 du protocole d'accord préélectoral du 23 mars 2023 signé entre l'OGEC [5] et les syndicat SNEC-CFTC et SPELC en ce qu'il prévoit, pour le deuxième collège : « Quatre urnes sont prévues pour les titulaires de droit privé et les titulaires de droit public, suppléants de droit privé et suppléants de droit public » et, d'autre part, de l'élection du deuxième collège des membres du comité social et économique de l'OGEC [5], alors « qu'aux termes de l'article 9 de la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022, par dérogation aux articles L. 2121-1 et L. 2122-5 du code du travail, jusqu'à la deuxième mesure de l'audience prévue au 3° du même article L. 2122-5 suivant la publication de la présente loi, le ministre chargé du travail arrête la liste et le poids des organisations syndicales reconnues représentatives dans les branches regroupant des établissements mentionnés aux articles L. 442-5 du code de l'éducation et L. 813-8 du code rural et de la pêche maritime sur le fondement de l'ensemble des suffrages exprimés au premier tour des élections des titulaires aux comités sociaux et économiques de ces établissements et au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés lors de la période prise en compte pour la dernière mesure de l'audience prévue au 3° de l'article L. 2122-5 du code du travail" ; qu'il ressort de cette disposition que, jusqu'en 2029, la liste et le poids des organisations syndicales reconnues représentatives dans la branche de l'enseignement privé sont arrêtés au vu de l'ensemble des suffrages exprimés au premier tour des élections des titulaires aux comités sociaux et économique, sans qu'il y ait lieu, par conséquent, de distinguer les suffrages des salariés de droit privé et ceux des agents de droit public ; qu'en considérant, dès lors, que l'article 9 du protocole d'accord préélectoral conclu en vue des élections des membres du comité social et économique de l'OGEC [5] prévoyant l'existence d'urnes séparées pour les enseignants de droit privé et ceux de droit public était conforme à la réglementation et la jurisprudence en vigueur", le tribunal judiciaire a violé l'article 9 de la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022 par refus d'application. »
Réponse de la Cour
6. Aux termes de l'article L. 2122-5 du code du travail, dans les branches professionnelles, sont représentatives les organisations syndicales qui : 1° Satisfont aux critères de l'article L. 2121-1 ; 2° Disposent d'une implantation territoriale équilibrée au sein de la branche ; 3° Ont recueilli au moins 8 % des suffrages exprimés résultant de l'addition au niveau de la branche, d'une part, des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires aux comités sociaux et économiques, quel que soit le nombre de votants, et, d'autre part, des suffrages exprimés au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés dans les conditions prévues aux articles L. 2122-10-1 et suivants. La mesure de l'audience s'effectue tous les quatre ans.
7. Selon l'article L. 442-5 du code de l'éducation, les établissements d'enseignement privés du premier et du second degré peuvent demander à passer avec l'Etat un contrat d'association à l'enseignement public, s'ils répondent à un besoin scolaire reconnu qui doit être apprécié en fonction des principes énoncés aux articles L. 141-2, L. 151-1 et L. 442-1. La conclusion du contrat est subordonnée à la vérification de la capacité de l'établissement à dispenser un enseignement conforme aux programmes de l'enseignement public. Le contrat d'association peut porter sur une partie ou sur la totalité des classes de l'établissement. Dans les classes faisant l'objet du contrat, l'enseignement est dispensé selon les règles et programmes de l'enseignement public. Il est confié, en accord avec la direction de l'établissement, soit à des maîtres de l'enseignement public, soit à des maîtres liés à l'Etat par contrat. Ces derniers, en leur qualité d'agent public, ne sont pas, au titre des fonctions pour lesquelles ils sont employés et rémunérés par l'Etat, liés par un contrat de travail à l'établissement au sein duquel l'enseignement leur est confié, dans le cadre de l'organisation arrêtée par le chef d'établissement, dans le respect du caractère propre de l'établissement et de la liberté de conscience des maîtres. Nonobstant l'absence de contrat de travail avec l'établissement, les personnels enseignants mentionnés à l'alinéa précédent sont, pour l'application des articles L. 2141-11, L. 2312-8, L. 2322-6, L. 4611-1 à L. 4611-4 et L. 4611-6 du code du travail, pris en compte dans le calcul des effectifs de l'établissement, tel que prévu à l'article L. 1111-2 du même code. Ils sont électeurs et éligibles pour les élections des délégués du personnel et les élections au comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et au comité d'entreprise. Ils bénéficient de ces institutions dans les conditions prévues par le code du travail. Les rémunérations versées par l'Etat à ces personnels sont prises en compte pour le calcul de la masse salariale brute, tel que prévu aux articles L. 2325-12 et L. 2325-43 du même code, et la détermination du rapport entre la contribution aux institutions sociales et le montant global des salaires, mentionné à l'article L. 2323-86 du même code.
8. Aux termes de l'article 9 de la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022 portant mesures d'urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi, par dérogation aux articles L. 2121-1 et L. 2122-5 du code du travail, jusqu'à la deuxième mesure de l'audience prévue au 3° du même article L. 2122-5 suivant la publication de la présente loi, le ministre chargé du travail arrête la liste et le poids des organisations syndicales reconnues représentatives dans les branches regroupant des établissements mentionnés aux articles L. 442-5 du code de l'éducation et L. 813-8 du code rural et de la pêche maritime sur le fondement de l'ensemble des suffrages exprimés au premier tour des élections des titulaires aux comités sociaux et économiques de ces établissements et au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés lors de la période prise en compte pour la dernière mesure de l'audience prévue au 3° de l'article L. 2122-5 du code du travail.
9. Par une décision du 19 septembre 2024, le Conseil constitutionnel a décidé que l'article 9 de cette loi est conforme à la Constitution (Cons. const., 19 septembre 2024, décision n° 2024-1103 QPC).
10. Selon la jurisprudence du Conseil d'Etat, si les personnels enseignants mentionnés à l'article L. 442-5 du code de l'éducation, qui sont des agents publics, bénéficient de la qualité d'électeur pour les élections des institutions représentatives du personnel dans les établissements de l'enseignement privé non lucratif couverts par la convention collective nationale de l'enseignement privé non lucratif et sont éligibles, leurs votes ne peuvent être pris en compte pour la détermination de la représentativité des organisations syndicales au niveau de la branche professionnelle de l'enseignement privé non lucratif, laquelle est couverte par une convention collective qui ne régit que les relations entre les employeurs relevant de son champ et leurs salariés de droit privé (Conseil d'Etat, 22 novembre 2021, décision n° 431431).
11. Le tribunal, qui a constaté que l'article 9 du protocole d'accord préélectoral prévoyait, pour le deuxième collège, l'existence d'urnes séparées pour les salariés de droit privé et les agents publics, en a exactement déduit que cet article n'était pas contraire aux dispositions légales en vigueur, dès lors qu'il n'était pas de nature à empêcher l'application transitoire des dispositions dérogatoires de l'article 9 de la loi n° 2022-1598 du 21 décembre 2022.
12. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 23-14.368

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 363 FS-D
Pourvoi n° T 23-14.368



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
L'Etat de Libye, dont le siège est [Adresse 2] (Libye), représenté par son directeur du département des affaires contentieuses du conseil judiciaire suprême, a formé le pourvoi n° T 23-14.368 contre l'arrêt rendu le 14 mars 2023 par la cour d'appel de Paris (chambre commerciale internationale, pôle 5, chambre 16), dans le litige l'opposant à la société Etrak Insaat Taahhüt Ve Ticaret Anonim Sirketi, société de droit Turc, dont le siège est [Adresse 1] (Turquie), défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Ancel, conseiller, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de l'Etat de Libye, et l'avis de M. Poirret, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Ancel, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, MM. Bruyère, Ancel, Mmes Peyregne-Wable, Tréard, Corneloup, conseillers, Mmes Kloda, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Poirret, premier avocat général, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 mars 2023), le 25 novembre 2009, la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste (l'Etat de Libye) et la République turque ont conclu un traité bilatéral d'encouragement et de protection réciproque des investissements (TBI), qui est entré en vigueur le 22 avril 2011.
2. Le 29 août 2016, la société turque Etrak Insaat Taahhüt Ve Ticaret Anonim Sirketi (la société Etrak) a engagé, sur le fondement de ce traité, une action indemnitaire devant un tribunal arbitral en raison de l'inexécution par l'Etat de Libye d'un accord transactionnel conclu le 9 décembre 2013 pour l'exécution d'un jugement du 29 octobre 2012, ultérieurement annulé en appel le 1er février 2018, par lequel le tribunal de première instance d'El Beida avait condamné l'Etat de Libye à lui payer diverses sommes dans le cadre d'un litige relatif au règlement de factures émises en exécution de contrats de travaux publics conclus avec des entités libyennes dans les années 1980.
3. Par une sentence du 22 juillet 2019, rendue à Genève sous l'égide de la chambre de commerce internationale (CCI), le tribunal arbitral s'est reconnu compétent à l'égard de toutes les demandes de la société Etrak, a dit que l'Etat de Libye avait violé l'article 2(2) du TBI en n'accordant pas un traitement juste et équitable à l'investissement de la société Etrak et condamné l'Etat de Libye au paiement de diverses sommes.
4. L'État de Libye a interjeté appel de l'ordonnance qui avait revêtu la sentence arbitrale de l'exequatur et il a sollicité devant la cour d'appel l'exequatur d'un jugement rendu le 2 mai 2019 par le tribunal de Tripoli-Nord annulant l'accord transactionnel du 9 décembre 2013.
Sur le premier moyen, pris en sa cinquième branche
Enoncé du moyen
5. L'Etat de Libye fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance d'exequatur rendue le 21 janvier 2020 déclarant exécutoire la sentence arbitrale CCI n° 22236/ZF/AYZ rendue à Genève le 22 juillet 2019, alors « qu'aux termes de l'article 10 du traité bilatéral d'investissement conclu entre la Turquie et la Libye le 25 novembre 2009, l'offre d'arbitrage prévue par ce traité ne concerne que les différends nés après son entrée en vigueur ; qu'un différend s'entend, au sens du droit international, d'un désaccord sur un point de droit ou de fait, une contradiction, une opposition de thèses juridiques ou d'intérêts entre deux personnes ; que ses contours s'apprécient en ayant égard aux intérêts que les parties cherchent in fine à défendre indépendamment des prétentions formellement élevées pour leur défense ; qu'en retenant, pour fonder la compétence ratione temporis du tribunal arbitral, l'autonomie du différend dont celui-ci avait été saisi par rapport au litige ayant opposé les parties depuis les années 1990, relatif au paiement du prix de travaux de construction, et ayant donné lieu au jugement du 29 octobre 2012, lorsqu'il ressortait des constatations de l'arrêt que les demandes dont était saisi le tribunal arbitral portaient sur la validité et l'exécution du protocole dont l'objet est « d'aménager les conditions d'exécution [de cette] décision de justice ayant condamné l'État libyen au règlement de sommes d'argent correspondant à des impayés de factures relatives à des travaux de construction réalisés en Libye avant 1991 ainsi qu'à des dommages et intérêts » (§ 48), la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1520, 1°, du code de procédure civile ensemble l'article 1525 de ce code. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 1520, 1°, et 1525 du code de procédure civile :
6. Il résulte de ces textes que le juge de l'annulation contrôle la décision du tribunal arbitral sur sa compétence, qu'il se soit déclaré compétent ou incompétent, en recherchant tous les éléments de droit ou de fait permettant d'apprécier la portée de la convention d'arbitrage, ce contrôle étant exclusif de toute révision au fond de la sentence.
7. En matière de protection des investissements transnationaux, le consentement de l'Etat à l'arbitrage procède de l'offre permanente d'arbitrage formulée dans un traité, adressée à une catégorie d'investisseurs que ce traité délimite pour le règlement des différends touchant aux investissements qu'il définit.
8. Pour juger que le tribunal arbitral était compétent, l'arrêt, après avoir relevé que le TBI était entré en vigueur le 22 avril 2011 et que son article 10 stipulait qu'il ne s'appliquait pas aux différends nés avant cette date, retient que le litige porte sur l'inexécution de l'accord transactionnel conclu le 9 décembre 2013, lequel d'une part, est source d'une créance financière au sens de l'article 1, 2, b) du TBI et, d'autre part, ne se borne pas à prévoir l'exécution pure et simple d'une décision de justice antérieure mais comporte des concessions réciproques et inclut des dommages et intérêts, de sorte que même si les créances ainsi consacrées se rattachent à des investissements antérieurs effectués sur le territoire libyen, la non-exécution de cet accord, comme la contestation de sa validité par l'État de Libye, sont à l'origine d'un différend nouveau.
9. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations, d'une part, que, selon l'article 1, 2, b) du TBI, les créances financières, telles que celle résultant de l'accord transactionnel du 9 décembre 2013, ne relevaient de la qualification d'investissement qu'en tant qu'elles étaient elles-mêmes liées à un investissement, lequel était en l'espèce constitué par les travaux exécutés dans les années 1980, d'autre part, que selon l'article 8.4, seuls les différends découlant directement d'activités d'investissement relevaient de la protection procédurale, de sorte que si le différend résultant de l'inexécution de la transaction avait été autonome par rapport au différend résultant du refus initial de l'Etat de Libye de payer les travaux pour entrer dans le champ d'application temporel du traité, il n'aurait pas été compris dans le champ d'application matériel du TBI comme ne découlant pas directement de l'investissement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
10. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt confirmant l'ordonnance d'exequatur rendue le 21 janvier 2020 entraîne la cassation du chef de dispositif rejetant la demande d'exequatur du jugement du tribunal de première instance de Tripoli-Nord du 2 mai 2019, qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 23-11.080

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 547 F-D
Pourvoi n° U 23-11.080


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° U 23-11.080 contre l'arrêt rendu le 24 novembre 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre 8, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [V] [G],
2°/ à Mme [L] [B],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
3°/ à la société Js Services, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], exerçant sous le nom commercial Green Planet,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [G] et de Mme [B], et après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 24 novembre 2022), le 7 juin 2016, par contrat conclu hors établissement, M. [G] et Mme [B] (les emprunteurs) ont commandé auprès de la société Js Services (le vendeur) la fourniture et l'installation de panneaux photovoltaïques, dont le prix a été financé par un crédit souscrit le même jour auprès de la société Cofidis (la banque).
2. Invoquant des irrégularités du bon de commande, les emprunteurs ont assigné le vendeur et la banque en annulation du contrat principal et du crédit affecté.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, et les deuxième et troisième moyens
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui, pour les premiers, ne sont manifestement pas de nature à entraî
Mais sur le premier moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
4. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à restituer aux emprunteurs une certaine somme, versée en exécution du crédit affecté, alors « que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de service emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute, de sorte qu'en se déterminant, par motifs propres, pour la raison que la privation de la banque de sa créance de restitution s'analyse objectivement comme la sanction tant des fautes commises par la banque elle-même que de la faute commise par le professionnel dans le cadre du contrat principal" et, par motifs à les supposer adoptés, que la privation de la banque de sa créance de restitution s'analyse comme une sanction de la faute commise par le professionnel? ; que l'ordre public de protection du consommateur s'impose en la matière indépendamment de toute notion d'indemnisation du consommateur et par conséquent de toute démonstration d'un quelconque préjudice de celui-ci", la cour d'appel a violé les articles L. 312-48 et L. 312-55 du code de la consommation et l'article 1231-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 312-55 du code de la consommation et 1231-1 du code civil :
5. En cas de résolution ou d'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, la faute du prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, ne dispense l'emprunteur de restituer le capital emprunté que si celui-ci justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
6. Pour condamner la banque à restituer aux emprunteurs une certaine somme, versée en exécution du crédit affecté, l'arrêt retient que la faute de la banque, qui n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal avant de verser les fonds empruntés, a incontestablement occasionné un préjudice dont l'exacte étendue doit être appréciée souverainement par le juge du fond et que ce préjudice ne saurait être réduit à la seule perte de chance de ne pas contracter.
7. En statuant ainsi, sans caractériser le préjudice en lien causal avec la faute de la banque lors de la délivrance des fonds, la cour d'appel a violé les textes susvisés.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 22-16.430

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Rejet

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 133 F-D
Pourvoi n° P 22-16.430



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° P 22-16.430 contre l'arrêt rendu le 17 mars 2022 par la cour d'appel de Douai (chambre 8, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [G] [N], domicilié [Adresse 1],
2°/ à la société Mandataires judiciaires associés (MJA), société d'exercice libéral à forme anonyme, dont le siège est [Adresse 2], représentée par M. [S] pris en qualité de liquidateur de la société Vivons Energy,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, de Me Balat, avocat de M. [N], après débats en l'audience publique du 23 janvier 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 17 mars 2022), le 9 mai 2017 M. [N] (l'emprunteur) a conclu hors établissement avec la société Vivons Energy (le vendeur) un contrat d'installation d'une centrale de production d'électricité photovoltaïque et d'un chauffe-eau thermodynamique, financé par un crédit souscrit auprès de la société Cofidis (la banque).
2. Un jugement du 13 décembre 2017 a prononcé la liquidation judiciaire du vendeur. M. [S] a été désigné liquidateur.
3. Invoquant diverses irrégularités du bon de commande, l'emprunteur a assigné le vendeur, représenté par son liquidateur, et la banque en annulation des contrats de vente et de crédit.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
5. La banque fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité du contrat de vente, de constater la nullité du contrat de crédit affecté et de la condamner à restituer à l'emprunteur l'ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté, alors « qu'en toute hypothèse, l'exécution volontaire du contrat en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation ; qu'en écartant la confirmation de la nullité relative encourue pour la raison que la connaissance de ce vice ne peut résulter de ce seul rappel dans les conditions générales de vente des dispositions précitées du code de la consommation" et qu'en conséquence l'acceptation de la livraison et l'accomplissement des démarches liées à l'installation n'avaient pu avoir pour effet de couvrir les irrégularités affectant le bon de commande, quand la reproduction lisible des dispositions du code de la consommation permet au contractant de prendre connaissance du vice résultant de leur inobservation et que la poursuite de l'exécution et l'acceptation de la livraison et la mise en service de l'installation vaut confirmation, la cour d'appel a violé l'article 1182, alinéa 3, du code civil. »
Réponse de la Cour
6. Selon l'article 1182, alinéa 3, du code civil, l'exécution volontaire du contrat, en connaissance de la cause de nullité, vaut confirmation.
7. Il résulte de ce texte que la reproduction, même lisible, des dispositions du code de la consommation prescrivant le formalisme applicable à un contrat conclu hors établissement ne permet pas au consommateur d'avoir une connaissance effective du vice résultant de l'inobservation de ces dispositions et de caractériser la confirmation tacite du contrat, en l'absence de circonstances, qu'il appartient au juge de relever, permettant de justifier d'une telle connaissance et pouvant résulter, en particulier, de l'envoi par le professionnel d'une demande de confirmation, conformément aux dispositions de l'article 1183 du code civil.
8. Ayant relevé, par motifs propres, que le bon de commande ne comportait aucune indication sur le calendrier d'exécution du contrat et sur l'exacte durée des travaux et, par motifs adoptés, que les conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande reprenaient les textes relatifs au démarchage à domicile, et retenu que la connaissance de ce vice ne pouvait résulter de ce seul rappel dans les conditions générales et que l'acceptation de la livraison et l'accomplissement des démarches liées à l'installation n'avaient pas eu pour effet de couvrir ces irrégularités, la cour d'appel a pu en déduire que la confirmation de l'acte entaché de nullité n'était pas caractérisée.
9. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
10. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à restituer à l'emprunteur l'ensemble des sommes versées à quelque titre que ce soit en exécution du crédit affecté et de rejeter sa demande subsidiaire de condamnation de celui-ci à lui restituer le capital emprunté, déduction à faire des échéances payées, alors :
« 1°/ que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de service emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute ; qu'en retenant, par motifs adoptés que la privation de la banque de sa créance de restitution s'analyse comme une sanction de la faute commise par le professionnel", que l'ordre public de protection du consommateur s'impose en la matière indépendamment de toute notion d'indemnisation du consommateur et par conséquent de toute démonstration d'un quelconque préjudice de celui-ci", que l'indemnisation du consommateur n'est pas la finalité de ce dispositif" et qu'en conséquence, la banque sera privée de sa créance de restitution sans qu'il soit besoin pour l'emprunteur de rapporter la preuve d'un quelconque préjudice résultant de la faute de la banque", la cour d'appel a violé les articles L.312-48 et L. 312-55 du code de la consommation et 1231-1 du code civil ;
2°/ que, dans ses conclusions d'appel, la société Cofidis faisait valoir que si la juridiction saisie jugeait tout de même que la banque avait commis une quelconque faute, il conviendrait alors de déterminer si les emprunteurs subissent véritablement un préjudice de nature à priver la banque de son droit à restitution du capital", qu' il suffira à la cour de se reporter au bordereau de pièces communiquées par l'emprunteur pour constater qu'il n'apporte la preuve d'aucun préjudice? la banque demande à la cour de constater qu'il n'y a aucune preuve d'un quelconque dysfonctionnement et que même à imaginer que les panneaux ne soient pas raccordés, cela ne serait pas de nature à entraîner la privation de la créance de restitution du capital de la concluante" ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
11. En cas de résolution ou d'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, la faute du prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, ne dispense l'emprunteur de restituer le capital emprunté que si celui-ci justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
12. Lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, l'emprunteur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal.
13. La cour d'appel a retenu que la banque avait commis une faute en versant au vendeur l'intégralité du capital emprunté alors que le bon de commande était irrégulier et relevé le vendeur avait été placé en liquidation judiciaire.
14. Il en résulte que l'emprunteur, qui ne peut plus récupérer auprès du vendeur insolvable le prix de vente en dépit de l'annulation du contrat, a subi un préjudice en lien causal avec la faute de la banque, d'un montant égal au montant du capital emprunté.
15. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt se trouve légalement justifié en ce qu'il rejette la demande formée par la banque en restitution du capital emprunté et en ce qu'il la condamne à restituer à l'emprunteur l'ensemble des sommes versées en exécution du contrat de crédit.




Soc. 9 octobre 2024 n° 22-21.048

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
JL10


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 1020 F-D
Pourvoi n° G 22-21.048





R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société La Poste, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° G 22-21.048 contre l'arrêt rendu le 7 juillet 2022 par la cour d'appel de Bordeaux (chambre sociale, section B), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [Z] [X], domicilié [Adresse 1],
2°/ au syndicat Sud PTT, dont le siège est [Adresse 3],
3°/ au Pôle emploi [Localité 5], dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bouvier, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société La Poste, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [X] et du syndicat Sud PTT, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bouvier, conseiller rapporteur, Mme Ollivier, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article L. 431-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société La Poste du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le Pôle emploi [Localité 5].
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 7 juillet 2022), M. [X] a été engagé par la société La Poste (La Poste) en qualité d'agent de traitement colis selon contrat de travail à durée indéterminée du 1er août 2002.
3. Le salarié, adhérent du syndicat Sud PTT Gironde, était titulaire de divers mandats de représentation du personnel.
4. La Poste lui a notifié le 7 mars 2018 un avertissement pour avoir pris, le 8 janvier 2018, la parole en méconnaissance des règles relatives à l'exercice du droit syndical. Le salarié a contesté cet avertissement.
5. Le 6 avril 2018, il a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'annulation de la sanction et d'indemnisation du préjudice subi. Le syndicat Sud PTT Gironde s'est joint à cette action.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. La Poste fait grief à l'arrêt d'annuler l'avertissement délivré au salarié le 7 mars 2018 et de la condamner à lui verser la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts et au syndicat Sud PTT Gironde la somme de 1 000 euros, alors :
« 1°/ que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que M. [X] a été sanctionné pour violation des règles issues des articles 4 à 7 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 gouvernant la tenue des réunions syndicales, La Poste lui reprochant une prise de parole de nature syndicale non autorisée", et ajoutant que les prises de parole ne peuvent se dérouler que dans le cadre d'une réunion mensuelle d'information ou d'une réunion statutaire et d'information en dehors des heures de service, et à condition d'en informer en amont le chef d'établissement afin que l'organisation adéquate soit mise en place" ; que pour annuler cette sanction, la cour d'appel, a énoncé que l'attestation du responsable d'établissement, produite par La Poste, selon laquelle Lors de la soirée du 8 janvier 2018, M. [X] s'est présenté dans mon bureau vers 21h50 pour m'informer qu'il allait faire une prise de parole. Je ne lui ai pas donné l'autorisation. A la fin de cette assemblée générale, M. [X] a demandé aux agents volontaires à le suivre en grève [...]", est impropre à justifier l'affirmation de La Poste selon laquelle la « prise de parole » de M. [X], énoncée comme telle dans la lettre d'avertissement du 7 mars 2018, devrait s'analyser comme une réunion au sens des articles 4 à 7 du décret du 28 mai 1982" ; qu'en se déterminant de la sorte, quand il lui appartenait de qualifier elle-même la prise de parole" du [CS3] représentant syndical du 8 janvier 2018 au regard des règles de droit gouvernant l'exercice du droit syndical à La Poste, conformément à l'article 31 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée et aux articles 4 à 7 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982, et notamment la tenue des réunions syndicales, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;
2°/ que s'analyse comme une réunion syndicale au sens des articles 4 à 7 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 la prise de parole d'un représentant syndical sur les lieux et pendant les heures de service [CS4], dans le cadre de son mandat, pour inviter les agents présents à une grève et au soutien de collègues faisant l'objet d'une procédure disciplinaire ; que la licéité d'une telle réunion est subordonnée à la formulation d'une demande d'autorisation au moins une semaine à l'avance ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que M. [X], élu syndical", a été sanctionné pour avoir, pendant le temps et sur les lieux du service, tenu à l'intention des agents présents des propos portant tant sur la situation de collègues qui étaient sous le coup de procédures disciplinaires que sur un préavis de grève antérieurement donné" ; que cette prise de parole de nature syndicale et en lien avec son mandat présentait le caractère d'une réunion syndicale, laquelle, pour ne pas perturber le fonctionnement du service, ne pouvait être tenue que moyennant une demande d'autorisation formulée au moins une semaine avant sa date ; qu'en retenant cependant que La Poste ne justifiait pas son affirmation selon laquelle cette prise de parole devait s'analyser comme une réunion au sens des articles 4 à 7 du décret du 28 mai 1982", la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 4 à 7 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 ;
3°/ que les agents de La Poste qui exercent des fonctions syndicales disposent de la liberté d'action et d'expression particulière qu'exigent l'exercice de leur mandat et la défense des intérêts des personnels qu'ils représentent, cette liberté doit être conciliée avec le respect des règles encadrant l'exercice du droit syndical dans la fonction publique qui leur sont applicables, ainsi que leurs obligations déontologiques et les contraintes liées à la sécurité et au bon fonctionnement du service ; que méconnaît ces règles et encourt, dès lors, une sanction disciplinaire objectivement justifiée par l'abus ainsi commis dans l'exercice de son mandat, le représentant syndical qui, sans respecter la procédure d'autorisation préalable des réunions syndicales destinée à permettre à l'employeur de s'organiser, prend la parole sur les lieux et pendant le temps du service pour inviter ses collègues à une grève de soutien, perturbant ainsi nécessairement le fonctionnement de ce service ; qu'en décidant le contraire aux termes de motifs inopérants pris de ce que La Poste ne démontrait pas, d'une part, que l'autorisation de parole aurait été refusée, d'autre part que cette prise de parole aurait été à l'origine d'une désorganisation du service, la cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles 4, 5 et 7 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982, ensemble les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 1333-2 du code du travail. »
Réponse de la Cour
7. Il résulte de l'article L. 1333-2 du code du travail que la juridiction peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
8. Ayant, d'une part, constaté que la prise de parole pendant quelques minutes de l'agent de La Poste, appelant ses collègues de travail à la grève en solidarité de ceux convoqués pour des entretiens préalables pouvant aller jusqu'au licenciement, ne constituait pas une réunion statutaire ou d'information, au sens des articles 4 à 7 du décret n° 82-447 du 28 mai 1982, d'autre part, fait ressortir que cet agent n'avait pas commis d'abus dans l'exercice de sa liberté d'expression, la cour d'appel a estimé, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient des articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail, que la sanction disciplinaire prononcée par l'employeur était disproportionnée.
9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.






Soc. 9 octobre 2024 n° 23-16.271

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation partielle

Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 1002 F-D
Pourvoi n° M 23-16.271
Aide juridictionnelle totale en demande au profit de Mme [R], veuve [E]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 30 mars 2023.



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
Mme [D] [R], veuve [E], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 23-16.271 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 9), dans le litige l'opposant à la société Le Nettoyage, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de Me Bouthors, avocat de Mme [R], de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Le Nettoyage, après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 juin 2022) et les productions, Mme [R], veuve [E], a été engagée en qualité d'agent de service, le 1er décembre 2002, par la société Le Nettoyage (la société). Elle exerçait en dernier lieu la fonction de chef d'équipe.
2. Elle a été licenciée pour cause réelle et sérieuse, le 1er juillet 2015.
3. Contestant le bien-fondé de son licenciement et estimant ne pas avoir été intégralement remplie de ses droits durant la relation de travail, la salariée a saisi la juridiction prud'homale le 30 novembre 2015.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. La salariée fait grief à l'arrêt de déclarer prescrite en vertu de l'article L. 1471-1, alinéa 1, du code du travail, issu de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, sa demande tendant à l'octroi de dommages-intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, alors « qu'il résulte de l'article 455 du code de procédure civile que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs et que l'action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit, en vertu de la combinaison des articles 2244 du code civil et L. 1471-1 du code du travail dans sa version en vigueur jusqu'au 24 septembre 2017, par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; qu'au cas présent, la cour d'appel, pour retenir le point de départ de la prescription concernant le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, ne pouvait, comme elle l'a fait, omettre de prendre en compte la demande de Mme [E] telle qu'expressément mentionnée dans ses conclusions, visant le manquement de l'employeur au regard des visites médicales périodiques tous les 24 mois quand ces manquements n'ayant pas cessé de produire leurs effets avant la fin du contrat de travail, le point de départ du délai de prescription était ainsi reporté au 1er juillet 2015, date du licenciement de la salariée, la saisine prud'homale intervenue le 30 novembre 2015 n'étant pas alors atteinte par la prescription ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile pour défaut de réponse à conclusions, ensemble les articles 2244 du code civil et L. 1471-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
5. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
6. Pour débouter la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour manquement de son employeur à son obligation de santé et de sécurité, l'arrêt retient qu'il résulte de la combinaison des articles 2224 du code civil et L. 1471-1, alinéa 1, du code du travail, dans sa version applicable au présent litige, et des dispositions transitoires de la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, que la salariée aurait dû engager son action au plus tard le 17 juin 2015. Il ajoute que son action à ce titre était prescrite à la date de sa saisine du conseil de prud'hommes le 30 novembre 2015.
7. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la salariée qui soutenait que son employeur avait manqué à son obligation de santé et de sécurité pour ne pas avoir organisé les visites médicales de reprise suite à un accident de travail et, de façon générale, ne pas avoir fait passer de visite médicale périodique tous les 24 mois, ce dont il résultait qu'elle se fondait sur des faits qui n'avaient pas cessé de produire leurs effets avant la période non atteinte par la prescription, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.




Crim. 9 octobre 2024 n° 24-80.655

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° Q 24-80.655 F-D
N° 01206

ODVS 9 OCTOBRE 2024

CASSATION PARTIELLE

M. BONNAL président,







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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 9 OCTOBRE 2024


M. [L] [D] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 17 janvier 2024, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de viols et atteinte à l'intimité de la vie privée, a prononcé sur une demande d'annulation de pièces de la procédure.
Par ordonnance du 29 mars 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de M. Gouton, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [L] [D], et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gouton, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.
2. Le 19 avril 2023, une information judiciaire a été ouverte contre M. [L] [D] des chefs de viols aggravés sur deux victimes et atteinte à l'intimité de la vie privée de l'une d'entre elles.
3. L'intéressé, mis en examen, a présenté une requête à fin d'annulation de pièces de la procédure.
Examen des moyens
Sur les deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens
4. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Mais sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à annulation ou cancellation d'autres actes ou pièces de la procédure que celles figurant en cote D 56, a dit la procédure régulière jusqu'à la cote D 87 incluse et a fait retour de la procédure au juge d'instruction saisi en vue de la poursuite de l'information, alors « que dans ses conclusions, M. [D] soutenait, en se fondant sur des pièces précises du dossier de la procédure, que l'enquêteur avait fait preuve de partialité, et sollicitait en conséquence l'annulation de l'intégralité des procès-verbaux de sa garde à vue, ainsi que des éléments de preuves obtenus de façon déloyale, et de tous les actes subséquents qui en sont le support nécessaire et la destruction des enregistrements de la garde à vue (à savoir la cancellation des cotes D1, D2, D3, D6 à D72, D74 à D 87, ainsi que l'intégralité des cotes B, C et P) ; en jugeant n'y avoir lieu à annulation ou cancellation d'autres actes ou pièces de la procédure, sans répondre au moyen péremptoire de M. [D] sur ce point, la chambre de l'instruction a violé les articles 593 du code de procédure pénale et 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour
Vu l'article 593 du code de procédure pénale :
6. Selon ce texte, tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
7. En laissant sans réponse l'articulation du mémoire régulièrement déposé devant elle pour le demandeur, qui invoquait un moyen de nullité de la procédure tirée du défaut d'impartialité de l'enquêteur, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision.
8. La cassation est par conséquent encourue.
Portée et conséquences de la cassation
9. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions ayant écarté le moyen de nullité tiré du défaut d'impartialité de l'enquêteur. Les autres dispositions seront donc maintenues.




Crim. 9 octobre 2024 n° 23-84.859

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° P 23-84.859 F-D
N° 01214

ODVS 9 OCTOBRE 2024

CASSATION

M. BONNAL président,







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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 9 OCTOBRE 2024


M. [M] [B] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'application des peines de la cour d'appel de Nîmes, en date du 12 juillet 2021, qui a prononcé sur la révocation d'un sursis probatoire.
Un mémoire a été produit.
Sur le rapport de Mme Guerrini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Guérin-Gougeon, avocat de M. [M] [B], et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Guerrini, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Par jugement du 28 janvier 2021, le juge de l'application des peines a ordonné la révocation du sursis probatoire qui assortissait la peine de quatre mois d'emprisonnement prononcée par le tribunal correctionnel le 26 novembre 2018 à l'encontre de M. [M] [B].
3. Ce dernier a relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la révocation totale du sursis avec mise à l'épreuve de M. [B] attaché à la peine de quatre mois d'emprisonnement délictuel, prononcé le 26 novembre 2018 par le tribunal correctionnel de Nîmes, alors :
« 4°/ en toute hypothèse que la chambre de l'application des peines, saisie de l'appel du jugement prononçant la révocation d'un sursis avec mise à l'épreuve, doit procéder elle-même à l'examen des faits invoqués pour justifier la révocation du sursis ; qu'en se bornant à énoncer que faute pour M. [B] d'être venu soutenir son appel, il n'existait pas d'élément nouveau qui justifierait que la décision du juge de l'application des peines soit remise en cause, sans procéder elle-même à l'examen des faits reprochés à l'intéressé, la chambre de l'application des peines a méconnu les articles 742, 509 et D. 49-44-1 du code de procédure pénale et le principe de l'effet dévolutif de l'appel ;
5°/ en toute hypothèse que la chambre de l'application des peines, saisie de l'appel du jugement prononçant la révocation d'un sursis avec mise à l'épreuve après l'expiration du délai d'épreuve, doit s'assurer que les faits justifiant la révocation du sursis ont été commis au cours de la période d'épreuve ; qu'il ressort de l'arrêt attaqué que la chambre de l'application des peines a été saisie de l'appel du jugement prononçant la révocation d'un sursis avec mise à l'épreuve après l'expiration du délai d'épreuve ; qu'en se bornant à énoncer que faute pour M. [B] d'être venu soutenir son appel, il n'existait pas d'élément nouveau qui justifierait que la décision du juge de l'application des peines soit remise en cause, sans s'assurer que les faits retenus par ce dernier pour justifier la révocation du sursis avaient été commis au cours de la période d'épreuve, la chambre de l'application des peines n'a pas justifié sa décision au regard des articles 742, 509 et D. 49-44-1 du code de procédure pénale, de l'article 132-52 du code pénal et du principe de l'effet dévolutif de l'appel. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 593 du code de procédure pénale :
5. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.
6. Pour ordonner la révocation du sursis probatoire, la chambre de l'application des peines retient que M. [B] qui a été régulièrement convoqué n'est pas venu soutenir son appel devant elle, de sorte qu'il n'existe pas d'élément nouveau qui justifierait que la décision du juge de l'application des peines soit remise en cause.
7. En statuant ainsi, la chambre de l'application des peines qui devait procéder à l'examen des manquements reprochés à l'intéressé ayant fondé la décision de révocation, a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé.
8. La cassation est par conséquent encourue de ce chef, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 23-15.111

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 532 F-D
Pourvoi n° A 23-15.111

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
M. [O] [W], domicilié chez M. [X] [T] - [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 23-15.111 contre l'arrêt rendu le 7 mars 2023 par la chambre d'appel de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion à Mamoudzou (chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ au procureur général près la cour d'appel de Mamoudzou, domicilié en son parquet général, [Adresse 2],
2°/ à l'avocat général près la chambre d'appel de Mamoudzou, domicilié en son parquet général, [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Ancel, conseiller, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. [W], après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Ancel, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Caducité du pourvoi
1. M. [W] justifie de l'accomplissement des formalités de l'article 1040 du code de procédure civile, pour avoir communiqué le 12 octobre 2023 sa déclaration de pourvoi et son mémoire ampliatif au ministère de la justice.
2. Il n'y a donc pas lieu de constater la caducité du pourvoi.
Faits et procédure
3. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 7 mars 2023), M. [O] [B] [W], se disant né le 23 novembre 1997 à Madagascar, a introduit une action déclaratoire de nationalité française.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
4. M. [W] fait grief à l'arrêt de constater son extranéité, de rejeter ses autres demandes, et d'ordonner la conservation d'un extrait de la décision au répertoire civil du service central au ministère des affaires étrangères, alors « que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en cause d'appel, pour justifier de son état civil, M. [O] [B] [W] produisait un jugement supplétif accompagné de la transcription correspondante ; qu'en énonçant toutefois, pour retenir que M. [O] [B] [W] était défaillant à rapporter la preuve d'un état civil fiable et certain, qu'elle se trouvait en l'état de l'annulation de son acte de naissance, et en l'absence de jugement supplétif, quand il était au contraire produit en cause d'appel, la cour d'appel a dénaturé par omission ce jugement et ainsi violé l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis. » Réponse de la Cour
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :
5. Pour rejeter la demande de M. [W], l'arrêt énonce que du fait de l'annulation de son acte de naissance, et par conséquent sans acte de naissance et en l'absence de jugement supplétif, M. [O] [B] [W] est défaillant à rapporter la preuve d'un état civil fiable et certain.
6. En statuant ainsi, alors que la liste des pièces communiquées mentionnées dans les conclusions de l'intéressé devant la cour d'appel mentionne la production d'un jugement supplétif de naissance n° 3325 du 24 mai 2022 en pièce n° 15 palliant l'annulation de l'acte de naissance n° 409 du 27 novembre 1997 par jugement du tribunal de première instance de Mahajanga de la République de Madagascar du 12 avril 2022, ainsi qu'en pièce n° 16, un certificat de non recours contre le jugement supplétif et en pièce n° 17, la transcription n° 3650 de ce jugement supplétif, la cour d'appel qui a dénaturé ces écrits, a violé le principe susvisé.




Soc. 9 octobre 2024 n° 23-14.465

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation

Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 995 F-D
Pourvoi n° Y 23-14.465



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
M. [L] [T], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 23-14.465 contre l'arrêt rendu le 10 février 2023 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale B), dans le litige l'opposant à la société Xenax, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Carillon, conseiller référendaire, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [T], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Xenax, après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Carillon, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, Mme Grivel, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 10 février 2023), M. [T] a été engagé en qualité de chimiste de recherche et développement et contrôle de qualité à compter du 13 avril 2015 par la société Xenax (la société).
2. Convoqué le 14 mars 2017 à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, avec mise à pied conservatoire, le salarié, licencié pour faute lourde le 4 avril 2017, a saisi la juridiction prud'homale afin de contester le licenciement.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
4. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement est régulier mais fondé sur des fautes graves et de le débouter de l'ensemble de ses demandes, alors « que le salarié a droit, même au temps et au lieu de travail, au respect de l'intimité de sa vie privée ; que celle-ci implique en particulier le secret des correspondances ; qu'il incombe à l'employeur qui produit en justice une correspondance privée du salarié de prouver qu'il l'a obtenue licitement ; qu'en l'espèce, pour débouter le salarié de ses demandes, la cour d'appel a retenu que l'employeur était recevable à produire des courriels échangés entre le salarié et une société tierce depuis sa messagerie électronique personnelle motifs pris que ''la charge de la preuve de leur caractère illicite incombe à M. [T]. Ce dernier ne démontre pas que c'est par une fouille dans ses effets personnels que son employeur les a découverts, alors qu'il affirme lui-même que ces documents se trouvaient dans les locaux professionnels et qu'il reconnait qu'il était absent de la société lors de leur appréhension. La production des courriels en justice est donc tout à fait licite. Le conseil de prud'hommes ne pouvait écarter ces pièces au seul motif qu'il n'avait pas la possibilité matérielle de constater la loyauté de leur obtention et le jugement sera infirmé de ce chef'' ; qu'en statuant ainsi, quand il incombait à l'employeur de prouver qu'il s'était licitement procuré ces correspondances privées, la cour d'appel a violé les articles 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil, 9 du code de procédure civile et L. 1121-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil, 9 du code de procédure civile, et L. 1121-1 du code du travail :
5. Il résulte de ces textes que les documents détenus par le salarié dans le bureau de l'entreprise mis à sa disposition, sont, sauf lorsqu'il les identifie comme étant personnels, présumés avoir un caractère professionnel, de sorte que l'employeur peut y avoir accès hors sa présence.
6. Pour dire le licenciement fondé, l'arrêt retient, au titre de la licéité des moyens de preuve produits par l'employeur, que la charge de la preuve du caractère illicite des courriels échangés entre le salarié et la société Indian Toners et Developers, incombe au salarié et que ce dernier ne démontre pas que c'est par une fouille dans ses effets personnels que son employeur les a découverts, alors qu'il affirme lui-même que ces documents se trouvaient dans les locaux professionnels et qu'il reconnaît qu'il était absent de la société lors de leur appréhension. Il en déduit que la production de ces courriels en justice est licite.
7. En statuant ainsi, alors qu'il n'était pas contesté que les documents litigieux découverts par l'employeur sur le bureau du salarié provenaient de sa messagerie personnelle, de sorte qu'étant identifiés comme personnels, l'employeur ne pouvait y accéder et les appréhender hors la présence du salarié, ce dont elle aurait du déduire que la preuve avait été obtenue de manière illicite, la cour d'appel a violé les textes susvisés.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 23-19.581

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 552 F-D
Pourvoi n° J 23-19.581

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5], a formé le pourvoi n° J 23-19.581 contre l'arrêt rendu le 11 mai 2023 par la cour d'appel de Douai (chambre 8, section 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. [E] [G],
2°/ à Mme [Z] [G],
tous deux domiciliés [Adresse 1],
3°/ à la société Alliance, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], représentée par Mme [H] [V], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société IC Groupe, sise [Adresse 3],
4°/ à la société Immo Confort (IC Groupe), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], représentée par Mme [H] [V], mandataire liquidateur,
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. et Mme [G], après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 11 mai 2023), le 19 septembre 2017, par contrat conclu hors établissement, M. [G] a commandé auprès de la société Immo Confort (le vendeur) un système photovoltaïque, une unité de gestion, un kit batterie et un chauffe-eau thermodynamique, à un prix de 24 500 euros financé par un crédit souscrit le même jour, avec Mme [G], auprès de la société Cofidis (la banque).
2. Le vendeur a été placé en liquidation judiciaire, Mme [V] ayant été désignée en qualité de liquidateur.
3. Les 5 et 6 mai 2020, invoquant des irrégularités du bon de commande, M. et Mme [G] (les emprunteurs) ont assigné Mme [V], ès qualités, et la banque, en annulation du contrat principal et du crédit affecté.
Examen des moyens
Sur le premier moyen et sur le deuxième moyen, pris en ses quatre premières branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen, pris en ses cinquième à septième branches
Enoncé du moyen
5. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à payer aux emprunteurs les sommes que ceux-ci lui ont versées à la date de l'arrêt soit la somme de 35 195,36 euros, alors :
« 5°/ que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de service emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute ; qu'en retenant que ces fautes ont incontestablement occasionné un préjudice aux emprunteurs" et que de telles fautes (i. e, celle de la banque et celle du fournisseur) en l'espèce ont causé à un préjudice incontestable [sic] aux emprunteurs qui doit être justement arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution", sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'installation photovoltaïque fonctionnait, et si les travaux exécutés au profit des emprunteurs étaient satisfaisants, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 312-54 du code de la consommation et 1231-1 du code civil ;
6°/ que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de service emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute ; que l'impécuniosité du contractant principal n'est pas en lien de cause à effet avec la faute du prêteur consistant en l'absence de vérification de la conformité du bon de commande aux exigences légales à l'époque où le fournisseur était in bonis ; qu'en décidant néanmoins le contraire en énonçant que la faillite du vendeur survenue dans le cours de la présente procédure contentieuse doit être considérée comme générant un préjudice suffisant pour priver le prêteur de sa créance de restitution" et que du fait de cette déconfiture se verront dans l'impossibilité selon toute vraisemblance d'obtenir la désinstallation du matériel et de récupérer le prix de vente auprès du vendeur placé en liquidation judiciaire - alors même que cette restitution du prix aurait été la conséquence juridique normale et automatique résultant de l'annulation du contrat de vente", la cour d'appel a violé l'article 1231-1 du code civil ;
7°/ que la rentabilité économique ne constitue une caractéristique essentielle d'une installation photovoltaïque au sens de l'article L. 111-1 du code de la consommation, qu'à la condition que les parties l'aient faite entrer dans le champ contractuel ; qu'en affirmant que les emprunteurs ont également subi un préjudice lié au fait qu'ils ont utilisé un matériel qui n'était pas en parfaite adéquation avec leurs souhaits notamment quant à son rendement afférent à la production d'électricité", sans constater que les souhaits" des époux [G], notamment de rentabilité et d'autofinancement de l'installation qu'ils invoquaient dans leurs conclusions, étaient entrés dans le champ contractuel, la banque contestant qu'il en fut ainsi, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles L. 312-54 du code de la consommation et 1231-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
6. En cas de résolution ou d'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, la faute du prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, ne dispense l'emprunteur de restituer le capital emprunté que si celui-ci justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
7. Lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, le consommateur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal.
8. Après avoir annulé la vente en raison des irrégularités qui affectaient le bon de commande, l'arrêt retient, d'une part, qu'en libérant le capital emprunté sans vérifier la régularité du contrat principal, la banque avait manqué à ses obligations, d'autre part, que les emprunteurs avaient subi un préjudice consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès d'un vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente du matériel.
9. En l'état de ces constations et appréciations, dès lors que ce préjudice n'aurait pas été subi sans la faute de la banque, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder aux recherches inopérantes invoquées aux cinquième et septième branches du moyen, a retenu que la demande en réparation était fondée en son principe.
10. Partiellement inopérant, le moyen n'est pas fondé pour le surplus.
Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
11. La banque fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'en vertu du principe de la réparation intégrale, la victime doit être indemnisée de son préjudice sans perte ni profit ; qu'en condamnant la banque, qui avait prêté aux emprunteurs une somme de 24 500 euros, à leur payer une somme de 35 195,36 euros, après avoir décidé que le préjudice devait être arbitré à hauteur du montant intégral de la créance de restitution, de sorte que la condamnation de la banque ne pouvait porter que sur les seules échéances payées par les emprunteurs en remboursement du crédit, et que la cour constate que la dette de restitution des emprunteurs à laquelle ils avaient été condamnés à restitution par le tribunal, dont le jugement n'était pas assorti de l'exécution provisoire, s'élevait à la somme de 17 339,84 euros, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de s'assurer du respect de la règle ci-dessus visée et privé son arrêt de base légale. »
Réponse de la Cour
Vu le principe d'une réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :
12. Pour condamner la banque à payer aux emprunteurs la somme de 35 195,36 euros, la cour d'appel retient que ce montant correspond aux sommes que ceux-ci ont versées à la date de l'arrêt.
13. En statuant ainsi, alors qu'elle avait retenu que le préjudice des emprunteurs s'élevait à une somme égale au montant du capital emprunté, soit 24 500 euros, dont seule une partie avait été remboursée à la banque, la cour d'appel a violé le principe susvisé.




Soc. 9 octobre 2024 n° 23-17.506 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC. / ELECT
ZB1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Rejet

M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 1013 F-B
Pourvoi n° D 23-17.506

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
Le groupement d'intérêt économique Alliance gestion, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 23-17.506 contre le jugement rendu le 9 juin 2023 par le tribunal judiciaire de Paris (pôle social, contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :
1°/ à la féderation syndicale FIECI CFE-CGC,
2°/ à la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie (FIECI),
3°/ au Syndicat national de l'encadrement des professionnels des études et des conseils (SNEPEC),
tous trois ayant leur siège [Adresse 3],
4°/ à Mme [L] [H], domiciliée [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Lanoue, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat du groupement d'intérêt économique Alliance gestion, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la féderation syndicale FIECI CFE-CGC, de la Fédération nationale du personnel de l'encadrement des sociétés de service informatique, des études, du conseil et de l'ingénierie, du Syndicat national de l'encadrement des professionnels des études et des conseils et de Mme [H], après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Lanoue, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Paris, 9 juin 2023), le 2 février 2023, le GIE Alliance gestion (le GIE) et la fédération syndicale FIECI CFE-CGC (le syndicat) ont signé un protocole d'accord préélectoral en vue du renouvellement de la délégation du personnel au comité social et économique, prévoyant notamment que les proportions de femmes et d'hommes étaient respectivement de 70,24 % et 29,76 % dans le premier collège, trois sièges étant à pourvoir.
2. Par lettre du 22 février 2023, le syndicat a adressé au GIE au titre des « candidatures CFE-CGC pour le premier tour des élections du CSE du GIE Alliance gestion » pour le premier collège la candidature unique de Mme [H] en qualité de titulaire et suppléante.
3. Par lettre du 27 février 2023, le GIE a contesté la conformité de cette liste aux dispositions légales sur la représentation équilibrée entre les hommes et les femmes en demandant à l'organisation syndicale de modifier sa liste ou de la retirer. Le syndicat a maintenu sa liste.
4. A l'issue du premier tour du scrutin qui s'est déroulé le 13 mars 2023, le quorum n'a pas été atteint. Mme [H], qui était la seule candidate, a obtenu 100 % des suffrages valablement exprimés. Elle a été élue en qualité de titulaire au second tour qui s'est tenu le 28 mars 2023 où elle s'était présentée comme candidate libre.
5. Le 3 avril 2023, le GIE a saisi le tribunal judiciaire aux fins de juger que la liste de candidats présentée par le syndicat au premier tour des élections professionnelles organisées au sein du GIE Alliance gestion pour le premier collège, non-cadres, était irrégulière au regard des règles relatives à la représentation équilibrée des hommes et des femmes et à l'interdiction de présenter un unique candidat si plusieurs sièges sont à pourvoir et demandé en conséquence que ce syndicat soit jugé non représentatif et que les élections professionnelles soient annulées.
6. Par jugement du 9 juin 2023, le tribunal a débouté le GIE de l'ensemble de ses demandes principales, dont celle de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article L. 2314-30 du code du travail.
7. A l'occasion du pourvoi formé contre ce jugement, le GIE a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée : « Les dispositions de l'alinéa 3 de l'article L. 2314-32 du code du travail, qui ne prévoient comme sanction du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2314-30 du même code que la simple annulation de l'élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter, portent-elles atteinte, en ce qu'elles ne prévoient pas l'annulation des élections même lorsque l'irrégularité dans le déroulement des élections née de la présentation par une organisation syndicale d'une liste de candidat ne répondant pas aux exigences d'ordre public de l'article L. 2314-30 a été déterminante de la qualité représentative des organisations syndicales dans l'entreprise, au principe résultant de l'article 34 de la Constitution selon lequel l'incompétence négative du législateur ne doit pas affecter un droit ou une liberté que la Constitution garantit, en l'occurrence le droit des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail et le principe d'égalité tels que garantis par les alinéas 6 et 8 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et les articles 1er, 5 et 6 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 ? »
8. Par arrêt du 10 octobre 2023, la Cour de cassation a dit n'y avoir lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité.
Examen des moyens
Sur le deuxième moyen
9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
10. Le GIE fait grief au jugement de le débouter de l'ensemble de ses demandes principales et de dire n'y avoir lieu à transmission de la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article L. 2314-30 du code du travail, alors « que les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 2314-32 du code du travail, en ce qu'elles prévoient que la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2314-30 n'entraîne que l'annulation de l'élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter, est contraire aux droits et libertés garantis par la Constitution ; qu'en conséquence, la déclaration d'inconstitutionnalité qui sera prononcée par le Conseil constitutionnel après renvoi par la Cour de cassation, privera le jugement attaqué de fondement juridique. »
Réponse de la Cour
11. La Cour de cassation ayant dit n'y avoir lieu à transmission de la question prioritaire de constitutionnalité, le moyen est inopérant.
Sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
12. Le GIE fait grief au jugement de le débouter de l'ensemble de ses demandes principales, alors :
« 1°/ que les irrégularités commises dans l'organisation et le déroulement du scrutin constituent une cause d'annulation des élections si, s'agissant du premier tour, elles ont été déterminantes de la qualité représentative des organisations syndicales dans l'entreprise ; que lorsqu'une organisation syndicale présente au premier tour des élections une liste ne présentant qu'un seul candidat et ne respectant pas les exigences de l'article L. 2314-30 du code du travail et obtient plus de 10 % des suffrages exprimés, il en résulte que l'irrégularité est déterminante dans la qualité représentative de cette organisation syndicale, puisque si celle-ci avait respecté les exigences de l'article L. 2314-30 du code du travail, elle n'aurait pas présenté de liste, de sorte qu'elle n'aurait pas pu recueillir au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour et donc être jugée représentative ; qu'en l'espèce, pour débouter le GIE Alliance gestion de sa demande d'annulation des élections professionnelles, le tribunal judiciaire s'est borné à relever que "l'annulation, en application des dispositions de l'article L. 2314-32 du code du travail, de l'élection d'un candidat au titre du non-respect par la liste de candidats des prescriptions prévues à l'article L. 2314-30 du même code est sans effet sur la condition d'audience électorale requise par l'article L. 2122-1 (Cour de cassation, Chambre sociale, 16 décembre 2020 ¿ n° 19-18.613)" ; qu'en statuant ainsi quand l'irrégularité qui entachait la liste de la FIECI CFE-CGC avait été déterminante dans la qualité représentative de cette organisation syndicale puisque celle-ci, qui n'avait présenté qu'une seule candidate sur sa liste, n'aurait pas dû présenter de liste et n'aurait donc pas dû recueillir au moins 10 % des suffrages au premier tour des élections et être jugée représentative, le tribunal judiciaire a violé les articles L. 2122-1, L. 2143-3, L. 2314-24 et L. 2314-5, L. 2314-30 du code du travail et les principes généraux du droit électoral ;
2°/ que les irrégularités commises dans l'organisation et le déroulement du scrutin constituent une cause d'annulation des élections si elles ont eu une influence sur le résultat des élections ou si elles ont été déterminantes de la qualité représentative des organisations syndicales dans l'entreprise ; qu'en l'espèce, en déboutant le GIE Alliance Gestion de sa demande d'annulation des élections professionnelles sans rechercher, comme il y était invité, si mise à part la FIECI CFECGC, les autres organisations syndicales n'avaient pas respecté les dispositions d'ordre public de l'article L. 2314-30 du code du travail en ne présentant pas de listes, ce qui les avait privées de la possibilité d'être jugées représentatives, de sorte que l'irrégularité qui entachait la liste de la FIECI CFE-CGC avait été déterminante sur le résultat du premier tour des élections et sur la qualité représentative des organisations syndicales dans l'entreprise, le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2122-1, L. 2143-3, L. 2314-24 et L. 2314-5, L. 2314-30 du code du travail et les principes généraux du droit électoral. »
Réponse de la Cour
13. Aux termes de l'article L. 2122-1 du code du travail, dans l'entreprise ou l'établissement, sont représentatives les organisations syndicales qui satisfont aux critères de l'article L. 2121-1 et qui ont recueilli au moins 10 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité social et économique, quel que soit le nombre de votants.
14. Il résulte par ailleurs de l'article L. 2314-32 du code du travail que la constatation par le juge, après l'élection, du non-respect par une liste de candidats des prescriptions prévues à la première phrase du premier alinéa de l'article L. 2314-30 entraîne la seule sanction de l'annulation de l'élection d'un nombre d'élus du sexe surreprésenté égal au nombre de candidats du sexe surreprésenté en surnombre sur la liste de candidats au regard de la part de femmes et d'hommes que celle-ci devait respecter et que, l'annulation, en application des dispositions de l'article L. 2314-32 du code du travail, de l'élection d'un candidat au titre du non-respect par la liste de candidats des prescriptions prévues à l'article L. 2314-30 du même code est sans effet sur la condition d'audience électorale requise par l'article L. 2122-1 du même code pour l'acquisition de la qualité de syndicat représentatif.
15. C'est en conséquence à bon droit que le tribunal a rejeté la demande du GIE d'annulation du premier tour des élections et consécutivement du score électoral du syndicat, ainsi que la demande d'annulation des élections, sans avoir à procéder aux recherches visées au moyen quant aux comportements hypothétiques du syndicat et d'éventuelles autres organisations syndicales et peu important qu'un second tour ait été organisé compte tenu du nombre de votants au premier tour.
16. Le moyen est, dès lors, inopérant.




Soc. 9 octobre 2024 n° 23-11.339 B

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 1011 F-B
Pourvoi n° A 23-11.339



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
Le comité social et économique de l'établissement Zone de production Nord-Est-Normandie de SNCF réseau, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 23-11.339 contre l'arrêt rendu le 5 janvier 2023 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 2), dans le litige l'opposant à la société SNCF réseau, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Sommé, conseiller, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat du comité social et économique de l'établissement Zone de production Nord-Est-Normandie de SNCF réseau, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société SNCF réseau, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Sommé, conseiller rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 janvier 2023), statuant selon la procédure accélérée au fond, la société SNCF réseau (la société) est dotée d'un comité social et économique central et de six comités sociaux et économiques d'établissement, dont le comité social et économique de l'établissement Zone de production Nord-Est-Normandie de SNCF réseau (le comité).
2. Au cours de l'année 2021, la société a consulté les instances représentatives du personnel concernées sur un projet d'optimisation des frais généraux administratifs, qui définit les principes généraux d'organisation des fonctions support devant être déployés entre 2021 et 2023.
3. Le comité a été convoqué le 8 juillet 2021 pour être consulté sur le déploiement de ce projet dans le périmètre de l'établissement Zone de production Nord-Est-Normandie. A cette date, le comité a décidé de recourir à l'assistance d'un expert.
4. Après dépôt du rapport d'expertise, estimant qu'il ne disposait pas d'informations suffisantes pour rendre un avis, le comité a saisi, le 3 septembre 2021, le président du tribunal judiciaire d'une requête aux fins d'être autorisé à assigner en urgence.
5. Par acte du 6 septembre 2021, le comité a fait assigner la société devant le président du tribunal judiciaire aux fins d'ordonner à celle-ci de lui communiquer certaines informations complémentaires, de prolonger son délai de consultation de deux mois à compter de la transmission de ces informations et d'interdire à la société, sous astreinte, de mettre en oeuvre le projet litigieux jusqu'à expiration de ce délai.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
6. Le comité fait grief à l'arrêt de décider qu'il est irrecevable en ses demandes, alors « que le comité social et économique peut, s'il estime ne pas disposer d'éléments suffisants, saisir avant l'expiration du délai dont il dispose pour rendre son avis le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, aux fins de voir ordonner la communication par l'employeur des éléments manquants ; que ce délai de forclusion est interrompu à la date de signification de l'assignation en justice à la partie adverse, et non à celle du placement de l'assignation signifiée auprès du greffe du tribunal ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 2312-15 du code du travail, tel que modifié par l'ordonnance n° 2019-738 du 17 juillet 2019 et, par fausse application, l'article 492-1 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 2312-15, L. 2312-16, R. 2312-5 et R. 2312-6 du code du travail et 481-1 du code de procédure civile :
7. Selon l'article L. 2312-15 du code du travail, le comité social et économique émet des avis et des v?ux dans l'exercice de ses attributions consultatives. Il dispose à cette fin d'un délai d'examen suffisant et d'informations précises et écrites transmises ou mises à disposition par l'employeur, et de la réponse motivée de l'employeur à ses propres observations. Le comité peut, s'il estime ne pas disposer d'éléments suffisants, saisir le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, pour qu'il ordonne la communication par l'employeur des éléments manquants. Cette saisine n'a pas pour effet de prolonger le délai dont dispose le comité pour rendre son avis. Toutefois, en cas de difficultés particulières d'accès aux informations nécessaires à la formulation de l'avis motivé du comité, le juge peut décider la prolongation du délai prévu au deuxième alinéa.
8. Aux termes de l'article L. 2312-16 du même code, sauf dispositions législatives spéciales, l'accord défini à l'article L. 2312-19 et à l'article L. 2312-55 ou, en l'absence de délégué syndical, un accord entre l'employeur et le comité social et économique ou, le cas échéant, le comité social et économique central, adopté à la majorité des membres titulaires de la délégation du personnel du comité, ou, à défaut d'accord, un décret en Conseil d'Etat fixe les délais dans lesquels les avis du comité social et économique ou, le cas échéant, du comité social et économique central sont rendus dans le cadre des consultations prévues au présent code. Ces délais permettent au comité social et économique ou, le cas échéant, au comité central d'exercer utilement sa compétence, en fonction de la nature et de l'importance des questions qui lui sont soumises. A l'expiration de ces délais ou du délai mentionné au cinquième alinéa de l'article L. 2312-15 , le comité ou, le cas échéant, le comité central, est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif.
9. Aux termes de l'article R. 2312-5 du code du travail, en sa rédaction antérieure au décret n° 2022-678 du 26 avril 2022, pour l'ensemble des consultations mentionnées au présent code pour lesquelles la loi n'a pas fixé de délai spécifique, le délai de consultation du comité social et économique court à compter de la communication par l'employeur des informations prévues par le code du travail pour la consultation ou de l'information par l'employeur de leur mise à disposition dans la base de données économiques et sociales dans les conditions prévues aux articles R. 2312-7 et suivants.
10. Selon l'article R. 2312-6 du même code, pour les consultations mentionnées à l'article R. 2312-5, à défaut d'accord, le comité social et économique est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la date prévue à cet article. En cas d'intervention d'un expert, le délai mentionné au premier alinéa est porté à deux mois.
11. Le délai de consultation fixé par l'article R. 2312-6 du code du travail court à compter de la date à laquelle le comité social et économique a reçu une information le mettant en mesure d'apprécier l'importance de l'opération envisagée et de saisir le président du tribunal s'il estime que l'information communiquée est insuffisante.
12. Selon l'article 481-1, 1° et 2°, du code de procédure civile, à moins qu'il en soit disposé autrement, lorsqu'il est prévu par la loi ou le règlement qu'il est statué selon la procédure accélérée au fond, la demande est formée, instruite et jugée dans les conditions suivantes : 1° La demande est portée par voie d'assignation à une audience tenue aux jour et heure prévus à cet effet ; 2° Le juge est saisi par la remise d'une copie de l'assignation au greffe avant la date fixée pour l'audience, sous peine de caducité de l'assignation constatée d'office par ordonnance du juge, ou, à défaut, à la requête d'une partie.
13. Il résulte des articles L. 2312-15 du code du travail et 481-1 du code de procédure civile que la demande en justice devant le président du tribunal judiciaire, statuant selon la procédure accélérée au fond, étant formée par assignation, la date de saisine du juge s'entend de celle de l'assignation.
14. Pour déclarer irrecevables les demandes du comité, l'arrêt relève que l'assignation délivrée par le comité a été signifiée à la société le 6 septembre 2021, que cette assignation a été placée au greffe du tribunal le 9 septembre 2021 et que les parties s'accordent à considérer que le délai imparti au comité pour donner son avis, étendu à deux mois dans le cadre de la saisine d'un expert, courait à compter du 8 juillet 2021. Il retient qu'en application de l'article 481-1 du code de procédure civile, le juge ne peut être saisi qu'à la double condition que l'assignation soit effectivement signifiée et qu'une copie soit ensuite placée au greffe de la juridiction, qu'ainsi dans le cadre d'une procédure accélérée au fond, la demande n'est effective qu'au moment de la remise de la copie de l'assignation au greffe. L'arrêt en déduit qu'en l'espèce, cette remise est tardive puisqu'elle est intervenue le 9 septembre 2021, soit postérieurement à l'expiration du délai imparti au comité pour émettre son avis.
15. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'assignation avait été délivrée à la société le 6 septembre 2021, soit avant l'expiration du délai dont disposait le comité pour donner son avis, la cour d'appel a violé les textes susvisés.




Soc. 9 octobre 2024 n° 23-15.811

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 1014 F-D
Pourvoi n° M 23-15.811



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
1°/ Mme [O] [E], domiciliée [Adresse 4],
2°/ La fédération des employés et cadres Force ouvrière, dont le siège est [Adresse 3],
ont formé le pourvoi n° M 23-15.811 contre l'arrêt rendu le 14 mars 2023 par la cour d'appel d'Agen (chambre sociale), dans le litige les opposant à la Mutuelle assurance des commerçants et industriels de France et des cadres et salariés de l'industrie du commerce (MACIF), dont le siège est [Adresse 2], et ayant un établissement secondaire, Macif Sud-Ouest Pyrénées, situé [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La Mutuelle assurance des commerçants et industriels de France et des cadres et salariés de l'industrie du commerce a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, trois moyens de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de leur recours, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Arsac, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [E] et de la fédération des employés et cadres Force ouvrière, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la Mutuelle assurance des commerçants et industriels de France et des cadres et salariés de l'industrie du commerce, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Arsac, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 14 mars 2023), Mme [E] a été engagée en qualité de guichetière par la société Mutuelle assurance des commerçants et industriels de France et des cadres et salariés de l'industrie du commerce (la société) suivant contrat de travail du 4 mai 1987. Au dernier état de la relation de travail, elle occupait les fonctions d'assistante technique assurance.
2. Le 4 avril 2018, la société a convoqué la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour faute grave, fixé au 13 avril 2018. Cette convocation était assortie d'une mesure de mise à pied à titre conservatoire dans l'attente du prononcé de la décision.
3. Le 11 avril 2018, la salariée a adressé au directeur général de la société un courrier faisant état d'une situation de harcèlement moral.
4. Par lettre recommandée avec accusé de réception du 15 mai 2018, la société a notifié à la salariée son licenciement pour cause réelle et sérieuse.
5. Le 29 avril 2019, la salariée a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de nullité de son licenciement pour harcèlement moral et pour violation de sa liberté d'expression. La fédération des employés et cadres Force ouvrière (la fédération) est intervenue volontairement à l'instance pour présenter une demande d'indemnisation au titre du préjudice porté à l'intérêt collectif de la profession.
Examen des moyens
Sur le moyen du pourvoi incident
6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
7. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en nullité du licenciement en raison d'un harcèlement moral et de sa demande en réintégration ainsi que de ses demandes en condamnation de la société à lui verser certaines sommes à titre d'indemnité pour licenciement nul, de dommages-intérêts pour préjudice subi en raison des actes de harcèlement moral et de la violation par l'employeur de son obligation de sécurité et de débouter la fédération de sa demande de condamnation de la société à lui payer une certaine somme au titre de l'atteinte à l'intérêt collectif de la profession, alors « que, aux termes de l'article 2224 du code civil, en matière de responsabilité civile, le point de départ du délai de prescription est le jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer ; qu'en matière de harcèlement moral, lorsque l'action n'est pas prescrite, il appartient au juge d'analyser l'ensemble des faits invoqués par le salarié permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral quelle que soit leur date de commission ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que la salariée soutenait avoir été victime d'agissements de harcèlement moral jusqu'en 2018, ce dont il résultait que, ayant saisi la juridiction prud'homale le 29 avril 2019, son action en indemnisation du harcèlement moral n'était pas prescrite, la cour d'appel a cru pouvoir affirmer que "pour agir devant le conseil de prud'hommes, la salariée doit engager la procédure dans le délai de prescription de 5 ans" et qu'en l'espèce, si "Mme [E] invoque des agissements répétés de ses supérieurs hiérarchiques qui seraient constitutifs d'un harcèlement moral depuis 2012", "Pour autant elle n'a saisi le conseil de prud'hommes à ce titre que le 29 avril 2019", de sorte que "les faits invoqués antérieurs au 29 avril 2014 sont couverts par la prescription" ; qu'en statuant ainsi, alors que l'action en indemnisation du harcèlement moral n'était pas prescrite et qu'il appartenait dès lors à la cour d'appel d'analyser l'ensemble des faits invoqués par la salariée permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral, quelle que soit la date de leur commission, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil, ensemble les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail :
8. Il résulte de ces textes que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié présente des éléments de fait qui laissent supposer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement.
9. Dès lors que l'action fondée sur le harcèlement n'est pas prescrite, le juge doit analyser l'ensemble des éléments de fait invoqués par le salarié au titre du harcèlement moral, quelle que soit la date de leur commission.
10. Pour dire que le harcèlement moral n'est pas établi et débouter la salariée de ses demandes à ce titre, l'arrêt retient que la salariée, qui a saisi le conseil de prud'hommes le 29 avril 2019, ne peut invoquer des faits antérieurs au 29 avril 2014, qui sont en effet couverts par la prescription, et que les éléments de fait postérieurs au 29 avril 2014, pris dans leur ensemble, ne permettent pas de présumer l'existence d'un harcèlement moral.
11. En statuant ainsi, alors qu'il n'était pas contesté que l'action de la salariée fondée sur le harcèlement n'était pas prescrite, la cour d'appel, à laquelle il appartenait d'analyser tous les éléments de fait invoqués par la salariée quelle que soit la date de leur commission, a violé les textes susvisés.
Et sur le deuxième moyen du pourvoi principal
Enoncé du moyen
12. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à ce qu'il soit jugé que son licenciement est nul en raison de la violation de sa liberté d'expression et de sa demande en réintégration ainsi que de sa demande de condamnation de la société à lui verser une certaine somme à titre d'indemnité pour licenciement nul, et de débouter la fédération de sa demande de condamnation de la société à lui payer une certaine somme en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession, alors :
« 1°/ que, sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression ; que le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l'exercice, par le salarié, de sa liberté d'expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement ; qu'en l'espèce, pour écarter la demande de la salariée tendant à faire valoir que son licenciement était nul pour avoir été fondé directement sur sa liberté d'expression, la cour d'appel a retenu que le licenciement n'était pas fondé uniquement sur l'envoi du courriel du 14 février 2018 ; qu'en se déterminant de la sorte alors que le motif de licenciement tiré de l'exercice de la liberté d'expression emportait à lui seul la nullité du licenciement, peu important l'existence d'autres griefs, la cour d'appel a violé l'article L. 1121-1 du code du travail, ensemble l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
2°/ que, sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression ; le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l'exercice, par le salarié, de sa liberté d'expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement ; que le licenciement d'un salarié fondé sur l'envoi d'un courriel rédigé sans termes injurieux, diffamatoires ou excessifs par celui-ci viole la liberté d'expression du salarié dont il jouit dans l'entreprise ; qu'en affirmant que la lettre de licenciement ne fait pas grief à la salariée d'avoir commis un abus de son droit d'expression mais bien d'une attitude d'insubordination, quand la lettre de licenciement reprochait à la salariée d'avoir adressé un mail à son responsable de service dans lequel elle contestait sa démarche et sa décision, l'accusant de "fait du prince", la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il résultait que la lettre de licenciement reprochait expressément à la salariée d'avoir fait usage de sa liberté d'expression, a violé l'article L. 1121-1 du code du travail, ensemble l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
3°/ que, sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression ; que le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l'exercice, par le salarié, de sa liberté d'expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement ; que le licenciement d'un salarié fondé sur l'envoi d'un courriel rédigé sans termes injurieux, diffamatoires ou excessifs par celui-ci viole la liberté d'expression du salarié dont il jouit dans l'entreprise ; qu'en écartant la nullité du licenciement, cependant qu'il résultait de ses constatations que le licenciement était, en partie, fondé sur un mail adressé par la salariée à son responsable de service dans lequel elle contestait sa démarche et sa décision, l'accusant de "fait du prince", la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il résultait que la lettre de licenciement reprochait expressément à la salariée d'avoir fait un usage non abusif de sa liberté d'expression, ce qui suffisait à emporter la nullité du licenciement, a violé l'article L. 1121-1 du code du travail, ensemble l'article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et L. 1121-1 du code du travail :
13. Sauf abus, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression.
14. Le caractère illicite du motif du licenciement prononcé, même en partie, en raison de l'exercice, par le salarié, de sa liberté d'expression, liberté fondamentale, entraîne à lui seul la nullité du licenciement.
15. Pour rejeter la demande en nullité du licenciement pour atteinte à la liberté d'expression, après avoir constaté que la lettre de licenciement énonçait notamment le grief suivant : « Le 14 février 2018, en réponse à une demande de votre responsable de service, [L] [G], de procéder à des activités de contrôle C2A, vous lui adressez un mail, aux propos inacceptables, dans lequel vous contestez sa démarche et sa décision et par voie de conséquence, sa responsabilité et son management. Dans votre mail, auquel vous avez souhaité donner une large publicité, puisque vous avez ajouté à la liste des destinataires votre collègue et les responsables hiérarchiques de votre manager, vous mettez en cause l'action de ce dernier en l'accusant de "fait du prince", et poursuivez en insinuant qu'il vous demande un travail inutile et stupide, et qu'il n'est pas au fait de votre travail », l'arrêt retient, d'une part, que le licenciement n'est pas fondé uniquement sur l'envoi du courriel du 14 février 2018, et, d'autre part, que la lettre de licenciement ne fait pas grief à la salariée d'avoir commis un abus de son droit d'expression mais bien d'une attitude d'insubordination qui est caractérisée par les pièces produites, le courriel du 14 février 2018 n'étant que le dernier fait d'insubordination relevé par l'employeur mais non le seul retenu dans la lettre de licenciement.
16. En statuant ainsi, sans caractériser l'existence, par l'emploi de termes injurieux, diffamatoires ou excessifs, d'un abus dans l'exercice de la liberté d'expression dont jouit tout salarié, alors qu'il résultait de ces constatations que la lettre de licenciement reprochait à la salariée la tenue de propos relevant de sa liberté d'expression, la cour d'appel a violé les textes susvisés.




Soc. 9 octobre 2024 n° 23-16.015

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
CH9


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Rejet

Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 996 F-D
Pourvoi n° G 23-16.015



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société Normandy Castel Villers, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 23-16.015 contre l'arrêt rendu le 27 avril 2023 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant à M. [D] [V], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Redon, conseiller référendaire, les observations de Me Soltner, avocat de la société Normandy Castel Villers, de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. [V], après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Redon, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, Mme Grivel, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Rouen, 27 avril 2023), rendu sur renvoi après cassation (Soc., 21 septembre 2022, pourvoi n° 21-14-481) M. [V] a été engagé par la société Vouillon, devenue la société Normandy Castel Villers, en qualité de responsable d'agence à compter du 1er avril 2015.
2. Convoqué le 5 décembre 2017 à un entretien préalable fixé au 18 décembre et mis à pied à titre conservatoire, il a été licencié pour faute grave le 15 janvier 2018.
3. Contestant son licenciement et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits, le salarié a saisi la juridiction prud'homale.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur deuxième moyen
Enoncé du moyen
5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement du salarié est dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner en conséquence à lui payer diverses sommes, alors :
« 1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; qu'en l'espèce, pour dire que le grief reproché au salarié n'était pas établi et que l'employeur ne pouvait pas, dans le cadre de la procédure prud'homale, reprocher au salarié de ne pas avoir sollicité des acquéreurs concernés le versement du dépôt de garantie ou de ne pas s'être assuré de la réalité de leurs virements dans la mesure où les termes explicites et clairs de la lettre de licenciement n'énoncent pas de tels manquements, la cour d'appel a retenu qu'''aux termes de la lettre de licenciement, il est reproché au salarié d'avoir demandé à la comptable de la société d'effectuer du compte séquestre de la société des virements, correspondant ''aux dépôts de garantie'', dans les ventes ci-dessus précisées, alors que ''ces ventes ne prévoyaient aucun dépôt de garantie'' et constaté qu'il résultait pourtant de l'examen des actes de vente sous conditions suspensives concernées qu'il était bien stipulé, pour chacune d'entre elles, le versement d'un acompte par l'acquéreur ; qu'il apparaissait cependant à la lecture des termes clairs et précis de la lettre de licenciement que s'il était bien reproché au salarié d'avoir procédé, dans le cadre de la vente Perrot-Grollin, ''au virement d'un dépôt de garantie dans une vente qui n'en prévoyait aucun'', il lui était reproché, s'agissant des ventes Slakmon-Rioult et Sarfati d'avoir ''donné des ordres de virement pour des ventes ne donnant pas lieu à dépôt de garantie'' ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de la lettre de licenciement en violation du principe susvisé ;
2°/ le juge doit rechercher si les faits reprochés au salarié, à défaut de caractériser une faute grave, ne constituent pas néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement ; qu'outre l'hypothèse où le licenciement est fondé sur une insuffisance professionnelle, la cause réelle et sérieuse ne nécessite pas que les faits reprochés au salarié présentent un ''caractère délibéré et volontaire'' ; qu'en l'espèce, il soutenait dans ses conclusions que les faits reprochés au salarié ne pouvaient pas révéler une simple insuffisance professionnelle et la cour d'appel n'a pas retenu que les faits qui lui étaient reprochés étaient constitutifs d'une insuffisance professionnelle ; qu'en jugeant pourtant qu'il n'était pas démontré que les faits reprochés au salarié aient eu un caractère délibéré, cependant que l'employeur avait seulement à démontrer que les faits reprochés au salarié, que ceux-ci aient présentés ou non un caractère délibéré ou volontaire, étaient suffisamment fautifs pour constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
3°/ qu'il appartient au juge d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur à l'appui d'un licenciement ; qu'en l'espèce, il exposait qu'il n'était pas sérieux de soutenir que le salarié n'avait commis aucune faute au motif qu'il n'aurait pas eu accès au compte séquestre puisqu'en raison des fonctions de responsable d'agence qu'il exerçait et de sa grande expérience professionnelle, il avait pour mission de suivre l'intégralité des processus de vente et de gérer administrativement l'agence dont il était chargé ; qu'elle exposait encore que le maniement de fonds revêt une importance capitale pour une agence immobilière et nécessite une vigilance accrue, d'autant plus de la part d'un responsable d'agence, puisque l'utilisation de fonds versés par un client pour une autre vente génère un risque de responsabilité déontologique, civile et pénale outre un risque réputationnel évident ; qu'en l'espèce, pour juger que les faits reprochés au salarié n'étaient pas fautifs, la cour d'appel s'est bornée à relever qu'il n'avait pas accès au compte séquestre et que dans ces conditions il n'avait pas pu procéder à aucune vérification utile et que l'employeur n'établissait pas l'existence ou le contenu du ''dossier'' visé à la lettre de licenciement dans lequel le salarié aurait pu vérifier la réalisation d'un précédent virement ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si eu égard à son expérience, ses responsabilités et les risques qu'ils faisaient peser sur l'entreprise, les faits reprochés au salarié ne revêtaient pas un caractère fautif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
6. D'abord, il résulte de l'article L. 1232-6 du code du travail que si la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié et les conséquences que l'employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, il appartient au juge de qualifier les faits invoqués.
7. Ensuite, si l'insuffisance professionnelle ne revêt pas, en principe, un caractère fautif, il en va autrement lorsque cette insuffisance résulte d'une abstention volontaire ou d'une mauvaise volonté délibérée du salarié.
8. La cour d'appel, après avoir relevé que l'employeur, aux termes de la lettre de licenciement, reprochait au salarié des opérations qu'il qualifiait d'erreurs, faisant ressortir qu'il s'agissait d'un licenciement pour insuffisance professionnelle, a retenu que ces erreurs imputées au salarié, dont certaines n'étaient pas établies, en l'absence d'une abstention volontaire ou d'une mauvaise volonté délibérée de l'intéressé, ne revêtaient aucun caractère fautif.
9. De ces constatations et énonciations, elle a exactement déduit, sans dénaturer la lettre de licenciement et sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que les griefs invoqués ne pouvaient justifier un licenciement disciplinaire.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 22-22.474

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 537 F-D
Pourvoi n° G 22-22.474

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
M. [H] [C], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 22-22.474 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2022 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 2e section), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société BNP Paribas Personal Finance, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1],
2°/ à M. [G] [B], domicilié [Adresse 3], pris en qualité de mandataire liquidateur de la société E.C.LOG,
défendeurs à la cassation.
La société BNP Paribas Personal Finance a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Tréard, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [C], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société BNP Paribas Personal Finance, après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Tréard, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement du pourvoi incident
1. Il est donné acte à la société BNP Paribas Personal Finance du désistement de son pourvoi incident.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué et les productions (Versailles, 6 septembre 2022) le 1er novembre 2016, par contrat conclu hors établissement, M. [C] (l'emprunteur) a commandé auprès de Ia société E.C.LOG, exerçant sous l'enseigne « Air Eco Logis » (le vendeur) douze panneaux photovoltaïques et un ballon thermodynamique, dont le prix a été financé par un crédit souscrit le même jour auprès de la société BNP Paribas Personal Finance (la banque).
3. A la suite de sa défaillance dans le règlement des échéances du crédit, la banque a assigné l'emprunteur en paiement.
4. Le vendeur ayant été placé en liquidation judiciaire par jugement du 24 juin 2020, l'emprunteur a assigné en intervention forcée le mandataire liquidateur de ce dernier et demandé, notamment, la nullité du contrat principal et par voie de conséquence celle du crédit affecté, ainsi que la déchéance de la banque de son droit aux intérêts contractuels et la restitution des sommes versées en remboursement du contrat de crédit.
Examen des moyens
Sur le second moyen
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. L'emprunteur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la banque une somme de 18 837,10 euros, alors « que le prêteur qui commet une faute lors de la libération des fonds, ne peut prétendre au remboursement du capital prêté, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute ; qu'en condamnant l'emprunteur à rembourser à la banque une somme représentant le montant du capital emprunté, après avoir constaté que la banque avait commis une première faute en ne vérifiant pas la régularité du bon de commande et une seconde faute en procédant au déblocage des fonds suite à la production d'une attestation qui ne permettait pas à la banque de se convaincre de l'exécution complète de l'intégralité des prestations stipulées au contrat principal de vente, au motif qu'il n'était pas démontré que le raccordement tardif de l'installation serait en lien avec la faute commise par la banque qui n'était pas en charge des démarches administratives ni du raccordement de l'installation, après avoir constaté que la banque avait commis une faute en procédant au déblocage des fonds suite à la production d'une attestation qui ne lui permettait pas de se convaincre de l'exécution complète de l'intégralité des prestations stipulées au contrat principal de vente, au nombre desquelles figurait l'obligation de procéder aux démarches administratives et de raccorder l'installation et cependant qu'il était constant que la mise en liquidation judiciaire de la société E.C LOG empêcherait l'emprunteur de récupérer le prix de vente de son installation, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1147 du code civil, devenu 1231-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 312-48, L. 312-55 du code de la consommation et 1231-1 du code civil :
7. Il résulte de ces textes que la résolution ou l'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, emporte pour l'emprunteur l'obligation de restituer au prêteur le capital prêté.
8. Cependant la banque qui commet une faute peut être privée en tout ou partie de sa créance de restitution, dès lors que l'emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
9. Lorsque la restitution du prix à laquelle le vendeur est condamné, par suite de l'annulation du contrat de vente ou de prestation de service, est devenue impossible du fait de l'insolvabilité du vendeur ou du prestataire, l'emprunteur, privé de la contrepartie de la restitution du bien vendu, justifie d'une perte subie équivalente au montant du crédit souscrit pour le financement du prix du contrat de vente ou de prestation de service annulé en lien de causalité avec la faute de la banque qui, avant de verser au vendeur le capital emprunté, n'a pas vérifié la régularité formelle du contrat principal ou sa complète exécution.
10. Pour condamner les emprunteurs, à la suite de l'annulation de la vente et du contrat de crédit affecté, à restituer à la banque le capital prêté après déduction des sommes déjà versées, l'arrêt retient qu'en ne vérifiant pas la régularité du bon de commande et en procédant à un déblocage prématuré des fonds sans vérifier la complète exécution du contrat principal, la banque a commis des fautes, mais que l'emprunteur ne caractérise pas un préjudice en lien causal avec ces fautes dès lors que l'installation fonctionne et que la liquidation sans poursuite d'activité rend illusoire la récupération de l'installation, de sorte que l'emprunteur pourra continuer à jouir des fruits procurés par les panneaux, même s'il ne pourra effectivement récupérer le prix de sa commande.
11. En statuant ainsi, alors que le préjudice de l'emprunteur consistant à ne pas pouvoir obtenir, auprès d'un vendeur placé en liquidation judiciaire, la restitution du prix de vente d'un matériel dont il n'est plus propriétaire, n'aurait pas été subi sans les fautes de la banque, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
12. La cassation prononcée n'emporte pas celle des chefs de dispositif de l'arrêt faisant masse des dépens qu'il partage par moitié entre l'emprunteur et la banque, et rejetant les demandes faites en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par les dispositions de l'arrêt non remises en cause.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 23-16.301

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
MY1


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 549 F-D
Pourvoi n° U 23-16.301

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° U 23-16.301 contre l'arrêt rendu le 2 mars 2023 par la cour d'appel de Limoges (chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société France eco Energy, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à M. [J] [Y], domicilié [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 2 mars 2023), le 19 novembre 2018, par contrat conclu hors établissement, M. [Y] (l'emprunteur) a commandé auprès de la société France eco Energy (le vendeur) la fourniture et l'installation d'une centrale photovoltaïque et d'un chauffe-eau thermodynamique, dont le prix a été financé par un crédit souscrit le même jour auprès de la société Projexio, aux droits de laquelle se trouve la société Cofidis (la banque).
2. Invoquant des irrégularités du bon de commande, l'emprunteur a assigné le vendeur et la banque en annulation du contrat principal et du crédit affecté.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
3. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à rembourser à l'emprunteur le montant total des échéances du prêt et de rejeter sa demande en remboursement du capital emprunté, alors « que l'annulation ou la résolution du contrat de vente ou de prestation de services emporte celle du contrat de crédit accessoire et que l'emprunteur est alors tenu de restituer le capital emprunté, sauf si l'emprunteur établit l'existence d'une faute du prêteur et d'un préjudice consécutif à cette faute ; qu'en se déterminant par la considération manifestement inopérante qu' en tout état de cause, l'emprunteur n'a jamais été destinataire des fonds empruntés, directement entre les mains du vendeur, et s'il a été livré de l'installation, il doit la tenir à disposition de ce dernier", la cour d'appel n'a pas caractérisé le préjudice subi par l'emprunteur consécutif à la faute commise par la banque, la restitution de l'installation étant la seule conséquence de l'annulation du contrat principal en raison de l'irrégularité formelle du bon de commande imputable au fournisseur, la cour d'appel a violé les articles L. 312-54 du code de la consommation et 1231-1 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 312-55 du code de la consommation et 1231-1 du code civil :
4. En cas de résolution ou d'annulation d'un contrat de crédit affecté, en conséquence de celle du contrat constatant la vente ou la prestation de services qu'il finance, la faute du prêteur qui a versé les fonds sans s'être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, ne dispense l'emprunteur de restituer le capital emprunté que si celui-ci justifie avoir subi un préjudice en lien avec cette faute.
5. Pour condamner la banque à rembourser à l'emprunteur le montant total des échéances du prêt et rejeter sa demande en remboursement du capital emprunté, l'arrêt retient que le manquement de la banque à son obligation de vérifier la régularité du bon de commande avant de verser les fonds est à l'origine d'un préjudice pour l'emprunteur dès lors que celui-ci n'a pas pu mettre un terme à l'opération, qu'il n'a jamais été destinataire du capital du prêt, directement versé entre les mains du vendeur, et que s'il a été livré de l'installation photovoltaïque, il doit la tenir à disposition de ce vendeur.
6. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser le préjudice en lien causal avec la faute de la banque lors de la délivrance des fonds, la cour d'appel a violé les textes susvisés.
Sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche
Enoncé du moyen
7. La banque fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement formée contre le vendeur, alors « qu'en affirmant que la banque fournissait au vendeur un imprimé modèle bon de commande, quand il résultait clairement de l'article 3 de la convention de crédit vendeur signée le 10 mars 2017 entre le vendeur et la banque que celle-ci fournissait à son partenaire les seuls formulaires de documents précontractuels et contractuels de crédit, la cour d'appel a dénaturé ladite stipulation et violé l'article 1192 du code civil. »
Réponse de la Cour
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis :
8. Pour rejeter le recours formé par la banque à l'encontre du vendeur, l'arrêt retient que la banque a fourni au vendeur un imprimé modèle de bon de commande insuffisamment précis pour permettre un descriptif des caractéristiques essentielles des biens achetés répondant aux prescriptions légales.
9. En statuant ainsi, alors qu'il résulte de l'article 3 de la convention signée le 10 mars 2017 entre le vendeur et la banque que celle-ci s'engageait à fournir à son partenaire les seuls formulaires de documents précontractuels et contractuels relatifs au contrat de crédit, la cour d'appel a violé le principe susvisé.
Et sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
10. La banque fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement d'une certaine somme formée contre le vendeur, alors « que, dans ses conclusions d'appel, la société Cofidis faisait valoir qu'en vertu de l'article 6 de la convention crédit vendeur conclue avec la société France eco Energy Le vendeur est responsable à l'égard de Cofidis de la bonne exécution des obligations mises à sa charge lors de l'accord de crédit et plus généralement au titre de la présente convention. Il assume les conséquences financières qui pourraient découler du non-respect de ses obligations par lui et par ses préposés et supportera toute perte pouvant en résulter pour les établissements de crédit, en capital, intérêts et frais", et qu'en conséquence, elle était fondée à solliciter le remboursement des fonds qu'elle a transmis à la société venderesse mais également l'allocation d'une somme équivalente aux intérêts qu'elle aurait perçus si le contrat de crédit s'était poursuivi jusqu'à son terme" ; qu'en ne répondant pas à ce moyen péremptoire, tiré d'un recours contractuel de la banque contre le vendeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 455 du code de procédure civile :
11. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.
12. Pour rejeter le recours formé par la banque à l'encontre du vendeur, l'arrêt retient qu'en fournissant au vendeur, qui n'est pas un professionnel du droit, un imprimé modèle de bon de commande insuffisamment précis pour permettre un descriptif des caractéristiques essentielles des biens achetés répondant aux prescriptions légales et en manquant à son obligation de vérification du bon de commande avant de procéder à la libération des fonds alors qu'elle dispose d'un service juridique spécialisé, la banque a commis des fautes qui sont à l'origine exclusive de son propre préjudice.
13. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la banque qui invoquait l'exécution d'une convention conclue avec le vendeur, stipulant que celui-ci était responsable de la bonne exécution des obligations mises à sa charge lors de l'accord de crédit, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.




Civ.1 9 octobre 2024 n° 23-16.950

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
CIV. 1
SA9


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation

Mme CHAMPALAUNE, président


Arrêt n° 533 F-D
Pourvoi n° Z 23-16.950



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 OCTOBRE 2024
M. [F] [D], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 23-16.950 contre l'arrêt rendu le 15 mars 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 2-2), dans le litige l'opposant au procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, domicilié en son parquet général cour d'Appel rue Peyresc, 13100 Aix-en-Provence, défendeur à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Ancel, conseiller, les observations de la SCP Guérin-Gougeon, avocat de M. [D], après débats en l'audience publique du 9 juillet 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Ancel, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 mars 2022), M. [F] [D], se disant né le 11 août 1991 à El Biar (Algérie) a introduit une action déclaratoire de nationalité.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deuxième et cinquième branches
2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le moyen, pris en ses première et troisième branches
Enoncé du moyen
3. M. [F] [D] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande tendant à voir dire et juger qu'il est de nationalité française par filiation paternelle, constater son extranéité et dire n'y avoir lieu d'ordonner la mention prévue à l'article 28 du code civil, alors :
« 1°/ que les Français de statut civil de droit commun domiciliés en Algérie à la date de l'annonce officielle des résultats du scrutin d'autodétermination conservent la nationalité française quelle que soit leur situation au regard de la nationalité algérienne ; que l'acquisition du statut civil de droit commun peut résulter d'un décret d'admission ou d'un jugement pris en application du sénatus consulte du 14 juillet 1865 et des lois des 4 février 1919 et 18 août 1929 ; que ce statut se transmet par filiation ; qu'en retenant, pour écarter la nationalité française de M. [F] [D] par filiation paternelle, qu'il n'était pas démontré que son père, M. [L] [D], aurait conservé la nationalité française de plein droit au moment de l'accession à l'indépendance de l'Algérie comme bénéficiant du statut civil de droit commun, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. [L] [D] ne s'était pas vu transmettre ce statut par filiation paternelle et maternelle, son père l'ayant acquis en vertu d'un décret n° 25289X40 du 24 mai 1942 et sa mère se l'étant vu transmettre par filiation paternelle, son propre père l'ayant acquis en vertu d'un jugement du tribunal civil de première instance de Bejaia du 4 septembre 1925, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 30 et 32-1 du code civil ;
3°/ en tout état de cause que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en retenant, pour écarter la nationalité française de M. [F] [D] par filiation paternelle, qu'il n'était pas démontré que son père, M. [L] [D], aurait conservé la nationalité française de plein droit au moment de l'accession à l'indépendance de l'Algérie comme bénéficiant du statut civil de droit commun, sans examiner le jugement du tribunal civil de première instance de Bejaia du 4 septembre 1925 ayant admis au statut civil de droit commun M. [Y] [E] (pièce n° 21), statut que celui-ci a transmis à sa fille, Mme [K] [E] (pièce n° 19), qui l'a elle même transmis à son fils, M. [L] [D], la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu les articles 32-1 du code civil et 455 du code de procédure civile :
4. Aux termes du premier texte, les Français de statut civil de droit commun domiciliés en Algérie à la date de l'annonce officielle des résultats du scrutin d'autodétermination conservent la nationalité française quelle que soit leur situation au regard de la nationalité algérienne.
5. Selon le second texte, tout jugement doit être motivé.
6. Pour constater l'extranéité de M. [F] [D], l'arrêt retient qu'il ne rapporte pas la preuve de la nationalité française de son père, M. [L] [D], dès lors qu'il n'est pas démontré que ce dernier aurait conservé la nationalité française de plein droit au moment de l'accession à l'indépendance de l'Algérie comme bénéficiant du statut civil de droit commun et que le certificat de nationalité française délivré en sa faveur n'est pas suffisant à établir sa nationalité française, puisque ce document n'est pas un titre de nationalité française au contraire d'un décret de naturalisation ou d'une déclaration mais seulement une attestation pouvant être contestée.
7. En statuant ainsi, sans viser ni analyser, même sommairement, le jugement du tribunal civil de première instance de Bejaia du 4 septembre 1925 dont M. [F] [D] se prévalait pour attester du statut civil de droit commun de sa grand-mère, [K] [E] comme étant la fille de [Y] [E] ayant obtenu ce statut par ce jugement, la cour d'appel a violé le premier texte susvisé et n'a pas satisfait aux exigences du second.




Soc. 9 octobre 2024 n° 22-20.054

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
SOC.
JL10


COUR DE CASSATION ______________________

Audience publique du 9 octobre 2024



Cassation partielle sans renvoi

Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président


Arrêt n° 992 F-D
Pourvoi n° C 22-20.054




R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 OCTOBRE 2024
La société Arcade nettoyage, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° C 22-20.054 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2022 par la cour d'appel de Versailles (21e chambre), dans le litige l'opposant à Mme [S] [D], épouse [E] [F], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Carillon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de la société Arcade nettoyage, après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Carillon, conseiller référendaire rapporteur, M. Pietton, conseiller, Mme Grivel, avocat général, et Mme Dumont, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 9 juin 2022), Mme [E] [F] a été engagée en qualité de chef d'équipe le 8 juillet 2011 par la société Aspirotechnique, aux droits de laquelle vient la société Arcade nettoyage (la société) dont elle était la filiale.
2. Convoquée le 22 février 2017 à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire, la salariée a fait l'objet le 5 avril 2017 d'une mutation disciplinaire sur un autre site. La salariée ayant contesté les manquements invoqués et refusé sa nouvelle affectation, la société a maintenu la mutation disciplinaire par lettre du 20 avril 2017.
3. Convoquée le 2 mai 2017 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 12 mai suivant, avec mise à pied conservatoire, elle a été licenciée le 6 juin 2017 pour faute grave.
4. La salariée a saisi la juridiction prud'homale en annulation de la mutation disciplinaire, pour contester son licenciement et obtenir paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'annuler la mutation disciplinaire
Enoncé du moyen
5. La société fait grief à l'arrêt de dire nulle la mutation disciplinaire notifiée le 5 avril 2017, alors « qu'une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur de l'entreprise ; qu'en cas d'inopposabilité du règlement intérieur au salarié, à défaut pour l'employeur d'avoir accompli les formalités de publicité, il appartient au juge de rechercher si la sanction prononcée demeure justifiée au regard des dispositions du code du travail ou de la convention collective applicable à la relation de travail ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire nulle la mutation disciplinaire de la salariée que l'employeur ne justifiant pas des formalités de publicité du règlement intérieur de l'entreprise, la sanction de mutation disciplinaire édictée par ce règlement intérieur ne pouvait être prononcée à l'encontre de la salariée et devait être annulée, sans rechercher si le prononcé de cette sanction demeurait possible en application des dispositions du code du travail ou de la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1331-1 du code du travail. »
Réponse de la Cour
6. Une sanction disciplinaire autre que le licenciement ne peut être prononcée contre un salarié par un employeur employant habituellement au moins vingt salariés que si elle est prévue par le règlement intérieur prescrit par l'article L. 1311-2 du code du travail.
7. La cour d'appel, qui a constaté que l'employeur ne justifiait pas des formalités de publicité du règlement intérieur de l'entreprise, en a exactement déduit, sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que la mutation disciplinaire prononcée à l'encontre de la salariée devait être annulée.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
9. La société fait grief à l'arrêt de juger que le licenciement pour faute grave de la salariée était dépourvu de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, de la condamner à lui payer diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de rappel de salaire et des congés payés afférents, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, alors :
« 1°/ que la cassation s'étend à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; que la cassation, à intervenir sur le premier moyen de cassation, du chef de dispositif de l'arrêt attaqué ayant déclaré nulle la mutation disciplinaire notifiée à la salariée le 5 avril 2017, entraînera par voie de conséquence l'annulation du chef du dispositif de l'arrêt ayant décidé qu'en raison de l'annulation de cette sanction, son licenciement pour faute grave, pour avoir refusé d'exécuter cette sanction disciplinaire, était dépourvu de cause réelle et sérieuse, et ce en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°/ que commet une faute de nature à justifier son licenciement, le salarié qui refuse d'exécuter une sanction disciplinaire sans avoir préalablement soumis à l'appréciation du contrôle judiciaire le bien-fondé de cette sanction ; qu'en décidant néanmoins que le licenciement pour faute grave de la salariée était dépourvu de cause réelle et sérieuse, motif pris que la mutation disciplinaire prise à son encontre étant nulle et de nul effet, le non-respect de cette sanction par la salariée était dénué de caractère fautif, bien que le refus d'exécution de cette sanction disciplinaire par la salariée, qui ne l'avait pas contestée par voie judiciaire, ait été fautif, de sorte qu'il lui appartenait de rechercher s'il était de nature à justifier son licenciement, la cour d'appel, qui a refusé de se prononcer en ce sens, a violé les articles L. 1232-1, L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-9, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 24 septembre 2017, L. 1235-1, L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail. »
Réponse de la Cour
10. D'abord, le rejet du premier moyen en sa première branche rend sans portée la demande de cassation par voie de conséquence.
11. Ensuite, la cour d'appel a constaté que le licenciement de la salariée était motivé, d'une part, par son refus de se soumettre à la mutation disciplinaire, laquelle était nulle, de sorte que son refus de l'exécuter et son refus de quitter le site où elle était affectée n'étaient pas fautifs, d'autre part, par des faits de soustraction d'un passe d'accès dans le coffre de l'hôtel, lesquels n'étaient pas établis, et le contrôle des chambres, lequel s'inscrivait dans l'exécution de ses fonctions habituelles et n'était donc pas répréhensible.
12. En l'état de ces constatations, peu important que la salariée n'ait pas préalablement saisi le juge prud'homal pour contester sa mutation disciplinaire, elle a décidé, dans l'exercice des pouvoirs qu'elle tient de l'article 1235-1 du code du travail, que les griefs ne pouvaient constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.
13. Le moyen n'est donc pas fondé.
Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de condamner la société à payer une somme à titre de dommages-intérêts en conséquence de la mutation disciplinaire nulle
Enoncé du moyen
14. La société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la salariée une somme à titre de dommages-intérêts en conséquence de la nullité de la mutation disciplinaire, alors « que le juge ne peut méconnaître les limites du litige, telles qu'elles résultent des conclusions respectives des parties ; que dans ses conclusions d'appel, la salariée ne formulait aucune demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle aurait subi du fait de sa mutation disciplinaire, qu'elle jugeait irrégulière ; qu'en condamnant néanmoins la société, après avoir annulé cette sanction, à payer à la salariée la somme de 750 euros en réparation de son préjudice, la cour d'appel a méconnu les limites du litiges, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 4 du code de procédure civile :
15. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.
16. Pour condamner la société au paiement d'une somme au titre de la sanction nulle, l'arrêt retient que le préjudice subi par la salariée résultant de cette sanction irrégulière sera réparé par l'octroi de la somme de 750 euros à titre de dommages-intérêts.
17. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, la salariée se bornait à demander la nullité de la mutation disciplinaire sans solliciter l'indemnisation du préjudice en résultant, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé.
Portée et conséquences de la cassation
18. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
19. La cassation prononcée sur le premier moyen, pris en sa première branche n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond.




Crim. 9 octobre 2024 n° 24-81.577

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° S 24-81.577 F-D
N° 01218

ODVS 9 OCTOBRE 2024

CASSATION

M. BONNAL président,







R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 9 OCTOBRE 2024


M. [T] [K] a formé un pourvoi contre I'arrêt de la cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, en date du 12 février 2024, qui, pour violences aggravées en récidive et infraction à la législation sur les stupéfiants, l'a condamné à un an d'emprisonnement.
Un mémoire personnel et des observations complémentaires ont été produits.
Sur le rapport de Mme Diop-Simon, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Bougy, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 septembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Diop-Simon, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure
1. Il résulte de I'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [T] [K] a été poursuivi des chefs de violences par conjoint en récidive, menaces, menaces aggravées, tentative de dégradation par moyen dangereux et détention de stupéfiants, devant le tribunal correctionnel qui, par jugement du 26 avril 2023, l'a relaxé de l'ensemble des chefs exceptés ceux de détention de stupéfiants pour lesquels il l'a condamné à six mois d'emprisonnement et deux ans d'interdiction de paraître sur le département de la Seine-Maritime.
3. Le prévenu et le ministère public ont relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
4. Le moyen critique I'arrêt attaqué en ce qu'il a constaté le refus de M. [K] d'être extrait pour comparaître à l'audience alors qu'il avait sollicité le report de l'affaire et qu'il était positif au Covid-19 le jour de l'examen de celle-ci.
Réponse de la Cour
Vu les articles 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme et 593 du code de procédure pénale :
5. Il se déduit de ces textes que les juges ne peuvent refuser le renvoi d'une affaire sans motiver leur décision.
6. Il résulte des pièces de procédure, soumises au contrôle de la Cour de cassation, que le prévenu avait, par un courrier adressé à la cour d'appel, le 27 décembre 2023, et reçu par la juridiction, le 2 janvier 2024, sollicité le renvoi de l'affaire, pour laquelle il devait être jugé le 8 janvier, en indiquant qu'il souhaitait prendre un avocat pour faire valoir ses droits.
7. En procédant au jugement de l'affaire sans répondre à cette demande de renvoi, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé.
8. La cassation est par conséquent encourue.




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